Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Qualification d'un poste de poste de direction ou de confiance en vertu de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - Premier palier de la procédure des griefs - Proportion du temps consacrée au traitement de griefs - l'employeur a désigné le titulaire d'un poste pour traiter officiellement des griefs présentés au premier palier de la procédure des griefs par les fonctionnaires relevant directement de lui - l'employeur a ensuite qualifié ce poste de poste de direction ou de confiance en vertu de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - l'agent négociateur s'est objecté à cette qualification parce que le titulaire du poste ne consacre pas une proportion notable de son temps au traitement de griefs - l'agent négociateur allègue que les amendements de 1993 à la Loi font en sorte que, pour qu'un poste puisse être qualifié de poste de direction ou de confiance parce que son titulaire doit traiter de griefs à l'intérieur de la procédure des griefs, le titulaire de ce poste doit y consacrer une proportion notable de son temps - en l'espèce, la description des fonctions du poste précise que son titulaire consacre 15 % de son temps à l'ensemble de ses attributions de gestion des ressources humaines - la Commission a conclu que l'interprétation de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi avancée par l'agent négociateur est contraire à l'intention du législateur et aurait pour effet de créer de l'incertitude dans le processus de qualification, faisant en sorte que les mêmes postes pourraient ou non être qualifiés de postes de direction ou de confiance, tout dépendant des fluctuations dans le volume des griefs dont leurs titulaires doivent traiter. Qualification confirmée.

Contenu de la décision

Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ENTRE LE CONSEIL DU TRÉSOR (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada)

employeur et L'INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA agent négociateur

AFFAIRE : Qualification d'un poste de direction ou de confiance après l'accréditation du Groupe Gestion des systèmes d'ordinateurs

Devant : Yvon Tarte, président Pour l’employeur : J. Raymond Dionne Pour l’agent négociateur : Luc Quesnel (Affaire décidée sans audience)

Dossier : 172-2-1115 Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 1 DÉCISION Robert Jobin occupe, sur une base intérimaire, le poste 230-2084 A (CS-02), Gestionnaire de site, Division des services techniques, Direction régionale des services gouvernementaux de télécommunication et d'informatique (SGTI), Bureau régional du Québec, Direction générale des SGTI, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) (le « poste »). Le 10 juillet 1996, l'employeur lui écrit qu'il est « [...] désigné à titre de responsable de palier (premier) de la procédure de règlement des griefs et [qu'il est] autorisé à répondre, au nom de l'employeur, à tout grief présenté officiellement à ce palier par un employé qui relève directement de [lui]. »

Le 10 novembre 1997, conformément au paragraphe 5.2(2) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, l'employeur notifie la Commission des relations de travail dans la fonction publique et l'agent négociateur qu'il a qualifié le poste de « poste de préposé à la gestion ou à des fonctions confidentielles », en vertu de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi, parce que Robert Jobin « a la responsabilité de traiter, au nom de l'employeur, des griefs au 1er palier ».

Le 1 er décembre 1997, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada se prévaut du paragraphe 5.2(3) de la Loi pour s'opposer à la qualification du poste de poste de direction ou de confiance, parce que Robert Jobin n'a pas à s'occuper du traitement de griefs dans une proportion notable.

Le 19 mai 1998, les parties demandent à la Commission de leur permettre de présenter leurs preuves et arguments par écrit, au lieu d'appeler une audience pour entendre l'affaire. Le 20 mai 1998, la Commission acquiesce à leur demande.

Les dispositions pertinentes de la Loi se lisent comme suit : DÉFINITIONS 2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi. [...] « fonctionnaire » Personne employée dans la fonction publique [...] mais à l’exclusion des personnes :

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Décision Page 2 [...] j) occupant un poste de direction ou de confiance; [...] [...] « poste de direction ou de confiance » [...] g) poste ainsi qualifié en application des articles 5.1 ou 5.2 et dont la qualification n’a pas été annulée en application de l’article 5.3.

[...] CHAMP D’APPLICATION [...] Postes de direction ou de confiance 5.1 (1) La Commission, à l’occasion d’une demande d’accréditation d’agent négociateur présentée par une organisation syndicale, qualifie de postes de direction ou de confiance ceux qui sont visés par la demande et répondent, à son avis, à l’un ou l’autre des critères suivants :

[...] b) leurs occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions de gestion à l’égard de fonctionnaires ou des attributions les amenant à s’occuper officiellement, pour le compte de l’employeur, de griefs présentés selon la procédure établie en application de la présente loi;

[...] [...] 5.2 (1) Une fois l’agent négociateur accrédité avant ou après l’entrée en vigueur du présent article —, l’employeur peut qualifier, selon les modalités réglementaires, de postes de direction ou de confiance ceux visés au paragraphe 5.1(1) et occupés par des fonctionnaires de l’unité de négociation en question; à cette fin, l’avis mentionné à l’alinéa 5.1(1)d) vaut avis de l’employeur.

(2) L’employeur notifie sa décision de qualifier un poste à la Commission et à l’agent négociateur.

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Décision Page 3 (3) L’agent négociateur peut, dans les vingt jours suivant cette notification, déposer auprès de la Commission un avis d’opposition à la qualification.

(4) La Commission, après avoir étudié l’avis d’opposition et donné à l’employeur et à l’agent négociateur l’occasion de présenter des observations, confirme ou annule la qualification.

[...] [...] PARTIE IV GRIEFS [...] Règlements concernant les griefs [...] 100. (4) Pour l’application des dispositions de la présente loi concernant les griefs, l’employeur désigne les personnes dont la décision en cette matière constitue un palier de la procédure applicable, y compris le dernier. En cas de doute, il communique par écrit les noms de ces personnes à quiconque voulant déposer un grief, ou à la Commission.

La disposition pertinente de la convention collective se lit comme suit : ARTICLE 33 PROCÉDURE DE RÈGLEMENT DES GRIEFS [...] 33.06 La procédure de règlement des griefs comprend quatre (4) paliers au maximum. Ces paliers sont les suivants :

a) Palier 1 - premier niveau de direction; [...] [...]

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Décision Page 4 FAITS Les faits pertinents à la présente affaire sont simples et ne sont pas contestés. Le poste est situé à Québec et Robert Jobin se rapporte à la directrice régionale des SGTI, Bureau régional du Québec, Direction générale des SGTI, TPSGC, elle-même située à Montréal.

La description des fonctions du poste, soumise par l'employeur au soutien de la qualification du poste de poste de direction ou de confiance, indique que Robert Jobin doit « [a]ssurer la supervision et l'encadrement des employés informatiques [sic] dans les secteurs de support aux usagers, l'exploitation des systèmes, le réseau de communication » et que, pour ce faire, il consacre 15% de son temps à « [gérer], contrôle[r] et effectue[r] les suivis des budgets qui lui sont alloués et supervise[r] les techniciens des services informatiques. » Aucune autre attribution de gestion de ressources humaines n'est prévue dans ce document. Robert Jobin supervise huit employés, pour lesquels il constitue le premier niveau de gestion.

Le 10 juillet 1996, l'employeur avise Robert Jobin qu'il l'a désigné pour traiter, au premier palier de la procédure des griefs, des griefs présentés par ses subalternes. Depuis cette date, Robert Jobin n'a eu à s'occuper d'aucun grief.

PLAIDOIRIE DE L'EMPLOYEUR L'employeur a présenté sa plaidoirie écrite le 29 mai 1998. Elle se lit ainsi : En novembre dernier, l’employeur soumettait aux fins d’exclusion de l’unité de négociation du groupe CS, le poste #2302084A, Gestionnaire de site, Services techniques, CS-2. M. R. Jobin occupe ce poste depuis le 10 juin 1996. Le 1 er décembre 1997, l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) s’objectait à cette proposition d’exclusion sous la seconde partie de l’alinéa 5.1(1)b) de la définition de poste de direction ou de confiance qui se lit comme suit :

« leurs occupants exercent des attributions les amenant à s’occuper officiellement, pour le compte de l’employeur, de griefs présentés selon la procédure établie en application de la présente loi. »

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Décision Page 5 Hiérarchiquement, Monsieur Jobin se rapporte à la directrice régionale, services informatiques, Mme Crevier-Leclerc, EX-1, qui, à son tour, se rapporte au directeur général régional pour la région du Québec, M. Crête, EX-3. Madame Crevier et Monsieur Crête sont tous deux localisés à Montréal alors que M. Jobin est physiquement situé à Québec d’où il dirige le bureau des services techniques des Services gouvernementaux Canada, région du Québec.

À titre de gestionnaire de site, Monsieur Jobin gère et supervise le travail de 8 employés dont cinq sont indéterminés et trois temporaires nommés pour une durée de plus de six mois. En plus, il doit (1) assurer l’orientation fonctionnelle des membres de son équipe concernant la coordination et l’exécution des tâches touchant un ou plusieurs emplacements, de gestion de projets (l’implantation de nouveaux courriers électroniques, le déploiement de nouveaux ordinateurs, la migration de réseaux), (2) gérer, contrôler et effectuer les suivis de budgets, (3) d’effectuer des recommandations pour l’émission de nouvelles politiques, (4) fournir à son personnel de l’information sur les politiques et les lignes directrices concernant principalement la sécurité ou tous autres domaines, (5) enfin de procéder à l’évaluation de son personnel sur une base régulière afin d’apporter des correctifs si nécessaire, etc.

Monsieur Jobin est délégué au niveau 3 d’autorité en matière de ressources financières et humaines comme en font foi les documents ci-inclus. Il est également investi d’autorités significatives qu’il exerce, au besoin. Toutefois en matière de ressources humaines, il n’a pas eu à traiter de griefs ni a prendre des mesures disciplinaires à l’égard de son personnel.

Vu l’utilité fonctionnelle de rendre accessible la procédure des griefs le plus près possible des employés, l’employeur a identifié et désigné le poste de M. Jobin comme premier palier de la procédure ministérielle des griefs pour tous les employés se rapportant à lui. La procédure de griefs comprend quatre niveaux qui sont :

1. M. R. Jobin, Gestionnaire de site, services techniques, Québec; 2. Mme G. Crevier-Leclerc, Directrice régionale, SGTI, Montréal; 3. M. R. Crête, Directeur général régional, Montréal; 4. M. R.A. Quail, Sous-ministre, Ottawa. Délégation au sous-ministre adjoint, ressources humaines.

Le 10 juillet 1996, Madame Ginette Crevier-Leclerc, directrice régionale, SGTI, lui envoyait une lettre le désignant premier palier de la procédure des griefs pour recevoir les griefs et lui conférant l’autorité de répondre, au nom de l’employeur, aux griefs des employés relevant de sa juridiction. L’autorité de répondre aux griefs qui lui a été attribuée est conforme aux exigences de l’article 5.1 et 100(4) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et satisfait au libellé de l’article 33 de la convention collective du groupe CS du fait que M. Jobin est premier palier de direction.

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Décision Page 6 L’employeur est aussi d’avis que cette proposition d’exclusion satisfait aux conditions essentielles élaborées par la Commission dans les décisions ci-énumérées :

The Professional Institute of the Public Service of Canada and Treasury Board (Dossier 174-2-220)

The Public Service Alliance of Canada and Treasury Board (Dossier 174-2-250)

The International Brotherhood of Electrical Workers, Local 2228 and Treasury Board (Dossier 173-2-258)

The Economists’, Sociologists’ and Statisticians’ Association and Treasury Board (Dossier 172-2-356)

The Public Service Alliance of Canada and Treasury Board (Dossier 174-2-499)

The Public Service Alliance of Canada and Treasury Board (Dossier 173-2-500)

The Public Service Alliance of Canada and Treasury Board (Dossier 174-2-553)

The Professional Institute of the Public Service of Canada and Treasury Board (Dossier 172-2-668)

The Public Service Alliance of Canada and Treasury Board (Dossier 172-2-831)

The Social Science Employees Association and Treasury Board (Dossier 172-2-957)

L’ensemble de la preuve documentaire annexée et celle antérieurement soumise par l’employeur supporte la conclusion que M. Jobin a été effectivement attribué [sic] la fonction et la responsabilité de premier palier de la procédure des griefs. À ce titre, il est autorisé à rendre des décisions de sa propre autorité et à répondre aux griefs présentés par les employés sous sa gouverne.

Selon la jurisprudence existante, l’employeur allègue que le rôle de la Commission se limite à déterminer, comme question de fait, si M. Jobin a bel et bien été assigné [sic] la responsabilité de s’occuper de griefs présentés en vertu de la Loi. Si la Commission conclut que tel est le cas, elle devrait trancher la question en faveur de l’employeur et exclure le poste de M. Jobin.

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Décision Page 7 PLAIDOIRIE DE L'AGENT NÉGOCIATEUR La plaidoirie écrite de l'agent négociateur a été présentée le 17 juin 1998 et se lit comme suit :

Introduction : L’IPFPC désire s’opposer à la demande d’exclusion (230-2084A) d’un poste de CS-02 actuellement occupé par Monsieur R. Jobin, à titre intérimaire, telle que demandée par le Conseil du Trésor en sa qualité d’employeur.

L’IPFPC à titre d’agent négociateur pour l’unité de négociation visée s’oppose à la demande d’exclusion pour les raisons suivantes.

Les faits : Le 10 juillet 1996, la Directrice régionale SGTI, Madame Ginette Leclerc informe Monsieur Robert Jobin du fait que l’employeur estime que ce dernier est désormais désigné à titre de « responsable premier palier dans la procédure de règlement des griefs ». Dans cette lettre la directrice régionale informe M. Jobin qu’il est autorisé à répondre, au nom de l’employeur, à tout grief présenté par UN EMPLOYÉ QUI RELÈVE DIRECTEMENT DE VOUS.

Le pouvoir ainsi délégué serait, selon la lettre de Madame Leclerc, au niveau d’autorisation permanente détenu en raison du poste occupé (CS-02 int.). La directrice exhorte le nouveau titulaire de cette délégation de s’informer et de demander conseil avant la prise de décision.

La description des fonctions qui fut acheminée à l’agent négociateur prévoit que parmi les tâches dévolues au titulaire de ce poste de gestionnaire de site (CS-02), il devra assurer la supervision et l’encadrement des employés informatiques [sic] dans les secteurs de support aux usagers, l’exploitation des systèmes, le réseau et les télécommunications.

Ce même document nous informe sur la proportion présumée du temps consacré aux différentes tâches qui constituent l’ensemble des responsabilités. Notons que seul le point 4 indique des responsabilités qui seraient associées avec les fonctions de gestion pouvant mener à l’exclusion de l’unité de négociation :

4. Gère, contrôle et effectue les suivis des budgets qui lui sont alloués et supervise les techniciens des services informatiques. % du temps : 15%

L’organigramme fourni à l’agent négociateur indique que la supervision relevant de ce poste s’étend à huit (8) fonctionnaires dont la plupart sont de niveau CS-01.

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Décision Page 8 Finalement, le dossier indique que le seul motif pour exclure ce poste de l’unité de négociation serait que le titulaire du poste a « la responsabilité de traiter, au nom de l’employeur, des griefs au 1er palier ».

Le droit : La Loi sur les relations du travail dans la fonction publique permet à l’employeur de demander l’exclusion et plus particulièrement en fonction de l’alinéa 5.1(1)b) l’employeur peut demander que soient exclus les postes dont « leurs occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions de gestion à l’égard de fonctionnaires ou des attributions les amenant à s’occuper officiellement, pour le compte de l’employeur, de griefs présentés selon la procédure établie en application de la présente loi; »

Le concept est clair; toutefois, il est important de souligner que lesdites fonctions doivent être exercées dans une proportion notable et que cette démonstration doit être faite par l’employeur à la satisfaction de la Commission.

Argumentaire : Bien que le dossier remis à l’agent négociateur indique que le titulaire du poste sera responsable de la supervision des fonctionnaires de niveau CS-01, rien ne nous permet de déduire de la présentation de l’employeur que cette personne exercera de façon notable les fonctions de gestion en ressources humaines au-delà de la simple supervision à laquelle réfère la description de tâches au point 4. La simple mention de la délégation du pouvoir de représentation de l’employeur au premier palier de grief n’est pas, en soi, l’exercice des fonctions.

La demande d’exclusion doit démontrer que les attributions, les amenant à s’occuper officiellement de griefs pour le compte de l’employeur, sont exercées dans une proportion notable.

Que signifie cette expression? Premièrement, nous devons convenir qu’il incombe à l’employeur de faire cette démonstration tel que la Commission a déjà exprimé en de telles matières :

« Il incombait à l’employeur de prouver que l’exclusion des fonctionnaires en cause était justifiée. La preuve sur laquelle il s’est fondé ne me convainc pas que les fonctionnaires doivent être exclus de l’unité de négociation. » extrait de AFPC et CT, dossier CRTFP 174-2-497 paragraphe 62.

Rien dans la demande ou dans la documentation reçue par l’agent négociateur ne permet de conclure que cette fonction sera exercée de façon notable. Tout au plus, une partie de la tâche serait hypothétiquement

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Décision Page 9 réservée à cette exercice et cela ne peut certes dépasser 15% si l’on se fie à la description de tâches (point 4, cité en introduction) mais se situerait dans la réalité probablement plus près du 0% absolu si l’on considère ce qui reste après le temps que le titulaire doit consacrer à même ce 15% de son temps de travail total lorsqu’il « gère, contrôle et effectue les suivis des budgets qui lui sont alloués » ainsi que lorsqu’il « supervise les techniciens des services informatiques ».

La forme utilisée par l’employeur dans ladite description de tâches permet de conclure exclusivement que le fonctionnaire visé fera la gestion, le contrôle et le suivi d’un budget pré-établi. L’action du fonctionnaire visé se limite à la supervision du groupe de CS-01 avec qui il est intimement associé dans les opérations quotidiennes. Rien ne permet de conclure, à quelque titre que ce soit, que le fonctionnaire aura des fonctions de gestion de ces mêmes ressources humaines. De plus, la présentation du représentant de l’employeur indique que depuis que cette délégation a été effectuée dans les livres de l’employeur, aucun grief n’a été présenté et aucune mesure disciplinaire n’a été prise.

« Toutefois en matières de ressources humaines, il n’a eu à traiter de griefs ni à prendre des mesures disciplinaires à l’égard de son personnel. »

extrait de la présentation du représentant de l’employeur à la page 2. Il faut noter ici, que le temps écoulé est de plus de 22 mois depuis la lettre du 10 juillet 1996. Ceci confirme que le temps consacré par le fonctionnaire à la procédure de griefs est inexistant. Il ressort que la base conceptuelle de la démarche de l’employeur pour obtenir cette exclusion est tout à fait théorique malgré les effets concrets et pratiques que cette exclusion aurait pour le fonctionnaire visé.

Pourquoi doit-on en venir à cette conclusion? La démarche effectuée par le législateur en 1992 a porté une modification substantielle au texte pertinent. Ainsi le texte en vigueur à l’origine prévoyait dans la définition de « personne occupant un poste de direction ou de confiance » à l’article 2 (chap. P-35) :

« c)(iii) s’occupant officiellement pour le compte de l’employeur, en raison de ses attributions, d’un grief présenté selon la procédure établie en application de la présente loi, »

Il fut modifié pour y lire spécifiquement dans un nouveau texte dédié à la question des « Postes de direction de confiance » au paragraphe 5.1(1):

« b) leurs occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions de gestion à l’égard de fonctionnaires ou des attributions les amenant à s’occuper officiellement, pour le compte de l’employeur, de griefs selon la procédure établie en application de la présente loi; »

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Décision Page 10 L’ajout du segment « dans une proportion notable » modifie le mandat qui est confié à la Commission et celle-ci doit s’assurer que cette exigence est démontrée dans la demande d’exclusion.

Voici ce que Le petit Robert (extraits joints aux présentes) nous indique pour ce nom et cet adjectif :

PROPORTION 1. Rapport de grandeur entre les parties d’une chose, entre une des parties et le tout... 2. Rapport ou ensemble de rapports de grandeur... 3. Rapport quantitatif (entre deux ou plusieurs choses).

Cette définition s’accorde effectivement avec l’annotation en marge du paragraphe 5.1(1) il est indiqué que le paragraphe traite de la « Qualification par la Commission » et implique que la Commission doit évaluer, mesurer ou qualifier la proportion des attributions excluantes [sic]. Le quasi-automatisme qui entraînait l’exclusion par la désignation à titre de représentant de palier de grief tel qu’il semblait s’appliquer dans les décisions invoquées par le représentant de l’employeur n’existe plus. La règle a changé.

Le dictionnaire définit : NOTABLE 1. Qui est digne d’être noté, remarqué => remarquable. Un fait notable. Des différences notables, de notables progrès. => appréciable, important, sensible.

pièce jointe : Extrait du dictionnaire Le petit Robert, 1996 De l’ensemble de la soumission, il apparaît que l’employeur n’a pas démontré qu’une proportion NOTABLE, appréciable, importante ou sensible des tâches de la fonction est consacrée à la représentation de l’employeur dans le cadre de la procédure de griefs. L’affirmation du représentant de l’employeur à l’effet qu’en deux (2) ans, aucun grief n’a été acheminé au titulaire du poste, M. Jobin, confirme bien que l’exercice suggéré par l’employeur est théorique et que cette désignation aux fins de représentation de l’employeur dans le cadre de la procédure de griefs ne peut, dans ce cas précis, satisfaire à la nouvelle formulation adoptée par la Chambre des Communes en 1992. Qui plus est, la conclusion à l’effet contraire priverait un fonctionnaire de son droit à la négociation collective et de son droit de participation aux affaires syndicales en soutenant que le législateur a modifié la loi sans que cela ait de conséquence, que rien n’a changé. Cette conséquence est celle d’imposer de façon notable un fardeau de preuve plus exigeant à l’employeur pour exclure les fonctionnaire de l’unité de négociation. L’employeur ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve en démontrant de façon prépondérante que le fonctionnaire titulaire de ce poste exercerait dans une proportion notable les tâches justifiant son exclusion.

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Décision Page 11 CONCLUSION La proposition d’exclusion (230-2084A) d’un poste de CS-02 - Groupe de gestion des systèmes d’ordinateurs - occupé de façon intérimaire par M. Robert Jobin doit être rejetée.

[Emphase dans l'original] RÉPLIQUE DE L'EMPLOYEUR En réplique à la plaidoirie de l'agent négociateur, le représentant de l'employeur a présenté ce qui suit, le 24 juin 1998 :

J’ai revu et examiné les représentations du 17 juin 1998 de M. L. Quesnel, représentant de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada concernant le dossier en rubrique. Vous trouverez ci-joint les commentaires de l’employeur en réponse aux allégations de l’agent négociateur quant (1) au rôle de M. Jobin à titre de gestionnaire, (2) à l’absence de griefs depuis le 10 juillet 1996, (3) à l’interprétation de l’alinéa 5.1(1)b) faite par l’IPFPC, (4) et à la jurisprudence de la Commission depuis 1993.

Rôle de gestionnaire L’employeur maintient qu’il est inexact et erroné de dire que M. Jobin consacrerait 0% absolu de son temps à gérer, contrôler et effectuer les suivis des budgets qui lui sont alloués (les frais de déplacements, achats et autorisation d’équipements informatiques, analyse des écarts, planification, plan annuel et quinquennal, plan de formation des employés, stratégie ministérielle en regard aux objectifs etc.) et à superviser les techniciens des services informatiques. Après vérification auprès de M. Jobin, celui-ci m’informe que le temps consacré à l’exercice de cette fonction #4 serait plus représentatif de la réalité, s’il était haussé de 15% à 30%.

Quant au terme générique « superviser », il devrait se lire « contrôler et gérer l’ensemble des effectifs du district de Québec. » À titre de gestionnaire, M. Jobin, en plus d’assurer la direction et l’orientation fonctionnelle d’une équipe d’informaticiens chargée de l’installation, de l’administration, de l’entretien et du soutien technique des systèmes informatiques, doit régler les litiges avec les différents gestionnaires, assister à des réunions de coordination et de planification, et représenter le directeur des services informatiques sur certains aspects propres aux opérations du district.

Absence de griefs L’agent négociateur fait valoir que puisque M. Jobin n’a pas eu à répondre à des griefs depuis juillet 1996, son poste ne comprend pas des fonctions

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Décision Page 12 notables en matière de ressources humaines, y compris de résolution de griefs, par conséquent, ne devrait pas être exclu. Cette position contredit la jurisprudence présente et passée de la Commission. L’absence de griefs n’est pas un facteur qui doit être considéré aux fins d’exclusion d’une personne en tant que palier dans la procédure des griefs sous l’alinéa 5.1(1)b) de la loi.

Le rôle d’un gestionnaire avisé est justement d’être un modérateur lors de conflits potentiels et essayer, autant que faire ce peut, de trouver des solutions afin d’éviter les griefs et, le cas échéant, de trouver un terrain d’entente. Un gestionnaire efficace est celui qui désamorce les situations critiques et conflictuelles et qui met en place des mesures correctives afin de rétablir l’harmonie et la bonne entente parmi le personnel et de favoriser le travail d’équipe. C’est ce que M. Jobin s’est fixé comme mission en sa qualité de gestionnaire.

Interprétation de l’alinéa 5.1(1)b) L’alinéa 5.1(1)b) se divise en deux propositions totalement distinctes. L’employeur soutient que, à l’examen de la structure de cet alinéa, la phrase « dans une proportion notable » ne vise et ne s’applique qu’à la première définition, à savoir :

« leurs occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions de gestion à l’égard de fonctionnaires... »

et non à la seconde qui se lit comme suit : « ou des attributions les amenant à s’occuper officiellement pour le compte de l’employeur de griefs présentés selon la procédure établie en application de la présente loi; »

L’employeur est d’avis que la conjonction « OU » exerce une fonction disjonctive qui isole et sépare les deux définitions. En conséquence, la phrase « dans une proportion notable » ne qualifie d’aucune manière les attributions d’une personne qui s’occupe de répondre aux griefs au nom de l’employeur dans la procédure des griefs en conformité de la loi.

L’employeur soutient également que, dans l’alinéa 5.1(1)b), le Parlement n’a pas jugé utile d’investir expressément la Commission, contrairement au libellé de l’alinéa 5.1(1)d), d’un pouvoir discrétionnaire d’évaluer et de jauger les motifs et la qualité des décisions de l’employeur d’identifier et d’assigner à une personne l’autorité de répondre aux griefs présentés par des employés.

Jurisprudence depuis 1993 L’IPFPC mentionne dans ses représentations que les attributions amenant une personne à s’occuper officiellement de griefs, pour le compte de l’employeur, doivent être exercées de façon notable. À notre avis, cette

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Décision Page 13 proposition heurte de front non seulement la jurisprudence développée par la Commission mais aussi la lettre et l’esprit de l’alinéa 5.1(1)b).

M. L. Tenace, vice-président de la Commission, statuait à la page 8 de sa décision du 26 avril 1996 (dossier #172-2-831) ce qui suit :

« As can be seen, despite different wording, there is little substantial difference between the “old” and the “new” criteria. »

Dans sa décision # 172-2-957 du 17 février 1997, Madame Marguerite- Marie Galipeau ne fait aucune mention ni ne sous-entend que la Loi amendée de juin 1993 impose une condition nouvelle aux conditions déjà existantes pour qu’une personne soit légalement nommée à l’un des paliers dans la procédure de griefs. De toute évidence, il n’existe aucune modification significative par rapport à l’ancien critère d’exclusion 2c(iii) [sic] ou 2(e) [sic] qui rendrait caduque la jurisprudence actuelle.

En dernier ressort, l’employeur aimerait attirer l’attention de la Commission sur la copie d’une lettre du 2 juin 1998 signée par Mme Paula Shaver de l’Institut professionnel adressée à M. R. Jobin l’avisant qu’il a probablement été informé de sa désignation comme personne occupant un poste confidentiel ou de gestion. Selon l’employeur, ce document parle de lui-même et est explicite. Il devrait suffire à mettre fin aux démarches en cours.

En guise de conclusion, l’employeur maintient que M. Jobin est proprement investi de l’autorité de répondre aux griefs et de l’exercer de sa propre autorité, qu’il jouit du statut propre à un gestionnaire, qu’il est un premier niveau de gestion et que les fonctions et les responsabilités énoncées tant dans le poste générique no 0G032 que dans le poste 230-2084A reflètent amplement les attributs propres à un gestionnaire. L’employeur demande donc à la Commission de désigner le poste du gestionnaire de site, services informatiques, comme étant un poste devant être exclu sous l’alinéa 5.1(1)b) de la Loi.

[Emphase dans l'original] MOTIFS La raison invoquée par l'employeur pour qualifier le poste de poste de direction ou de confiance en vertu de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi est que Robert Jobin doit s'occuper officiellement, pour le compte de l'employeur, des griefs présentés au premier palier de la procédure des griefs par tout employé relevant directement de lui. Le dossier devant la Commission révèle que l'employeur a effectivement désigné Robert Jobin pour traiter des griefs présentés par ses subalternes au premier palier de

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Décision Page 14 la procédure des griefs et que le poste représente le premier niveau de gestion pour ces employés.

Au soutient de l'opposition à la qualification du poste, le représentant de l'agent négociateur avance un argument relié au niveau de gestion de ressources humaines exercé par Robert Jobin sur les huit fonctionnaires qu'il supervise. Je note cependant que la décision de l'employeur de qualifier le poste de poste de direction ou de confiance ne repose aucunement sur cette fonction de gestion. Je considère donc que cet argument n'est pas pertinent aux fins de la décision que la Commission doit rendre.

Le représentant de l'agent négociateur allègue aussi que l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi limite les cas de qualification aux postes dont les occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions les amenant à s'occuper officiellement de griefs. Cet argument se fonde sur les amendements apportés à la Loi le 1 er juin 1993. Avant le 1 er juin 1993, l'article 2 de la Loi définissait comme suit qui était une « personne occupant un poste de direction ou de confiance » :

« personne occupant un poste de direction ou de confiance » Personne qui :

[...] c) employée dans la fonction publique et sur désignation par la Commission, [...] est classée comme :

[...] (ii) occupant un poste dont les attributions comprennent les fonctions d'administrateur du personnel, ou l'amènent à participer directement au processus de négociations collectives pour le compte de l'employeur,

(iii) s'occupant officiellement pour le compte de l'employeur, en raison de ses attributions, d'un grief présenté selon la procédure établie en application de la présente loi,

[...] Le 1 er juin 1993, la Loi a été amendée. Maintenant, l'article 5.1(1) prévoit que : Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 15 5.1 (1) La Commission [...] qualifie de postes de direction ou de confiance ceux qui [...] répondent, à son avis, à l’un ou l’autre des critères suivants :

[...] b) leurs occupants exercent, dans une proportion notable, des attributions de gestion à l’égard de fonctionnaires ou des attributions les amenant à s’occuper officiellement, pour le compte de l’employeur, de griefs présentés selon la procédure établie en application de la présente loi;

[...] [Je souligne] C'est le libellé de ce nouvel alinéa 5.1(1)b) de la Loi qui amène le représentant de l'agent négociateur à prétendre que, pour que le poste puisse être qualifié de poste de direction ou de confiance, Robert Jobin doit s'occuper de griefs au premier palier de la procédure des griefs dans une proportion notable.

Je ne peux partager cette interprétation de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi. Accepter l'interprétation du représentant de l'agent négociateur entraînerait de l'incertitude dans le processus de qualification, faisant en sorte que les mêmes postes pourraient ou non être qualifiés en vertu de la Loi, tout dépendant des fluctuations dans le volume des griefs dont leurs titulaires doivent traiter. Cette interprétation limiterait aussi de façon déraisonnable la capacité de l'employeur de déléguer au premier niveau de gestion, conformément à la clause 33.06 de la convention collective, ses pouvoirs de traiter les griefs au premier palier de la procédure des griefs. Je suis d'autant plus convaincu que l'interprétation que fait le représentant de l'agent négociateur de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi est contraire à l'intention du législateur lorsque je lis la version anglaise de cet alinéa :

5.1 (1) Where [...] the Board is satisfied that any position of an employee [...] meets any of the following criteria, it shall identify the position as a managerial or confidential position:

[...] (b) a position the occupant of which has substantial management duties, responsibilities and authority over employees or has duties and responsibilities dealing formally on behalf of the employer with a

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 16 grievance presented in accordance with the grievance process provided for by this Act;

[...] [Je souligne] S'il peut être invoqué que la version française de l'alinéa 5.1(1)b) de la Loi contient une ambigüité ou une imprécision de langage, on ne peut en dire autant de la version anglaise, qui n'exige aucunement que le titulaire d'un poste s'occupe du traitement de griefs de façon notable pour que son poste puisse être qualifié de poste de direction ou de confiance en vertu de la Loi. Sur ce point, les amendements apportés à la Loi le 1 er juin 1996 n'ont pas changé les règles du jeu, contrairement à ce que prétend le représentant de l'agent négociateur.

Pour toutes ces raisons, je suis donc d'avis que le poste qu'occupe Robert Jobin est un poste de direction et de confiance en vertu de la Loi et la Commission en confirme la qualification.

Yvon Tarte, président

OTTAWA, le 21 juillet 1998.

Commission des relations de travail dans la fonction publique

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