Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Pratique déloyale de travail - Plainte fondée sur le paragraphe 23(1)a) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) alléguant une violation de l'article 8 - Communication directe avec les employés - Discrimination - Activité syndicale - les parties étaient engagées dans des négociations - la plainte portait sur deux questions - premièrement, l'agent négociateur se plaignait que l'employeur avait communiqué directement avec certains employés au sujet des négociations afin d'embarrasser l'agent négociateur et de nuire à la capacité de l'agent négociateur de représenter ses membres - il prétendait également que l'employeur usait de menaces et de représailles et d'abus de droit envers les employés, plus particulièrement relativement aux membres des équipes d'urgence. - à la table de négociation, l'agent négociateur a clairement fait savoir que la bonification du régime de pension serait une question importante - l'employeur soutenait que l'amélioration du régime de pension n'était pas une question négociable à la table - grâce à sa persévérance, un membre de l'unité de négociation a obtenu du Conseil du Trésor un avis confirmant que la question n'était pas négociable à la table - il a distribué cet avis à plusieurs autres membres de l'unité de négociation - l'agent négociateur a déclaré que l'employeur avait menacé de prendre des mesures disciplinaires contre les fonctionnaires se servant du courriel pour émettre des commentaires en faveur du syndicat, sans pour autant se soucier des fonctionnaires utilisant le courrier électronique pour contester la position du syndicat - chaque pénitencier a une équipe d'intervention d'urgence pour intervenir auprès de détenus récalcitrants, en cas d'incendie ou pour la formation sur l'utilisation des armes et autres instruments de défense - chaque équipe est composée de volontaires - pendant les négociations, et en réponse à une demande de l'agent négociateur, 90 % des membres de ces équipes ont démissionné - l'employeur a expliqué aux fonctionnaires de l'unité de négociation que s'il devenait nécessaire de réunir une équipe d'urgence, il ordonnerait à un ancien membre de l'équipe d'intervenir et, en cas de refus répétitif, les fonctionnaires visés seraient passibles de mesure disciplinaire et même de renvoi - la Commission a conclu que, en ce qui avait trait à l'échange de courriels avec le fonctionnaire de l'unité de négociation, la direction n'avait pas eu l'intention de s'ingérer dans les affaires de l'agent négociateur - comme le fonctionnaire en question était un cotisant du régime de pension, il était normal de répondre directement à ce « client » du régime de pension, sans nécessairement avoir l'intention de s'ingérer dans les affaires syndicales - de plus, une fois que l'employeur avait été informé de la situation, il avait pris les mesures nécessaires pour s'assurer qu'une telle situation ne se reproduirait plus en cours de négociations - en ce qui concerne l'utilisation du courrier électronique de l'employeur, rien dans la preuve n'indiquait que l'employeur avait traité différemment les fonctionnaires qui étaient en faveur du syndicat de ceux qui étaient contre - pour ce qui est du recours aux anciens membres des équipes d'intervention d'urgence pour maîtriser des détenus récalcitrants ou des incendies, la Commission a conclu que les motifs de sécurité interne et d'urgence justifiaient le geste posé par l'employeur - cependant, ces critères ne s'appliquaient pas dans le cas des cours de maniement des armes, et d'anciens instructeurs ne pouvaient pas être tenus de donner ces cours; l'employeur aurait plutôt dû se tourner vers d'autres solutions, en trouvant par exemple des instructeurs dans la région ou à l'extérieur - l'employeur avait le droit de demander aux fonctionnaires de participer à des cours, mais pas de les menacer de mesure disciplinaire s'ils répondaient à la demande de leur syndicat - cela serait assimilable à de l'ingérence dans les affaires du syndicat. Plainte accueillie en partie. Décisions citées :Ager, dossier de la CRTFP 161-2-167 (1978) (QL); Alliance de la Fonction publique du Canada, dossier de la CRTFP 161-2-791 (1996)(QL); Jackson, dossier de la CRTFP 161-2-399 (1988) (QL); Alliance de la Fonction publique du Canada, dossier de la CRTFP 461-HC-10 à 12; Alliance de la Fonction publique du Canada c. Agence des douanes et du revenu Canada, 2001 CRTFP 105.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2004-06-21
  • Dossier:  161-2-1263
  • Référence:  2004 CRTFP 71

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique




ENTRE

UNION OF CANADIAN CORRECTIONAL OFFICERS -
SYNDICAT DES AGENTS CORRECTIONNELS DU CANADA
(UCCO-SACC-CSN)

plaignant

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général Canada - Service correctionnel)

défendeur

Objet : Plainte déposée en vertu de l'article 23 de la
Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Devant:   Jean-Pierre Tessier, commissaire

Pour le plaignant :   Maurice Laplante, avocat

Pour le défendeur :   Jennifer Champagne, avocate


Affaire entendue à Montréal (Québec),
les 28 et 29 août et le 9 décembre 2003.


[1]   Le syndicat, Union of Canadian Correctional Officers - Syndicat des agents correctionnels du Canada (UCCO-SACC-CSN), est accrédité depuis le 13 mars 2001 pour représenter tous les fonctionnaires de l'employeur compris dans le groupe Service correctionnel. Il représente plus de 5 500 agents correctionnels dans plus de 50 pénitenciers au Canada.

[2]   Le 10 avril 2002, le syndicat déposait son projet de renouvellement de la convention collective. Entre le 10 avril 2002 et le 20 mai 2003, il y a eu 38 séances de négociations en plus de diverses rencontres avec le Conseil du Trésor, le commissaire et le sous-commissaire principal du Service correctionnel Canada (SCC).

[3]   Considérant qu'il y a eu ingérence dans les affaires du syndicat, le 19 juin 2003, celui-ci dépose auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (Commission) une plainte lui demandant de rendre une ordonnance demandant à l'employeur :

[…]

DE CESSER d'émettre toute directive visant à contraindre les employés à continuer de participer contre leur volonté aux différentes équipes d'intervention d'urgence;

DE CESSER toutes représailles, d'émettre des avis et des mesures disciplinaires relativement au refus des employés de continuer à participer aux différentes équipes d'intervention d'urgence;

D'AVISER les employés de l'unité de négociation de la teneur de l'ordonnance;

D'AFFICHER ladite ordonnance dans chacun de ses établissements;

DE CESSER de négocier de mauvaise foi;

D'ENGAGER les discussions avec le syndicat, entre autres, relativement au régime de retraite;

DE CESSER de s'ingérer dans les affaires du syndicat;

RENDRE toute autre ordonnance propre à la sauvegarde des droits des parties.

[…]

[4]   Le 18 juillet 2003, le syndicat dépose une autre plainte relativement semblable à celle du 19 juin 2003. L'employeur n'a pas fait de représentation quant au choix de l'un ou l'autre des plaintes. Aux fins de l'audition, les deux plaintes sont considérées et portent sur trois éléments significatifs découlant des plaintes.

[5]   Le syndicat a demandé à la Commission de rendre d'urgence une ordonnance provisoire. Cependant, le tout a été référé pour audience devant un commissaire dans la semaine du 28 août 2003.

[6]   Lors de l'audience d'août 2003, le syndicat a présenté sa preuve mais faute de temps et de disponibilité de la part des parties, l'audience du dossier est reportée à une date ultérieure pour entendre la preuve de l'employeur et les arguments des parties.

[7]   Entre-temps, le syndicat réfère le dossier en cour fédérale et en cour d'appel fédérale pour faire déterminer s'il n'y a pas lieu d'émettre une ordonnance provisoire. Les tribunaux supérieurs conviennent que le dossier doit se poursuivre devant la Commission.

[8]   La poursuite de l'audience a lieu le 9 décembre 2003.

[9]   Il est à noter qu'avant l'audience du 9 décembre 2003, le syndicat a retiré les demandes d'ordonnance concernant la négociation, soit particulièrement celles visant la négociation de mauvaise foi et le fait d'engager des discussions avec le syndicat, entre autres, relativement au régime de retraite.

[10]   Lors de la reprise de l'audience le 9 décembre 2003, le syndicat confirme que la plainte porte désormais sur deux points. On reproche à l'employeur d'être intervenu directement auprès de certains employés et d'embarrasser ainsi le syndicat. On reproche ensuite à l'employeur d'user des menaces et des représailles et d'abus de droit envers les employés, plus particulièrement relativement aux membres des équipes d'urgence.

Les faits

[11]   Dans son témoignage lors de l'audience, le président national du syndicat, M. Sylvain Martel, se réfère particulièrement aux documents déposés en bloc (pièces P-1 à P-8) pour ce qui a trait à l'intervention de l'employeur auprès des employés et aux pièces P-9 à P-19, relativement à de l'intimidation exercée auprès des employés.

[12]   M. Martel explique qu'un des éléments importants qui a été soulevé par le syndicat pendant la période de négociations est la question du fonds de pension.

[13]   Selon M. Martel, la contribution des employés au fonds de pension a été majorée au cours des années antérieures afin de permettre d'octroyer des retraites dès que les employés ont atteint l'âge de 50 ans. Cependant, peu d'employés profitent de cette possibilité, compte tenu du montant de la pension octroyée.

[14]   M. Martel désire ardemment améliorer le mécanisme du fonds de pension et c'est pourquoi son syndicat insiste pour régler cette question au moment de la négociation.

[15]   M. Martel explique que l'approche du syndicat a fait l'objet de beaucoup de discussions avec l'employeur. Le représentant du Conseil du Trésor ne veut pas aborder le sujet du fonds de pension à la table de négociations. Il soutient qu'il peut y avoir des discussions sur ce sujet à un autre palier.

[16]   Le syndicat souhaite que la question du fonds de pension soit abordée rapidement. Une publicité syndicale (pièce P-3) s'intitule : « Pas d'entente sans un vrai régime de retraite. » On y lit de plus sur la page titre « c'est négociable. »

[17]   Certains employés syndiqués contestent l'approche des dirigeants syndicaux et laissent entendre qu'un débat sur la possibilité ou non de discuter des questions relatives au fonds de pension risque de retarder le déroulement de la négociation.

[18]   Quoi qu'il en soit, un employé « dissident » de la position syndicale cherche à obtenir de la part de représentants du Conseil du Trésor une opinion sur la possibilité de négocier la question du fonds de pension à la table de négociations.

[19]   À force de persistance, cet employé a réussi à obtenir une réponse d'un représentant du Conseil du Trésor. Dans un document, ce dernier expose l'opinion de la partie patronale au fait que la question du fonds de pension n'est pas un objet négociable à la table de négociations.

[20]   L'employé « dissident » a véhiculé cette opinion auprès de plusieurs autres syndiqués (pièce P-5), ce qui a eu pour effet de porter ombrage à la position du syndicat.

[21]   Relativement à l'utilisation du courriel électronique, le président du Syndicat, M. Martel reproche à l'employeur le fait qu'il soit intervenu auprès de certains employés relativement à l'usage du courriel électronique alors que, selon lui, des employés « dissidents » se servaient du courriel pour contester la position du syndicat.

[22]   Relativement à la question de la négociation relative au fonds de pension, M. Michel Gauthier, négociateur en chef pour le syndicat, a cependant expliqué que le syndicat n'a pas posé l'ultimatum sur le lieu de négociations de la question du fonds de pension, que se soit à la table de négociations ou ailleurs; tout ce que le syndicat veut c'est que la question des pensions se règle rapidement. Il est à noter que le syndicat a retiré cette question des éléments de sa plainte.

[23]   L'autre point de reproche à l'employeur concerne les équipes d'urgence ou spécialisées. Le syndicat explique que, depuis plusieurs années, l'employeur a convenu avec le syndicat que la meilleure façon de dispenser certains services spécialisés était de constituer des équipes d'employés (notamment : a) intervention auprès de détenus ou de groupe de détenus récalcitrants; b) intervention en cas d'incendie; et c) formation sur l'utilisation des armes et autres instruments de défense).

[24]   À l'intérieur de chaque établissement, des employés se portent volontaires pour faire partie d'une équipe spécialisée. Lorsqu'il y a nécessité d'intervenir pour sortir un détenu récalcitrant d'une cellule, on fait appel à ces employés. Si ces employés sont déjà au travail, on procède par réaffectation pour transférer les employés à un endroit désigné et ils sont remplacés à leur affectation initiale. S'il n'y a pas assez d'employés spécialisés au travail pour former l'équipe d'intervention, on rappelle des employés non en service.

[25]   L'employé qui accepte d'être membre d'une équipe d'intervention ne reçoit aucune rémunération spéciale ou prime additionnelle pour ce travail.

[26]   Il y a un peu plus de 900 personnes qui sont membres d'équipes spécialisées pour l'ensemble des services carcéraux.

[27]   En pratique, les employés se portent volontaires pour être membres de ces équipes d'urgence pour un certain nombre d'années. En cours de route, certains remettent leur démission et sont remplacés par d'autres employés qui se portent volontaires.

[28]   M. Martel explique avoir discuté en septembre 2002 avec l'employeur de la modalité selon laquelle un employé pouvait se retirer d'une équipe d'intervention. Il n'y a pas eu d'accord sur le délai de préavis.

[29]   L'employeur lui a répondu qu'il jugeait qu'un avis de deux mois était nécessaire pour que l'employé se retire d'une équipe d'urgence.

[30]   Au début de 2003, le syndicat a mis en place une stratégie pour que les employés membres des équipes d'urgence avisent l'employeur qu'ils démissionnent comme membres du groupe. Des lettres types ont été préparées. Les employés les expédient, mais indiquent que 60 jours plus tard, soit le 28 mai 2003, ils se retirent comme membres d'une équipe spécialisée (pièce P-14).

[31]   Selon le syndicat, une compilation du 11 juin 2003 démontre que 895 employés avaient transmis l'avis de leur retraite (ou démission) des équipes d'urgence, soit environ 90 %.

[32]   Le syndicat explique que, pour contrer cette action, l'employeur aurait préparé des mesures d'avertissement de sorte que, à compter de juin, lorsqu'il y avait nécessité de réunir une équipe d'intervention, par exemple pour procéder à une extraction d'un détenu d'une cellule, un représentant de l'employeur donnait l'ordre à un « ex membre » d'équipe d'intervention. Au premier refus, un avertissement est donné. L'ordre est répété quelques secondes plus tard et on indique que le membre est passible de pénalité. Un troisième, quatrième et cinquième ordres sont donnés dans la minute qui suit et finalement l'employé est passible de congédiement.

[33]   Lorsque la première situation s'est présentée au début de juin 2003, le syndicat (national) est informé et l'on conseille alors aux employés d'obéir aux ordres donnés plutôt que de subir des sanctions.

[34]   Le syndicat souligne que le même type d'ordre a été donné à des instructeurs de tirs. Ces derniers avaient, eux aussi, remis leurs avis de démission 60 jours à l'avance.

[35]   Le document déposé comme pièce P-18 et les suivants démontrent que les employés ont déposé des griefs à la suite de ces incidents, tout en obéissant à l'ordre donné. La pièce P-26, préparée par le syndicat, dresse une liste des personnes représentant l'employeur qui sont intervenues auprès des employés.

[36]   Trois agents du SCC ont témoigné pour corroborer le fait qu'ils aient reçu des ordres d'agir au sein d'équipes d'intervention d'urgence alors qu'ils avaient démissionnés en mai comme membres de ces équipes. Ils confirment qu'ils participent à des cours de formation annuellement, du moins tous les 12 ou 15 mois.

[37]   L'employeur fait témoigner M. Fraser McVie. Ce dernier est directeur général de la sécurité. Il compte plus de 30 ans d'expérience dans le domaine.

[38]   M. McVie confirme la position syndicale sur l'historique de la formation des équipes d'urgence et sur leur utilité. Se référant à une description de tâches d'un agent correctionnel CX-01 (pièce E-3), il explique que l'intervention auprès de détenus récalcitrants fait partie de la tâche de chaque employé.

[39]   Cependant, poursuit-il, suite à des difficultés lors d'émeutes, il a été convenu que certains employés recevraient une formation plus spécialisée. On forme des équipes de gens intéressés et formés pour fin d'intervention spécialisée. Les membres d'une équipe étaient tous intéressés et adhéraient volontairement à l'équipe, se sachant plus en sécurité les uns avec les autres.

[40]   M. McVie a été informé au printemps 2003 que des employés avaient transmis leurs avis de démission comme membres d'équipes d'urgence. En l'absence de membres d'équipes d'intervention d'urgence, il trouve dangereux que les institutions fassent appel à des employés qui n'ont pas déjà été membres d'une équipe d'urgence pour procéder à une opération.

[41]   C'est pourquoi il recommande que chaque institution s'adresse à des employés déjà formés, donc ceux qui étaient membres d'équipes avant avril 2003, pour procéder à une intervention.

[42]   Pour ce faire, on doit donner un ordre direct à l'employé et lui indiquer que lors d'une situation de refus de la part de l'employé, des sanctions peuvent êtres infligées, allant même jusqu'au congédiement.

[43]   En contre-interrogatoire, il explique ne pas être au courant de tous les évènements qui se sont déroulés à partir de l'été 2003. Les gens responsables de la gestion du personnel et les autorités de chaque établissement devaient s'occuper de contacter les employés. Il n'a pas été informé d'ailleurs du nombre d'employés membres des équipes d'urgence qui auraient donné leur démission à compter de mai 2003.

[44]   M. Daniel Langevin est négociateur pour l'employeur et il souligne avoir été informé du fait que M. Charko, adjoint à la Division des pensions, avait communiqué avec un employé couvert par l'accréditation syndicale. Il en a discuté avec le syndicat et a fait en sorte que désormais, et pour éviter toute confusion, il n'y ait plus de réponses apportées directement à un employé.

Arguments

[45]   Le syndicat soutient que l'employeur s'est ingéré dans les affaires syndicales en communiquant directement avec des employés à propos de la question du fonds de pension. Aussi, le syndicat soutient que les actions des représentants de l'employeur auprès des « ex-membres » des équipes d'intervention constituent une mesure excessive. Bien qu'en vertu du présent dossier de plainte l'arbitre n'ait pas à se prononcer sur le bien fondé ou non des sanctions imposées par l'employeur comme dans le cas d'un grief, l'arbitre doit, dans le présent cas, examiner si le caractère des sanctions ou menace de sanctions indiquées par l'employeur n'équivaut pas à une mesure d'intimidation et d'ingérence visant à contrôler les moyens de pression mis en place par le syndicat.

[46]   L'employeur savait, depuis avril 2003, que des employés se retiraient des équipes d'intervention; il aurait pu mettre en place des mesures supplémentaires.

[47]   Selon l'employeur, en cas de plainte, c'est le syndicat qui a le fardeau de la preuve. Dans l'espèce, l'employeur a agi de bonne foi en assurant la sécurité dans les établissements. L'utilisation des employés formés et habitués à travailler en équipe s'est avérée au cours des années la façon la mieux appropriée d'intervenir lors d'évènements particuliers.

[48]   Le maintien de l'ordre et les interventions visant à assurer la sécurité du personnel et des détenus sont les activités inhérentes à la tâche des employés. Selon l'employeur, l'employeur n'a fait que gérer les établissements en toute sécurité. L'arbitre n'a pas à intervenir sur les ordres donnés aux employés et les menaces de sanctions, car des griefs ont été logés par les employés et ces derniers feront l'objet d'un examen. L'arbitre dans le présent dossier doit se limiter à vérifier le bien fondé ou non des allégations d'ingérence.

Motifs

[49]   Par sa plainte basée sur l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), le syndicat reproche à l'employeur d'avoir enfreint les interdictions énumérées à l'article 8 de la LRTFP :

8.(1)   Il est interdit à quiconque occupant un poste de direction ou de confiance, qu'il agisse ou non pour le compte de l'employeur, de participer à la formation ou à l'administration d'une organisation syndicale, ou d'intervenir dans la représentation des fonctionnaires par une telle organisation ou dans les affaires en général de celle-ci.

   (2)   Sous réserve du paragraphe (3), il est interdit :

  1. de refuser d'employer ou de continuer à employer une personne, ou encore de faire des distinctions injustes fondées, en ce qui concerne l'emploi ou l'une quelconque des conditions d'emploi d'une personne, sur l'appartenance de celle-ci à une organisation syndicale ou sur l'exercice d'un droit que lui accorde la présente loi.

  2. d'imposer - ou de proposer d'imposer - à l'occasion d'une nomination ou d'un contrat de travail, une condition visant à empêcher un fonctionnaire ou une personne cherchant un emploi d'adhérer à une organisation syndicale ou d'exercer un droit que lui accorde la présente loi;

  3. de chercher, notamment par intimidation, par menace de destitution ou par l'imposition de sanctions pécuniaires ou autres, à obliger un fonctionnaire :

    1. à adhérer - ou s'abstenir ou cesser d'adhérer - ou encore, sauf disposition, contraire dans une convention collective, à continuer d'adhérer à une organisation syndicale,

    2. à s'abstenir d'exercer tout autre droit que lui accorde la présente loi.

   (3)   Toute action ou omission à l'égard d'une personne occupant un poste de direction ou de confiance, ou proposée pour un tel poste, ne saurait constituer un manquement aux dispositions du paragraphe (2).

[50]   De l'ensemble de la preuve présentée, je retiens trois types d'interventions que le syndicat reproche à l'employeur. Nous pouvons les résumer comme suit :

  1. d'avoir adressé une lettre (un courriel) à un employé relativement au fonds de pension s'émissant dans une controverse entre un groupe d'employés et le syndicat sur la stratégie de négociations portant atteinte à sa capacité de représentation;

  2. avoir menacé de sanctions des employés se servant du courriel pour émettre des commentaires;

  3. avoir menacé de mesures disciplinaires des employés visant à leur faire exécuter des tâches reliées aux équipes d'intervention d'urgence, alors que ces derniers n'étaient plus membres de ces équipes, modifiant ainsi le mécanisme habituel de participation qui se veut une adhésion volontaire.

[51]   Avant d'étudier les faits, j'examinerai d'abord la notion d'ingérence telle que décrite dans les décisions antérieures de la Commission.

[52]   Selon la jurisprudence récente de la Commission, l'intention de l'employeur n'est pas importante dans l'analyse du paragraphe 8(1) de la LRTFP. Cependant, certaines autres décisions nous indiquent le contraire. Dans la décision Ager (dossier de la CRTFP no 161-2-167) (1978) (QL), au paragraphe 32, la Commission a rejeté la plainte dans la mesure où elle s'appliquait au paragraphe 8(1) de la LRTFP pour le motif que le plaignant n'a pas fait la preuve des intentions de l'employeur :

Nous ne disposons d'aucune preuve directe à l'appui des allégations voulant que, en prenant diverses mesures contre M. Ager, les défendeurs aient été motivés par leurs sympathies envers l'une ou l'autre des parties en cause dans le conflit intersyndical.

[53]   Par contre, dans la décision L'Alliance de la Fonction publique du Canada (dossiers de la CRTFP nos 161-2-791 et 584) (1996) (QL), Ian Deans, pour la Commission, a écrit :

En dernière analyse, la plaignante doit recevoir les renseignements dont elle a besoin pour bien représenter les fonctionnaires qui font partie de l'unité de négociation. Le refus de les lui fournir constitue une violation de l'interdiction contenue au paragraphe 8(1) de la LRTFP. En arrivant à cette conclusion, la Commission ne dit pas que les actions de l'employeur et de M. Harder étaient motivées de quelque façon que ce soit par des « sentiments anti-syndicaux ». Nous affirmons simplement que, vu les circonstances de cette affaire, les préoccupations de l'employeur et de M. Harder au sujet des questions de protections des renseignements personnels ne peuvent empêcher la communication des renseignements requis par la plaignante pour s'acquitter convenablement de ses responsabilités aux termes de la LRTFP.

[54]   La décision Jackson (dossier de la CRTFP no 161-2-399) (1988) (QL), au paragraphe 37, est très explicite en parlant de la motivation de l'employeur et se lit comme suit :

D'après le paragraphe 8(1) on doit prouver qu'il y a eu intention d'ingérence de la part du défendeur.

[55]   Cependant, aucune décision de la Commission ne semble avoir procédé à une analyse approfondie du paragraphe 8(1) et de la nécessité pour le syndicat de prouver que l'employeur a fait preuve de mauvaise foi ou d'animus anti-syndicale.

[56]   Le paragraphe 6(1) de la Loi sur les relations de travail au Parlement est identique au paragraphe 8(1) de la LRTFP. Donc, il est fort intéressant de lire la décision du président Yvon Tarte dans L'Alliance de la Fonction publique du Canada, L'Association des employés du service de sécurité et le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (dossiers de la CRTFP nos 461-HC-10 à 12). À la page 47 de la décision, nous trouvons le suivant :

Le questionnaire du sondage a touché à plusieurs sujets qui font ou qui peuvent faire l'objet de négociations collectives entre les parties. Il n'est pas crucial à ce genre de plainte que la communication avec les employés syndiqués ait lieu durant les négociations collectives. Pas plus qu'il n'est nécessaire de prouver l'intention d'ingérence. Le noud de l'affaire est de savoir si le sondage a porté atteinte à la capacité des plaignants de représenter les membres.

[57]   En définitive, je crois que les articles 6 à 8, de la Loi (LRTFP) visent à éviter l'ingérence dans les activités syndicales. C'est donc sous cet angle qu'il faut envisager l'examen d'un geste posé par l'employeur, que ce geste soit intentionnel ou non.

[58]   Relativement au premier point, la preuve démontre qu'il y a eu plusieurs demandes adressées par l'employé « dissident » auprès des représentants de l'employeur (ressources humaines et le Conseil du Trésor). C'est finalement à la suite de l'insistance de ce dernier qu'un représentant de l'employeur indique que « la question des pensions n'est pas négociable. »

[59]   Le secrétaire adjoint à la Division des pensions et avantages sociaux, poursuit son courriel en indiquant « que le changement de la réglementation concernant la modification des taux de pension (70 % à 25 ans par rapport à 70 % à 35 ans), la réponse n'était pas simple. »

[60]   Il n'apparaît qu'en définitive la réponse d'un représentant de la Division du fonds de pensions se veut très technique. L'employé qui a reçu cette réponse, s'en est servi pour ses propres fins et l'a distribuée à d'autres employés. Je ne peux conclure, compte tenu de la nature très formelle du courriel et la façon dont un employé a réussi à l'obtenir, que le représentant de l'employeur ait voulu s'ingérer dans les affaires du syndicat.

[61]   Il faut noter ici que l'auteur du courriel est secrétaire adjoint à la Division des pensions et avantages sociaux. Ce sont les employés et non le syndicat qui cotisent au fonds de pension. L'employé est donc un « client » du fonds de pension. Les dirigeants du fonds peuvent être enclins à répondre directement à la demande d'un employé sans nécessairement y avoir une ingérence par rapport au syndicat. D'ailleurs, par la suite, lorsque l'employeur en est informé, il prend les dispositions pour qu'on ne réponde pas directement à la demande des employés, membres de l'UCCO-SACC-CSN, lors des négociations.

[62]   Bien avant la transmission du courriel par le représentant de la division de fonds de pension, il existait un différend entre le syndicat et certains employés dissidents.

[63]   Comme l'a expliqué le négociateur syndical, l'approche de négociations se voulait responsable et suffisamment souple pour éviter de créer une impasse sur le sujet de fonds de pension. L'employé « dissident » a fait beaucoup de publicité contre la stratégie syndicale. Cependant, le syndicat aurait pu se défendre en expliquant son comportement à la table de négociations.

[64]   Sur le deuxième point relatif aux remarques de l'employeur sur l'utilisation du courriel, je n'ai aucune preuve que la position de l'employeur a été différente entre des employés disons « favorables » au syndicat et des employés disons « dissidents ». L'employeur a la responsabilité de maintenir la discipline et d'émettre des directives sur l'utilisation des ordinateurs et je n'ai aucune preuve qu'il ait exercé de la discrimination à cet égard. Relativement à l'employé « dissident », la preuve démontre clairement que l'employé « dissident » sur la question du fonds de pension a utilisé son courriel personnel.

[65]   Le troisième point à examiner est beaucoup plus complexe. Les deux parties reconnaissent que la mise sur pied d'équipes spécialisées s'est avérée, au cours des années, être le moyen le plus efficace pour assurer la sécurité et ces équipes sont d'une importance capitale.

[66]   De la même façon, le mode de recrutement, l'insistance sur l'intérêt des participants, l'adhésion volontaire et la formation de ces derniers s'avèrent un atout précieux dans la cohésion des équipes et la sécurité des opérations.

[67]   S'il y a adhésion volontaire, il peut y avoir démission ou retrait de l'équipe.

[68]   Dans le contexte actuel, il faut examiner le dossier sous l'angle d'une plainte plutôt que celui d'un grief. En mai et juin 2003, 90 % des employés membres des équipes d'intervention d'urgence ont retiré leur participation volontaire à ces équipes et ce, 60 jours à l'avance.

[69]   En juin 2003, les établissements se retrouvent donc aux prises avec des actions à entreprendre sans avoir en place ces équipes actives d'intervention. Dans ce contexte, l'employeur décide de faire travailler les mêmes employés qui auparavant étaient volontairement membres des équipes d'urgence. Dans le cas d'intervention spéciale, telle l'extraction de cellules, l'expérience antérieure démontre que la façon la plus sécuritaire est de réunir une équipe composée d'employés formés spécifiquement, intéressés au travail, ayant développés un bon esprit d'équipe et ayant une confiance mutuelle.

[70]   L'employeur a exercé son droit de gérance et s'est adressé aux employés déjà formés, soit « les ex-démissionnaires ». Cela est conforme à l'un des éléments essentiels de la pratique antérieure, soit d'utiliser des personnes formées et capables de faire la tâche. Regrouper dans une même équipe d'intervention des gens formés et des gens moins formés et qui antérieurement n'ont pas manifesté d'intérêt pour de telles activités pourrait constituer un risque pour la sécurité.

[71]   En conséquence, pour ce qui est des équipes d'intervention d'urgence en rapport avec la maîtrise de détenus récalcitrants, ainsi que des équipes rattachées au service d'incendie, les motifs de sécurité interne et d'urgence justifient le geste posé par l'employeur. Les circonstances entourant l'action de l'employeur ne peuvent laisser percevoir qu'il y a ingérence ou apparence d'ingérence.

[72]   Cependant, on peut se demander si ces critères d'urgence et de sécurité s'appliquent dans le cas des cours de tir ou de maniement d'instruments d'intervention. L'employeur s'adresse à des « ex-formateurs » pour procéder à des cours de formation.

[73]   La preuve a démontré qu'en pratique, une formation est requise chaque année aux 12 mois ou aux 16 mois. Il existerait un décalage de trois à quatre mois quant à la nécessité de suivre des cours de formation.

[74]   Dans ce contexte, compte tenu qu'il n'avait plus de formateurs actifs (ceux-ci ayant démissionné), l'employeur pouvait reporter les cours de formation tentant de trouver des formules alternatives.

[75]   Selon le témoignage de M. McVie, il y a des formateurs locaux et régionaux. Dans la recherche de solutions, l'employeur aurait peut-être pu avoir recours à des formateurs régionaux ou encore examiner la possibilité de faire appel à des formateurs de l'extérieur.

[76]   Il est évident que le fait de reporter le cours cause un impact économique à l'employeur. Par contre, il s'agit-là d'une conséquence découlant d'une situation de fait, causée par l'absence de formateurs volontaires. Les employés ont exercé leur droit légitime de démissionner sous le conseil du syndicat.

[77]   Le syndicat ne se cache pas que ces démissions (retrait de la participation volontaire) sont orchestrées à l'échelle nationale; 90 % des employés membres des équipes spécialisées ont avisé de leur retrait.

[78]   Le fait pour l'employeur de menacer de sanctions disciplinaires, allant jusqu'au congédiement, « un ex-instructeur » pour qu'il procède à un cours dont l'urgence n'a pas été démontrée, a pour effet de nier la procédure antérieurement établie sans motif valable d'urgence et de sécurité. En pratique, cette action de l'employeur a pour effet de contrecarrer un geste légitime des employés parce que ce geste a des conséquences sur les activités de formation.

[79]   En absence de preuve que des raisons de sécurité justifient l'employeur de s'écarter de la pratique établie relativement à l'utilisation de «formateurs volontaires» le recours à des formateurs démissionnaires a comme effet de placer ces derniers dans une position délicate.

[80]   Ces derniers doivent-ils se fier à l'avis fourni par leur syndicat relativement à la légalité de leur démission (retirer leur nom de la liste des volontaires) ou obéir à l'ordre qui leur est donnée de participer à la formation?

[81]   Dans la décision L'Alliance de la Fonction publique du Canada et Carey Barnowski et l'Agence des douanes et du revenu du Canada, Rob Wright et Reid Corrigal (2001 CRTFP 105), le président, Yvon Tarte, conclu que la participation à une manifestation orchestrée par l'organisation syndicale constitue pour un individu une participation à une activité légitime protégée par l'article 6 de la LRTFP. Il ne fait aucun doute que les avis de démissionner des équipes d'urgence font partie d'une stratégie syndicale.

[82]   Dans une note de service émanant du sous-commissaire principal (onglet 15) en date du 9 avril 2003, on y trouve ce qui suit :

Réponse à l'avis de retrait de services

[…]

La gestion du SCC continuera d'utiliser et de déployer les employés qui sont formés et qualifiés à effectuer des tâches précises. Pour cette raison, vous devez vous assurer que vos plans d'urgence soient à jour et applicables rapidement afin de limiter toute interruption potentielle de vos opérations journalières si de tels retraits de services devaient avoir lieu.

Lorsque vous serez informé par des employés de leur retrait de services, vous devrez leur rappeler leurs responsabilités quant à leur propre sécurité, celle de leurs collègues, des détenus et du public. Ils doivent également être informés qu'ils pourraient faire l'objet de mesures disciplinaires s'ils décidaient de ne pas effectuer les tâches qui leurs sont attitrées. Vos agents régionaux des relations de travail, en collaboration avec leurs collègues de l'administration centrale, pourront vous guider dans le choix de la mesure disciplinaire appropriée à appliquer.

[83]   La note parle donc d'être guidé quant au choix de la mesure disciplinaire appropriée à appliquer. Comme je l'ai mentionné précédemment, dans le cas des équipes d'intervention d'urgence, on peut interpréter que l'employeur, tout en acceptant l'avis de retrait des employés, a recours à ces derniers pour des motifs d'urgence et de sécurité.

[84]   L'employeur n'a fait aucune différence dans le choix des mesures disciplinaires à appliquer, qu'il s'agisse d'extraction de cellule ou de session de formation. Je me pose la question suivante : si on menace de congédiement un employé qui a retiré, dans les délais requis de 60 jours, son nom de la liste des formateurs parce qu'il refuserait de participer à une session de formation, quelle mesure devait-on imposer à un employé qui n'a pas retiré son nom de la liste (ou ne l'a retiré que depuis 10 jours) et qui refuse de participer à une session de formation?

[85]   Dans de telles circonstances, il y a lieu d'examiner la portée des gestes posés par l'employeur.

[86]   Comme je l'ai mentionné précédemment, deux facteurs peuvent être pris en considération : soit l'intention de l'employeur ou encore la conséquence des gestes posés par l'employeur.

[87]   Le fait, pour l'employeur, de demander de participer à une session de formation à un employé qui a retiré son nom de la liste des employés volontaires pour faire de la formation, ne constitue pas une infraction.

[88]   Cependant, les menaces de congédiement adressées à un ex-formateur, qui a retiré son nom de la liste des formateurs, suite à une recommandation ou une ligne de conduite syndicale, contrastent donc la politique de volontariat appliquée antérieurement. Je me dois d'examiner l'opportunité de faire une telle demande et l'opportunité d'y assortir une menace de sanction, allant jusqu'au congédiement.

[89]   Bien qu'il n'y ait pas de preuve détaillée sur les cours de formation, il ressort des témoignages des parties que cette formation annuelle fait partie intégrale des mesures de sécurité. Il apparaît nécessaire pour maintenir un niveau de sécurité convenable qu'il y ait formation ponctuelle des employés. Les témoignages démontrent cependant que cette formation ponctuelle se situe dans un cadre flexible allant de 12 à 16 mois.

[90]   La preuve démontre que des demandes relatives aux sessions de formations surviennent à la fin du mois de mai 2003; soit immédiatement après que les employés avaient retiré leur nom de la liste des formateurs; l'avis indiquait que la participation prenait fin le 28 mai 2003.

[91]   Le lendemain du 28 mai 2003, l'employeur se trouve devant une situation difficile. Il n'a plus ou peu de formateurs inscrits sur les listes de volontaires. Par ailleurs, la pratique antérieure veut qu'on utilise des employés formateurs qui se sont volontairement inscrits sur la liste. L'employeur doit évaluer la façon dont il procèdera dans l'avenir.

[92]   Bien que la formation soit nécessaire, à moyen et long terme, il est difficile de prétendre qu'une session ne puisse être reportée de quelques semaines.

[93]   Les gestes posés par l'employeur à la fin mai et juin 2003, à l'égard des ex-formateurs, sans qu'il y ait d'évaluation du dossier et d'examen de la nécessité immédiate d'agir, risque d'être perçue comme une sanction à la remise de leur démission (retrait de la liste de volontaire) par les employés.

[94]   Dans de telles circonstances, les exigences de l'employeur face aux ex-formateurs, on pour effet de mettre ces derniers en position de devoir reconsidérer les démissions qu'ils avaient transmises suite au conseil de leur syndicat.

[95]   Compte tenu des circonstances de temps et de la non nécessité immédiate de tenir des sessions de formation, le geste de l'employeur a comme conséquence de confronter les ex-formateurs. Dans ces circonstances, le geste de l'employeur a l'effet de contrer le mot d'ordre syndical.

[96]   Je me dois de constater qu'à cette époque, le geste de l'employeur à l'égard des ex-formateurs, a eu pour effet de contrer l'avis du syndicat. Il a conséquemment constitué une ingérence dans les activités syndicales.

[97]   Contrairement à la situation touchant les équipes d'urgence et les groupes d'incendie, à l'égard de laquelle les arguments évoqués par l'employeur relativement à la nécessité immédiate et au risque quant à la sécurité permettent de réfuter les allégations d'ingérence formulées par le syndicat, aucune preuve ou prétention de cette nature ne peut être retenue en ce qui concerne la formation.

[98]   Par ailleurs, je ne peux rendre d'ordonnance permanente relativement aux gestes posés par l'employeur eu égard aux cours de formation. Après avoir examiné les diverses possibilités de dispenser des cours de formations, l'employeur pourrait alors en venir à la conclusion qu'il doit utiliser les employés ayant déjà travaillé comme formateurs. Mais cette décision devra s'appuyer sur des considérations opérationnelles valables.

[99]   La formation fait partie intégrante des mesures de sécurité. Bien que l'époque dans l'année, à laquelle elle doit avoir lieu, peut varier, il n'en demeure pas moins qu'il y a nécessité relative que la formation soit dispensée.

[100]   En conséquence, je rejette la plainte du syndicat, relativement à la transmission par l'employeur d'information sur le fond de pension, relativement aux directives sur l'utilisation du courriel ainsi qu'aux ordres concernant les équipes d'intervention d'urgence et les équipes d'incendie.

[101]   J'accueille partiellement la plainte relative aux cours de formation dans le sens suivant.

  • Je constate que, compte tenu des circonstances, des menaces de sanctions et du peu de nécessité d'agir immédiatement, les directives de l'employeur, à l'égard des responsables des cours de formation, en mai et à l'été 2003, on eu l'effet d'une ingérence dans les affaires du syndicat contrairement aux interdictions énoncées au paragraphe 8 (1) de la Loi et d'une contrainte à la liberté pour un fonctionnaire de participer à l'activité légitime du syndicat.

[102]   Je ne rends aucune ordonnance permanente, relativement aux gestes de l'employeur, compte tenu que ma décision réfère aux circonstances et à la façon dont les gestes ont été posés en mai et juin 2003.

Jean-Pierre Tessier,
commissaire

OTTAWA, le 21 juin 2004

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.