Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Détermination de l'unité de négociation - Demande de réexamen fondée sur l'article 27 de la LRTFP - L'Office national de l'énergie (ONE) a présenté une demande fondée sur l'article 27 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) relativement au réexamen de la structure actuelle de l'unité de négociation - L'ONE a proposé la création d'une seule unité de négociation pour favoriser des relations de travail saines et efficaces, obtenir une représentation satisfaisante des employés et correspondre au mode de classification actuel - à titre d'employeur distinct figurant à la partie II de l'annexe I de la LRTFP, l'ONE a demandé à la Commission de réexaminer une décision qu'elle a rendue en 1993 et qui a eu pour effet de créer, pour ses effectifs syndiqués, une structure regroupant deux unités de négociation - les agents négociateurs qui détiennent les accréditations émises en 1993 se sont opposés à cette demande, même s'ils ont reconnu que les descriptions des unités de négociation actuelles étaient problématiques - La Commission a rejeté le critère de réexamen des certificats d'accréditation d'unités de négociation proposé par l'AFPC, selon lequel il faut faire la preuve que des relations de travail défavorables existent réellement, parce qu'il était trop restrictif - la Commission a plutôt renvoyé à l'une de ses décisions antérieures dans l'affaire Forces canadiennes, Employés des Fonds non publics et Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, section locale 864 (125-18-78) où elle avait statué que le réexamen de demandes de fusion d'unités de négociation établies de longue date devait être effectué avec prudence et devait être étudié de manière isolée - la Commission a conclu que le critère de réexamen devait plutôt porter sur l'existence de changements importants rendant la structure actuelle insatisfaisante - la Commission a reconnu que des changements importants étaient survenus au sein de l'ONE depuis que la Commission avait réexaminé pour la dernière fois son cadre d'unités de négociation - l'organisme a modifié sa structure en 1996, mettant l'accent sur la prestation de services en fonction de secteurs d'activités, ce qui a mené à un recours fréquent à des équipes multidisciplinaires dont les membres proviennent des deux unités de négociation actuelles, une pratique qu'un témoin appelé par l'AFPC a qualifiée de révolutionnaire - le cadre de compétences établi par l'ONE est maintenant utilisé pour évaluer tous les postes sur le fondement de critères établis, et le processus d'évaluation a permis de montrer que de nombreux employés, sans égard à l'unité de négociation à laquelle ils appartiennent, partagent des habiletés, des compétences et des qualifications - une grande part des arguments présentés par les parties portait sur la question de savoir si le mode de classification de l'employeur était pertinent dans le cadre de la présente instance - la condition selon laquelle une structure d'unités de négociation doit correspondre au mode de classification établi par l'employeur est prévue à l'article 33 de la LRTFP, qui renvoie uniquement aux demandes d'accréditation fondées sur l'article 28 de la Loi - lorsqu'elle est appelée à réexaminer des certificats d'accréditation sous le régime de l'article 27, la Commission n'est pas tenue aux mêmes obligations législatives, en ce qui concerne le mode de classification de l'employeur, que dans le cas des demandes d'accréditation initiales fondées sur les articles 28 et 33 - Cependant, l'article 27 de la LRTFP n'exclut pas expressément le mode de classification comme étant un facteur que la Commission peut prendre en considération dans des demandes de cette nature - la Commission a conclu que, même si rien dans la LRTFP n'oblige la Commission à prendre en considération le mode de classification établi par l'employeur dans le cadre d'un réexamen fondé sur l'article 27, il était tout à fait logique de le faire dans le contexte des relations de travail dans la fonction publique fédérale - la Commission a tenu compte de la petite taille des deux unités de négociation actuelles l'unité de l'Alliance comptant approximativement 105 membres et celle de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) en comptant approximativement 145, ce qui fait, au total, 250 employés syndiqués - Il a aussi été souligné que tous les employés travaillent sous un même toit, dans un environnement de travail semblable et, de manière générale, aux mêmes heures - les conventions collectives diffèrent à certains égards, mais pas d'une manière qui est extrêmement importante, et les griefs déposés par le passé par les membres de l'AFPC et ceux de l'IPFPC révèlent l'existence là aussi d'une communauté d'intérêts - la Commission a conclu qu'une unité de négociation unique devrait remplacer les deux unités de négociation actuelles et que cette unité de négociation devrait inclure tous les employés de l'ONE qui sont syndiqués à l'heure actuelle - la Commission a donc ordonné la tenue d'un scrutin de représentation dans le cadre duquel les syndiqués seraient invités à indiquer s'ils souhaitaient que l'IPFPC ou l'AFPC les représente à titre d'agent négociateur. Demande accueillie.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2003-09-17
  • Dossiers:  125-26-101, 125-26-102
  • Référence:  2003 CRTFP 79

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

OFFICE NATIONAL DE L'ÉNERGIE
employeur - requérant

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA ET
INSTITUT PROFESSIONNEL DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

agents négociateurs - intimés

OBJET :  Demande présentée en vertu de l'article 27 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique


Devant:   Yvon Tarte, Président

Pour le requérant :   Me Stephen Bird, avocat

Pour l'intimée, l'Alliance de la Fonction publique du Canada :   Alain Piché

Pour l'intimée, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada :   James Bart


Audience tenue à Calgary (Alberta),
les 21, 22, 23 et 24 janvier et 8 et 9 avril 2003.


La demande

[1]   Le 15 mai 2002, l'Office national de l'énergie (l'ONE) a déposé une demande en vertu de l'article 27 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) en vue de faire réexaminer les certificats d'accréditation d'unités de négociation existantes.

[2]   Dans sa demande, l'ONE propose que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la CRTFP ou la Commission) détermine qu'une seule unité de négociation doit être créée pour favoriser le maintien de relations de travail saines et efficaces et permettre une représentation satisfaisante des employés, et que cette unité corresponde au mode de classification actuel de l'employeur.

[3]   Les agents négociateurs représentant les deux unités de négociation de l'ONE, à savoir l'Alliance de la Fonction publique du Canada (l'AFPC) et l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l'IPFPC ou l'Institut), se sont tous deux opposés à la demande, affirmant qu'il n'y avait aucune raison impérieuse ni aucune preuve convaincante justifiant la modification d'une structure d'unités de négociation qui donne de bons résultats depuis sa mise en place par la CRTFP en 1993 (voir les dossiers de la Commission 142-26-297 à 301).

[4]   De nombreux témoins ont été entendus et une documentation volumineuse a été déposée au cours des journées d'audience qui se sont tenues à Calgary (Alberta), en janvier et en avril 2003. Étant donné la nature de l'instance, la période sur laquelle l'audience s'est étalée et la quantité de documents déposés, la Commission a demandé aux parties de déposer des observations écrites.

La preuve

Pour l'ONE, requérant

[5]   Valerie Katarey est chef de secteur, Services généraux, à l'ONE. Son curriculum vitæ a été déposé sous la cote E-2, onglet 1. Mme Katarey a décrit en détail la nature du travail qu'elle accomplit pour l'ONE, ainsi que le mandat et les responsabilités de l'organisme. Elle a reconnu plusieurs documents, dont le Rapport annuel, les Rapports sur les plans et les priorités et les Rapports ministériels sur le rendement.

[6]   L'ONE compte environ 290 employés, qui travaillent tous sous un même toit, à Calgary (Alberta).

[7]   Au cours des cinq dernières années, l'ONE, qui avait auparavant pour tâche de réglementer ce secteur d'activités d'une manière très spécifique, a laissé place à un processus de réglementation axé sur les objectifs dans le cadre duquel le secteur d'activités doit élaborer les plans détaillés qu'il entend suivre pour atteindre les objectifs établis par l'ONE.

[8]   Depuis 1996, l'ONE a procédé à sa propre restructuration dans le but d'être moins hiérarchique. Selon la nouvelle structure, les employés travaillent au sein d'équipes qui regroupent souvent des membres des deux unités de négociation.

[9]   Avant que l'ONE ne devienne un employeur distinct en 1993, ses employés étaient répartis dans 26 groupes professionnels représentés par cinq agents négociateurs. Au mois de mai 1993, l'ONE a mis au point son propre mode de classification, qui est entré en application au mois de décembre de la même année. Le mode de classification de l'ONE (pièce 2, onglet 8), qui a été mis en application dans son ensemble en 1996, repose sur les quatre facteurs neutres qui sont reconnus par la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP).

[10]   La pièce E-2, onglet 9, renferme une liste de tous les employés de l'ONE par ordre de niveaux (de ONE 1 à ONE 16) ainsi que les classifications du Conseil du Trésor qui se rattachaient auparavant à leur poste. C'est au sein des niveaux ONE 7, 8 et 9 que l'on retrouve le plus grand nombre de chevauchements entre unités de négociation.

[11]   Depuis quelques années, les agents des ressources humaines de l'ONE ne connaissent plus l'ancien mode de classification du Conseil du Trésor, sur lequel les certificats d'accréditation accordés par la CRTFP en 1995 sont fondés. Les différences entre l'ancien mode de classification du Conseil du Trésor et le nouveau mode mis de l'avant par l'ONE ont engendré des difficultés au niveau de la répartition de nouveaux postes dans les unités de négociation telles qu'elles sont structurées à l'heure actuelle. Citons en exemple les deux postes de spécialiste des raffineries de gaz qui font l'objet, devant la CRTFP, d'une demande visant à déterminer l'unité de négociation à laquelle ils appartiennent.

[12]   L'ONE a récemment établi un cadre de compétences qui s'applique à la plupart des postes (pièce E-3). Ce nouveau cadre, à l'égard duquel le travail est achevé dans une proportion de 90 %, ne tient pas compte des frontières entre les unités de négociation. Différents postes faisant partie de différentes unités de négociation peuvent être assortis des mêmes exigences en matière de compétences. Le nouveau cadre permet à l'ONE de modeler la formation et le perfectionnement en fonction du classement par familles d'emplois.

[13]   L'existence de certificats d'accréditation d'unités de négociation à l'ONE signifie que des postes classifiés au même niveau sont assujettis à différentes échelles de traitement. Les tentatives visant à harmoniser ces écarts à la table des négociations se sont révélées vaines. À l'heure actuelle, les deux unités de négociation ont choisi de s'en remettre à l'arbitrage obligatoire pour résoudre leur différend.

[14]   Le témoin juge lourde la structure actuelle des unités de négociation, mais celle-ci n'a jamais empêché l'ONE d'atteindre les buts et les objectifs qui lui sont imposés par la loi. L'inclusion du groupe PE dans l'unité de négociation en 1993 ne pose plus aucune difficulté, puisque tous les employés qui travaillent dans le secteur des ressources humaines ont depuis été exclus des négociations collectives.

[15]   Avant le dépôt de la présente demande, l'ONE avait songé à maintenir le statu quo, à clarifier les certificats d'accréditation actuels et à demander la création d'une seule unité de négociation. Les difficultés qui continuent de se poser dans l'attribution de nouveaux postes aux unités de négociation actuelles ainsi que la nécessité de rationaliser ses activités ont convaincu l'ONE de présenter une demande en vue de la création d'une unité de négociation unique.

[16]   Amy Campbell, dont le curriculum vitæ figure à l'onglet 1 de la pièce E-6, est consultante en relations de travail. Ses services ont été retenus par l'ONE en décembre 2001 pour examiner la structure des unités de négociation et formuler des recommandations à cet égard. Elle avait auparavant effectué un travail semblable pour d'autres organismes.

[17]   Pour mieux comprendre l'ONE et à titre de préparation, Mme Campbell a passé en revue bon nombre de documents, dont le mode de classification et les conventions collectives antérieures et actuelles. Elle a examiné également la jurisprudence pertinente, plus particulièrement sur la question de la communauté d'intérêts.

[18]   Sur ce dernier point, elle s'est attardée surtout sur les conditions d'emploi, les habiletés, la source de travail ainsi que la cohérence et l'interdépendance fonctionnelles.

[19]   En examinant le fonctionnement de l'ONE, qui est une organisation de taille modeste dont les employés hautement qualifiés possèdent des connaissances spécialisées, Mme Campbell s'est tout de suite dit qu'une unité de négociation unique serait peut-être habile à négocier collectivement. À un niveau plus élevé, la structure de l'organisation repose sur l'établissement d'équipes multidisciplinaires qui ne fait aucune distinction marquée au niveau des unités de négociation.

[20]   Pour ainsi dire tout le travail qui est accompli à l'ONE est spécialisé et nécessite recherche et analyse. Le travail est exécuté principalement dans des bureaux, en fonction d'horaires de travail ordinaires, au moyen d'un équipement de bureau normal, comme des ordinateurs. Tous les employés travaillent dans le même immeuble à Calgary.

[21]   Les descriptions de travail et les organigrammes de l'ONE révèlent, d'une part, un degré élevé d'interdépendance fonctionnelle, de séries communes d'habiletés et de similarité des tâches et, d'autre part, très peu de distinctions au titre des frontières entre les unités de négociation.

[22]   Mme Campbell estime que le mode de classification de l'ONE et les descriptions de travail pourraient rendre difficile, dans certains cas, l'attribution d'emplois à l'une ou l'autre unité de négociation.

[23]   Elle s'est penchée sur plusieurs postes appartenant à différentes directions et en est arrivée à la conclusion que nombre des titulaires de postes rattachés à l'une ou l'autre unité de négociation exécutaient des tâches semblables et faisaient partie des mêmes équipes.

[24]   Son examen des conventions collectives l'a amenée à conclure que les contrats de travail ne sont pas sensiblement différents, et que les différences se retrouvent habituellement au niveau du quantum et non de la substance. En ce qui concerne la communauté d'intérêts, les deux plus récentes conventions collectives prévoient, dans la plupart des cas, des avantages semblables, voire identiques. Bien qu'il existe des différences, plus particulièrement dans le domaine de la Politique sur le réaménagement des effectifs, ces différences ne sont pas importantes.

[25]   Si l'on se fie aux griefs qui ont été déposés par le passé par les membres des deux unités de négociation, rien n'indique qu'il existe une distinction au niveau de la communauté d'intérêts.

[26]   Se fondant sur les résultats de sa recherche et de son analyse, Mme Campbell en est arrivée à la conclusion que la seule solution logique consistait à créer une unité de négociation unique; c'est ce qu'elle a recommandé à son client, l'ONE.

[27]   M. Bart a reconnu, au cours du contre-interrogatoire de Mme Campbell, que cette dernière avait présenté [Traduction] « un dossier convaincant à l'appui de la création d'une unité de négociation unique » dans l'hypothèse où, en l'espèce, il faudrait « partir de zéro ».

[28]   Bien que la révision des certificats d'accréditation actuels ne soit pas impossible, elle représenterait un véritable défi et continuerait probablement de faire fi de la communauté des intérêts des employés.

[29]   M. Byron Goodall, dont le curriculum vitæ a été déposé sous la cote E-8, est chef de secteur, Gestion de l'information, pour l'ONE. Il a expliqué en détail le travail qu'effectue sa section, dont les équipes offrent des services, des conseils et un appui à d'autres unités. Le travail de l'ONE, dans tous les secteurs, est accompli par des équipes largement intégrées et interdépendantes.

[30]   M. Goodall a souligné que Mme Greentree, qui a témoigné pour l'AFPC dans la demande de 1993 (pièce E-2, onglet 11), fait maintenant partie de l'unité de négociation de l'IPFPC.

[31]   Les employés qui travaillent dans son secteur se retrouvent tous sous le même toit et sont assujettis à des conditions normales (à l'exception de M. Kane, qui travaille à l'atelier d'impression). Ils ont des heures de travail normales, effectuent des heures supplémentaires à l'occasion, et sont très rarement appelés à travailler sur le terrain.

[32]   John McCarthy, dont le curriculum vitæ figure à la pièce E-10, onglet 1, est le chef du Secteur des opérations à l'ONE.

[33]   M. McCarthy a présenté un vaste exposé des fonctions qu'assument les employés de sa section. Il a signalé plusieurs cas où des employés de son groupe, appartenant à l'une ou l'autre unité de négociation, avaient travaillé ensemble au sein d'une même équipe. Ses employés interagissent également beaucoup avec d'autres équipes rattachées à d'autres secteurs. Dans ces cas-là également, ces autres équipes regroupent des employés des deux unités de négociation. Tous les processus de l'ONE sont très intégrés.

[34]   Les membres des équipes qui sont des agents d'inspection appartiennent aux deux unités de négociation. Pour se pencher sur des questions de sécurité et sans égard à l'unité de négociation à laquelle il appartient, un employé doit comprendre les mêmes normes industrielles ou réglementaires et être en mesure de les appliquer.

[35]   Tous les employés appartenant au secteur de M. McCarthy travaillent à Calgary, au siège de l'ONE. Leurs heures de travail, le travail qu'ils effectuent sur le terrain et les possibilités de formation qui leur sont offertes sont les mêmes, sans égard à l'unité plus large à laquelle ils appartiennent. La grève qui a eu lieu en 1999 n'a eu aucun effet significatif sur le travail de ses équipes, mais elle a affecté le moral des troupes.

[36]   Terrance Rochefort, dont le curriculum vitæ a été déposé sous la cote E-11, est le chef du Secteur des produits. Ses employés travaillent au sein d'équipes qui regroupent des membres des deux unités de négociation. Ces équipes travaillent aussi avec des équipes provenant d'autres secteurs dans le cadre du système intégré d'exécution des opérations de l'ONE. Les membres de ses équipes travaillent dans des bureaux, en fonction d'heures de travail normales, et effectuent à l'occasion des heures supplémentaires.

[37]   M. Rochefort croit que l'existence de deux unités de négociation a bel et bien empêché l'ONE d'atteindre ses objectifs.

[38]   Brenda Kenny, dont le curriculum vitæ figure à la pièce E-12, est la chef du Secteur des demandes de l'ONE. Comme c'est le cas dans tous les autres secteurs d'activités, ses employés font partie d'équipes qui regroupent des membres des deux unités de négociation. Ces équipes travaillent en étroite collaboration avec les équipes qui proviennent des autres secteurs.

[39]   Le travail de l'ONE est intégré à une échelle beaucoup plus grande qu'il ne l'était il y a six ans.

[40]   Avant la réorganisation de 1996, le travail à l'ONE était en large partie fondé sur les connaissances des employés. Les équipes ou les unités étaient établies en fonction de connaissances particulières et les fonctions étaient compartimentées. Depuis 1996, l'ONE a atteint un niveau maximal d'intégration. Les employés, quelles que soient l'unité de négociation à laquelle ils appartiennent et leurs connaissances, travaillent ensemble. Aujourd'hui, l'apprentissage est important pour tous les employés et pour permettre aux deux unités de négociation de mieux intégrer rôles et fonctions. Le travail en équipe est maintenant axé sur une approche holistique.

[41]   Les employés du secteur de Mme Kenny travaillent en général des heures normales, dans des bureaux. Il peut leur arriver de travailler sur le terrain, le plus souvent avec des agents d'inspection.

Pour l'AFPC

[42]   Guy Hamel, dont le curriculum vitæ a été versé en preuve sous la cote A-3, est agent de la réglementation pour l'ONE, où il travaille depuis vingt-neuf ans et où il a occupé divers postes. Il est le président de la section locale de l'AFPC.

[43]   L'ONE a toujours recouru, pour exécuter ses projets, à la formation de groupes de travail. En 1996, ces groupes sont devenus multidisciplinaires.

[44]   La plupart des membres de l'unité de négociation de l'AFPC effectuent du travail de soutien administratif, tandis que les membres de l'unité de négociation de l'IPFPC sont des professionnels. L'ONE favorise les professionnels, ce qui est très frustrant pour le groupe de soutien administratif. En outre, lorsqu'il est à la table des négociations, l'employeur se comporte de manière différente avec les deux unités de négociation.

[45]   Les membres de l'unité de négociation de l'AFPC ont des intérêts différents de ceux des membres de l'unité de négociation de l'IPFPC. Ils sont plus intéressés à la sécurité d'emploi à l'ONE que les professionnels, qui peuvent sans difficulté se trouver un emploi ailleurs.

[46]   Les superviseurs de M. Hamel aimeraient qu'il assume davantage de responsabilités en gestion de projet (pièce E-13), mais ce dernier ne croit pas que des occasions réelles existent à cet égard.

[47]   S'il n'y avait qu'une seule unité de négociation à l'ONE, la majorité que constitue l'IPFPC écraserait les membres de l'AFPC. M. Hamel craint que certaines questions chères à l'AFPC ne soient pas abordées comme il se doit au sein d'une unité de négociation unique, mais il ne possède aucune preuve que l'AFPC ou l'IPFPC serait alors incapable de représenter les intérêts d'un groupe minoritaire. M. Hamel ignorait l'existence du devoir de l'agent négociateur, qui lui est imposé par la loi, de représenter ses membres équitablement.

[48]   Ann Shalla, dont le curriculum vitæ figure à la pièce A-9, est spécialiste des domaines techniques et travaille pour l'ONE depuis 1980. Elle est à l'heure actuelle vice-présidente de la section locale de l'AFPC, et elle a, par le passé, occupé d'autres postes au sein du syndicat.

[49]   Elle a comparu devant la Commission en 1993, pour le compte de l'AFPC, dans le cadre de la demande de restructuration initiale. Mme Shalla adhère encore à la plupart des opinions qu'elle avait alors exprimées. Elle estime que les membres des deux syndicats ont des intérêts qui diffèrent les uns des autres et que les professionnels [Traduction] « jouissent de l'écoute de la direction ».

[50]   L'établissement d'un cadre de compétences à l'ONE n'a eu aucune incidence sur son poste. Seul un retour à l'école lui permettrait d'espérer obtenir des promotions.

[51]   Le fait d'être rattachée à l'AFPC lui garantit une représentation adéquate de ses intérêts. Elle n'a pu dire avec certitude que l'un ou l'autre agent négociateur serait en mesure de représenter correctement les intérêts divers d'une unité de négociation unique, mais elle a affirmé qu'à son avis, l'AFPC ferait probablement un meilleur travail.

[52]   Mme Shalla a occupé des postes qui appartiennent à l'unité de négociation de l'IPFPC.

[53]   George Kealy, qui est maintenant à la retraite et dont le curriculum vitæ figure à la pièce A-10, a travaillé pour l'ONE pendant 33 ans, avant de prendre sa retraite en 2001. Il est titulaire d'un diplôme universitaire. De 1991 à 2001, il a occupé un poste d'inspecteur technique à l'ONE. Tout au long de sa carrière, il a été membre de l'AFPC. Depuis sa retraite, il reste en contact avec d'anciens collègues et il a agi à titre de représentant dans le cadre de quelques griefs.

[54]   De 1993 jusqu'à sa retraite, il était président de la section locale de l'AFPC. M. Kealey a dit avoir le [Traduction] «sentiment profond » que les intérêts de l'IPFPC seraient différents de ceux de l'AFPC. Une unité de négociation unique permettrait aux professionnels de « dominer ».

[55]   La réorganisation mise de l'avant en 1996, qui a mené à un travail d'équipe intégré, était [Traduction] « presque révolutionnaire ». D'organisation cloisonnée en fonction des diverses disciplines qu'il était en 1993, l'ONE est devenu une organisation privilégiant le travail d'équipe, où des employés appartenant à toutes les disciplines et aux deux unités de négociation se sont réunis pour travailler ensemble dans le cadre de différents projets.

[56]   Comme les professionnels aspirent à assumer des responsabilités liées à la gestion et sont mus par une éthique du travail différente de celle qui anime le personnel de soutien, il est peu probable que, au sein d'une unité de négociation unique, ils défendent aussi bien que l'AFPC la cause des minorités.

[57]   Brent Storey a détenu plusieurs postes à l'ONE depuis 1983. Il travaille à titre d'enquêteur, d'agent d'inspection et d'agent de santé et de sécurité.

[58]   À son avis, les concepts du travail d'équipe ont peu changé depuis 1993. Bien qu'il ne soit pas membre de la direction syndicale, M. Storey a pris part à quelques rondes de négociations collectives. Il estime que les intérêts des unités de négociation de l'IPFPC et de l'AFPC sont différents. Si l'AFPC est plus activiste et plus encline à lutter sur certains enjeux, l'IPFPC paraît être plus attiré par l'argent et disposé à renoncer à certains avantages pour obtenir plus d'argent.

[59]   À l'instar de George Kealy, M. Storey a assuré la formation et l'encadrement de jeunes ingénieurs. Dans le cadre de son travail, il doit connaître les normes d'ingénierie et les appliquer.

[60]   Bien qu'il n'ait jamais été membre d'une unité de négociation regroupant des professionnels et des employés de soutien, il croit qui ni l'AFPC ni l'IPFPC n'est en mesure de représenter l'unité correctement.

[61]   Dave Jackson, dont le curriculum vitæ a été déposé sous la cote A-12, est le représentant régional de l'AFPC. Il travaille à Calgary.

[62]   Bien que les membres de l'AFPC qui travaillent à l'ONE aient choisi le recours à l'arbitrage obligatoire pour leur prochaine ronde de négociations, ils se sentent habilités par leur dernière grève, qui a eu lieu en 1999. Les membres de l'AFPC ont beaucoup d'occasions d'exprimer leurs opinions dans le processus de négociations collectives.

[63]   Le témoin croit, contrairement à Amy Campbell, que les différences entre les conventions collectives conclues par l'AFPC et l'IPFPC sont marquées. D'après M. Jackson, toute différence au niveau des avantages est importante et donc significative. L'harmonisation des deux conventions collectives entraînera inévitablement une réduction des avantages dont jouissent les membres de l'AFPC.

Contre-preuve de l'ONE

[64]   Avec le consentement des parties, Me Bird a indiqué que la mise en place d'une nouvelle fonction de vérification, mentionnée dans la documentation, pour les postes de spécialiste des raffineries de gaz, sera retardée au-delà du mois d'avril 2003.

Arguments

[65]   Les parties se sont échangé leurs arguments écrits, qui sont résumés ci-après.

Pour l'ONE

PARTIE I : A. Principes de droit applicables aux demandes de réexamen de la structure d'unités de négociation

[66]   Compte tenu de la jurisprudence actuelle, on peut dire que les principes suivants régissent les demandes de réexamen de la structure d'unités de négociation :

[Traduction]

  1. Il doit exister de bonnes raisons, sur le plan des relations de travail, d'effectuer le réexamen; le simple allégement administratif ne suffit pas.

  2. L'on reconnaît que les emplois, les secteurs d'activités et les organisations changent et que, en conséquence, les rapports au niveau des négociations collectives doivent peut-être être modifiés pour s'adapter à cette évolution.

  3. L'accès à la syndicalisation favorise les unités de négociation de plus petite taille. Une fois cet objectif atteint, il existe moins de raisons de déroger à la présomption générale de la Commission en faveur d'unités de négociation plus importantes qui englobent tous les employés.

  4. Le requérant n'est pas tenu de démontrer que la structure actuelle ne fonctionne pas. Il n'a qu'à démontrer qu'elle ne permet pas le maintien de relations de travail saines.

  5. Une demande de réexamen sera accueillie s'il est établi que la structure de l'unité de négociation en cause ne satisfait plus aux besoins des employés et de l'employeur en matière de relations de travail.

[67]   L'ONE estime que sa demande doit être accueillie pour quatre raisons.

[68]   Premièrement, la description des unités de négociation actuelles est mal fondée, puisqu'elle repose sur des désignations faites par le Conseil du Trésor qui n'existent plus suivant le mode de classification établi par l'ONE. Pour cette raison, les certificats accordés par la Commission en 1993 contenaient des anomalies importantes qui, entre autres choses, créent des chevauchements entre les unités de négociation.

[69]   Deuxièmement, la décision de la Commission, en 1993, de créer des unités de négociation regroupant, dans un cas, les professionnels et, dans l'autre cas, les employés de soutien, était peu avisée en ce qui concerne les relations de travail. Lorsqu'elle a créé ces deux unités, la Commission n'a pas pris en considération l'impact de sa décision sur les relations de travail, le risque d'une « surenchère » au niveau des revendications syndicales, la similarité des conditions d'emploi et les pratiques inefficaces et coûts supplémentaires engendrés par la multiplicité des rondes de négociations collectives. La décision de la Commission reposait sur des hypothèses qui n'avaient jamais existé, ou qui ont changé et qui n'existent plus à l'ONE.

[70]   Troisièmement, des changements fondamentaux sont intervenus au sein de l'ONE depuis la décision de 1993. Une nouvelle structure organisationnelle a été mise en place en 1996; organisation auparavant hiérarchique, l'ONE mène maintenant ses activités en fonction de secteurs d'activités, ce qui signifie qu'il met aujourd'hui davantage l'accent sur la mise sur pied d'équipes multidisciplinaires et interfonctionnelles composées d'employés qui proviennent des deux unités de négociation. Appelé à témoigner pour le compte de l'AFPC, M. Kealy a qualifié ces changements de révolutionnaires.

[71]   L'ONE a mis en place un cadre de compétences qui révèle qu'un grand nombre d'employés sont assujettis à des exigences semblables en matière de compétences, de connaissances et d'habiletés.

[72]   En outre, les agents de santé et de sécurité, chargés de l'application et de l'exécution des normes établies par le Code canadien du travail dans le secteur du pétrole et du gaz, proviennent des deux unités de négociation actuelles.

[73]   Quatrièmement, la décision de 1993 est illégale. La structure actuelle des unités de négociation ne correspond pas au mode de classification établi par l'employeur, contrairement à l'article 33 de la LRTFP, ni ne respecte les exigences en matière d'équité salariale prévues par la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). L'ONE a été incapable d'établir une échelle de traitement unique dans le cadre de négociations collectives avec deux unités de négociation. À l'heure actuelle, si on ne peut dire que l'ONE manque aux obligations que lui impose la LCDP, c'est simplement du fait que ni l'une ni l'autre unité de négociation n'est formée en majorité de femmes. Enfin, les employés de la section des ressources humaines, qui n'étaient pas représentés avant 1993, ont été inclus dans l'unité de négociation, « tout autre » bien qu'aucune demande de cette nature n'ait été faite par l'une ou l'autre partie à la demande initiale.

PARTIE II : Déterminer la structure des unités de négociation pour l'ONE

[74]   L'ONE exige d'une structure d'unités de négociation qu'elle reconnaisse sa propre structure organisationnelle et la diversité de son rôle, de ses fonctions et de son mandat, de manière à lui permettre d'atteindre ses objectifs sur le plan des ressources humaines tout en répondant de manière satisfaisante aux préoccupations de ses employés en matière de représentation. La Commission devrait, dans sa décision en l'espèce, déterminer la structure de négociation qui répond le plus aux besoins et de l'ONE et de ses employés.

[75]   Depuis 1993, la Commission a conclu que des employés dont les tâches sont très différentes ont une communauté d'intérêts suffisante pour former une unité de négociation unique aux fins des négociations collectives. En plus de tenir compte de facteurs se rapportant à la communauté d'intérêts, la Commission doit choisir une structure d'unités de négociation qui favorise la tenue de négociations collectives saines.

[76]   En raison de la taille de l'ONE, toute unité de négociation devrait compter un nombre suffisant de membres pour être en mesure de négocier efficacement. La preuve établit que, du point de vue des relations de travail, il n'existe aucune différence sensible dans les conventions collectives conclues par l'IPFPC et l'AFPC.

[77]   Pour maintenir et favoriser des relations de travail saines et efficaces, la Commission devrait viser à assurer l'équilibre entre les intérêts, d'une part, de l'ONE et, d'autre part, de ses employés. L'ONE recherche l'efficience administrative ainsi que la promotion de conditions d'emploi communes, de l'avancement professionnel et de la mobilité.

[78]   La preuve produite par l'AFPC n'a pas permis de mettre en doute la communauté d'intérêts manifeste ou d'établir q'une unité de négociation unique correspondant au mode de classification établi par l'ONE ne permettrait pas aux employés d'obtenir une représentation satisfaisante. Dans l'hypothèse la plus optimiste, la preuve de l'AFPC était impressionniste. Si l'on se fie aux résultats du sondage mené auprès des employés de l'ONE (pièce A-6), les employés en majorité ne partagent pas les opinions exprimées par les témoins qui ont été appelés par l'AFPC (qui étaient tous des représentants syndicaux ou des membres de l'équipe de négociation).

PARTIE III : Décrire une structure d'unités de négociation qui maintient son intégrité

[79]   Les conseils canadiens des relations de travail ont traditionnellement favorisé l'établissement d'unités de négociation importantes qui regroupent l'ensemble des employés. Par la présente demande, l'ONE cherche à atteindre une efficacité administrative que permet une structure organisationnelle simplifiée où les niveaux hiérarchiques sont éliminés.

[80]   Le Conseil canadien des relations du travail a dit ceci dans l'affaire Canadien Pacifique, [1976] 1 C.L.R.B.R. 361 (CCRT) :

En règle générale, l'unité de négociation idéale est celle qui est constituée de tous les employés d'un employeur donné qui ont droit à la négociation collective. Elle est idéale parce qu'elle assure la réalisation de deux des objectifs fondamentaux mentionnés ci-dessus: c'est celle qui nuit le moins à l'employeur, qui permet le mieux de conclure une convention collective et qui protège le plus tous les employés d'un employeur donné qui ont droit à la négociation collective.

[81]   La proposition des agents négociateurs de maintenir des unités distinctes pour les employés professionnels et les employés de soutien est inacceptable. Les employés devraient tous faire partie d'une même unité, sauf s'il existe une nette démarcation, au niveau de la communauté d'intérêts, entre les professionnels et les employés de soutien. Étant donné que l'ONE privilégie largement le travail en équipe, il n'y a plus aucune raison de répartir les employés en fonction des lignes de démarcation actuelles.

Partie IV : Conclusions

[82]   Pour tous les motifs qui précèdent, l'ONE propose à la Commission de déterminer qu'il y a lieu de créer une seule unité de négociation, composée des employés qui sont représentés aux termes des ordonnances d'accréditation existantes. Cette unité correspondrait à son mode de classification, faciliterait le maintien de relations de travail saines et efficaces, répondrait aux enjeux actuels et à venir en matière d'équité salariale, corrigerait la situation des agents des ressources humaines et permettrait une représentation satisfaisante de tous les employés concernés.

[83]   L'ONE propose de décrire dans les termes suivants cette unité de négociation unique :

[Traduction]

Tous les employés de l'Office national de l'énergie, à l'exception des dirigeants, des employés qui prennent part à la planification, à l'exécution et au contrôle d'avis stratégiques sur les ressources humaines ou les services organisationnels ou qui donnent de tels avis, et toute autre personne occupant un poste de direction ou un poste de confiance.

[84]   À l'appui de sa demande, l'ONE a cité les décisions suivantes :

  1. Centre de la sécurité des télécommunications, Ministère de la Défense nationale, [2001] C.R.T.F.P.C. no 9; en ligne : QL.

  2. Canada (Forces canadiennes, Employés des Fonds non publics), [1998] CRTFPC no 99; en ligne : QL.

  3. Énergie atomique du Canada limitée, (1995), 99 di 37 (C.C.R.T.); en ligne : QL.

  4. Purolator Courier Ltd. (1993), 19 C.L.R.B.R. (2d) 84 (C.C.R.T.).

  5. Radio Acadie Ltée. (1994), 94 di 128 (C.C.R.T.); en ligne : QL.

  6. Office national de l'énergie, [1993] C..R.T.F.P.C. no 183; en ligne : QL.

  7. Office national de l'énergie, Alliance de la Fonction publique du Canada [inédit], 29 décembre 1993 (CRTFP).

  8. Commission de la capitale nationale, [1994]. no 112; C..R.T.F.P.C. en ligne : QL.

  9. Groupe Communication Canada, [1994] C..R.T.F.P.C.. no 46; en ligne : QL.

  10. Société canadienne des postes [1988] 19 CLRBR (NS) 129 (CCRT).

  11. Parcs Canada, [2000] C..R.T.F.P.C. no 72; en ligne : QL.

  12. Usarco, (1967) O.L.R.B. Rep. 526 (C.R.T.O.).

  13. Sick Children's Hospital (1985), O.L.R.B. Rep. February 266 (C.R.T.O.).

  14. Mississauga Hydro-Electric Commission, [1993] O.L.R.B. Rep. June 523; en ligne : QL.

  15. Musée canadien des civilisations [1992] 87 di 185 (C.C.R.T.); en ligne : QL.

  16. Canadien Pacifique, [1976] 1 C.L.R.B.R. 361 (CCRT); en ligne : QL.

  17. Niagara Regional Health Unit [1975] O.L.R.B. Rep. April 376.

  18. Jewish Vocational Services, [1977] O.L.R.B. Rep. 754.

  19. Bell Canada (1976), 19 di 117 (C.C.R.T.).

  20. Canadian General Electric Co., [1979] O.L.R.B. Rep. 169.

Pour l'AFPC

Partie I : Principes de droit applicables à une demande de réexamen par l'Office national de l'énergie

[85]   L'AFPC – intimée – s'oppose à la demande de l'ONE. Très peu de choses ont changé de manière significative depuis que la Commission a entendu les observations détaillées au cours des audiences d'accréditation tenues en 1993. Ni le mandat, ni les activités, ni la taille de l'ONE n'ont changé de manière appréciable depuis ce temps.

[86]   En l'espèce, aucune preuve présentée à la Commission ne permet d'établir que les deux agents négociateurs ne jouissent plus de l'appui des membres qu'ils représentent.

A : Principes de droit applicables au réexamen des décisions de la Commission

[87]   Dans le dossier de la Commission 125-2-41, la Commission a exposé en des termes clairs la norme qui doit être appliquée dans le cadre d'un réexamen effectué sous le régime de l'article 27 :

Selon la Commission, l'article 25 [ aujourd'hui l'article 27]   ne vise pas à permettre à une partie qui a été déboutée de faire valoir à nouveau sa thèse, mais il a plutôt pour objet de donner à la Commission la possibilité de réexaminer une décision lorsque les circonstances ont changé, ou pour permettre à une partie de présenter de nouveaux éléments de preuve ou de nouveaux arguments qu'elle ne pouvait raisonnablement avancer à l'audition originale ou encore lorsqu'il existe d'autres motifs de révision impérieux. Permettre à la partie perdante d'étayer ou de reformuler des arguments qui ont déjà été examinés et tranchés serait non seulement incompatible avec la nécessité de mettre un terme aux procédures mais également injuste et fastidieux pour la partie qui a eu gain de cause.

[88]   Dans les affaires qui portent sur le réaménagement d'unités de négociation, le requérant doit s'acquitter d'une charge très lourde. Suivant l'interprétation, par l'employeur, de ce que constitue cette charge dans la présente affaire, il suffit simplement d'établir qu'il existe, au niveau des relations de travail, une raison qui justifie un changement de la structure existante. L'employeur établit à son intention un critère qui n'est pas très exigeant. Il est clair que la jurisprudence propose une norme beaucoup plus élevée. L'employeur doit démontrer l'existence d'un préjudice actuel et grave sur le plan des relations de travail. Il ne suffit pas de dire qu'une nouvelle structure serait plus efficace pour l'employeur ou même qu'elle pourrait peut-être être plus efficiente.

[89]   La décision que la Commission a prise en 1993 a donné lieu à une décennie de stabilité dans les relations de travail. Il s'ensuit que des raisons impérieuses doivent exister pour justifier l'intervention extraordinaire que demande l'ONE. L'AFPC soutient ce qui suit :

[Traduction]

  1. Le requérant doit pouvoir établir que des circonstances nouvelles engendrent des problèmes continus et graves qui démontrent que la structure des unités de négociation n'est pas viable et nécessitent l'intervention de la Commission;

  2. Le requérant doit démontrer à la satisfaction de la Commission que les intérêts des employés seraient servis par le changement qu'il demande;

  3. Une demande de réexamen ne constitue pas une nouvelle demande d'accréditation et ne devrait pas être abordée sous cet angle;

  4. Chaque demande doit être examinée en fonction des faits qui lui sont propres et en vue de favoriser le maintien de relations de travail stables;

  5. Les demandes de réexamen d'unités de négociation ne devraient pas constituer un moyen pour une partie de rechercher un avantage stratégique dans le processus de négociation ou de faire avancer des objectifs au niveau des négociations;

  6. Les parties à une instance doivent pouvoir tenir pour définitives, dans une certaine mesure, les décisions de la Commission en matière d'accréditation et de relations de travail. Le processus de réexamen ne devrait pas permettre un nouvel examen d'une décision à moins que la partie puisse démontrer l'existence de faits nouveaux qui n'auraient pu raisonnablement être présentés lors de l'audience initiale.

[90]   L'AFPC estime que l'ONE n'a pas satisfait à ces critères.

[91]   L'employeur a déclaré dans ses observations que la décision de 1993 de la Commission était illégale. Mais il fait ainsi fi du dossier et tente de substituer ses opinions aux conclusions de la Cour fédérale, qui a maintenu cette décision.

B et C : Description « non valable » des unités de négociation

[92]   La décision de la Commission qui remonte à 1993 devait avoir pour effet d'accréditer une unité de négociation composée de professionnels et une unité de négociation composée d'employés de soutien. La logique établie de cette décision était fondée sur la preuve produite, la culture du lieu de travail, l'historique des négociations collectives et la perception qu'avaient certains employés de soutien que leurs intérêts en matière de négociations étaient distincts de ceux des professionnels.

[93]   L'ONE désapprouve fortement le fait que les certificats d'accréditation rédigés par la Commission en 1993 renvoyaient aux normes professionnelles élaborées par le Conseil du Trésor. Or, cela était approprié et efficace. En effet, on ne peut faire abstraction du fait que les employés de l'ONE provenaient de la fonction publique fédérale centrale et que l'ONE, à titre d'employeur distinct, continue de mener ses activités au sein de la famille des organismes fédéraux.

D. Signaler des changements fondamentaux

[94]   L'employeur a invoqué trois changements, survenus depuis 1993, qu'il qualifie de fondamentaux. Ils sont a) la nouvelle structure organisationnelle mise en place en 1996-1997; b) l'établissement d'un cadre de compétences; et c) la prise en charge de responsabilités sous le régime de la partie II du Code canadien du travail. L'AFPC fait valoir que la preuve présentée à la Commission sur ces trois volets ne permet pas d'établir qu'il existe un préjudice au niveau des relations de travail.

[95]   La demande de l'ONE dans la présente affaire a été déposée cinq ans après la réorganisation de 1996. On peut difficilement comprendre comment les conséquences des changements apportés en 1996 ne sont devenues un enjeu pour l'ONE et la justification première de la présente demande que cinq ans plus tard.

[96]   La preuve établit que les employés travaillaient en équipes ou en groupes de travail de projet avant 1996 et qu'ils ont maintenu cette approche par la suite. Il n'y a aucune preuve que cette méthode a changé sensiblement par suite de la réorganisation survenue en 1996.

[97]   Le cadre de compétences n'est rien d'autre qu'un outil de gestion qui n'a aucun effet réel, du point de vue des relations de travail, sur les fonctions au travail.

[98]   Il ressort clairement de la preuve que l'ajout de nouvelles tâches sous le régime du Code canadien du travail n'a pas changé la dynamique fondamentale des relations de travail à l'ONE.

E. La décision de 1993 de la Commission n'est pas illégale

[99]   Le requérant peut continuer de croire à cette prétention, mais il reste qu'une formation de trois juges de la Cour d'appel fédérale en est arrivée à une conclusion contraire. L'argument du requérant repose sur la prémisse inexacte que la Commission est contrainte, par la Loi, de traiter la présente demande comme s'il s'agissait d'un nouveau processus d'accréditation, qui, par conséquent, déclenche l'application des exigences prévues à l'article 33 de la LRTFP.

[100]   Le lieu de travail est occupé par deux agents négociateurs. Il va sans dire qu'il serait plus pratique et peut-être plus efficace, du point de vue de la gestion des ressources humaines, d'éliminer un syndicat. Le fait demeure cependant que la Commission n'est pas tenue de se pencher sur la présente demande comme s'il s'agissait d'une nouvelle demande d'accréditation.

[101]   Les problèmes que l'employeur a soulevés en ce qui concerne la LCDP sont hypothétiques. Il n'y a rien, dans la jurisprudence, qui indique que, pour satisfaire activement aux exigences de la LCDP, il faut compter une seule unité de négociation. La preuve ne permet d'établir que l'existence d'un écart ténu au niveau du salaire de base entre les professionnels et les employés de soutien, et il n'y a certainement aucune preuve qui indique à première vue qu'une paie inégale est versée pour un travail de valeur égale, même si l'unité représentée par l'AFPC est en fait formée en majorité de femmes.

[102]   L'ajout, en 1993, du groupe des ressources humaines (PE) à l'unité de négociation était ni illégal, ni inhabituel. Quoi qu'il en soit, tous les agents des ressources humaines ont depuis été exclus de l'unité de négociation.

Partie II : Déterminer la structure des unités de négociation pour l'ONE

[103]   L'AFPC rejette la prétention de l'employeur que la jurisprudence portant sur les certificats d'accréditation initiaux s'applique à la présente affaire.

[104]   L'ONE est encore une organisation dominée par un personnel de professionnels qui n'ont pas les mêmes intérêts, au niveau des négociations et des relations de travail, que le personnel de soutien administratif et technique.

[105]   Il ressort clairement de la preuve que les deux syndicats abordent de manière tout à fait différente les négociations collectives, selon les instructions qu'ils reçoivent de leurs membres. L'AFPC accorde priorité aux heures supplémentaires, à la protection salariale et à la sécurité d'emploi, aux fins d'obtenir une plus grande sécurité pour ses membres. L'évolution, depuis 1993, de cette dynamique dans le cadre du processus de négociation, a démontré que les intérêts de l'unité de négociation sont distincts.

Partie III : Décrire une unité de négociation qui maintient son intégrité

[106]   La preuve a permis d'établir que l'ONE n'a jamais accepté la création d'une structure composée de deux unités de négociation et qu'il souhaite obtenir ce qu'il a toujours considéré être la solution la plus pratique du point de vue administratif, à savoir une seule unité de négociation.

[107]   On a pour ainsi dire jamais tenté d'étudier, de discuter et de régler les problèmes que posent les certificats d'accréditation actuels, si tant est que de tels problèmes existent.

Résumé et conclusion

[108]   L'AFPC affirme que la preuve produite dans le cadre de la présente demande ne justifie pas la Commission d'intervenir pour modifier la structure actuelle des unités de négociation. Les parties doivent pouvoir tenir pour définitives, dans une certaine mesure, les décisions de la Commission, qui, pour cette raison, devrait rejeter la demande de l'ONE.

[109]   La Commission doit déterminer quels changements sont survenus depuis 1993 et décider si ces changements ont entraîné des problèmes graves et profonds sur le plan des relations de travail. Si elle ne peut en arriver à une telle conclusion, la Commission doit s'abstenir de modifier la structure actuelle, qui est caractérisée par sa stabilité, sur le fondement de l'hypothèse qu'une nouvelle structure d'unités de négociation pourrait peut-être convenir davantage.

[110]   La Commission pourrait rejeter la demande de l'ONE tout en demeurant saisie du dossier pendant une certaine période pour permettre aux parties de régler les questions entourant l'attribution de postes aux unités de négociation appropriées.

Pour l'IPFPC

La question préliminaire

[111]   Il y a lieu de faire la distinction entre la demande de réexamen présentée en vertu de l'article 27 de la LRTFP et, d'une part, la demande d'accréditation initiale présentée en vertu de l'article 28 et, d'autre part, la demande présentée sous le régime de l'article 48.1 en ce qui concerne les droits du successeur.

[112]   Dans la présente demande de réexamen d'une ordonnance qui a été rendue conformément à l'article 33 de la Loi, la Commission doit, dans un premier temps, déterminer si la structure actuelle continue de convenir aux fins des négociations collectives. Si elle répond à cette question par l'affirmative, la Commission doit rejeter la demande et ce, même si une autre structure d'unités de négociation pourrait peut-être être considérée comme convenant davantage.

[113]   Même si, par sa valeur probante, la preuve pourrait par ailleurs appuyer une ordonnance établissant une unité de négociation unique dans le cadre d'une demande d'accréditation initiale, cette même preuve peut ne pas être suffisante, pour ce qui est de sa valeur probante ou de sa pertinence, pour mener à une décision semblable dans le cadre d'une demande visant à modifier une structure existante.

Principes directeurs

[114]   Pour trancher la présente demande, la Commission doit se laisser guider par les principes énoncés par le Conseil canadien des relations industrielles dans l'affaire Rogers Cablesystems Ltd. [2000] CCRI no 51, aux pages 6 à 8 :

. . .

24. Pour décider s'il y a lieu de fusionner des unités de négociation, le Conseil tient compte de l'efficacité de la structure de négociation et de la meilleure façon d'équilibrer les intérêts divergents d'unités de négociation viables afin d'assurer des négociations efficaces et des relations de travail harmonieuses. Il incombe au requérant de démontrer pourquoi la structure actuelle n'est plus appropriée et de préciser quel objectif valable lié aux relations de travail la révision de la structure de négociation existante permettrait d'atteindre. ...

. . .

29. ... Aucune de ces questions ne correspond aux problèmes majeurs ou récurrents des relations du travail mentionnés par le Conseil dans Énergie atomique du Canada Limitée (1995), 99 di 37 (CCRT no 1135).

. . .

31. Aux termes des nouvelles dispositions de l'article 18.1, il ne suffit pas de démontrer que la structure demandée est plus appropriée que celle qui existe actuellement; il doit exister des motifs contraignants pour lesquels la structure de négociation n'est plus appropriée et nécessite l'intervention du Conseil. ...

[115]   L'ONE a grandement sous-évalué la charge de la preuve à laquelle il doit satisfaire dans la présente affaire. On peut se reporter à d'autres affaires pour obtenir des précisions sur ce que pourraient être des « raisons impérieuses » de modifier une structure existante :

[Traduction]

  1. Lorsqu'une structure existante est dépassée par des changements survenus dans la conjoncture économique et sur le marché, et qu'elle empêche indûment l'employeur d'exploiter son entreprise;

  2. Lorsque les frontières juridictionnelles créées par une structure existante privent un employeur de la souplesse dont il a besoin pour attribuer du travail et faire exécuter celui-ci de la manière la plus efficace possible;

  3. Lorsque les fonctions exécutées par des employés faisant partie de plus d'une unité de négociation ont été (ou seront) fusionnées;

  4. Lorsqu'une multiplicité d'unités de négociation ayant des communautés d'intérêts semblables gêne indûment le processus de négociation collective;

  5. Lorsqu'une unité de négociation ne serait pas viable (c.-à-d. trop petite pour avoir une influence réelle sur les conventions collectives ou les relations de travail).

[116]   La preuve produite par l'ONE ne révèle pas l'existence de tels problèmes. En fait, la preuve indique l'existence d'une structure d'unités de négociation qui fonctionne bien. Les documents déposés par l'ONE montrent que le processus de négociation collective fonctionne comme on l'avait prévu. Chaque agent négociateur a participé à quatre rondes de négociation et prend part, à l'heure actuelle, à une cinquième ronde. L'IPFPC n'a jugé nécessaire de recourir à l'arbitrage que dans l'une de ces quatre rondes. L'AFPC a obtenu un règlement au cours de trois rondes, dont l'un est intervenu au terme d'une grève, et elle a eu recours à l'arbitrage obligatoire une fois (pièce E-2, onglet 24). Un tel dossier n'indique pas l'existence d'un régime de négociations collectives disfonctionnel.

[117]   Il n'y a aucune preuve que la structure actuelle a) a empêché l'ONE de mener ses activités avant la réorganisation de 1996 ou depuis celle-ci; b) a empêché que des changements fondamentaux soient effectués; c) a créé des problèmes juridictionnels qui privent l'employeur de la souplesse dont il a besoin pour attribuer le travail de la manière la plus efficiente possible; ou d) a fait entrave à la mobilité des employés.

Changements organisationnels et autres

[118]   L'avocat de l'ONE a fait valoir que trois changements mis en place à la suite de l'accréditation font état d'une évolution de nature telle qu'un réaménagement des unités de négociation serait justifié : la réorganisation de 1996, l'établissement d'un cadre de compétences et la prise en charge de responsabilités aux termes du Code canadien du travail.

[119]   La structure actuelle des unités de négociation n'ayant aucunement empêché la mise en place de ces changements, la Commission doit déterminer s'ils ont modifié la nature des relations de travail si profondément que la structure actuelle ne convient plus aux fins des négociations collectives.

[120]   Bien que le régime axé sur le travail d'équipe ait été plus institutionnalisé et qu'il ait été utilisé plus fréquemment depuis 1993, la méthodologie essentielle en fonction de laquelle le travail est effectué paraît ne pas avoir changé de manière fondamentale. La réorganisation de 1996 constitue davantage l'une des mesures graduelles que toutes les organisations publiques ou privées ont le droit de prendre à l'occasion pour faciliter l'exploitation de leur entreprise.

[121]   Le cadre de compétences ne fait que donner un caractère officiel à certains facteurs qui sont généralement pris en considération en matière de dotation et de promotion. Puisque la structure actuelle n'a pas empêché la progression des employés au niveau professionnel, le cadre de compétences ne devrait pas être un facteur déterminant.

[122]   Le troisième changement invoqué par l'ONE, survenu lui aussi de manière graduelle, ne constitue donc pas un changement fondamental. L'ONE a simplement pris en charge une responsabilité qu'il n'avait pas auparavant et qui se rapporte à la réglementation du secteur du pétrole et du gaz au niveau fédéral.

[123]   La structure d'unités de négociation actuelle peut s'adapter à ces changements – et c'est ce qui s'est produit – sans qu'il en découle, en matière de relations de travail, des problèmes fondamentaux ou récurrents nécessitant un réaménagement de la dynamique des négociations collectives.

La décision de 1993 était mal avisée

[124]   En 1993, la Commission a soupesé une preuve, entendu des arguments et rendu la décision fondamentale selon laquelle deux unités de négociation étaient habiles à négocier collectivement. La Cour d'appel fédérale n'a rien trouvé à reprocher à cette décision. L'ONE tente manifestement de faire valoir son point de vue à nouveau, dix ans après que le dossier eut été réglé en bonne et due forme.

La décision de 1993 était illégale

[125]   L'ONE s'appuie sur trois arguments pour contester la légalité de la décision de 1993.

[126]   Premièrement, dans sa décision, la Commission n'a pas tenu compte, comme elle se devait, de l'article 33 de la LRTFP, aux termes duquel les unités de négociation doivent correspondre au mode de classification établi par l'employeur. Il est clair que l'article 33 ne s'applique que dans le cadre d'une demande d'accréditation initiale déposée par une organisation syndicale conformément à l'article 28 de la Loi. Ce facteur ne doit pas être pris en considération dans le cadre d'une demande de réexamen fondée sur l'article 27.

[127]   Deuxièmement, l'ONE n'éprouve aucune difficulté au niveau de l'équité salariale. Il existe différentes échelles de traitement pour différents niveaux de classification (ONE 6 à ONE 10), mais aucun groupe professionnel n'est composé dans une large majorité d'employés d'un sexe ou de l'autre. Il n'y a donc rien qui puisse maintenant justifier le dépôt d'une plainte en matière d'équité salariale. L'article 11 de la LCDP n'oblige aucun employeur à maintenir une seule échelle de traitement.

[128]   La Commission n'est pas tenue de prendre en considération les facteurs qui, à l'heure actuelle, ne présentent aucun problème pour l'employeur, ou que ce dernier peut surmonter dans le cadre des négociations collectives. Autrement, la Commission ne pourrait pour ainsi dire jamais en arriver à la conclusion qu'une structure autre qu'une structure qui comprend une seule unité de négociation convient.

[129]   Troisièmement, l'inclusion des professionnels des ressources humaines dans les certificats d'accréditation de 1993 ne revêt aucune importance dans l'affaire dont la Commission est aujourd'hui saisie. Dans le meilleur des scénarios, l'argument de l'ONE à cet égard est d'importance mineure et doit être écarté.

Les descriptions actuelles des unités de négociation ne sont pas valables

[130]   Il se peut que les descriptions des unités de négociation élaborées par la Commission en 1993 contiennent certaines irrégularités, mais celles-ci peuvent facilement être corrigées au moyen de nouveaux certificats d'accréditation définissant mieux les deux unités de négociation existantes. Si les parties avaient eu l'occasion de collaborer, elles seraient peut-être arrivées à formuler de nouvelles descriptions qu'elles auraient pu présenter à la Commission dans le cadre d'une demande conjointe. En se dépêchant indûment de déposer sa demande en vue de l'accréditation d'une unité de négociation unique, l'ONE a privé les parties de cette occasion.

[131]   L'Institut reconnaît que les descriptions actuelles des unités de négociation sont devenues problématiques. Toutefois, le fait de reconnaître l'existence d'une irrégularité dans les descriptions d'unités de négociation – un problème qui peut être facilement corrigé – ne permet pas de conclure qu'en raison de la structure actuelle, les unités de négociation ne sont plus habiles à négocier collectivement.

Conclusion

[132]   L'ONE n'a pas établi l'existence de problèmes fondamentaux ou récurrents en matière de relations de travail, ni établi quelque autre raison impérieuse que ce soit de changer la structure actuelle, qui porte fruit depuis des années. Il n'a pas réussi à établir le bien-fondé de son argument en faveur d'une structure comprenant une seule unité de négociation. La demande devrait par conséquent être rejetée.

[133]   L'IPFPC est cependant en faveur d'une ordonnance révisant la description de l'unité des professionnels afin de mieux tenir compte des intentions de la Commission telles qu'elles ont été exposées dans la décision de 1993.

Réplique de l'ONE

Questions préliminaires

[134]   L'AFPC et l'Institut semblent avoir l'impression que, pour que la Commission exerce son pouvoir discrétionnaire et réexamine les certificats d'accréditation initiaux, il faut que la structure existante des unités de négociation soit un échec sur toute la ligne. Là n'est pas et n'a jamais été le critère.

[135]   L'AFPC demande à la Commission de confirmer une description d'unités de négociation qui tient compte de fonctions et de classifications qui remontent à 1967 (qui ne sont plus en application à l'administration centrale) et de les rattacher aux employés de l'ONE en fonction d'un mode de classification complètement différent sur le fondement non pas de la question de savoir si cette structure est appropriée, mais sur la question de savoir qui aurait représenté ces employés s'ils avaient encore fait partie de la fonction publique.

[136]   Les deux intimés ont reconnu que les certificats actuels sont imprécis et causent des difficultés. Ce facteur à lui seul suffit pour nécessiter l'intervention de la Commission. La description actuelle des unités de négociation est à ce point viciée que, pour cette seule raison, la Commission doit se sentir contrainte de revoir les certificats en cause.

[137]   Bien que les intimés aient tenté d'atténuer l'importance des changements organisationnels survenus à l'ONE depuis 1995, la preuve présentée, y compris le témoignage de Mme Kealey, prouve qu'il y a eu un changement important au sein de l'organisation dans son ensemble.

La volonté des employés et la représentation historique

[138]   La jurisprudence nous enseigne que, si la volonté des employés n'est pas sans importance, elle n'a cependant aucun effet déterminant sur l'établissement des unités de négociation qui sont habiles à négocier collectivement (Société canadienne des postes, CCRT). Quoi qu'il en soit, les seuls employés qui ont témoigné occupaient des postes à la direction de la section locale de l'AFPC, de sorte qu'il est difficile de déterminer dans quelle mesure leurs opinions étaient personnelles ou représentaient le point de vue de leur syndicat.

[139]   L'AFPC et l'IPFPC ont tous deux évoqué le passé stable des négociations. Au cours des 10 dernières années, il y a eu quatre rondes de négociations collectives. Pendant approximativement cinq de ces dix années, l'ONE était assujetti au gel salarial imposé à toute la fonction publique. Aucune de ces quatre rondes de négociation n'a débouché sur un règlement négocié dans des circonstances normales.

Nouveau processus d'accréditation

[140]   Dans le cadre d'un réexamen fondé sur l'article 27, la Commission a toujours tenu compte de ce qui, sur le plan des relations de travail, est le plus pratique pour les parties, tant aujourd'hui qu'à l'avenir.

Le mode de classification établi par l'ONE

[141]   Personne ne conteste que le mode de classification établi par l'ONE cadre avec le sens ordinaire de ces termes. En 1993, la Commission n'a pas tiré la conclusion que le mode proposé par l'ONE n'était pas un mode de classification. Elle a plutôt conclu qu'une conformité à ce mode, comme le requérait l'article 33 de la LRTFP, entraînerait une représentation insatisfaisante. La preuve présentée à la Commission en l'espèce n'appuie pas cette conclusion.

[142]   Si la Commission décide de revoir la structure actuelle, l'article 33 s'applique tout autant qu'il s'appliquerait dans le cadre d'une demande initiale fondée sur l'article 28.

[143]   Dans le cadre de la présente instance, les intimés n'ont produit aucune preuve qui indique qu'une structure d'unités de négociation qui correspond au mode de classification établi par l'employeur entraînerait une représentation insatisfaisante des employés.

Facteurs se rapportant aux droits de la personne

[144]   Le problème, au sein de l'ONE, tient au fait que les certificats d'accréditation qui ont déjà été accordés par la Commission rangent des employés dont la classification est la même dans deux syndicats différents. C'est le chevauchement au niveau des échelles de traitement qui crée un problème, non pas le fait d'avoir plus d'une échelle de traitement. On ne peut dire que le fait de tolérer la possibilité réelle qu'il y ait illégalité à l'avenir favorise l'établissement de relations de travail saines.

Résumé

[145]   Toutes les parties ont reconnu que la description des unités de négociation contenue dans la décision de 1993 est fondamentalement viciée et, pour cette seule raison, il a été satisfait au critère préliminaire qui justifie la tenue d'un réexamen fondé sur l'article 27.

[146]   Aux fins de décrire de nouvelles unités de négociation, la Commission doit tenir compte du mode de classification établi par l'ONE, à moins que l'établissement d'une structure y correspondant entraîne une représentation insatisfaisante. Or, rien, dans la preuve qui a été présentée à la Commission, ne permet de tirer une telle inférence; en fait, la preuve établit exactement le contraire.

[147]   L'existence d'une unité de négociation unique répondrait aux besoins de l'employeur et de ses employés en matière de relations de travail, permettrait une représentation satisfaisante et favoriserait l'établissement de relations de travail saines et stables.

Décision

[148]   À titre d'employeur distinct figurant à la partie II de l'annexe I de la LRTFP, l'ONE a demandé à la Commission de réexaminer une décision qu'elle a rendue en 1993 et qui a eu pour effet de créer, pour ses effectifs syndiqués, une structure regroupant deux unités de négociation. Les agents négociateurs intimés qui détiennent les certificats d'accréditation délivrés en 1993 s'opposent à la demande. Ils ont cependant reconnu que les descriptions des unités de négociation actuelles sont problématiques.

[149]   Ainsi que la Commission l'a déclaré dans l'affaire Forces canadiennes, Employés des Fonds non publics et Union internationale des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, section locale 864 (dossier de la Commission 125-18-78, [1998] C.P.S.S.R.B. no 99), le réexamen de demandes de fusion d'unités de négociation établies de longue date doit être effectué avec prudence.

[150]   Cependant, la Commission doit étudier chaque cas de manière isolée, tout en gardant à l'esprit que les circonstances changent au fil des années. Ces changements peuvent, dans certains cas, justifier le réexamen de structures d'unités de négociation existantes. Même dans le monde des relations de travail, où la stabilité est primordiale, rien n'est coulé dans le béton.

[151]   Le critère de réexamen des certificats d'accréditation d'unités de négociation proposé par l'AFPC, selon lequel il faut faire la preuve que des relations de travail défavorables existent réellement, est trop restrictif. Le critère de réexamen doit plutôt porter sur l'existence de changements importants qui rendent la structure actuelle insatisfaisante. En arriver à une conclusion contraire rendrait impossible tout changement rendu nécessaire par suite de l'évolution d'un cadre de relations de travail donné.

[152]   Dans un monde où les changements surviennent rapidement et où la technologie et les pratiques commerciales évoluent sans arrêt, on ne peut permettre que le secteur des relations de travail reste figé. Lui aussi doit, lorsque cela convient, suivre le rythme.

[153]   Des changements importants sont survenus au sein de l'ONE depuis que la Commission a réexaminé pour la dernière fois son cadre d'unités de négociation. L'agence a modifié sa structure en 1996, mettant l'accent sur la prestation de services en fonction de secteurs d'activités, ce qui a mené à un recours fréquent à des équipes multidisciplinaires dont les membres proviennent des deux unités de négociation actuelles, une pratique qu'un témoin appelé par l'AFPC a qualifiée de révolutionnaire.

[154]   Le cadre de compétences établi par l'ONE est maintenant utilisé pour évaluer tous les postes sur le fondement de critères établis. Le processus d'évaluation a permis de montrer que de nombreux employés, sans égard à l'unité de négociation à laquelle ils appartiennent, partagent des habiletés, des compétences et des qualifications.

[155]   Enfin, le mode de classification établi par l'ONE, qui comprend 16 niveaux (ONE 1 à ONE 16), a été officiellement approuvé et mis en application par le Conseil du Trésor le 31 décembre 1993 (pièce E-2, onglet 9). Une grande part des arguments présentés par les parties portait sur la question de savoir si le mode de classification de l'employeur était pertinent dans le cadre de la présente instance. La condition selon laquelle une structure d'unités de négociation doit correspondre au mode de classification établi par l'employeur est prévue à l'article 33 de la LRTFP, qui renvoie uniquement aux demandes d'accréditation fondées sur l'article 28 de la Loi.

[156]   Par conséquent, lorsqu'elle est appelée à réexaminer des certificats d'accréditation sous le régime de l'article 27, la Commission n'est pas tenue aux mêmes obligations législatives, en ce qui concerne le mode de classification de l'employeur, que dans le cas des demandes d'accréditation initiales fondées sur les articles 28 et 33. Cependant, l'article 27 de la LRTFP n'exclut pas expressément le mode de classification comme étant un facteur que la Commission peut prendre en considération dans des demandes de cette nature.

[157]   Par conséquent, bien que rien dans la LRTFP n'oblige la Commission à prendre en considération le mode de classification établi par l'employeur dans le cadre d'un réexamen fondé sur l'article 27, il est tout à fait logique de le faire dans le contexte des relations de travail dans la fonction publique fédérale.

[158]   Bien que cela ne soit pas pertinent relativement à la présente instance, il est intéressant de signaler que l'article 70 du projet de loi C-25 (Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois), tel qu'il a été adopté par la Chambre des Communes le 3 juin 2003, contraint la Commission à tenir compte du mode de classification établi par l'employeur dans le cadre du réexamen de la structure des unités de négociation.

[159]   Enfin, les deux unités de négociation actuelles sont de petite taille. L'unité formée par l'Alliance compte approximativement 105 membres, tandis que le groupe représenté par l'IPFPC compte approximativement 145 membres, ce qui fait, au total, 250 employés syndiqués.

[160]   Tous les employés travaillent sous un même toit, dans un environnement de travail semblable et, de manière générale, aux mêmes heures. Les conventions collectives diffèrent à certains égards, mais pas d'une manière qui est extrêmement importante. Les griefs qui ont été déposés par le passé par les membres de l'AFPC et ceux de l'IPFPC révèlent l'existence là aussi d'une communauté d'intérêts.

[161]   Au cours des dernières années, étant donné le recours plus fréquent au travail en équipe, plusieurs membres de l'AFPC ont assumé des fonctions détenues par des membres de l'IPFPC ou ont été promus à des postes détenus par ces derniers.

[162]   Le passé récent a permis de constater que les anciennes divisions entre les professionnels et les employés de soutien ne sont pas toujours faciles à faire et qu'elles ne sont pas nécessairement utiles. Compte tenu du nombre peu élevé d'employés, qui travaillent dans les conditions mentionnées dans les présents motifs, et étant donné les changements importants mentionnés dans la présente décision, la Commission en arrive à la conclusion qu'une unité de négociation unique devrait remplacer les deux unités de négociation qui existent actuellement.

[163]   Cette unité de négociation inclura tous les employés de l'ONE qui sont syndiqués à l'heure actuelle et sera décrite dans les termes suivants : « Tous les employés de l'ONE, à l'exception des employés qui sont expressément exclus des négociations collectives par application de la loi ou détermination de la Commission ».

[164]   Par conséquent, la Commission ordonne la tenue d'un scrutin de représentation de la manière qu'elle précisera par l'intermédiaire de son secrétaire.

[165]   Étant donné la taille des unités actuelles et la ferme conviction de la Commission que les deux agents négociateurs pourraient représenter convenablement les membres de la nouvelle unité de négociation, le bulletin de vote devrait faire mention et de l'IPFPC et de l'AFPC. Les syndiqués seront donc invités à indiquer s'ils souhaitent que l'IPFPC ou l'AFPC les représente à titre d'agent négociateur.

[166]   Aux fins de la préparation du scrutin, la Commission ordonne à l'ONE de lui remettre, au plus tard le 15 octobre 2003, une liste des noms de tous les employés faisant partie de la nouvelle unité de négociation à la date de la présente décision (ainsi qu'une adresse postale à laquelle il est possible de les joindre le cas échéant).

[167]   En outre, la Commission ordonne à l'ONE de fournir une deuxième liste de tous les employés faisant partie de l'unité de négociation à la date de la présente décision, sans l'adresse postale des employés en question. Cette deuxième liste sera transmise à la Commission, à l'AFPC et à l'IPFPC, au plus tard le 15 octobre 2003. Les agents négociateurs peuvent formuler des commentaires sur cette liste à la Commission et à l'ONE au plus tard le 31 octobre 2003. La Commission donnera alors, par l'entremise de son secrétaire, les instructions nécessaires à la tenue du scrutin.

Yvon Tarte,
président

OTTAWA, le 17 septembre 2003.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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