Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Pratique déloyale de travail - Plainte fondée sur l'alinéa 23(1)a) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - Sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi - Menace de licenciement si le grief est maintenu - Respect des délais - le 20 juillet 1993, le fonctionnaire s'estimant lésé a participé, au palier interne, à une audience visant le règlement d'un grief relatif au contenu de son dossier personnel - il a allégué que, pendant l'audience, le représentant de l'employeur, le défendeur Gee, lui a donné le «choix» entre retirer son grief et reprendre ses tâches ou s'exposer à un licenciement - le défendeur Gee a soutenu qu'il avait discuté avec le plaignant de sa mauvaise attitude et de ses antécédents d'emploi pendant l'audience, mais qu'il ne lui avait jamais recommandé de retirer son grief - l'employeur a soulevé la question du respect des délais puisque la plainte, déposée le 17 mars 1995, portait sur des événements survenus le 20 juillet 1993 - la Commission a entendu et considéré le témoignage des quatre personnes qui étaient présentes à l'audience du 20 juillet - la Commission a conclu que, même si le défendeur Gee avait fait preuve d'imprudence en discutant de questions autres que le grief précis pendant la rencontre sur le grief, les allégations formulées par le plaignant n'étaient pas fondées - compte tenu de ses conclusions sur le fond de la plainte, la Commission a jugé inutile d'aborder la question du respect des délais. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Dossier: 161-2-763 Loi sur les relations de travail Devant la Commission des relations dans la fonction publique de travail dans la fonction publique ENTRE WALTER G. HASLETT plaignant et L t - COL. WILLIAM F. GEE ET DÉFENSE NATIONALE

défendeurs AFFAIRE: Plainte fondée sur l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Devant: Muriel Korngold Wexler, président suppléant Pour le plaignant: Georges Nadeau, Alliance de la Fonction publique du Canada Pour les défendeurs: Roger Lafrenière, avocat

Affaire entendue à Winnipeg (Manitoba), les 22 juin et 23 novembre 1995

Decision Page 1 DÉCISION Depuis 1971, M. Walter G. Haslett travaille à la Base des Forces canadiennes Shilo (BFC Shilo) en qualité de fonctionnaire civil. Le 17 mars 1995, il a déposé un plainte conformément à l’article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la Loi) dans laquelle il a prétendu que les défendeurs avaient contrevenu au sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi. Selon M. Haslett, le 20 juillet 1993, lors de l’audition d’un grief, le défendeur a violé l’article 8 de la Loi [traduction] « en usant de son autorité pour [l’]intimider en le menaçant d’entamer des procédures de congédiement [s’il] maintenait son grief ».

LA PREUVE M. Georges Nadeau, représentant de M. Walter G. Haslett, a cité M. Keith Hillis et le plaignant à comparaître. Les défendeurs étaient représentés par M Lafrenière qui a cité le l t -col. William F. Gee et M parties ont également déposé 36 pièces justificatives.

M. Haslett a déclaré qu’il travaillait à la BFC Shilo en qualité de fonctionnaire civil depuis septembre 1971. Il a travaillé à l’atelier de menuiserie jusqu’en 1975 comme charpentier pour ensuite devenir le superviseur de l’atelier (GL-WOW-10-C-3), poste qu’il a occupé pendant deux ans. Il était responsable de la maintenance des bâtiments « allemands » de la base. La base militaire Shilo est utilisée comme base d’entraînement par l’OTAN. En 1980, le niveau du poste a été rehaussé au niveau GL-CO-1-10-C-3, et M. Haslett est devenu un inspecteur de la construction, titre qu’il a détenu jusqu’en 1991. En octobre de la même année, l’atelier a été aboli et le poste de M. Haslett est devenu superflu. Ce dernier a donc été muté au module des contrats à titre d’inspecteur en date du 21 octobre 1991 (pièces 1 et 2).

Au cours de l’été 1993, d’après les explications de M. Haslett, son superviseur immédiat était l’adjudant-maître Larry Boyd. Ce dernier supervisait le travail de trois inspecteurs des contrats. Son superviseur immédiat était M. Bob Reisz, ingénieur et membre du personnel civil. Le major William F. Wawrychuk était chef du service et superviseur immédiat de M. Reisz. Le l t col. McLeod occupait le poste d’officier des services techniques de la base et M. Pierre Boucher celui de commandant de la base. Le

Commission des relations de travail dans la fonction publique

e Roger me Joyce Heenan à comparaître. Les

Decision l t -col. Gee était l’officier de l’administration de la base et M personnel civil de la base. M. Haslett a produit trois rapports d’évaluation du rendement du personnel civil visant la période du 1 (pièces 3, 4 et 5). Il a décrit les circonstances à l’origine de la présente plainte.

Au printemps de 1991, M. Haslett s’est fait imposer une suspension de cinq jours pour insubordination, suspension qu’il a contestée en déposant un grief. Le grief, renvoyé à l’arbitrage, devait être instruit le 27 mai 1992, mais un règlement est survenu la veille de l’audience en arbitrage; la suspension de cinq jours a été ramenée à deux jours. Ainsi, M. Haslett croyait que son dossier personnel redeviendrait « vierge » à compter du 28 mai 1992. Il a aussi déclaré que son représentant syndical lui avait conseillé de ne rien faire jusqu’à son évaluation de rendement en mars ou avril 1993. En avril 1993, après avoir pris connaissance du rapport d’évaluation du personnel civil et accompagné de son représentant syndical et délégué syndical, M. Keith Hillis, M. Haslett a consulté son dossier personnel. M me Joyce Heenan était présente pendant qu’il consultait son dossier. M. Haslett trouvait que son dossier contenait des documents qui auraient en avoir été retirés. Il l’a mentionné à M m e Heenan et, au moyen de papillons, a indiqué les documents qu’il voulait faire supprimer. M me Heenan lui a expliqué qu’elle en discuterait avec les autorités appropriées. Le 21 juin 1993, M. Haslett a reçu une lettre de M me Heenan l’informant qu’il n’y avait aucune raison de retirer quelque autre document que ce soit de son dossier personnel. Elle a confirmé que tous les documents faisant directement référence à toute mesure disciplinaire qu’on lui a imposée pendant qu’il travaillait à la BFC Shilo avaient été retirés (pièce 6). M. Haslett a déclaré qu’il n’avait jamais demandé à M. P.J. Graves, titulaire du poste d’agent du personnel civil de la base avant M m e Heenan, de retirer les documents en question de son dossier personnel. Non satisfait de cette réponse, M. Haslett a déposé un grief le 9 juillet 1993 (pièce 7). Le major Wawrychuk était responsable du premier palier de la procédure de règlement des griefs. Or, le grief a été transmis directement au l t -col. Gee, au deuxième palier. Le 20 juillet 1993, le l t -col. Gee a convoqué une réunion pour instruire le grief. C’est au cours de cette réunion que les présumés incidents se sont produits. Les protagonistes réunis dans le bureau du l t -col. Gee étaient outre ce dernier, M me Heenan, M. Hillis et le plaignant. M. Haslett n’avait jamais encore rencontré le l t -col. Gee de telle sorte qu’on a commencé par les présentations. Le Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 2 me Joyce Heenan l’agent du er avril 1992 au 31 mars 1995

Decision Page 3 plaignant et le défendeur n’ont pas le même souvenir du déroulement de la réunion et des propos échangés à ce moment-là. Je vais donc résumer les dépositions individuelles des témoins qui ont assisté à cette réunion.

Tous les témoins s’entendent quant aux personnes qui étaient présentes à la réunion, mais personne ne se souvient de l’endroit M. Hillis était assis, y compris ce dernier.

M. Haslett a déclaré que la rencontre a eu lieu dans le bureau de l’administrateur de la base (le l t -col. Gee). Il a dit se souvenir de 98 p. 100 de ce qui s’est passé, mais non pas de la durée de la réunion ni des paroles exactes du l t -col. Gee. La réunion a débuté vers 10 h. Le l t -col. Gee s’est présenté à M. Haslett, car il ne le connaissait pas. Le l t -col. Gee a ensuite lu le grief de M. Haslett après quoi, selon ce dernier, il a dit : « M. Haslett, vous êtes un employé difficile », en ajoutant que le dossier du personnel appartenait à l’administration et non pas à l’employé; qu’il revenait à l’administration de décider des documents qu’il y a lieu de garder ou de retirer; et que certains employés à la BFC Shilo avaient deux dossiers. C’est à ce moment-là que M. Hillis l’a interrompu pour l’interroger au sujet de ce système de dossiers en double. Le l t -col. Gee a répondu que lorsqu’un litige aboutit à l’arbitrage, le second dossier est immédiatement détruit. Il a mentionné le fait que l’ancien superviseur de M. Haslett risquait de faire de la prison et que la même chose pourrait lui arriver s’il le « défendait ». Puis, le l t -col. Gee a examiné un a un les documents que M. Haslett avait marqués d’un papillon comme devant être retirés de son dossier personnel. Il a passé des commentaires au sujet de chaque document, précisant lesquels seraient gardés et lesquels seraient retirés. M. Haslett a déclaré que le l t- col. Gee n’a pas voulu entendre sa version des faits. MM. Hillis et Haslett n’ont pas pu faire de représentation et n’ont pas dit grand chose. Le l t -col. Gee a accepté de retirer « un ou deux documents » du dossier, qu’il a jetés à la poubelle. Vers le milieu de l’examen des documents, le l t -col. Gee a dit : « Je vais conclure une affaire avec vous. Signez le formulaire de désistement et le ministère de la Défense nationale ne sera plus responsable de votre stress au travail et retirera tous les documents que vous voudrez de votre dossier personnel. » (M. Haslett est le seul témoin à avoir rapporté ces propos.) Ce dernier a ajouté qu’il a essayé de prendre la parole, mais que le l t_ c ol. Gee ne l’a pas laissé parler. On s’est mis à discuter de l’offre après quoi M. Haslett a indiqué que « l’affaire était du ressort provincial plutôt que fédéral ». On Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 4 est ensuite revenu aux documents. Le l t -col. Gee a dit à M. Haslett que ce dernier n’avait « aucune explication à donner puisque les documents parlaient d’eux-mêmes ». Il est demeuré assis derrière son bureau pendant toute cette discussion. Les autres étaient assis à une longue table fixée au bureau; M me Heenan d’un côté et M. Haslett de l’autre.

Selon M. Haslett, à un moment donné au cours de la discussion, le l t -col. Gee s’est levé, a fait quelques pas puis s’est assis près de lui en lui disant : « Je me suis rapproché pour que vous puissiez bien voir la couleur de mes yeux ». Le l t -col. Gee a ajouté, en regardant l’APCB (M m e Heenan), qu’elle allait « l’engueuler et lui donner de la merde ». M me Heenan a fait un signe de tête affirmatif. Le l t -col. Gee a repris la discussion au sujet des documents tout en continuant de passer ses commentaires. Il a parlé du rendement de M. Haslett. Ensuite, il a déclaré : « M. Haslett, vous avez deux choix : vous retirez votre grief et vous retournez travailler ou vous le maintenez et j’entame la procédure de congédiement » le choix »). Le l t -col. Gee a conseillé à M. Haslett d’en discuter avec son représentant syndical et de lui faire part de sa décision dans les plus brefs délais. C’est là-dessus que la réunion a pris fin. (Le l t col. Gee et M me Heenan ont tous les deux déclaré que celui-là n’avait pas offert un tel choix à M. Haslett.)

À l’issue de la réunion, MM. Hillis et Haslett ont discuté de la situation, et M. Hillis a dit à ce dernier de « laisser tomber ». M. Haslett a également discuté de l’affaire avec M. Brian Molsberry, président de la section locale, lequel lui a dit : « Qu’est ce que cela va te donner sinon te faire remarquer davantage ». Avant de recevoir la réponse du l t -col. Gee au sujet du grief, M. Haslett a informé M. Hillis de son intention de le retirer. Il a cependant reçu la réponse du l t -col. Gee le 22 juillet 1993 (pièce 8). M. Hillis devait indiquer à ce dernier que M. Haslett voulait retirer son grief, mais il ne l’a pas fait. On a en outre expliqué à M. Haslett que la section locale l’appuierait s’il désirait déposer une plainte de harcèlement contre le l t -col. Gee. M. Haslett a déclaré que, le 11 août 1993, le major Wawrychuk lui a imposé une suspension de deux jours concernant des allégations de harcèlement formulées par M. Boyd (pièce 9). Il n’a pas déposé de grief cependant parce qu’il ne voulait pas avoir à se présenter de nouveau devant le l t -col. Gee. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 5 Quelque temps plus tard, en 1993, tout le personnel civil de la BFC Shilo a été invité à une séance d’information sur le harcèlement, organisée par la Commission de la fonction publique (CFP). M. Denis Lamirande était responsable de la séance en question à laquelle M. Haslett a assisté. À l’issue de cette rencontre, M. Haslett a envoyé une plainte par la poste à M. Lamirande. Il a été incapable de produire en preuve une copie de cette plainte, et la date à laquelle la présente plainte a été déposée auprès de la CFP a fait l’objet d’un contre-interrogatoire serré de la part de M e Lafrenière. M. Haslett a cependant présenté en preuve l’accusé de réception de cette plainte, que M. Lamirande lui a envoyé en date du 2 décembre 1993 (pièce 10). Ce dernier a indiqué à M. Haslett qu’il devait d’abord en discuter avec son Ministère avant que la Direction des enquêtes de la CFP puisse enquêter. M. Haslett a affirmé avoir téléphoné à M. Lamirande pour obtenir des explications. Ce dernier lui a indiqué qu’il devait d’abord envoyer sa plainte au Ministère.

La date de la lettre adressée à M. Lamirande est importante car, le 27 novembre 1993, M. Haslett aurait proféré des menaces contre M m e Heenan, menaces qui, le 2 décembre 1993, ont amené l’employeur à imposer une suspension de 11,5 jours à M. Haslett (dossier de la Commission : 166-2-25825). L’avocat des défendeurs a soutenu que M. Haslett a présenté la présente plainte à cause de la gravité de l’incident du 27 novembre 1993. M. Haslett a nié qu’il y ait eu un lien entre ces deux situations.

Le 1 er février 1994, M. Haslett a rempli le formulaire de plainte du Ministère qu’il a remis à son représentant syndical (pièces 11 et 13). L’employeur a fait connaître sa réponse le 3 février 1994 (pièces 12 et 14). M me Judy Krushen, officier supérieur d’état major, Commandement aérien, Winnipeg, a fait enquête, et l’employeur a répondu à la plainte le 5 mai 1994 (pièce 14); elle a été rejetée par le col.J.L.H.L.P. Boucher, commandant de la base. M. Haslett a ensuite discuté de l’affaire avec son syndicat et a rempli un formulaire de plainte conformément à l’article 23 de la Loi. Il l’a envoyé à son « syndicat à Ottawa » en septembre 1994 (pièce 15), on a rempli un nouveau formulaire qu’on a déposé devant la présente Commission le 17 mars 1995, lequel fait l’objet de la présente décision.

M. Haslett a reçu une copie du rapport d’enquête du Ministère concernant sa plainte ainsi que d’autres renseignements relatifs à la réunion du 20 juillet 1993 après

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Decision les avoir demandés en vertu de la Loi sur l’accès à l’information (pièces 16 et 17). La pièce 16 est une note de service que M m laquelle elle lui demande de donner des exemples pour étayer sa déclaration qu’il « a passé en revue toutes les raisons possibles pour lesquelles il [M. Haslett] devait changer d’attitude ». Le l t -col. Gee a indiqué à M réunion du 20 juillet 1993. Aussi, le 8 avril 1994, il a répondu qu’autant qu’il s’en souvienne il avait fourni les exemples suivants (pièce 17) :

[traduction] 1 - qu’il a été muté dans un poste de superviseur des contrats à cause de son incapacité à travailler en équipe;

2 - qu’il a dit à l’OAGCB de « prendre le camion et de se le fourrer dans ... »;

3 - que lui et M. Abbott n’ont pas réussi à s’entendre sur l’usage du véhicule sans chauffeur qu’ils se partagent;

4 - que toutes ses évaluations de rendement mentionnent son inaptitude partielle à s’entendre avec les autres ou lui accordent une cote faible à cet égard;

5 - qu’il a déposé une série de griefs qui ont tous été renvoyés à l’arbitrage puis rejetés sauf celui concernant la réclamation arbitraire d’une indemnisation d’accident du travail - déposait-il des griefs farfelus? Refusait-il d’assumer la responsabilité de ses actes (inappropriés)? Avait-il de la difficulté à s’entendre avec les personnes détenant l’autorité?

6 - qu’il devait apprendre à s’entendre avec les gens; 7 - qu’il devait veiller à ne pas devenir un fardeau pour l’administration.

Le l t -col. Gee a ajouté qu’il y avait sans doute donné d’autres exemples car on était en train de revoir les antécédents de travail de M. Haslett. C’est aussi à ce moment-là qu’il lui a dit à ce dernier qu’il n’avait rien à ajouter car les documents parlaient d’eux-mêmes (pièce 17). M. Haslett n’était pas d’accord avec les faits relatés par le l t -col. Gee. Relativement à la pièce 17, il a déclaré ce qui suit : (1) il était faux de dire qu’il avait été muté dans le poste d’inspecteur des contrats parce qu’il était incapable de travailler en équipe;

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Page 6 e Krushen a envoyée au l t -col. Gee, dans m e Krushen qu’il l’avait fait lors de la

Decision Page 7 (2) une décision arbitrale a été rendue à cet égard (mais il n’a pas donné de numéro de dossier ni de référence). [Au cours de la présentation des arguments en l’occurrence, la soussignée a appris que cet incident avait entraîné une suspension d’une journée (dossier de la Commission : 166-2-10738, tranchée par l’arbitre T.W. Brown).]

(3) c’est complètement faux; (4) ce n’est pas vrai même si les rapports d’évaluation personnelle contiennent des commentaires à cet effet;

(5) M. Haslett ne s’est pas souvenu d’avoir soulevé cette question à la réunion du 20 juillet 1993;

(6),(7) le l t -col. Gee ne l’a pas mentionné à la réunion du 20 juillet 1993. En contre-interrogatoire, M. Haslett a admis qu’il a présenté divers griefs de harcèlement, mais que ce n’est qu’en novembre 1993, lors du séminaire organisée par M. Lamirande, qu’il a pris conscience de ce qui constituait du harcèlement. M e Lafrenière a montré cinq documents à M. Haslett, certains datant de 1988, concernant des griefs de présumé harcèlement qu’il a déposés. M. Haslett a reconnu la pièce 23, un grief déposé le 6 avril 1988 dans lequel il a prétendu avoir été « intimidé et harcelé par le capt Tracey ». Ce même jour, il a aussi déposé un grief de présumé harcèlement dont il aurait été victime de la part de l’adjum Henry (pièce 22). Le 20 juin 1988, il a présenté un troisième grief contre du présumé « harcèlement personnel » dont il aurait fait l’objet par l’administration à la suite d’une réprimande écrite (pièce 21). Le 20 mars 1990, M. Haslett a déposé un grief alléguant être victime de harcèlement parce que trois personnes avaient contrevenu à l’article M-1 et à la clause M-1.01 de la Convention cadre (pièce 20). Le 7 juin 1990, dans un autre grief, il s’est plaint de harcèlement de la part de l’administration (pièce 19). Puis, le 29 avril 1991, il a déposé un grief dans lequel il s’est plaint de harcèlement de la part de l’adjum Mills (pièce 18).

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Decision Page 8 M. Haslett a déclaré que l’idée de se plaindre lui est venue après avoir assisé à la séance d’information de M. Lamirande. Il a reconnu qu’il n’avait pas été victime de harcèlement en novembre 1993, mais qu’il remontait à la réunion du 20 juillet 1993. Il ne s’est pas souvenu de la date à laquelle il avait écrit à M. Lamirande qui a accusé réception de sa lettre le 2 décembre 1993. La lettre a peut-être été envoyée le 26 novembre 1993, mais il n’est pas sûr. M. Haslett a reconnu avoir reçu la lettre du l t -col. Gee, datée du 30 novembre 1993, le convoquant à une réunion pour discuter de l’incident du 27 novembre 1993 il aurait proféré des menaces contre M me Heenan (pièce 24). Cet incident a donné lieu à une suspension de 11,5 jours, laquelle a fait l’objet d’un grief renvoyé à l’arbitrage (dossier de la Commission : 166-2-25825) qui a été instruit les 23 juin et 29 novembre 1995. M. Haslett a maintenu catégoriquement qu’il avait écrit à M. Lamirande avant de recevoir la lettre de l t -col. Gee le convoquant à une réunion pour discuter des présumées menaces proférées contre M me Heenan (pièce 24).

M. Haslett a déclaré que lui-même et M. Hillis sont sortis de la réunion d’instruction du grief tenue le 20 juillet 1993 après que le l t -col. Gee eut indiqué le « choix » qu’il offrait à M. Haslett. Il a été question durant toute la réunion des documents que M. Haslett voulait faire retirer de son dossier personnel. D’après ce dernier, lorsque le l t -col. Gee s’est levé de derrière son bureau pour s’asseoir près de lui, il était toujours question du grief. L’audition du grief n’a pris fin qu’au départ de MM. Hillis et Haslett. Ce dernier a ajouté que lui-même et le l t -col. Gee « se comprenaient et [avaient] effectivement levé le ton ». M. Haslett était contrarié; il n’en revenait pas des propos tenus par l t -col. Gee. Il a affirmé que ce dernier n’a pas dit, en s’assoyant près de lui, qu’il voulait l’entretenir de son attitude. M. Haslett a cependant précisé qu’il était contrarié et qu’il ne se souvenait pas très bien de ce dont il avait été question. Il s’est rappelé que l t -col. Gee avait mentionné « le choix » à deux reprises, mais non pas ses paroles exactes, qu’il a utilisé les termes « procédures de congédiement immédiatement » et non pas le terme « renvoi ». M. Haslett ignorait à l’époque ce que son dossier aurait pu contenir pour justifier son congédiement.

M. Haslett a indiqué que la pièce 13, un document daté du 4 février 1994 qu’il a lui-même rédigé, est un compte rendu des propos du l offensants lors de la réunion du 20 juillet 1993 :

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t -col. Gee qu’il a jugés

Decision Page 9 [traduction] 1. Que tout le monde s’entend pour dire que je suis un employé difficile.

2. Qu’il s’est assis près de moi pour que je puisse voir la couleur de ses yeux.

3. Que mon ancien superviseur risquait de faire de la prison et que la même chose pourrait m’arriver si je le défendais.

4. Que chaque employé avait deux dossiers et qu’en cas de recours à l’arbitrage, ces dossiers sont immédiatement détruits.

5. Que l’APCB (Joyce) l’engueulerait sans doute à l’issue de la réunion à cause de ce qu’il a dit.

6. Qu’il ne voulait pas entendre ma version des faits parce que les documents parlaient d’eux-mêmes.

7. Que j’avais deux choix : retirer mon grief ou perdre mon droit de présenter un grief parce qu’il allait immédiatement entamer des procédures de congédiement.

8. Que je devais en discuter avec mon représentant syndical et lui faire part de ma décision, car il était sérieux.

M. Haslett ne s’est pas souvenu de ce qu’il avait répondu au l t -col. Gee le 20 juillet 1993 lorsque ce dernier lui a offert « le choix » à deux reprises. Il a ajouté que la première fois fut environ cinq minutes après le début de la réunion, puis la seconde fois une vingtaine de minutes plus tard, juste avant son départ en compagnie de M. Hillis. M. Haslett a expliqué s’être senti victime d’abus de pouvoir de la part du l t -col. Gee. Il a eu l’impression de ne « compter pour rien » et qu’il n’aurait même pas se trouver là. M. Haslett a nié que l t -col. Gee lui ait dit « de se reprendre en main » sinon il entamerait des procédures de renvoi.

En contre-interrogatoire, M. Haslett s’est souvenu de la rencontre qu’il a eue avec M m e Krushen le 29 mars 1994. M e Lafrenière a présenté en preuve les notes prises lors de cette entrevue (pièce 25). M. Haslett a déclaré qu’il a lu le document avant de le signer, mais qu’il n’y a pas accordé beaucoup d’importance. D’après la pièce 25, M. Haslett a indiqué que « le l t -col. Gee a mentionné à deux reprises durant la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 10 conversation qu’il [M. Haslett] avait deux choix, qu’il devait se reprendre en main ». Lors du contre-interrogatoire, toutefois, M. Haslett a déclaré que ce n’était pas ce que le l t -col. Gee avait dit, que ce dernier parlait sérieusement lorsqu’il lui a donné « le choix » et l’a menacé de congédiement s’il maintenait son grief. M. Haslett a contesté quelques-unes des déclarations qu’il aurait faites à M m e Krushen le 29 mars 1994 et qui sont reproduites dans la pièce 25. Il a indiqué qu’il ne voulait pas utiliser l’expression « donner de la merde » devant elle et que c’est la raison pour laquelle il a affirmé que l t -col. Gee avait dit « Cela va sans doute me causer des problèmes, mais je m’arrangerai » en s’assoyant près de lui. M. Haslett a dit à M me Krushen qu’il avait écrit à M. Lamirande le 26 novembre 1993. Or, en contre-interrogatoire, il a affirmé qu’il ne se souvenait pas d’où provenait cette date et qu’il avait écrit la lettre durant les heures de travail un vendredi et l’avait mise à la poste un samedi. M. Haslett a dit à M me Krushen que la réunion du 20 juillet 1993 avait duré une dizaine ou une quinzaine de minutes, mais que c’était parce qu’il était « troublé à la sortie de la réunion ». Au cours de l’audience en arbitrage, il a toutefois indiqué que la rencontre avait duré de 30 à 35 minutes au maximum bien qu’il n’en ait pas été sûr: elle aurait pu aussi bien avoir duré 10, 15 ou 30 minutes.

Le 20 juillet 1993, à l’audition du grief, M. Haslett se savait visé par une plainte de harcèlement déposée par un collègue (M. Abbott). D’après lui, il n’était pas question « d’entrevue-conseil » ce jour-là lorsque le l superviseur. Il a plutôt interprété les propos du l pendant que l’instruction du grief était en cours. Selon M. Haslett, le l précisé pourquoi il le considérait comme un employé difficile ni mentionné son dossier antérieur.

M. Haslett a expliqué que les documents qu’il désirait faire retirer de son dossier personnel n’étaient pas des lettres disciplinaires ni des lettres d’entrevue-conseil. C’est par pure coïncidence qu’il s’est adressé à M m e Heenan, la nouvelle APCB, et non pas à M. Graves. M. Haslett a indiqué qu’il « a abandonné son grief parce qu’[il] ne voulait pas perdre [son] emploi ». Lors de l’interrogatoire principal, il a déclaré avoir dit à M. Hillis qu’il voulait retirer son grief et s’être attendu à ce que M. Hillis prévienne le l t -col. Gee, tandis qu’en contre-interrogatoire, il a déclaré l’avoir abandonné. M. Haslett a fait remarquer que le rapport d’évaluation du

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t -col. Gee a fait allusion à son ancien t -col. Gee comme des menaces t -col. Gee n’a pas

Decision rendement pour la période du 1 er décembre 1989 au 1 un des documents qu’il aurait voulu que le l dossier personnel. Ce document, selon lui, était de nature disciplinaire et on aurait le retirer au bout de deux ans. L’employeur n’était pas du même avis en ce qui concerne la pièce 26. Ce document indique ce qui suit :

[traduction] Les superviseurs de M. Haslett ont fait une description exacte et équitable du rendement de cet employé au cours de la période visée par cette évaluation. Il a éprouvé de la difficulté à s’entendre avec le personnel, particulièrement ses supérieurs comme en témoigne le fait que l’O Prod a établir le présent RÉR en qualité de superviseur de M. Haslett parce que ce dernier a refusé d’avoir affaire à son supérieur immédiat, le chef de la production. Au cours de la période visée par le rapport d’évaluation, M. Haslett a reçu une lettre d’orientation concernant son manque de leadership et de techniques d’encadrement, ses mauvaises relations de travail, son refus d’accepter des directives en matière de gestion et des critiques constructives. Il doit améliorer son rendement au travail.

Au cours de cette période, M. Haslett a été supervisé par le capitaine M.H. Congdon (neuf mois) et l’adum D.R. Mills (18 mois). On lui a attribué une cote de deux sur cinq pour l’ensemble de son rendement. M. Haslett a reconnu que l’administration a essayé de l’aider à régler ses problèmes au moyen « d’entrevues-conseils » et qu’il a reçu des lettres concernant ses prétendues difficultés. D’après lui, cependant, il n’éprouve aucune difficulté à comprendre les gens, à s’entendre avec les autres employés ou avec ses collègues. En outre, il n’a jamais rencontré ses superviseurs pour discuter « d’orientation et de ses rapports avec ses collègues ». En ce qui le concerne, la réunion du 20 juillet 1993 était une audition de grief et non pas une « entrevue-conseil ».

M. Haslett a ajouté que la lettre envoyée par M. P.J. Graves à M. J.W. Blair, président de la section locale 704 de l’UEDN, datée du 10 août 1990, aurait être retirée de son dossier personnel. Cette lettre, intitulée « Refus du congé pour accident du travail - M. Walter G. Haslett » (pièce 27), est une réponse à la demande formulée par M. Blair d’une définition du terme « acte délibéré d’inconduite » et d’une justification du refus d’accorder le congé pour accident du travail. M. Graves a fait Commission des relations de travail dans la fonction publique

Page 11 er décembre 1990 (pièce 26) est t -col. Gee et M m e Heenan retirent de son

Decision Page 12 référence aux dispositions de la Convention cadre de l’AFPC selon lesquelles un employé n’a pas droit au congé si l’accident est le résultat d’un acte délibéré d’inconduite de sa part. Le 24 mai 1988, semble-t-il, M. Haslett a été reconnu coupable d’avoir harcelé un de ses subordonnés et a reçu une lettre de réprimande à cet effet. M. Haslett a donc déposé un grief le 25 mai 1988 pour contester cette mesure disciplinaire et il est demeuré absent du travail pendant un an et demi. Il a demandé le congé pour accident du travail à l’égard de six semaines de cette période d’absence. L’employeur a reconnu que M. Haslett a pu souffrir de stress à la suite des actes posés par l’administration (la lettre de réprimande et son affectation temporaire à un autre poste), mais, au cours de l’été de 1988, la commission des accidents du travail ayant rejeté la réclamation, l’employeur a jugé que M. Haslett n’avait pas droit au congé pour accident du travail. D’après l’employeur, le stress de M. Haslett était imputable à sa réaction excessive et à son indignation face à ce qu’il considérait comme un abus d’autorité de la part de l’administration (la lettre de réprimande et la réaffectation temporaire, pièce 27). M. Haslett a déclaré qu’il considère ce document (pièce 27) comme étant inapproprié même s’il s’agit d’une réponse à une demande de renseignements formulée par son représentant syndical.

M. Haslett a déclaré qu’il est impossible qu’il ait mal compris les déclarations faites par le l t -col. Gee lors de la rencontre du 20 juillet 1993. De plus, il n’a rien dit en entendant les commentaires du l t -col. Gee, mais les a répétés par la suite à M. Brian Molsberry. (M. Molsberry n’a pas été cité à comparaître.) M. Haslett a examiné la pièce 17, les exemples fournis par le l t -col. Gee à M me Krushen le 8 avril 1994, et, selon lui, le l t -col. Gee n’aurait pas mentionné le fait qu’il devait apprendre à s’entendre avec les gens et faire en sorte qu’il ne devienne pas un fardeau administratif (6 e et 7 e paragraphes de la pièce 17). M. Haslett a ajouté qu’il est impossible qu’il n’ait pas prêté attention lors de la rencontre du 20 juillet 1993. De plus, il n’a pas déposé la présente plainte aux termes de l’article 23 à cause de la suspension de 11,5 jours sans traitement imposée par le l t -col. Gee ou de la suspension de deux jours purgée en août 1993.

M. Keith Hillis occupe le poste de Chef de prévention des incendies à la BFC Shilo depuis mars 1970. En juillet 1993, il était premier vice-président de la section locale 50704 de l’UEDN. Il a dit avoir été présent à la réunion du 20 juillet 1993. Il a

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Decision Page 13 pris quelques notes durant la réunion et à son retour au bureau. Ces notes manuscrites, non datée et rédigées en style télégraphique, constituent la pièce 29. Elles n’indiquent pas qui a dit quoi, et leur auteur a utilisé trois stylos différents : les deux premières parties ont été rédigées à l’encre bleu de ton différent et la dernière à l’encre rouge. M. Hillis n’a pas précisé à quel moment il avait noté les trois derniers commentaires. Par conséquent, ces notes n’aident pas à établir si le l t -col. Gee a oui ou non tenu les propos qu’on lui impute. Selon M. Hillis, ce dernier lui a expliqué, ainsi qu’à M. Haslett, qu’il avait ses propres dossiers sur « tout le monde » et qu’il « détruirait tous les documents sauf ceux qui se trouvent dans le dossier personnel ». D’après M. Hillis, le l t -col. Gee ne devrait garder qu’un seul dossier par employé, soit le dossier du personnel civil. Il l’a d’ailleurs mentionné au l t -col. Gee au cours de la réunion. Il se souvient d’avoir entendu le l t -col. Gee dire que « l’APCB (M m e Heenan) allait sans doute lui donner de la merde à l’issue de la réunion à cause de ses déclarations telles que le fait d’avoir des dossiers en double ». Ensuite, vers la fin de la réunion, lorsque M. Hillis a été sur le point de partir en compagnie de M. Haslett, le l t -col. Gee a dit à ce dernier que s’il maintenait son grief on amorcerait la procédure de renvoi. M. Hillis a expliqué que la discussion a parfois dégénéré et qu’il a été question des altercations entre M. Haslett et d’autres personnes ainsi que du fait que ce dernier faisait l’objet d’une enquête parce qu’il avait harcelé un collègue. M. Hillis s’est également rappelé que le l t -col. Gee a mentionné qu’une autre personne allait sans doute faire de la prison et demandé à M. Haslett s’il voulait le suivre. Le l t -col. Gee a examiné le dossier personnel de M. Haslett et l’a accusé d’être un employé difficile, d’avoir des problèmes avec ses superviseurs, gestionnaires, subordonnés et collègues. M. Hillis a dit que le l t -col. Gee s’est promené dans le bureau puis s’est assis en face de M. Haslett. Il ne savait pas au juste il voulait en venir. Il n’a pas réagi lorsque le l t -col. Gee a donné « le choix » à M. Haslett de retirer son grief ou d’être renvoyé. Il voulait d’abord en discuter avec ce dernier avant de prendre une décision. Le l t -col. Gee a invité M. Haslett à discuter du « choix » avec M. Hillis puis à lui faire part de sa décision.

M. Hillis a déclaré que M. Haslett tremblait et était effrayé à la sortie de la réunion. Ce dernier lui a dit qu’il n’avait d’autre choix que d’abandonner son grief, que c’était sa décision; il savait qu’il avait le droit de déposer un grief. Aussi, M. Hillis en a discuté, ainsi que de la possibilité de présenter une plainte aux termes de

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Decision Page 14 l’article 23, avec M. Willie Yaworski, deuxième vice-président de la section locale, et M. Brian Molsberry, mais aucune décision n’a été prise. M. Hillis a également été interviewé par M m e Krushen qui désirait savoir ce que l’on avait dit et ce qui s’était passé au cours de la réunion du 20 juillet 1993.

En contre-interrogatoire, M. Hillis a reconnu que son souvenir de la réunion s’était estompé avec le temps. Il n’a pu dire combien de temps elle avait duré; entre 30 et 45 minutes. Il a indiqué qu’elle avait été essentiellement à sens unique, c’est-à-dire que le l t -col. Gee avait été à peu près le seul à parler. MM. Hillis et Haslett avaient une liste de documents qu’ils voulaient faire retirer, mais le l t -col. Gee n’en a retiré qu’un seul qu’il a jeté à la poubelle. Selon M. Hillis, le l t -col. Gee est demeuré assis à son bureau pendant que l’on discutait des documents. Il s’est rendu compte que celui-ci ne retirerait pas d’autres documents lorsqu’il s’est levé et est passé à autre chose. Il n’a pu dire à quel moment précis le l t -col. Gee a affirmé que M. Haslett était un employé difficile parce qu’il était question du dossier relatif au grief ainsi que d’autres dossiers et documents. Selon M. Hillis, le l t -col. Gee a menacé le choix ») M. Haslett une seule fois, soit vers la fin de la réunion. Il ne s’est pas souvenu de l’avoir entendu dire à M. Haslett de se reprendre en main. Il lui aurait plutôt dit de changer d’attitude. Il est possible qu’il ait dit qu’à défaut de quoi M. Haslett serait renvoyé.

M. Hillis ne s’est pas souvenu d’avoir été présent lorsque M. Haslett s’est présenté au bureau de M m e Heenan pour lui demander de retirer des documents de son dossier personnel. Il s’est rappelé avoir rencontré cette dernière pour la première fois le 20 juillet 1993. M. Hillis a eu l’impression que M. Haslett avait semblé étonné d’apprendre à la réunion du 20 juillet 1993 qu’il faisait l’objet d’une enquête pour harcèlement. Il a précisé que M. Haslett se demandait pourquoi le l t -col. Gee le considérait comme un employé difficile; il n’acceptait pas qu’on le perçoive ainsi; il ne se considérait pas comme un employé difficile. Le 12 avril 1994, M. Hillis a signé un document concernant l’entrevue qu’il avait eue avec M me Krushen le 29 mars 1994 (pièce 30).

M. Hillis a déclaré qu’il ne pouvait répéter textuellement les propos tenus par le l t -col. Gee lors de la réunion du 20 juillet 1993 ni qu’elle avait été son intention Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision lorsqu’il avait donné « le choix » à M. Haslett. Il a interprété cette déclaration comme étant un ordre d’abandonner le grief. Le l employé difficile. Il a été question du grief durant toute la réunion du 20 juillet 1993. M. Hillis n’a pu se souvenir de la réaction qu’il a eue ni de la réponse qu’il a faite au l t -col. Gee concernant « le choix ». Il ne s’est pas rappelé si le l terme renvoi ou congédiement.

En réponse aux questions de M e Lafrenière lors de l’examen de la pièce 28 (les notes manuscrites de M. Haslett concernant les propos du l t -col. Gee lors de la réunion du 20 juillet 1993) à l’audience en arbitrage, M. Hillis a déclaré :

[traduction] 1. Le lt -col. Gee a effectivement affirmé que : « Que tout le monde s’entend pour dire que je suis un employé difficile ».

2. Il ne s’est pas souvenu d’avoir remarqué si le l « s’est assis près de moi pour que je puisse voir la couleur de ses yeux ».

3. Il s’est rappelé que le l t -col. Gee a dit que « l’ancien superviseur de M. Haslett allait faire de la prison et que si je le défendais la même chose pourrait m’arriver ».

4. Il s’est également rappelé que le l « l’APCB (Joyce) l’engueulerait sans doute à l’issue de la réunion à cause de ses déclarations ».

5. M. Hillis ne s’est pas souvenu de la déclaration selon laquelle le l t -col. Gee « ne voulait pas entendre ma version des faits parce que les documents parlaient d’eux-mêmes ».

6. M. Hillis s’est rappelé que le l t -col. Gee avait offert un choix et qu’il avait utilisé le terme renvoi ou congédiement, mais non pas qu’il ait dit que M. Haslett avait « deux choix ».

7. M. Hillis a confirmé que le l discuter » avec son représentant syndical, mais non pas de « lui faire part de sa décision ».

M. Hillis n’a pas informé le l t -col. Gee de la décision de M. Haslett d’abandonner le grief.

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Page 15 t -col. Gee estimait que M. Haslett était un t -col. Gee avait utilisé le

t -col. Gee

t -col. Gee a dit que

t -col. Gee a dit « d’en

Decision Page 16 À 11 h, le matin du 23 juin 1995, M e Lafrenière a produit une copie de la plainte que M. Haslett a envoyée à M. Lamirande en date du 26 novembre 1993 (pièce 31). M. Haslett a donc été reconvoqué et contre-interrogé au sujet de ce document. Il l’a reconnu. Il a déclaré qu’il l’avait rédigé sans l’aide de personne. Il ne s’est pas souvenu du moment précis il l’avait écrit le 26 novembre 1993. Il s’est souvenu seulement de l’avoir rédigé avant le 27 novembre 1993 et de l’avoir mis à la poste avant le 2 décembre 1993. Le 30 novembre 1993, il a été convoqué à une entrevue disciplinaire concernant des menaces qu’il aurait présumément proférées le samedi 27 novembre 1993 (pièce 24). M. Haslett a affirmé qu’il a entendu parler pour la première fois du fait qu’il faisait l’objet d’une plainte de harcèlement lorsque M me Heenan le lui a dit, quand il est allé à son bureau pour consulter son dossier personnel et lui demander d’en retirer certains documents. L’entrevue relative à la plainte de harcèlement a eu lieu le 13 juillet 1993, à l’issue de laquelle on lui a imposé une suspension de deux jours. M. Haslett n’a pas fait de lien entre l’allusion du l t -col. Gee à l’emprisonnement de son ancien superviseur et la plainte de harcèlement. Il n’a pas répondu clairement lorsque M e Lafrenière lui a demandé si M. Hillis s’était trompé en affirmant dans son témoignage que M. Haslett avait été étonné d’apprendre qu’on l’avait accusé de harcèlement. Sa réponse a été que « M. Hillis pouvait à la fois s’être et ne pas s’être trompé ».

Le l t -col. William F. Gee a déclaré être le chef d’état-major du District de l’Alberta à Calgary. En 1993, il est devenu l’officier de l’administration de la BFC Shilo. Il est arrivé à la base le 7 avril 1992. Il compte 32 années de service au sein de la Défense nationale. Il occupe des postes de commandement depuis 1968 bien que ce soit la première fois qu’il occupe le poste d’officier de l’administration d’une base et que toutes les questions en matière de personnel relèvent de lui. Il est responsable de 375 employés. Il a déjà été l’un des paliers de la procédure de règlement des griefs avant 1993, mais pour les Forces armées. Il a déjà traité des griefs déposés par le personnel civil avant le 20 juillet 1993, mais la présente audience est la première à laquelle il assiste concernant M. Haslett. Le l t -col. Gee a ajouté qu’il n’avait jamais personnellement rencontré ce dernier avant la réunion du 20 juillet 1993. Le 15 juin 1993, M me Heenan a remplacé M. Graves, qui a pris sa retraite, dans le poste d’agent du personnel civil de la base. Au cours de l’été de 1992, M m e Heenan a travaillé pour Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 17 M. Graves et tous les deux lui ont fait un compte rendu au sujet de M. Haslett. Au début de juin 1993, M. Graves s’est présenté au bureau du l t -col. Gee pour l’informer que M. Haslett avait demandé que l’on supprime plusieurs documents de son dossier personnel. M. Graves lui a décrit les antécédents de M. Haslett quant à son dossier et à son travail. Il lui a expliqué que M. Haslett était un employé difficile. Il lui a essentiellement conseillé de ne pas perdre la trace des incidents le concernant. Il lui a aussi parlé de certains de ces incidents en essayant de situer le l t -col. Gee dans le contexte général des rapports antérieurs de M. Haslett avec l’APCB. M. Graves lui a suggéré de lire les décisions rendues en arbitrage ainsi que les plaintes de harcèlement concernant M. Haslett. M. Graves a donné l’impression que les griefs et les plaintes de M. Haslett étaient de nature frivole.

Le l t -col. Gee a expliqué que ses antécédents professionnels sont strictement militaires. Il a ajouté que la Défense nationale n’a pas adopté la gestion de la qualité totale tandis que du côté des Forces armées on travaille en équipe. Le l t -col. Gee ne voulait pas donner l’impression qu’il se laissait mener par le bout du nez. Il croyait que les gestionnaires civils traitaient avec l’administration et que l’APCB devait s’occuper de tous les problèmes relatifs au personnel civil. Il voulait que les gestionnaires assument cette responsabilité.

D’après le l t -col. Gee, M me Heenan lui a expliqué que M. Haslett avait officiellement demandé (par voie de grief) qu’on retire certains documents de son dossier personnel. Elle lui a montré la liste des documents en question et a attiré son attention sur les diverses décisions arbitrales. Elle lui a recommandé de rejeter la requête. Pour le convaincre de la justesse de cette décision elle lui a remis le dossier personnel de M. Haslett. Le l t -col. Gee l’a examiné durant le week-end qui a précédé le 20 juillet 1993.

Voici ce dont se souvient le l t -col. Gee de la réunion du 20 juillet 1993. M. Haslett était assis au bout de la table à la droite de M. Hillis. Le l t -col. Gee s’est aussi rappelé l’avoir vu de l’autre côté, près de M me Heenan (pièce 32). Comme le l t -col. Gee connaissait déjà M. Hillis, il s’est présenté à M. Haslett, puis s’est assis dans le fauteuil derrière son bureau. Il a décrit ce fauteuil comme étant en quelque sorte un « outil de déférence » d’où il dirige les audiences.

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Decision Page 18 Le l t -col. Gee a indiqué qu’il a commencé par lire le grief avant d’examiner chaque document en détail. MM. Hillis et Haslett sont intervenus à de nombreuses reprises. Le l t -col. Gee affirme avoir consacré entre sept et huit minutes à chaque document. Par conséquent, la discussion entourant ces documents a duré une vingtaine de minutes. On a discuté des circonstances de chaque document. Le l t -col. Gee a affirmé que l'échange entre MM. Hillis et Haslett et lui-même s'était déroulé à peu près moitié-moitié. Chaque document a fait l’objet d’une intervention.

De l’avis du l t -col. Gee, l’audition du grief avait pour objectif d’expliquer la position de l’employeur. Par conséquent, il a essayé de faire preuve de retenue, de ne pas se montrer agressif et de s’en tenir aux faits relativement à chaque document. Il pensait que M. Haslett avait ses propres priorités surtout en ce qui concerne deux rapports d’évaluation de rendement auxquels il revenait constamment. Le l t -col. Gee a eu de la difficulté à maintenir le fil de la discussion; M. Haslett changeait constamment de sujet. Et M. Hillis avait lui aussi ses propres priorités.

Le l t -col. Gee a rendu une première décision à la suite de l’examen de chaque document, puis a fait part de sa décision définitive à la fin de la lecture de tous les documents. Il a accepté de retirer un document (pièce 27). Entre-temps, M me Heenan notait soigneusement chaque décision prise à l’égard de chaque document. Selon le l t -col. Gee, il a catégoriquement affirmé que l’audience était terminée au bout de 20 minutes de discussion. Il s’est levé, puis s’est placé devant le bureau. Étant donné qu’il n’avait pas eu l’intention de tenir une entrevue-conseil, il a tenu les propos suivant en expliquant à M. Haslett qu’il « n’en avait pas » discuté avec M m e Heenan : « Walter, je vais sans doute me faire engueuler par l’APCB pour ce que je m’apprête à faire ». Il s’est avancé vers la chaise située à proximité de M. Haslett et a ajouté : « Walter, je suis très sérieux, je ne le nie pas. Vous voyez la couleur de mes yeux. » Il s’agit d’une expression dont il se sert pour indiquer la gravité de la situation; en l’occurrence qu’il désirait s’entretenir avec M. Haslett d’une chose grave.

En s’assoyant près de M. Haslett, le l t -col. Gee indiquait par qu’il abandonnait sa position d’autorité. Il voulait changer le ton de la discussion et attirer l’attention du plaignant. C’est à ce moment-là qu’il a dit : « Walter, vous avez beaucoup de

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Decision Page 19 problèmes. » À l’époque, M. Charlie Abbott, un des collègues de M. Haslett, avait déposé un plainte contre ce dernier.

Le l t -col. Gee a déclaré qu’il n’a pas tenu les propos que lui prête M. Haslett dans les 1 er , 2 e , 4 e et 7 e paragraphes de la pièce 13. Il a par contre dit quelque chose qui ressemble à l’affirmation que l’on peut lire au 3 e paragraphe et a confirmé avoir tenu les propos rapportés aux 5 e et 6 e paragraphes. Lors de l’audition du grief (les 20 premières minutes de la rencontre), selon le l t -col. Gee, il n’a pas accusé M. Haslett d’être un employé difficile ni l’a-t-il accusé de quoi que ce soit. Il est cependant possible qu’à mi-chemin de la lecture des documents ainsi que durant les explications touchant ces derniers, il ait dit qu’il avait entendu dire que M. Haslett était un employé difficile. En ce qui concerne le troisième paragraphe : « que l’ancien superviseur de M. Haslett risquait de faire de la prison et que [s’il] le défendai[t] la même chose était susceptible de [lui] arriver », le l t -col. Gee a précisé qu’il a prononcé ces paroles durant l’entrevue-conseil, après avoir reproché à M. Haslett sa difficulté à s’entendre avec les gens. Le l t -col. Gee a fait remarquer qu’une série de rapports d’évaluation le mentionnait. De plus, il y avait eu six ou sept plaintes de harcèlement (pièces 18 à 23) qui avaient toutes été rejetées par l’employeur. M. Haslett a répondu au l t -col. Gee qu’il était aimé de tous ses collègues dans l’atelier. C’est à ce moment-là que le l t -col. Gee a mentionné que le superviseur faisait l’objet d’une enquête. Certaines indications laissaient croire à l’époque que M. Haslett était mêlé à des activités criminelles et qu’il risquait de se retrouver en prison. Le l t -col. Gee le lui a mentionné pour le prévenir de ne rien dire qui pourrait l’incriminer.

D’après le l t -col. Gee, c’est M. Hillis qui a dit que : « chaque employé a deux dossiers et qu’en cas de recours à l’arbitrage, ces dossiers sont immédiatement détruits ». Avant l’entrevue, le l t -col. Gee avait discuté avec M. Hillis du droit de la direction de garder des dossiers. Le l t -col. Gee a indiqué qu’il insistait pour que les gestionnaires supérieurs gardent de bonne notes. M. Hillis se plaint depuis longtemps que le Ministère garde des dossiers en double.

Le l t -col. Gee a déclaré, relativement au 5 e paragraphe de la pièce 13, qu’il a employé le terme « engueuler » en parlant de la réaction de l’APCB, car l’APCB considère les choses d’un point de vue officiel et maintient une approche

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Decision Page 20 contradictoire. Chez les militaires, cependant, on se considère comme une famille et cette approche est dysfonctionnelle. Le l t -col. Gee nie avoir prononcé les paroles rapportées par M. Haslett aux 7 e et 8 e paragraphes de la pièce 13. Ce dernier a contesté chaque document. Il voulait revenir sur toutes les questions et litiges qui avaient déjà fait l’objet d’une décision arbitrale et de plaintes. C’est pourquoi le l t -col. Gee a dit à M. Haslett : « Walter, vous avez beaucoup de problèmes. Je ne veux pas revenir [là-dessus], les documents parlent d’eux-mêmes... » Les griefs de M. Haslett avaient été rejetés comme en faisaient foi les diverses décisions arbitrales et plaintes. Le l t -col. Gee a catégoriquement nié d’avoir menacé M. Haslett de congédiement s’il maintenait son grief.

Le l t -col. Gee a affirmé qu’il était impossible qu’il ait fait une telle déclaration (le présumé « choix » dont parle M. Haslett). Il a expliqué qu’il essayait de lui faire comprendre qu’il devait regarder les choses « dans l’ensemble »; « qu’il devait s’entendre avec les gens »; « se reprendre en main ». Le l t -col. Gee a précisé que c’était la première fois qu’il rencontrait M. Haslett. Il était exaspéré, d’où la déclaration : « Si vous continuez comme ça, vous ne pourrez demeurer au service du Ministère ». Le l t -col. Gee a déclaré qu’il n’a pas fait de lien entre un congédiement éventuel et le grief. De plus, il a fait cette déclaration à la toute fin de l’entrevue. Il a insisté sur le fait qu’il n’avait à aucun moment indiqué à MM. Haslett et Hillis qu’il y aurait des répercussions si M. Haslett maintenait son grief. Le conseil qu’il a donné à M. Haslett d’en discuter avec son représentant syndical (8 e paragraphe de la pièce 13) a été donné immédiatement après celui d’améliorer ses rapports interpersonnels au risque de perdre son emploi. Le l t -col. Gee faisait référence au comportement général de M. Haslett. Il lui a dit : « il est indispensable de convaincre la haute administration de la Base (BFC Shilo) de sa bonne volonté ou de son désir de changer, et d’en discuter avec son représentant syndical, puis de lui faire part de sa décision ». La rencontre a pris fin avec ces paroles. Le l t -col. Gee a ajouté qu’il n’en a plus été question par la suite.

Le l t -col. Gee a déclaré qu’il a pris connaissance pour la première fois le 14 janvier 1994 des allégations de M. Haslett telles que rapportées dans la pièce 13. Ce jour-là, on a demandé à M. Haslett de fournir des détails au sujet de la plainte de harcèlement déposée contre lui. M. Haslett a exigé des excuses de la part du l t -col. Gee pour les propos tenus lors de la réunion du 20 juillet 1993. Ce dernier ignorait Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 21 pourquoi M. Haslett exigeait de telles excuses. Il ne s’est donc pas excusé. Les allégations ont fait surface le 2 décembre 1993 avec l’imposition de la mesure disciplinaire (la suspension sans traitement de 11,5 jours) découlant des menaces proférées contre M me Heenan le 27 novembre 1993 (pièce 33). M. Haslett a déposé un grief contre cette suspension (dossier de la Commission 166-2-25825) et le Ministère a tenu une « audience » en janvier 1994 le l t -col. Gee a pour la première fois entendu parler des allégations de M. Haslett. Le l t -col. Gee a déclaré qu’avant l’imposition de la suspension de 11,5 jours (le 2 décembre 1993), il ne savait pas que M. Haslett avait déposé une plainte de harcèlement contre lui. Il a répondu au grief concernant le retrait de documents (pièce 8). C’est « l’APCB » (au bureau de M me Heenan) qui a rédigé la réponse, et le l t -col. Gee a insisté pour que l’on inclue le paragraphe résumant la discussion du 20 juillet 1993. Ce paragraphe est reproduit textuellement ci-dessous :

[traduction] Il semble M. Haslett que vous n’ayez aucun respect envers l’administration, son autorité légitime, et que vous ne soyez nullement intéressé à établir un esprit de corps avec les autres employés. C’est inacceptable. Vous devez changer d’attitude si vous désirez continuer de travailler au sein de la fonction publique.

Le l t -col. Gee a reconnu qu’une entrevue-conseil constitue une forme de mesure disciplinaire et qu’il n’avait envoyé aucun préavis de son intention de tenir une telle entrevue le 20 juillet 1993. Essentiellement, il ne prête pas foi au système contradictoire. À son avis, ce n'est pas la façon la plus efficace de régler les problèmes. Avant la rencontre, le l t -col. Gee ne s’était pas fait une idée concernant l’attitude de M. Haslett et la question de savoir s’il était ou non un employé difficile. C’est l’entrevue qui l’a convaincu. Il a ajouté qu’il n’a pas affirmé, lors de la réunion du 20 juillet 1993, qu’une partie de la rencontre allait être une entrevue-conseil et il n’a pas employé le terme « orientation ». Mais il y a effectivement eu orientation. D’après le l t -col. Gee, la réunion du 20 juillet 1993 avait été convoquée pour aider un employé à voir les faits du point de vue de la haute direction (le l t -col. Gee et le commandant de la base).

En sa qualité de gestionnaire responsable, le l de fermer les yeux sur une situation qui devait être réglée. C’est la raison pour

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t -col. Gee ne pouvait se permettre

Decision Page 22 laquelle il a décidé d’avoir un entretien avec M. Haslett et il a dit qu’il allait se faire engueuler par M me Heenan. Il ne voulait pas se montrer aussi rigoureux que l’APCB. La situation à laquelle le l t -col. Gee faisait allusion était les conflits perpétuels de M. Haslett, l’incapacité de ce dernier à s’entendre avec les gens et ses piètres relations interpersonnelles avec ses supérieurs, ses collègues et ses subordonnés. Le l t -col. Gee a essayé d’expliquer à M. Haslett qu’on pouvait presque qualifier ses griefs d’être frivoles et vexatoires étant donné qu’ils avaient tous été rejetés. Les allégations de ce dernier suivaient un schéma particulier. Le l t -col. Gee s’est quelque peu laissé influencé par l’opinion que s’était faite M. Percy J. Graves de M. Haslett à cause des incidents et des griefs passés. M. Graves avait été l’APCB à la BFC Shilo jusqu’en juin 1993.

Le l t -col. Gee a décrit son entrevue avec M me Krushen au cours de laquelle ils se sont entretenu des exemples du comportement insatisfaisant de M. Haslett déjà fournis (pièce 17), exemples que le l t -col. Gee avait extraits des dossiers concernant M. Haslett (les mesures disciplinaires, les décisions arbitrales ainsi que les rapports d’évaluation de rendement). À partir de ces dossiers, et des discussions qu’il a eues avec M. Graves et M m e Heenan, le l t -col. Gee a conclu que M. Haslett avait de la difficulté à travailler avec d’autres employés et ses superviseurs. Lors de la rencontre du 20 juillet 1993, il ne comprenait pas voulait en venir M. Haslett ni pourquoi il changeait de sujet. Il a donc commencé à se méfier des motifs de ce dernier. Il a constaté qu’il réagissait négativement toutes les fois que l’administration rendait une décision le concernant et qu’il contestait le droit légitime de l’administration de gérer.

M me Joyce Heenan a témoigné le 29 novembre 1995. Elle a déclaré qu’elle a été l’adjointe de l’agent du personnel civil de la base (APCBA) à la BFC Shilo de juillet 1992 à juin 1993, date à laquelle elle est devenue APCB. Avant juillet 1992, M me Heenan était un agent du personnel à Trenton. De 1986 à 1990, elle a été l’adjointe de l’APCB à la BFC Shilo. M. Percy G. Graves a été son superviseur de juillet 1992 à juin 1993. M me Heenan a été mise au courant de la situation relative à M. Haslett à cette époque, sa tâche principale étant la dotation et le recrutement. De plus, de 1986 à 1990, il y avait eu différentes histoires de relations de travail concernant M. Haslett. Elle a confirmé le fait que ce dernier a toujours eu de la difficulté à s’entendre avec ses collègues, ses subordonnés et ses superviseurs.

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Decision Page 23 M me Heenan a déclaré que la semaine avant le 15 juin 1993, M. Haslett a demandé par écrit de consulter son dossier personnel. La rencontre a eu lieu le 15 juin 1993, en présence de M m e Heenan, M me Linda Mawson (une préposée à la paie), M. Hillis et M. Haslett. M m e Heenan n’avait jamais eu affaire à M. Haslett avant ce jour-là. Ce dernier a demandé que l’on retire 14 documents spécifiques de son dossier. M m e Heenan lui a répondu que les documents en question devaient demeurer consigner dans le dossier; elle a néanmoins promis de les réexaminer par rapport à la politique du Ministère à ce sujet. Elle en a également discuté avec M. Ian Hamelin, agent principal des relations de travail pour la région, Défense nationale. M. Hamelin était d’accord avec la décision de rejeter la demande de M. Haslett. M m e Heenan a donc rédigé la pièce 6 le 21 juin 1993, informant M. Haslett de sa décision. Elle a décrit les documents que M. Haslett voulait faire retirer du dossier. Il s’agit de rapports d’évaluation de rendement, de documents concernant une demande d’indemnisation pour accident du travail, de documents relatifs à un programme de formation (pièces 34 et 35), etc.

De plus, en juin 1993, M. Charlie Abbott, un collègue de M. Haslett et un subordonné de l’adjudant-maître Boyd, a déposé un grief pour se plaindre de harcèlement dont il était victime de la part de MM. Haslett et Boyd. En date de la rencontre du 15 juin 1993, le grief Abbott venait d’être présenté, et l’employeur était sur le point d’y affecter un enquêteur et d’en informer les parties en cause.

Au début de la réunion du 15 juin 1993, M. Haslett était très agréable, mais dès qu’il y avait désaccord au sujet du retrait d’un des documents, il se mettait en colère, levait le ton et devenait tout rouge. M m e Heenan n’a rien fait pour provoquer cette réaction. Elle a également mentionné le grief Abbott, grief dont M. Haslett n’était pas au courant. En raison de la tournure que prenait la discussion entourant les documents, M m e Heenan a décidé de mettre fin à la rencontre. Le capitaine John Snyder, l’enquêteur, a terminé son rapport relatif au grief Abbott et l’a remis au l t -col. Gee le 16 juillet 1993. Il a conclu que M. Haslett avait harcelé M. Abbott. M. Haslett a été suspendu pendant deux jours.

M me Heenan a indiqué qu’elle a rencontré le l t -col. Gee cinq ou six jours avant la réunion du 20 juillet 1993 pour discuter du grief de M. Haslett concernant le retrait des documents. Ils ont tous les deux examiné les documents. L’audition du grief a eu Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 24 lieu le 20 juillet 1993 et les souvenirs de M me Heenan concernant cette rencontre sont exposés ci-dessous. Elle a ajouté qu’elle se souvenait très bien des commentaires du l t -col. Gee au sujet de la pièce 13. D’après M me Heenan, la réunion a duré entre une demi-heure et une heure. Au début, a-t-elle précisé, le l t -col. Gee était assis derrière son bureau (pièce 32) et les trois autres personnes présentes avaient pris place autour d’une petite « table de réunion » fixée au bureau. M. Haslett se trouvait d’un côté et M m e Heenan de l’autre. Elle aussi a été incapable de préciser était assis M. Hillis. Le l t -col. Gee a débuté la réunion en mentionnant le grief (pièce 7) puis a passé au travers des documents marqués d’un papillon. Il a décrit chaque document et expliqué la raison pour laquelle il fallait les garder dans le dossier. M. Haslett et le l t -col. Gee ont discuté de chaque document. La réunion s’est en grande partie déroulée dans le calme et les échanges ont été fructueux. Le l t -col. Gee a accepté de retirer un document qu’il a jeté à la poubelle. Il a ensuite affirmé que les autres documents devaient demeurer dans le dossier, puis a mis ce dernier de côté. La discussion a duré une quinzaine de minutes. C’est à ce moment-là que le l t -col. Gee a dit à M. Haslett que les divers documents concernant son comportement et son attitude l’inquiétaient énormément au point il avait jugé bon de demander à M me Heenan de lui remettre des copies des décisions arbitrales (dossiers de la Commission : 166-2-20616, 166-2-20737 et 166-2-20738). Il a ajouté qu’il voulait profiter de l’occasion pour entretenir M. Haslett de son rendement au travail. Il s’est levé, est passé devant le bureau et s’est assis près de M. Haslett. Il a effectivement déclaré que « M me Heenan allait l’engueuler pour ce qu’il s’apprêtait à dire ». En s’assoyant près de M. Haslett, le l t -col. Gee dit à ce dernier qu’il semblait avoir énormément de problèmes, ce à quoi M. Haslett a répondu : « Êtes-vous en train de me dire que je suis un employé difficile? » Le l t -col. Gee a répliqué que la façon dont M. Haslett traitait les gens au travail ainsi que ses supérieurs était inacceptable et que cela ne pouvait continuer. « Walter, a-t-il précisé, c’est grave, vous devez comprendre que je ne tolérerai pas ce type de comportement au travail. » Durant toute cette discussion, le l t -col. Gee a maintenu un ton et une attitude calmes. Il n’a pas levé la voix. M. Haslett, lui, par contre, a changé d’attitude au fur et à mesure qu’avançait la réunion et au fil des déclarations du l t -col. Gee. Il s’est mis sur la défensive et a parlé fort. Plus il parlait fort, plus le l t -col. Gee en faisait autant. Ce dernier a abordé de façon générale un ou deux cas spécifiques de comportement incorrect. M. Haslett Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 25 l’a interrompu en essayant de se justifier. Le l t -col. Gee a cependant répondu qu’il ne voulait pas entrer dans les détails des cas particuliers, que les documents parlaient d’eux-mêmes et que c’est l’attitude générale du M. Haslett envers l’administration qui était inacceptable. Il s’est mis à lui parler du présent en faisant allusion à ce qui se passait à ce moment-là à la Section du génie construction. Il a mentionné l’enquête en cours alors et le fait qu’un bon ami de M. Haslett, le sergent-major (tout le monde savait qu’il voulait dire l’adum Boyd), risquait de faire de la prison; il a fortement invité M. Haslett à faire un examen de conscience et à repenser son comportement.

M m e Heenan a expliqué qu’il y avait deux enquêtes en cours à l’époque. La première concernait le grief de M. Abbott et la seconde était issue de l’enquête menée par le capitaine Snyder ce dernier avait découvert certaines activités sur lesquelles la police militaire a fini par enquêter (consommation indue de boissons alcooliques au travail, cadeaux de boissons alcooliques ainsi que l’achat et la revente de l’équipement d’entrepreneurs par les inspecteurs des contrats). MM. Boyd et Haslett étaient visés par une enquête menée par la police militaire.

M me Heenan a expliqué en outre qu’au ministère de la Défense nationale, et particulièrement dans les Forces armées, on utilise couramment l’expression « faire de la prison » parce que les Forces armées ont leur propre système pénal et « les militaires » vont littéralement en prison. On entend souvent cette expression, spécialement chez les officiers. Selon M me Heenan, le l t -col. Gee mettait M. Haslett en garde; il a indiqué qu’il ne serait pas aussi tolérant que l’ancienne administration. M me Heenan et le l t -col. Gee en avaient discuté avant la réunion du 20 juillet 1993; ils avaient également discuté de l’intention de ce dernier d’aborder la question. Le comportement de M. Haslett, qui avait déjà été convoqué à au moins une entrevue-conseil et fait l’objet d’au moins une mesure disciplinaire, inquiétait le l t -col. Gee parce qu’il y avait risque de récidive. Il a été question de ce qu’on pouvait faire pour que M. Haslett comprenne qu’il ne pouvait pas menacer les gens comme il le faisait. Dans le passé, le comportement de ce dernier était devenu intolérable au point que le licenciement semblait être la seule option. C’est la raison pour laquelle le l t -col. Gee a indiqué à M. Haslett qu’à moins d’un changement d’attitude chez ce dernier, il entreprendrait lui-même des démarches pour qu’il soit licencié de la Défense nationale.

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Decision Page 26 M me Heenan a passé en revue les allégations faites par M. Haslett dans ses plaintes (pièces 13 et 15). Elle a déclaré que le l t -col. Gee a dit que M. Haslett avait énormément de problèmes, ce à quoi M. Haslett a répondu : « Êtes-vous en train de dire que je suis un employé difficile? » Ce n’est pas le l t -col. Gee qui a prononcé ces mots. Ce dernier s’est effectivement assis près de M. Haslett, mais M m e Heenan ne se rappelait pas s’il avait parlé de « la couleur de mes yeux ». Il a dit « pour me voir ». Le l t -col. Gee a fait allusion à l’ancien superviseur de M. Haslett en disant à ce dernier qu’il pourrait aboutir à la même place que lui s’il agissait comme lui. Donc, le l t -col. Gee n’a pas discuté directement du grief Abbott lors de cette réunion, mais l’a mentionné indirectement. M me Heenan a affirmé que le l t -col. Gee n’a pas dit qu’il y avait deux dossiers sur chaque employé et qu’en cas de renvoi à l’arbitrage on les détruirait immédiatement. M m e Heenan et M. Hillis en avaient souvent discuté entre eux. M. Hillis prétendait qu’une note personnelle prise par un superviseur devait être consignée dans le dossier personnel. M m e Heenan avait tenté de lui expliquer quel genre de document l’on versait au dossier personnel. M. Hillis cherchait à soulever la question à presque toutes les auditions de griefs. En ce qui concerne le 5 e paragraphe de la pièce 13, M me Heenan a déclaré que le l t -col. Gee a effectivement dit que « l’APCB allait sans doute [l’]engueuler... » Elle ne savait pas que le l t -col. Gee allait s’entretenir avec M. Haslett, mais il savait ce qu’elle pensait de ce genre de chose. Le l t -col. Gee a bien dit qu’il ne voulait pas connaître les détails (en faisant référence à la décision de la Commission rendue relativement au dossier : 166-2-25825), qu’il savait lire et que les documents parlaient d’eux-mêmes. D’après M me Heenan, M. Haslett a déformé les propos du l t -col. Gee relatifs au 7 e paragraphe le choix »). Le l t -col. Gee regardait M. Hillis lorsqu’il a dit à M. Haslett qu’il prendrait des dispositions pour le faire licencier s’il continuait de démontrer son incapacité à traiter avec les gens. À la toute fin de la réunion, le l t -col. Gee a dit à M. Haslett qu’il avait un choix : se reprendre en main et devenir un bon employé être licencié. Il n’a jamais employé les termes : « retirer le grief ». Si elle l’avait entendu prononcer ces paroles, comme l’a prétendu M. Haslett, elle l’aurait interrompu pour lui dire qu’il n’avait pas le droit de le faire. De plus, le l t -col. Gee n’a jamais prononcé les mots « article 31 » ou « congédiement ». En outre, les termes : « en discuter avec le représentant syndical et lui faire part de sa décision » avaient été utilisés dans la phrase précédente (8 e paragraphe de la pièce 13). M me Heenan s’est rappelé que c’est au début et non pas à la fin de la réunion, contrairement à ce qu’a prétendu M. Haslett, que le l t -col. Gee a dit qu’il « était Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 27 sérieux ». M m e Heenan a ajouté qu’en aucun moment au cours de la réunion du 20 juillet 1993, le l t -col. Gee et M. Hillis ont-ils parlé en privé. Le l t -col. Gee n’a pas menacé ou intimidé M. Haslett durant la réunion. M m e Heenan n’a entendu aucune menace de la part du l t -col. Gee. M me Heenan a examiné le compte rendu de l’entrevue que M me Krushen a eue avec M. Haslett le 29 mars 1994 (pièce 25). Elle a fait remarquer que M. Haslett s’était trompé concernant l’ordre de certaines déclarations faites durant la réunion du 20 juillet 1993. De plus, M. Haslett a déformé certaines phrases et expressions telles que « le choix » qui n’avait rien à voir avec le « retrait du grief ».

M me Heenan n’a rien vu de mal à ce que le l t -col. Gee tienne une entrevue-conseil concurremment à l’audition du grief en raison des circonstances de l’affaire. Ce dernier profitait de l’occasion pour prévenir M. Haslett. Il voulait l’amener à réfléchir à son comportement pour voir s’il allait se corriger et promettre de le faire. M me Heenan a reconnu qu’il était anormal de tenir une entrevue-conseil en même temps qu’une audition de grief. D’après elle, M. Haslett n’est pas « un employé normal »; il a eu des problèmes.

À la suite du témoignage de M me Heenan, M. Haslett a de nouveau été cité à comparaître. Il a déclaré qu’il ne savait pas, le 20 juillet 1993, que le l t -col. Gee faisait référence à l’enquête militaire en parlant « de faire de la prison », et il n’a pas « mentionné » le nom de M. Boyd.

Il y a lieu de noter qu’en contre-interrogatoire le 22 juin 1995, M. Haslett a déclaré qu’il n’avait pas pris de notes de la réunion du 20 juillet 1993. Or, le 29 novembre 1995, reconvoqué pour témoigner, il est apparu avec des notes qu’il aurait prises « après la réunion ». Ces notes portaient sur une période d’un mois (du 22 juin à juillet 1993) et avaient toutes été écrites avec le même stylo.

ARGUMENTS M. Georges Nadeau, le représentant de M. Haslett, a invoqué l’article 23 de la Loi et les restrictions auxquelles doit se plier l’employeur. L’article 8 et, en particulier, le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi imposent « d’importantes » interdictions. En vertu de l’article 23, la Commission est tenue de faire respecter ces interdictions. M. Nadeau a

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Decision soutenu que les gestes posés par le l t -col. Gee le 20 juillet 1993 ont constitué de la menace et de l’intimidation dirigées contre M. Haslett parce qu’il avait déposé un grief. Il a passé en revue la preuve et a fait remarquer que le l l’utilité du système accusatoire. D’après ce dernier (pièces 16 et 17), M. Haslett n’avait fait que déposer des griefs frivoles et il était devenu un fardeau administratif. M. Nadeau a ajouté que le l t -col. Gee avait effectivement menacé M. Haslett de congédiement et il importe peu qu’il ait employé le terme congédiement ou licenciement. Ce qui importe est le fait qu’il y a eu menace. Le l proféré des menaces dans sa réponse au grief (pièce 8). Il a donc menacé M. Haslett verbalement et par écrit. Selon M. Nadeau, M cet égard, le représentant a invoqué la pièce 25 et le témoignage de M D’après lui, elle s’est contredite.

M. Nadeau a repris les déclarations de MM. Haslett et Hillis qui ont maintenu que ce qui a été communiqué à M. Haslett fut une menace spécifique concernant son emploi s’il maintenait son grief. Selon M. Nadeau, la déclaration du l faire part de sa réponse » est reliée au maintien du grief et non pas à la question de savoir si M. Haslett serait un bon employé à l’avenir. M mentionné le grief de harcèlement de M. Abbott, lequel n’est pas mentionné dans la pièce 17 (les exemples donnés par le l t -col. Gee à M discuté à la réunion du 20 juillet 1993. L’objectif du l M. Haslett à retirer son grief.

M. Nadeau a fait valoir que la réunion du 20 juillet 1993 était une audition de grief. En la transformant en entrevue-conseil on a contrevenu à la Loi et utilisé l’audition du grief comme toile de fond pour menacer le plaignant. Le l t -col. Gee et M me Heenan ont refusé de reconnaître que l’audition d’un grief n’est pas la tribune qui convient pour tenir une entrevue-conseil. En agissant de la sorte, ils ont intimidé et menacé M. Haslett contrairement au sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi. M. Nadeau m’a donc demandé d’accorder le redressement demandé dans la plainte :

[traduction] a) Que le l t -col. Gee reçoive l'ordre de cesser d’intimider les employés durant les auditions de grief;

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Page 28 t -col. Gee ne croyait pas à t -col. Gee a même me Heenan a une mémoire sélective et, à me Heenan.

t -col. Gee « de lui m e Heenan a également m e Krushen), ni a-t-il été soulevé ou t -col. Gee était d’amener

Decision Page 29 b) Que le l t -col. Gee reçoive l'ordre de cesser de se servir des auditions de grief pour tenir des entrevues-conseils;

c) Que l’employeur donne la formation nécessaire aux personnes chargées d’appliquer règlement des griefs, y compris le l d) Que le l t -col. Gee me remette une lettre d’excuses et que la lettre soit consignée dans mon dossier;

e) Que le soussigné, Walter Haslett, ne fasse plus l’objet de harcèlement pour avoir exercé son droit conformément à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

M e Roger Lafrenière, avocat des défendeurs, a répondu que le 27 mars 1995, l’employeur a envoyé une lettre à la Commission dans laquelle il soulève une question préliminaire concernant le fait que le grief a été déposé en dehors du délai imparti. À cet égard, il a fait référence à la décision Horstead (dossier de la Commission : 161-2-739). Cette question a été soulevée dans la perspective de la motivation qui a poussé M. Haslett à présenter la présente plainte et du redressement demandé. La plainte a été déposée le 17 mars 1995, mais le présumé incident concerne une réunion tenue le 20 juillet 1993. Il s’agit d’un laps de temps extraordinaire. M. Haslett aurait pu déposer sa plainte bien avant et rien n’indique qu’on l’a empêché de le faire en temps opportun. M e Lafrenière s’interroge quant aux motifs pour lesquels nous sommes, aujourd’hui, soit deux ans et demi plus tard, saisis de la présente plainte suite à un incident présumément survenu le 20 juillet 1993.

M e Lafrenière a examiné la preuve et fait remarquer qu’il existe trois versions différentes de ce qui a été dit le 20 juillet 1993. Il a mentionné le fait que MM. Hillis et Haslett ont été incapables de dire si le l t -col. Gee avait employé les termes renvoi, congédiement ou licenciement. M e Lafrenière a soutenu qu’ils auraient retenir le terme juste. Les témoignages de MM. Hillis et Haslett prêtaient à confusion. M e Lafrenière a fait valoir que nous devrions examiner le contexte des déclarations du l t -col. Gee et comparer les versions de MM. Haslett et Hillis relatives à l’expression « faire de la prison ».

M e Lafrenière a demandé ce que l’on pouvait reprocher à un fonctionnaire qui dit : « Je veux parler à l’employé et régler le problème avant qu’il soit trop tard ». Il a

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la procédure de t -col. Gee;

Decision Page 30 soutenu que les allégations de M. Haslett soulèvent une question de crédibilité. Il m’a demandé d’examiner la preuve relativement à ce que le l t -col. Gee a dit à M. Haslett. M e Lafrenière a fait valoir qu’il m’incombait en qualité de commissaire de la Commission chargé d’instruire la présente plainte de me prononcer sur la question de la crédibilité. D’après lui, je devrais choisir la version du l t -col. Gee, laquelle a été corroborée par M me Heenan. Il a fait référence aux six griefs déposés par M. Haslett (pièces 18 à 23) en réponse aux tentatives déployées par l’employeur pour régler les problèmes rencontrés au travail. L’employeur essayait de corriger une situation, et une plainte présentée en vertu de l’article 23 de la Loi ne devrait pas être utilisée pour l’empêcher de le faire. L’article 23 de la Loi ne devrait pas être invoqué pour intimider la direction.

M. Nadeau a répliqué que M. Haslett a rédigé sa plainte le 26 novembre 1993 et l’a envoyée à la CFP on l’a reçue le 1 er décembre 1993. L’enquête au sujet de la plainte a pris fin quelque temps en avril 1994. La pièce 15 indique que M. Haslett a préparé une plainte conformément à l’article 23 de la Loi. Il l’a envoyée à son syndicat en septembre 1994, et la présente Commission en a été saisie en mars 1995. Par conséquent, M. Haslett a soulevé le problème auprès de l’employeur dès le début. M. Nadeau a fait remarquer que M me Heenan a eu de la difficulté à se souvenir des propos échangés le 20 juillet 1993 (pièce 35). Il a invoqué la pièce 29, soit les notes prises par M. Hillis de la réunion du 20 juillet 1993, et la réponse du l t -col. Gee au grief, laquelle était également déplacée. Il s’agit en outre d’une lettre d’avertissement.

DÉCISION En l’occurrence, je suis saisie d’une plainte présentée en vertu du paragraphe 23(1) de la Loi, qui stipule :

23 (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle l’employeur ou une organisation syndicale ou une personne agissant pour le compte de celui-là ou de celle-ci n’a pas, selon le cas :

a) observé les interdictions énoncées aux article 8, 9 ou 10; ... Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 31 M. Haslett prétend qu’il y a eu violation du sous-alinéa 8(2)c)(ii) qui se lit comme suit :

8 (2) Sous réserve du paragraphe (3), il est interdit : c) de chercher, notamment par intimidation, par menace de destitution ou par l’imposition de sanctions pécuniaires ou autres, à obliger un fonctionnaire :

(ii) à s’abstenir d’exercer tout autre droit qui lui accorde la présente loi.

Une plainte présentée en vertu de l’article 23 doit être prise très au sérieux, d’autant plus si elle soulève une violation du sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi.

La plainte soulève des questions de crédibilité et de constatation de faits. Chaque partie a cité deux témoins à comparaître pour faire une déposition sur les propos échangés à la réunion du 20 juillet 1993. La preuve est contradictoire. Je dois donc décider, selon la preuve et la prépondérance des probabilités, laquelle des deux versions retenir, celle de M. Haslett ou celle des défendeurs. À la suite d’un examen approfondi de la preuve et après avoir eu l’occasion d’observer le comportement des quatre témoins, je conclus que je dois retenir le témoignage respectif du l t -col. Gee et de M m e Heenan. Ayant donc décidé en faveur de la version des défendeurs, il n’y a pas lieu de me prononcer sur la question du non-respect du délai soulevée par M e Lafrenière. M. Haslett a soulevé des allégations graves contre le l t -col. Gee. D’après lui, ce dernier l’a menacé à deux reprises en employant des termes comme : « M. Haslett, vous avez deux choix, laissez tomber votre grief et retournez travailler ou maintenez votre grief et j’amorce des procédures de congédiement ».

M. Haslett est le seul à s’être souvenu que le l « choix » deux fois. M. Hillis a déclaré l’avoir entendu une seule fois. Le l M m e Heenan ont nié avoir exigé que le plaignant fasse un tel choix. Ils ont déclaré que le choix concernait l’attitude de M. Haslett et n’avait rien à voir avec le grief. Je trouve que le témoignage de M. Haslett n’est pas digne de foi à certains égards. Il voulait me faire croire qu’il avait présenté une plainte de harcèlement contre le l suite de la réunion du 20 juillet 1993, en novembre 1993 après avoir été informé de Commission des relations de travail dans la fonction publique

t -col. Gee lui avait offert ce t -col. Gee et t -col. Gee à la

Decision Page 32 l’existence d’une politique contre le harcèlement lors d’une séance d’information organisée par M. Lamirande de la Commission de la fonction publique. Toutefois, en 1988 et en 1990, M. Haslett a déposé cinq griefs contre du présumé harcèlement. Il y a ensuite la question des notes qu’il aurait prises. Il a d’abord déclaré qu’il n’avait pas pris de notes de la réunion du 20 juillet 1993. Puis, reconvoqué à la barre des témoins, il a produit des notes qu’il aurait prises au cours d’une période d’un mois. Ces notes sont écrites à l’encre d’un même stylo. Je trouve également bizarre que M. Haslett ait signé la déclaration écrite de M me Krushen (pièce 25) « sans y accorder beaucoup d’importance », car cette pièce contredit son témoignage et ses allégations. Elle indique que M. Haslett a dit à M me Krushen que le l t -col. Gee l’avait enjoint deux fois « de se reprendre en main » alors que dans son témoignage, il a déclaré qu’il lui a dit deux fois de « retirer son grief ». M. Haslett a reconnu qu’il était contrarié lors de la réunion du 20 juillet 1993. Il ne s’est pas rappelé si le l t -col. Gee lui a dit qu’il voulait discuter de son attitude, ni des propos exacts utilisés par ce dernier quant au « choix ».

La réunion du 20 juillet 1993 a été convoquée parce que M m e Heenan a refusé d’acquiescer à la demande de M. Haslett de retirer des documents de son dossier personnel. Ce dernier avait un dossier disciplinaire (une suspension d’un jour et une autre de deux jours pour insubordination). Il faisait également l’objet d’une enquête par la police militaire. Il avait aussi un passé chargé de problèmes de relations interpersonnelles avec ses superviseurs, ses collègues et ses subordonnés. Aux yeux de l’employeur, M. Haslett était un employé difficile. Il avait déposé, quoiqu’en vain, un certain nombre de griefs et de plaintes de présumé harcèlement (pièces 18 à 22) et lui-même avait également été accusé de harcèlement par M. C. Abbott. C’est dans ce contexte que je dois examiner les allégations selon lesquelles le l t -col. Gee et la Défense nationale auraient violé l’article 8 de la Loi.

M. Haslett a fait appel à M. Hillis pour appuyer sa version des propos qui auraient été échangés à la réunion du 20 juillet 1993. Malheureusement, M. Hillis n’a pas beaucoup aidé M. Haslett à cet égard. Il avait oublié des aspects importants de l’affaire. Il ne se souvenait pas d’avoir été présent lorsque M. Haslett a premièrement demandé à M me Heenan de retirer les documents et lors de la consultation du dossier personnel. Les notes manuscrites de M. Hillis (pièce 29) ont été rédigées dans un style télégraphique et n'ont été d’aucune utilité pour déterminer ce qui a été dit à la Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 33 réunion du 20 juillet 1993. Je conclus également que c’est M. Hillis qui a soulevé la question des deux dossiers distincts sur les employés. Un examen de la preuve m’amène à conclure en ce sens, car il aurait été illogique et en fait étonnant que le l t -col. Gee avoue à M. Hillis, représentant du syndicat, que l’employeur gardait deux dossiers sur les employés, dont un est détruit lorsqu’un question aboutit à l’arbitrage. C’est en plein le genre d’argument et de perception qu’aurait le syndicat des pratiques de l’administration. Par conséquent, à ce sujet, je préfère les déclarations du l t -col. Gee et de M m e Heenan selon lesquelles M. Hillis était celui qui avait soulevé cette question. M. Hillis a reconnu que sa mémoire s’était estompée avec le temps. De plus, M. Hillis croyait qu’il avait rencontré M me Heenan la première fois le 20 juillet 1993. Il est également intéressant de noter que M. Hillis ne s’est pas souvenu d’avoir réagi à la menace du l t -col. Gee de congédier M. Haslett s’il maintenait son grief. Si ce dernier avait tenu de tels propos, je crois que M. Hillis aurait réagi: n’était-il pas le représentant syndical après tout. Une telle menace proférée par une gestionnaire et le l t -col. Gee aurait constitué une violation très grave de la Loi et aurait justifié l’intervention immédiate de M. Hillis et de l’agent négociateur. Par conséquent, je crois le l t -col. Gee et M me Heenan, qui ont déclaré qu’il n’y a eu ni menace ni offre de choix le 20 juillet 1993. On a plutôt prévenu M. Haslett qu’il risquait de perdre son emploi au sein du Ministère s’il persistait dans son attitude négative.

J’ai passé en revue les déclarations faites par le l 20 juillet 1993 et le souvenir qu’en ont ce dernier et M déclarations ne violent pas le sous-alinéa 8(2)c)(ii) de la Loi. Le l poste d’agent de l’administration de la base à la BFC Shilo. À titre de gestionnaire, il avait le droit et le devoir d’expliquer à M. Haslett qu’il avait un problème et que ses mauvais rapports interpersonnels avec ses superviseurs, ses collègues et ses subordonnés risquaient d’entraîner son licenciement. Il s’agissait d’une possibilité réelle. L’employeur a le droit de licencier un employé insatisfaisant. De plus, c’est un principe bien connu que l’employeur est obligé d’avertir l’employé d’une telle éventualité.

Le l t -col. Gee n’aurait peut-être pas se lancer dans une « entrevue-conseil » à la fin de l’audition du grief. Cela a manifestement induit MM. Haslett et Hillis en erreur. À leurs yeux, la réunion du 20 juillet 1993 n’était rien d’autre qu’une audition

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t -col. Gee à la réunion du me Heenan. Je conclus que ces t -col. Gee occupait le

Decision Page 34 de grief, tandis que l t -col. Gee et M m e Heenan l’ont interprétée à la fois comme une audition de grief et une entrevue-conseil.

Dans des cas tels celui de M. Haslett, il est préférable pour la direction d’être très prudente et d’informer clairement l’employé intéressé et l’agent négociateur du but de la réunion en vue d’éviter tout malentendu. Le l t -col. Gee a cru bien faire en avertissant M. Haslett qu’il devait changer d’attitude. Cet avertissement cependant aurait être fait à l’occasion d’une autre réunion. Le l t -col. Gee avait le droit de dire à M. Haslett que ce dernier avait de gros problèmes. Les antécédents professionnels de M. Haslett et son dossier personnel l’attestent. Il s’agissait d’une déclaration de fait et l’on n’a rien à reprocher au l t -col. Gee à cet égard. En ce qui concerne l’allusion au fait que le « superviseur risquait de faire de la prison », ici encore, il s’agit d’une constatation de fait. La police militaire a mené une enquête qui pouvait aboutir à des accusations.

La date à laquelle la plainte a été déposée est un autre fait intéressant. Le 27 novembre 1993, M. Haslett aurait présumément proféré des menaces contre M me Heenan d’où l’imposition de la suspension de 11,5 jours le 2 décembre 1993. Ce jour-là ou quelques jours avant, M. Haslett a envoyé une plainte à M. Lamirande. Je n’en dirai toutefois pas plus à ce sujet à la lumière de ma conclusion que les allégations de M. Haslett sont sans fondement.

Pour ces motifs, la présente plainte est rejetée.

Muriel Korngold Wexler président suppléant

OTTAWA, le 27 février 1996. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau Commission des relations de travail dans la fonction publique

Decision Page 35 Commission des relations de travail dans la fonction publique

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