Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Révision d'une décision - Article 27 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (Loi) - Habilité de l'unité à négocier collectivement - Tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada - l'employeur a demandé une révision de la décision dans laquelle la Commission avait déterminé qu'une unité de négociation composée de tous les fonctionnaires de l'employeur était habile à négocier collectivement : 2000 CRTFP 109 (140-33-15 et 16), [(2000) 38 Résumés de la CRTFP 1] - l'Alliance de la Fonction publique du Canada (Alliance) avait été accréditée à titre d'agent négociateur de cette unité de négociation : 2001 CRTFP 39 (140-33-15 et 16), [(2001) 39 Résumés de la CRTFP 2] - l'employeur voulait faire retirer de l'unité de négociation les fonctionnaires qui n'étaient pas représentés avant qu'il ne devienne un employeur distinct - il a allégué que la Commission avait outrepassé la compétence dont elle est investie par l'alinéa 48.1(4)a) de la Loi, en déterminant la composition de l'unité de négociation - il a maintenu que l'article 48.1 de la Loi n'autorisait pas la Commission à accorder des droits de représentation à des fonctionnaires qui n'étaient pas représentés jusque-là - l'Alliance a répliqué que l'employeur savait que la Commission envisageait la reconnaissance d'une seule unité de négociation pour tous ses fonctionnaires et qu'il ne s'était pas opposé à l'inclusion dans l'unité de négociation de fonctionnaires qui n'étaient pas représentés jusque-là - l'Alliance a ajouté que la Commission était investie par l'article 21 de la Loi de grands pouvoirs discrétionnaires dont elle s'était prévalue à juste titre - l'employeur a répliqué que les pouvoirs dont la Commission est investie par l'article 21 de la Loi sont limités par l'article 48.1 - la Commission a conclu que l'article 48.1 de la Loi ne s'applique qu'aux fonctionnaires déjà représentés. Demande accueillie.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2001-12-07
  • Dossier:  125-33-100, 140-33-15, 140-33-16
  • Référence:  2001 CRTFP 123

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

L'AGENCE PARCS CANADA

employeur

et

L'ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

agent négociateur

AFFAIRE :  Demande fondée sur l'article 27 de la
Loi sur les relations de travail dans la fontion publique

Devant :  Yvon Tarte, président

Pour l'employeur :  Stephen Bird

Pour l'agent négociateur :  Alain Piché


Décision rendue sur la foi de représentations écrites, sans audience.

[1]   L'Agence Parcs Canada (Agence) a présenté une demande fondée sur l'article  27 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (Loi) afin que la Commission révise et, s'il y a lieu, modifie la description de l'unité de négociation définie dans la décision du 11  décembre  2000 par laquelle l'Alliance de la Fonction publique du Canada (Alliance) a été accréditée à titre d'agent négociateur (dossiers de la Commission 140–33–15 et 16).

[2]   L'Agence est devenue un employeur distinct de la Partie  II de l'Annexe  I de la Loi, le 21  décembre  1998. À l'époque, un certain nombre de fonctionnaires qui faisaient jusque–là partie de l'administration centrale (dont le Conseil du Trésor est l'employeur) ont été transférés au nouvel employeur distinct, l'Agence.

[3]   Le 4  août  1999, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (Institut) a proposé, dans la demande fondée sur l'article  48.1 de la Loi qu'il a présentée (dossier de la Commission 140–33–15), que toutes les unités de négociation dont il était l'agent négociateur au moment du transfert soient regroupées en une seule unité de négociation dont il continuerait d'être l'agent négociateur.

[4]   L'Agence a déposé une demande fondée sur l'article  48.1 (dossier de la Commission 140–33–16) le 27  août  1999. Elle a proposé que les unités de négociation existant à l'époque de sa création soient restructurées en deux nouvelles unités de négociation.

[5]   L'Alliance, l'Association des employé(e)s en sciences sociales (A.E.S.S.), l'Association des gestionnaires financiers de la Fonction publique (A.G.F.F.P.) et la Fraternité internationale des ouvriers en électricité, section locale  2228 (Fraternité), les quatre agents négociateurs qui représentaient des fonctionnaires du nouvel employeur avant sa création comme tel, ont été informées des deux demandes fondées sur l'article  48.1 et ont toutes eu la possibilité d'y répondre.

[6]   La position avancée dans ce contexte par l'Agence et par les agents négociateurs sur quelles(s) unité(s) seraient habiles à négocier collectivement était fondée sur diverses combinaisons des fonctionnaires de l'Agence qui étaient représentés par l'un ou l'autre des agents négociateurs immédiatement avant la création du nouvel employeur et le transfert de son personnel.

[7]   Après de longues audiences, la Commission a décidé que tous les fonctionnaires de l'Agence devraient être rangés dans une seule unité de négociation. Elle a ordonné la tenue d'un scrutin de représentation dans lequel les fonctionnaires représentés par les agents négociateurs visés dans la demande ont été invités à préciser s'ils souhaitaient que l'Institut ou l'Alliance les représente comme agent négociateur.

[8]   La majorité des fonctionnaires votants a opté pour l'Alliance comme agent négociateur. Dans sa décision du 1er mai  2001, la Commission a donc accrédité l'Alliance à titre d'agent négociateur d'une unité de négociation décrite comme étant constituée de «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » (dossiers de la Commission 140–33–15 et 16).

[9]   Les parties ne s'entendent pas sur la question de savoir si l'unité de négociation comprend les fonctionnaires de l'Agence classés dans des groupes professionnels qui, au moment du transfert, n'étaient pas représentés par un agent négociateur. Cela s'appliquerait notamment aux fonctionnaires de l'Agence des groupes  PE (Administration du personnel) et MM (Direction). L'agent négociateur est d'avis qu'ils font partie de l'unité de négociation; l'employeur est convaincu du contraire. C'est ce qui a incité l'Agence à présenter une demande, fondée sur l'article  27 de la Loi, dans laquelle elle réclame une modification, s'il y a lieu, de la description de l'unité de négociation. Le redressement demandé est le suivant :

[Traduction]

Compte tenu des observations des parties ainsi que des limites imposées par la Loi, l'Agence demande à la Commission de réviser sa décision dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2001 CRTFP 39 (140–33–15, 140–33–16) et de déclarer que les fonctionnaires classés dans les groupes professionnels qui n'étaient pas liés par une convention collective ou une décision arbitrale à la date de la première demande à la Commission (plus particulièrement les membres des groupes  PE et MM) ne sont pas inclus dans l'unité de négociation définie dans la description de ladite unité.

[10]   Les parties ont été informées que la Commission allait trancher la question en se fondant sur leurs représentations écrites, qui sont annexées ci–après.

Représentations de l'Agence Parcs Canada

[Traduction]

Partie I  - Contexte

  1. L'Agence Parcs Canada (l'Agence) est devenue un employeur distinct de la Partie  II de l'Annexe  I de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (Loi), le 21  décembre  1998. À l'époque, un certain nombre de fonctionnaires qui avaient jusque–là fait partie de l'administration centrale (dont le Conseil du Trésor est l'employeur) ont été transférés au nouvel employeur distinct, l'Agence.

  2. Le 4  août  1999, l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (Institut) a présenté à la Commission une demande (dossier de la Commission 140–33–15) fondée sur l'article  48.1 de la Loi, pour réclamer le regroupement en une seule unité de négociation de toutes les unités de négociation dont il était l'agent négociateur accrédité au moment du transfert, en demandant aussi à continuer d'être l'agent négociateur de cette unité.

  3. Le 27  août  1999, l'Agence a présenté une demande (dossier de la Commission 140–33–16) elle aussi fondée sur l'article  48.1 de la Loi, afin que les unités de négociation existantes à l'époque où la nouvelle agence avait été créée soient restructurées en deux nouvelles unités de négociation.

  4. Les audiences devant la Commission se sont étendues sur de nombreuses journées en 2000. Au paragraphe  139 de la page  31 de la décision qu'elle a rendue dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Alliance de la Fonction publique du Canada et Association des gestionnaires financiers de la Fonction publique, 2000 CRTFP 109 (dossiers 140–33–15 et 140–33–16), la Commission a conclu que tous les fonctionnaires de l'Agence devaient être rangés dans une seule unité de négociation. Elle a donc ordonné la tenue d'un scrutin de représentation pour qu'on demande aux fonctionnaires s'ils souhaitaient que l'Institut ou l'Alliance les représente comme agent négociateur (onglet  1).

  5. Après avoir étudié le Certificat d'attestation du résultat du scrutin, le Certificat d'attestation des scrutateurs et le Certificat de consentement et de désistement, la Commission a rendu sa décision dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2001 CRTFP 39 (140–33–15 et 140–33–16) le 1er mai  2001; elle a conclu que la majorité des fonctionnaires de l'Agence qui avaient voté souhaitait que l'Alliance les représente comme agent négociateur, a accrédité l'Alliance à titre d'agent négociateur pour «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » et lui a délivré un certificat à cet égard (onglet 2).

  6. L'accréditation d'une unité de négociation composée de «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » a suscité un différend entre l'Agence et l'Alliance sur la question de savoir si les fonctionnaires des groupes  PE et MM qui n'étaient pas représentés auparavant font désormais partie de l'unité de négociation. Dans une lettre datée du 22  juin 2001, l'Alliance a déclaré à l'Agence qu'elle les considère comme inclus dans la nouvelle unité de négociation (onglet  3).

  7. Par conséquent, le 19  juillet  2001, en vertu de l'article  27 de la Loi, l'Agence a déposé une demande de révision de la décision de la Commission dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2001 CRTFP 39 (140–33–15 et 140–33–16).

Partie II  - Point en litige

Il n'est pas sûr que la Commission doive nécessairement réviser sa décision d'accréditer l'Alliance comme agent négociateur pour «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  », dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2001 CRTFP 39 (140–33–15 et 140–33–16). La requérante reconnaît que la question peut être aussi simple qu'un malentendu entre les parties quant à l'interprétation qu'il faut donner au certificat de négociation délivré par la Commission. Au cas où la Commission aurait voulu que la description de l'unité composée de «  tous les fonctionnaires  » soit interprétée dans le contexte de l'alinéa  48.1(4)a) de la Loi, et que les membres des groupes professionnels qui n'étaient pas représentés auparavant ne font donc pas partie de l'unité de négociation, elle n'a pas besoin de réviser sa décision. La requérante se contenterait alors de demander à la Commission de fournir aux parties une note explicative pour les éclairer.

Par contre, si la Commission entendait que ces fonctionnaires soient inclus dans l'unité de négociation ainsi décrite, la requérante la prie respectueusement de réévaluer sa décision à cet égard.

Partie  III  - Argumentation

  1. Dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Alliance de la Fonction publique du Canada et Association des gestionnaires financiers de la Fonction publique, 2000 CRTFP 109 (140–33–15 et 140–33–16), la Commission a déclaré, au paragraphe  139, que «  tous les fonctionnaires de l'Agence devraient être inclus dans une seule unité de négociation  ».

  2. Cette décision de la Commission a été prise en réponse aux demandes fondées sur l'article  48.1 de la Loi qui lui avaient été présentées. L'alinéa  48.1(4)a) autorise la Commission à décider «  si les fonctionnaires de l'employeur distinct qui sont liés par la convention collective ou la décision arbitrale constituent une ou plusieurs unités habiles à négocier collectivement  ».

  3. Pendant toute la période pertinente, les fonctionnaires des groupes  PE et MM n'étaient liés ni par une convention collective ni par une décision arbitrale. Nous estimons, avec tout le respect que nous lui devons, que la Commission ne s'est pas conformée à l'alinéa  48.1(4)a) et qu'elle a par conséquent outrepassé sa compétence.

  4. L'article  48.1 de la Loi s'applique aux droits du successeur. Les commissions et conseils de relations du travail sont unanimes à juger que les dispositions sur les droits du successeur ont pour objet de préserver  - et non d'accroître  - les droits de négociation des syndicats [voir Pitts Engineering, [1983] O.L.R.B.R. 938 (onglet  4)]. Avec tout le respect que nous lui devons, nous estimons que, pour accroître les droits de négociation, la Commission aurait besoin d'être légalement investie d'une compétence que la Loi ne lui donne pas.

  5. Subsidiairement, si la Commission avait compétence pour inclure ces groupes de fonctionnaires non représentés dans l'unité de négociation, elle ne les en a pas informés au moment du scrutin de représentation, de sorte qu'ils n'ont pas eu la possibilité d'y participer. La requérante est d'avis que la Commission a alors erré dans sa décision en ne respectant pas les principes de la justice naturelle.

Partie  IV  - Redressement réclamé

  1. Compte tenu des observations des parties de même que des limites imposées par la loi, l'Agence demande à la Commission de réviser sa décision dans Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2001 CRTFP 39 (140–33–15 et 140–33–16) et de déclarer que les fonctionnaires des groupes professionnels qui n'étaient pas visés par une convention collective ou une décision arbitrale, à la date où la première demande lui a été adressée (plus particulièrement les membres des groupes  PE et MM) ne sont pas inclus dans l'unité de négociation précisée dans la description qu'elle a donnée.

Représentations de l'Alliance

[Traduction]

1.   La défenderesse, l'Alliance de la Fonction publique du Canada (l'Alliance) souscrit à l'énoncé des faits de l'employeur, c'est-à-dire aux paragraphes 1 à 7 de la Partie  I  - Contexte de ses représentations écrites.

2.   La décision de la Commission d'accréditer une seule unité de négociation composée de «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » a été rendue après 20  jours d'audience (répartis sur une période de 14  mois) et l'analyse d'une masse considérable de témoignages et de documents soumis par les fonctionnaires de Parcs Canada et les représentants de sa direction (dossiers de la Commission 140–33–15 et 140–33–16, Agence Parcs Canada et Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Alliance de la Fonction publique du Canada et Association des gestionnaires financiers de la Fonction publique, 2000 CRTFP 109).

Cette décision révèle que la Commission s'est prévalue de ses grands pouvoirs discrétionnaires pour soupeser la preuve présentée par les parties, en se fondant sur sa conviction qu'il ne devrait pas y avoir de morcellement ni de multiplicité d'unités de négociation. La Commission a conclu qu'une seule unité de négociation représentant tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada serait l'unité la plus habile à négocier collectivement, compte tenu de tous les faits, des arguments des parties et des principes des relations du travail.

3.   Dans ses représentations, l'Alliance avait réclamé la reconnaissance d'une seule unité de négociation composée de tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada qui étaient représentés auparavant par elle quand leur employeur était le Conseil du Trésor du Canada. La Commission a invité les parties à lui soumettre des observations sur une seule unité de négociation. Celles que l'Alliance lui a présentées revenaient à dire que, même si elle ne demandait pas de représenter tous les fonctionnaires de l'Agence, elle avait l'expérience et la capacité nécessaires pour le faire (Agence, 2000 CRTFP 109, p.  133, paragr.  69).

4.   L'Alliance a obtenu l'appui de la majorité des participants au scrutin de représentation que la Commission avait ordonné; elle a été reconnue comme agent négociateur pour «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » le 1er mai  2001. L'employeur ne prétend pas que les quelque trois (3) fonctionnaires actuellement classés stagiaires en administration (MM) et les cinquante-cinq (55) administrateurs du personnel (PE) environ qui sont à son service ne sont pas des fonctionnaires. Nous estimons que, à titre de fonctionnaires, ils sont visés par le certificat englobant tous les fonctionnaires que la Commission a délivré, et qu'ils ont le droit de participer au processus de négociation collective.

Bien que l'Alliance n'ait pas cherché à faire inclure les groupes  PE et MM dans son certificat d'accréditation comme agent négociateur de tous les fonctionnaires, l'inclusion des deux petits groupes dans l'unité de négociation est compatible avec l'esprit de la décision, à savoir : «  Notre décision, croyons-nous, est tournée vers l'avenir et non vers le passé, et elle ouvre la voie à des relations syndicales-patronales utiles à court et à long terme  » (Agence 2000 CRTFP 109, p.  30, paragr.  133). L'inclusion de ces groupes ne pose aucun problème de relations du travail en ce qui concerne l'efficacité de la représentation. La Commission est investie par l'article  21 d'une grande latitude quant à l'administration de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique; elle s'en est prévalue judicieusement.

5.   La décision de la Commission de reconnaître une seule unité de négociation a été prise compte tenu de la structure organisationnelle de l'employeur et de la preuve que les classifications existantes ne reflétaient plus la nature du travail accompli à l'Agence : «  La preuve et les témoignages produits nous ont convaincus que les classifications et la structure des unités de négociation existantes ne reflètent plus le caractère souvent spécialisé du travail accompli à l'Agence.  » (Agence 2000 CRTFP 109, p.  30, paragr.  134)

Un peu plus loin dans la décision, la Commission a aussi déclaré ce qui suit :

Enfin, pour en arriver à notre décision, nous avons tenu compte, ainsi qu'il ressort de la preuve, du fait que l'Agence est en bonne voie de parachever et d'adopter sa propre norme générale de classification, et ce, en conformité avec la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui exige que, dans tout établissement où un travail est accompli, un système de classification non discriminatoire s'applique à toutes les catégories professionnelles. (ACP 2000 CRTFP 109, p.  30, paragr.  138)

Cette décision rendue le 11  décembre  2000 témoigne d'un exercice pondéré et réfléchi de la compétence de la Commission. Compte tenu de la preuve que l'Agence Parcs Canada était en train d'adopter un système de classification fondé sur la norme générale de classification, la décision de la Commission de reconnaître une seule unité de négociation, ce qui pourrait avoir pour effet de grouper et d'appliquer de même conditions d'emploi à tous les groupes professionnels, justifie l'inclusion de tous les groupes professionnels existants dans l'unité globale de tous les fonctionnaires. La décision de la Commission a été prise compte tenu de la détermination de l'employeur de mettre en ouvre un nouveau plan de classification général et du fait que tous les fonctionnaires, quelle qu'ait été leur classification à l'époque, allaient être identifiés et évalués en fonction d'une norme générale. Les groupes  MM et PE seront aussi évalués en fonction de cette norme. Même si nous reconnaissons que, dans bien des cas, une seule et même classification n'exige pas nécessairement qu'il y ait une seule unité de négociation, dans le cas de l'Agence Parcs Canada, il est évident que l'agent négociateur accrédité va négocier les taux de rémunération et autres aspects de la mise en ouvre du plan de classification. Par conséquent, tous les groupes professionnels, y compris les groupes  MM et PE, vont bénéficier de sa représentation.

Dans la pratique, l'inclusion des MM et des PE découle naturellement de l'ordonnance de la Commission, étant donné la nature particulière de l'organisation de l'Agence et les répercussions éventuelles de son nouveau plan de classification. Dans ce contexte, l'inclusion des MM et des PE dans l'unité de négociation est conforme à l'esprit de l'article  48.1, puisque l'unité de négociation qui en résulte est habile à négocier collectivement.

6.   En l'espèce, la demande de l'employeur a pour objet d'obtenir une modification de la décision originale d'une façon qui, de l'avis de l'Alliance, n'est pas compatible avec l'intention de la Commission, quand elle a jugé habile à négocier collectivement une unité composée de tous les fonctionnaires, comme elle l'a déclaré au paragraphe  131 de sa décision :

On pourrait certes arguer que les unités proposées sont appropriées à l'intérieur de certaines limites, mais la Commission est d'avis que, au moment d'examiner plusieurs unités habiles à négocier, elle devrait chercher à déterminer l'unité la plus appropriée et, s'il y a lieu et dans l'intérêt de toutes les parties, façonner l'unité la plus appropriée.

La décision et le certificat que la Commission a délivrés le 1er mai  2001 établissent aussi bien pour le syndicat que pour l'employeur un solide cadre de la négociation collective et des relations du travail d'aujourd'hui et de demain. L'Alliance est d'avis que la décision et le certificat sont conformes à l'esprit des alinéas  48.1(4)a) et b), en ce que la Commission tentait de définir des unités de négociation habiles à négocier collectivement et qu'elle a conclu en établissant ce qu'elle jugeait être l'unité la plus habile à négocier.

7.   L'ordonnance de la Commission visant l'Agence Parcs Canada ne reflète ni les demandes, ni les observations d'aucune des parties; la Commission est plutôt arrivée à cette conclusion en se prévalant de sa latitude et des pouvoirs généraux dont elle est investie par le paragraphe  48.1(4) et l'article  21, qui dispose ce qui suit :

  21. (1) La Commission met en ouvre la présente loi et exerce les pouvoirs et fonctions que celle–ci lui confère ou qu'implique la réalisation de ses objets, notamment en prenant des ordonnances qui exigent l'observation de la présente loi, des règlements pris sous le régime de celle–ci ou des décisions qu'elle rend sur les questions qui lui sont soumises.

Nous estimons que l'effet d'inclure les groupes  MM et PE dans l'unité de négociation de l'Agence est une conséquence «  qu'implique la réalisation [des] objets [de la Loi]  » et que, si la Commission n'avait pas la compétence nécessaire pour rendre une telle décision en vertu du paragraphe  48(4), comme l'employeur le prétend, elle l'avait de toute évidence en vertu de l'article  21 et de l'alinéa  22b), qui l'autorisent à prendre des règlements d'application générale concernant «  la détermination des unités de fonctionnaires habiles à négocier collectivement  ». Dans cette affaire, la Commission a décidé, en se fondant sur la preuve qu'on lui avait soumise, d'établir le cadre le plus propice à répondre aux besoins de tous les fonctionnaires maintenant et dans l'avenir.

8.   L'employeur déclare que les membres des groupes  MM et PE n'ont pas eu la possibilité de participer au scrutin de représentation ordonné par la Commission. Bien que ce soit regrettable, il n'en reste pas moins que, en l'occurrence, la Commission a créé une unité de négociation entièrement nouvelle qui n'existait pas dans le passé. Dans cette situation, d'autres commissions et conseils des relations du travail ont conclu qu'il n'était pas nécessaire d'ordonner un scrutin de représentation pour les groupes qu'on ajoutait quand le nombre des personnes visées était infime au point qu'il ne pouvait modifier nettement la décision de la majorité et que leur ajout à l'unité de négociation n'en modifiait pas non plus nettement l'envergure. Selon nous, la Commission a le pouvoir d'invoquer ce raisonnement dans le cas des groupes  MM et PE, dont l'effectif, qui s'élève en tout à quelque cinquante-huit (58) fonctionnaires, est extrêmement petit comparativement à celui de l'ensemble de l'unité (voir Telus Corporation (19  octobre  2000), décision no 94 (CCRI).

Subsidiairement, la Commission a aussi compétence, conformément au paragraphe  48.1(8) de la Loi, pour ordonner un scrutin de représentation à l'intention des employés des groupes  MM et PE afin qu'ils puissent faire connaître leur désir d'appartenir ou pas à l'unité de négociation des fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada.

Réplique de l'Agence Parcs Canada

  1. En ce qui concerne les allégations de la défenderesse, aux paragraphes  4 et 7 de sa réponse, l'article  21 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique autorise la Commission à exercer les pouvoirs et fonctions que la Loi «  lui confère  ». En droit administratif, c'est un principe reconnu que, en sa qualité de tribunal inférieur établi par une loi, la Commission agit seulement dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi. Or, le paragraphe  48.1(4) lui impose précisément une telle limite, et elle ne peut se réclamer d'une compétence dont la Loi ne l'a pas investie.

  2. La défenderesse soutient que la Commission pourrait se prévaloir de l'autorité découlant de ses pouvoirs en ce qui concerne les questions «  qu'implique la réalisation de ses objets  ». Toutefois, pour qu'elle puisse le faire, nous estimons, avec tout le respect que nous devons à la Commission, qu'elle devrait conclure qu'elle a le pouvoir de se donner compétence dans un domaine où le Parlement l'en a expressément privée, en déclarant qu'elle agit afin de réaliser les objets de la Loi. C'est non seulement un raisonnement bizarre dans le contexte du droit administratif, mais c'est aussi contraire au mandat législatif dont le Parlement a investi la Commission et qui consiste à mettre «  en ouvre la présente loi et [à exercer] les pouvoirs et fonctions que celle–ci lui confère  ».

  3. Au paragraphe  7 de sa réponse, la défenderesse déclare que la Commission a été investie des pouvoirs nécessaires en vertu de l'alinéa  22b) de la Loi. Or, l'article  22 confère à la Commission certains pouvoirs réglementaires, mais elle n'a pris aucun règlement susceptible d'être applicable en l'espèce et ne pourrait de toute façon pas prendre un règlement incompatible avec sa loi habilitante.

  4. Au paragraphe  8 de sa réponse, la défenderesse semble vouloir dire que les fonctionnaires des groupes  MM et PE pourraient maintenant avoir la possibilité de décider s'ils veulent être inclus dans l'unité de négociation établie par la Commission. La logique de cet argument laisse à désirer pour plusieurs raisons. Premièrement, le paragraphe  48.1(8) exige que la Commission autorise la tenue d'un scrutin de réglementation avant de déterminer qui sera l'agent négociateur aux termes de l'alinéa  48.1(4)b). Deuxièmement, ce même paragraphe  48.1(8) ne peut être applicable qu'aux membres de l'unité de négociation, ce qui est précisément le point en litige. Troisièmement, une telle interprétation est incompatible avec l'article  28 de la Loi, qui porte sur l'accréditation d'un agent négociateur pour représenter des fonctionnaires qui ne l'étaient pas jusqu'alors.

  5. Afin d'étayer son raisonnement qu'il n'est pas nécessaire pour la Commission de donner aux MM et PE la possibilité de participer à un scrutin de représentation, la défenderesse cite la décision du Conseil canadien des relations industrielles dans Telus Corporation. Avec tout le respect que nous lui devons, nous estimons que cette décision n'est pas pertinente.

  6. D'abord, il s'agissait d'une demande fondée sur l'article  18 du Code canadien du travail, portant sur le pouvoir de révision d'une décision ou d'une ordonnance (de façon analogue à l'article  27 de la Loi), et non sur l'article  47 du Code. (Le libellé de l'alinéa  47(4)a) du Code est très voisin de celui de l'alinéa  48.1(4)a) de la Loi). Il ne s'agissait pas dans la décision Telus Corporation d'une dévolution d'un ministère fédéral, de sorte que son application est contestable ici ne serait–ce que pour cette raison.

  7. De plus, la décision Telus Corporation porte sur une situation dans laquelle des employés déjà syndiqués avaient été englobés dans une plus grande unité de négociation sans avoir le droit de voter pour exprimer leurs désirs à cet égard. Il ne s'agissait pas d'une situation dans laquelle certains employés se seraient vu refuser le droit de participer à un scrutin.

  8. Enfin, et c'est plus important encore, la décision Telus Corporation ne visait pas des employés qui n'avaient pas été syndiqués jusque–là. Nous invitons la Commission à lire le paragraphe  26 de la décision :

    Comme le banc initial l'a déclaré, l'affaire dont il était saisie n'était pas une demande présentée par un syndicat en vue d'élargir la portée d'une unité de négociation existante pour y inclure un groupe d'employés qui en était jusque–là exclu. [...] Nous sommes en présence d'une situation où deux employeurs importants, complexes et distincts ont fusionné et ont par la suite présenté une demande de révision des structures des unités de négociation en place chez chaque employeur au moment du dépôt de leur demande dans le but de fusionner leurs activités et de créer une nouvelle structure de négociation habile à négocier dans le nouveau contexte. La nouvelle unité créée comprend des groupes d'employés déjà accrédités, et volontairement reconnus et diverses sections locales d'au moins quatre syndicats. Il ne fait aucun doute que le Conseil a le pouvoir de fusionner les unités pertinentes et d'accorder les accréditations modifiées pertinentes.

  9. La requérante réclame le redressement précisé dans sa demande.

Motifs de la décision

[11]   L'article  48.1 de la Loi est intitulé «  Droits du successeur  » et se lit comme il suit :

   48.1 (1) La convention collective ou la décision arbitrale applicable aux fonctionnaires d'un ministère ou d'un secteur de la fonction publique qui, par radiation de son nom de la Partie  I de l'annexe  I  - ou par sa séparation d'un secteur mentionné à cette partie  - et adjonction de son nom à la partie  II de l'annexe  I  - ou par son intégration à un secteur mentionné à cette partie  - devient un employeur distinct ou est intégré à un secteur qui est un employeur distinct continue d'avoir effet, sous réserve des autres dispositions du présent article, jusqu'à la date d'expiration qui y est fixée.

   (2) Une organisation syndicale peut demander à la Commission son accréditation à titre d'agent négociateur des fonctionnaires régis par la convention collective ou la décision arbitrale mentionnée au paragraphe  (1); elle ne peut toutefois le faire qu'au cours de la période pendant laquelle il est permis, aux termes de l'article  31, de solliciter l'accréditation.

   (3) Dans les cas où les fonctionnaires du secteur qui est devenu un employeur distinct ou a été intégré à un secteur qui constitue un employeur distinct sont régis par une convention collective ou une décision arbitrale, le secteur qui devient l'employeur, ou tout agent négociateur touché par ce changement, peut, au moins cent vingt jours et au plus cent cinquante jours suivant le changement, demander à la Commission de statuer par ordonnance sur les questions mentionnées au paragraphe  (4).

   (4) Saisie de la demande visée au paragraphe  (3), la Commission doit rendre une ordonnance par laquelle elle décide :

 a) si les fonctionnaires de l'employeur distinct qui sont liés par la convention collective ou la décision arbitrale constituent une ou plusieurs unités habiles à négocier collectivement;

 b) quelle organisation syndicale sera l'agent négociateur des fonctionnaires de chacune de ces unités;

 c) si chaque convention collective ou décision arbitrale qui s'applique à ces fonctionnaires :

 (i) restera en vigueur,

 (ii) si oui, le restera jusqu'à la date d'expiration qui y est stipulée ou jusqu'à la date antérieure qu'elle fixe.

   (5) Si, en application de l'alinéa  (4)c), la Commission décide qu'une convention collective ou une décision arbitrale restera en vigueur, l'une des parties à celle–ci peut lui demander, dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent, de lui permettre, par ordonnance, de donner à l'autre partie un avis de négocier collectivement.

   (6) À défaut de présentation de la demande visée au paragraphe  (3) dans un délai fixé, l'employeur ou tout agent négociateur lié par une convention collective ou une décision arbitrale qui est maintenue en vigueur aux termes du paragraphe  (1) peut, au cours de la période commençant le cent cinquante et unième jour et se terminant le deux cent quarantième jour suivant le jour où le secteur en cause est devenu un employeur distinct ou a été intégré à un secteur distinct, demander à la Commission de lui permettre, par ordonnance, de donner à l'autre partie un avis de négocier collectivement.

   (7) Si, dans le cas visé au paragraphe  (1), un avis de négocier collectivement avait été donné avant que le secteur en cause ne devienne un employeur distinct ou ne soit intégré à un secteur qui constitue un employeur distinct :

a) les conditions d'emploi figurant dans la convention collective ou la décision arbitrale maintenues en vigueur par l'effet de l'article  52 continuent de lier  - ou lient de nouveau si l'article  52 avait cessé d'avoir effet  - l'employeur distinct, l'agent négociateur et les fonctionnaires, sauf entente à l'effet contraire entre l'employeur et l'agent négociateur, tant que les conditions des articles  102 à 104 n'ont pas été remplies;

b) sur demande de l'employeur distinct ou de l'agent négociateur touché par le transfert présentée au moins cent vingt jours et au plus cent cinquante jours après celui–ci, la Commission décide, par ordonnance :

(i) si les fonctionnaires de l'employeur distinct qui sont représentés par l'agent négociateur constituent une ou plusieurs unités habiles à négocier collectivement,

(ii) quelle organisation syndicale sera l'agent négociateur des fonctionnaires de chacune de ces unités;

c) dans les cas où la Commission rend une ordonnance dans le cadre de l'alinéa  b), l'employeur distinct ou l'agent négociateur peut transmettre à l'autre partie un avis de négocier collectivement en vue de la conclusion d'une convention collective.

   (8) La Commission peut, avant de rendre sa décision dans le cadre du paragraphe  (4) ou de l'alinéa  7b), faire des enquêtes et ordonner la tenue d'un scrutin de représentation parmi les fonctionnaires concernés, selon ce qu'elle estime nécessaire. Le paragraphe  36(3) s'applique à la tenue du scrutin.

[12]   L'article  48.1 n'est pas une solution de rechange à la procédure d'accréditation prévue par l'article  28 de la Loi; comme son titre l'implique, il a pour objet la transition harmonieuse du système de négociation collective dans des situations où un secteur de la fonction publique qui y est assujettie passe de l'autorité de l'administration centrale (le Conseil du Trésor) à celle d'un employeur distinct. Dans ce contexte, on peut demander à la Commission de définir une ou des unités habiles à négocier collectivement dans deux situations, l'une décrite au paragraphe  48.1(3) et l'autre au paragraphe  48.1(7).

[13]   Le paragraphe  48.1(3) dispose que, dans les cas où les fonctionnaires du secteur de la fonction publique qui est constitué comme employeur distinct sont régis par une convention collective, l'employeur distinct ou l'agent négociateur touché par le changement peut demander à la Commission une ordonnance statuant sur les éléments précisés au paragraphe  48.1(4). En vertu de ce paragraphe, la Commission doit déterminer notamment si les fonctionnaires d'un employeur distinct qui étaient liés par une convention collective quelconque au moment du transfert constituent une ou plusieurs unités habiles à négocier collectivement.

[14]   Le paragraphe  48.1(7) s'applique dans les cas où, avant le transfert, un avis de négocier collectivement avait été donné à l'égard d'une convention collective régissant les fonctionnaires du secteur désormais établi comme employeur distinct à la Partie  II de l'Annexe  I de la Loi qui, immédiatement avant le transfert, faisait partie de la fonction publique à la Partie  I de ladite Annexe. En pareil cas, l'employeur distinct ou l'agent négociateur représentant ces fonctionnaires peut demander à la Commission une ordonnance déterminant si les fonctionnaires de l'employeur distinct qui sont représentés par un agent négociateur constituent une ou plusieurs unités habiles à négocier collectivement.

[15]   De toute évidence, aux termes de ces deux paragraphes, la Commission n'a compétence qu'à l'égard des fonctionnaires qui faisaient partie d'une des unités de négociation existantes au moment du transfert. Par conséquent, la définition «  tous les fonctionnaires de l'Agence Parcs Canada  » qui figurait dans la décision de la Commission du 1er mai  2001 n'englobe pas ceux qui étaient classés dans un groupe professionnel comme les groupes  PE et MM ou un autre groupe et qui, au moment du transfert, n'étaient pas représentés par un agent négociateur.

[16]   La Commission est disposée à modifier la description de l'unité de négociation si les parties le jugent nécessaire.

Yvon Tarte,
président

OTTAWA, le 7  décembre  2001.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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