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Résumé :

Rémunérationdes heures supplémentaires un jour de repos - Groupe Services des programmes etde l'administration - le fonctionnaires'estimant lésé avait été en disponibilité durant deux quarts consécutifs de8 heures - pendant son premier quart en disponibilité, il avait reçu unappel téléphonique à la maison et travaillé pendant 0,5 heure - plus tardpendant ce premier quart de travail en disponibilité, on l'a de nouveau appeléà la maison et il a dû se présenter au travail - il avait travaillé en tout8,75 heures, à raison de 4,25 heures pendant son premier quart endisponibilité et de 4,50 heures pendant son second quart - la conventioncollective précisait que les fonctionnaires tenus de se présenter au travail unjour de repos touchent la plus élevée de deux rémunérations, soit l'équivalentde 3 heures de rémunération au taux applicable des heures supplémentaireschaque fois qu'ils doivent se présenter au travail, jusqu'à un maximum de8 heures de rémunération par période de 8 heures, ou la rémunérationau taux des heures supplémentaires applicable - le fonctionnaire s'estimantlésé avait réclamé 3 heures de rémunération pour le premier appeltéléphonique, à taux simple et demi, puis 7,50 heures à taux simple etdemi et 1,25 heure à taux double, pour un total de 18,25 heures derémunération - l'employeur lui a payé 14,75 heures de rémunération équivalantà toutes les heures effectivement travaillées par le fonctionnaire s'estimantlésé (dont 0,5 heure pour l'appel téléphonique), à taux simple et demipour la première tranche de 7,5 heures et à taux double pour le reste,soit 1,75 heure - le fonctionnaire s'estimant lésé soutenait avoir ledroit de réclamer la rémunération la plus élevée à chaque occasion où il avaittravaillé - l'employeur a répondu que, pour chaque période de disponibilité, lefonctionnaire s'estimant lésé avait droit à la rémunération la plus élevée de3 heures de traitement à taux simple et demi ou du nombre d'heurestravaillées au taux des heures supplémentaires applicable - l'arbitre a jugéque la convention collective était claire, et que le fonctionnaire s'estimantlésé avait droit à la rémunération la plus élevée pour chaque fois qu'il avaitété tenu de travailler. Grief accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2002-01-28
  • Dossier:  166-2-30787
  • Référence:  2002 CRTFP 11

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

CLAUDIO G. PELLICORE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Citoyenneté et Immigration Canada)

employeur

Devant :  Joseph W. Potter, vice–président

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé :  David Landry, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur :  Jennifer Champagne, avocate


Affaire entendue à Toronto, le 29 novembre,
puis à Ottawa, le 21 décembre 2001.

[1]   Le 21 novembre 2000, M. Claudio G. Pellicore a déposé un grief, auquel étaient joints sept documents, pour contester sa rémunération au titre des heures supplémentaires. Le grief portait sur l'interprétation par la direction des sous–clauses 28.06c), 28.07c) et 29.02d) de la convention collective du groupe Services des programmes et de l'administration, conclue entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada et expirant en juin 2000 (mais prorogée en attendant l'achèvement des négociations) (pièce G–3).

[2]   À titre de mesure corrective, M. Pellicore demande qu'on lui verse la totalité de l'indemnité de disponibilité à laquelle il prétend avoir droit.

[3]   Dès le début de l'audience, le représentant du fonctionnaire s'estimant lésé a déclaré qu'il ne restait plus qu'une question à régler au moment où l'affaire a été renvoyée à l'arbitrage. La question à trancher en l'espèce porte sur l'interprétation de la sous–clause 28.07c), qui se lit comme suit :

28.07   Rémunération des heures supplémentaires un jour de repos

Sous réserve de l'alinéa 28.04a) :

[. . .]

  1. l'employé-e qui est tenu de se présenter au travail un jour de repos et qui s'y présente touche la plus élevée des deux rémunérations suivantes :

    1. une rémunération équivalant à trois (3) heures de rémunération calculée au tarif des heures supplémentaires applicable pour chaque rentrée au travail, jusqu'à concurrence de huit (8) heures de rémunération au cours d'une période de huit (8) heures,

      ou

    2. la rémunération calculée au tarif applicable des heures supplémentaires.

[. . .]

[4]   La preuve non contestée a été présentée par le fonctionnaire s'estimant lésé et elle se résume comme suit.

[5]   Le fonctionnaire s'estimant lésé a été affecté à des fonctions de disponibilité à compter de 23 h, le 3 novembre 2000, et ce, jusqu'à 15 h, le 4 novembre 2000. En fait, il a été en disponibilité pendant deux périodes de huit heures.

[6]   Le 4 novembre 2000, à 0 h 30, le fonctionnaire s'estimant lésé a reçu un appel téléphonique à la maison et a travaillé pendant 30 minutes.

[7]   Le fonctionnaire s'estimant lésé a demandé d'être rémunéré pour cette période de travail en vertu de l'alinéa 28.07c)(i). Il a réclamé trois heures de rémunération à tarif et demi.

[8]   À 2 h 45, M. Pellicore a de nouveau été appelé à la maison et a dû se présenter au travail. Il a travaillé jusqu'à 11 h 30 et a demandé pour cette période, en vertu de l'alinéa 28.07c)(ii), une rémunération équivalant à sept heures et demie à tarif et demi et à une heure et quart à double tarif.

[9]   D'après le fonctionnaire s'estimant lésé, il devait toucher une rémunération équivalant à 18,25 heures de travail.

[10]   Lorsque M. Pellicore a présenté sa feuille de temps (pièce G–4) sur laquelle il demandait d'être rémunéré pour 18,25 heures, son superviseur a refusé la demande en déclarant que la rémunération devait être réclamée soit en vertu de l'alinéa 28.07c)(i), soit en vertu de l'alinéa 28.07c)(ii), mais non les deux. En l'espèce, l'employeur a jugé que l'alinéa 28.07c)(ii) était plus avantageux pour le fonctionnaire s'estimant lésé et a donc indiqué à ce dernier qu'il serait rémunéré en vertu de cette disposition seulement pour toutes les heures travaillées.

[11]   Ainsi, le fonctionnaire s'estimant lésé a modifié sa feuille de temps et n'a demandé que 14,75 heures de rémunération, conformément aux directives de son superviseur. Ce dernier est arrivé à ce chiffre en appliquant le tarif majoré de moitié aux 7,5 premières heures travaillées, puis le tarif double à l'autre tranche de 1,75 heure. Le fonctionnaire s'estimant lésé a ensuite déposé son grief.

[12]   La question à trancher en l'espèce est de savoir si le fonctionnaire s'estimant lésé a droit à une rémunération équivalant à 18,25 heures de travail, tel qu'il le prétend, ou à 14,75 heures de travail, tel que le soutient l'employeur. D'après le fonctionnaire s'estimant lésé, son interprétation est celle qui s'applique depuis des années.

Plaidoiries

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[13]   La seule question à trancher porte sur la rémunération à laquelle a droit le fonctionnaire s'estimant lésé à l'égard de ses périodes de travail le 4 novembre 2000, pendant qu'il était en disponibilité. Le fonctionnaire s'estimant lésé croit avoir droit à une rémunération totale correspondant à 18,25 heures de travail, alors que l'employeur soutient qu'il a droit à une rémunération totale équivalant à 14,75 heures de travail.

[14]   Les faits ne sont pas contestés. Le 3 novembre M. Pellicore a fait partie du quart de jour, puis, le même soir à compter de 23 h, a été affecté à des fonctions disponibilité. À 0 h 30, il a reçu un appel téléphonique chez lui et a travaillé pendant une demi-heure. Pour cette période de travail, il a demandé d'être rémunéré en vertu de l'alinéa 28.07c)(i).

[15]   Pendant qu'il était toujours en disponibilité, M. Pellicore a de nouveau été appelé à travailler, soit de 2 h 45 à 11 h 30. Il a demandé d'être rémunéré pour cette période de travail en vertu de l'alinéa 28.07c)(ii).

[16]   L'employeur a rejeté la demande de rémunération telle qu'elle a été présentée et a indiqué à M. Pellicore que celle–ci devait être faite en vertu de l'alinéa 28.07c)(i) ou (ii), selon la disposition qui lui permettait de toucher la rémunération la plus élevée.

[17]   Rien dans le libellé de l'alinéa 28.07c)(i) ou (ii) n'empêche l'employé d'invoquer tantôt le premier, tantôt le second alinéa.

[18]   Selon la disposition en question, un employé(e) qui est tenu(e) de se présenter au travail et qui s'y présente touche la plus élevée des rémunérations prévues à l'alinéa 28.07c)(i) ou 28.07c)(ii). C'est exactement ce qu'a demandé M. Pellicore. La première fois, il a invoqué l'alinéa (i) et la seconde, l'alinéa (ii), ce qui est tout à fait conforme au libellé de la convention collective.

[19]   M. Landry présente les décisions suivantes à l'appui de son argumentation : Paul (dossier de la Commission 166–2–406) et Barnard (dossier de la Commission 166–2–281).

Pour l'employeur

[20]   La convention collective est claire et non ambiguë et doit être interprétée en fonction de son libellé, selon lequel l'employé reçoit une rémunération équivalant à trois heures calculée au tarif des heures supplémentaires, jusqu'à concurrence de huit heures de rémunération pour chaque période de huit heures. Le fonctionnaire s'estimant lésé a droit soit à cette rémunération, soit à celle calculée au tarif des heures supplémentaires, selon la plus élevée de ces deux rémunérations.

[21]   Le fonctionnaire s'estimant lésé a travaillé pendant les deux périodes de huit heures au cours desquelles il était en disponibilité. Dans les deux cas, l'alinéa 28.07c)(ii) lui est le plus favorable, et c'est ce à quoi il a droit. Aucune disposition ne lui permet d'invoquer tantôt l'alinéa 28.07c)(i), tantôt l'alinéa 28.07c)(ii).

[22]   Si l'intention de la convention collective était de permettre à un employé d'opter pour la disposition la plus avantageuse pour chaque demande de rémunération des heures supplémentaires, cela y serait indiqué. La seule interprétation logique consiste à faire le total des heures travaillées par l'employé, puis à calculer laquelle des dispositions lui permet de toucher la rémunération la plus élevée.

[23]   L'employé ne peut être rémunéré de façon adéquate qu'une fois que la période totale de huit heures est examinée.

[24]   Dans l'affaire Doyon c. Commission des relations de travail dans la fonction publique et La Reine, [1978] 1 F.C. 31, la Cour d'appel fédérale a déclaré, à la page 34 :

[. . .]

Si un contrat est clair, on ne peut, dans le but de lui attribuer un sens différent de son sens apparent, établir que les parties ont voulu autre chose que ce qu'elles ont dit..

[. . .]

[25]   L'avocate de l'employeur présente les décisions suivantes à l'appui de son argumentation : Comeau,2001 CRTFP 112 (166–2–30313), Gagnon (dossiers de la Commission 166–18–17832 à 17834) et Regina v. Barber et al.,  68 D.L.R. (2d) 682 (C.A. Ont.)

Réfutation

[26]   La convention collective ne dit pas que le calcul doit être effectué au bout de huit heures, mais plutôt au moment où l'employé présente sa feuille de temps.

Motifs de la décision

[27]   La question à trancher en l'espèce concerne l'interprétation de la sous–clause 28.07c) de la convention collective du groupe Services des programmes et de l'administration. Les faits en l'espèce ne sont pas contestés, du moins en ce qui concerne le nombre d'heures que le fonctionnaire s'estimant lésé a témoigné avoir travaillées le 4 novembre 2000.

[28]   Le 4 novembre 2000, à 0 h 30, pendant qu'il était en disponibilité, le fonctionnaire s'estimant lésé a reçu un appel téléphonique à la maison qui l'a obligé à travailler pendant une trentaine de minutes. Pour cette période de travail, il a demandé d'être rémunéré en vertu de l'alinéa 28.07c)(i), ce qui représentait une rémunération équivalant à trois heures de travail calculée au tarif des heures supplémentaires applicable. Si le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait pas eu à travailler de nouveau pendant la première des deux périodes de disponibilité de huit heures, son droit à cette rémunération n'aurait pas été contesté.

[29]   Toutefois, la situation est devenue plus complexe lorsque le fonctionnaire s'estimant lésé a été rappelé au travail de nouveau et a effectivement travaillé pendant une autre période de huit heures et 45 minutes. D'après l'employeur, cela signifiait que le fonctionnaire s'estimant lésé devait choisir entre l'alinéa 28.07c)(i) et l'alinéa (ii), selon celui qui lui permettait de toucher la rémunération la plus élevée.

[30]   La disposition est libellée de façon à faire état dès le départ de la condition applicable, c'est–à–dire  :

  1. l'employé-e qui est tenu de se présenter au travail un jour de repos et qui s'y présente touche la plus élevée des deux rémunérations suivantes :

[. . .]

[31]   La disposition me semble claire. Lorsque l'employé est tenu de se présenter au travail, il demande d'être rémunéré en vertu soit de l'alinéa 28.07c)(i), soit de l'alinéa 28.07c)(ii). En l'espèce, le fonctionnaire s'estimant lésé a été appelé à se présenter au travail à 0 h 30, le 4 novembre 2000, et avait donc le droit de toucher la plus élevée des rémunérations prévues à l'alinéa (i) ou (ii). Dans ce cas, c'est l'alinéa 28.07c)(i) qui lui permettait de toucher la rémunération la plus élevée.

[32]   L'employé a également été tenu de se présenter au travail à compter de 2 h 30, le 4 novembre 2000. À mon avis, il avait le droit d'invoquer l'alinéa (i) ou (ii), étant donné qu'il a respecté la condition énoncé au départ à la sous–clause 28.07c), c'est–à–dire qu'il était tenu de se présenter au travail et s'y est présenté. Cette fois, il a invoqué l'alinéa (ii), puisque c'est cette disposition qui lui permettait de toucher la rémunération la plus élevée.

[33]   À mon avis, pour pouvoir soutenir l'interprétation de la sous–clause 28.07c) de l'employeur, il faudrait qu'il y ait une disposition expresse dès le début qui précise que soit l'alinéa (i), soit l'alinéa (ii) s'applique pour toute période de disponibilité d'une durée de huit heures consécutives. Aucune disposition à cet égard n'est prévue au début de la sous–clause 28.07c).

[34]   En l'espèce, le fonctionnaire s'estimant lésé a été tenu de se présenter au travail à deux reprises pendant qu'il était en disponibilité. Chaque fois, il a indiqué qu'il avait le droit d'être rémunéré selon la disposition applicable de la convention collective. Cette disposition précise ce qu'il peut réclamer lorsqu'il prépare sa feuille de temps. À mon avis, il n'existe aucune disposition qui permet à l'employeur de combiner la rémunération à laquelle a droit un employé appelé à se présenter au travail à deux occasions différentes.

[35]   Ainsi, le grief de M. Pellicore est accueilli dans la mesure où ce dernier a le droit d'être rémunéré selon sa demande initiale de rémunération au titre des heures supplémentaires, qui représentait une rémunération équivalant à 18,25 heures de travail.

Joseph W. Potter,
vice-président

OTTAWA, le 28 janvier 2002.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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