Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Rémunérationd'intérim - Nouvel avantage accordé en vertu de la convention collective -Rétroactivité - la fonctionnaire s'estimantlésée était un agent du service extérieur FS-01 - elle occupait à titreintérimaire un poste de FS-02 depuis le 31 juillet 1999 - elleavait demandé qu'on lui verse une rémunération d'intérim à partir de cette date- l'employeur lui avait payé cette rémunération à partir du31 août 2000, date à laquelle une nouvelle convention collectiveavait été signée - la convention collective précédente ne donnait pas à lafonctionnaire s'estimant lésée le droit de toucher une rémunération d'intérim -le 26 avril 2001, elle a présenté un grief pour contester la décisionde l'employeur en réclamant une rémunération d'intérim rétroactivement au31 juillet 1999 - elle a soutenu que la convention collective luidonnait le droit de toucher une rémunération d'intérim pour toute la périodedurant laquelle elle avait rempli les fonctions d'un poste d'un niveausupérieur - l'employeur a répliqué qu'elle n'avait pas droit à une rémunérationd'intérim en vertu de la convention collective précédente - il a ajouté que lanouvelle convention collective ne contenait aucune disposition sur larétroactivité de la rémunération d'intérim - l'arbitre a conclu que laconvention collective était claire et que la disposition sur la rémunération d'intérim n'était pas applicable rétroactivement. Grief rejeté. Décisions citées : Leduc(166-2-28701); Doyon c.Canada (Commission des relations de travail dans la fonction publique), [1978] 1 C.F. 31 (C.A.).

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2002-02-04
  • Dossier:  166-02-30856
  • Référence:  2002 CRTFP 15

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

KATHY BUNKA

fonctionnaire s'estimant lésée

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)

employeur

Devant :  D.R. Quigley, commissaire

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée :  Ron Cochrane, Association professionnelle des agents du service extérieur

Pour l'employeur :  Colleen Edwards, avocate


Affaire entendue à Ottawa (Ontario)
le 17 décembre 2001.

[1]   La présente décision porte sur un grief déposé par Mme Kathy Bunka, qui allègue que l'employeur a enfreint la convention collective, signée le 31 août 2000, entre le Conseil du Trésor et l'Association professionnelle des agents du service extérieur (APASE) (code : 312/00; date d'expiration : 30 juin 2001) en lui refusant sa rémunération d'intérim pour toute la période durant laquelle elle a rempli les fonctions d'un poste de niveau FS–2. Elle demande à être rémunérée rétroactivement à compter du jour où son affectation intérimaire a commencé, soit le 31 juillet 1999.

[2]   Mme Bunka n'était pas présente à l'audience et aucun témoin n'a été appelé. Les parties ont produit un « exposé conjoint des faits » (pièce E–1), qui se lit ainsi :

[Traduction]

Exposé conjoint des faits
Dans l'affaire Kathy Bunka contre le Conseil du Trésor
(ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)
Dossier 166–2–30856 de la CRTFP

Les parties ont convenu de présenter l'information suivante concernant le grief susmentionné pour examen par la Commission. Cette information n'est pas contestée. En outre, le présent exposé conjoint des faits est produit sous toutes réserves.

  1. La fonctionnaire s'estimant lésée est une agente du service extérieur employée par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI).
  2. La fonctionnaire est classée aux groupe et niveau FS–01.
  3. Le 26 avril 2001, Mme Bunka a contesté la décision de la direction de lui refuser sa rémunération d'intérim de niveau FS–02 pour toute la période durant laquelle elle a exercé les fonctions d'un poste de niveau plus élevé, à savoir FS–02.
  4. Mme Bunka soutient que la décision de la direction de ne pas la rémunérer pour toute la période d'intérim constitue une infraction à sa convention collective.
  5. En guise de réparation, la fonctionnaire s'estimant lésée demande à ce qu'une rémunération d'intérim lui soit payée rétroactivement à la date où elle a commencé à assurer l'intérim, soit le 31 juillet 1999.
  6. L'employeur confirme que, depuis le 31 juillet 1999, Mme Bunka a exécuté, sur une base intérimaire, une grande partie des fonctions d'un poste de niveau FS–02.
  7. La fonctionnaire s'estimant lésée touche une rémunération d'intérim de niveau FS–02 depuis la date de signature de la convention collective, soit le 31 août 2000.
  8. La convention collective en vigueur au moment où Mme Bunka a présenté son grief était la « Convention entre le Conseil du Trésor et l'Association professionnelle des agents du service extérieur » signée par les parties le 31 août 2000, avec une date d'expiration fixée au 30 juin 2001.
  9. Les dispositions visées par le présent grief sont les clauses 42.08 et 44.02 de la convention collective susmentionnée.
Date :


Ilan Rumstein
pour le Conseil du Trésor
 
Ron Cochrane
pour l’APASE

[3]   Les clauses 42.08 et 44.02 se lisent comme suit :

**
42.08   Rémunération d'intérim

Le fonctionnaire qui est tenu par l'Employeur d'exécuter et exécute effectivement sur une base intérimaire une grande partie des fonctions d'un poste d'un niveau de classification supérieur pour une période de plus de quatre (4) jours ouvrables consécutifs, touche une rémunération d'intérim, calculée à partir de la date à laquelle il a commencé à remplir ces fonctions, comme s'il avait été nommé à ce niveau de classification supérieur, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim.

S'il s'agit d'une affectation intérimaire à un poste du Groupe de la direction, le fonctionnaire est exempté de l'application de l'article 12, Heures supplémentaires.

Lorsque la période d'attente comporte un jour désigné comme jour férié payé, celui–ci sera considéré comme un jour travaillé aux fins de la période d'attente.

[. . .]

44.02   À moins d'indications contraires précises, la présente convention entre en vigueur à la date de sa signature.

[4]   Les éléments suivants ont également été présentés sous forme de pièces :

Pièce E–2 : clauses 42.11 et 44.02 de la convention collective entre le Conseil du Trésor et l'APASE (code 312/99; date d'expiration : 30 juin 1999) et
Pièce E–3 : la convention collective entre le Conseil du Trésor et l'APASE (code 312/00; date d'expiration : 30 juin 2001).

Observations présentées par les parties

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée

[5]   M. Cochrane déclare que, le 31 août 2000, l'APASE et le Conseil du Trésor ont signé une convention collective. À l'issue des négociations, la clause 42.11, qui porte ce qui suit :

**
42.11  Rémunération d'intérim

Le fonctionnaire qui est affecté à l'étranger ou au Canada, dans le cadre d'un système de rotation du personnel, ne touche, en vertu du présent paragraphe, aucune rémunération d'intérim en raison de cette affectation. Cependant, si au cours de ladite affectation, il est tenu par l'Employeur d'exécuter et exécute effectivement sur une base intérimaire une grande partie des fonctions d'un poste de niveau de classification supérieur pour une période de plus de quinze (15) jours ouvrables consécutifs, il touche une rémunération d'intérim, calculée à partir de la date à laquelle il a commencé à remplir ces fonctions, comme s'il avait été nommé à ce niveau de classification supérieur, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim.

a été remplacée par la clause 42.08 (pièce E–3), qui se lit ainsi :

**
42.08 Rémunération d'intérim

Le fonctionnaire qui est tenu par l'Employeur d'exécuter et exécute effectivement sur une base intérimaire une grande partie des fonctions d'un poste d'un niveau de classification supérieur pour une période de plus de quatre (4) jours ouvrages consécutifs, touche une rémunération d'intérim, calculée à partir de la date à laquelle il a commencé à remplir ces fonctions, comme s'il avait été nommé à ce niveau de classification supérieur, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim.

S'il s'agit d'une affectation intérimaire à un poste du Groupe de la direction, le fonctionnaire est exempté de l'application de l'article 12, Heures supplémentaires.

Lorsque la période d'attente comporte un jour désigné comme jour férié payé, celui–ci sera considéré comme un jour travaillé aux fins de la période d'attente.

[6]   M. Cochrane explique que la raison de ce changement est qu'on voulait s'assurer que tous les employés exécutant, sur une base intérimaire, une grande partie des fonctions d'un poste d'un niveau de classification plus élevé aient droit à une rémunération d'intérim. L'aspect concernant le taux de traitement et la rétroactivité n'a pas été modifié par rapport à la convention collective précédente, c'est–à–dire que le fonctionnaire « [...] touche une rémunération d'intérim, calculée à partir de la date à laquelle il a commencé à remplir ces fonctions, comme s'il avait été nommé à ce niveau de classification supérieur, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim. »

[7]   M. Cochrane déclare que l'employeur a rejeté le grief au motif que la disposition ne prenait effet que le 31 août 2000, date de signature de la nouvelle convention collective, car les parties n'avaient pas expressément stipulé une date différente.

[8]   Le représentant de la fonctionnaire s'estimant lésée souscrit en partie à la thèse de l'employeur, puisque ce n'est qu'à la signature de la convention collective qu'un « fonctionnaire qui est affecté à l'étranger ou au Canada, dans le cadre d'un système de rotation du personnel, » devient admissible à une rémunération d'intérim en vertu de cette affectation, pour autant que l'affectation soit faite à un poste d'un niveau de classification supérieur. Le seul autre changement apporté à cette clause, qui a pris effet le 31 août 2000, concernait la période d'admissibilité à une rémunération d'intérim.

[9]   L'employeur est tenu de payer aux fonctionnaires occupant des postes intérimaires, qui satisfont aux exigences fondamentales, une rémunération d'intérim calculée à partir de la date à laquelle le fonctionnaire a commencé à exercer les fonctions intérimaires comme s'il avait été nommé à ce niveau de classification supérieur, et ce, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim. Par conséquent, le calcul de la rémunération d'intérim et la période de rémunération n'ont effectivement pas changé par rapport à l'ancienne convention collective. En d'autres termes, l'admissibilité et la période d'admissibilité ont changé mais pas le calcul de la rémunération d'intérim.

[10]   Qu'il s'agisse d'une période de 15 jours consécutifs, comme dans l'ancienne convention collective, ou d'une période de quatre jours consécutifs, comme c'est le cas dans la nouvelle convention, les fonctionnaires admissibles touchaient une rémunération pour la période au cours de laquelle ils remplissaient les fonctions d'un poste de niveau de classification supérieur et pas seulement pour la période commencée après le 31 août 2000.

[11]   S'il avait eu l'intention de restreindre le calcul de la rémunération d'intérim aux personnes satisfaisant à ces critères, quelle que soit la date de signature, le Conseil du Trésor aurait changé le libellé de la phrase « [...] calculée à partir de la date à laquelle il a commencé à remplir ces fonctions [...] », de même qu'il aurait précisé davantage le passage « pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim ».

[12]   L'APASE est d'avis qu'il ressort clairement du libellé de cette disposition que, si un fonctionnaire, à la date de la signature de la convention collective, exécute des fonctions d'intérim et satisfait aux critères révisés des « jours ouvrables consécutifs », alors la rémunération d'intérim est calculée à partir de la date à laquelle le fonctionnaire a commencé à exécuter une grande partie des fonctions du poste de niveau supérieur, et ce, pour la période au cours de laquelle il assure l'intérim.

[13]   M. Cochrane allègue que tout fonctionnaire qui remplissait des fonctions d'intérim pendant la durée de validité de l'ancienne convention collective, ou après sa date d'expiration, et qui satisfaisait aux critères a droit à une rémunération d'intérim pour la période durant laquelle il assure l'intérim et non pour la période commençant à la date de signature de la convention.

[14]   À son avis, il n'était pas nécessaire d'identifier une date antérieure, puisque le changement apporté à la clause 42.11 (pièce E–2) visait les employés qui exerçaient des fonctions d'intérim à un niveau de classification supérieur ou qui allaient exercer les fonctions d'un poste de niveau supérieur et non ceux qui avaient rempli des fonctions d'intérim, mais avaient cessé de le faire pendant cette période, ce qui aurait pu être le cas si les parties avaient expressément stipulé une date antérieure. Cela aurait été un fardeau administratif.

[15]   M. Cochrane produit de nombreuses décisions et des textes de jurisprudence qui portent sur l'interprétation des conventions collectives. En outre, il cite L'objet de l'interprétation : l'intention des parties et d'autres ouvrages, comme la troisième édition de Canadian Labour Arbitration, (Brown et Beatty), 4:2100, et la décision Massey–Harris–Ferguson Ltd. (1955), 5 L.A.C. 2123 (à la page 2124.), dans lesquels un certain nombre de points sont précisés pour aider les arbitres à interpréter les conventions collectives.

[16]   On m'a demandé d'examiner la jurisprudence produite et de l'appliquer à l'espèce en gardant les cinq points suivants à l'esprit :

  1. l'intention des parties était d'inclure un groupe de fonctionnaires qui avaient antérieurement été exclus des dispositions concernant la rémunération d'intérim car ils exécutaient les fonctions d'un poste de niveau de classification supérieur dans le cadre d'un système de rotation, ainsi que de réduire la période d'admissibilité à une rémunération d'intérim;
  2. les parties n'avaient pas l'intention de changer la méthode de calcul ni la période visée, car le libellé de la convention collective précédente n'a pas été modifié sur ce point;
  3. en ma qualité d'arbitre, je ne me trouve pas devant un « choix à faire entre deux interprétations possibles, linguistiquement parlant »;
  4. l'interprétation de l'APASE considère le libellé de la disposition dans son sens normal et ordinaire;
  5. il n'y a pas d'incompatibilité entre le fait de reconnaître une plus longue période de couverture dans la disposition tout en reconnaissant que le calcul, qui est demeuré inchangé, remonterait dans le temps pour les fonctionnaires nouvellement visés.

Pour l'employeur

[17]   Me Edwards, l'avocate de l'employeur, argue qu'il s'agit là du [traduction] « cas classique de rétroactivité demandée par le syndicat ». La fonctionnaire s'estimant lésée veut obtenir un nouvel avantage auquel elle n'avait pas droit.

[18]   La clause 42.08 a supprimé les dispositions d'exclusion à la date de signature. Aucun droit n'est prévu par la présente convention collective avant sa signature.

[19]   Me Edwards attire mon attention sur la clause 44.02, qui dit que « à moins d'indications contraires précises, la présente convention entre en vigueur à la date de sa signature. »

[20]   Me Edwards me demande d'examiner la clause 42.03, « Échelles de rémunération », et l'appendice « A », qui se lisent ainsi :

42.03   Échelles de rémunération

  1. Les échelles de rémunération indiquées à l'appendice « A » de la présente convention entrent en vigueur aux dates stipulées dans ladite convention.

  2. Lorsque les taux de rémunération énoncés à l'appendice « A » ont une date d'entrée en vigueur antérieure à la date de signature de la convention, les conditions suivantes s'appliquent :

    1. pour les fins des sous–alinéas (ii) à (v), l'expression « période de rémunération rétroactive » désigne la période qui commence à la date d'entrée en vigueur de la révision rétroactive à la hausse des taux de rémunération et se termine le jour de la signature de la convention où le jour où la décision arbitrale est rendue à cet égard;

    [. . .]

**APPENDICE « A »

GROUPE DU SERVICE EXTÉRIEUR

ÉCHELLES DE RÉMUNÉRATION

(en dollars)

  1. En vigueur le 1er juillet 1999
  2. En vigueur le 1er juillet 2000
  3. En vigueur le 1er août 2000 –restructure
Niveau   Minimum
de l'échelle
(Annuel)
Minimum
de l'échelle
(Annuel)
FS - 1
De :  $  36210 49266
À :  A  36934 50251
   B  37857 51507
FS - 2
De :  $  48278 68931
À :  A  49244 70310
   B  50475 72068
   C  50475 75423

Structure de rémunération de perfectionnement
De :  $  36201 40074 44421 47514
À :  A  38605 42788 48765 50670

NOTE SUR LA RÉMUNÉRATION
Restructuration de la rémunération - niveau FS–2
Les employés qui, le 1er août 2000, auront été rémunérés pendant plus de douze (12) mois au taux maximum prévu pour leur niveau, passeront au nouveau taux de rémunération maximum en vigueur à compter du 1er août 2000.

[21]   Au moment de rendre ma décision, il est clairement ressorti de ces clauses que, à moins d'indication expressément stipulée, comme c'était le cas pour ces clauses, une disposition ne peut prendre effet avant que la convention collective soit signée, ainsi que le précise la clause 44.02.

[22]   Au 31 juillet 1999, la fonctionnaire s'estimant lésée était donc assujettie aux conditions de la convention collective précédente (pièce E–2). En vertu des dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (Loi), les conditions demeurent en vigueur (transition) tant qu'une nouvelle convention collective n'a pas été ratifiée et signée.

[23]   Me Edwards fait observer que le paragraphe 96(2) de la Loi m'interdit, en ma qualité d'arbitre, de modifier la convention collective et que je n'ai donc pas compétence. Le paragraphe 96(2) de la Loi porte ce qui suit :

(2) En jugeant un grief, l'arbitre ne peut rendre une décision qui aurait pour effet d'exiger la modification d'une convention collective ou d'une décision arbitrale.

[24]   L'avocate de l'employeur reconnaît pour sa part la clause 42.08 et les changements négociés. Toutefois, la clause 44.02 est une disposition prépondérante.

[25]   La clause 44.01 stipule ce qui suit : « La présente convention collective est en vigueur à compter de la date de sa signature jusqu'au 30 juin 2001. » Par conséquent, cela suppose que la convention entre en vigueur à la date de sa signature et non à la date d'expiration de la convention précédente.

[26]   Les dispositions expresses sur la date de signature concluent que la prise d'effet commence à cette date; pour ce qui est de la rétroactivité de la rémunération d'intérim, la convention ne contient pas de disposition expresse qui permette de remonter à une date antérieure.

[27]   Me Edwards produit cinq décisions à l'appui de sa thèse : Leduc (dossier de la Commission 166–2–28701); Desgagné et collègues (dossiers de la Commission 166–2–15503 à 15506); Boyce (dossier de la Commission 166–2–13918); Gagnon et collègues (dossiers de la Commission 166–18–17832 à 17834) et Ward (dossier de la Commission 166–2–12638).

Réplique

[28]   M. Cochrane conclut que cette clause sur la rémunération d'intérim n'est pas seulement propre à l'APASE mais aussi à la fonction publique. Elle comporte des dispositions sur la rémunération et, en l'occurrence, la rémunération d'intérim est différente de la clause sur la durée. On pourrait arguer que le calcul de la rémunération d'intérim a été expressément stipulé.

[29]   M. Cochrane déclare que les textes de jurisprudence que m'avait produits l'avocate de l'employeur n'étaient pas pertinents en l'espèce.

[30]   En résumé, l'interprétation que fait l'APASE de la clause en litige est la meilleure lorsque l'on tient compte de l'objet des règles d'interprétation. Découvrir l'intention de l'auteur est l'objet de toute interprétation d'un instrument écrit, lequel instrument est toujours considéré comme la déclaration écrite de l'esprit de son auteur. Par conséquent, l'interprétation doit être le plus près possible de l'esprit et de l'intention apparente des parties et dans les limites que permet la loi.

[31]   M. Cochrane déclare que tout membre de l'unité de négociation qui était admissible à une rémunération d'intérim le jour de la signature officielle de la convention était en droit de toucher une rémunération d'intérim pour toute la période durant laquelle il assurait l'intérim et non seulement pour une partie de cette période.

Motifs de la décision

[32]   Les parties conviennent que l'affaire que je dois trancher repose uniquement sur l'interprétation des clauses 42.08 et 44.02.

[33]   On ne conteste pas le fait que Mme Kathy Bunka est au niveau de classification FS–1 en qualité d'agente du service extérieur employée par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI).

[34]   L'employeur a confirmé que, depuis le 31 juillet 1999, Mme Bunka exécutait une grande partie des fonctions d'un poste de groupe et niveau FS–2.

[35]   La convention collective qui était en vigueur lorsque Mme Bunka a déposé son grief a été signée par les parties le 31 août 2000 et vient à expiration le 30 juin 2001.

[36]   Il m'est évident que la décision que Philip Chodos, alors vice–président de la Commission, a rendue dans l'affaire Leduc (supra), dans laquelle il a conclu que les agents du service extérieur avaient droit à une rémunération d'intérim uniquement lorsqu'ils exécutaient une grande partie des fonctions d'un poste de niveau de classification supérieur à celui qu'ils occupent dans le cadre d'une affectation par rotation, a incité les parties à négocier une modification de la clause 42.11 (pièce E–2); d'où la clause 42.08 (pièce E–3).

[37]   Les parties ont pu en arriver, par la négociation, à 1) supprimer la condition préalable à l'admissibilité (le fait maintenant que les fonctionnaires exécutant une grande partie des fonctions d'un poste de niveau de classification supérieur toucheront une rémunération d'intérim) et 2) réduire, en le faisant passer de quinze (15) à quatre (4), le nombre de jours d'intérim pour être admissible à une rémunération d'intérim.

[38]   La question est bien entendu la suivante : À quel moment la rémunération d'intérim de Mme Bunka commence-t-elle ? Au moment où la fonctionnaire s'estimant lésée commence à exécuter une grande partie des fonctions d'un poste de niveau FS–2, soit le 31 juillet 1999, ou au moment où les parties ont signé la convention collective, le 31 août 2000 ? La conclusion que je tire de la jurisprudence sur l'application rétroactive des dispositions d'une convention collective, c'est que ces dispositions n'entrent en vigueur qu'à la date de signature de la convention collective, à moins d'indication expresse ou tacite d'une autre date.

[39]   Aucune des deux parties ne m'a produit de preuve - que ce soit sous la forme d'une lettre d'entente ou d'un protocole d'entente - qui démontrerait qu'elles étaient parvenues à une entente, à l'égard de la clause 42.08, quant à la date de rétroactivité pour le début de la rémunération d'intérim. Les parties n'ont pas produit de preuve démontrant que, dans les conventions collectives précédentes, la rétroactivité était payée pour les affectations intérimaires pendant la période de transition, avant la date de signature de la convention.

[40]   L'alinéa 42.03b)(i) stipule clairement que l'expression « période de rémunération rétroactive » désigne la période qui commence à la date d'entrée en vigueur de la révision rétroactive à la hausse des taux de rémunération et se termine le jour de la signature de la convention où le jour où la décision arbitrale est rendue à cet égard. Les échelles de rémunération du groupe Service extérieur, à l'appendice « A », ont toutes des dates de prise d'effet aux fins de la rémunération. La restructuration de la rémunération au niveau FS–2 comporte aussi la date d'entrée en vigueur du 1er août 2000, date de la signature, pour l'accès au nouveau taux de rémunération maximum.

[41]   La décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Doyon c. CRTFP, [1978] 1 C.F. 31, traite d'une situation dans laquelle l'arbitre de grief a retenu une preuve extrinsèque de pratiques antérieures pour interpréter un article de la convention collective. La Cour a jugé que l'article en question n'était ni ambigu ni obscur et que l'arbitre de grief avait donc fait erreur en admettant la preuve extrinsèque pour faciliter l'interprétation de l'article.

[42]   En l'espèce, je trouve que le libellé des clauses 42.08 et 44.02 n'est ni ambigu ni obscur. En conséquence, il ne serait pas indiqué de tenir compte d'une preuve extrinsèque aux fins de leur interprétation.

[43]   Lorsque les parties négocient collectivement, il leur incombe d'exprimer clairement les positions qu'elles défendent eu égard au droit à la rémunération rétroactive, qu'il s'agisse de rémunération d'intérim, de rémunération d'heures supplémentaires, d'une indemnité de travail salissant, etc. et, en particulier, au sujet de la date précise à laquelle ces clauses prennent effet.

[44]   Mme Bunka était une FS–1 exécutant par intérim depuis le 31 juillet 1999 les fonctions d'un FS–2 dans le cadre d'une affectation par rotation et, jusqu'à ce que l'on apporte le changement à l'issue des négociations, elle n'avait pas droit à une rémunération d'intérim en raison de l'aspect « roulement » de son poste. À la lumière du libellé des articles pertinents de la convention collective, j'estime qu'ils ne comportent pas d'application rétroactive.

[45]   En l'espèce, Mme Bunka n'est pas admissible à une rémunération d'intérim avant la date de signature de la convention collective (31 août 2000).

[46]   Par conséquent, pour les raisons qui précèdent, le présent grief est rejeté.

D.R. Quigley,
commissaire

OTTAWA, le 4 février 2002.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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