Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Licenciement(motif disciplinaire) - Vente de drogue à un collègue - Suspension pour unepériode indéfinie - Agent de correction - Détermination de la crédibilité - Loidu silence - lefonctionnaire s'estimant lésé avait été suspendu pour une période indéfinie,puis licencié pour avoir vendu de la cocaïne à l'agent de correction N - Navait témoigné que cela s'était produit à l'appartement de l'agent decorrection K, qui était aussi présent au moment de l'échange - lefonctionnaire s'estimant lésé et K niaient que le fonctionnaire s'estimant léséait vendu de la cocaïne à N - K niait même que N ait jamais été à sonappartement - compte tenu de toute la preuve, l'arbitre a retenu le témoignagede N, selon la prépondérance des probabilités - en outre, il a déclaré quel'existence d'une loi du silence faisait qu'il était peu probable que N aitmenti - faire du trafic de drogue est un acte d'inconduite très grave pour unagent de correction, et le licenciement est une sanction disciplinaireappropriée en l'absence de circonstances atténuantes péremptoires - il n'y avait pas de telles circonstances atténuantes dans cette affaire. Griefs rejetés. Décisions citées : Tipple c.Canada (Conseil du Trésor),(26 septembre 1985), A-66-85 (C.A.F.);Faryna c. Chorny, 2 D.L.R. 354 (C.A. C.-B.).

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2002-04-16
  • Dossier:  166-02-30897 et 30898
  • Référence:  2002 CRTFP 42

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

JAMIE RENAUD

fonctionnaire s'estimant lésé

et

LE CONSEIL DU TRÉSOR
(Solliciteur général du Canada - Service correctionnel du Canada)

Employeur

Devant :  Joseph W. Potter, vice-président

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé :  Angus J. MacLeod, avocat

Pour l'employeur :  Richard E. Fader, avocat


Affaire entendue à Kingston (Ontario)
du 26 février au 1er mars 2002.

[1]   La présente affaire porte sur deux griefs déposés par l'agent de correction (CX-01) Jamie Renaud. Le grief initial, déposé le 5 avril 2001, porte sur la suspension de M. Renaud pour une période indéterminée. Le second, déposé le 23 mai 2001, porte sur son licenciement.

[2]   Au moment de sa suspension pour une période indéterminée, M. Renaud occupait un poste d'agent de correction au pénitencier de Kingston. La lettre lui signifiant sa suspension est datée du 3 avril 2001. Il y est écrit, notamment (pièce E-10) :

[Traduction]

[…]

Votre suspension est nécessaire à cause de l'enquête en cours sur vos présumées fautes de conduite. Il est allégué, entre autres, que vous avez eu de la cocaïne en votre possession et que vous en avez fait le trafic..

[…]

[3]   À l'issue de l'enquête sur les allégations d'inconduite de sa part, M. Renaud a été notifié de son licenciement dans une lettre datée du 22 mai 2001 et signée par le directeur du pénitencier de Kingston à l'époque, Monty Bourke. Il y est écrit, notamment (pièce E–11) :

[Traduction]

[…]

D'après les éléments de preuve recueillis, vous avez commis des fautes de conduite très graves. Il a été établi que vous avez vendu de la drogue. J'ai étudié soigneusement tous les faits et circonstances dans cette affaire, et en me fondant sur tous les renseignements disponibles, j'en suis venu à la conclusion que vous avez enfreint le Code de discipline et les Règles de conduite professionnelle du Service correctionnel du Canada. J'en ai conclu que selon la prépondérance des probabilités, vous vous êtes conduit d'une manière contraire à l'éthique et à la déontologie de la profession, jetant ainsi le discrédit sur le Service.

Dans ma décision, j'ai bien tenu compte de votre dossier disciplinaire et de vos antécédents professionnels ainsi que du fait que vous niez toutes les allégations d'inconduite. J'ai aussi tenu compte de vos années de service au Service correctionnel du Canada. Étant donné la nature et la gravité de votre inconduite, je ne puis que conclure que le lien de confiance qui constitue un élément fondamental de la relation employeur-employé a été irrévocablement rompu. De plus, la conduite que vous avez manifestée est absolument contraire à la conduite qui est attendue d'un agent de correction du Service correctionnel du Canada.

[...]

[4]   Une demande d'exclusion de témoins a été présentée, laquelle a été accordée. Au total, 12 témoins ont témoigné, dont un a été rappelé. L'avocat de l'employeur a déposé 13 pièces en preuve, alors que l'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé en a déposé cinq, dont une (pièce U–4) contenait 17 onglets (T-1 à T-17).

Contexte

[5]   L'employeur allègue que M. Renaud a vendu de la cocaïne à un autre agent de correction, Richard Noble, en dehors du lieu de travail. M. Renaud soutient que cela ne s'est jamais produit.

[6]   M. Bourke a assumé les fonctions de directeur du pénitencier de Kingston le 15 décembre 1997. Peu de temps après son entrée en fonction, il a reçu des renseignements sur l'inconduite et la corruption de certains agents de correction. Après qu'une enquête interne a abouti à un cul–de–sac, on a décidé de faire appel à la Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.) et à la Police provinciale de l'Ontario (P.P.O.). Un groupe de travail conjoint a été mis sur pied et une opération secrète, appelée « Project O Correct », s'est déroulée de mars 1999 à mars 2001.

[7]   Très peu de gens étaient au courant de l'opération « Project O Correct », pour des raisons bien évidentes. Outre le directeur du pénitencier et son adjoint, le seul autre employé du pénitencier qui était au courant du projet était Rick Rogers, l'agent de la Sécurité préventive à l'établissement (ASPÉ). Le sergent Jeff McCann de la P.P.O. était l'enquêteur principal, et M. Rogers se tenait en liaison avec le sergent McCann.

[8]   Comme les allégations de corruption visaient les activités d'agents de correction à l'intérieur du pénitencier de Kingston, le sergent McCann a pensé qu'il serait préférable de trouver un détenu qui les renseignerait sur les activités des agents de correction soupçonnés de corruption. Un détenu, qui sera désigné du nom d'agent no 2 dans la présente décision, a été recruté par la suite pour exécuter cette tâche. L'agent no 2 a transmis des renseignements à M. Rogers de même qu'au sergent McCann sur ses achats d'objets interdits auprès de certains agents de correction. Pour commencer, l'agent no 2 a dit au sergent McCann qu'il (l'agent no 2) avait acheté de l'alcool de l'agent de correction Dave Perkins et que M. Perkins lui avait ensuite proposé de la cocaïne. Depuis, M. Perkins s'est suicidé.

[9]   M. Rogers a témoigné qu'autour du mois de mai 2000, l'agent no 2 lui a dit que M. Perkins lui avait parlé d'autres agents de correction qui se livraient à un trafic de drogue au pénitencier de Kingston, dont M. Renaud. Cependant, les choses en sont restées là jusqu'au 29 juin 2000.

[10]   Le matin du 29 juin, M. Rogers se préparait à se rendre au travail quand l'agent no 2 lui a téléphoné et lui a dit qu'il avait appris, par M. Perkins, que celui–ci devait rencontrer M. Renaud le matin même. À cette rencontre qui devait avoir lieu au dépanneur situé pas loin du pénitencier, M. Perkins devait acheter de la cocaïne de M. Renaud.

[11]   M. Rogers a quitté la maison immédiatement pour se rendre au pénitencier. À son arrivée au stationnement du pénitencier, il a vu M. Perkins qui marchait en direction de son camion. M. Rogers a décidé de le prendre en filature et l'a donc filé en voiture jusqu'à ce que le camion de M. Perkins pénètre dans le stationnement du dépanneur.

[12]   M. Rogers s'est posté tout près de l'endroit où M. Perkins avait garé sa voiture. Il a observé M. Perkins qui a baissé la vitre de la portière pendant qu'il attendait à l'intérieur de son véhicule. Environ quatre ou cinq minutes plus tard, M. Rogers a vu une personne vêtue d'un uniforme du Service correctionnel s'approcher du véhicule de M. Perkins et s'appuyer sur le rebord de la vitre. M. Rogers a pris trois photos de cette rencontre, dont deux ont été prises pendant qu'il tentait de repositionner son véhicule. Ces deux photos (pièces U–1 et U–3) sont floues, mais sur la troisième (pièce U–2), on voit une personne, le dos à l'appareil photo, debout à côté d'un camion rouge près du dépanneur. M. Rogers a identifié la personne à côté du véhicule de M. Perkins comme étant M. Renaud.

[13]   Au cours de son contre–interrogatoire, M. Rogers a déclaré qu'il n'avait pas vu MM. Renaud et Perkins échanger de la drogue ou de l'argent lors de leur rencontre dans le stationnement du dépanneur.

[14]   À la suite de cet événement, l'agent no 2 a appris à M. Rogers que M. Perkins lui avait dit avoir acheté un gramme de cocaïne de M. Renaud.

[15]   En juillet 2000, l'agent no 2 a appris à M. Rogers qu'il avait entendu dire que l'agent de correction Rick Noble avait acheté de la cocaïne de M. Renaud et était mécontent de la qualité de la cocaïne, soupçonnant M. Renaud d'y avoir ajouté des produits de coupe pour en réduire la qualité.

[16]   L'opération « Project O Correct » a cessé d'être secrète en mars 2001 lorsque des membres du groupe de travail se sont mis à interroger des agents de correction.

[17]   Le 7 mars 2001, deux agents de la G.R.C. ont interrogé M. Noble (pièce U–4, T–17). Au cours de l'entretien, M. Noble a affirmé qu'il avait autrefois un problème d'alcool et de drogue et avait acheté de la cocaïne de M. Perkins ainsi que de M. Renaud.

[18]   Pour ce qui est de l'achat de cocaïne de M. Renaud, M. Noble a dit aux enquêteurs qu'il lui en avait acheté un gramme et avait payé entre 80 $ et 100 $.

[19]   M. Noble a été appelé à témoigner à l'audience. Il a déclaré qu'il avait été embauché comme agent de correction en 1989 et avait suivi peu de temps après un traitement pour sa consommation abusive d'alcool. De 1994 à 1999, M. Noble a participé à un programme de rétablissement; il a déclaré n'avoir presque pas touché à l'alcool et la drogue au cours de cette période. En 2000, cependant, il a cessé de participer aux réunions de son groupe d'entraide, et il a dit qu'il allait alors à la dérive.

[20]   M. Noble a affirmé qu'il a d'abord acheté un gramme de cocaïne de M. Perkins en juin 2000. À ce moment-là, M. Noble a appris que M. Renaud approvisionnait M. Perkins en cocaïne. Au début de juillet 2000, M. Noble a donc communiqué avec M. Renaud et lui a demandé s'il pouvait lui obtenir un gramme de cocaïne. M. Renaud lui a répondu par l'affirmative.

[21]   Plus tard, pendant qu'ils étaient au travail, M. Perkins a dit à M. Noble que la cocaïne qu'il (M. Perkins) avait achetée de M. Renaud était « de qualité ». M. Noble a donc fait les démarches auprès de M. Renaud pour en acheter de lui.

[22]   M. Noble a dit qu'au début de juillet, M. Renaud l'a appelé pour lui dire de venir prendre livraison de la cocaïne. M. Noble s'est rendu à un immeuble résidentiel où il a payé M. Renaud soit 80 $ ou 100 $ pour un gramme de cocaïne. Il y avait une autre personne dans l'appartement au moment de l'achat, et cette personne était un autre agent de correction nommé Dallas Kropelin. M. Noble a témoigné que c'était l'appartement de M. Kropelin.

[23]   Environ une semaine après avoir consommé cette cocaïne, M. Noble a croisé M. Perkins au travail et lui a fait part de son insatisfaction à l'égard de la qualité de la cocaïne. Il a cependant précisé qu'il avait laissé tomber, car il faisait des efforts pour se ressaisir et se reprendre en main. À l'époque, il était sous les soins d'un spécialiste en désintoxication, et il a témoigné qu'il essayait de s'abstenir totalement d'alcool et de drogue (voir les pièces E–2 à E–4).

[24]   M. Noble a affirmé qu'il était nerveux quand la G.R.C. a communiqué avec lui pour l'interroger, mais qu'il a néanmoins décidé de se rendre à l'entrevue et de dire la vérité. Il a déclaré : [traduction] « Je me démenais pour arrêter, et il m'a semblé que c'était une chose que j'avais besoin de faire. »

[25]   Il a dit que la seule erreur qu'il a faite dans son entretien avec la G.R.C. était d'affirmer que l'achat avait eu lieu à l'appartement de M. Renaud. Il s'est rendu compte de son erreur à la lecture de la transcription de l'entretien avant sa propre entrevue disciplinaire, et l'a signalée aux enquêteurs internes.

[26]   M. Noble a affirmé qu'après son entrevue avec la G.R.C., il s'est effondré et a fondu en larmes. Il a dit qu'il n'ignorait pas à ce moment–là que son avenir n'était pas reluisant, car il avait dénoncé un autre agent de correction et que ce n'était pas une chose à faire. Il a ajouté qu'une « loi du silence » régnait au pénitencier de Kingston et qu'il savait donc que ses dénonciations à la G.R.C. ne seraient pas sans répercussions.

[27]   Il a témoigné qu'il a reçu, tard dans la nuit, des coups de téléphone anonymes où la personne à l'autre bout du fil grognait ou, parfois, disait le mot « rat », c'est–à–dire « mouchard ». Il a reçu un appel au travail où la personne à l'autre bout du fil l'a traité de « a rat junkie and a piece of shit », c'est–à–dire « un junkie mouchard et une merde ». De plus, quelqu'un a écrit les mots « rat » et « junkie » à côté de son nom dans le registre au travail.

[28]   M. Noble a dit qu'il a aussi été « mis au placard » par ses collègues au travail; lorsqu'il pénétrait dans une pièce où se trouvaient d'autres agents de correction, personne ne lui adressait la parole.

[29]   M. Noble a déclaré que le 13 septembre 2001, son employeur l'a informé qu'un contrat avait été passé avec un tueur pour le faire assassiner. Cette nouvelle l'a évidemment très bouleversé, et il est en congé depuis le 17 octobre 2001 à cause du stress.

[30]   Au cours d'un long contre–interrogatoire approfondi, la question a été posée à M. Noble, à savoir s'il n'était pas vrai que c'était M. Perkins et non M. Renaud qui lui avait vendu la cocaïne puisque c'est à M. Perkins que M. Noble s'est plaint de la qualité du produit. M. Noble a répondu par la négative et affirmé qu'il s'était plaint à M. Perkins parce que celui–ci était au courant de l'achat.

[31]   M. Noble s'est aussi fait demander s'il n'était pas vrai qu'il n'avait pas été franc lors de son entrevue avec la G.R.C. quand il leur a dit que l'achat avait eu lieu à l'appartement de M. Renaud. M. Noble a répondu qu'il avait corrigé son erreur à son entrevue disciplinaire.

[32]   M. Renaud a dit qu'il n'avait jamais vendu de cocaïne ni à M. Noble, ni à toute autre personne d'ailleurs, car il ne fait pas le trafic de cocaïne. Trois amis d'enfance de M. Renaud ont témoigné qu'au cours de leur longue amitié, ils ne l'ont jamais vu prendre de drogue ni s'intéresser à la drogue de quelque façon que ce soit.

[33]   Chris Monroe, qui est agent de correction à l'établissement de Bath, a témoigné que des allégations avaient été formulées à son endroit, voulant qu'il ait vendu de la cocaïne et des champignons magiques à M. Perkins. Bien qu'il ait été suspendu au départ, il a été réintégré dans ses fonctions puisque, comme le lui a dit M. Bourke, il n'y avait aucune preuve corroborant les allégations étant donné le décès de M. Perkins. Il connaissait aussi M. Renaud et ne l'avait jamais vu se mêler de drogue.

[34]   Dans leurs témoignages, Rob Clark, chef d'unité à l'établissement Pittsburgh, et Keir MacMillan, directeur adjoint de l'établissement de Bath, ont tous les deux parlé de leur participation à la rédaction d'un raP.P.O.rt d'enquête disciplinaire concernant l'agent de correction, Dallas Kropelin (pièce U–4, T–16). Il était allégué que M. Kropelin avait consommé de la marijuana en présence d'un autre agent de correction. Les enquêteurs ont conclu que l'allégation ne pouvait être corroborée à ce moment–là, et on n'y a donc pas donné suite. Au cours de leur contre–interrogatoire, les deux témoins ont affirmé que les faits en l'espèce n'étaient pas les mêmes que dans l'affaire sur laquelle ils avaient enquêté.

[35]   M. Kropelin a comparu pour le compte de M. Renaud. La question lui a été posée, à savoir s'il se souvenait d'une situation en juillet 2000 où lui et M. Renaud étaient à son appartement et où M. Noble a acheté de la drogue de M. Renaud. M. Kropelin a répondu : « non ». L'avocat lui a aussi demandé s'il lui était déjà arrivé d'être témoin d'une vente de drogue entre MM. Noble et Renaud pendant qu'il était à son appartement avec M. Renaud. Le témoin a répondu : « non ». De plus, il connaît très bien M. Renaud et ne l'a jamais vu se mêler à quelqu'affaire de drogue que ce soit.

[36]   Suivant le réinterrogatoire de M. Kropelin par l'avocat, j'ai demandé à M. Kropelin si M. Noble avait déjà, à un moment quelconque, mis les pieds dans son appartement ou dans tout autre logement où il (M. Kropelin) a habité. Il a répondu « non », que M. Noble n'avait jamais mis les pieds chez lui. J'ai demandé à M. Kropelin de décrire son appartement où l'achat de cocaïne est censé avoir eu lieu. Il a dit que c'était un appartement à deux chambres à coucher, avec salle à dîner à droite ouvrant sur la salle de séjour. La cuisine est à droite de la salle à dîner, et la chambre à coucher est directement en face. L'appartement donne sur un terrain de stationnement.

[37]   Immédiatement après le témoignage de M. Kropelin, j'ai demandé que M. Noble soit rappelé dans le seul but de lui demander de décrire l'appartement de M. Kropelin. M. Noble avait été absent de la salle d'audience, sauf pendant son propre témoignage, et n'y était pas quand M. Kropelin a décrit son appartement.

[38]   Après que M. Noble a été rappelé à témoigner, je lui ai dit que dans son témoignage, M. Kropelin avait affirmé que M. Noble n'avait jamais mis les pieds dans son appartement. M. Noble a dit que ce n'était pas vrai. Je lui ai alors demandé de décrire l'appartement. Il a dit que c'était un appartement d'une ou deux chambres à coucher, la salle de séjour et la salle à dîner formant un seul espace avec un court couloir, qu'il était situé au quatrième ou cinquième étage et que, de la fenêtre, on voyait un terrain de stationnement et les bâtiments voisins.

[39]   Enfin, j'ai entendu M. Renaud. Il a commencé à travailler comme agent de correction en 1998 et, en août 2000, il s'est vu infliger une suspension d'un jour (pièce E–12). Il a dit qu'il n'a jamais eu de drogues illégales en sa possession, n'a jamais vendu ni donné de drogues illégales à M. Noble et n'a jamais vendu de drogue à M. Noble à l'appartement de M. Kropelin.

[40]   Quant à sa rencontre avec M. Perkins dans le stationnement du dépanneur, M. Renaud a déclaré qu'il n'avait pas organisé cette rencontre. Il a dit qu'il s'arrêtait au dépanneur presque tous les jours où il se rendait au travail et qu'il y croisait beaucoup d'autres agents de correction. Quand on lui a montré les photos présumées être des photos de sa rencontre avec M. Perkins dans le stationnement du dépanneur, M. Renaud a dit qu'il lui était impossible d'affirmer que c'était bien lui dans les photos.

[41]   M. Renaud a été interrogé au sujet de son entrevue avec la G.R.C. dans le cadre de l'opération « Project O Correct » (pièce U–4, T-15). Au cours de cet entretien, les enquêteurs de la G.R.C. ont demandé à M. Renaud s'il acceptait de se soumettre à un test polygraphique, et celui–ci a répondu : [traduction] « Je veux bien passer un test polygraphique quand vos (sic) le voudront » (page 16). M. Renaud n'a pas été soumis à un test polygraphique.

[42]   Interrogé sur les raisons pour lesquelles M. Noble inventerait les allégations qui pèsent contre lui, M. Renaud a répondu qu'en toute franchise, il ne le savait pas.

[43]   Au cours de son contre–interrogatoire, M. Renaud a été prié de décrire l'appartement de M. Kropelin. Il a dit que de l'entrée, un couloir s'étendait à gauche, que l'appartement était à un étage supérieur et que de la fenêtre, on voyait un terrain de stationnement et un lotissement voisin. Le coin salle à dîner était meublé d'une table pour manger et constituait une pièce distincte de la salle de séjour.

[44]   L'entrevue de M. Renaud avec la G.R.C. a eu lieu le 9 mars 2000. Le 4 avril, pendant qu'il était au travail, M. Renaud a été convoqué au bureau du directeur du pénitencier. Au cours de cet entretien, M. Bourke a appris à M. Renaud qu'il était suspendu de ses fonctions en attendant l'issue d'une enquête sur des allégations de trafic de stupéfiants. M. Renaud a répondu que c'était impossible, car il n'avait jamais fait cela. M. Renaud a tout de même été conduit à la sortie du pénitencier sous escorte.

[45]   À l'issue de l'enquête, M. Renaud a reçu la lettre lui signifiant son licenciement (pièce U–4, T–12).

Plaidoiries

Pour l'employeur

[46]   Cette affaire porte sur le licenciement d'un fonctionnaire qui compte deux ans et demi de service et qui a un dossier disciplinaire. Le fardeau de la preuve incombe à l'employeur, et pour s'en acquitter, il doit présenter une preuve qui est à la fois convaincante et claire. Il y a deux questions auxquelles il faut répondre, à savoir :

  1. Est–ce que le fonctionnaire s'estimant lésé a vendu de la drogue selon toute probabilité?
  2. Dans l'affirmative, est–il justifié de le licencier?

[47]   Pour ce qui est de la première question, soit M. Noble ment ou M. Renaud ment; la question de leur crédibilité se pose donc.

[48]   Pour ce qui est de la rencontre au dépanneur, l'agent no 2 a téléphoné à M. Rogers et lui a dit qu'une rencontre aurait lieu le matin même au dépanneur du voisinage en vue d'un trafic de drogue. L'agent no 2 a dit que c'était MM. Perkins et Renaud qui devaient se rencontrer. M. Rogers a quitté son domicile immédiatement pour se rendre au pénitencier de Kingston où il a observé M. Perkins quittant l'établissement, et il l'a filé en voiture. M. Perkins s'est rendu au dépanneur où il s'est garé et a attendu à l'intérieur de son véhicule. Environ quatre ou cinq minutes plus tard, M. Renaud est arrivé sur les lieux, s'est approché du véhicule de M. Perkins et s'est appuyé sur le rebord de la vitre. Un peu plus tard, l'agent no 2 a dit que la vente de drogue avait eu lieu dans le stationnement du dépanneur. Selon toute probabilité, il s'agissait bien d'un trafic de drogue.

[49]   Cependant, l'issue de la présente affaire repose sur la déclaration de M. Noble. Il n'avait absolument aucun motif pour mentir; en fait, c'est bien le contraire. Après avoir été interrogé par la G.R.C. et avoir dit la vérité au sujet du trafic de drogue, il savait quelles en seraient les conséquences. C'est pourquoi il s'est effondré et a fondu en larmes. Il savait que c'était une entrevue policière et n'avait pas l'intention de se parjurer.

[50]   M. Noble n'avait aucune raison de mentir pendant son entrevue avec la G.R.C. Il aurait été plus facile pour M. Noble de simplement dénoncer M. Perkins, puisque celui–ci était mort. Il n'est donc pas plausible de soutenir que M. Noble aurait inventé une histoire d'achat de cocaïne de M. Renaud.

[51]   M. Noble savait que s'il disait la vérité, les conséquences seraient lourdes, et il ne se trompait pas. Il souffre du syndrome de stress post–traumatique. Un contrat a été passé avec un tueur pour le faire assassiner et, au travail, les autres agents de correction l'ont mis « au placard ». Bref, il n'avait aucun motif pour mentir.

[52]   Le fait que M. Noble a été témoin de la vente même de drogue ajoute à sa crédibilité. Il a décrit la transaction et il a aussi décrit l'endroit où la transaction a eu lieu en détail. Les descriptions que le fonctionnaire s'estimant lésé et M. Noble ont faites de l'appartement se recoupent; ils ont dit tous les deux que, de la fenêtre, on voyait un terrain de stationnement et les bâtiments voisins.

[53]   Quand M. Noble a témoigné, ses souvenirs étaient encore tout récents, et son témoignage concorde avec tous les éléments de preuve connexes. À l'observer témoigner, il était clair que M. Noble était un témoin très crédible.

[54]   Étant donné le peu d'années de service que compte M. Renaud, son dossier disciplinaire et le fait qu'il persiste à mentir au sujet de cet incident, le lien de confiance employeur-employé ne peut être rétabli.

[55]   L'avocat de l'employeur invoque les décisions suivantes : Flewelling (dossier de la Commission 166–2–14236), Cunningham (dossier de la Commission 166–2–18834) et Re Colchester East Hants District School Board and Canadian Union of Public Employees, Local 1047 (1993), 34 L.A.C. (4th) 72.

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

[56]   Le fardeau de la preuve dans cette affaire devrait consister à présenter une preuve claire, forte et convaincante d'une faute de conduite. Cette preuve n'a pas été établie.

[57]   Pour ce qui est de l'incident du stationnement du dépanneur, M. Perkins est mort et ne peut être soumis à un contre-interrogatoire. L'agent no 2 a plaidé coupable à trois accusations de meurtre et a négocié un allégement de sa sentence; il est donc évident qu'il est corrompu et peu fiable. De plus, on n'a trouvé ni drogue ni argent de la drogue sur M. Renaud.

[58]   Pour ce qui est du présumé achat de drogue, il a été établi que M. Noble était un alcoolique aussi bien qu'un toxicomane qui se livrait à des activités criminelles en toute connaissance de cause. Son motif était simple : sauver sa peau.

[59]   M. Noble dit qu'il y a eu trafic de drogue. Or, si l'on examine son histoire, il est évident qu'elle a changé. Il a dit à la G.R.C. que la vente avait eu lieu à l'appartement de M. Renaud, mais il affirme maintenant que c'était l'appartement de M. Kropelin. De plus, il nous dit maintenant que M. Kropelin était témoin de la transaction; or, il ne l'a pas mentionné dans son entrevue avec la G.R.C.

[60]   M. Noble ne pouvait pas décrire l'appartement. Il suffit de passer devant l'immeuble en voiture n'importe quand pour savoir que de l'appartement, on voit le terrain de stationnement. Il ne savait pas combien de chambres à coucher compte l'appartement, et il s'est trompé sur son aménagement en espace ouvert.

[61]   Il n'y a aucune preuve que M. Renaud consomme de la drogue. Personne ne l'a vu en prendre, et l'on n'a jamais trouvé l'attirail du drogué en sa possession.

[62]   L'enquête disciplinaire visant M. Renaud a reposé sur des éléments de preuve qu'un autre comité de discipline a rejetés d'emblée dans son enquête sur la conduite de M. Kropelin. L'enquête doit être juste et objective, ce qui n'a pas été le cas.

[63]   On nous a dit que les agents de correction doivent donner l'exemple. Dans le cas de M. Noble, le directeur du pénitencier de Kingston a dit qu'aucune drogue n'avait été introduite dans l'établissement; par conséquent, M. Noble est digne de confiance et n'a pas été congédié. Cependant, dans exactement les mêmes circonstances, le directeur dit que M. Renaud n'est pas digne de confiance et devrait être congédié.

[64]   M. Noble a dit qu'il avait acheté de la drogue et s'était plaint ensuite à M. Perkins. Pourquoi se plaindre à M. Perkins? La réponse est simple : on se plaint d'un produit à la personne qui nous l'a vendu. M. Noble a acheté sa drogue de M. Perkins, et non de M. Renaud.

[65]   Pourquoi M. Noble mentirait–il? Il s'est rendu à son entrevue avec la G.R.C. en pensant que s'ils le tenaient, il allait conclure une entente avec eux. Sa seule porte de sortie était de devenir un informateur, mais il n'a pas dit la vérité.

[66]   Le témoignage de M. Renaud était direct. Il a répondu sans détour aux questions qui lui ont été posées à cette audience et a nié tout démêlé avec la drogue. Il s'est comporté de la même façon à son entrevue avec la G.R.C. Il a même offert de se soumettre à un test polygraphique. Les allégations qui pèsent contre lui ne sont tout simplement pas fondées.

[67]   L'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé invoque les décisions suivantes : R. c.. Chenier, [2001] O.J. no 4708; R. c. B. (K.G.) [K.G.B.], [1993] 1 R.C.S. 740; R. c. Smith, [1992] 2 R.C.S. 915; Tsatsakis c. Procureur général du Canada (1998), 152 F.T.R. 146; Gale, 2001 CRTFP 85 (166-2-30347) et Larson 2002 CRTFP 9 (166-2-30267 à 30269).

Réplique

[68]   Il existe en l'espèce une preuve solide, soit une personne qui a acheté et consommé de la drogue. Il n'est pas nécessaire de trouver de la drogue, ni l'argent de la drogue, pour démontrer que la transaction a eu lieu.

[69]   Toute injustice commise sur le plan de la procédure, si injustice il y a eu, a été réparée par l'audition de novo qui a eu lieu devant l'arbitre, comme le précise la décision rendue dans l'affaire Tipple c. Canada (Conseil du Trésor), [1985] A.C.F. no 818 :

[...]

En supposant qu'il y ait eu injustice sur le plan de la procédure lorsque les supérieurs du requérant ont recueilli les déclarations de ce dernier (hypothèse dont nous doutons beaucoup), cette injustice a été entièrement réparée par l'audition de novo qui a eu lieu devant l'arbitre, où le requérant a été pleinement informé des allégations qui pesaient contre lui et où il a eu pleinement l'occasion d'y répondre. De façon plus particulière, l'arbitre n'a pas erré en droit en accordant la valeur probante qu'il considérait appropriée aux déclarations qu'il a, à bon droit selon nous, jugées recevables en preuve.

[...]

Motifs de la décision

[70]   Cette affaire en est une de licenciement où, après en avoir pelé toutes les couches comme un oignon, il reste une question fondamentale à trancher. En l'espèce, dois–je croire M. Noble ou M. Renaud? C'est, à mon avis, la vraie question qui se pose.

[71]   Pour ce qui est de l'injustice de la part de l'employeur sur le plan de la procédure, si une telle injustice a en fait été commise, elle a été réparée par l'audition de novo qui a eu lieu devant moi (voir Tipple (supra)) comme l'a indiqué l'avocat de l'employeur.

[72]   À mon avis, la rencontre dans le stationnement du dépanneur ne comporte pas une preuve convaincante qui me permette de conclure qu'un trafic de drogue a eu lieu. Personne n'a vu les deux hommes échanger de l'argent ni de la drogue, et sur la foi de ce que j'ai entendu, je ne puis en conclure qu'il y a, dans cet incident, motif à prendre des mesures disciplinaires à l'encontre du fonctionnaire.

[73]   Cela laisse donc l'allégation d'avoir vendu de la drogue, à savoir de la cocaïne, à M. Noble. Pour trancher les questions liées à la crédibilité des témoins, les arbitres se reportent souvent à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire Faryna v. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354. À la page 357 de sa décision, le juge O'Halloran a écrit ce qui suit :

[Traduction]

[...]

En bref, ce qui permet de vérifier réellement si le témoin dit la vérité en pareil cas, c'est la compatibilité de sa version avec la prépondérance des probabilités que reconnaîtrait d'emblée une personne pratique et informée qui se trouverait dans ce lieu et dans ces conditions.

[...]

[74]   Dans l'analyse des faits en l'espèce, je crois qu'il me faut être convaincu, sur la base d'éléments de preuve clairs, forts et convaincants, que l'incident allégué a bien eu lieu avant de pouvoir conclure que l'employeur s'est acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombe.

[75]   Comme point de départ, je vais chercher à établir qui a des raisons de mentir. M. Renaud a certainement des raisons de mentir, car il ne veut pas que je juge qu'il s'est livré à un trafic de drogue. Toutefois, ce n'est pas du tout concluant. Il se peut tout aussi bien qu'il dise la vérité. Il se peut que M. Noble mente pour sauver sa peau, comme l'a soutenu l'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé, mais si c'est le cas, il lui en a coûté très cher sur le plan personnel. À mon avis, M. Noble savait bien qu'en dénonçant un collègue, il s'attirait, sous une forme quelconque, la vengeance d'autres agents de correction. Je suis absolument convaincu qu'il existait une loi du silence parmi les agents de correction au moment où cet incident s'est produit. M. Noble était nécessairement conscient des conséquences de dénoncer un collègue, et il a fondu en larmes après son entrevue avec la police. Je n'ai aucune raison d'en douter.

[76]   Un contrat a été passé avec un tueur pour faire assassiner M. Noble. Il souffre du syndrome de stress post–traumatique. Au travail, il a été mis « au placard », des insultes ont été inscrites au registre à côté de son nom et il a reçu des appels téléphoniques que l'on pourrait qualifier au mieux de troublants. Malgré cela, son témoignage n'a pas changé. Il a dit qu'il avait acheté de la cocaïne de M. Renaud.

[77]   L'ami de M. Renaud, M. Kropelin, dont l'appartement fut le lieu de la vente alléguée de drogue, a témoigné que M. Noble n'avait jamais, en aucun temps, mis les pieds chez lui, ni à l'appartement en question ni dans tout autre logement qu'il a occupé. M. Kropelin a ensuite décrit son appartement pendant que M. Noble était absent de la salle d'audience. M. Renaud a, lui aussi, été prié de décrire l'appartement, ce qu'il a fait.

[78]   M. Noble a été rappelé à témoigner dans le seul but de décrire l'appartement dans lequel la vente alléguée de drogue a eu lieu. Dès le premier témoignage de M. Noble, j'ai remarqué qu'il semblait être un homme extrêmement fragile sur le plan émotionnel. C'est compréhensible, à mon avis, puisqu'il sait qu'un contrat a été passé avec un tueur pour le faire assassiner et qu'il souffre du syndrome de stress post–traumatique. Malgré cela, il est revenu témoigner au sujet de l'appartement.

[79]   La première chose qui m'a frappé chez M. Noble quand il a été prié de décrire l'appartement où la vente alléguée de drogue a eu lieu, c'est qu'il s'est tout de suite mis à le décrire sans hésitation. J'aurais pensé que, s'il mentait, il n'aurait pas pu décrire l'endroit aussi aisément et n'aurait pas été si disposé à le faire. Sans hésiter, il a dit que c'était un appartement à une ou deux chambres à coucher; M. Kropelin a dit que c'était un appartement à deux chambres à coucher. Est–ce le hasard? Peut–être bien, mais M. Noble savait que l'appartement contenait une chambre à coucher. M. Noble a dit qu'il y avait un court couloir; M. Renaud a dit que de l'entrée, un couloir s'étendait à gauche. Est–ce encore le hasard? Peut–être bien, mais M. Noble a ensuite dit que l'appartement était situé au quatrième ou cinquième étage et que, de la fenêtre, on voyait un terrain de stationnement et les bâtiments voisins; M. Renaud a dit que l'appartement était à un étage supérieur et que de la fenêtre, on voyait un terrain de stationnement et un lotissement voisin.

[80]   L'avocat du fonctionnaire s'estimant lésé soutient qu'il suffit de passer devant l'immeuble en voiture n'importe quand pour savoir que de l'appartement, on peut voir un terrain de stationnement. Pourquoi M. Noble passerait–il devant l'immeuble en voiture s'il ne savait pas qu'on lui demanderait de décrire l'appartement? Je crois que M. Noble a décrit l'appartement adéquatement et, comme je l'ai précisé précédemment, il l'a fait sans la moindre hésitation de la barre des témoins. Je crois qu'il était dans l'appartement.

[81]   Cette conclusion signifie que je ne crois pas ce qu'a dit M. Kropelin ni ce qu'a dit M. Renaud sur ce sujet. Pourquoi deux agents de correction mentiraient–ils sur la présence d'une autre personne dans l'appartement? Force m'est d'en conclure qu'ils cherchent à cacher un événement qui s'est produit dans l'appartement.

[82]   M. Noble a avoué avoir acheté de la drogue, c'est–à–dire de la cocaïne, pendant qu'il était dans l'appartement. Il a dit qu'il avait acheté cette cocaïne de M. Renaud. Me fondant sur tous les éléments de preuve que j'ai entendus et sur mon observation des témoins, j'en conclus que M. Noble dit la vérité. Là où l'histoire de M. Noble ne concorde pas avec celles d'autres témoins, je préfère la version présentée par M. Noble.

[83]   Ayant établi que M. Renaud a vendu de la cocaïne à M. Noble, je dois décider s'il y avait lieu de le licencier. Je crois que le trafic de drogue par un agent de correction est une faute de conduite très grave et que le licenciement de l'employé fautif est une mesure disciplinaire appropriée pour sanctionner un tel acte d'inconduite en l'absence de circonstances atténuantes péremptoires.

[84]   Le fonctionnaire s'estimant lésé compte deux ans et demi de service, avec une suspension d'un jour à son dossier. Il n'a pas cessé de nier avoir vendu de la cocaïne, alors que j'ai conclu que la preuve établissait le contraire. L'employeur a affirmé que M. Renaud avait enfreint le Code de discipline (pièce E–8, page 6) et les Normes de conduite professionnelle (pièce E–7). Je suis d'accord. Je crois que le lien de confiance entre le fonctionnaire s'estimant lésé et son employeur a effectivement été rompu dans cette situation. Je ne vois aucune raison de modifier la sanction, et en fait aucune raison valable de la modifier n'a été invoquée à l'audience.

[85]   Par conséquent, pour tous ces motifs, les griefs sont rejetés.

Joseph W. Potter,
vice-président

OTTAWA, le 16 avril 2002.

Traduction de la C.R.T.F.P.

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