Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé alléguait que l’employeur avait contrevenu à la convention collective en lui refusant un congé de rendement - la convention collective prévoit que les employés qui occupent un poste de direction et qui satisfont aux critères énoncés dans les lignes directrices en matière de rendement sont admissibles à un congé de rendement - le fonctionnaire s’estimant lésé ne satisfaisait pas à ces critères - l’employeur a fait valoir que la Commission n’avait pas compétence pour se pencher sur l’appréciation du rendement du fonctionnaire s’estimant lésé - ce dernier prétendait qu’il avait été traité de manière discriminatoire - il estimait que l’omission de l’employeur d’appliquer la procédure d’appréciation du rendement établie équivalait à de la mauvaise foi et que l’arbitre de grief avait compétence pour examiner cette question - l’arbitre de grief a conclu qu’il avait compétence pour se pencher sur l’appréciation du rendement du fonctionnaire à la seule fin de déterminer si les lignes directrices en matière de rendement avaient été appliquées de bonne foi - l’arbitre de grief a conclu que l’appréciation du rendement du fonctionnaire avait été menée à bien de bonne foi - dans ce cas-ci, l’omission de respecter le délai prévu pour l’application de la procédure ne constituait pas de la mauvaise foi. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2005-12-20
  • Dossier:  166-34-35391
  • Référence:  2005 CRTFP 177

Devant un arbitre de grief



ENTRE

STANLEY BAHNIUK

fonctionnaire s’estimant lésé

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Bahniuk c. Agence du revenu du Canada

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant :  Ian R. Mackenzie, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé : Debra Seaboyer, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur : Harvey Newman, avocat


Affaire entendue à Calgary (Alberta),
les 26 et 27 juillet 2005.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Grief renvoyé à l'arbitrage

[1]   Stanley Bahniuk a déposé un grief dans lequel il allègue que l’on a contrevenu à la disposition portant sur le congé de rendement de la convention collective conclue entre l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) et l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) à l’égard du groupe Exécution des programmes et des services administratifs (date d’expiration : 31 octobre 2003 (pièce G-1)).   Plus particulièrement, il soutient qu’il a fait l’objet d’un traitement discriminatoire en ce qui a trait à l’application de la disposition du congé de rendement de sa convention collective (paragraphe 54.03).

[2]   M. Bahniuk a reçu son évaluation de rendement le 10 septembre 2002.   Il a déposé un grief le 20 septembre 2002 et a reçu une réponse au dernier palier le 22 octobre 2004.   Le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 26 novembre 2004.   À la demande du fonctionnaire s’estimant lésé, le grief a été mis en suspens jusqu’en avril 2005, après quoi il a été mis au rôle des audiences.

[3]   Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur.   En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ce renvoi à l'arbitrage de grief doit être décidé conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (l'« ancienne Loi »).   De plus, il convient de noter que, depuis le 12 décembre 2005, l’ADRC est devenue l’Agence du revenu du Canada (ARC).

[4]   Au début de l’audience, l’avocat de l’employeur a présenté des observations sur la portée de la preuve à l’égard du grief.   J’ai rendu une décision sur la portée de la preuve après avoir entendu les observations des parties.   Leurs observations, et ma décision, sont exposées ci-dessous.   J’ai d’abord reproduit la disposition de la convention collective en question ainsi que les allégations et la mesure corrective demandée dans le grief.

[5]   La convention collective prévoit ce qui suit :

[…]

ARTICLE 54

CONGÉS PAYÉS OU NON PAYÉS POUR D’AUTRES MOTIFS

[…]

54.03 Congé de rendement de gestion

a)
Sous réserve des critères établis dans les Lignes directrices de l’ADRC sur la gestion du rendement pour les membres du groupe Management/Gestion (MG) de l’Employeur, les employé-e-s qui effectuent les tâches MG au cours de la période annuelle d’évaluation, seront éligibles à recevoir jusqu’à dix (10) jours de congé de rendement de gestion pour leur gestion des personnes selon leur évaluation de rendement annuelle.

[…]

[6]   Dans son évaluation de rendement, M. Bahniuk a reçu la cote « ne satisfait pas aux critères » à l’égard de l’un des éléments de l’évaluation.   Par conséquent, il n’a pas satisfait aux critères d’admissibilité au congé de rendement (« Lignes directrices sur la rémunération au rendement et le congé de rendement », pièce E/G-1).

[7]   Dans son grief, M. Bahniuk a allégué ce qui suit :

[Traduction]

Le rapport de gestion de l’employé qui m’a été présenté pour la période du 1er avril 2001 au 31 mars 2002 n’est appuyé par aucun document et ne représente pas entièrement mon rendement.   Les commentaires négatifs sont fondés sur les actes discriminatoires continus de M. Peech.   En raison de ses actes discriminatoires et de son incompétence, je n’ai pas été entièrement rémunéré conformément au paragraphe 54.03 de la convention cadre.

[8]   Comme mesure corrective, il a demandé ce qui suit :

[Traduction]

Que M. Peech soit tenu responsable de ses actes.   Je demande que mon rapport de gestion soit rempli en prenant en considération les Lignes directrices sur le rendement de l’ADRC.   Que je sois rémunéré convenablement aux termes du paragraphe 54.03 de la convention cadre.

Observations sur la portée de la preuve

Pour l’employeur

[9]   M. Newman a fait valoir que, selon son interprétation du grief, le fonctionnaire s’estimant lésé demande qu’un arbitre de grief revoit son évaluation de rendement.   M. Newman a ajouté qu’un arbitre de grief n’a pas compétence pour réviser les évaluations de rendement.   Il m’a renvoyé à la discussion portant sur ce principe dans la décision Bratrud c. Bureau du surintendant des institutions financières, 2004 CRTFP 10.   Le grief ne contenait aucune allégation de mesure disciplinaire et il ne serait pas indiqué de soulever ce point à l’arbitrage (Burchill c. Procureur général du Canada [1981] 1 C.F. 109).

[10]   Il a soutenu que l’admissibilité au congé de rendement est fondée sur le respect des « Lignes directrices sur la rémunération au rendement et le congé de rendement » (pièce E/G-1) de l’ADRC.   Si le fonctionnaire s’estimant lésé peut démontrer qu’il a satisfait aux exigences énoncées dans les lignes directrices et qu’on l’a jugé inadmissible, l’arbitre de grief a compétence.   M. Newman a affirmé que, mis à part cette portée limitée, je n’ai pas compétence.   Toute autre conclusion équivaudrait à réviser l’évaluation de rendement et à substituer mon avis à celui de la gestion.

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

[11]   Mme Seaboyer a fait valoir qu’un arbitre de grief peut examiner le processus utilisé dans le cadre d’une évaluation de rendement et que le défaut de suivre le processus peut être assimilé à de la mauvaise foi.   Elle a ajouté que le processus d’évaluation doit être transparent et respecter les lignes directrices.   Elle a aussi souligné qu’un arbitre de grief a compétence pour déterminer la bonne foi de l’employeur.   Le présent grief invoque un traitement discriminatoire, ce qui est une indication de mauvaise foi.

Réponse

[12]   M. Newman a soutenu que le grief ne porte pas sur la mauvaise foi.   Il a ajouté que les irrégularités techniques observées dans le processus d’examen sont sans conséquence.

Décision sur la portée de la preuve

[13]   La jurisprudence de la Commission est claire : un arbitre de grief n’a pas compétence pour réviser une évaluation de rendement (voir Ahad c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), dossiers de la CRTFP 166-2-15840, 16038 et 16233 (1986) (QL)).   La jurisprudence traite principalement d’allégations de mesures disciplinaires, qui ne sont pas en cause en l’espèce.   Néanmoins, les principes demeurent les mêmes.   Je conclus donc que je n’ai pas compétence pour réviser l’évaluation de rendement du fonctionnaire s’estimant lésé, sauf dans la mesure décrite ci-dessous.

[14]   Le paragraphe 54.03 établit l’« admissibilité » à un congé à partir d'une évaluation du rendement.   À mon avis, la portée de la preuve peut englober l’examen à savoir si les [traduction] « conditions établies dans les […] lignes directrices » ont été satisfaites, comme l’a maintenu M. Newman, et si ces lignes directrices ont été appliquées de bonne foi.   Il s’agit là d’une portée très limitée; le fonctionnaire s’estimant lésé doit démontrer, pour l’essentiel, que la cote « ne satisfait pas aux critères » qu’il a obtenue dans son évaluation de rendement n’était pas justifiée.

[15]   Le grief ne fait pas référence à la « mauvaise foi ».   Toutefois, il fait allusion à des « mesures discriminatoires » et à la « discrimination ».   À mon avis, ces éléments suffisent à appuyer une allégation de mauvaise foi.

Preuve

[16]   M. Bahniuk est chef d’équipe, Recouvrement des recettes, aux groupe et niveau MG-3 à la Direction de recouvrement des recettes du Bureau des services fiscaux de Calgary.

[17]   Les conditions établies par l’employeur pour l’admissibilité au congé de rendement sont énoncées dans les « Lignes directrices sur la rémunération au rendement et le congé de rendement » (pièce E/G-1) :

[Traduction]

Admissibilité à la rémunération au rendement ou au congé de rendement

[...]

Pour être admissible à la rémunération au rendement ou au congé de rendement, le gestionnaire doit remplir les conditions suivantes.

a)
Le gestionnaire doit avoir exécuté les fonctions d’un poste MG, ou encore d’un poste PE équivalent, à titre de poste d’attache, intérimaire ou pour une période déterminée.
b)
Le gestionnaire doit avoir exécuté les fonctions du poste MG pendant au moins six mois consécutifs au cours de la période d’examen du rendement.
c)
Le gestionnaire doit avoir reçu dans son évaluation de rendement une cote « satisfait aux exigences » ou « dépasse les exigences » concernant ses responsabilités principales.
d)
Le gestionnaire doit avoir reçu dans son évaluation de rendement une cote « satisfait aux exigences » ou « dépasse les exigences » concernant ses engagements permanents.
e)
Les gestionnaires occupant des postes représentés doivent être régis par une convention collective contenant une clause qui traite de la rémunération au rendement ou du congé de rendement.

[…]

[18]   Si un ou une fonctionnaire obtient une cote « dépasse les exigences », il ou elle a droit à 10 jours de congé.   Avec une cote « satisfait aux exigences », le ou la fonctionnaire a droit à six jours de congé.

[19]   M. Bahniuk a reçu son évaluation de rendement (« Rapport de gestion du rendement de l’employé ») le 10 septembre 2002 (pièce E/G-3).   Son évaluation de rendement a été rédigée par son superviseur, D.R. Peech.   M. Bahniuk a satisfait à toutes les exigences donnant droit au congé de rendement sauf en ce qui concerne l’exigence d’obtention d’une cote « satisfait aux exigences » ou « dépasse les exigences » dans son évaluation du rendement continu.   Il a obtenu la cote « ne satisfait pas aux exigences » dans la partie sur l’évaluation du rendement continu (« engagement continu des gestionnaires ») de son évaluation (pièce E/G-3).   La cote « ne satisfait pas aux exigences » est définie comme suit :

[Traduction]

N’a pas satisfait à une ou à plusieurs des attentes relatives au rendement; amélioration nécessaire; besoin d’une attention spéciale.

[20]   À l’appui de l’évaluation globale de l’engagement continu, M. Peech a noté ce qui suit (pièce E/G-3) :

[Traduction]

[…]

Un élément qui constitue une préoccupation est la façon dont Stan communique avec la haute direction et à certains moments avec ses pairs.   Stan devrait accorder à son superviseur l’occasion de répondre à ses préoccupations avant de les porter à un niveau supérieur.   Le renvoi des préoccupations à un niveau supérieur devrait se faire sur la tribune et de la façon appropriées.   À certains moments, les échanges sont accusateurs et manquent de professionnalisme, de respect et de sensibilité.   Ce type de comportement peut avoir une incidence sur le moral et miner l’autorité de la gestion.   Nous nous engageons à travailler avec Stan sur ce plan.

L’esprit au sein de l’équipe de Stan en est un de collaboration, de respect et de professionnalisme.   Stan traite ses subalternes avec respect, intégrité et professionnalisme, ce qui favorise la collaboration.   Il aborde les valeurs de base dans les réunions et les conversations.   Les valeurs de base ne sont pas toujours appliquées lorsqu’il traite avec ses pairs et avec la haute direction.   Nous continuerons à travailler avec Stan dans le but d’assurer la cohérence entre le comportement individuel au travail et les valeurs de l’organisation.

Stan gère les conflits au sein de son équipe.   Il écoute les points de vue divergents, en tenant compte des besoins de chacun et en cherchant des solutions.   De cette manière, il favorise les négociations axées sur les intérêts.   Cependant, Stan n’adopte pas la même attitude lorsqu’il exprime son insatisfaction à la haute direction.   Bien que dans son droit, Stan adopte souvent une approche axée sur les droits et non une approche axée sur les intérêts, l’orientation adoptée et encouragée par l’ADRC.

[…]

Stan, vous êtes un chef d’équipe de grande expérience et possédez énormément de connaissances techniques.   Vous gérez très bien les tâches au sein de votre équipe.   Dans vos rapports avec la haute direction, vous n’affichez pas un comportement modèle que vos employés pourraient imiter.   Le BSF de Calgary s’efforce de gérer ses activités suivant les valeurs de base, les normes de déontologie et de conduite et la charte du gestionnaire de l’Agence.   Nous nous engageons à travailler avec vous afin de démontrer notre intégrité et notre professionnalisme dans le but de vous aider à obtenir le respect et la collaboration de la gestion du BSF.

[21]   Le 15 octobre 2001, tous les chefs d’équipe de la direction ont reçu, dans un courriel de M. Peech, l’ébauche d’une entente de rendement décrivant les attentes relatives au rendement (pièce G-2).   Dans son courriel, M. Peech expliquait que chaque chef d’équipe aurait à signer une entente et demandait à chaque chef d’équipe d’examiner le document.   Lors d’une réunion de chefs d’équipe, tenue le 23 octobre 2001, M. Peech a annoncé qu’il rencontrerait chaque chef d’équipe afin de discuter de son plan d’apprentissage individuel et son entente de rendement (pièce G-3).   M. Bahniuk a déclaré que M. Peech n’a jamais communiqué avec lui pour discuter de son plan d’apprentissage ou son entente de rendement.   M. Peech a expliqué que tous les autres chefs d’équipe avaient communiqué avec lui afin de discuter de leur entente de rendement.   M. Bahniuk a témoigné que l’ébauche d’entente de rendement était un document générique.

[22]   Le 20 décembre 2001, M. Peech a rencontré M. Bahniuk à la suite de deux incidents mettant en cause une collègue de M. Bahniuk, Launa McCann.   La veille, M. Bahniuk avait eu une conversation avec Mme McCann au sujet d’un dossier qui avait été enlevé à son équipe avant que l’affaire ne soit d’abord discutée avec lui.   Le lendemain (le 20 décembre), il a abordé avec elle l’affectation de nouveaux employés.   À la fin de la conversation, elle pleurait.   M. Bahniuk a expliqué qu’elle pleurait parce qu’elle était enceinte et [traduction] « affectée par les hormones ».   M. Bahniuk s’est immédiatement rendu au bureau de M. Peech; lorsqu’il y est arrivé, M. Peech était au téléphone avec Mme McCann.   M. Peech a déclaré avoir parlé à M. Bahniuk après avoir terminé son appel.   Il a suggéré à M. Bahniuk de revenir plus tard pour discuter de l’affaire après s’être calmé.   Toutefois, M. Bahniuk voulait parler d’un certain nombre de questions.   Celui-ci lui a demandé pourquoi il n’était pas nommé à des affectations intérimaires pendant l’absence de M. Peech.   Il a aussi demandé de recevoir les commentaires de M. Peech par écrit.

[23]   Comme M. Bahniuk n’avait pas reçu les commentaires écrits de M. Peech, il a déposé un grief daté du 14 janvier 2002 (pièce E-G-4) dans lequel il allègue ce qui suit :

[Traduction]

Aucune attente relative au rendement, aucun plan d’apprentissage ou commentaire ne m’a été fourni depuis que Don Peech est devenu mon gestionnaire.   Il ne m’a jamais permis d’agir en son nom.   Lorsque j’ai abordé la question le 20 décembre 2001, il a répondu : « Vous n’agirez jamais en mon nom ».   À ce moment, je lui ai demandé de le mettre par écrit.   Jusqu’à ce jour, je n’ai rien reçu.   Don a délibérément fait preuve de discrimination à mon égard.

[24]   À titre de mesure corrective, il a demandé ce qui suit :

[Traduction]

Je demande d’avoir l’occasion, comme d’autres chefs d’équipe, d’agir au nom de mon superviseur, de contribuer et d’exécuter mes fonctions.   Je demande également une orientation adéquate et pertinente.   De plus, je demande que des mesures disciplinaires soient prises contre Don Peech, notamment une suspension sans traitement.

[25]   Le 18 janvier 2002, M. Peech a envoyé une note à M. Bahniuk en réponse à la rencontre du 20 décembre 2001 (pièce G-4) dans laquelle il précisait ce qui suit :

[Traduction]

[ …] La conversation du 20 décembre portait sur des questions concernant le manque de professionnalisme, le travail d’équipe et la collaboration.   Il y a eu des débordements visant à dénoncer la gestion plutôt qu’à fournir une critique constructive.   Un tel incident est survenu encore à la dernière réunion de la direction, le 27 septembre 2001.   Cette conduite engendre une atmosphère négative et peut avoir de profondes conséquences sur le moral et la perception positive qu’ont les employés de la gestion.

Certains de vos pairs ont indiqué qu’ils sont réticents à travailler avec vous sur des projets.   D’autres gestionnaires ont signalé qu’à certains moments vous avez été contreproductif puisqu’il semble que vous ne recherchez pas le but commun dans les réunions de comités, c.-à-d. le Comité de formation.   Plus récemment, votre conduite lors de la confrontation d’une autre chef d’équipe a été accusatrice et certainement non professionnelle ou sensible envers cette personne.

Le Code de déontologie et de conduite de l’ADRC est très précis.   Il précise que « la conduite comprend également le fait de réfléchir à l’incidence possible de vos actes et de vos décisions sur toutes les parties intéressées quant à ce qui est bon ou mauvais ou juste ».   Le travail d’équipe et la collaboration nécessitent la capacité d’établir des relations positives et de travailler en collaboration au sein d’un partenariat avec les membres de l’équipe, les chefs d’équipe et la gestion.   Il est nécessaire de travailler en équipe plutôt qu’en concurrence ou dans une direction opposée.   Ces éléments ont été couverts dans les attentes provisoires qui vous ont été fournies le 15 octobre 2001 et auxquelles vous n’avez pas répondu.

Des améliorations ont été constatées dans ces domaines.   Toutefois, il est nécessaire d’apporter d’autres améliorations importantes et, à ce moment, j’envisagerai de vous nommer à des affectations intérimaires.   Je m’engage à travailler avec vous, Stan, et à vous aider à améliorer vos compétences.   Il est important de souligner que le maintien de cette attitude négative et de propos accusateurs et non professionnels peut entraîner la prise de mesures disciplinaires.

Si vous désirez discuter ou obtenir des précisions, je suis prêt à vous rencontrer.

[26]   M. Peech a expliqué qu’il n’avait pas porté ses préoccupations concernant la rencontre du 17 septembre 2001 à l’attention de M. Bahniuk à ce moment-là, parce qu’il ne jugeait pas l’affaire d’une importance particulière.

[27]   En contre-interrogatoire, on a aussi montré à M. Peech une note au dossier qu’il avait rédigée le 21 novembre 2001 concernant une plainte qui lui avait été présentée par un chef d’équipe au sujet d’un commentaire qu’avait fait M. Bahniuk à un formateur, soit que la formation était meilleure 15 ans auparavant (pièce G-9).   Il n’avait pas porté ce point à l’attention de M. Bahniuk.

[28]   M. Bahniuk a déposé un grief contre la note de M. Peech le 21 janvier 2002 (pièce E/G-5), dans lequel il allègue ce qui suit :

[Traduction]

La note du 18 janvier 2002 est accusatrice, mais ne donne pas d’exemples concrets.   Certaines des références sont désuètes; aucune rétroaction n’a été fournie à cette date et est dénuée de fondement.   Dans aucun de ces cas, Don n’est venu me voir pour obtenir mon point de vue et évaluer la situation de manière objective.

[29]   À titre de mesure corrective, M. Bahniuk a demandé que la note soit retirée de son dossier et que sa demande de mesure disciplinaire contre M. Peech « soit exécutée ».   Il a également déclaré que la note était la preuve que M. Peech fait preuve de discrimination contre lui.

[30]   En réponse au grief déposé par M. Bahniuk contre le défaut de M. Peech de fournir par écrit ses commentaires, Reid Corrigall, directeur du Bureau des services fiscaux à Calgary, a écrit ce qui suit le 11 février 2002 (pièce E/G-4) :

[Traduction]

[…]

CONCLUSION

Je vais ordonner à la direction du Recouvrement des recettes de s’assurer que les attentes relatives au rendement vous soient communiquées en temps plus opportun à l’avenir.   Je vais demander à M. Peech de vous rencontrer d’ici la fin du mois afin de finaliser les attentes relatives à votre rendement.   Toutefois, si vous avez des inquiétudes concernant le contenu de ces attentes, je vous demande de communiquer vos inquiétudes à votre gestionnaire sans tarder.   Cette façon de procéder repose sur le principe selon lequel le processus de gestion du rendement est une responsabilité partagée.

[…]

[31]   Le 20 février 2002, M. Corrigall a répondu de la façon suivante au grief pour contester la note de M. Peech du 20 janvier 2002 (pièce E/G-5) :

[Traduction]

[…]

En ce qui concerne la deuxième question, je suis inquiet des rapports difficiles que vous entretenez avec M. Peech.

À la suite de conversations antérieures que nous avons eues, vous et moi, je désire confirmer mon offre d’appui à votre intention et à celle de votre gestionnaire afin d’établir une relation de travail plus efficace.   Avant notre prochaine réunion, je vous encourage à examiner une offre de médiation dans le cadre de laquelle on aidera les deux parties à communiquer leurs préoccupations et le processus de communication sera géré de manière à ce qu’il soit respectueux et professionnel.   Je demanderai également à M. Peech de commenter régulièrement votre rendement afin que les préoccupations soient traitées dès qu’elles sont soulevées.   Des commentaires seront formulés au cours de réunions régulières avec votre gestionnaire et vous seront confirmés par écrit.   Je demanderai à M. McCutchan de suivre la situation et de me tenir au courant des progrès.

[32]   M. Peech a été en congé prolongé de la mi-février jusqu’au 1er avril 2002 et n’a donc eu aucune autre discussion avec M. Bahniuk concernant son rendement.

[33]   M. Bahniuk a expliqué que, pendant la période d’évaluation de rendement (de 2001 à 2002), il avait exprimé son désaccord quant à l’interprétation faite par la gestion d’une décision de la Cour d’appel concernant une faillite et l’impôt sur le revenu dû (la décision Markovitz).   M. Peech a affirmé que l’approche qui consistait à certifier la créance était une directive de l’administration centrale.   Dans un courriel envoyé à un collègue (pièce G-14), M. Bahniuk s’est dit en désaccord avec cette approche et a déclaré : [traduction] « Ne croyez-vous pas qu’il s’agit d’une contravention à la loi et proposez-vous que nous enfreignions la loi ».   M. Bahniuk a eu l’impression que sa position sur la décision Markovitz était utilisée contre lui dans son évaluation de rendement.

[34]   M. Bahniuk a déclaré que M. Peech n’avait jamais observé son rendement au travail et qu’il ne savait pas comment il en était venu à ces conclusions (positives ou négatives) dans son évaluation de rendement.

[35]   Dans la réponse au dernier palier du présent grief, le sous-commissaire, D.G.J. Tucker, a reconnu que les attentes relatives au rendement et l’évaluation de rendement subséquente n’ont pas été fournies dans le délai prescrit dans les lignes directrices.   Il a déclaré que ce fait était regrettable, mais que la question était de déterminer si l’évaluation reflétait exactement le rendement de M. Bahniuk au cours de la période visée.

Résumé de l’argumentation

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

[36]   Mme Seaboyer a fait valoir que la question dont je suis saisi consiste à savoir si l’employeur a agi de façon arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi, en particulier en ce qui a trait à l’évaluation de rendement du fonctionnaire s’estimant lésé, ce qui a eu pour effet de lui refuser un congé de rendement aux termes du paragraphe 54.03 de la convention collective.   Elle a soutenu que l’évaluation de rendement fournie au fonctionnaire s’estimant lésé pour l’exercice 2001-2002 était arbitraire, discriminatoire et de mauvaise foi.   Les attentes relatives au rendement n’ont été fournies qu’en octobre 2001, soit six mois après le début de la période d’évaluation.   Ces attentes relatives au rendement, qui n’étaient qu’une version provisoire, étaient générales et non destinées en particulier au fonctionnaire s’estimant lésé.

[37]   Mme Seaboyer a souligné que les « Lignes directrices sur la gestion du rendement de l’employé » (pièce E/G-2) précisent le processus visant à assurer une rétroaction et un dialogue continus.   Il incombe au superviseur d’initier le dialogue.   M. Peech ne s’est pas donné la peine de rencontrer le fonctionnaire s’estimant lésé pour discuter avec lui.   Lors de la réunion du 23 octobre 2001, M. Peech s’est engagé à rencontrer les chefs d’équipe, mais ne s’est pas acquitté de cet engagement.

[38]   Mme Seaboyer a soutenu que de la documentation dont le fonctionnaire s’estimant lésé n’a jamais pris connaissance avait été utilisée pour appuyer son évaluation de rendement.   Un employé a le droit de savoir comment l’information est utilisée et d’avoir l’occasion d’y répondre.   Il existe une obligation de mener un processus transparent qui ne vise pas à faire échouer l’employé.   Il n’y a eu aucun dialogue continu et M. Peech a donc contribué à l’échec du fonctionnaire s’estimant lésé.   Ce ne sont pas les actes d’une personne agissant de bonne foi.   Le fait que M. Peech se soit fondé sur la réaction du fonctionnaire s’estimant lésé à la décision Markovitz n’est appuyé par aucune discussion avec le fonctionnaire s’estimant lésé ni aucun document.

[39]   Mme Seaboyer a expliqué que la confrontation rendait M. Peech mal à l’aise et que celui-ci trouvait plus facile d’éviter toute personne qui remettait en cause son autorité.   L’agent négociateur n’a pas contesté le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé remettait en cause l’autorité d’une manière déterminée et dogmatique.   Toutefois, il s’agissait du seul employé que M. Peech n’a pas rencontré afin de discuter de ses attentes et le fonctionnaire s’estimant lésé a été le seul employé à contester l’autorité de M. Peech de manière agressive.   Il ressort clairement des réponses à d’autres griefs (pièces E/G-4 et E/G-5) que la gestion a reconnu qu’il s’agissait d’une relation difficile; elle n’était pas heureuse de la façon dont la relation se déroulait et croyait qu’un meilleur dialogue s’imposait.

[40]   Mme Seaboyer a fait valoir qu’un certain retard dans la communication des attentes était accepté, mais que les attentes auraient dû être communiquées plus tôt.   Le fait de ne pas respecter un délai ne constitue pas en soi de la mauvaise foi mais, lorsqu’il est combiné avec les autres éléments, on constate une tendance.

[41]   Mme Seaboyer a signalé que le fonctionnaire s’estimant lésé avait été traité différemment de Mme McCann le 20 décembre 2001.   Le fonctionnaire s’estimant lésé a été traité différemment des autres chefs d’équipe.   On ne lui a pas demandé son avis et des comptes lui ont été enlevés sans discussion.   Ce sont tous des exemples du traitement différent et des indications de mauvaise foi et d’une conduite arbitraire.   Mme Seaboyer a également soutenu que M. Peech avait tiré une conclusion négative en raison des griefs déposés par le fonctionnaire s’estimant lésé.   Toutefois, le dépôt des griefs ne veut pas dire que le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas satisfait aux attentes de cette « évaluation des engagements permanents ».   Mme Seaboyer a fait valoir que le fonctionnaire s’estimant lésé a reçu une cote « ne satisfait pas aux exigences » parce qu’il était difficile à superviser et que M. Peech ne transige pas bien avec ceux qui contestent son autorité.   Le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas peur de s’exprimer.   Il a contesté l’intégrité de son gestionnaire et n’est pas revenu sur sa position.   Le fonctionnaire s’estimant lésé était d’avis qu’en ce qui concerne la décision Markovitz l’employeur lui demandait d’agir de façon illégale.   Il a posé les mêmes questions qui étaient posées par d’autres.   Il contestait continuellement la gestion et ne prenait pas son point de vue au pied de la lettre.   La gestion préférerait que le fonctionnaire s’estimant lésé « s’en aille », mais ce n’est pas son genre.

[42]   L’incident avec Mme McCann est malheureux, Mme Seaboyer en convient.   Toutes les personnes concernées auraient d û mieux réagir.   Toutefois, M. Peech a une obligation, à titre de gestionnaire, et aurait dû traiter la situation de manière plus ouverte.   Il a écouté Mme McCann, mais n’a pas offert la même chance au fonctionnaire s’estimant lésé.   Un gestionnaire qui sait comment gérer aurait donné au fonctionnaire s’estimant lésé le temps de se calmer.

[43]   Mme Seaboyer a soutenu qu’aucun élément de preuve ne confirme que M. Peech a discuté de questions de rendement avec le fonctionnaire s’estimant lésé.   La lettre du 18 janvier 2002 (pièce E/G-4) a été demandée expressément par le fonctionnaire s’estimant lésé.   L’allégation contenue dans la lettre selon laquelle les autres chefs d’équipe ne voulaient pas travailler avec lui n’est appuyée d’aucun document.   Le fonctionnaire s’estimant lésé a déclaré qu’il avait de bonnes relations de travail avec les autres chefs d’équipe et il a reconnu l’incident avec Mme McCann.   Selon Mme Seaboyer, le défaut de consulter le fonctionnaire s’estimant lésé en temps opportun sur les questions de rendement constitue de la mauvaise foi.   En outre, le défaut de discuter des questions de rendement est discriminatoire et de mauvaise foi.

[44]   Mme Seaboyer a fait valoir que les conditions d’admissibilité au congé de rendement imposent un critère extrêmement élevé et très subjectif fondé sur les bonnes relations avec les pairs et les superviseurs.   Il est difficile de satisfaire à ce critère parce que le fonctionnaire s’estimant lésé conteste l’autorité.   M. Peech avait l’obligation de traiter le fonctionnaire s’estimant lésé de manière transparente, impartiale et juste.   Elle soutient que la preuve appuie la prétention du fonctionnaire s’estimant lésé, soit qu’il n’a pas été traité de bonne foi.

[45]   Mme Seaboyer m’a renvoyé à la décision Dhaliwal c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada : Service correctionnel), 2004 CRTFP 109.   Elle a soutenu que cette décision porte sur un renvoi en cours de stage, mais que les principes de bonne foi qui y sont examinés s’appliquent à la présente.   Elle a ajouté que M. Peech a manqué de diligence et n’a pas aidé le fonctionnaire s’estimant lésé dans l’exécution de ses fonctions.   Elle a également affirmé que, comme dans l’affaire Dhaliwal (supra), l’employeur a contrevenu à sa propre politique et que cette contravention constituait de la mauvaise foi.

[46]   Mme Seaboyer a demandé, à titre de mesure corrective, une déclaration selon laquelle l’évaluation de rendement a été faite de mauvaise foi.   Étant donné le temps écoulé et les difficultés que représentait l’évaluation du rendement du fonctionnaire s’estimant lésé pendant la période visée, Mme Seaboyer a également demandé une ordonnance accordant une cote de « satisfait aux exigences » dans l’évaluation de rendement et qu’on accorde au fonctionnaire s’estimant lésé le congé approprié.   Elle a fait valoir que cette mesure corrective était nécessaire afin que l’employeur ne profite pas de sa propre faute et parce qu’un véritable redressement s’impose.   Elle a également demandé que je demeure saisi de l’affaire.

Pour l’employeur

[47]   M. Newman a affirmé que, selon l’employeur, le fonctionnaire s’estimant lésé avait été rémunéré de façon appropriée aux termes du paragraphe 54.03 de la convention collective.   Ce paragraphe précise que les conditions d’admissibilité à un congé de rendement sont établies dans les lignes directrices.   Il a souligné que le fonctionnaire s’estimant lésé n’avait pas satisfait à l’une des conditions, soit celle d’obtenir une cote « satisfait aux exigences » ou « dépasse les exigences » dans la partie de son évaluation de rendement portant sur les « engagements permanents ».

[48]   M. Newman a souligné que le fonctionnaire s’estimant lésé était expérimenté et qu’il comprenait ce qu’on attendait de lui.   L’évaluation de rendement indique qu’il avait eu des échanges avec M. Peech.   (L’évaluation précise que le fonctionnaire s’estimant lésé tenait son gestionnaire informé.)   L’évaluation de rendement indique également que le fonctionnaire s’estimant lésé reconnaît la valeur de la communication avec son propre personnel, mais qu’il n’applique pas cette valeur aux communications avec ses pairs et les gestionnaires.

[49]   M. Newman a soutenu que la preuve appuie amplement les préoccupations de la gestion qui figurent dans l’évaluation de rendement.   Lorsque les propres intérêts du fonctionnaire s’estimant lésé étaient en cause, il était difficile de traiter avec lui; il n’était pas prêt à discuter avec ses gestionnaires et ses pairs de manière professionnelle.   L’incident avec Mme McCann a été une affaire très troublante.   Le fonctionnaire s’estimant lésé a admis que la discussion avait été animée.   Il l’a fait pleurer, mais a rejeté la faute sur elle parce qu’elle était enceinte et [traduction] « affectée par les hormones ».   Le fonctionnaire s’estimant lésé a fait preuve d’insensibilité, élément qui a été pris en compte par la gestion à l’égard de sa capacité à communiquer.   Lors de la réunion du 20 décembre 2001, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas voulu discuter des effets sur Mme McCann, mais ne s’intéressait qu’à ses propres préoccupations, comme les possibilités d’affectations intérimaires.   Il n’a jamais tenté de se réconcilier avec Mme McCann ou de s’excuser.   Ce comportement démontre une attitude arrogante dans le traitement des événements et envers les personnes.

[50]   M. Newman a indiqué que personne n’a critiqué le fonctionnaire s’estimant lésé pour avoir déposé des griefs; il en a le droit.   Toutefois, il y aurait lieu de croire qu’il existe d’autres moyens de soulever des problèmes en milieu de travail avant d’avoir recours aux griefs.

[51]   M. Newman a affirmé qu’il a été prouvé que le fonctionnaire s’estimant lésé tenait des propos accusateurs.   M. Peech disposait d’une abondance de preuve pour en arriver à cette conclusion.   Les commentaires qu’il a formulés dans son évaluation de rendement n’ont pas été faits de mauvaise foi ou d’une manière arbitraire ou capricieuse.   Il n’avait aucune arrière-pensée; il souhaitait seulement faire du fonctionnaire s’estimant lésé un meilleur gestionnaire.   Il n’y avait aucune animosité entre M. Peech et le fonctionnaire s’estimant lésé.

[52]   M. Newman m’a renvoyé au « Code de déontologie » de l’ADRC (pièce E-1) et a affirmé que le fonctionnaire s’estimant lésé, à titre de gestionnaire, n’avait pas fait preuve de leadership.

[53]   M. Newman a fait valoir que le défaut de M. Peech de soulever ses préoccupations concernant la réunion du 27 septembre 2001 jusqu’en décembre 2001 ne constituait pas de la mauvaise foi.   Les gestionnaires ne sont pas tenus de réprimander les employés chaque fois qu’ils agissent de façon inappropriée et les gestionnaires de la fonction publique ne devraient pas être encouragés dans ce sens.

[54]   M. Newman a également soutenu que la lettre du 18 janvier 2002 a été envoyée bien avant l’évaluation de rendement et soulève un certain nombre de questions liées au rendement.   M. Peech a honnêtement tenté de régler les problèmes.   Nous ne sommes pas ici pour juger des compétences de superviseur de M. Peech; il s’agit seulement pour nous de déterminer s’il a fait preuve de mauvaise foi à l’égard du fonctionnaire s’estimant lésé.   Selon M. Newman, le fait de ne pas tenir compte de la réalité de la situation et d’inventer des choses constituerait de la mauvaise foi.   Tel n’est pas le cas en l’espèce.

[55]   M. Newman a expliqué que M. Peech a initié le dialogue, mais que c’est le fonctionnaire s’estimant lésé qui a refusé de discuter avec lui.   Le fait que le fonctionnaire s’estimant lésé soit intransigeant, arrogant et accusateur constitue un obstacle.   Il y avait eu une quantité raisonnable de commentaires et la possibilité d’en fournir encore davantage.

[56]   M. Newman a soutenu que l’évaluation principale montre que M. Peech avait du respect pour les compétences techniques et les habiletés de gestionnaire du fonctionnaire s’estimant lésé.   M. Peech n’a pas tenté de faire échouer le fonctionnaire s’estimant lésé, mais a plutôt tenté de l’aider à s’améliorer et à faire progresser sa carrière au sein de l’ADRC.

[57]   M. Newman a fait valoir que la décision dans l’affaire Dhaliwal (supra) était une décision particulière fondée sur un ensemble de facteurs bien précis.   Il a souligné que, dans la présente affaire, il n’existe pas de lignes directrices semblables à celles dont il est question dans la décision Dhaliwal.   En l’espèce, le défaut de satisfaire à toutes les exigences des lignes directrices de l’employeur portant sur les évaluations (pièce E/G-2) n’avait aucune incidence sur l’évaluation ultérieure.   Quoi qu’il en soit, on a respecté les lignes directrices dans une large mesure.   Il a également souligné que les lignes directrices du Conseil du Trésor citées dans l’affaire Dhaliwal ne s’appliquent pas à l’ADRC qui est un employeur distinct.

[58]   M. Newman a également fait remarquer que, selon la décision McMorrow c. Conseil du Trésor (Anciens combattants Canada), dossier de la CRTFP 166-2-23967 (1993) (QL) (citée dans la décision Dhaliwal (supra)), il existe une présomption de bonne foi.   Il m’a aussi renvoyé à la définition de mauvaise foi du Black’s Law Dictionary contenue dans la décision Dhaliwal : [traduction] « croyance ou objet malhonnête ».   M. Newman a fait valoir qu’une arrière-pensée et le fait d’assurer l’échec du fonctionnaire s’estimant lésé constituerait de la mauvaise foi.   Tel n’est pas le cas en l’espèce.   M. Newman a aussi souligné que dans la décision Dhaliwal, rien ne prouve que les préoccupations ont été portées à l’attention du fonctionnaire s’estimant lésé.   Dans la présente affaire, le fonctionnaire s’estimant lésé savait ce qu’on attendait de lui et M. Peech a essayé de lui faire part de ses préoccupations à la réunion du 20 décembre 2001 et dans la note du 18 janvier 2002 (pièce G-4).

[59]   M. Newman a fait valoir que M. Peech disposait de suffisamment de faits pertinents pour en arriver à la conclusion qu’il a tirée.   Les lignes directrices établissent une norme d’admissibilité très élevée à l’égard du congé de rendement et le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas satisfait à cette norme élevée.   La conclusion de M. Peech dans l’évaluation de rendement était appuyée sur la preuve et M. Newman a demandé que je rejette le grief.

[60]   Dans l’alternative, si je devais conclure que l’employeur a fait preuve de mauvaise foi, M. Newman a soutenu que la seule mesure correctrice appropriée serait une déclaration.   Il a souligné qu’il était impossible de savoir qu’elle aurait été la cote.

Réponse

[61]   Mme Seaboyer a soutenu que, contrairement aux déclarations de M. Newman, le fonctionnaire s’estimant lésé contestait le fondement de l’évaluation de rendement dans son entier et non seulement des parties négatives.   Le fonctionnaire s’estimant lésé a déclaré qu’il ne savait pas comment M. Peech en était arrivé même aux éléments positifs de son évaluation.

[62]   Mme Seaboyer a fait valoir que le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé des griefs seulement parce qu’il n’a pas obtenu de réponses de son employeur.   Son grief en réponse à la lettre du 18 janvier 2002 était justifié parce que la lettre le menaçait de mesures disciplinaires.   Elle a soutenu que la critique adressée au fonctionnaire s’estimant lésé dans son évaluation de rendement pour avoir défendu ses droits équivalait à le punir pour avoir exercé ses droits aux termes de la convention collective et de la loi.

Motifs

[63]   Comme je l’ai déjà mentionné, j’ai déterminé à l’audience que la portée de ma compétence était limitée.   Ma compétence se limite à la convention collective et ne s’étend pas à l’appréciation de l’évaluation de rendement elle-même.   À mon avis, ma compétence est limitée à la détermination de la question à savoir si l’employeur a agi de mauvaise foi en refusant à M. Bahniuk un congé de rendement de gestion.   Dans ce contexte, la mauvaise foi signifierait que l’employeur n’a fondé son évaluation du rendement de M. Bahniuk sur aucun fait.   Quant à savoir si M. Bahniuk méritait la cote qu’il a reçue, cette question ne relève pas de ma compétence.   Le rôle d’un arbitre de grief dans de tels cas sera toujours extrêmement limité.

[64]   Mme Seaboyer a laissé entendre que la critique adressée au fonctionnaire s’estimant lésé pour avoir déposé des griefs équivalait à le punir d’avoir exercé ses droits, tant aux termes de la convention collective que de l’ancienne Loi.   Ce genre d’argument nous amène très loin du grief initial.   La façon adéquate de soulever de telles allégations aurait été une plainte contre l’employeur aux termes de l’article 23 de l’ancienne Loi.

[65]   Dans le contexte d’un renvoi en cours de stage, l’arbitre de grief dans l’affaire McMorrow (supra) a défini la mauvaise foi comme étant une décision qui est « une conclusion arbitraire sur les faits ».   Pour prouver qu’il y a eu mauvaise foi parce qu’on ne lui a pas accordé un droit prévu par la convention collective, M. Bahniuk doit donc démontrer que la cote « ne satisfait pas aux exigences » qui lui a été donnée dans son évaluation de rendement n’était pas fondée.   La preuve montre que cette cote était fondée.   Son gestionnaire a exprimé des préoccupations à l’égard de son rendement.   La preuve montre que certains événements et comportements ont donné lieu à ces préoccupations.   Il ne m’appartient pas de déterminer si je suis d’accord avec la cote accordée.   À mon avis, la cote de rendement était fondée sur des observations légitimes de la gestion et, par conséquent, tenait compte des faits.   Rien ne prouve que la décision était capricieuse ou arbitraire.   Je conclus donc que l’évaluation a été faite de bonne foi.

[66]   Comme on l’a souligné dans la réponse au dernier palier du grief, le fait que les délais n’aient pas été respectés dans le processus d’évaluation est regrettable.   Toutefois, dans les circonstances, le défaut de respecter les exigences de la procédure ne constitue pas de la mauvaise foi.  

[67]   Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

[68]   Le grief est rejeté.

Le 20 décembre 2005.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Ian R. Mackenzie,
arbitre de grief

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