Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante occupe un poste de PM-02 dont certaines fonctions touchent à la TPS -lorsqu’elle a appris que la classification d’employés à l’extérieur du Québec, dont le travail concernait également l’application de la TPS, était soit PM-03, soit AU-02, elle a déposé deux griefs afin de recevoir un traitement égal à celui de ses collègues des autres régions et de faire reclassifier son poste à un niveau supérieur - son agent négociateur a refusé de la représenter à l’arbitrage, et elle a, du coup, présenté deux plaintes, affirmant que l’agent négociateur avait manqué à son devoir de représentation juste -elle a prétendu que l’agent négociateur avait mal caractérisé son grief et l’avait mal conseillée lors de la préparation des plaidoiries concernant l’aspect discriminatoire de sa rémunération - elle a allégué, de plus, que l’agent négociateur s’était comporté de manière discriminatoire, en ce sens qu’il avait obtenu le règlement du grief connexe présenté par son collègue, dont le poste était classifié au niveau PM-03, mais qu’il n’avait pas réussi à obtenir le même règlement relatif à ses propres griefs - l’agent négociateur a contesté la divulgation par la plaignante du contenu du règlement confidentiel, et la Commission a déclaré que la preuve relative au règlement devait être limitée aux conséquences de celui-ci et que la plaignante ne pouvait divulguer ni le contenu du règlement ni les discussions préalables - la plaignante a prétendu, de plus, que l’agent négociateur avait manqué à son devoir en l’informant à une date tardive de l’existence d’une politique de l’employeur régissant la promotion sans concours et en s’abstenant d’intervenir lorsque l’employeur n’a pas établi au Québec les mêmes postes qu’il avait créés ailleurs au Canada - l’agent négociateur a rétorqué qu’il avait examiné rigoureusement les griefs et constaté que la Commission n’avait pas compétence pour traiter de questions de classification et ne pouvait la nommer à un poste supérieur à son poste actuel - il a ajouté que le règlement offert à son collègue était indépendant de sa volonté et que l’employeur lui avait fait une offre qu’elle avait refusée - en ce qui concerne l’établissement de postes, l’agent négociateur a fait valoir que la réponse de l’employeur était raisonnable et qu’aucune autre intervention particulière de la part de l’agent négociateur n’était nécessaire - la Commission a soutenu que l’agent négociateur avait soigneusement évalué le dossier, qu’il n’était coupable ni de négligence ni d’avoir agi de mauvaise foi ou de façon arbitraire et qu’aucun élément de preuve n’indiquait que le travail de la plaignante, par sa qualité ou son volume, était équivalent à celui qu’effectuaient d’autres employés de l’ARC ailleurs au Canada - la Commission a également soutenu que des postes avaient été établis pour répondre aux besoins dans chacune des régions du Canada et que l’établissement de postes relevait de la responsabilité de l’employeur - la Commission n’a fait aucune constatation en ce qui a trait au respect des délais, comme ni l’une ni l’autre des parties n’avait préparé d’arguments sur la question. Plaintes rejetées.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique édictée
par l’article 2 de la Loi sur la
modernisation de la fonction publique,
L.C. 2003, ch. 22

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2005-06-14
  • Dossiers:  161-34-1260 et 1262
  • Référence:  2005 CRTFP 53

Devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique



ENTRE

CHARLOTTE RHÉAUME

plaignante

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

partie défenderesse

Répertorié
Rhéaume c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant des plaintes logées en vertu de l’article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DES DÉCISION

Devant : Jean-Pierre Tessier, commissaire

Pour la plaignante : Elle-même

Pour la partie défenderesse : Laurent Trudeau, avocat


Affaire entendue à Montréal (Québec),
les 11 et 12 mai 2004 et les 1 et 2 février 2005.

Plaintes devant la Commission

[1]   Charlotte Rhéaume est fonctionnaire et son poste est classifié aux groupe et niveau PM-02. Au moment où Mme Rhéaume a présenté sa plainte, elle était au service de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), devenue l’Agence du revenu du Canada (ARC) par la suite de la réorganisation de la fonction publique annoncée le 12 décembre 2003.

[2]   À l’automne 1999, Mme Rhéaume occupe un poste à Montréal dont un certain nombre des fonctions sont rattachées à des activités concernant la taxe sur les produits et services (TPS).  Elle constate que certains de ses collègues, ailleurs au Canada, détiennent des postes classifiés PM-03 ou AU-02 et qu’ils sont mieux rémunérés, bien qu’ils s’occupent eux aussi de questions reliées à la TPS.

[3]   Mme Rhéaume dépose donc à ce moment un grief dans lequel elle demande notamment :

  1. d’être traitée de façon juste et équitable au même titre que ses pairs des autres régions du Canada;
  2. que le poste qu’elle occupe soit dûment reclassifié à un niveau supérieur.

[4]   Suite à diverses discussions avec les représentants de son syndicat (Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC)), ce dernier refuse de la représenter au niveau de l’arbitrage des griefs.

[5]   Insatisfaite, Mme Rhéaume dépose, le 31 mai 2003, deux plaintes contre l’AFPC, alléguant que son syndicat a agi de manière arbitraire, discriminatoire et de mauvaise foi, en matière de représentation.

[6]   L’audience de ces plaintes a lieu en mai 2004 et se poursuit en février 2005.

[7]   Le 1 er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « nouvelle Loi »), édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur.  En vertu de l’article 39 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, la Commission demeure saisie de ces plaintes, qui doivent être décidées conformément à la nouvelle Loi.

Résumé de la preuve

[8]   Lors de l’audience, Mme Rhéaume dépose divers documents relatifs au grief.  Les pièces P-1 à P-16 sont des échanges de correspondance entre Mme Rhéaume et son syndicat, ainsi qu’avec l’employeur. La pièce P-17 est la Politique de l’employeur relative aux descriptions de travail. Les pièces P-18 à P-26 sont des documents émanant de l’employeur et du syndicat et de la correspondance expédiée par Mme Rhéaume.

[9]   Les deux plaintes portent sur le refus de représentation du syndicat face aux revendications de Mme Rhéaume.  Dans une lettre datée du 1 er octobre 2003, Mme Rhéaume indique cependant que chacune des plaintes renvoie à des faits distincts.

Tout d’abord, je crois qu’une erreur s’est glissée quant au numéro de référence attribué à chaque plainte dans la position de l’Alliance du 8 septembre 2003.  La plainte 161-34-1260 est relative au grief #99-1208-10462 et la plainte 161-34-1262 est relative au processus de restructuration des emplois et la reclassification des emplois aux Services de l’interprétation technique (SIT).  Chaque plainte touche des faits différents et une cause d’action différente.  Je demande à la Commission de verser une copie de la présente lettre de commentaires à chaque dossier de plaintes susmentionnées.

[10]   Dans la plainte 161-34-1260, Mme Rhéaume reproche au syndicat d’avoir examiné son grief sous l’angle de la classification et de l’avoir mal guidée pour pouvoir soutenir l’aspect discriminatoire parce qu’elle est rémunérée à un salaire inférieur à ses pairs ailleurs au Canada.

[11]   Se référant à un courriel daté du 8 juin 2001, provenant de Michèle Julien, conseillère en classification pour l’employeur, Mme Rhéaume réitère qu’elle voulait une rémunération équitable (pièce P-1).

[12]   En se référant à la pièce P-1, ainsi qu’à une lettre que Mme Rhéaume a adressée à M me Brown, Customs Excise Union Douanes Accise (CEUDA), une section du syndicat, le 27 janvier 2000 (pièce P-6),  Mme Rhéaume souligne qu’il y a dans son dossier un problème d’énoncé de fonctions.

[13]   Dans une lettre datée du 8 octobre 2002 (pièce P-14), Mme Rhéaume reproche à son syndicat de mal apprécier la portée de son grief relativement à l’exercice de fonctions de niveau supérieur.

[…]

À l’appui de votre décision, vous faites aussi référence à notre conversation téléphonique du 30 septembre 2002 au cours de laquelle je vous aurais dit que mon énoncé de fonctions est complet et à jour.  Vous concluez de cette conversation que je ne conteste pas le fait que l’employeur aurait violé les dispositions de l’article 55 de ma convention collective.  Par ailleurs, ajoutez-vous, en ce qui se rapporte à l’article 64 qui traite de salaire, lorsque mon employeur me demande des fonctions de niveau supérieur, je ne conteste pas dans mon grief ce fait.  L’employeur nie, dites-vous, m’avoir demandé des fonctions de niveau supérieur tel que prescrit à l’article 64.  Aussi, concluez-vous, mon employeur n’aurait pas violé les dispositions de la convention collective sur ce sujet.

[…]

[14]   Subséquemment, Mme Rhéaume présente une preuve relativement à la possibilité de règlement de son grief par voie de médiation.

[15]   Mme Rhéaume allègue que le syndicat a agi de façon discriminatoire à son égard puisque dans un dossier d’un de ses collègues de travail, Christian Alcindor, il y aurait eu un règlement équivalent à la réclamation qu’elle exigeait pour elle-même. Mme Rhéaume déclare que, selon elle, son collègue fut reclassifié aux groupe et niveau de AU-02.

[16]   Le syndicat s’est objecté à ce que Mme Rhéaume dévoile le contenu d’une entente qui est de nature confidentielle et qui lie l’employeur et M. Alcindor.  Sur ce point, j’ai indiqué à la plaignante qu’elle ne pouvait témoigner sur une entente à laquelle elle n’est pas partie.  De plus, si la plaignante demandait à M. Alcindor de témoigner, son témoignage devait se limiter aux conséquences de l’entente et non au contenu des discussions et aux textes des accords qui sont de caractère confidentiel entre les parties.

[17]   De fait, M. Alcindor a témoigné que dans son cas, il était classifié aux groupe et niveau PM-03, alors que Mme Rhéaume est PM-02.  Il indique qu’il souhaitait obtenir la classification aux groupe et niveau AU-02 ou du moins un salaire équivalent.  Comme conséquence du règlement avec l’employeur, il devait prendre sa retraite et a reçu une compensation salariale satisfaisante par rapport à sa demande initiale.

[18]   Mme Rhéaume admet avoir reçu une offre de l’employeur mais reproche au syndicat de ne pas avoir obtenu d’offre semblable à celle qu’a reçue M. Alcindor.

[19]   En ce qui a trait à la deuxième plainte, 161-34-1262, Mme Rhéaume se réfère à la Politique relative aux descriptions de travail édictées par l’employeur (pièces P-17a) et b)).

[20]   Cette politique est entrée en vigueur en novembre 1997 et prévoit notamment la promotion sans concours mais en fonction du mérite, à des postes classés à un groupe et un niveau supérieurs.

[21]   Mme Rhéaume dit avoir été mise au courant de cette politique tardivement et que, selon elle, des postes de niveau supérieur n’ont pas été créés au Québec, du moins des postes en relation avec les fonctions qu’elle exerçait. Elle se demande pourquoi le syndicat n’est pas intervenu.

[22]   Témoignant pour le syndicat, Francine Cabana indique avoir travaillé pour l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) depuis 1984.  De 1984 à 1992, elle a agi comme agente syndicale et depuis 1997, elle est agente de grief et d’arbitrage.

[23]   M me Cabana précise que les dossiers de grief au niveau national sont acheminés à la coordinatrice des griefs qui les assignent pour analyse à un agent de grief.  Les dossiers de Mme Rhéaume ont été assignés au départ à Rachel Dugas, puis par la suite à M me Cabana.

[24]   Se référant à la lettre qu’elle écrivait à Mme Rhéaume le 4 octobre 2002 (pièce S-5), M me Cabana explique avoir rencontré Mme Rhéaume et avoir analysé son grief.  Dans cette lettre, elle fait état des objections formulées par l’employeur et souligne que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) n’est pas compétente pour traiter de questions de classification et qu’un arbitre ne peut donner droit au correctif recherché par Mme Rhéaume en la nommant à un groupe et un niveau supérieurs.

[25]   M me Cabana dit avoir joint à cette lettre l’opinion d’une analyste de grief (Nathalie St-Louis) qui fut préparée le 10 août 2001 (pièce S-6).  M me Cabana note que l’analyse détaillée de M me St-Louis conclut qu’il n’y a aucune chance de succès à défendre le grief.  De plus, M me Cabana souligne que M me Rhéaume a défendu elle-même son grief en arbitrage et que la décision de l’arbitre conclut au rejet du grief (2003 CRTFP 114).

[26]   M me Cabana ajoute que dans cette lettre du 4 octobre 2002, elle rappelle à Mme Rhéaume que l’employeur lui a fait une offre de règlement qu’elle a refusée.

[27]   En ce qui a trait à ce point des offres de règlement, M me Cabana dépose un relevé de cotisations payées par M. Alcindor (pièce S-7). Ce relevé confirme que M. Alcindor, après l’entente avec l’employeur, paie des cotisations à l’AFPC et qu’en conséquence, il n’a pas été reclassifié à un poste aux groupe et niveau AU-02, qui est couvert par une autre accréditation syndicale.

[28]   M me Cabana souligne qu’il peut y avoir des discussions sur l’énoncé de fonctions de Mme Rhéaume mais son grief traite de classification et de discrimination dans la rémunération.

[29]   À propos de la question de création de poste par l’employeur, Mme Cabana indique que le syndicat ne fait pas partie de cette décision.  Selon M me Cabana, les postes étaient créés en fonction des besoins de chaque région.  En ce sens, elle se réfère à une réponse de l’employeur, datée du 28 juin 2001, dont un extrait est repris dans l’analyse de Mme St-Louis (pièce S-6) :

[…]

Dans le cadre d’une revue de certains emplois reliés à l’interprétation de la Loi sur la taxe d’accise, il fut convenu que des postes de catégorie AU devaient être créés et que chaque région avait le soin de doter les postes en fonction de leurs besoins.  Dans la région de Québec, aucun poste de ce genre n’a été jugé nécessaire du fait que nos employés n’ont pas à donner d’interprétation de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise, partie qui porte sur la taxe des produits et services (TPS).  Cette tâche a été confiée aux employés du Ministère du revenu du Québec dans le cadre de protocoles d’entente signés entre les instances provinciale et fédérale du revenu.

[…]

[30]   M me Cabana considère que la réponse de l’employeur est logique et ne voit pas pourquoi le syndicat aurait dû décider de faire des représentations spéciales.  Elle rappelle que la création de postes est une responsabilité de l’employeur.  De fait, au Québec, deux cents employés fédéraux ont accepté un transfert du gouvernement du Québec; seul deux employés sont demeurés au fédéral dont Mme Rhéaume et M. Alcindor.

Résumé de l’argumentation

Arguments des parties

[31]   Mme Rhéaume soutient que la situation au Québec n’est pas différente des autres provinces du Canada.  Selon elle, des postes supérieurs auraient pu être créés au Québec, au niveau de la TPS, et elle répond aux critères d’attribution.  Le syndicat n’a jamais informé les employés au Québec que l’employeur créait des nouveaux postes dans les autres provinces.

[32]   Mme Rhéaume évoque les principales dates où il y a des communications relatives à la reclassification des emplois ainsi que la date où il y a échange de correspondance entre elle-même et son employeur et le syndicat (pièce P-26, plaidoirie écrite).

[33]   En se référant à la pièce P-1, Mme Rhéaume souligne qu’elle n’a pas signé de description de travail et qu’elle devait être classifiée rétroactivement au 1 er janvier 1999.

[34]   Mme Rhéaume soutient que le syndicat savait qu’il y avait écart de rémunération entre elle-même et ses collègues des autres provinces qui travaillent au niveau de la TPS.

[35]   Elle considère injuste que son collègue de travail, M. Alcindor, ait pu conclure une entente satisfaisante sur son grief alors que dans son cas, l’employeur lui offrait moins.

[36]   Relativement à son grief, elle considère que le syndicat s’en limite aux questions de classification et n’a pas considéré que le grief pouvait être défendable au niveau de la discrimination puisque ce grief indiquait qu’elle désirait recevoir le même traitement que ses collègues des autres provinces.  Elle se réfère à la décision Savoury c. La Guilde de la Marine Marchande du Canada , 2001 CRTFP 79 et considère que le syndicat a fait preuve de négligence.

[37]   De son côté, le syndicat soutient que les agents syndicaux ont pris soin d’examiner tous les éléments du dossier de Mme Rhéaume.

[38]   Relativement à la question de description de fonction, le syndicat se réfère à la décision de l’honorable Juge Rouleau de la Cour fédérale du Canada dans le dossier Rhéaume c. Sa Majesté et l’Alliance de la Fonction publique du Canada, 2003 CF 1405, au paragraphe 47 :

[…]

Cependant, cette dernière disposition est de portée plus limitée que l’article 91, ce qui fait que certaines questions qui peuvent faire l’objet d’un grief ne peuvent pas être renvoyées à l’arbitrage.  C’est d’ailleurs ce qui explique la décision du syndicat de retirer la partie du grief relatif à la description de tâches de la demanderesse quelques jours avant sa date prévue d’arbitrage.

[…]

[39]   Relativement à la plainte, reprochant au syndicat d’avoir mal informé et mal représenté la plaignante, dans le cas de la restructuration et la reclassification des emplois, le syndicat souligne que Mme Rhéaume loge sa plainte en 2003 pour des actions qui ont eu lieu en 1999.

[40]   En plus de cet élément de tardivité de la plainte, le syndicat souligne qu’il lui appartient de prendre la décision relativement à l’intérêt de l’ensemble de ses membres et qu’il appartient à l’employeur de créer des postes selon les besoins de chaque région.  Au Québec, la TPS est transférée au gouvernement provincial et le volume de travail diffère des autres provinces.

[41]   En conclusion, le syndicat soutient avoir une certaine discrétion dans la conduite des griefs et que la plaignante doit démontrer qu’il a agi de façon arbitraire, discriminatoire, ou de mauvaise foi.

[42]   En ce qui a trait à l’élément subsidiaire de règlement du dossier de M. Alcindor par rapport au règlement du dossier de Mme Rhéaume, le syndicat soumet que les propositions de règlement sont celles de l’employeur.  Dans le cas de M. Alcindor, il est question de départ pour la retraite et d’une rémunération additionnelle par rapport à sa classification aux groupe et niveau PM-03.  Dans le cas de Mme Rhéaume, on ne parle pas de départ à la retraite et sa classification était PM-02.  D’ailleurs, cette dernière a refusé l’offre.  Le syndicat l’a représentée mais il n’est pas responsable des offres faites par l’employeur.

[43]   Le syndicat se réfère à certains cas de jurisprudence pour démontrer qu’il jouit d’une discrétion appréciable pour décider de référer ou non un grief à l’arbitrage après avoir fait une étude sérieuse du dossier; Savoury (supra); Lipscomb c. Alliance de la Fonction publique du Canada, dossier de la CRTFP 161-34-1127 (2000) (QL).  Se référant à la décision Harrison c. Alliance de la Fonction publique du Canada, dossier de la CRTFP 161-02-725 (1995) (QL), le syndicat souligne que la plaignante doit soumettre sa plainte dans un délai raisonnable.

Motifs

[44]   La plaignante considère que le syndicat a violé les dispositions de la loi quand il ne l’a pas soutenue dans la défense du grief qu’elle avait logé.

[45]   Le syndicat a analysé le dossier de Mme Rhéaume et lui a souligné que la question de classification des postes échappe à la compétence de la CRTFP.

[46]   En ce qui a trait à la question de discrimination par rapport à ses autres collègues de travail du Canada, M me Rhéaume allègue qu’elle s’occupait de la TPS et qu’elle avait les compétences nécessaires pour obtenir un salaire équivalent à ses collègues de travail des autres provinces.

[47]   Selon M me Rhéaume, le syndicat aurait dû soutenir qu’elle effectuait des tâches de niveau comparable à ses collègues des autres provinces et qu’elle devait donc être rémunérée à un niveau supérieur, du moins de façon intérimaire.

[48]   Sur ce point, les arguments soulevés par Mme Rhéaume créent beaucoup de confusion.  Mme Rhéaume insiste sur la reclassification de ses fonctions, elle insiste sur ses compétences et son aptitude à occuper un poste supérieur et elle soutient que bien que l’administration de la TPS ait été transférée au gouvernement du Québec, il n’y a pas de différence entre la tâche des employés fédéraux au Québec par rapport aux autres provinces.  Selon elle, les employés font tous partis des services d’interprétation techniques .

[49]   J’ai examiné l’ensemble de la preuve et vérifié l’ensemble de la documentation au dossier.  Je ne vois, dans la documentation présentée par Mme Rhéaume, aucune démonstration probante, relativement à l’exécution de fonctions supérieures que le syndicat aurait omis de considérer soit par négligence ou mauvaise foi.   En effet, rien n’indique que Mme Rhéaume effectuait un travail en qualité et en quantité équivalentes à celui effectué par ses pairs des autres provinces occupant des fonctions supérieures. D’ailleurs, il n’y a aucune preuve sur la fonction détaillée des tâches de travail accomplies par les employés des autres provinces.

[50]   Dans ces circonstances, je trouve que le syndicat a agi de façon responsable et consciencieuse en prenant soin d’analyser le dossier de Mme Rhéaume avant de décider ou non d’aller en arbitrage et je ne trouve aucune preuve de négligence, d’insouciance ou de mauvaise foi de leur part.  Cette attitude diffère des faits décrits dans la décision Savoury (supra) dans laquelle l’arbitre conclut qu’il y a eu négligence et conduite désinvolte de la part du syndicat.

[51]   Avant d’aborder la deuxième plainte, je dois noter une question qui revient à plusieurs reprises dans la documentation au dossier.  Il s’agit de la question de l’exposé des fonctions de travail de Mme Rhéaume.  Dans sa lettre datée du 21 août 2001 (pièce P-22), Mme Rhéaume considère que M me St-Louis ne peut prétendre qu’un grief contestant l’exposé des fonctions aurait pu être présenté puisque selon Mme Rhéaume, elle n’a pas reçu l’exposé des fonctions « officielle ».  Je crois que les parties auraient intérêt à régler leur différend sur ce point.  Il me paraît que lorsqu’un employé fait référence au travail qu’il effectue, il est utile qu’il ait une description de tâches à jour et de façon officielle.  Bien qu’il y ait des discussions entre  Mme Rhéaume et le syndicat sur ce point, je ne constate aucune attitude de discrimination ou de mauvaise foi de la part du syndicat envers Mme Rhéaume.

[52]   Concernant la deuxième plainte, relativement à la création de postes supérieurs, la preuve démontre que ces postes devaient être créés selon les besoins de chaque région.  Cette responsabilité appartient à l’employeur et le syndicat n’est pas partie intégrante dans ce processus.   Le syndicat doit tenir compte de l’intérêt de l’ensemble de ses membres et il a décidé de ne pas faire de pression sur l’employeur pour faire des représentations sur le besoin de créer des postes supérieurs au Québec au niveau de la TPS, alors que ce champs d’activité est transféré à l’administration du gouvernement du Québec.

[53]   En vertu de la loi, un agent négociateur doit représenter ses membres d’une manière qui ne soit pas arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi.  Lorsqu’elle est saisie d’une plainte de représentation injuste, la CRTFP doit évaluer le comportement reproché afin de déterminer s’il constitue une violation des dispositions de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP).

[54]   Le syndicat a examiné les circonstances de l’affaire, il indique que Mme Rhéaume loge sa plainte en 2003 pour des actions qui ont eu lieu en 1999.  Il souligne qu’il a examiné le fond du dossier et il a décidé de ne pas aller plus loin.  Cette décision n’est pas contraire aux exigences du paragraphe 10(2) de la LRTFP (actuellement 185) tel qu’exprimé par la Commission dans la cause Ford c. Alliance de la Fonction publique du Canada, dossier de la CRTFP 161-2-775 (1995) (QL) :

Il existe de nombreux cas de jurisprudence tranchés par la présente Commission concernant la disposition ci-dessus.  Il n’est pas nécessaire de les résumer ici.  Qu’il suffise de dire que la Loi exige que l’agent négociateur représente ses membres équitablement et lui interdit d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi.  Cela étant dit, il ne faut pas en conclure que l’agent négociateur est devant les plus hauts tribunaux au pays.  Le membre ne jouit pas du droit absolu de se faire représenter par son agent négociateur en arbitrage.  Diverses possibilités sont offertes à l’agent négociateur et celui-ci est entièrement libre de peser les multiples facteurs qui interviennent dans une prise de décision tels que la jurisprudence pertinente, la question de savoir si le grief du membre est bien fondé, les coûts et les intérêts généraux de l’unité de négociation ainsi que d’autres considérations.

[55]   Lors de l’audience, le syndicat n’a pas déposé de preuve concluante sur la question de tardivité de la plainte.  La plaignante souligne avoir été informée des reclassifications dans les autres provinces, que bien longtemps après les événements.  Aucune des parties n’a fournit de date précise du moment où l’information sur les reclassifications fut disponible au Québec.  Compte tenu de la fragilité de la preuve et compte tenu des conclusions auxquelles j’en arrive relativement au fond du dossier, je n’ai pas tranché la question relative à la tardivité de la plainte.

[56]   Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

[57]   La plaignante n’a pu démontrer que le syndicat a enfreint les dispositions de la LRTFP en agissant de mauvaise foi, de manière arbitraire ou discriminatoire.  En conséquence, ses plaintes sont rejetées.

Le 14 juin 2005.

Jean-Pierre Tessier,
commissaire

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