Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé, classé CX-02, a présenté un grief concernant le fait qu’on ne lui a pas offert des heures supplémentaires pour un quart qui tombait lors de son jour férié désigné payé, en dépit du fait qu’il avait verbalement indiqué à son superviseur qu’il était disponible ce jour-là pour effectuer des heures supplémentaires - le fonctionnaire s’estimant lésé a allégué que cela contrevenait à la clause 21.10 - selon les lignes directrices publiées par l’employeur concernant l’application de la clause 21.10, il incombait à l’employé d’informer le superviseur qu’il était disponible - d’après la clause 26.10 de la convention collective, les agents en congé férié ont priorité, pour les heures supplémentaires, sur les agents qui ne sont pas en congé férié - le fonctionnaire s’estimant lésé a témoigné qu’il avait informé son superviseur de sa disponibilité - le superviseur n’a pas témoigné pour contredire cette déclaration et l’employeur n’a pas réfuté le témoignage du fonctionnaire s’estimant lésé sur ce point - le fonctionnaire s’estimant lésé s’est acquitté du fardeau de la preuve - le fonctionnaire s’estimant lésé avait priorité pour effectuer des heures supplémentaires sur les autres agents qui ont été appelés au travail même s’il ne s’agissait pas d’un congé férié. Grief accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P–35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2005-06-29
  • Dossier:  166-2-32748
  • Référence:  2005 CRTFP 66

Devant un arbitre de grief



ENTRE

CRAIG PURCHASE

fonctionnaire s’estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
Purchase c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant un grief renvoyé à l’arbitrage en vertu de l’article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P–35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant : Léo–Paul Guindon, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé : John Mancini, UNION OF CANADIAN CORRECTIONAL OFFICERS–SYNDICAT DES AGENTS CORRECTIONNELS DU CANADA–CSN

Pour l’employeur : Anne–Marie Lebel, stagiaire en droit


Affaire entendue à Moncton (N.–B.),
les 20 et 21 octobre 2004.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Grief renvoyé à l’arbitrage

[1]   Craig Purchase, agent correctionnel de niveau CX–02, travaille au pénitencier de Dorchester pour le Service correctionnel du Canada (SCC) depuis janvier 1998. Le 20 mai 2003, il a déposé un grief alléguant qu’on ne lui avait pas offert un quart de travail en heures supplémentaires, le 19 mai 2003.

[2]   Le 1 er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l’article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, je demeure saisi de ce renvoi à l’arbitrage, sur lequel je dois statuer conformément à l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985) ch. P–35 (l’ « ancienne Loi »).

Résumé de la preuve

[3]   Le grief était fondé sur la clause suivante de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et le UNION OF CANADIAN CORRECTIONAL OFFICERS–SYNDICAT DES AGENTS CORRECTIONNELS DU CANADA–CSN (Codes 601 et 651; date d’expiration, 31 mai 2002) (pièce G–1) :

[…]

21.10    Répartition des heures supplémentaires

Sous réserve des nécessités du service, l’Employeur fait tout effort raisonnable pour :

  1. répartir les heures supplémentaires de travail sur une base équitable parmi les employé–e–s qualifiés facilement disponibles,
  2. attribuer du travail en temps supplémentaire aux employé–e–s faisant partie du même groupe et niveau par rapport au poste à combler, p. ex. CX–1 à CX–1, CX–2 à CX–2, etc.,

    et
  3. donner aux employé–e–s, qui sont obligés de travailler des heures supplémentaires, un préavis suffisant de cette obligation.

[…]

[4]   Dans son témoignage, le fonctionnaire s’estimant lésé a déclaré qu’il était en congé férié, le 19 mai 2003, ce qui est indiqué sur le « relevé d’appel du jour » (pièce E–1). Le « relevé d’appel du jour » est affiché sur le mur 14 jours avant le début de l’horaire. Le fonctionnaire s’estimant lésé a affirmé que, lorsque le relevé a été affiché, il avait indiqué verbalement au surveillant, Graham Lewis, qu’il était disponible pour effectuer des heures supplémentaires le 19 mai 2003. Il a également apposé une étoile à côté de son nom sur le « relevé d’appel du jour » qui était affiché au mur. À son retour au travail, il a constaté que des heures supplémentaires avaient été données, sans qu’on ne l’appelle. Le fonctionnaire s’estimant lésé a expliqué que les employés en congé férié ont la priorité pour les heures supplémentaires régulières conformément à la clause 26.10 de la convention collective. La clause 26.10 se lit comme suit (pièce G–1) :

26.10   Sous réserve des nécessités du service, l'Employeur fait tout effort raisonnable pour répartir, sur une base équitable, le travail sur les postes vacants du jour férié aux employés en congé férié payé qualifiés et facilement disponibles.

[5]   Le surveillant correctionnel Larry Hicks a témoigné au nom de l’employeur. Il a expliqué que l’employé qui souhaite être rappelé au travail pour effectuer des heures supplémentaires doit en aviser le surveillant en charge. Le surveillant indique alors sur la copie de travail du « relevé d’appel du jour » en sa possession que l’agent correctionnel est disponible pour faire des heures supplémentaires en mettant une étoile à côté de son nom. Aucune étoile n’apparaissait à côté du nom du fonctionnaire s’estimant lésé sur la copie de travail du « relevé d’appel du jour » (pièce E–1). Au début du quart de travail, le surveillant en charge doit attribuer les postes aux employés affectés aux quarts de travail. Si certains postes sont vacants après cet exercice, il rappelle au travail les employés qui sont inscrits comme étant disponibles pour faire des heures supplémentaires, c’est–à–dire ceux ayant une étoile devant leur nom sur la copie de travail du relevé d’appel du jour.

[6]   Des lignes directrices confirmant la répartition des responsabilités ont été rédigées à l’automne 2002, et sont entrées en vigueur au pénitencier de Dorchester en janvier 2003 (pièce E–2). En vertu de ces lignes directrices, il incombe à l’employé qui est en congé férié d’informer son surveillant qu’il est disponible pour effectuer des heures supplémentaires : 

[…]

5) Avant de procéder à l’embauche du personnel en temps supplémentaire à partir de la liste du personnel, tous les efforts doivent être faits afin de permettre aux membres du personnel qui sont en « congé férié » sur un quart de travail particulier de combler une vacance sur un autre quart de travail dans une période de 24 heures. Il incombera à la personne bénéficiant d’un congé férié d’aviser son surveillant qu’il (elle) est disponible sur un autre quart.

[…]

[7]   Plusieurs agents correctionnels qui étaient en congé férié le 19 mai 2003 ont mis en application les lignes directrices, comme en témoigne la copie de travail du relevé d’appel du jour. D’après ce document, les agents correctionnels désignés comme disponibles pour effectuer des heures supplémentaires qui ont été appelés mais qu’il a été impossible de joindre étaient : T.J. Murphy au poste 1B et F. Savoie au poste R–4. Le document indique que D.P. Cormier, qui était disponible, a été joint et a accepté de faire des heures supplémentaires au poste T–1. R.Y. Cormier, qui était en congé férié, mais n’était pas désigné comme étant disponible pour effectuer des heures supplémentaires, a été rappelé au travail pour effectuer des heures supplémentaires au poste T–1, ainsi que D.J. Robinson (poste 4B). Deux agents correctionnels qui n’étaient pas en congé férié ont été rappelés au travail pour effectuer des heures supplémentaires (R.G. Phinney et S. Cyr). Aucune étoile n’apparaissait devant le nom du fonctionnaire s’estimant lésé sur le relevé d’appel du jour.

[8]   La copie de travail du relevé d’appel du jour indique que trois agents correctionnels ont été rappelés au travail (K. W. Fletcher, G. Desforges et J. Sanipass). M. Sanipass a été affecté au poste 6N pour remplacer B. Reade qui était en congé férié.

Résumé de l’argumentation

Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

[9]   Le représentant du fonctionnaire s’estimant lésé a fait valoir que le fonctionnaire s’estimant lésé avait informé son surveillant, M. Lewis, qu’il était disponible pour effectuer des heures supplémentaires pendant son congé férié. L’employeur n’a pas contredit la preuve. Les lignes directrices énoncent qu’un agent correctionnel doit mettre une étoile devant son nom sur l’horaire qui est affiché pour indiquer à son superviseur qu’il est disposé à effectuer des heures supplémentaires. En l’espèce, le surveillant est le seul en cause puisqu’il a omis de mettre une étoile à côté du nom du fonctionnaire s’estimant lésé sur la copie de travail de l’horaire.

Pour l’employeur

[10]   L’employeur a soutenu qu’en vertu des lignes directrices sur la répartition des heures de travail les jours fériés, l’employé devait informer son surveillant de sa disponibilité à effectuer des heures supplémentaires ce jour–là. En l’espèce, le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas démontré qu’il avait informé son surveillant en conséquence. Il aurait dû savoir que le surveillant n’appellerait que les employés inscrits comme étant disponibles sur la copie de travail de l’horaire et non sur la copie affichée sur le mur. La copie de travail de l’horaire n’indiquait pas que le fonctionnaire s’estimant lésé était disponible pour effectuer des heures supplémentaires, et le surveillant en charge le 19 mai 2003 n’a pas commis d’erreur en n’appelant pas le fonctionnaire s’estimant lésé.

Réponse

[11]   Le représentant du fonctionnaire s’estimant lésé a rétorqué que, dans sa réponse au premier palier du processus de règlement des griefs, l’employeur avait déclaré que le fonctionnaire s’estimant lésé avait tenté de se rendre disponible pour travailler le jour férié. En l’absence de contestation du témoignage du fonctionnaire s’estimant lésé, l’arbitre devrait accepter le grief.

Motifs

[12]   La preuve démontre que, le 19 mai 2003, le fonctionnaire s’estimant lésé était en congé férié. Une indication à cet égard était inscrite sur la copie de travail du « relevé d’appel du jour » pour ce jour–là, au poste 4D (unité n o 4), pour le quart de travail de 11 h à 19 h, et au poste D (secteurs récréatifs), pour le quart de 7 h à 11 h (pièce E–1).

[13]   Selon le témoignage non contredit du fonctionnaire s’estimant lésé, avant le 19 mai 2003, il a informé verbalement son surveillant, M. Lewis, qu’il était disponible pour effectuer des heures supplémentaires ce jour–là. Sur la copie de travail du « relevé d’appel du jour », rien n’indique que le fonctionnaire s’estimant lésé a informé son surveillant. Aucune étoile n’apparaît à côté de son nom, mais des étoiles apparaissent devant le nom des agents correctionnels qui ont, apparemment, informé le surveillant qu’ils étaient disponibles pour effectuer des heures supplémentaires.

[14]   D.P. Cormier, qui était en congé férié (unité n o 4, poste 4C), a été rappelé au travail et a effectué quatre heures en temps supplémentaire. Au bas du « relevé d’appel du jour », une note indique que les agents correctionnels Phinney et Cyr, qui n’étaient pas en congé férié, ont été rappelés au travail pour effectuer des heures supplémentaires.

[15]   Dans la décision que j’ai rendue dans Saindon, East et Aubertin c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada – Service correctionnel), 2002 CRTFP 73, j’ai conclu que la clause 26.10 de la convention collective accordait aux agents correctionnels en congé férié la priorité d’effectuer des heures supplémentaires aux postes vacants pendant les jours fériés. Cette interprétation n’est pas en cause dans la présente affaire. Le litige porte sur l’application des lignes directrices sur l’attribution des heures supplémentaires, conformément à la clause 26.10, qui énonce que la personne se trouvant en congé férié doit faire savoir à son surveillant qu’elle est disposée à effectuer d’autres quarts de travail. La question en l’espèce est de savoir si le fonctionnaire s’estimant lésé s’est conformé aux conditions des lignes directrices et s’il a indiqué à l’employeur qu’il était « facilement disponible » comme l’exige la clause 26.10.

[16]   Je n’ai aucun motif de refuser le témoignage du fonctionnaire s’estimant lésé selon lequel il a informé son surveillant, M. Lewis, de sa disponibilité à effectuer des heures supplémentaires le 19 mai 2003. M. Lewis n’a pas témoigné, et l’employeur n’a pas réfuté le témoignage du fonctionnaire s’estimant lésé sur ce point. Par conséquent, sur la foi de ce témoignage non contesté, je dois conclure que le fonctionnaire s’estimant lésé s’est acquitté de son fardeau de la preuve et qu’il a démontré, à ma satisfaction, qu’il avait avisé son surveillant de sa disponibilité le 19 mai 2003. Le surveillant n’a pas mis une étoile devant le nom du fonctionnaire s’estimant lésé sur la copie de travail du relevé d’appel du jour, et il est le seul à blâmer pour cela. Le libellé des lignes directrices n’exige pas de l’agent correctionnel qu’il s’assure que le surveillant inscrive une indication sur le calendrier de travail, mais il prévoit simplement que l’employé doit faire savoir à son surveillant qu’il est disposé à effectuer d’autres quarts.

[17]   La preuve démontre également que d’autres agents correctionnels n’étant pas en congé férié ont effectué des heures supplémentaires ce jour–là. N’eut été de l’erreur du surveillant en charge, qui a omis d’inscrire sur le relevé d’appel du jour qu’il était disposé à travailler, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait été rappelé au travail pour effectuer des heures supplémentaires parce qu’il avait priorité pour les postes laissés vacants pendant ce jour férié. Par conséquent, je conclus que, sans cette erreur, le fonctionnaire s’estimant lésé aurait eu droit à ces heures supplémentaires.

[18]   Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

[19]   Pour ces motifs, j’accepte le grief et j’ordonne à l’employeur de verser au fonctionnaire s’estimant lésé quatre heures de rémunération à temps et demi, comme demandé dans le grief et conformément à la clause 21.12 de la convention collective.

Le 29 juin 2005.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Léo–Paul Guindon,
arbitre de grief

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