Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a contesté le refus de l’employeur d’inclure, dans le calcul de son ancien traitement, le montant que son employeur précédent lui a versé à titre d’indemnité provisoire (IP) aux fins du calcul de sa rémunération à la nomination - son ancien employeur, la Bibliothèque du Parlement (BP), a demandé et obtenu la qualité d’intervenante, mais l’arbitre de grief a limité la portée de cette qualité à la présentation de la plaidoirie finale - la fonctionnaire s’estimant lésée a occupé un poste à la BP qui prévoyait le versement d’un salaire et d’une IP, dont le montant total faisait en sorte que sa rémunération équivalait à celle d’un poste FI-03 dans le noyau de la fonction publique - lorsque la fonctionnaire s’estimant lésée a ensuite accepté un poste dans le noyau de la fonction publique, son ministère a refusé d’inclure l’IP dans le calcul de sa rémunération à la nomination, car l’IP ne faisait pas partie du salaire que lui versait la BP, sauf pour le calcul de la pension de retraite - la politique de l’employeur concernant les conditions d’emploi est l’outil qu’il convient d’utiliser pour déterminer la rémunération appropriée - l’IP n’est pas incluse dans les taux de rémunération pour la classification du poste qu’occupait la fonctionnaire s’estimant lésée à la BP, et il était clairement indiqué dans la lettre d’offre soumise à la fonctionnaire par la BP que l’IP et la rémunération étaient deux choses distinctes - en outre, le terme << provisoire >> indique que l’indemnité est temporaire - il a été clairement précisé à la fonctionnaire s’estimant lésée que l’IP versée par la BP ne faisait pas partie du salaire, sauf pour le calcul de la pension de retraite - la préclusion ne s’applique pas, car aucune promesse ferme n’a été faite et, par conséquent, il n’y a pas eu une confiance préjudiciable. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2006-10-18
  • Dossier:  166-02-34751
  • Référence:  2006 CRTFP 114

Devant un arbitre de grief



ENTRE

JULIE LAROSE

fonctionnaire s'estimant lésée

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

employeur

et

BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT

intervenante

Répertorié
Larose c. Conseil du Trésor (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux) c. Bibliothèque du Parlement

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant : Barry Done, arbitre de grief

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée : Deborah Cooper, Association canadienne des agents financiers

Pour l'employeur : Simon Kamel, Secrétariat du Conseil du Trésor, Services juridiques

Pour l'intervenante : Paul Lalonde


Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 5 au 9 juin 2006.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Grief renvoyé à l'arbitrage

[1]    Le 3 mars 2004, la fonctionnaire s'estimant lésée, Julie Larose, a présenté un grief (pièce G-17) en déclarant : [traduction] « Je proteste contre le refus de T.P.S.G.C. de me rémunérer au taux approprié à ma nomination à mon poste actuel de FI-03 ».

[2]    Elle demande comme redressement d'être rémunérée à l'échelon d'augmentation de traitement approprié rétroactivement à la date de sa nomination. Son poste fait partie de l'unité de négociation du groupe Gestion des finances; la convention collective applicable (pièce G-1) a été conclue entre le Conseil du Trésor et l'Association des gestionnaires financiers de la fonction publique, qui a changé de nom depuis, devenant l'Association canadienne des agents financiers (ACAF). À l'audience, huit personnes ont témoigné, et les parties ont déposé 42 pièces. La Bibliothèque du Parlement a participé à l'audience et plaidé à titre d'intervenante.

[3]    La fonctionnaire s'estimant lésée a renvoyé son grief à l'ancienne Commission des relations de travail dans la fonction publique le 13 août 2004.

[4]    Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ce renvoi à l'arbitrage de grief doit être décidé conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (« l'ancienne Loi »).

[5]    Juste avant l'audience, la Bibliothèque du Parlement a informé la CRTFP de son intérêt dans l'affaire en demandant officiellement la qualité d'intervenante. On a fait tenir copie de cette demande aux parties et la CRTFP a décidé de la trancher à l'audience même. Après que la Bibliothèque du Parlement eut expliqué son intérêt et sa demande d'avoir qualité d'intervenante comme quasi-partie, avec le droit de produire une preuve, de contre-interroger les témoins et de présenter des arguments, les parties se sont fait demander leur réaction. Ni l'une, ni l'autre ne s'est opposée à la demande de la Bibliothèque du Parlement en vue d'obtenir la qualité d'intervenante; l'employeur l'a même appuyée. Après avoir pris une pause pour étudier la demande et les réactions des parties, j'ai décidé de l'accueillir, en n'autorisant toutefois la Bibliothèque du Parlement qu'à présenter une plaidoirie finale. Si j'ai décidé d'imposer cette limite à sa participation, c'était parce que :

  1. même si je comprenais que la Bibliothèque du Parlement avait un intérêt dans la décision en l'espèce, je n'étais pas convaincu de l'importance de cet intérêt;
  2. je doutais que les conséquences d'une décision pour la Bibliothèque du Parlement que je pourrais rendre puissent être aussi importantes ou directes que le disait son avocat, M. Lalonde.

Néanmoins, j'ai pris bonne note du fait que la fonctionnaire s'estimant lésée ne s'était pas opposée à la demande et que l'employeur l'avait appuyée. Les deux parties semblaient penser, tout comme M. Lalonde, que la Bibliothèque du Parlement pourrait peut-être présenter non seulement un autre point de vue, mais aussi fournir des renseignements pertinents qu'elle n'avait pas donnés aux parties lorsqu'elles les avaient demandés.

Résumé de la preuve

[6]    À la suite de cette démarche - et avant que je commence à entendre la preuve - les parties m'ont demandé un peu plus de temps pour discuter en vue d'arriver à un règlement avec mon aide. En dépit de tous nos efforts, nous avons été incapables de conclure une entente, et la représentante de la fonctionnaire s'estimant lésée a fait comparaître son premier témoin après les déclarations d'ouverture des deux parties.

[7]    Geoffrey Greenidge est actuellement analyste financier principal (MPA-04) à la Bibliothèque du Parlement. Il a brigué un poste là parce que Monique Boutin, la directrice des Finances, le lui avait suggéré. Le poste était classifié LAS-5. Je dois préciser que la Bibliothèque du Parlement a un régime de classification différent de celui du noyau de la fonction publique. M. Greenidge s'était fait dire que, s'il était le candidat heureux, on lui paierait l'équivalent du taux de traitement maximum d'un FI-03 dans le noyau de la fonction publique. Pour ce faire, on lui avait dit que la Bibliothèque du Parlement lui verserait une indemnité provisoire (IP) pour combler l'écart entre le taux de traitement d'un LAS-5 à la Bibliothèque du Parlement et celui d'un FI-03 dans la fonction publique. Cette équivalence allait être maintenue tant qu'il occuperait le poste, avec des rajustements de l'IP au besoin. M. Greenidge ne se rappelle pas s'être fait dire que l'IP faisait partie de son traitement, mais il se souvient clairement qu'on en tenait compte pour le calcul de sa pension de retraite. Il a reconnu avoir été [traduction] « plutôt naïf », mais il pensait que c'était simplement avoir du bon sens de conclure que l'IP faisait partie intégrante de son traitement; s'il avait su qu'il en était autrement, il n'aurait pas accepté l'offre d'emploi de la Bibliothèque du Parlement.

[8]    En contre-interrogatoire, M. Greenidge a avoué qu'il n'avait pas de connaissances en ressources humaines ni en rémunération, qu'il pensait que le versement d'une IP n'était qu'une façon de combler l'écart entre les taux de traitement des LAS-5 et des FI-03 et que ce n'était rien d'autre qu'une question de [traduction] « pure sémantique ». Quand on lui a montré une lettre datée du 28 juillet 2003 qui lui était adressée, dans laquelle on précisait les conditions de sa nomination par intérim à un poste de MPA-05, y compris le versement d'une IP (pièce E-1), il a reconnu qu'on lui avait déclaré que l'IP ne ferait pas partie intégrante de son traitement.

[9]    Mme Larose, la fonctionnaire s'estimant lésée, avait vu une affiche (pièce G-2) invitant les intéressés à faire acte de candidature au poste de gestionnaire des Opérations comptables à la Bibliothèque du Parlement; elle a présenté sa candidature; le poste lui a été offert. Le traitement annoncé était [traduction] « l'équivalent d'un FI-03 ». Au moment où elle s'est portée candidate, la fonctionnaire s'estimant lésée travaillait dans le noyau de la fonction publique. La lettre d'offre d'emploi qu'elle a reçue par la suite, datée du 31 octobre 2001 (pièce G-3) - offre qu'elle a fini par accepter - précisait que son traitement serait le minimum de l'échelle de rémunération des LAS-5 et qu'elle toucherait en outre une indemnité provisoire de 818 $ par mois. Le total de son traitement de LAS-5 et de l'IP amenait sa rémunération à l'équivalent de celle d'un FI-03. La spécialiste des ressources humaines Paula Ghosh l'avait assurée que l'IP [traduction] « était simplement un truc technique », en lui disant de ne pas s'en faire. Elle a accepté cet avis, et elle a commencé à travailler à la Bibliothèque du Parlement le 19 novembre 2001.

[10]    Quand elle a vu son premier talon de chèque, six semaines après ses débuts dans ce nouveau poste, la fonctionnaire s'estimant lésée s'est dit qu'elle aurait dû s'inquiéter, puisque l'IP figurait dans une autre case que son traitement. Toutefois, il semblait bien que s'inquiéter ne lui aurait pas servi à grand-chose, puisqu'elle avait déjà commencé à occuper le poste.

[11]    À la fin de 2002, Mme Larose a eu plus de quoi s'inquiéter encore, lorsqu'elle a commencé à postuler des emplois dans le noyau de la fonction publique. Ses discussions avec Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) au sujet d'une offre de poste de FI-03 ont soulevé une question fondamentale pour l'affaire qu'on me demande maintenant de trancher : en calculant la rémunération à laquelle la fonctionnaire s'estimant lésée avait droit, TPSGC devait-il inclure comme partie intégrante de son traitement à la Bibliothèque du Parlement l'IP que celle-ci lui avait versée? Si oui, la fonctionnaire s'estimant lésée allait être payée au maximum de l'échelle de traitement des FI-03. Sinon, elle serait rémunérée à un taux inférieur de deux échelons. Mme Larose a reconnu avoir vu une lettre que le directeur des Ressources humaines de la Bibliothèque du Parlement lui avait adressée en date du 27 janvier 2003 au sujet de son IP (pièce G-4). Dans la dernière phrase de cette lettre, on peut lire que l'IP ne fait pas partie du traitement à la Bibliothèque du Parlement, sauf pour le calcul de la pension de retraite. Mme Larose a témoigné qu'elle recevait une lettre analogue à la pièce G-4 chaque fois que l'IP était rajustée.

[12]    Après des échanges sur cette question qui ont duré deux mois entre les représentants de la Bibliothèque du Parlement, ceux de TPSGC et la fonctionnaire s'estimant lésée, l'intéressée a signé la lettre d'offre d'emploi de TPSGC (pièce G-7) le 1er juillet 2003; elle a accepté l'offre sous condition, en y ajoutant ce qui suit :

[Traduction]

Je poursuis mes démarches au sujet de mon traitement. Je prévois entrer en fonctions dans mon poste le 18 août 2003.

[13]    Dans la lettre d'offre d'emploi, la fonctionnaire s'estimant lésée était informée des taux de traitement d'un poste de FI-03 à TPSGC; il était précisé que son traitement serait déterminé conformément au Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique.

[14]    Pour calculer son traitement après lui avoir offert un poste, TPSGC a déclaré à Mme Larose qu'il lui fallait une confirmation de son traitement actuel à la Bibliothèque du Parlement. Le chef des Relations de travail de la Bibliothèque du Parlement a envoyé à TPSGC une lettre datée du 2 juin 2003 (pièce G-10) dans laquelle il est écrit que :

[Traduction]

[…] Pour fins de rémunération, son poste est considéré comme directement comparable à un FI-3 dans la fonction publique. Par conséquent, son revenu annuel total est […]

[15]    Quand la fonctionnaire s'estimant lésée a vu la pièce G-10, cette lettre de la Bibliothèque du Parlement sur son revenu, elle s'est dit que [traduction] « c'était un problème réglé, une affaire conclue » et que son traitement n'était plus contesté. Par conséquent, et compte tenu aussi de ce qu'elle considérait comme des pressions de Joanne Potvin, des Ressources humaines de TPSGC, qui lui avait dit : [traduction] « […] si tu ne signes pas la lettre d'offre d'emploi, nous prendrons ça comme un refus », et de l'avis de l'agent des Services ministériels William Yates, qui lui recommandait de signer cette lettre conditionnellement, de se joindre à TPSGC et de demander à son syndicat de l'aider à obtenir la directive nécessaire de la Bibliothèque du Parlement, elle a signé la lettre d'offre d'emploi en étant convaincue que le risque était très mince. TPSGC avait encore besoin d'une confirmation de la Bibliothèque du Parlement que Mme Larose n'avait pas bénéficié d'un traitement préférentiel avec son IP (pièce G-12, courriel du 19 juin 2003), en demandant à son ancien employeur un bulletin ou une directive officiels stipulant que tous les employés de la Bibliothèque du Parlement étaient traités de la même façon à cet égard. La Bibliothèque du Parlement a informé TPSGC le 18 novembre 2003 (pièce G-13) qu'elle n'était pas disposée à lui fournir un document interne concernant l'IP. Comme la fonctionnaire s'estimant lésée était convaincue qu'il existait un document de ce genre, elle a décidé de se le procurer en présentant une demande d'accès à l'information, avec l'aide d'un représentant syndical (pièce G-3, courriel du 25 novembre 2003).

[16]    En contre-interrogatoire, la fonctionnaire s'estimant lésée a avoué qu'elle connaissait la position de TPSGC, selon M. Yates (pièce G-12, courriel du 19 juin 2003) : l'IP ne serait prise en compte pour le calcul de son traitement que s'il était prouvé que son arrangement à la Bibliothèque du Parlement n'était pas une procédure officieuse. Elle a aussi avoué qu'elle savait, après avoir pris connaissance de la pièce G-4, la lettre de la Bibliothèque du Parlement concernant l'IP, que celle-ci ne considérait pas l'IP comme faisant partie intégrante de son traitement, et que cette interprétation était compatible avec une lettre de la Bibliothèque du Parlement datée du 6 juin 2003 (pièce E-2) qui lui avait été adressée. Le 19 juin 2003, Monique Côté, conseillère en rémunération à TPSGC, a informé l'intéressée (pièce E-4) que TPSGC ne tiendrait pas compte de la partie de son traitement correspondant à l'IP sur l'avis du Conseil du Trésor, puisque la Bibliothèque du Parlement ne pouvait pas lui fournir un document officiel stipulant que cette IP faisait effectivement partie intégrante de son traitement chez cet employeur.

[17]    Murielle Boucher, directrice de projet opérationnel (Projet de la transformation des systèmes financiers) à TPSGC, avait été détachée de ce ministère à la Bibliothèque du Parlement à l'automne 1997 comme chef des Services financiers. On s'attendait à ce qu'un processus de classification comble l'écart salarial entre les postes de la Bibliothèque du Parlement et leurs équivalents dans la fonction publique, mais comme cette démarche n'a pas abouti, la Bibliothèque du Parlement a décidé de se servir d'une IP pour assurer l'équivalence voulue. La rémunération de Mme Boucher était composée de son traitement et de l'IP, mais elle pensait que l'IP faisait partie intégrante de son traitement; elle le disait aux candidats lorsqu'elle recrutait dans la fonction publique. Quand elle a quitté la Bibliothèque du Parlement pour rentrer dans la fonction publique, en avril 2005, on ne s'est servi que de son traitement de base là-bas, compte non tenu de l'IP, pour calculer son nouveau taux de traitement. Mme Boucher n'avait jamais vu de directive sur l'IP, mais elle a confirmé s'être fait dire chaque année quelle serait l'IP qu'elle allait toucher, sauf l'année pendant laquelle on ne lui a pas versé d'IP.

[18]    Quand la fonctionnaire s'estimant lésée a parlé à Mme Boucher de ses propres problèmes de calcul de son traitement, celle-ci a été étonnée; elle a commencé à dire aux candidats qu'elle tentait de recruter que la rémunération à la Bibliothèque du Parlement était constituée du traitement et d'une IP, ce qui rendait difficile sa tâche de recruter dans la fonction publique.

[19]    En contre-interrogatoire, Mme Boucher a déclaré que, même si elle avait reçu des copies de la pièce G-4, la lettre stipulant que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement, elle ne l'avait jamais lue. Elle n'avait jamais demandé de directive sur l'administration de l'IP, mais elle était convaincue que, si l'on en tenait compte pour le calcul de la pension de retraite, elle faisait partie intégrante de son traitement. Elle savait que l'IP variait, mais elle pensait que c'était une partie permanente de sa rémunération, même quand on l'appelait une « indemnité provisoire ».

[20]    Mme Boutin, qui est actuellement directrice des Finances et de la gestion du matériel, a débuté à la Bibliothèque du Parlement en avril 1997. Comme elle était chargée de former une équipe qui assurerait tous les services financiers, elle avait des responsabilités de recrutement. Pour être en mesure d'attirer du personnel de la fonction publique, la Bibliothèque du Parlement avait trouvé l'idée de l'IP [traduction] « […] comme moyen qui me permettrait d'attirer des gens qui avaient des connaissances, de la compétence et de l'expérience ».

[21]    Selon elle, l'IP faisait partie intégrante de la [traduction] « rémunération globale », mais, comme elle était consciente de la situation de la fonctionnaire s'estimant lésée, elle a dit estimer que le recours à l'IP [traduction] « n'était pas la solution ». Actuellement, elle ne recrute que du secteur privé ou, quand c'est de la fonction publique, lorsque les postes des fonctionnaires intéressés sont vulnérables. Si elle agit ainsi, c'est parce que [traduction] « […] personne n'accepterait en sachant qu'il serait rétrogradé quand il partirait ». Même si elle n'a pas participé aux négociations sur le traitement de la fonctionnaire s'estimant lésée, elle a dit être d'avis que l'IP [traduction] « […] était empoisonnée, parce qu'elle rendait les bénéficiaires prisonniers de la Bibliothèque du Parlement étant donné que leur rémunération allait diminuer s'ils la quittaient ». Et c'était regrettable, car la fonctionnaire s'estimant lésée avait dépassé toutes les attentes et qu'elle était une très, très bonne employée.

[22]    En contre-interrogatoire, Mme Boutin a déclaré qu'elle ne savait pas, lorsqu'elle avait commencé à recruter du personnel, si l'IP faisait partie intégrante du traitement ou non, mais qu'elle avait fini par se rendre compte qu'elle [traduction] « […] vendait une fausseté ». Comme la Bibliothèque du Parlement était une petite organisation, les employés n'y restaient pas éternellement; elle servait en quelque sorte de tremplin. Il n'était pas important pour Mme Boutin, à l'époque, de savoir si l'IP faisait partie intégrante du traitement, puisque c'était simplement pour elle un moyen d'attirer des gens, et toutes les distinctions qu'on aurait pu faire entre la rémunération globale et le traitement n'étaient pour elle qu'une question de sémantique.

[23]    Jennifer Sweet a été appelée à témoigner pour l'employeur. Elle a été embauchée par la Bibliothèque du Parlement en avril 2001 comme conseillère en rémunération; elle est actuellement chef de la Rémunération par intérim. Elle a déclaré que l'IP n'a jamais fait partie intégrante du traitement à la Bibliothèque du Parlement, sauf pour le calcul de la pension de retraite, et que c'était clair dès son introduction en 2000 (pièce E-5, 13 mars 2000). Mme Sweet a identifié la pièce E-6 - les taux de rémunération du groupe LAS à la Bibliothèque du Parlement - et les pièces E-7 et E-8, des listes des taux de traitement du groupe MPA, de 2000 à 2004.

[24]    Elle a identifié aussi la pièce E-9, datée du 7 février 2001 et signée par le bibliothécaire du Parlement. C'est dans ce document que la politique de la Bibliothèque du Parlement sur le versement de l'IP est expliquée. Elle résulte de la demande de la Bibliothèque du Parlement, en mars 2000 (pièce E-5), qu'on crée une IP pour certains employés non syndiqués. La politique précise que l'IP ne fait pas partie intégrante du traitement à la Bibliothèque du Parlement, sauf pour le calcul de la pension de retraite. Des documents analogues produits par la Bibliothèque du Parlement en date du 30 mai 2002 (pièce E-10) et du 31 mars 2003 (pièce E-11) le répètent.

[25]    Comme les groupes LAS et MPA ne sont pas syndiqués, leurs conditions d'emploi durant la période pertinente sont exposées dans un document daté du 4 octobre 1999 (pièce E-12); elles sont restées en vigueur jusqu'au 27 septembre 2004. La fonctionnaire s'estimant lésée s'est fait remettre ce document le 19 novembre 2001, le jour où elle a commencé à travailler à la Bibliothèque du Parlement, en même temps que 16 autres documents.

[26]    En contre-interrogatoire, Mme Sweet a reconnu que, durant la période en question, elle était à la fois l'employée la plus fraîchement recrutée et celle qui occupait le poste le moins élevé dans la hiérarchie des Ressources humaines. Elle n'a pas non plus participé personnellement au concours qui avait mené à la nomination de Mme Larose, ni aux négociations de son traitement avec TPSGC. Quand on lui a montré la pièce G-3, la lettre d'offre d'emploi de la Bibliothèque du Parlement à la fonctionnaire s'estimant lésée, elle a reconnu qu'il n'y était pas expressément précisé que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement, mais elle a déclaré qu'on le précise actuellement dans les lettres d'offre de la Bibliothèque du Parlement. L'IP varie selon les taux de traitement négociés des FI et, contrairement à ces taux, elle n'est pas approuvée par la Chambre des communes ni par le Sénat, puisque la Bibliothèque du Parlement est une entité distincte de la fonction publique. Mme Sweet avait vu la pièce G-10, la lettre de la Bibliothèque du Parlement à TPSGC au sujet du revenu annuel de la fonctionnaire s'estimant lésée, et elle a confirmé que l'IP n'y est pas mentionnée.

[27]    Beatrice Rogier est actuellement gestionnaire de la Rémunération à Environnement Canada; elle occupait auparavant le même emploi à TPSGC. En sa qualité de conseillère en rémunération, Mme Côté a été la première personne chargée du dossier de la fonctionnaire s'estimant lésée. Mme Rogier a commencé à s'en occuper après que l'intéressée eut quitté la Bibliothèque du Parlement. Comme la demande de Mme Larose que l'IP que la Bibliothèque du Parlement lui versait soit incluse dans son traitement était inhabituelle, Mme Côté avait demandé l'aide de Mme Rogier et demandé aussi un avis au Conseil du Trésor. À l'époque, la fonctionnaire s'estimant lésée était en congé non payé de TPSGC et elle avait accepté un poste dans un autre ministère, de sorte qu'elle était en situation de double emploi, ce qui est prévu dans la pièce E-15a), sur les nominations pour des périodes spécifiées au cours d'une période de congé payé prolongée (double emploi), telle que modifiée le 19 décembre 2003, et dans la pièce E-15b), l'Annexe A de cette pièce E-15a), telle que modifiée le 19 décembre 2003. Mme Rogier a appliqué ces politiques dans le cas de la fonctionnaire s'estimant lésée pour calculer son taux de traitement lorsqu'elle a appris, dans une lettre de la Bibliothèque du Parlement, que l'intéressée avait été nommée pour une période indéterminée chez cet employeur. Mme Rogier a dit qu'il lui aurait fallu une confirmation écrite du traitement de Mme Larose à la Bibliothèque du Parlement et qu'elle n'a jamais reçu cette confirmation.

[28]    En contre-interrogatoire, Mme Rogier a déclaré que TPSGC ne savait pas, au départ, que la fonctionnaire s'estimant lésée était à la fois en congé non payé et au service d'un autre employeur.

[29]    M. Yates est actuellement agent des Services ministériels de rémunération au ministère de la Justice. Son ancien poste à TPSGC était analogue. Pendant qu'il travaillait à TPSGC, s'il y avait une question litigieuse dans un dossier et que ni le superviseur, ni l'agent de rémunération ne pouvaient résoudre le problème, l'affaire lui était renvoyée, comme ce fut le cas pour le dossier de la fonctionnaire s'estimant lésée en mars 2003. Après avoir consulté le Conseil du Trésor, M. Yates a conclu que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement de l'intéressée.

[30]    On se demandait sur quel traitement se baser pour calculer celui de Mme Larose dans son nouveau poste : son traitement comme FI-02 quand elle était partie de TPSGC en congé non payé ou son traitement à la Bibliothèque du Parlement. Normalement, on se base sur le traitement chez l'employeur distinct, mais M. Yates a demandé l'avis du Conseil du Trésor. Il s'est fait répondre que, pour qu'on puisse se baser sur le traitement de Mme Larose à la Bibliothèque du Parlement, il aurait d'abord fallu qu'elle démissionne de TPSGC. Cette option a été rejetée parce que déraisonnable; il a donc été décidé qu'on se baserait sur le traitement que l'intéressée avait touché à la Bibliothèque du Parlement pour calculer celui de son nouveau poste. L'avis du Conseil du Trésor à M. Yates figure dans la pièce E-17, un courriel daté du 16 juin 2003. M. Yates a témoigné que, même après de nombreuses tentatives, il n'avait pas pu obtenir de la Bibliothèque du Parlement l'information que le Conseil du Trésor exigeait. Comme la Bibliothèque du Parlement refusait de lui fournir le seul document qui aurait pu résoudre le problème, on a décidé que, faute de preuve du contraire, l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement.

[31]    La seule promesse qu'on ait faite alors à la fonctionnaire s'estimant lésée, c'est que TPSGC recalculerait son traitement si la Bibliothèque du Parlement révisait son échelle de traitement, et que si TPSGC obtenait la preuve que l'IP faisait partie intégrante du traitement à la Bibliothèque du Parlement, il l'inclurait lui aussi dans le traitement qu'elle y touchait.

[32]    En contre-interrogatoire, M. Yates s'est fait poser des questions sur ce qu'il avait déclaré dans la pièce E-17, le courriel daté du 16 juin 2003 confirmant l'avis du Conseil du Trésor, à savoir [traduction] « […] que la Bibliothèque du Parlement [avait] produit un courriel déclarant que l'indemnité de maintien en poste faisait partie du traitement, mais que, après un suivi, elle n'[avait] pas pu produire de directive ni de politique […] » Il a expliqué que ce courriel avait été produit par Ghislaine Lacroix, de la Bibliothèque du Parlement. TPSGC voulait essentiellement que tout le monde soit traité de la même façon. Il a dit se rappeler une conversation qu'il avait eue en fin de semaine avec la fonctionnaire s'estimant lésée, quand il lui avait dit qu'il n'y avait aucun risque pour elle à signer la lettre d'offre, en déclarant que le Règlement sur les conditions d'emploi dans la fonction publique s'appliquerait, tout comme d'ailleurs les avis reçus du Conseil du Trésor.

[33]    Mme Côté est conseillère en rémunération et chef d'équipe par intérim à Environnement Canada depuis le 7 février 2005. Elle faisait auparavant le même travail à TPSGC, où elle relevait de Mme Rogier. Elle a expliqué comment on applique les règles sur la rémunération de la Politique sur les conditions d'emploi dans la fonction publique (pièce E-18). En appliquant les règles du paragraphe 24, elle a déterminé que la nomination de Mme Larose constituait une promotion. Ensuite, elle a calculé son nouveau taux de traitement en partant de son traitement comme FI-02 à TPSGC, quand elle avait commencé son congé non payé, puisqu'elle ne savait pas alors que la fonctionnaire s'estimant lésée avait été nommée pour une période indéterminée à la Bibliothèque du Parlement. Quand Mme Larose lui a demandé de se baser sur son traitement chez cet employeur, Mme Côté a consulté sa superviseure, Mme Rogier, après quoi elle a recalculé le traitement de Mme Larose (pièce G-9, courriel du 13 mars 2003). Ce traitement était inférieur à celui que Mme Larose avait demandé; Mme Côté a donc obtenu l'écran des traitements de la Bibliothèque du Parlement (pièce G-19), dans lequel elle a vu qu'il y avait une colonne pour le traitement de base et un code correspondant à l'indemnité qui était aussi versée. Le 19 juin 2003, Mme Côté a envoyé un courriel à Mme Larose pour lui confirmer quel serait son nouveau traitement si elle acceptait le poste de FI-03. Par la suite, quand la Bibliothèque du Parlement a confirmé qu'il y avait eu une révision de l'échelle de traitement du groupe MPA, le traitement de Mme Larose a été encore recalculé, pour de bon cette fois-là.

[34]    En contre-interrogatoire, Mme Côté a dit qu'elle avait considéré la fonctionnaire s'estimant lésée comme étant en congé non payé jusqu'en février 2003, quand elle a su que celle-ci avait été nommée pour une période indéterminée à son poste à la Bibliothèque du Parlement. Mme Lacroix lui avait dit que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement, et que c'était pour cette raison que la Bibliothèque du Parlement ne pouvait pas produire de document officiel déclarant qu'elle en faisait partie.

Résumé de l'argumentation

Arguments de l'agent négociateur

[35]    Le montant supplémentaire payé par la Bibliothèque du Parlement était un paiement de parité ou de rajustement et non une IP. Il faisait donc partie intégrante du traitement. L'IP n'a pas été mentionnée à la fonctionnaire s'estimant lésée ni incluse dans l'affiche annonçant le poste qu'elle avait brigué (pièce G-2). Elle n'était pas mentionnée non plus dans la lettre d'offre d'emploi (pièce G-3), ni dans le document sur les conditions d'emploi (pièce G-12) qui a été remis à l'intéressée à son premier jour de travail. Tout cela est compatible avec les déclarations de tous les quatre témoins que la fonctionnaire s'estimant lésée a fait comparaître, à savoir qu'on ne lui avait pas montré de document précisant que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement. D'ailleurs, Mme Boucher et Mme Boutin ne le savaient pas non plus, tant qu'elles n'ont pas été informées du problème de l'intéressée.

[36]    Mme Boucher et M. Greenidge pensaient que le montant de l'IP était négocié et fixé et qu'on ne pouvait la retirer qu'en négociant, puisqu'on ne leur avait jamais montré les pièces E-9, E-10 ou E-11, c'est-à-dire les documents qui avaient créé et maintenu l'IP. Même Tarik W. Lacene, chef des Relations de travail à la Bibliothèque du Parlement, avait employé l'expression [traduction] « traitement total » dans sa lettre à TPSGC (pièce G-10), sans mentionner le moindrement que le traitement était séparé en deux composantes et sans mentionner non plus une IP. Dans la pièce G-12, Mme Lacroix a déclaré que le traitement de la fonctionnaire s'estimant lésée était son traitement total y compris l'indemnité, et même si Mme Côté se rappelle s'être fait dire le contraire par Mme Lacroix, aucun écrit ne corrobore cette partie de son témoignage.

[37]    La recherche de Mme Cooper dans la jurisprudence a révélé que les cas où il était question d'indemnités provisoires se déroulaient dans un environnement syndiqué où une convention collective était en vigueur. On m'a renvoyé à Billett c. Conseil du Trésor (ministère des Anciens combattants), 2006 CRTFP 28; Parker c. Conseil du Trésor (Archives nationales du Canada), 2004 CRTFP 13; et Boudreau c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), 2002 CRTFP 84. À son avis, il n'existait pas d'indemnité provisoire pour des employés non syndiqués.

[38]    Subsidiairement, Mme Cooper est d'avis qu'on ne devrait pas permettre à l'employeur de prôner l'application stricte des règles sur la rémunération, puisque le principe de préclusion s'applique. La fonctionnaire s'estimant lésée était convaincue que la question allait être tranchée en sa faveur, sur la foi de la lettre de M. Lacene à TPSGC (pièce G-10) et du courriel de M. Yates (pièce G-12) dans lequel celui-ci déclarait que TPSGC pourrait inclure l'IP dans son traitement pourvu qu'on puisse prouver que la pratique n'était pas une procédure officieuse. Ces documents, combinés avec les courriels (dans la pièce G-9) de M. Yates, signifiaient que la seule question à trancher consistait à savoir si l'intéressée avait bénéficié d'un traitement de faveur à la Bibliothèque du Parlement, et que M. Yates était d'avis que TPSGC allait obtenir de la Bibliothèque du Parlement un document qui suffirait.

[39]    C'est pour cette raison que la fonctionnaire s'estimant lésée a accepté le conseil de M. Yates, qui lui avait dit de se joindre à TPSGC, de signer la lettre d'offre en déclarant que la question du traitement restait à régler, et qu'elle pouvait signer sans risque. Les pressions que Mme Potvin avait exercées sur elle avaient aussi contribué à sa décision, puisqu'elle lui avait déclaré que, si elle ne signait pas la lettre d'offre d'emploi, ce serait interprété comme un refus. La fonctionnaire s'estimant lésée est une personne intelligente et raisonnable : il serait donc illogique que je conclue, selon sa représentante, qu'elle aurait signé pour accepter l'offre d'emploi si elle avait cru qu'il y avait une chance qu'elle n'obtienne pas le traitement attendu.

[40]    Ce qui jouait à son détriment, c'est qu'elle aurait perdu d'autres possibilités à la Bibliothèque du Parlement.

[41]    Pour étayer sa position sur le principe de préclusion, on m'a renvoyé à quatre décisions : Molbak c. Conseil du Trésor (Revenu Canada, Impôt), dossier de la CRTFP 166-2-26472 (1995) (QL); Pacific Press Ltd. v. Vancouver-New Westminster Newspaper Guild, Local 115 (1987), 31 L.A.C. (3d) 411; Lansey c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration Canada), dossier de la CRTFP 166-02-25569 (1994) (QL); et Webb c. Conseil du Trésor (Affaires étrangères et Commerce international), dossier de la CRTFP 166-2-28379 (1998) (QL).

[42]    Mme Cooper a terminé en me demandant de conclure que l'IP fait partie intégrante du traitement et qu'on a fait à la fonctionnaire s'estimant lésée des promesses auxquelles elle était censée se fier, ce qu'elle a fait à son détriment. Elle me demande de rester saisi de l'affaire au sujet des calculs nécessaires, dans l'éventualité où j'accueillerais le grief.

Arguments de l'employeur

[43]    M. Kamel a décidé de commencer par répondre aux arguments de Mme Cooper, après quoi il a présenté les principaux arguments de l'employeur.

Réponse aux arguments de Mme Cooper

[44]    Les calculs mathématiques de Mme Côté étaient corrects puisqu'elle a utilisé les règles sur la paye comme elle l'a expliqué, sauf que son point de départ n'était pas bon. La charge de la preuve incombe en l'occurrence à l'agent négociateur, qui aurait pu, s'il l'avait souhaité, faire comparaître et Roland Bonaventure, le directeur des Ressources humaines, et Mme Lacroix. Quoi qu'il en soit, la pièce G-4, c'est-à-dire la lettre de M. Bonaventure à la fonctionnaire s'estimant lésée au sujet de l'IP, est claire : l'IP ne fait pas partie intégrante du traitement. Ce fait est compatible avec ce qu'on peut lire dans les pièces E-9 à E-11, les documents qui ont créé et maintenu l'IP, et ils sont clairs eux aussi.

[45]    Le fait que certains employés ont mal interprété les politiques de la Bibliothèque du Parlement n'en change pas la véritable nature, à savoir que l'IP ne fait pas partie intégrante du traitement.

[46]    Contrairement à ce que Mme Cooper a prétendu, il n'est pas question dans la pièce G-10, produite par la Bibliothèque du Parlement, du [traduction] « traitement », mais bien du [traduction] « revenu annuel total », ce qui pourrait comprendre bien des choses. L'argument de Mme Cooper qu'on n'a jamais cessé de verser l'IP, mais qu'on a simplement cessé de la verser quand elle n'était plus nécessaire, n'est que pure sémantique. La fonctionnaire s'estimant lésée n'a pas été incitée par TPSGC à aller travailler pour la Bibliothèque du Parlement. Elle y a accepté un autre poste auquel elle a été nommée pour une période indéterminée pendant qu'elle était en congé non payé, et ce sans demander à TPSGC quelles seraient les conséquences si elle décidait d'y revenir.

[47]    L'interprétation de la fonctionnaire s'estimant lésée voulant que la seule question à trancher consiste à décider si l'IP était incluse dans son traitement par suite d'un arrangement officiel ou officieux ne tient pas. La pièce G-12, un courriel de M. Yates dont elle a reçu copie, montre clairement ce dont TPSGC avait besoin : savoir si l'IP était considérée comme partie intégrante du traitement pour tous les employés.

[48]    Quant à la déclaration de la fonctionnaire s'estimant lésée au sujet de ce que M. Yates lui aurait dit, qu'elle ne courait aucun risque à signer la lettre d'offre, ce qui aurait dû être clair dans son esprit, c'est que si la Bibliothèque du Parlement révisait son échelle de traitements, comme elle l'a fait, elle en bénéficierait, et elle en a bénéficié. Si M. Yates lui a fait une autre promesse, elle était conditionnelle : [traduction] « […] si nous recevons de la Bibliothèque du Parlement une lettre qui répond à nos exigences, TPSGC va inclure l'IP dans le calcul de votre traitement. » La fonctionnaire s'estimant lésée elle-même a reconnu que les choses étaient encore en l'air et qu'elle espérait que la solution lui serait favorable. Cela montre qu'on ne lui avait pas fait de promesse non équivoque.

[49]    Le fait que l'affiche de la Bibliothèque du Parlement (pièce G-2) ne faisait aucune mention de l'IP est sans importance, car la prime au bilinguisme qui a été versée à la fonctionnaire s'estimant lésée n'y était pas mentionnée non plus.

Principaux arguments de l'employeur

[50]    Cette affaire concerne la Bibliothèque du Parlement et c'est là qu'elle aurait dû être tranchée, peut-être par la procédure de règlement des griefs qui figure dans la pièce E-14, le document sur les conditions d'emploi. Quoi qu'il en soit, la réponse au problème de la fonctionnaire s'estimant lésée se trouve à la Bibliothèque du Parlement, dont les documents montrent clairement que l'IP n'a jamais fait partie intégrante du traitement. On m'a renvoyé au document initial réclamant la création de cette indemnité (pièce E-5, mars 2000). Ni la conviction de la fonctionnaire s'estimant lésée, ni les souvenirs collectifs des témoins ne peuvent changer l'évidence même. Prises comme un tout, les pièces E-5 et E-9 à E-11 prouvent sans l'ombre d'un doute que l'IP ne faisait pas partie intégrante du traitement, sauf pour le calcul de la pension de retraite.

[51]    TPSGC a eu raison d'agir avec prudence, puisque la preuve démontre que, s'il avait payé le traitement demandé, il aurait dû recouvrer le trop-payé. Quelle que soit la façon de décrire le paiement additionnel - comme une IP ou comme un paiement de rattrapage pour assurer une parité salariale - la question reste la même : ce paiement fait-il partie intégrante du traitement?

[52]    En ce qui concerne le principe de préclusion, on m'a renvoyé à Canadian Labour Arbitration, de Brown et Beatty, 3e édition, paragr. 2:2211. Les quatre éléments essentiels de ce principe sont les suivants :

    1. une déclaration claire et non équivoque;
    2. cette déclaration doit être faite pour qu'on s'y fie;
    3. le fait qu'on s'est fié à la déclaration;
    4. le détriment en résultant.

[53]    M. Kamel a fait valoir que, comme dans Roach c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2006 CRTFP 3, la promesse en question n'était pas sans équivoque, mais conditionnelle. Il m'a rappelé le témoignage de M. Yates dans lequel le mot « si » était critique. Tout ce qu'il avait promis, c'est qu'il ferait quelque chose si quelque chose d'autre arrivait.

[54]    Pour ce qui est de se fier à une déclaration à son détriment, M. Kamel m'a renvoyé à Ellement c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), dossier de la CRTFP 166-2-27688 (1997) (QL), une décision dans laquelle, au paragraphe 36, l'arbitre de grief a conclu que le principe de préclusion ne saurait s'appliquer si l'on ne peut pas prétendre s'être fié à une déclaration à son détriment. Or, la preuve a démontré que la fonctionnaire s'estimant lésée avait refusé une offre d'Agriculture Canada avant d'en recevoir une de TPSGC et que l'emploi à cet autre ministère ne l'intéressait pas de toute façon.

[55]    La pièce E-2, une lettre de la Bibliothèque du Parlement à la fonctionnaire s'estimant lésée, lui a clairement fait savoir dès le 6 juin 2002 que l'IP ne faisait pas partie de son traitement, sauf pour le calcul de sa pension de retraite.

[56]    Mme Larose ne s'est jamais fait dire que son IP serait considérée comme faisant partie de son traitement si elle acceptait l'offre d'emploi de TPSGC. Ses notes manuscrites, rédigées près de deux mois après réception de cette offre, révèlent que rien n'était encore résolu dans son esprit (pièce G-7) : [traduction] « Je poursuis mes démarches […] » On ne peut pas non plus conclure en toute équité qu'elle a subi des pressions indues puisqu'on sait qu'il lui a fallu presque deux mois, du 9 mai au 1er juillet 2003, pour accepter l'offre d'emploi.

Arguments de l'intervenante

[57]    La Bibliothèque du Parlement n'a pas compétence pour payer une indemnité en tant que partie intégrante du traitement, d'après les pièces E-5 et E-9 à E-11. Même si je devais conclure que, lorsqu'elle a été recrutée, des représentants de la Bibliothèque du Parlement ont dit à la fonctionnaire s'estimant lésée que l'IP faisait partie de son traitement, cela n'aurait aucune incidence sur le résultat. La preuve a démontré que TPSGC n'allait tenir compte de l'IP dans le calcul du traitement de l'intéressée que si la Bibliothèque du Parlement lui produisait un document justificatif, ce qu'elle n'a pas fait.

[58]    TPSGC a posé des conditions pour accepter de reconnaître l'IP comme partie intégrante du traitement, et ces conditions n'ont pas été respectées. La preuve produite à l'audience a montré que l'IP n'a jamais fait partie du traitement, sauf pour le calcul de la pension de retraite (pièces E-5 et E-9 à E-11).

[59]    Même si je devais conclure que la Bibliothèque du Parlement a fait des déclarations contraires à des directives pourtant claires, M. Lalonde a fait valoir que ces déclarations refléteraient un arrangement spécial qui n'était pas applicable à tous les employés et qui serait donc inacceptable pour TPSGC de toute manière (pièce G-12). Il m'a pressé de ne pas conclure que de telles déclarations avaient été faites, puisque cela n'aurait de toute façon aucune incidence sur la question à trancher. De même, les déclarations verbales qui auraient été faites, si c'est le cas, ont été corrigées par écrit en juin 2002 (pièce E-2), et cela a été confirmé six mois plus tard dans la pièce G-4.

[60]    Peu après être arrivée à la Bibliothèque du Parlement, la fonctionnaire s'estimant lésée a compris que l'IP était distincte de son traitement, mais elle a continué à travailler là pendant deux ans. Elle aurait pu présenter un grief, mais elle ne l'a pas fait. M. Lalonde a fait valoir qu'elle avait souscrit à une nouvelle condition de son contrat de travail, ou qu'elle avait accepté cette nouvelle condition, en restant à la Bibliothèque du Parlement sans présenter de grief. À cet égard, il m'a renvoyé à Swanwick v. Desautels (1999), 141 Man. R. (2d) 138, [2000] 6 W.W.R. 496.

[61]    Enfin, la Bibliothèque du Parlement n'est nullement tenue de fournir à TPSGC un document interne tel que les pièces E-5 ou E-11, concernant l'IP, ni d'aider Mme Larose à quitter son service.

Réplique pour la fonctionnaire s'estimant lésée

[62]    Dans sa réplique aux arguments de l'employeur, Mme Cooper a dit être convaincue de s'être acquittée de la charge de la preuve. Elle a déclaré que Mme Larose n'avait accepté aucun changement de ses conditions d'emploi et que si TPSGC, par l'intermédiaire de M. Yates, s'était montré plus « agressif » dans cette affaire, elle ne se serait pas fiée à ce qu'il lui a dit à son détriment.

[63]    Elle m'a renvoyé à la décision rendue dans Pacific Press pour étayer son argument : lorsque le message est clair même quand une promesse est équivoque, on peut invoquer le principe de préclusion. Elle a conclu en me rappelant que la situation a joué au détriment de Mme Larose de deux façons :

1.)
à cause de la différence de traitement entre l'échelon auquel elle a été nommée et le maximum de l'échelle auquel elle aurait été nommée si TPSGC avait inclus l'IP dans son traitement;
2.)
parce qu'elle aurait pu aller occuper le poste de M. Greenidge à la Bibliothèque du Parlement, où elle aurait pu acquérir un nouvel ensemble d'habiletés.

Motifs

[64]    Comme M. Kamel l'a souligné, la charge de la preuve incombe à la fonctionnaire s'estimant lésée, en l'espèce. Dans son grief, la pièce G-17, Mme Larose déclare que TPSGC a refusé de la payer au taux approprié à sa nomination. La pièce G-7, la lettre d'offre d'emploi de TPSGC à l'intéressée, stipule que sa nomination prenait effet le 18 août 2003, et elle veut être payée au taux approprié rétroactivement à cette date-là.

[65]    Quel est donc le taux approprié? Les parties ont convenu que la pièce E-18, la Politique sur les conditions d'emploi dans la fonction publique, est l'instrument dont il faut se servir pour déterminer le traitement d'un fonctionnaire. Le fait est, d'ailleurs, que la pièce G-1 - la convention collective - stipule, à la clause 55.01, que : « Sauf selon qu'il est stipulé dans le présent article, les conditions régissant l'application de la rémunération aux employé-e-s ne sont pas modifiées par la présente convention ». Les parties ont aussi convenu que les calculs mathématiques de Mme Côté basés sur la pièce E-18 sont impeccables. Sur ce quoi elles ne s'entendent pas, c'est sur ce qu'on devrait considérer comme ayant été le traitement de Mme Larose à la Bibliothèque du Parlement pour appliquer les règles d'administration de la paye et pour déterminer quel devait être son nouveau traitement à TPSGC. La confusion résulte du fait que la fonctionnaire s'estimant lésée a touché une IP à la Bibliothèque du Parlement. L'intéressée est convaincue que, pour que TPSGC la paye à l'échelon de traitement approprié, l'IP doit être incluse dans son traitement à la Bibliothèque du Parlement pour calculer quel doit être son traitement à TPSGC, qui est convaincu pour sa part qu'on ne peut pas considérer l'IP comme faisant partie intégrante du traitement, et qui a donc décidé de se fonder seulement sur le traitement de base de la fonctionnaire s'estimant lésée, sans tenir compte de l'IP.

[66]    Trancher cette question va régler le grief.

[67]    Je vais commencer par l'argument de Mme Cooper, à savoir que, peu importe comment on appelle la somme additionnelle qui a été payée à Mme Larose, ce n'était pas une IP, de sorte qu'elle devait faire partie de son traitement, et je ne puis souscrire à ce raisonnement. Le poids de la preuve contre lui est écrasant. La pièce G-3, la lettre d'offre d'emploi de la Bibliothèque du Parlement, semble claire sur ce point, puisqu'on peut lire au premier paragraphe : [traduction] « […] votre traitement sera au minimum de l'échelle de traitement des LAS-5 ».

[68]    Il existe donc de toute évidence une échelle de traitement à la Bibliothèque du Parlement, et la pièce E-6 le confirme.

[69]    Dans cette pièce E-6, où l'on trouve les échelles de traitement des employés non syndiqués, nous trouvons notamment celle des LAS-05. Le 19 novembre 2001, quand la fonctionnaire s'estimant lésée a commencé à travailler à la Bibliothèque du Parlement, il y avait cinq échelons dans cette échelle, le moins élevé étant précisément le traitement mentionné dans la lettre d'offre d'emploi. Je note que les taux de traitement ne comprennent pas d'indemnité provisoire et que le document était signé par le bibliothécaire du Parlement ainsi que par les présidents de la Chambre des communes et du Sénat.

[70]    Qui plus est, la classification LAS a changé de nom, elle est devenue celle des MPA, dont l'échelle de traitement figure aux pièces E-7, E-8 et E-20; or, on n'y trouve nulle part une indemnité provisoire.

[71]    La distinction entre le traitement et l'indemnité provisoire est évidente aussi dans la lettre d'offre d'emploi, où l'on commence par préciser quel sera le traitement annuel de la fonctionnaire s'estimant lésée, puis poursuit en stipulant qu'elle va aussi toucher une indemnité mensuelle. Le fait que cette indemnité est dite mensuelle laisse en outre entendre qu'elle est distincte de son traitement, lequel est toujours annuel.

[72]    Qui plus est, que dois-je déduire de l'emploi du mot terminable en anglais ou, comme dans la pièce G-3 (la lettre d'offre d'emploi), de celui du mot provisoire? Je dois sûrement me dire que, puisque la lettre d'offre d'emploi stipule que l'indemnité mensuelle est temporaire ou provisoire et que le mot anglais terminable signifie limité ou non durable, cela signifie sûrement quelque chose. La preuve a révélé non seulement que l'indemnité pouvait cesser d'être versée, mais que son versement avait effectivement été interrompu après que l'employeur eut décidé unilatéralement de cesser de la verser (pièce G-4), ce qui tend énormément à prouver qu'elle ne faisait pas partie du traitement.

[73]    La preuve des témoins de la fonctionnaire s'estimant lésée et de ceux de l'employeur n'est pas contradictoire, puisque les sommes additionnelles ont toujours été décrites et perçues comme une IP. Cette indemnité a été créée par suite d'une demande de la Bibliothèque du Parlement (pièce E-5), et elle est mentionnée dans toutes les pièces, mais plus spécifiquement dans les pièces E-9 à E-11. Je rappelle que, dans les pièces G-4, E-9, E-10 et E-11, l'indemnité provisoire, à l'instar de bien des dispositions sur les congés, n'est censée être versée que dans un mois où l'employé touche au moins 10 jours de paye. La pièce E-12, les conditions d'emploi pour les employés non syndiqués, est libellée de façon analogue sinon identique, aux clauses 16.01 (congé de maladie) et 13.02 (congé annuel). Par conséquent, comment l'indemnité peut-elle faire partie du traitement? La réponse est bien sûr qu'elle ne le peut pas, puisqu'elle n'est pas versée les mois où l'employé touche moins de 10 jours de paye.

[74]    Pour trancher en faveur de la fonctionnaire s'estimant lésée, je dois rejeter ce que M. Kamel décrit à juste titre comme [traduction] « l'évidence même ».

[75]    D'abord, dans la pièce E-2, datée du 6 juin 2002, qui a été envoyée à la fonctionnaire s'estimant lésée moins de sept mois après son arrivée à la Bibliothèque du Parlement, le directeur des Ressources humaines l'informait, au paragraphe 3, que : [traduction] « […] l'indemnité provisoire ne fait pas partie de votre traitement, sauf pour le calcul de la pension de retraite ».

[76]    Cette même déclaration sans équivoque figure dans les pièces E-5, E-9, E-10, E-11 et G-4, couvrant les années 2000 à 2003 inclusivement. Certains de ces documents datent d'avant l'arrivée de la fonctionnaire s'estimant lésée à la Bibliothèque du Parlement; d'autres ont été produits pendant qu'elle y travaillait, jusqu'au moment de son départ. D'ailleurs, lorsqu'on lui a montré une copie de la lettre l'informant que l'IP allait recommencer à lui être versée (pièce G-4), la fonctionnaire s'estimant lésée a expliqué qu'elle avait reçu une lettre analogue chaque fois que l'indemnité était modifiée. Six semaines après avoir commencé à travailler à la Bibliothèque du Parlement, quand elle a reçu son premier chèque de paye, elle a témoigné qu'il lui avait semblé, en regardant son talon de chèque, que l'indemnité était quelque chose de différent du traitement.

[77]    La jurisprudence qui m'a été citée ne m'a pas aidé à tirer une conclusion sur le premier argument de Mme Cooper, à savoir que les sommes additionnelles versées à la fonctionnaire s'estimant lésée n'étaient pas une IP.

[78]    Je conclus que les sommes additionnelles qui ont été versées à l'intéressée l'étaient sous forme d'IP et que cette indemnité ne faisait pas partie de son traitement. Il me reste donc l'argument de Mme Cooper sur le principe de préclusion.

[79]    Cet argument doit lui aussi être rejeté. Mme Larose a témoigné qu'elle pensait que la question de son traitement allait être tranchée en sa faveur. En plus de cette conviction, elle s'était basée sur d'autres facteurs pour finalement décider d'accepter l'offre d'emploi de TPSGC :

  1. Elle a dit que le risque était mince. Le fait qu'elle reconnaissait l'existence d'un risque, si mince fut-il, laisse entendre que la question n'était pas réglée.
  2. Elle a dit avoir eu le sentiment qu'on faisait pression sur elle quand Mme Potvin l'a menacée en lui disant que, si elle ne signait pas la lettre d'offre d'emploi, son refus de la signer serait considéré comme un refus. Elle a tardé presque deux mois à signer la lettre, pendant qu'on lui donnait le temps de réfléchir sérieusement à ses options. Bien que je reconnaisse que Mme Larose a subi une pression, je n'estime pas que cette pression ait été assez forte pour faire pencher la balance en l'incitant à décider d'accepter l'offre d'emploi.
  3. Mme Larose dit qu'elle s'est sentie confortée dans sa décision par la pièce G-10, la lettre de la Bibliothèque du Parlement à TPSGC, mais le mot traitement ne figure pas du tout dans cette lettre, où il est plutôt question de son [traduction] « revenu annuel total ». Mme Larose a manifestement interprété cela comme son traitement, mais je ne crois pas que cette conclusion était logique. Il me semble plutôt que la pièce G-10 était une réponse judicieusement formulée à la demande d'information de TPSGC sur l'application de l'indemnité provisoire à la Bibliothèque du Parlement. C'est cette information précise que M. Bonaventure a refusé de donner (pièce G-13) à M. Yates et qu'il a continué à refuser de donner jusqu'à l'audience en l'espèce. Comme je l'ai souligné à M. Lalonde à l'audience, c'était à tout le moins peu accommodant pour les parties; au pire, c'était peut-être de l'obstruction. Même si les documents qui auraient été très utiles au printemps 2003 ont fini par être produits à l'été 2006, la Bibliothèque du Parlement ne donne pas très bonne impression en déclarant, en sa qualité d'intervenante, qu'elle n'est pas légalement tenue de fournir ces documents, point. Il m'est aussi difficile de comprendre sa position, telle qu'énoncée par M. Lalonde, sur son refus initial de fournir les documents, qu'il a exprimée en ses termes : [traduction] « Pourquoi aider une excellente employée à partir? ».
  4. Mme Larose a dit que les offres comme celle qu'elle avait eue à TPSGC n'arrivent pas souvent. J'estime que c'était pour elle une raison fondamentale de l'accepter.
  5. Mme Larose s'était sentie rassurée par les propos de M. Yates, qui lui avait dit qu'il n'y avait pas de risque à signer. J'accepte le témoignage de M. Yates quand il a déclaré que cela s'entendait seulement du fait que TPSGC allait réviser le traitement de Mme Larose si la Bibliothèque du Parlement révisait son échelle de traitement. Mme Larose a dit qu'elle croyait que M. Yates s'était conduit de façon très professionnelle et qu'il faisait de son mieux pour l'aider, et je n'en doute pas, sans non plus trouver quoi que ce soit de sinistre dans ses motifs. On part du principe que les gens agissent de bonne foi, et la fonctionnaire s'estimant lésée n'a rien produit en preuve pour réfuter cette présomption.
  6. Enfin, Mme Larose a témoigné que, si elle avait su comment la question de son traitement allait tourner, elle aurait probablement refusé l'offre d'emploi. Sa franchise révèle qu'elle aurait aussi pu accepter l'offre d'emploi de TPSGC même si le problème de son traitement ne s'était pas résolu en sa faveur.

[80]    J'ai étudié aussi bien la jurisprudence que la documentation sur la préclusion promissoire, et je conclus à l'inexistence d'une promesse non équivoque. Si je retiens le critère de l'observateur objectif, tel qu'exprimé dans Pacific Press, force m'est de conclure que les faits sont nettement différents dans cette affaire et dans la situation de Mme Larose. Contrairement à la personne intéressée dans Pacific Press, Mme Larose ne s'est jamais fait dire quoi que ce soit d'aussi catégorique. Dans son cas, le message a toujours été conditionnel.

[81]    On ne peut pas se fier à son détriment à des propos qui ne constituent pas une promesse sans équivoque. Cette promesse est le point de départ. La fonctionnaire s'estimant lésée savait qu'il y avait un risque qu'elle puisse ne pas arriver, en définitive, à faire considérer l'indemnité comme partie intégrante de son traitement; elle le comprenait et en acceptait les conséquences. Qui plus est, elle savait aussi, parce que la Bibliothèque du Parlement l'avait souvent répété, que son indemnité n'était considérée comme partie intégrante de son traitement que pour le calcul de sa pension de retraite, un point c'est tout. Elle savait en outre, d'après les derniers calculs de son traitement par Mme Côté, quel serait précisément son traitement à TPSGC (pièce E-4) si elle acceptait l'offre d'emploi. Elle était au courant de tous ces facteurs cruciaux et elle a accepté cette offre puisque le risque était très mince, comme elle l'a dit elle-même.

[82]    Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

[83]    Pour ces motifs, le grief est rejeté.

Le 18 octobre 2006.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Barry Done,
arbitre de grief

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