Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée allègue que son évaluation du rendement constituait du harcèlement et un abus de pouvoir - la portée de la contre-preuve est limitée; on ne peut introduire de nouveaux éléments de preuve ou reprendre des témoignages déjà entendus - l’employeur s’est doté d’un nouveau cadre stratégique et en a confié la mise en œuvre à un nouveau superviseur par intérim - la direction estimait que la fonctionnaire s’estimant lésée était réfractaire au changement; on en a discuté avec elle durant la période d’évaluation avant d’en faire mention dans son évaluation du rendement - aucune évaluation n’a été effectuée à mi-parcours - la fonctionnaire s’estimant lésée alléguait que son superviseur savait peu de choses du travail accompli dans son service - elle prétendait aussi qu’à son retour au travail après un congé de maladie, on ne lui avait pas confié de travail - l’employeur a avancé qu’il était difficile de lui attribuer une institution à ce moment-là car elle était revenue au travail vers la fin d’un cycle d’évaluation - l’évaluation du rendement a été modifiée durant la procédure de règlement des griefs pour rehausser notamment son appréciation globale - l’arbitre de grief a conclu que les allégations d’abus de pouvoir n’étaient pas à prendre à la légère - le rôle limité de l’arbitre de grief est de déterminer si les observations formulées dans l’évaluation du rendement sont fondées et si leur auteur avait l’intention de nuire - l’arbitre de grief a rejeté la prétention de l’employeur selon laquelle seule l’évaluation modifiée était en litige - c’est l’évaluation initiale qui est d’abord en litige puisque le grief ne porte pas sur l’évaluation du rendement en tant que telle, mais sur les actions du gestionnaire qui en est l’auteur - même si la politique du Conseil du Trésor sur l’abus de pouvoir ne s’applique pas aux parties, elle fournit néanmoins une définition sommaire utile - pour qu’il y ait abus de pouvoir, il faut que le gestionnaire nourrisse une intention - il n’a pas été démontré que le superviseur avait l’intention de nuire à la fonctionnaire s’estimant lésée - même si l’intention n’est pas nécessaire, la fonctionnaire s’estimant lésée doit démontrer que le superviseur s’est fondé sur des éléments insuffisants ou n’a pas tenu compte d’éléments pertinents ou encore a agi de manière discriminatoire - la fonctionnaire s’estimant lésée n’a pas fait cette démonstration - la direction avait le droit de gérer et de mettre en œuvre un nouveau cadre. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P–35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2006-05-26
  • Dossier:  166-23-31489
  • Référence:  2006 CRTFP 63

Devant un arbitre de grief



ENTRE

JEAN BRATRUD

fonctionnaire s’estimant lésée

et

BUREAU DU SURINTENDANT DES INSTITUTIONS FINANCIÈRES

employeur

Répertorié
Bratrud c. Bureau du surintendant des institutions financières

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P–35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant :  Ian R. Mackenzie, arbitre de grief

Pour la fonctionnaire s’estimant lésée :  Steve Eadie, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour l’employeur :  Neil McGraw, avocat


Affaire entendue à Toronto (Ontario),
les 30 et 31 mars, le 1er avril et du 5 au 8 décembre 2005.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Grief renvoyé à l’arbitrage

[1]    Jean Bratrud, fonctionnaire au Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), est assujettie à la convention collective conclue entre l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFPC) et le BSIF (pièce G-1). Elle a présenté ce grief parce que l'évaluation de son rendement constituait selon elle du harcèlement et un abus d'autorité, ce qui est interdit par sa convention collective.

[2]    J'ai rendu une décision provisoire sur la question de compétence de la Commission des relations de travail dans la fonction publique d'entendre un grief dénonçant du harcèlement en déclarant que j'avais bel et bien compétence (2004 CRTFP 10). J'ai conclu que la portée du grief était limitée à me faire décider si l'évaluation de rendement portait atteinte au droit de Mme Bratrud « de travailler dans un milieu libre de harcèlement personnel ». J'ai aussi décidé que la preuve sur le milieu de travail de l'intéressée n'est pertinente que dans la mesure où elle permet de situer la question de fond, à savoir si l'évaluation elle-même est un abus d'autorité.

[3]    Dans cette décision provisoire, j'ai aussi ordonné la divulgation de certains documents énumérés par Mme Bratrud, à certaines conditions :

  • les noms des institutions financières et de toutes les indications permettant de les identifier devaient être supprimés par le BSIF;
  • les noms des personnes autres que les fonctionnaires du BSIF devaient être supprimés par le BSIF; et
  • les documents, s'ils devaient être déposés comme pièces à l'audience, seraient mis sous scellés et retournés au BSIF après l'expiration de la période de présentation d'une demande de contrôle judiciaire ou à la fin de toute procédure de contrôle judiciaire.

[4]    Au début de l'audience au fond, il a été convenu que nous désignerions les institutions financières par des lettres. Cela dit, quand j'ai rédigé la présente décision, j'ai constaté que je n'avais pas besoin de mentionner d'institutions précises.

[5]    Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ce renvoi à l'arbitrage de grief doit être décidé conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (l' « ancienne Loi »).

[6]    Quand l'avocat de l'employeur a fini, le représentant de Mme Bratrud, Steve Eadie, l'a appelée à témoigner en réplique. Me McGraw s'y est opposé puisqu'il s'agissait essentiellement d'une tentative de réfuter la preuve de l'employeur. Il a fait valoir que Mme Bratrud aurait raisonnablement pu prévoir les témoignages qui allaient être rendus et les questions soulevées. M. Eadie a déclaré qu'elle n'aurait pas pu prévoir la réaction de Frank Mackowiak à divers documents. Il a maintenu que Mme Bratrud avait eu de la difficulté à se faire communiquer des renseignements et qu'elle n'avait d'ailleurs pas obtenu du tout certains renseignements qui auraient pu lui être donnés par M. Mackowiak avant qu'il ne témoigne.

[7]    J'ai laissé Mme Bratrud témoigner en réservant mon jugement sur l'admissibilité de son témoignage en réplique, au cours duquel elle a réagi à certaines des déclarations que M. Mackowiak avait faites en témoignant.

[8]    La contre-preuve (ou témoignage en réplique) ne devrait être acceptée que dans des circonstances très limitées (voir Guest et al. c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2003 CRTFP 89). Le principe fondamental est résumé dans l'extrait suivant de Leading Cases on Labour Arbitration, de Mitchnick et Etherington :

[Traduction]

[...]

                              5.10 CONTRE-PREUVE

[...] Le principe fondamental est que la partie qui présente une contre-preuve n'a pas le droit de scinder son argumentation. Avant d'être tenue de présenter une défense, l'autre partie a le droit de savoir quels arguments elle va devoir tenter de réfuter, et la partie qui entame la procédure ne peut être autorisée à produire en réplique des arguments qu'elle aurait dû faire valoir d'emblée. Il s'ensuit qu'une partie peut se prévaloir de son droit de réplique pour attaquer la crédibilité des témoins de l'autre ou pour expliquer les inconséquences de leurs témoignages ou de leur preuve, mais ne peut tenter d'introduire des éléments de preuve sur de nouvelles questions sans lien avec ce qui a été soulevé auparavant, ou des éléments de preuve qui auraient dû être introduits au cours de la présentation de son argumentation globale. [...]

[...]

[9]    Dans Re Canada Post Corp v. Letter Carriers' Union of Canada (N-27-04) (1989), 1 L.A.C. (4th) 447, l'arbitre de différends a souligné que le droit de présenter une preuve en réplique [traduction] « ne devrait pas être interprété étroitement ». En l'espèce, le témoignage de Mme Bratrud avait ostensiblement pour but de réagir à des inconséquences de la preuve produite par les témoins de l'employeur. En outre, M. Eadie a déclaré que, avant l'audience, l'employeur n'avait pas donné de précisions pour étayer l'évaluation de rendement. La preuve de Mme Bratrud avait aussi trait à la crédibilité des témoins de l'employeur. Sur cette base, je la juge admissible, mais je conclus aussi que ce témoignage de Mme Bratrud a largement répété ce qu'elle avait déclaré dans son interrogatoire principal et dans son contre-interrogatoire. Par conséquent, je lui ai accordé peu de poids.

Résumé de la preuve

[10]    La preuve produite à l'audience sur la question préliminaire de compétence est résumée dans la décision correspondante (2004 CRTFP 10).

[11]    Mme Bratrud s'est jointe à la Division de l'assurance-vie du bureau de Toronto du BSIF en 1998, à titre de gestionnaire d'une équipe d'assurance-vie, après avoir déménagé d'Ottawa où elle occupait déjà un poste au BSIF. La Division de l'assurance-vie est appelée le « FIG-411 » au BSIF.

[12]    Quand Mme Bratrud a voulu déposer en preuve ses évaluations de rendement antérieures, Me McGraw s'y est opposé. J'ai accepté que ces évaluations soient présentées en prenant en délibéré ma décision aussi bien sur leur pertinence que sur le poids qui doit leur être accordé (j'y reviendrai dans mes motifs).

[13]    Dans le passé, Mme Bratrud avait eu d'excellentes évaluations de rendement, avec la cote « dépasse les attentes » dans celle de 1998-1999 et « dépasse souvent les attentes » dans celles de 1999-2000. En 1998-1999, son ancienne surveillante, Elizabeth Lepatko, avait toutefois soulevé un bémol sur sa gestion du temps, en l'encourageant à [traduction] « limiter la masse de détails présentés dans les documents de travail » (pièce G-4). Comme Mme Lepatko a quitté le BSIF en 2000, l'évaluation de rendement de Mme Bratrud pour l'exercice 1999-2000 a été signée par Johann Bagnall, qui avait basé sa cote sur la recommandation de Mme Lepatko elle-même. Il est précisé dans cette évaluation de rendement que la Division de l'assurance-vie avait été [traduction] « durement éprouvée par un gros manque de ressources pour la seconde année d'affilée ».

[14]    Le BSIF a pour mandat de surveiller les institutions financières, notamment les sociétés d'assurance-vie. À cette fin, il a produit un document intitulé « Cadre de surveillance » (le « cadre » (pièce G-13)) conçu pour être « un processus efficace de mesure de la sécurité et de la stabilité d'une institution financière ». Le cadre dresse le processus d'évaluation du « profil de risque [d'une institution], de sa situation financière, de ses méthodes de gestion du risque et de sa conformité aux lois et règlements applicables ». Le cadre a été amorcé en mars 1998 et publié en 1999, puis mis en ouvre sur une période de trois ans. Dans son témoignage, Mme Bratrud l'a analysé de façon détaillée.

[15]    En décembre 1999, Mme Bagnall est devenue directrice principale du FIG-411. La surveillante de Mme Bratrud, Mme Lepatko, est partie en décembre 1999; on a organisé un concours pour la remplacer. Le candidat retenu, Calvin Johansson, ne pouvait pas entrer en fonctions immédiatement parce qu'il avait d'autres engagements au BSIF. Mme Bagnall a donc nommé M. Mackowiak à titre intérimaire pour occuper le poste pendant 10 mois, jusqu'à ce que M. Johansson puisse assumer ses fonctions. Elle a témoigné avoir déjà travaillé avec M. Mackowiak et dit qu'elle pouvait se fier à son jugement. Elle était d'avis qu'il fallait des gens énergiques pour la mise en ouvre du nouveau cadre. Elle a témoigné que, à ses débuts dans son poste, le groupe de l'assurance-vie se concentrait sur les questions de gouvernance et qu'il n'y avait pas toujours un lien direct dans ses rapports entre ce concept et les risques ainsi que la façon de les gérer. Elle a témoigné que M. Mackowiak avait pour mandat d'appliquer le cadre, tout en s'assurant que son approche convenait à M. Johansson. Pour sa part, M. Mackowiak a témoigné qu'il consultait régulièrement ce dernier.

[16]    M. Mackowiak a déclaré avoir constaté à son arrivée au FIG-411 que le personnel se concentrait sur les pratiques exemplaires et sur la gouvernance d'entreprise plutôt que sur l'évaluation du risque. Il a témoigné avoir tenté d'amener le groupe à changer d'approche par « le dialogue », mais allégué que lorsqu'il tentait de dialoguer avec Mme Bratrud, elle [traduction] « se fermait ». Mme Bratrud, elle, a témoigné que M. Mackowiak lui criait après en lui disant qu'elle avait tort.

[17]    La période d'évaluation du rendement visée dans le présent grief est celle de 2000-2001 (pièce G-6). Au début, Mme Bratrud s'est fait attribuer la cote globale « ne répond pas toujours aux attentes ». Comme cette évaluation est le point focal du grief, je reproduis ci-dessous les parties pertinentes de l'exposé narratif de l'évaluation :

[Traduction]

Résultats et réalisations. [...]

[...] Durant l'année, les exigences du cadre de surveillance n'ont pas été entièrement respectées. Côté surveillance, Jean se concentre habituellement sur des questions concernant le maintien de l'institution par sa direction, comme les méthodes internes de rapport, l'établissement des prix des produits, l'introduction des nouveaux produits, le contenu et la structure des plans stratégiques et ainsi de suite, plutôt que sur l'efficacité de la gestion du risque. Comme je suis optimiste, je pense que Jean comprend désormais mieux l'application des principes du cadre et qu'elle va se concentrer sur l'efficacité plutôt que sur les caractéristiques.

[...]

Objectif et/ou principale responsabilité

En tant que membre d'une équipe, diriger la formulation d'un Plan de surveillance 2000-2001 pour l'équipe, avec une bonne évaluation du risque et des priorités.

Résultats et réalisations. [...]

Jean produit des plans de surveillance exhaustifs cernant clairement les points qu'elle veut examiner, mais l'évaluation du risque et l'établissement des priorités laissent à désirer. Les points examinés sont essentiellement choisis en fonction du temps écoulé depuis le plus récent examen approfondi et limités seulement par les ressources disponibles. Jean a exprimé la conviction que les entreprises qu'elle surveille ne survivront pas parce qu'elles ne composent pas assez bien avec les forces et les conditions du marché où elles fonctionnent. Elle a aussi déclaré être convaincue que le BSIF a la responsabilité de dire à la direction des entreprises où les risques se situent. Elle se concentre sur la planification stratégique et sur la façon des entreprises de réagir à la concurrence plutôt que sur les risques inhérents à leurs activités et sur la mesure dans laquelle elles savent bien gérer et mitiger ces risques.

[...]

Objectif et/ou principale responsabilité

Avec l'aide d'une équipe, accomplir des tâches de surveillance sur place appropriées convenues à l'avance, conformément au plan de surveillance particulier de chaque institution.

Résultats et réalisations. [...]

Jean fait le travail sur place conformément au plan de surveillance qu'elle a établi pour l'institution. La documentation au dossier est abondante parce qu'elle est convaincue que toutes les observations tant bénignes que contestées, doivent être étayées par une documentation exhaustive. Cela dit, il faut reconnaître que ses notes de section sont raisonnablement bien faites.

Comme je l'ai souligné, les conclusions de Jean sont généralement « douces » et ses recommandations sont essentiellement axées sur la prise en note des politiques, procédures et mécanismes de gouvernance institutionnelle plutôt que sur l'efficacité de la gestion du risque. Certaines de ces recommandations sont valables et certaines sont adoptées par les institutions, sans toutefois ajouter beaucoup de valeur du point de vue de la surveillance. J'ai coté le rendement de Jean « répond toujours aux attentes » à cet égard parce que l'exécution de son travail est compatible avec ses plans. Pour conserver cette cote, Jean va devoir changer sa démarche de surveillance en accordant plus d'importance à l'efficacité de la gestion du risque, ainsi qu'assouplir son approche de compilation de documents dans les dossiers.

[...]

Objectif et/ou principale responsabilité

Avec l'aide d'une équipe, élaborer, gérer et formuler des interventions et des recommandations ainsi que les exigences internes et externes de rapport du processus de surveillance de façon judicieuse et révélatrice. [...]

Résultats et réalisations. [...]

Les stratégies d'intervention de Jean (lire les recommandations de surveillance) visent les symptômes plutôt que les causes. Ses recommandations enjoignent aux entreprises de remédier à ce qui est perçu comme des lacunes des procédures et de la prise en note des mécanismes, sans aucun raisonnement logique pour justifier clairement la nécessité des mesures correctives. Les conclusions sont généralement exprimées en termes de pratiques exemplaires [...] il serait préférable que [...] plutôt qu'en termes de définition d'un problème et de ses conséquences potentielles pour l'institution s'ils ne sont pas résolus. Habituellement, les conclusions rapportées ne précisent pas clairement un problème de réglementation réel débouchant sur la recommandation.

Les lettres de gestion de Jean se sont améliorées. La pratique dans l'ancien FIG-411 consistait à répartir les conclusions en une multitude de sous-conclusions et en incluant toutes sortes d'énoncés « guimauve » comme « Nous sommes heureux de constater que (la compagnie a fait quelque chose qui nous plaît); il est important que les entreprises (appliquent certaines pratiques exemplaires) ». Le groupe a aussi produit deux lettres de gestion, l'une étant le rapport officiel aux PDG et l'autre - faisant état de conclusions moins importantes - aux CF. Tout le groupe s'est fait dire de cesser d'envoyer des lettres aux CF après qu'un membre indépendant du conseil d'administration d'une institution s'est plaint au cours d'une réunion. Pendant l'année, les lettres de gestion de Jean sont devenues plus concises et plus directes. Elle écrit bien; en accordant plus d'attention aux causes et en étant plus concise, elle est capable de produire d'excellentes lettres de gestion.

Ces lettres ne sont pas envoyées assez rapidement. Le groupe avait l'habitude de terminer tout le travail sur place avant de les envoyer. Dans certains cas, il fallait que l'examen sur place soit terminé depuis quatre, cinq, voire six mois avant que les lettres de gestion ne soient envoyées aux institutions. Dans une discussion que nous avons eue sur l'importance de produire ces rapports rapidement, Jean a déclaré n'avoir jamais entendu parler d'un délai quelconque d'envoi des lettres de gestion. Elle tient à préserver la bonne image du Bureau auprès des institutions et sait très bien que la rapidité de production des rapports influe nettement sur ce facteur. Je n'ai aucun doute qu'elle va respecter des délais raisonnables d'envoi des lettres, à condition d'avoir les conseils voulus et la possibilité de le faire.

[...]

Objectif et/ou principale responsabilité

Effectuer un suivi efficace et rapide avec les institutions. [...] Prendre les mesures nécessaires sur les questions soulevées par les entreprises entre les stades du contrôle et de l'examen sur place.

Avec l'aide d'une équipe, gérer et focaliser efficacement le suivi des institutions qui lui sont confiées, conformément à leur profil de risque.

Résultats et réalisations. [...]

L'ancien FIG-411 n'effectuait pas efficacement le suivi des problèmes non résolus. Les étapes d'intervention étaient considérées comme un outil visant à obliger les entreprises à se conformer aux recommandations de la surveillance. Dans mes discussions avec Jean, je lui ai dit que la bonne méthode pour assurer la conformité des entreprises récalcitrantes consiste à faire vigoureusement le suivi dans la correspondance, puis à faire escalader le ou les problèmes dans la structure du BIF, au besoin. Jean poursuit les problèmes auprès des institutions avec intensité, et je m'attends que son suivi chez elles va s'améliorer dans son nouveau milieu.

Les activités de contrôle de Jean ont été bien meilleures que ses activités de suivi. Elle connaît très bien l'assurance-vie en général et ses institutions en particulier, de sorte qu'elle peut reconnaître les difficultés potentielles. Elle se sert énormément des groupes de spécialistes du BSIF, notamment en ce qui concerne la comptabilité, l'actuariat et le capital. Elle s'attaque avec efficience aux problèmes soulevés tant par les institutions que par les services internes et contrôle bien tous les dossiers relatifs à ses institutions. Son principal aspect à améliorer est l'analyse financière. Nous avons eu des discussions sur l'utilisation des renseignements financiers stockés dans FRIDB [une base de données d'analyse financière] et figurant dans la documentation que nous recevons des institutions pour effectuer les analyses financières et faire le suivi des tendances dans ces institutions. Au cours de la dernière année, les tâches d'analyse financière ont pris de l'ampleur dans l'ancien FIG-411. Pour conserver cette cote, Jean doit perfectionner ses habiletés d'analyse et les employer à meilleur escient.

[...]

Objectif et/ou principale responsabilité

Promouvoir les valeurs du BSIF et amener les membres de l'équipe à s'associer aux valeurs d'intégrité, d'esprit d'équipe, de dévouement et de professionnalisme de l'organisation.

Résultats et réalisations. [...]

Jean s'impose de strictes normes d'intégrité, de dévouement et de professionnalisme. Elle s'efforce de maintenir une image d'ouverture et de professionnalisme avec la direction des institutions qu'elle surveille; en outre, elle est très dévouée, les longues heures qu'elle effectue en témoignent.

Jean doit améliorer son esprit d'équipe. Elle s'en sert très bien à l'intérieur de son propre groupe [...], mais garde ses distances avec le personnel de surveillance qui n'appartient pas à ce groupe. Elle est très sensible à la critique et extrêmement soupçonneuse à l'endroit de quiconque la critique ou critique son groupe. Elle a aussi exprimé une grande méfiance à l'endroit de la direction des institutions financières fédérales, en disant être convaincue qu'elle s'efforce constamment de manigancer impunément.

L'esprit d'équipe est d'importance critique pour que le BSIF atteigne ses buts d'organisme de réglementation des services financiers avec efficience et professionnalisme. Jean doit comprendre que ses collègues ne sont pas acceptés dans l'équipe (ou rejetés de l'équipe) en fonction de son opinion sur leurs perceptions, leurs points de vue ou leur conduite. Travailler en collaboration avec des collègues dont on ne partage pas les opinions est simplement faire preuve de professionnalisme, et c'est ce qu'on attend de tout le personnel.

Il vaut la peine de souligner dans cette évaluation de rendement qu'on m'a donné à comprendre que, depuis que l'ancien FIG-411 a été intégré dans le FIG-412, Jean a nettement mieux accepté des personnes avec qui elle n'aurait jusque-là pas eu de rapports, et elle a su travailler avec elles. Elle devra améliorer ses interactions avec ses collègues dans toute l'organisation.

3. Considérations particulières

[...] décrire toutes les circonstances atténuantes influant sur le rendement de l'employé, mais échappant à son contrôle.

L'ancien FIG-411 fonctionnait conformément aux normes établies par la directrice précédente. Ces normes comprenaient :

a)
la concentration sur la gouvernance organisationnelle / le PERR [Programme d'évaluation du respect de la réglementation] et les questions de conduite des activités,
b)
des conclusions et recommandations essentiellement basées sur les « pratiques exemplaires dans l'industrie »,
c)
des conclusions et recommandations portant essentiellement sur l'incapacité des institutions de tenir correctement note de leurs politiques, procédures, plans stratégiques, etc., sans aucune identification des problèmes sous-jacents ni des éléments liés à des concepts comme la conduite des activités, le lancement de nouveaux produits, les fusions et acquisitions,
d)
le recours à des cotes aux différents stades d'intervention, afin d'obliger les entreprises à se conformer aux recommandations de la surveillance,
e) le recours à des rapports de tierces parties ainsi qu'à des textes publiés pour justifier les recommandations,
f)
l'absence de dates butoirs ou cibles pour la production des lettres de gestion adressées aux entreprises et
g) des doubles lettres de gestion,
  • la lettre aux « PDG » présentant nos conclusions et recommandations « officielles » et
  • la lettre aux « CF » exposant les conclusions considérées comme de moindre importance.

Ce cadre de surveillance n'a pas été appliqué comme il est censé l'être, et c'est dans ce milieu qu'on a affecté Jean quand elle a été mutée d'Ottawa, il y a trois ans.

Commentaires du surveillant

Jean a une grande connaissance technique de l'industrie et des produits de l'assurance-vie. Elle a adopté les pratiques que son ancienne directrice préconisait, mais n'a pas efficacement mis ses connaissances à profit pour surveiller les entreprises d'assurance-vie dont elle est responsable aux termes du cadre de surveillance. Quand sa directrice a démissionné, on a décidé de refocaliser le groupe conformément au cadre. Au début, cette refocalisation a causé de grandes difficultés à Jean et à l'ensemble. . . du groupe. Il est tout à l'honneur de Jean qu'elle ait commencé à manifester des signes qu'elle acceptait les changements requis, vers la fin de l'année. Depuis qu'elle a vécu cette période de changement, pour atteindre la cote globale « répond toujours aux attentes », Jean va devoir :

  • se concentrer davantage sur l'efficacité de la gestion du risque et sur une meilleure mise en ouvre du cadre de surveillance;
  • améliorer son esprit d'équipe, ce qui se refléterait par une amélioration de ses interactions avec ses collègues de tout le BSIF, nonobstant toutes les différences d'opinion ou autres qu'elle pourrait avoir vis-à-vis d'eux.

[18]    Mme Bratrud a longuement réfuté cette évaluation de rendement dans son témoignage, en analysant de façon détaillée des documents rédigés dans l'exercice de ses fonctions. J'ai résumé les principaux points qu'elle a soulevés. Elle a aussi produit une longue réfutation écrite qu'elle a remise à son employeur avant de déposer son grief (pièce G-15). M. Mackowiak en a pris connaissance; il a répliqué à la réfutation de Mme Bratrud en plus d'identifier les parties des documents en question reflétant des points qu'il avait soulevés dans l'évaluation de rendement. Il a aussi rédigé une réfutation (pièce E-1) qu'il n'a pas communiquée à Mme Bratrud avant le dépôt du grief.

[19]    Mme Bratrud a témoigné que sa section manquait de personnel et qu'elle avait signalé ses problèmes de ressources. Elle a dit qu'elle devait faire trop d'heures supplémentaires, feuilles de temps à l'appui (pièce G-33). En avril 1999, la prédécesseure de Mme Bagnall (Carol Shevlin) avait pris bonne note que le FIG-411 avait été [traduction] « surchargé de travail et de responsabilités », et que cela [traduction] « ne sembl[ait] pas devoir se terminer bientôt » (pièce G-32). M. Mackowiak a témoigné pour sa part que Mme Bratrud lui avait parlé de ses préoccupations au sujet des ressources, en déclarant toutefois qu'il n'était pas d'avis que des ressources additionnelles s'imposaient. Selon lui, le travail aurait pu être fait différemment pour ne pas mobiliser autant de ressources. Mme Bratrud a déclaré que M. Mackowiak avait pourtant embauché de nouveaux employés, mais qu'ils étaient incapables de se déplacer à l'extérieur de la ville, ce qui limitait nettement leur capacité de l'aider à s'occuper des institutions qui lui étaient confiées.

[20]    Mme Bratrud a fait valoir que M. Mackowiak et Mme Bagnall venaient tous deux de la Section des assurances multirisques du BSIF et ne savaient pas grand-chose sur l'assurance-vie. Elle estimait devoir leur donner plus d'information dans les documents qu'elle leur soumettait à cause de leur manque de connaissances de l'industrie d'assurance-vie. Elle a témoigné que M. Mackowiak avait une vision à court terme des responsabilités civiles des sociétés d'assurance-vie reflétant son expérience dans le secteur des assurances multirisques. Selon elle, il faut avoir une vision à plus long terme de ce facteur, étant donné que les polices d'assurance-vie couvrent de longues périodes.

[21]    M. Mackowiak est entré en fonctions en mai 2000, après la préparation des plans de surveillance des institutions. Mme Bratrud part du principe qu'il aurait pu modifier ces plans s'ils lui semblaient insatisfaisants, ce qu'il n'a pas fait. Elle a témoigné que toutes les institutions avaient été placées à un stade ou niveau de zéro à quatre en fonction du degré d'inquiétude qu'on avait quant à leur viabilité financière, « 0 » signifiant qu'on ne s'en inquiétait pas du tout et « 4 » qu'elles étaient au bord de la faillite. Mme Bagnall et M. Mackowiak lui ont demandé de reclasser plusieurs sociétés qu'elle avait rangées au stade 1 (certaines réserves) au stade « 0 » (aucune inquiétude). Elle a témoigné qu'il fallait beaucoup de travail pour changer une entreprise de stade dans ce contexte.

[22]    Mme Bratrud a témoigné que M. Mackowiak avait approuvé toutes les lettres d'examen qu'elle a envoyées aux entreprises sans les critiquer à l'époque, bien qu'il les ait critiquées dans son évaluation de rendement. Elle a déclaré que les extraits de lettres envoyées aux entreprises figurant dans son évaluation ([traduction] « il serait préférable que » et [traduction] « nous sommes heureux de constater ») sont introuvables dans les lettres qu'elle a rédigées au cours de la période d'évaluation. M. Mackowiak a été invité à prendre connaissance des documents sur lesquels Mme Bratrud a travaillé au cours de cette période et qu'elle a déposés en preuve; il a avoué que ces citations n'y figuraient pas, mais il n'en a pas moins maintenu qu'il les avait lues quelque part, sans toutefois pouvoir préciser dans quels documents elles figuraient.

[23]    Mme Bratrud a témoigné avoir été [traduction] « estomaquée » en lisant dans l'évaluation qu'il lui fallait s'améliorer en analyse financière : on l'avait encouragée à se joindre au bureau de Toronto du BSIF précisément pour son excellence en analyse financière. Elle a témoigné que la plus grande partie de l'analyse financière figurant dans les dossiers des institutions avait été faite avant l'arrivée de M. Mackowiak. Celui-ci lui a dit qu'il ne pensait pas que des tableaux de données financières soient révélateurs. Quand la fonctionnaire s'estimant lésée lui a demandé de lui montrer des dossiers dont il trouvait l'analyse financière satisfaisante, il ne l'a jamais fait.

[24]    Mme Bratrud a témoigné que, en ce qui concerne l'esprit d'équipe, elle aidait tout le monde et que sa porte était toujours ouverte; elle ne [traduction] « refusait personne dans le groupe ». M. Mackowiak a témoigné quant à lui qu'elle lui avait dit qu'elle ne travaillerait pas avec le groupe des assurances multirisques.

[25]    Christine Voyatzis était gestionnaire au FIG-411 lorsque M. Mackowiak a commencé à y travailler; elle a démissionné du BSIF en octobre 2000 pour accepter un poste dans le secteur privé. Selon elle, le style de M. Mackowiak était [traduction] « autocratique », et le climat du service, [traduction] « toxique ». Elle a témoigné que Mme Bratrud lui avait montré son évaluation de rendement par M. Mackowiak : elle a été renversée, parce qu'elle a cru que certaines parties de cette évaluation portaient sur son travail et sur son rendement.

[26]    Le 15 août 2000, Mme Bratrud a dit à M. Mackowiak qu'elle ne pourrait pas assister à une réunion des directeurs et des gestionnaires parce qu'elle devait réaliser une entrevue avec un dirigeant d'une société d'assurance (pièce G-35). M. Mackowiak lui a répondu en disant qu'elle devrait prendre d'autres arrangements pour cette entrevue :

[Traduction]

[...]

[...] C'est le début d'une démarche visant à bâtir une véritable équipe du FIG de Toronto, et c'est important. Certains des thèmes que nous devons discuter correspondent à des points que vous m'avez dit ne pas faire l'unanimité entre notre équipe et les autres équipes du secteur des assurances. Nous avons parlé des perceptions des autres. Jean, si vous ratez cette réunion, votre absence sera remarquée quelle qu'en soit la raison. Vous ratez déjà des réunions de tout le FIG parce que vous êtes à l'extérieur de la ville. Refuser d'assister à cette réunion-là n'est pas une bonne idée.

[...]

[27]    M. Mackowiak a envoyé aux trois gestionnaires (Mme Voyatzis, Normand Ferragne et Mme Bratrud) un courriel daté du 11 septembre 2000 critiquant la qualité des rapports de gestion (pièce G-38). Il avait pris connaissance des conclusions et des recommandations d'un certain nombre de ces rapports déjà envoyés aux destinataires, en prenant note des points dont il voulait discuter avant de les présenter à l'occasion d'une réunion avec l'équipe de tout le personnel :

[Traduction]

[...]

Ce document est une critique par sa nature même, mais je n'ai pas l'intention de pointer des gens du doigt, d'imputer un blâme à quiconque ou de critiquer qui que ce soit. Ce que je veux faire, c'est m'assurer que l'expérience sera positive et m'attaquer aux notions sous-jacentes à ce que nous signalons aux entreprises, ainsi qu'aux raisons pour lesquelles nous le faisons. Ma seule façon d'y arriver consiste à mentionner des points précis, mais je tiens à ce que vous sachiez que, pour ce faire, j'ai étudié des rapports portant sur toutes les entreprises de notre portefeuille. Personne n'a été particulièrement visé.

Une autre point : Vous verrez que je m'intéresse aux conclusions qui n'auraient pas dû être signalées de même qu'aux recommandations qui n'auraient pas dû être formulées dans les rapports de gestion. Les conclusions et recommandations figurant dans les rapports de gestion doivent être :

  • précises et sans équivoque;
  • appuyées par
  • un renvoi à la Loi, au règlement, aux lignes directrices ou à d'autre(s) directive(s) largement diffusée(s) du BSIF ou
  • une conclusion évidente sur un événement qui s'est passé à l'institution et qui a donné lieu à la recommandation.

Dans la mesure où la plupart des conclusions figurant dans ce document sont visées, rien n'empêche qui que ce soit d'en parler avec une entreprise ni de lui proposer des mesures à prendre. L'essentiel est de faire la différence entre ce qui est discuté avec une entreprise et ce qui devrait figurer dans un rapport de gestion.

[...]

[28]    M. Mackowiak a rencontré Mme Bratrud le 22 septembre 2000 pour discuter avec elle des délais de présentation des conclusions des examens sur place aux institutions; à cette occasion, il lui a dit s'attendre à ce que cela se fasse dans les 30 jours. Il a rédigé immédiatement après des notes résumant le contenu de cette réunion (pièce G-12). Mme Bratrud lui a déclaré alors que la norme de 30 jours ne correspondait pas à la pratique établie au FIG-411; il a répondu qu'il l'ignorait. Mme Bratrud a témoigné que la norme de 30 jours était celle de la Division des assurances multirisques, mais que le FIG-411 avait traditionnellement appliqué une norme de 60 jours. M. Mackowiak lui a dit qu'il acceptait de ne pas appliquer cette norme dans le contexte des évaluations de rendement, et que ce serait considéré comme [traduction] « de l'histoire ancienne ». Il lui a aussi dit qu'il faudrait respecter la nouvelle norme dans le cycle de surveillance de 2001-2002. Pourtant, dans l'évaluation de rendement de Mme Bratrud, M. Mackowiak a écrit qu'elle n'avait pas respecté le délai d'envoi des rapports. Il a déclaré que c'était un [traduction] « oubli » de sa part dont il a assumé la responsabilité.

[29]    Lors de cette rencontre du 22 septembre 2000, M. Mackowiak avait aussi dit à Mme Bratrud que les notes de section devraient être rédigées sur le terrain. Selon lui, elle devait faire état des résultats des entrevues dans les notes de section plutôt que dactylographier de [traduction] « copieuses » notes.

[30]    John Fernandes, le surintendant auxiliaire du BSIF, a parlé le 12 octobre 2000 à M. Mackowiak pour lui faire part d'un commentaire négatif sur un examen sur place provenant du président-directeur général d'une entreprise dont l'examen avait été réalisé par Mme Bratrud. M. Mackowiak s'est arrangé pour rencontrer l'intéressé pour en parler avec lui; après avoir pris les arrangements à cette fin, il a informé Mme Bratrud qu'il allait rencontrer ce PDG, mais elle avait déjà été informée de cette réunion à venir par quelqu'un d'autre, et elle a dit à M. Mackowiak qu'elle était très malheureuse que M. Fernandes ne lui en ait pas parlé directement. Elle a aussi demandé qu'on l'autorise à assister à la réunion avec le PDG en question. M. Mackowiak a refusé. Il a témoigné que la réunion n'avait rien donné, parce que le PDG lui avait dit qu'il n'y avait [traduction] « pas de problèmes ».

[31]    Par la suite, le 16 novembre 2000, M. Mackowiak a convoqué une réunion du personnel afin de parler des [traduction] « concepts de surveillance » (pièce G-39). Il avait inclus dans l'avis de réunion un document visant à [traduction] « définir globalement le cadre et donner des conseils raisonnablement précis sur son application ». Ce document contenait les [traduction] « résumés succincts » suivants de ses principaux points :

[Traduction]

                             Concepts de surveillance

1.           Importantes activités

[...]

Résumé succinct
Pour être considérée comme importante dans le contexte du cadre, l'activité doit relever d'un membre d'une institution responsable de sa gestion et de son rendement. Selon ce critère, toute activité importante peut être composée de sous-activités elles-mêmes importantes. Nous devrions toujours préciser le raisonnement sous-jacent à notre évaluation d'une activité.

2.           Risque inhérent

[...]

Résumé succinct
Pour déterminer le risque d'une activité, il faut d'abord identifier le ou les événements correspondants qui auraient des répercussions néfastes, puis quantifier l'effet de ces répercussions néfastes sur la base des meilleurs efforts. En tenant compte aussi de la probabilité de l'occurrence du risque, nous obtenons le degré de risque inhérent.

3.           Qualité de la gestion du risque

[...]

Résumé succinct
Quand nous attribuons une cote de qualité à la gestion du risque, nous devrions toujours répondre à la question [traduction] « Pourquoi est-ce que je pense ça? ». Notre évaluation de la qualité de la gestion du risque doit être axée sur l'efficacité de cette gestion plutôt que simplement sur le fait qu'elle repose ou pas sur des documents conséquents.

4.           Plan de surveillance

[...]

Résumé succinct
Un plan de surveillance doit préciser de façon détaillée les objectifs de l'examen, les procédures à suivre et le temps estimatif qu'il faudra pour y arriver, par section.

5.           Contrôle et travail sur place

[...]

Résumé succinct
Le contrôle doit englober l'analyse financière, et l'évaluation de la gestion du risque doit être axée sur l'efficacité de cette gestion, c'est-à-dire sur la mesure dans laquelle elle atténue vraiment le risque dans les activités de l'institution.

5.           Documentation

[...]

Résumé succinct
La partie narrative des notes de section ne devrait pas avoir besoin de documentation complémentaire pour communiquer intégralement la compréhension de leur contenu au lecteur, comme il se doit. Dans l'ensemble, le personnel ne devrait pas annexer de documents de corroboration à l'appui de ses observations, à moins que ce ne soit indispensable pour étayer une conclusion.

6.           Rapports

[...]

Résumé succinct
Les conclusions débouchant sur des recommandations aux institutions doivent clairement être bien étayées. Les recommandations doivent enjoindre aux institutions d'atteindre des résultats, plutôt que de préciser la ou les méthodes pour y arriver. Il faudrait produire des rapports à l'intention des institutions chaque fois que les conclusions qui le justifient sont tirées, pas seulement après le travail sur place.

[32]    Le 18 octobre 2000, Rose Bussière, des Ressources humaines du BSIF, a envoyé à tout le personnel une note de service pour lui rappeler que ce serait [traduction] « un bon moment pour réaliser les examens [du rendement] en milieu d'exercice » (pièce G-36). Elle déclarait dans cette note de service que même si ces examens étaient une importante partie du processus de gestion du rendement, il n'était pas indispensable d'envoyer les résultats aux Ressources humaines. M. Mackowiak n'a réalisé aucun examen de ce genre à l'égard de son personnel.

[33]    M. Mackowiak (pièce G-6) n'a pas montré l'évaluation de rendement à Mme Bratrud avant d'en parler avec Mme Bagnall. Celle-ci a témoigné avoir donné à ses gestionnaires des instructions voulant qu'ils lui communiquent les cotes attribuées à chaque employé afin que les directeurs et elle-même aient une vue d'ensemble du groupe, de façon à pouvoir coter les employés de façon conséquente. Elle a déclaré qu'elle parlait avec ses directeurs des cotes [traduction] « marginales », autrement dit de toutes celles supérieures ou inférieures à [traduction] « répond aux attentes ». Une fois cela fait, les cotes étaient communiquées au Comité directeur de la surveillance, dirigé par le surintendant auxiliaire. À la réunion de ce Comité, les cotes [traduction] « marginales » faisaient l'objet d'une discussion. Ensuite, le surintendant auxiliaire présentait les cotes au Comité de direction.

[34]    Mme Bagnall a témoigné que les gestionnaires ont le choix d'obtenir ou pas l'avis des employés sur leur évaluation de rendement avant que les cotes ne soient arrêtées. Elle a dit ne pas se rappeler quelle était la pratique au BSIF au moment de l'évaluation en question. Après que M. Mackowiak eut remis son évaluation de rendement à Mme Bratrud, Mme Bagnall a entendu dire que cette dernière voulait lui parler. Elle ne l'a pas reçue, parce que M. Mackowiak n'avait encore eu aucune discussion avec Mme Bratrud.

[35]    Mme Bagnall a admis avoir parlé de la cote de Mme Bratrud avec M. Mackowiak. Elle a dit qu'elle reconnaissait que Mme Bratrud était une bonne employée, mais que la direction se devait de lui [traduction] « envoyer un message », à savoir qu'il lui fallait s'améliorer en ce qui concernait la mise en ouvre du cadre.

[36]    Dans une note de service adressée à Mme Bagnall en date du 26 juin 2001 (pièce G-37), M. Mackowiak exposait ce qu'il disait être de fausses représentations de ses déclarations qu'il avait trouvées dans des notes de section rédigées par Mme Bratrud entre le 15 novembre 2000 et le 5 mars 2001. Il a demandé que cette note de service soit versée à son dossier personnel parce qu'il estimait que, pris hors contexte, les commentaires de Mme Bratrud risquaient de lui nuire. Mme Bratrud a obtenu la note de service en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels, après le dépôt de son grief. On peut y lire les déclarations suivantes, avec la réaction de M. Mackowiak :

[Traduction]

[...]

2.
« En raison des changements du processus de surveillance introduit par le directeur par intérim Frank Mackowiak, FIG Assurances ne formule plus de recommandations écrites sur les politiques, les procédures ou les processus organisationnels à moins que l'assureur ne soit au bord de la faillite. »
Ce qui a vraiment été dit
Toutes les recommandations adressées à une institution dans un rapport de gestion doivent être basées sur les conclusions pertinentes pour sa santé financière. Nous ne devrions pas faire de recommandations sur la consignation des politiques, des procédures ni des processus. Nos recommandations doivent être axées sur les conséquences et les risques pour l'institution lorsqu'elle n'a pas les politiques et mécanismes appropriés. Il ne suffit pas de dire simplement qu'elles doivent les avoir parce que la prudence le suppose.
Prétendre que j'ai préconisé une pratique consistant à ne pas formuler de recommandations écrites à moins que l'assureur ne soit au bord de la faillite est faux. Je n'ai jamais pris une telle position.

[...]
4.
« Le directeur par intérim a déclaré qu'il n'y aurait plus de conclusions ni de recommandations écrites dans les rapports de gestion à moins que la Loi sur les sociétés d'assurances n'ait été directement enfreinte ou que la société ne soit au bord de la faillite. Le directeur par intérim a maintenu qu'il est impossible de faire respecter le PERR et que cet aspect-là ne pouvait donc pas être inclus dans les rapports de gestion. »
Ce qui a vraiment été dit
Il est faux de prétendre que j'aie déclaré qu'on ne doit pas formuler de recommandations écrites à moins qu'il n'y ait eu une infraction directe de la LSA ou que la société ne soit au bord de la faillite. Je n'ai jamais fait de telle déclaration.
Le PERR est une série de lignes directrices et les lignes directrices n'ont pas force de loi, contrairement aux lois et aux règlements pris en vertu des lois. Les institutions ne sont pas tenues de se conformer à la lettre des lignes directrices; c'est leur esprit que nous voulons respecter. La direction des institutions doit décider comment se conformer aux lignes directrices. Elle n'est pas tenue de faire exactement ce que la ligne directrice dit. Nous devons déterminer si ce qu'elle a fait satisfait aux exigences de la ligne directrice.
[...]

[37]    Mme Bratrud n'était pas d'accord avec M. Mackowiak en ce qui concernait le potentiel d'imposition des lignes directrices.

[38]    Le 25 juin 2001, elle a rencontré Gina Gosse, de la Section des ressources humaines du BSIF, en compagnie du représentant de son agent négociateur (M. Eadie). Dans une lettre de suivi de cette rencontre (pièce G-15) datée du 5 juillet 2001, M. Eadie a écrit ce qui suit :

[Traduction]

[...]

J'aimerais vous résumer de nouveau les principaux points qui me préoccupe dans cette évaluation de rendement.

1)       Elle a pris Mme Bratrud entièrement par surprise.
2)       Elle donne une fausse idée du milieu dans lequel Mme Bratrud travaille et ne tient pas compte des mesures contraignantes qu'elle a dû surmonter dans son travail quotidien.
3)       Elle ne tient pas compte de la confusion pourtant reconnue entourant la mise en ouvre d'un grand changement stratégique, le cadre de surveillance.
4)       C'est un document critiquant une ancienne façon de procéder et tentant de rendre Mme Bratrud responsable de pratiques antérieures subitement réputées être mauvaises.
5)       Elle n'est pas conforme aux faits et impute faussement des dépenses à Mme Bratrud.
6)       Elle n'est ni constructive, ni encourageante et ne fait pas état des réalisations de l'employée.
7)       Elle est humiliante et punitive.

[...]

[39]    M. Mackowiak a rédigé le 15 juillet 2001 une réfutation détaillée des commentaires figurant dans la lettre de M. Eadie (pièce E-1). L'employeur n'a pas communiqué ce document à Mme Bratrud, qui n'a pu l'obtenir qu'en présentant une demande fondée sur la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels.

[40]    Dans son grief, déposé le 15 août 2001, Mme Bratrud a réclamé les redressements suivants :

[Traduction]

Que mon évaluation de rendement soit modifiée (conformément à mon document du 5 juillet envoyé aux Ressources humaines du BSIF) de façon à refléter correctement mon rendement, avec la même cote que les années précédentes.

Que la rémunération perdue parce que je n'ai pas eu une meilleure cote me soit payée rétroactivement.

Que l'auteur de l'évaluation me présente des excuses écrites pour le tort causé à ma réputation.

Que le BSIF me mute hors du Groupe des institutions financières dans un service qui nous convienne mutuellement.

[41]    On a apporté des changements à l'évaluation de rendement de Mme Bratrud après que son grief eut été entendu au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, puis après le troisième palier (pièce G-8). En plus des changements apportés aux parties narratives de l'évaluation, la cote globale de Mme Bratrud a été changée, passant à [traduction] « répond toujours aux attentes ». Dans sa réponse au troisième palier de la procédure, l'employeur a aussi invité Mme Bratrud à faire d'autres commentaires en s'engageant à les inclure dans son dossier d'évaluation du rendement. Mme Bagnall a témoigné que M. Mackowiak et elle-même avaient revu l'évaluation de rendement de Mme Bratrud et qu'ils lui avaient apporté les changements dont ils pouvaient s'accommoder.

[42]    Quand Mme Bratrud est revenue de son congé de maladie, elle a témoigné qu'on ne lui a donné aucun travail à faire. Elle a déposé en preuve des courriels confirmant ses demandes de travail (pièce G-9). Mme Bagnall a témoigné qu'il était difficile de confier à Mme Bratrud le dossier d'une institution quelconque, étant donné qu'elle avait repris le travail vers la fin du cycle d'examen. On lui a demandé de contribuer aux activités de formation en analyse financière.

[43]    La politique sur le harcèlement personnel en milieu de travail du BSIF a été révisée en mars 1993 (pièce G-40). L'énoncé de politique se lit comme suit :

[Traduction]

Chaque employé(e) du Bureau peut s'attendre à être traité(e) équitablement en milieu de travail dans un environnement libre de harcèlement personnel. Il est interdit de se servir de son autorité ou de son poste pour intimider, contraindre ou harceler qui que ce soit. Le harcèlement personnel est inacceptable; il peut entraîner des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu'au congédiement de l'employé(e) qui s'en rend coupable.

[44]    Dans cette politique, l'« abus d'autorité » s'entend des cas où [traduction] « une personne se sert de son autorité ou de son poste, avec le pouvoir implicite que cela suppose, pour saper injustement la carrière d'un autre fonctionnaire. Cette définition englobe des exemples aussi évidents d'abus d'autorité que l'intimidation, la menace, le chantage et la coercition. L'abus d'autorité inclut aussi le favoritisme à l'égard d'un employé au détriment d'un autre. »

Résumé de l'argumentation

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée

[45]    M. Eadie a fait valoir que ce grief est censé me faire déterminer si l'évaluation de rendement rédigée par M. Mackowiak constituait un abus d'autorité. Mme Bratrud a le droit de travailler dans un milieu sans harcèlement, et l'article pertinent de la convention collective (l'article 41) stipule que le harcèlement s'entend notamment de l'abus d'autorité.

[46]    M. Eadie a soutenu que la définition de l'abus d'autorité comprend le fait de saper injustement la carrière d'un fonctionnaire, comme la Politique sur le harcèlement de l'employeur le précise, d'ailleurs (pièce G-40). Il m'a aussi renvoyé aux définitions figurant dans L'abus d'autorité au travail : Une forme de harcèlement [Abuse of Authority in the Workplace, A Form of Harassment], (Carswell), de Jean-Maurice Cantin, c.r. incluant l'abus de pouvoir et l'abus d'autorité. Selon lui, cette affaire ne peut pas être tranchée simplement par une analyse de ce que les parties ont dit, parce qu'elles ne jouaient pas à armes égales.

[47]    Pour M. Eadie, l'évaluation de rendement était un abus d'autorité de la part de M. Mackowiak avec l'aide de Mme Bagnall, du Service des ressources humaine et de la haute direction du BSIF, qui ont eu connaissance de l'évaluation et approuvé la cote attribuée. À son avis, l'employeur n'avait aucune raison opérationnelle de produire une telle évaluation (ni aucune raison légitime pour les fins d'évaluation du rendement). Mme Bagnall a d'ailleurs témoigné que la véritable raison d'être de l'évaluation de rendement était [traduction] d'« envoyer un message » à Mme Bratrud. Sa véritable raison d'être consistait à humilier la fonctionnaire s'estimant lésée devant ses pairs et à porter atteinte à sa réputation; c'était aussi un message lui interdisant de penser indépendamment. Cette évaluation de rendement a réduit à néant les chances de Mme Bratrud d'être considérée comme apte à obtenir de l'avancement. Elle a servi à saper sa carrière.

[48]    M. Eadie a déclaré que la question de savoir si M. Mackowiak était conscient de ce qu'il faisait quand il a rédigé l'évaluation de rendement est complexe. D'après lui, M. Mackowiak avait un motif. On lui avait donné carte blanche pour 10 mois à la Division de l'assurance-vie, un service où il n'avait jamais travaillé jusque-là. Il n'aimait vraiment pas la façon de procéder dans le passé et s'était fait donner le mandat de faire quelque chose pour y remédier. Il aurait raisonnablement dû savoir que l'évaluation de rendement qu'il a rédigée constituait un abus d'autorité. Cela dit, l'organisation doit aussi assumer sa part du blâme. En effet, M. Mackowiak n'avait jamais travaillé jusque-là dans le secteur de l'assurance-vie, mais on l'a pourtant chargé d'y introduire d'importants changements sans lui offrir de la formation sur le harcèlement ni sur la gestion du changement. Qui plus est, il introduisait des changements majeurs dans un service qui réclamait plus de ressources depuis des années.

[49]    Selon M. Eadie, avant cette évaluation de rendement, Mme Bratrud était une travailleuse d'équipe respectée, justifiant de longs états de service, réputée pour son ardeur au travail, son dévouement, ses excellentes connaissances techniques et sa bonne humeur. Elle travaillait depuis 23 ans au BSIF sans l'ombre d'un problème. Quand Mme Bagnall et M. Mackowiak ont pris la relève, il en a résulté à la fois un changement d'orientation et une augmentation de la charge de travail, en raison de la nouvelle obligation de « rajuster le stade » des entreprises.

[50]    M. Eadie a allégué que l'évaluation de rendement était la preuve écrite du harcèlement qui s'était manifesté; c'était [traduction] « la pointe de l'iceberg ». Il est devenu évident que Mme Bratrud n'arriverait pas à satisfaire M. Mackowiak et c'est pourquoi elle s'est [traduction] « fermée », ce qui est une réaction humaine normale. M. Mackowiak lui criait après et lui disait constamment qu'elle faisait mal son travail. Mme Voyatsis a parlé de climat toxique et s'est plainte aux Ressources humaines. Mme Bratrud craignait d'empirer les choses en parlant de ses difficultés; elle a préféré attendre que M. Mackowiak ouvre son jeu. Ce dernier l'avait incitée à croire qu'il n'allait pas la tenir responsable du passé. Dans ses notes (pièce G-12), on peut lire qu'il l'avait assurée que les questions de délai de production des rapports ne se refléteraient pas dans son évaluation de rendement. Il a témoigné avoir fait une erreur en en parlant dans l'évaluation de rendement qu'il a rédigée. C'était une erreur de taille; M. Eadie se demande pourquoi elle s'est produite.

[51]    Il maintient par ailleurs que le cadre stratégique de surveillance pouvait faire l'objet de différentes approches au sein du BSIF. Durant la période couverte par l'évaluation de rendement, il n'existait pas d'approche acceptable universelle pour sa mise en ouvre. Mme Bratrud est devenue un pion dans la stratégie d'application de M. Mackowiak et de Mme Bagnall, une stratégie diamétralement opposée à la façon de fonctionner dans le passé. M. Eadie a conclu qu'il semble y avoir eu une lutte pour le pouvoir entre la Division des assurances multirisques et la Division de l'assurance-vie, et que Mme Bratrud s'est trouvée prise entre deux feux.

[52]    De plus, M. Eadie a déclaré que M. Mackowiak a critiqué les lettres que Mme Bratrud avait envoyées sans les avoir examinées. Qui plus est, M. Mackowiak n'a fait officiellement état de son insatisfaction au sujet de l'approche de la Division de l'assurance-vie qu'en novembre 2000.

[53]    Bref, M. Eadie a déclaré que l'évaluation de rendement constituait un abus d'autorité pour les raisons suivantes :

  • la cote globale n'était pas nécessaire pour les fins légitimes d'une évaluation de rendement (une cote [traduction] « répond aux attentes » assortie de commentaires aurait fait l'affaire);
  • l'évaluation de rendement n'était pas fondée, et son auteur n'a pas fait les efforts voulus pour qu'elle le soit; il a blâmé Mme Bratrud pour des points sur lesquels elle n'exerçait aucun contrôle;
  • l'évaluation de rendement n'a pas étayé ses allégations de preuves ou d'autres indications probantes;
  • elle a exploité les points forts de Mme Bratrud en les déformant d'une façon qui ne pouvait que lui nuire;
  • elle est rédigée d'un ton condescendant; Mme Bratrud y est traitée comme si elle avait du [traduction] « potentiel », alors que M. Mackowiak aurait dû savoir qu'elle était très respectée;
  • elle a été une surprise complète pour Mme Bratrud;
  • elle était trompeuse puisqu'elle confondait le travail de Mme Bratrud et celui du FIG-411 dans son ensemble;
  • elle n'a jamais été discutée avec Mme Bratrud avant d'être communiquée à la haute direction.

[54]    M. Eadie a aussi maintenu que M. Mackowiak a contrevenu à la politique d'évaluation du rendement en n'effectuant pas un examen en milieu d'exercice. De plus, il n'a tenu aucun compte des demandes de ressources additionnelles, même s'il savait que Mme Bratrud faisait beaucoup d'heures supplémentaires. Il aurait pu modifier le plan de surveillance des institutions dont Mme Bratrud était responsable, mais il a préféré ne pas le faire.

[55]    M. Eadie a déclaré que l'évaluation avait fait de Mme Bratrud un cas [traduction] « marginal », en la réduisant au statut de paria dans la structure du BSIF. Après son retour au travail, on l'a laissée assise dans un bureau sans lui donner de travail; par surcroît, on ne lui a offert en guise d'autre poste que des affectations pour une période déterminée.

[56]    M. Eadie m'a renvoyé à Re Corporation of City of Toronto v. Canadian Union of Public Employees, Local 43 (1991), 19 L.A.C. (4th) 412, où il est écrit que, si l'arbitre de différends est convaincu que la véritable raison pour laquelle l'employeur a fait quelque chose n'est pas une décision d'affaires légitime, il n'a pas prouvé [traduction] « l'honnêteté de sa démarche ».

[57]    M. Eadie a aussi invoqué University of Calgary Faculty Association v. University of Calgary, [1999] A.G.A.A., No. 104, décision dans laquelle on a conclu que les décisions du doyen d'annuler des cours donnés par les employés s'estimant lésés constituaient un abus d'autorité parce qu'il avait des motifs cachés.

[58]    Enfin, M. Eadie m'a demandé d'accueillir le grief et d'ordonner à l'employeur de prendre les mesures correctives demandées.

Pour l'employeur

[59]    Me McGraw a déclaré que rien dans l'évaluation de rendement ne pourrait être qualifié de menaçant ni d'abusif. Les parties ne s'entendent pas sur ce qui est approprié et correct dans ce document, mais cela ne permet pas de conclure à du harcèlement ni à de l'abus d'autorité.

[60]    L'avocat a soutenu que je ne devrais pas évaluer moi-même le travail de Mme Bratrud pour décider si je souscris ou non à l'évaluation de rendement contestée. Je ne devrais pas non plus tenir compte des autres allégations de harcèlement en milieu de travail soulevées à l'audience. Selon lui, il ne s'agit pas en l'occurrence d'un débat sur l'interprétation du cadre stratégique. L'employeur était investi du droit de la direction de décider comment ce cadre devait être appliqué, et les employés avaient la responsabilité de se conformer à ses instructions.

[61]    Me McGraw a fait valoir que, conformément à la décision rendue dans Burchill c. Procureur général du Canada, [1981] 1 C.F. 109, la portée du grief se limite à l'évaluation de rendement elle-même. Le fardeau de la preuve incombe à Mme Bratrud, qui ne s'en est pas acquittée.

[62]    Me McGraw maintient que je dois tenir compte des changements apportés à la version originale de l'évaluation de rendement. D'après lui, si je devais conclure qu'elle contient des énoncés constituant du harcèlement, je dois vérifier s'ils ont été modifiés, car agir autrement saperait la raison d'être même de la procédure interne de règlement des griefs.

[63]    L'avocat a aussi déclaré que rien ne prouve l'existence d'une vendetta personnelle de M. Mackowiak contre Mme Bratrud. La décision University of Calgary Faculty Association étaye la position de l'employeur, puisqu'il n'a pas été prouvé que les commentaires que M. Mackowiak a faits dans l'évaluation avaient un [traduction] « motif caché ». Par sa nature même, une évaluation de rendement est à la fois objective et subjective. Ce n'est pas seulement une question de fait, puisqu'elle reflète aussi l'opinion de l'évaluateur; c'est une critique constructive. Me McGraw a donc déclaré que l'évaluation originale ne pouvait pas être considérée comme purement négative vu qu'elle renfermait plusieurs commentaires favorables et des cotes positives.

[64]    L'évaluation est aussi par sa nature même une utilisation appropriée de l'autorité de la direction et la produire est un droit de la direction. Me McGraw a soutenu qu'il ne s'agit pas en l'occurrence d'un grief contestant du harcèlement, mais plutôt d'une tentative visant à faire arbitrer une évaluation de rendement.

[65]    L'avocat m'a renvoyé à la version modifiée de l'article pertinent de la convention collective en vigueur entre les parties qui autorise désormais les employés à produire des commentaires écrits en réponse à l'évaluation, commentaires qui peuvent lui être annexés.

[66]    Me McGraw a déclaré qu'il s'agit ici de savoir si M. Mackowiak a rédigé une évaluation de rendement qu'il estimait correcte. En outre, avec une preuve écrasante, a-t-il décidé d'ignorer des éléments qu'il savait être injustes et incorrects? L'avocat a affirmé que ce n'était pas le cas.

[67]    Il a déclaré que l'expérience professionnelle antérieure de M. Mackowiak et de Mme Bagnall (et plus précisément l'allégation que les deux n'avaient jamais travaillé dans le secteur de l'assurance-vie) n'est pas pertinente. Comme les deux étaient les surveillants de Mme Bratrud, elle avait l'obligation de se conformer à leurs directives.

[68]    Me McGraw a déclaré que le témoignage de Mme Voyatsis n'est pas crédible. Sa preuve est contradictoire et elle avait [traduction] « des comptes à régler ».

[69]    Me McGraw a souligné que, dans L'abus d'autorité au travail, il y a mention de Re Corporation of City of Toronto, où l'on a jugé que l'évaluation de rendement ne constituait pas du harcèlement. Selon lui, conclure que dire qu'une fonctionnaire [traduction] « ne répond pas toujours » aux attentes constitue un abus d'autorité jetterait une douche froide sur les gestionnaires et saperait leur capacité de formuler des critiques à la fois honnêtes et constructives. En l'espèce, rien ne prouve que Mme Bratrud ait été humiliée ni harcelée d'une façon quelconque.

[70]    Me McGraw a souligné que, dans son témoignage, M. Mackowiak a déclaré que sa mention de délais dans l'évaluation était un oubli, et qu'il avait accepté la responsabilité de cet oubli. Ce n'est pas là une indication de harcèlement. L'avocat se demande pourquoi cette question n'a été soulevée qu'à l'audience, en disant que Mme Bratrud doit assumer une certaine responsabilité pour ne pas l'avoir soulevée auparavant dans la procédure de règlement des griefs.

[71]    Il a déclaré que rien ne prouve non plus que l'opinion de M. Mackowiak sur la question des ressources ait été de mauvaise foi. Selon lui, ce que Mme Bratrud a vécu après son retour au travail n'est pas admissible en preuve. De toute manière, cette situation avait des raisons valables.

[72]    En ce qui concerne les excuses réclamées comme redressement, Me McGraw a maintenu qu'on ne peut pas forcer quelqu'un à présenter des excuses.

[73]    Il m'a aussi renvoyé aux affaires suivantes : Ahad c. Conseil du Trésor (Ministère de la Défense nationale), dossiers de la CRTFP 166-2-15840, 166-2-16038 et 166-2-16233 (1987) (QL); Joss c. Conseil du Trésor (Agriculture et Agroalimentaire Canada), dossier de la CRTFP 166-2-27331 (2001) (QL); Veilleux c. Conseil du Trésor (Commission de la fonction publique), dossier de la CRTFP 166-2-11370 (1982); et Ansari c. Conseil du Trésor (Ministère des Affaires extérieures), dossier de la CRTFP 166-2-14680 (1984) (QL).

Réplique

[74]    M. Eadie a déclaré que Mme Bratrud ne me demande pas de récrire l'évaluation. Cela dit, pour trancher la question du harcèlement, je dois examiner l'évaluation elle-même. En outre, selon lui, c'est la première évaluation qui constituait du harcèlement, et c'est celle-là qui devrait être examinée en l'espèce.

Motifs

[75]    Mme Bratrud allègue que M. Mackowiak a abusé de son autorité en lui faisant une appréciation de rendement négative. Fournir aux employés des évaluations de leur rendement est un rôle d'importance critique pour les surveillants, et alléguer qu'une évaluation constitue un abus d'autorité est grave. Pour pouvoir gérer efficacement le rendement de leurs subordonnés, les superviseurs doivent être libres d'exprimer leurs opinions honnêtes à cet égard. Dans ce contexte, la collection collective applicable limite le rôle de l'arbitre de grief à décider si le contenu de l'évaluation n'est pas fondé et si son auteur avait une intention malveillante en la rédigeant. C'est seulement lorsque les observations ou les conclusions du surveillant ne sont pas fondées ou que la preuve révèle une intention de nuire que l'arbitre de grief pourrait conclure qu'une évaluation de rendement constitue un abus d'autorité. Pour les motifs que je vais maintenant exposer, j'ai conclu que les observations et les conclusions de M. Mackowiak étaient motivées et qu'il n'avait aucune intention malveillante. Par conséquent, j'estime que l'évaluation de rendement ne constitue pas un abus d'autorité.

[76]    L'audience sur le fond a suivi quelques jours de témoignages sur la question de compétence. Une partie de la preuve avancée dans ce contexte est pertinente pour que je puisse trancher le grief au fond; j'en ai donc tenu compte dans ma décision. Le résumé de cette preuve figure dans la décision rendue antérieurement (2004 CRTFP 10).

[77]    La question de savoir quelle évaluation est en jeu dans ce grief a été soulevée par l'employeur : s'agit-il de l'évaluation originale ou de sa version modifiée? L'employeur déclare que seule la version modifiée de l'évaluation est en jeu, mais je ne suis pas d'accord. La version fondamentalement contestée est l'originale, et ce, parce que le grief ne portait pas sur l'évaluation de rendement en tant que document, mais plutôt sur les actions du gestionnaire, M. Mackowiak, quand il l'a rédigée. Dans la mesure où Mme Bratrud a allégué que d'autres employés du BSIF abusaient de leur autorité, notamment des membres des Ressources humaines et de la haute direction, les changements apportés à la version originale sont pertinents parce qu'ils reflètent ce que l'employeur a fait pour répondre aux doléances de l'intéressée quant à son évaluation. Néanmoins, ces changements ne seraient pertinents que si j'avais conclu que l'évaluation originale constituait un abus d'autorité.

[78]    Me McGraw s'est aussi opposé à l'introduction en preuve des évaluations de rendement de Mme Bratrud pour les années précédentes, et j'ai réservé ma décision sur la pertinence de ces documents ainsi que sur l'importance que je devais de leur accorder. Étant donné que le grief ne porte que sur l'évaluation de rendement de 2000-2001, les évaluations antérieures ne servent que de toile de fond aux allégations figurant dans le grief. Le fait qu'une surveillante antérieure (Mme Lepatko) avait formulé des réserves quant à la gestion du temps de Mme Bratrud en disant qu'elle devait limiter la masse de détails présentés dans ses documents de travail étaye jusqu'à un certain point ce que M. Mackowiak a écrit dans l'évaluation, à savoir que Mme Bratrud prenait [traduction] « de copieuses notes ». Les cotes globales montrent aussi que Mme Bratrud était très appréciée par ses anciens surveillants et qu'elle n'avait jamais eu de gros problèmes de rendement dans le passé.

[79]    L'abus d'autorité n'est pas défini dans la convention collective. Bien que la politique du Conseil du Trésor sur le harcèlement en milieu de travail ne soit pas applicable aux parties à la convention collective pertinente puisque le BSIF est un employeur distinct, la version de 1994 renferme bel et bien une définition aussi pratique qu'utile de l'abus d'autorité. Elle est d'ailleurs citée dans L'abus d'autorité au travail de Cantin. (La définition figurant dans la politique de l'employeur (pièce G-40) est analogue à celle de la politique du Conseil du Trésor.)

[Traduction]

L'abus d'autorité est une forme de harcèlement qui se manifeste lorsqu'une personne se sert de façon inacceptable de l'autorité et du pouvoir inhérents à son poste pour compromettre l'emploi d'un employé, saper son rendement dans cet emploi, menacer son gagne-pain, gêner son avancement professionnel ou influer indûment sur sa carrière et comprend l'intimidation, la menace, le chantage ou la coercition.

[80]    Comme M. Cantin l'a écrit, il faut être prudent pour connaître des plaintes faisant suite à des évaluations de rendement, car [traduction] « le superviseur a le droit d'évaluer le rendement d'un employé sans être soumis à des contraintes ni craindre qu'il porte plainte, ce qui pourrait devenir une forme de chantage. »

[81]    Dans McElrea c. Procureur général du Canada (Industrie Canada), 2003 CFPI 774, une affaire concernant une enquête sur un cas de harcèlement en vertu de la politique du Conseil du Trésor sur le harcèlement en milieu de travail, le juge a conclu que le gestionnaire doit avoir une intention coupable pour qu'on puisse conclure à l'abus d'autorité :

Lorsque je lis la définition d'abus d'autorité contenue à la politique, cela exige la présence de l'intention de nuire à un employé. La définition stipule qu'un abus d'autorité survient lorsque l'autorité ou le pouvoir inhérent à un poste est exercé de façon à « compromettre l'emploi d'un employé [...] ». La définition n'associe pas la conduite incorrecte « qui pourrait avoir pour effet de compromettre l'emploi d'un employé » à un abus d'autorité. L'utilisation des expressions « intimidation, menace, chantage ou coercition » renforce l'idée selon laquelle un acte, pour constituer de l'abus d'autorité, doit représenter plus qu'une décision administrative manquant de rigueur.

[82]    La décision University of Calgary Faculty Association citée par M. Eadie, confirme aussi qu'il faut que le gestionnaire ait une intention malveillante ou un [traduction] « motif caché ». Or, rien dans la preuve ne m'incite à conclure que M. Mackowiak ait eu l'intention de nuire à Mme Bratrud.

[83]    Dans Tucci c. Canada (Revenu Canada - Douanes, Accise et Impôt), [1997] A.C.C.F. no 159 (concernant une demande de contrôle judiciaire faisant suite à une enquête sur une mutation en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique), le juge Gibson a souligné qu'il peut y avoir abus de pouvoir dans l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire sans que la personne qui exerce ce pouvoir ait une intention répréhensible :

[Traduction]

[...]

[...] Il en serait ainsi, par exemple, lorsque le délégué se fonde sur des éléments insuffisants ou en ne tenant pas compte d'éléments pertinents ou encore lorsqu'il agit d'une manière discriminatoire, notamment en se fondant sur des éléments insuffisants, ou ne tient pas compte d'éléments pertinents. [...]

[...]

[84]    La nature même des évaluations de rendement les rend subjectives, car l'évaluation est l'appréciation par le gestionnaire du rendement d'un de ses subordonnés. L'employé et le gestionnaire peuvent n'être pas toujours d'accord sur l'évaluation, mais tant que l'opinion du gestionnaire est raisonnablement basée sur les faits, elle ne peut être un abus d'autorité. S'il y a des erreurs dans l'évaluation (comme y mentionner une question dont M. Mackowiak avait promis de ne pas tenir compte dans ce contexte), la bonne façon d'y remédier consiste à se prévaloir de la procédure d'évaluation du rendement elle-même, dans laquelle les employés sont invités à donner leur rétroaction, ou encore de la procédure de règlement des griefs. C'est essentiellement le cas lorsque les erreurs en question sont mineures comme en l'espèce. On se saurait dire que M. Mackowiak se soit fondé sur des éléments insuffisants ou n'ait pas tenu compte d'éléments pertinents pour arriver à son évaluation du rendement de Mme Bratrud. Rien dans la preuve n'indique qu'il ait agi de façon discriminatoire en la rédigeant.

[85]    Mme Bratrud a eu la possibilité d'ajouter ses commentaires à l'évaluation de son rendement. Rien dans la preuve n'indique qu'on lui ait imposé un délai quelconque pour cet ajout; je suis donc convaincu qu'il lui est encore possible de le faire. Je prends bonne note aussi que, dans la réponse à son grief au dernier palier de la procédure, Mme Bratrud a été invitée à présenter des commentaires qui pourraient être versés à son dossier d'évaluation de rendement. En outre, la convention collective actuelle prévoit explicitement ce droit de faire des commentaires, même si elle n'était pas encore en vigueur lorsque le grief a été déposé.

[86]    L'audience a confirmé l'existence d'une relation difficile entre Mme Bratrud et M. Mackowiak. Cette relation difficile a été exacerbée par l'introduction du cadre stratégique de surveillance et par sa mise en ouvre. Le cadre stratégique était un changement d'importance pour le BSIF et un important changement de son approche de surveillance des institutions financières. Néanmoins, la mise en ouvre d'un nouveau cadre et les désaccords quant à son application ne peuvent pas, dans ces circonstances, m'amener à conclure à l'existence d'un abus d'autorité. La direction a le droit de diriger, et tant que ses directives ne sont pas illégales, les employés ont l'obligation de s'y conformer.

[87]    Cela dit, bien que le BSIF ait encouragé les gestionnaires à faire des examens du rendement de leurs subordonnés au milieu de l'exercice (voir pièce G-36), il n'y a pas eu de tel examen dans le cas de Mme Bratrud. Pourtant, ne pas appliquer les pratiques exemplaires de gestion du rendement ne constitue pas un abus d'autorité. Quoi qu'il en soit, la preuve a démontré que M. Mackowiak rencontrait souvent Mme Bratrud pour lui parler de divers aspects de son rendement. Elle a aussi révélé qu'il avait informé tout le personnel de ses préoccupations quant aux modalités d'application du cadre de surveillance (pièces G-38 et G-39). Bref, on ne peut pas prétendre que Mme Bratrud a été surprise par une grande partie des commentaires figurant dans cette évaluation de rendement, puisqu'elle en avait été informée au cours de l'année visée par l'évaluation. En outre, même si ces commentaires avaient été une surprise totale, cela ne suffirait pas en soi pour m'amener à conclure que l'évaluation équivalait à un abus d'autorité.

[88]    Puisque j'ai conclu que l'évaluation originale rédigée par M. Mackowiak ne constituait pas un abus d'autorité, les actions que l'employeur a prises par la suite pour réviser l'évaluation afin de la rendre plus favorable à la fonctionnaire s'estimant lésée ne peuvent pas non plus constituer un abus d'autorité. Dans la procédure de règlement des griefs, l'employeur a apporté des changements aux parties narratives de l'évaluation et révisé la cote globale à la hausse en la portant à [traduction] « répond toujours » aux attentes. Qui plus est, l'employeur a explicitement invité Mme Bratrud à lui fournir d'autres commentaires qui pourraient être versés à son dossier d'évaluation. L'employeur s'est donc acquitté de ses obligations à l'endroit de Mme Bratrud dans le processus d'évaluation du rendement.

[89]    Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

[90]    Le grief est rejeté.

Le 26 mai 2006.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Ian R. Mackenzie,
arbitre de grief

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