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Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2006-07-28
  • Dossiers:  166-02-36804 et 36805
  • Référence:  2006 CRTFP 93

Devant un arbitre de grief



ENTRE

ANDREW G. FOK ET DAVID A. GRANGER

fonctionnaires s’estimant lésés

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Transports)

employeur

Répertorié
Fok et Granger c. Conseil du Trésor (ministère des Transports)

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant : Barry Done, arbitre de grief

Pour les fonctionnaires s’estimant lésés : Phillip G. Hunt, avocat

Pour l’employeur : Jennifer Champagne, avocate


Affaire entendue à Ottawa, Ontario,
le 22 juin 2006.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Griefs renvoyés à l'arbitrage

[1]    Les parties ont convenu de procéder en l'espèce par voie d'un « Exposé conjoint des faits ».

[2]    Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ces renvois à l'arbitrage de grief doivent être décidés conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (l'« ancienne Loi »).

Résumé de la preuve

[3]    Le 26 novembre 2004, Robert Richard, chef de la formation relative aux avions à turboréacteur, a fait savoir par courrier électronique aux deux fonctionnaires s'estimant lésés qu'ils devaient utiliser avant la fin de l'exercice leurs crédits de congé annuel en sus de la limite de report admissible de 25 jours (pièce 3).

[4]    Selon ce courriel, les fonctionnaires s'estimant lésés devaient présenter avant le 1er décembre 2004 un plan indiquant comment ils utiliseraient ces crédits et il leur était précisé que, faute de présentation d'un tel plan, l'utilisation de ces crédits de congé annuel serait déterminée pour eux.

[5]    Les deux fonctionnaires s'estimant lésés ont, la journée même, déposé un grief concernant cet ordre.

[6]    Environ deux semaines plus tard, soit le 8 décembre 2004, l'employeur a assoupli quelque peu sa position, acceptant de faire un paiement correspondant à un cinquième des crédits de congé annuel en sus de la limite de 25 jours (pièce 4).

[7]    Sept semaines après cette modification, soit le 24 janvier 2005, l'employeur a encore modifié sa position. Cette dernière modification changeait complètement le précédent ultimatum de prévoir une utilisation des crédits de congé annuel en sus de la limite de 25 jours et de les utiliser avant la fin de l'exercice, faute de quoi l'utilisation de ces crédits de congé serait déterminée par l'employeur.

[8]    D'après la note de service du 24 janvier 2005, tous les crédits de congé annuel en sus du report maximum devaient donner lieu à une compensation en argent (pièce 5).

[9]    La première et surtout la plus récente des modifications quant à la liquidation des crédits de congé annuel excédentaires ont été faites avant la réponse au premier palier de la procédure de règlement des griefs (pièce 6).

[10]    Avant l'audience, j'ai, par l'intermédiaire du bureau du greffier, avisé les deux parties que je me préoccupais de ce que ces événements subséquents pouvaient avoir rendu les griefs théoriques.

[11]    Il a été répondu, par l'entremise du bureau du greffier, que les parties voulaient une décision sur cette affaire. Là encore, au début de l'audience, j'ai dit ce qui me préoccupait et j'ai invité les parties à me présenter des observations sur la question de ma compétence. Les parties ont déclaré qu'elles voulaient seulement une ordonnance déclaratoire, car aucun rajustement des banques de congé des fonctionnaires s'estimant lésés n'était requis.

Motifs de décision

[12]    Comme je l'ai mentionné aux parties à l'audience, je ne peux considérer que j'ai compétence du simple fait du consentement des parties. La convention collective applicable aux présents griefs est la convention entre le Conseil du Trésor et l'Association des pilotes fédéraux du Canada, groupe Navigation aérienne (tous les employés), convention ayant pour date d'expiration le 25 janvier 2004 (pièce 1). Ce document prévoit une procédure de règlement des griefs, et la clause 35.05 de la convention indique qui est en droit de présenter un grief :

[...]

[...] tout employé qui estime avoir été traité d'une façon injuste ou qui se considère lésé par une action quelconque ou une absence d'action de la part de l'Employeur [...] a le droit de présenter un grief [...]

[...]

[13]    Ce droit naît uniquement lorsque l'employé estime avoir été traité d'une façon injuste ou se considère comme lésé par une action ou une absence d'action de la part de l'employeur (je souligne). Je note l'utilisation du passé, c'est-à-dire que quelque chose doit s'être produit comme condition préalable du droit de présenter un grief. Cela interdit évidemment le dépôt de griefs prématurés ou potentiels.

[14]    La procédure de règlement des griefs prévue dans la convention collective fait écho à l'article 91 de l'ancienne Loi. La clause 35.05 de la convention collective dit : « [...] Sous réserve de l'article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et conformément à ses dispositions [...] ». L'alinéa 91(1)a) de l'ancienne Loi dit : « [...] lorsqu'il [le fonctionnaire] s'estime lésé : a) par l'interprétation ou l'application à son égard [...] [je souligne] ». Les présents griefs sont des griefs individuels selon l'ancienne Loi et non des griefs collectifs du syndicat et ils doivent donc être présentés contre quelque conséquence personnelle effective d'une politique ou d'une  directive par opposition à quelque chose qui pourrait arriver ultérieurement.

[15]    La directive contestée indique que l'employeur pourrait prendre une mesure (détermination de l'utilisation de congé annuel) si l'employé omet de prendre une certaine mesure (fournir un plan avant le 1er décembre 2004 pour indiquer comment des crédits de congé excédentaires seront utilisés avant la fin de l'exercice, c'est-à-dire avant le 31 mars 2005).

[16]    Il s'agit ici de griefs potentiels par nature, et je n'ai pas compétence pour les entendre. Manifestement, si on n'est pas en droit de présenter un grief conformément à la convention collective ou à l'ancienne Loi, il n'y a pas de grief qui puisse être renvoyé à l'arbitrage de grief.

[17]    Il n'y a rien de nouveau dans ma conclusion que les griefs sont prématurés. À partir de 1982, avec l'affaire Reid c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), dossier de la CRTFP 166-02-12631, jusqu'en 1993 inclusivement, avec l'affaire Nicholson c. Conseil du Trésor (ministère des Transports), dossier de la CRTFP 166-02-22548, il n'y a pas moins de sept décisions concernant la compétence à l'égard de griefs prématurés ou potentiels, et toutes ces décisions indiquent que l'arbitre de grief n'a pas compétence à l'égard de tels griefs. Il n'existe pas de motif impérieux pour que je m'écarte de cette approche uniforme, et je suis d'accord sur le raisonnement de l'arbitre de grief Steward dans Reid, aux paragraphes 25 et 26, qui se lisent comme suit :

[...]

[25]    Bien que l'employé s'estimant lésé n'ait subi aucune perte de salaire, il est d'avis que son grief est légitime. Toutefois, il n'a pas été démontré que j'avais compétence pour trancher la question en vertu du paragraphe 91(1) de la Loi. En effet, selon ce paragraphe, lequel est reproduit ci-dessous, il est clair que M. Reid peut renvoyer un grief à l'arbitrage uniquement si ce grief a trait à l'application ou à l'interprétation, « en ce qui le concerne », d'une disposition de la convention collective.

[26]    Pour que j'aie compétence en l'occurrence, il faudrait que M. Reid ait un véritable grief, non un grief en puissance. Or, de l'aveu même de ce dernier, il n'a pas été lésé et le seul redressement qu'il demande, c'est une déclaration qui confirme son interprétation de la clause 30.12b) de la convention collective. Il est manifeste qu'il n'y a pas matière à grief. Par conséquent, je n'ai pas compétence pour rendre une décision.

[...]

[18]    Je suis également arrivé à la conclusion que les présents griefs sont théoriques. De plus, l'exposé conjoint des faits, au point 7, indique clairement que, à compter du 24 janvier 2005, la directive contestée ne s'appliquait plus aux présents fonctionnaires s'estimant lésés ni en fait à un employé quelconque financé par la portion de Transports Canada du budget (pièce 5). De fait, à ce stade, il n'y avait plus de différend entre les parties - il n'y avait pas de cause d'action.

[19]    Vu ce qui précède, je considère que les présents griefs sont à la fois théoriques et prématurés.

[20]    Toute observation que je pourrais formuler comme opinion incidente ne serait pas utile aux parties. J'ajouterai toutefois que, si ce problème est un problème qui continue, un recours est possible en vertu de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Motifs

[21]    Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

[22]    Les griefs sont rejetés.

Le 28 juillet 2006.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Barry Done,
arbitre de grief

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