Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le nom du plaignant avait été inscrit dans un bassin comptant dix-sept candidats, mais sa candidature n'avait été retenue pour aucune des trois nominations. Le plaignant a demandé communication de neuf éléments d'information distincts. Selon lui, le Tribunal devrait établir un seuil d’admissibilité peu élevé pour déterminer la pertinence des renseignements. Il a ajouté que le terme << renseignements >> devrait être interprété dans son sens large pour inclure davantage que la seule information écrite. L’intimé a fait valoir que les renseignements demandés n’étaient pas pertinents en l’espèce, notamment les éléments d’information concernant d’autres candidats non retenus. Il a soutenu d’autre part que le plaignant n’avait pas qualité pour représenter d’autres employés dont la candidature n’aurait pas été retenue dans un processus de nomination. Décision : Le Tribunal a fait remarquer que la partie présentant une demande d’ordonnance doit démontrer à la satisfaction du Tribunal la pertinence des renseignements réclamés. Une personne ne peut porter plainte que si << elle n’a pas été nommée >> et non pas contre le fait que d’autres candidatures n’ont pas été retenues. La plainte en l’espèce portait essentiellement sur l’établissement du critère de mérite << expérience récente >> et sur son application par rapport au plaignant. La demande a été analysée en conséquence. Dans la mesure où la LEFP n’exige pas le classement des candidats, la comparaison des résultats par rapport aux résultats obtenus par le candidat reçu n’est pas nécessaire, à moins que ce ne soit pertinent pour une plainte spécifique. Bien que la communication de renseignements pertinents puisse comprendre autre chose que des documents écrits et qu’une partie doive fournir des explications orales le cas échéant, le Tribunal n’a pas compétence pour contraindre une partie à fournir à une autre partie ce qui peut s’apparenter à une << admission >> ou à une << reconnaissance >>. Pour qu’elle soit efficace, la communication de renseignements exige que les deux parties se rencontrent pour discuter de la plainte. Demande refusée.

Contenu de la décision

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Dossier:
2006-0096
Rendue à:
Ottawa, le 30 novembre 2006

RICK VISCA
Plaignant
ET
LE SOUS-MINISTRE DE LA JUSTICE
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Demande d'ordonnance de communication de renseignements
Décision:
La demande est rejetée
Décision rendue par:
Guy Giguère, président
Langue de la décision:
Anglais
Répertoriée:
Visca c. le sous-ministre de la Justice et al.
Référence neutre:
2006 TDFP 0016

Motifs de la décision

Introduction

1 Le plaignant demande au Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) d’ordonner à l’intimé de lui fournir certains renseignements.

Contexte

2 Le plaignant, M. Visca, a participé à un processus de sélection annoncé (numéro 06‑JUS‑TOR‑CC‑29431) visant à doter un poste de juriste-expert, Poursuites en matière de drogues, au groupe et niveau LA‑2B au sein du ministère de la Justice, Service fédéral des poursuites (le SFP), à Toronto. Vingt demandes ont été reçues. Bien que sa candidature ait été acceptée et que son nom ait été inscrit dans un répertoire de candidats qualifiés, M. Visca n’a pas été nommé à un poste de juriste-expert à la fin du processus en question. Trois candidats inscrits dans le répertoire ont été nommés aux postes à doter.

3 La plainte a été déposée le 22 août 2006. Le plaignant déclare que le processus de sélection n’a pas permis de tenir compte comme il se doit de la plupart des critères de mérite établis, ou de les appliquer convenablement. Selon lui, un seul des quatorze critères de mérite a été appliqué dans son cas. Le plaignant ajoute que l’utilisation de plusieurs jurys de sélection pour mener les entrevues a compromis l’intégrité et la neutralité du processus de sélection.

4 Le plaignant a initié la communication des renseignements par l’envoi d’un courriel le 12 septembre 2006 dans lequel il demandait à l’intimé de lui communiquer des renseignements. Le plaignant a reçu certains des renseignements en question. Le 25 septembre 2006, le plaignant a présenté au Tribunal la demande en l’espèce, dans laquelle il demandait qu’on lui communique un certain nombre d’éléments d’information, qui sont résumés ci‑dessous :

  1. le nombre de candidats;
  2. le nombre de candidats éliminés et acceptés;
  3. l’année au cours de laquelle chaque candidat a atteint le groupe et le niveau LA-2A;
  4. l’évaluation de chaque candidat accepté à la présélection, ainsi que les notes prises par le jury de présélection;
  5. la date à laquelle M. Goldstein a été nommé à un poste LA-2B;
  6. la reconnaissance ou l’admission que le plaignant a été placé au sein de l’équipe des poursuites en matière fiscale à la demande pressante du directeur du SFP;
  7. l’admission ou la position en ce qui concerne l’équipe au sein de laquelle le plaignant aurait été affecté s’il n’avait pas été nommé au sein de l’équipe des poursuites en matière fiscale;
  8. la reconnaissance ou l’admission que le plaignant a été écarté de l’entrevue lors du concours lié aux poursuites en matière fiscale LA‑2B mené en même temps que le concours lié aux poursuites en matière de drogues LA‑2B;
  9. une explication sur les équipes du SFP dont faisaient partie les candidats reçus au moment de leur nomination dans le cadre du processus de nomination en l’espèce.

5 L’intimé a fourni les éléments I et II le 28 septembre 2006. Le 2 novembre 2006, le Tribunal a demandé aux parties de lui fournir des copies de tous les documents communiqués et de confirmer si elles s’étaient rencontrées pendant la période de communication de renseignements. Le Tribunal a également demandé à l’intimé de lui remettre une copie des critères de mérite.

6 Le Tribunal a reçu plus de 150 pages d’information, qui avaient été fournies au plaignant le 25 septembre 2006. Dans ces pages, on trouve des documents et des courriels portant sur les sujets suivants : la façon dont les critères de mérite ont été établis; la nécessité d’avoir recours à de nombreux comités pour diriger les entrevues; les instructions à l’intention des membres des comités en ce qui a trait à la façon d’évaluer chaque critère de mérite; l’évaluation du plaignant par rapport à chaque critère de mérite et les notes prises par chaque membre du comité; et les détails concernant le processus de sélection final. Selon le guide de cotation et d’autres documents, l’expérience récente était la première des onze qualifications essentielles et trois qualifications constituant un atout qui ont été prises en compte dans les critères de mérite.

7 Comme il a déjà été mentionné, la confirmation que le plaignant a été jugé qualifié dans le cadre du processus de dotation en question et le fait que son nom a été inscrit dans un répertoire de candidats qualifiés pour occuper d’éventuels postes vacants revêtent un intérêt particulier. En outre, un autre document indique que « dix‑sept (17) candidats ont satisfait aux qualifications énoncées dans le processus annoncé, et que leurs noms ont été conservés dans le répertoire de candidats. » [Traduction]

Question en litige

Les renseignements demandés sont-ils pertinents par rapport à la plainte?

Observations

8 Le plaignant prétend que le Tribunal devrait établir un seuil d’admissibilité peu élevé pour déterminer que les renseignements sont pertinents. Selon le plaignant, « dans la mesure où l’on peut dire que les renseignements demandés peuvent aider de façon logique à faire progresser l’enquête, ces renseignements sont "pertinents" » [Traduction].

9 Le plaignant affirme que l’établissement ou l’application de critères de mérite qui portent atteinte à la capacité d’un candidat de participer efficacement à un processus de sélection constitue un abus de pouvoir. Le plaignant est surtout préoccupé par le critère « Vaste expérience récente de l’exécution de poursuites complexes intentées en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, notamment des poursuites exigeant l’interception de communications » [Traduction]. Il insiste sur le fait que c’est l’expérience « récente » qui pose le problème le plus délicat. Le plaignant ajoute que le directeur du SFP nomme des avocats qui doivent travailler dans les équipes oeuvrant dans des domaines spécialisés, et que ces affectations limitent leur capacité de poser leur candidature à des postes lorsque le critère d’expérience récente est exigé.

10 Le plaignant prétend que l’établissement ou l’application du critère de mérite « expérience récente » a des répercussions sur une grande proportion des titulaires de poste LA-2A au sein du SFP. Ainsi, l’élément III, à savoir l’année au cours de laquelle chaque candidat a atteint le niveau LA-2A, est pertinent en ce qui concerne sa plainte selon laquelle les cas d’abus sont omniprésents au sein du SFP.

11 Selon le plaignant, l’élément IV est pertinent quant à la manière dont l’énoncé des critères de mérite a été appliqué à chaque candidat. Le plaignant prétend qu’il devrait au moins pouvoir comparer son évaluation à celles des candidats reçus.

12 Le plaignant et un autre avocat, M. Goldstein, ont participé à un processus de dotation en 2001 pour un poste d’avocat principal, et leurs noms ont été inscrits sur une liste d’admissibilité liée à un poste LA-2B en février 2002. Le plaignant prétend que l’élément V, à savoir la date de la promotion de M. Goldstein à un poste LA-2B, est pertinent, car il sert d’exemple pour démontrer dans quelle mesure le plaignant a été désavantagé dans le cadre du présent processus de sélection.

13 Finalement, le plaignant prétend que tous les candidats reçus faisaient partie de l’équipe des poursuites contre le crime organisé et que, par conséquent, les éléments de VI à IX sont pertinents pour établir qu’on a empêché le plaignant de travailler dans cette équipe pendant l’année et demie qui a précédé le processus de nomination.

14 L’intimé prétend que les éléments III et IV ne sont pas pertinents, car ils concernaient d’autres postulants qui n’ont pas été nommés. Selon le paragraphe 77(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP), une personne peut présenter une plainte à l’encontre du fait qu’elle n’a pas été nommée. Cependant, dans un recours, le plaignant n’a pas le pouvoir de représenter d’autres employés dont la candidature n’aurait pas été retenue dans le cadre d’un processus de nomination. Ceux-ci doivent présenter eux-mêmes leur plainte au Tribunal.

15 L’intimé prétend que l’élément V, à savoir la date de nomination d’un autre employé qui n’est pas visé par le présent processus de nomination, n’est pas pertinent. En ce qui concerne les éléments de VI à IX, l’intimé déclare que les renseignements demandés n’existent pas et qu’ils ne font pas partie de la décision en matière de nomination.

16 Comme le Tribunal a rendu sa décision dans l’affaire Tibbs c. le sous‑ministre de la Défense nationale et al.,[2006] TDFP 0008 après que le plaignant a déposé la demande d’ordonnance, ce dernier a présenté une réponse aux observations de l’intimé. Le plaignant prétend que l’unique solution de rechange à l’obtention des renseignements sur consentement, ou par voie d’ordonnance, consiste à exiger la présence de témoins à l’audience. Le plaignant estime que cette solution prendrait beaucoup de temps et irait à l’encontre de l’esprit du résolution des conflits dans le nouveau processus de plaintes.

17 Le plaignant répète qu’il ne cherche pas à présenter des plaintes au nom d’autres candidats non reçus. Cependant, il explique qu’il a récemment reçu des renseignements selon lesquels seulement deux des vingt postulants aient été écartés d’une entrevue pour les trois postes offerts. Il affirme que l’évaluation de chaque candidat est pertinente, car quinze des dix-huit autres postulants, y compris lui-même, ont été effectivement éliminés à la suite de l’application d’un seul des quatorze critères de mérite, à savoir l’expérience récente. Ainsi, le plaignant allègue que ces renseignements pourraient l’aider à convaincre le Tribunal que, dans le cadre du présent processus de nomination, l’abus est tellement omniprésent qu’il faut que le processus de nomination « soit annulé dans son ensemble » [Traduction].

18 Le plaignant ajoute que le terme « renseignements » doit être interprété de façon large et qu’il doit inclure davantage que la seule information écrite. Il laisse entendre qu’en l’absence de disposition expresse dans le Règlement du Tribunal pour exiger la présence de témoins à l’audience, la présentation de cette preuve au moyen d’un témoignage pourrait ne pas constituer une option. De plus, la communication de renseignements est énoncée dans les articles du Règlement qui portent sur le Mode alternatif de règlement des conflits, et si l’intimé fournissait les éléments de VI à IX, cela aiderait à faciliter la résolution de la plainte.

Analyse

19La terminologie utilisée par le plaignant dans ses observations est quelque peu déroutante et doit être clarifiée dès le début de la présente analyse. Alors que dans ses observations le plaignant indique qu’il a été écarté d’une entrevue, les documents communiqués indiquent qu’il a été reçu en entrevue pour le poste en question. En réalité, les documents confirment que le plaignant a été jugé qualifié dans le présent processus de dotation. Le plaignant a satisfait aux critères de mérite, et plus précisément, à la qualification essentielle « expérience récente ». Son nom a été inscrit dans un répertoire comptant dix‑sept candidats qualifiés, parmi lesquels trois ont été nommés.

20 Par conséquent, comme le plaignant a été jugé qualifié, sa plainte est fondée essentiellement sur les deux volets suivants : premièrement, le fait que l’expérience récente a été désigné comme premier critère de mérite pour coter les candidats dans le répertoire des personnes qualifiées constitue un abus de pouvoir; et deuxièmement, dans le contexte du SFP, l’application de ce critère de mérite constitue un abus de pouvoir, car le plaignant a été exclu de l’équipe des poursuites contre le crime organisé par le directeur du SFP, ce qui l’a empêché d’acquérir l’expérience récente nécessaire.

21 Comme il a été mentionné dans la récente décision Oddie c. le sous‑ministre de la Défense nationale et al., [2006] TDFP 0009, la partie qui présente la demande d’ordonnance doit démontrer, à la satisfaction du Tribunal, que les renseignements demandés sont pertinents. Dans la décision Oddie, supra, le Tribunal établit ce qu’est la pertinence de la façon suivante :

[22] (…) [La partie qui présente la demande] doit démontrer à la satisfaction du Tribunal qu'il y a un lien très clair, ou en d'autres mots, un lien concret entre les renseignements demandés et la question à l'étude. En outre, la demande doit être suffisamment précise de sorte qu'il n'y ait aucune ambiguïté quant à ce qui est demandé. Enfin, le Tribunal doit être convaincu que la communication des renseignements ne causera aucun préjudice indu.

22 Le plaignant demande d’obtenir les renseignements relatifs à l’élément III, à savoir l’année au cours de laquelle chaque candidat a atteint le niveau LA-2A, afin d’établir la mesure dans laquelle les titulaires de poste LA‑2A ont été touchés par le critère de mérite.

23 L’alinéa 77 (1)a) de la LEFP est ainsi rédigé :

77. (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement du Tribunal, présenter à celui-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a) abus de pouvoir de la part de la Commission ou de l’administrateur général dans l’exercice de leurs attributions respectives au titre du paragraphe 30(2).

24 Dans le paragraphe 77(1) de la LEFP, les mots « présenter au Tribunal une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination » indiquent clairement qu’une plainte doit se rapporter directement au plaignant concerné. Une personne ne peut porter plainte que si « elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination » et ne peut pas porter plainte contre le fait que d’autres personnes n’ont pas été nommées. La plainte ne peut pas porter sur la façon dont les autres candidats non reçus ont été traités, mais bien sur la façon dont le critère de mérite de l’expérience récente a été établi et appliqué au plaignant. Compte tenu de l’information susmentionnée, le Tribunal n’est pas convaincu que le plaignant a prouvé la pertinence de l’élément III de sa demande.

25 Le plaignant veut aussi obtenir l’élément IV, à savoir l’évaluation de chaque postulant reçu en entrevue. Le sommaire suivant porte sur le présent processus de nomination et est utile pour comprendre la plainte : vingt demandes ont été reçues; deux candidats ont été éliminés; une personne a été nommée chef d’équipe; dix-sept candidats ont satisfait aux critères de mérite, y compris le critère « expérience récente », et leurs noms ont été inscrits dans un répertoire de candidats qualifiés; et trois de ces candidats qualifiés ont été nommés à un poste de juriste-expert. La présente plainte est fondée essentiellement sur l’établissement du critère de mérite « expérience récente » et sur son application par rapport au plaignant. Aucune allégation selon laquelle le plaignant aurait été traité d’une façon différente n’a été faite. L’évaluation des dix‑sept postulants jugés qualifiés n’est pas pertinente en ce qui concerne la présente plainte. Par conséquent, le plaignant n’a pas démontré que les évaluations des dix-sept candidats inscrits dans le répertoire, candidats qui n’ont pas été nommés, sont pertinentes en l’espèce.

26 Le plaignant prétend qu’on doit au moins lui permettre de comparer son évaluation à celles des candidats reçus. Sous le régime de l’ancienne LEFP, lorsqu’une nomination faisait l’objet d’un appel, l’évaluation du candidat reçu était généralement communiquée, car elle pouvait être pertinente pour déterminer si la personne la plus méritante avait été nommée. Toutefois, comme il est expliqué dans la décision Tibbs, supra, l’ancien système de mérite relatif n’existe plus, et la définition du mérite énoncée au paragraphe 30(2) de la LEFP accorde un pouvoir discrétionnaire considérable, qui permette de choisir la personne qui répond aux qualifications essentielles et qui est la « bonne personne » pour faire le travail.

27 La LEFP n’exige pas le classement des candidats qualifiés ou l’évaluation comparative des candidats qualifiés. Par conséquent, en général, la comparaison des résultats par rapport aux résultats obtenus par le candidat reçu n’est pas nécessaire, à moins que ce ne soit pertinent pour une plainte en particulier. Par exemple, dans le cas d’une plainte contenant une allégation de différence de traitement comme celle soulevée dans la décision Oddie, supra, certains renseignements sur la personne nommée peuvent être pertinents. Cependant, en l’espèce, le plaignant n’a pas laissé entendre qu’il avait été traité de façon différente lors de l’évaluation, ou que l’évaluation d’un des trois candidats reçus a été faite d’une façon différente de la sienne.

28 Certains des documents fournis au plaignant par l’intimé au cours de la période de communication de renseignements expliquent de quelle façon les critères de mérite ont été établis. De plus, le guide de cotation et d’autres documents fournis indiquent que l’expérience récente était la première des onze qualifications essentielles et des trois qualifications constituant un atout. Le plaignant a aussi obtenu des documents qui montrent de quelle façon les critères de mérite ont été appliqués dans son cas et, plus particulièrement, qui indiquent qu’il répond à la qualification essentielle « expérience récente ».

29 Tel qu’indiqué précédemment, la présente plainte est fondée essentiellement sur l’établissement du critère de mérite « expérience récente » et sur son application par rapport au plaignant. Le plaignant laisse entendre que les candidats reçus, ayant tous fait partie de l’équipe des poursuites contre le crime organisé, ont été nommés parce qu’ils avaient ainsi pu acquérir une expérience plus récente que la sienne. Toutefois, le plaignant ne prétend pas que le critère de l’expérience récente a été appliqué de façon différente dans le cas des candidats reçus. Ainsi, le plaignant n’a pas démontré que les évaluations des candidats reçus sont clairement liées à sa plainte.

30 Le plaignant essaie également d’obtenir les renseignements se rapportant à l’élément V, à savoir la date de la nomination de M. Goldstein à un poste LA‑2B. Comme la nomination de M. Goldstein a trait à un processus de nomination différent, le Tribunal n’est pas convaincu que ces renseignements sont pertinents en l’espèce. Le plaignant n’a pas réussi à démontrer qu’il existe un lien clair entre les renseignements demandés et la plainte.

31 Le plaignant prétend que le terme « renseignements » doit être interprété dans un sens large et qu’il doit inclure davantage que la seule information écrite. Ainsi, il affirme qu’on devrait aussi lui fournir les éléments VI à IX, à savoir les admissions ou les explications relatives à son affectation par le directeur du SFP au sein de l’équipe des poursuites en matière fiscale.

32 Le pouvoir du Tribunal d’adopter des règlements se rapportant à la communication de renseignements découle de l’alinéa 109e) de la LEFP, qui est rédigé comme suit :

109. Le Tribunal peut, par règlement, régir :

(…)

e) la communication de renseignements obtenus dans le cadre de la présente loi au cours d’un processus de nomination ou de l’instruction de plaintes.

33 L’article 16 du Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS/2006 6 (le Règlement du TDFP) est ainsi rédigé :

16. (1) Pour faciliter la résolution de la plainte, le plaignant et l’administrateur général ou la Commission se communiquent, dès que possible après le dépôt de la plainte, les renseignements pertinents relatifs à celle-ci.

(2) La communication de renseignements se termine le vingt-cinquième jour suivant la date de l’accusé de réception de la plainte par le directeur exécutif.

(3) Si le plaignant ou l’administrateur général ou la Commission, selon le cas, ne communiquent pas les renseignements pertinents conformément aux paragraphes (1) et (2), le Tribunal peut ordonner que les parties complètent la communication des renseignements pertinents dans le délai qu’il fixe.

34 Le plaignant exhorte au Tribunal d’adopter une interprétation large du terme « renseignements ». Cependant, le texte portant sur le pouvoir que détient le Tribunal d’ordonner aux parties de communiquer tous les renseignements pertinents doit être lu en tenant compte des compétences exactes accordées au Tribunal par le législateur. Plus précisément, la compétence suivante a été accordée au Tribunal, aux termes de l’alinéa 99(1)e) de la LEFP :

99. (1) Le Tribunal peut, pour l’instruction d’une plainte :

(…)

e) obliger, en tout état de cause, toute personne à produire les documents ou pièces qui peuvent être liés à toute question dont il est saisi;

35 Alors que la communication de renseignements pertinents peut comprendre autre chose que des documents écrits et qu’une partie doit fournir des explications orales, le cas échéant, le Tribunal n’a pas compétence pour contraindre une partie à fournir à une autre partie ce qui peut équivaloir à une « admission » ou à une « reconnaissance ». Une partie peut décider de fournir les renseignements en question, mais le Tribunal ne peut l’obliger à le faire.

36 La question des renseignements recherchés dans les éléments VI à IX peut être abordée de manière plus appropriée pendant l’interrogatoire principal et le contre‑interrogatoire des témoins à l’audience. Le fait de contraindre des témoins à témoigner devant le Tribunal est énoncé expressément dans l’alinéa 99(1)a) de la LEFP :

99. (1) Le Tribunal peut, pour l’instruction d’une plainte :

a) de la même façon et dans la même mesure qu’une cour supérieure d’archives, convoquer des témoins et les contraindre à comparaître et à faire sous serment des dépositions orales ou écrites.

37 De plus, pour simplifier le processus d’audience, le Tribunal tiendra généralement des conférences préparatoires avant les audiences; la nécessité de convoquer un témoin peut être soulevée pendant la conférence préparatoire, s’il y a lieu.

38 Enfin, comme le plaignant le souligne avec justesse, les articles du Règlement du TDFP portant sur la communication de renseignements sont énoncés sous la rubrique Mode alternatif de règlement des conflits. La communication de renseignements constitue une occasion pour les deux parties de se rencontrer pour discuter de la plainte, d’écouter les préoccupations de chacun et de collaborer à la divulgation de tous les renseignements pertinents. Pour les plaignants, c’est aussi l’occasion de mieux comprendre de quelle façon les processus de dotation sont menés. De nombreuses plaintes sont réglées et retirées lors de la rencontre visant la communication de renseignements suite à la discussion des préoccupations et la clarification de malentendus.

39 Le préambule de la LEFP établit le cadre de la communication de renseignements lorsqu’il indique que la fonction publique « se distingue par ses pratiques d’emploi équitables et transparentes, le respect de ses employés, sa volonté réelle de dialogue et ses mécanismes de recours destinés à résoudre les questions touchant les nominations ». Les parties qui participent à la communication de renseignements doivent s’engager dans un dialogue, et le meilleur moyen d’y parvenir est d’avoir recours à une rencontre individuelle ou, lorsqu’une telle rencontre ne peut pas être organisée, d’avoir recours au moins à une conversation téléphonique. Pour renforcer la transparence des pratiques d’emploi, les renseignements pertinents devraient tous être communiqués, et pas uniquement les documents expressément demandés par les parties.

40 La communication de renseignements ne comprend pas seulement la transmission d’une liste contenant les renseignements demandés et les copies des documents demandés. Comme il a été expliqué précédemment, pour qu’elle soit efficace, la communication de renseignements exige que les deux parties se rencontrent pour discuter de la plainte. En s’assurant de la présence du gestionnaire d’embauche ou d’un membre du jury de sélection ainsi que d’un agent de dotation pendant la rencontre, on obtiendra des réponses à des questions générales ou précises en ce qui concerne le processus de dotation. En outre, la communication de renseignements s’effectue « dans les deux sens ». L’intimé ne sera donc pas le seul à divulguer des renseignements. Le plaignant sera également tenu de donner des explications sur sa plainte, et on pourra lui demander de fournir des copies de documents, s’il y a lieu. Il n’est pas trop tard pour les parties de tenir une telle rencontre dans ce dossier.

Décision

41 La demande d’ordonnance de communication des éléments I et II n’est pas nécessaire, car l’intimé a déjà fourni ces renseignements au plaignant.

42 La demande d’ordonnance de communication des éléments III à IX est rejetée.

Guy Giguère

Président

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2006-0096
Intitulé de la cause:
Rick Visca et le sous-ministre de la Justice et al.
Audience:
Demande écrite; décision rendue sans comparution des parties
Date des motifs:
Le 30 novembre 2006
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