Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé un grief en trois parties concernant son licenciement, l’absence d’un exposé des fonctions et l’attitude de son superviseur - l’audience a été reportée sur consentement - le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas assisté à l’audience - comme le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’est pas présenté le deuxième jour de l’audience, même après avoir été averti à plusieurs reprises que le défaut de comparaître pouvait entraîner le rejet de son grief, l’arbitre de grief a conclu que le grief était réputé avoir été abandonné. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique
,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2007-10-18
  • Dossier:  166-02-37182
  • Référence:  2007 CRTFP 109

Devant un arbitre de grief


ENTRE

HUSEIN E. JEEWANJEE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Agence canadienne de développement international)

employeur

Répertorié
Jeewanjee c. Conseil du Trésor (Agence canadienne de développement international)

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
D.R. Quigley, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Personne

Pour l'employeur:
Karl Chemsi, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
les 17 et 18 septembre 2007.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

Grief renvoyé à l'arbitrage

1 Husein E. Jeewanjee (le « fonctionnaire s'estimant lésé ») travaillait à titre d'agent principal de programme (PM-05) pour la Direction générale du partenariat canadien/l'unité Projets et Innovation, à l'Agence canadienne de développement international (ACDI). Le 23 décembre 2004, il a présenté un grief, avec l'appui de son agent négociateur, l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC), concernant sa lettre de licenciement, l'absence d'exposé de fonctions et la manière dont son superviseur l'avait traité.

2 Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ce renvoi à l'arbitrage de grief doit être décidé conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (l'« ancienne Loi »).

Résumé de la preuve

3 Le 30 octobre 2003, le fonctionnaire s'estimant lésé s'est vu offrir une nomination comme agent principal de programme pour une période déterminée allant du 27 octobre 2003 au 26 janvier 2004. La lettre d'offre indiquait que les services du fonctionnaire s'estimant lésé pourraient être requis pour une période plus brève, selon la disponibilité de travail et la continuation des fonctions à remplir. Le fonctionnaire s'estimant lésé était par ailleurs informé qu'il serait en période de stage pendant 12 mois. Il a accepté l'offre le 30 octobre 2003.

4 Le 16 janvier 2004, le fonctionnaire s'estimant lésé a reçu une autre offre de nomination pour une période déterminée allant cette fois du 26 janvier 2004 au 25 janvier 2005. Il a accepté l'offre le 16 janvier 2004. Cependant, le 25 octobre 2004, Jennifer Benimadhu, vice-présidente, Direction générale du partenariat canadien, à l'ACDI, a avisé le fonctionnaire s'estimant lésé que, conformément à l'article 28 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, elle le renvoyait en cours de stage, au 26 novembre 2004. Dans sa lettre, Mme Benimadhu disait que, après avoir examiné le travail du fonctionnaire s'estimant lésé, elle était arrivée à la conclusion qu'il était incapable d'exercer la gamme complète des fonctions de son poste. Elle signalait en outre qu'il n'avait pas fait preuve d'une amélioration importante et soutenue et qu'il n'avait pas manifesté un engagement ferme à cet égard.

5 Le 19 décembre 2005, Ric Cameron, premier vice-président, ACDI, a rejeté le grief lors de l'audition de celui-ci au dernier palier, déclarant que le renvoi en cours de stage était justifié.

6 La Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») avait inscrit l'affaire au rôle pour audition du 11 au 13 septembre 2006 à Ottawa, et un avis d'audience avait été envoyé aux parties le 14 août 2006. Le 25 août 2006, l'AFPC a demandé que l'audience soit remise à plus tard. L'employeur a consenti à ce que l'audience soit remise à plus tard, en vue de discuter davantage d'un règlement du grief.

7 L'audience a été réinscrite au rôle, pour audition du 14 au 16 février 2007, et un avis d'audience a été délivré le 18 décembre 2006.

8 Le 5 janvier 2007, l'AFPC a avisé la Commission qu'elle ne représentait plus le fonctionnaire s'estimant lésé et que tout autre contact devrait être établi directement avec lui. Une copie de cette correspondance a été envoyée au fonctionnaire s'estimant lésé, dont l'adresse de courrier électronique a été communiquée à la Commission.

9 Le 8 janvier 2007, la Commission a envoyé une lettre au fonctionnaire s'estimant lésé et à l'employeur pour les informer que toute correspondance subséquente devrait être expédiée directement au fonctionnaire s'estimant lésé, puisque l'AFPC ne le représentait plus.

10 Le 26 janvier 2007, le fonctionnaire s'estimant lésé a téléphoné à la Commission pour demander que les dates d'audience du 14 au 16 février 2007 soient reportées. On l'a avisé de mettre sa demande par écrit.

11 Le 28 janvier 2007, le fonctionnaire s'estimant lésé a écrit à la Commission pour demander un ajournement de trois mois, afin de bien se préparer pour l'audience. Le 2 février 2007, l'employeur a répondu qu'il n'avait pas d'objection à un ajournement, mais il demandait que l'audience soit réinscrite au rôle pour septembre 2007, car ses principaux témoins n'étaient pas disponibles durant les mois d'été. Le 2 février 2007, le fonctionnaire s'estimant lésé a informé la Commission qu'il s'opposait à la demande de l'employeur visant à ce que l'audience soit reportée jusqu'en septembre. La Commission a accepté l'ajournement et la demande de l'employeur que l'affaire ne soit pas inscrite au rôle pour audition avant septembre 2007.

12 Le 19 mars 2007, les deux parties ont été priées de confirmer leur disponibilité en vue d'une audience à Ottawa du 17 au 19 septembre 2007, ce qu'elles ont fait.

13 Par une lettre en date du 4 avril 2007, la Commission a confirmé que l'audience aurait lieu du 17 au 19 septembre 2007.

14 Le 16 août 2007, la Commission a envoyé aux parties un avis d'audience indiquant que celle-ci se déroulerait du 17 au 19 septembre 2007, à partir de 9 h 30 le premier jour, dans les locaux de la Commission, situés dans l'immeuble C.D. Howe, 240, rue Sparks, tour Ouest, 7e étage, Ottawa. Les parties ont également été informées que, si elles ne se présentaient pas à l'audience ou à une reprise de celle-ci, l'arbitre de grief pourrait régler l'affaire sur le fondement de la preuve et des observations présentées à l'audience, sans autre avis à leur intention.

15 Le 29 août 2007, la Commission a envoyé un avis d'audience modifié, qui indiquait un changement quant au lieu de l'audience; cette dernière se déroulerait à l'hôtel Radisson, 402, rue Queen, Ottawa. Là encore, les parties ont été informées que, si elles ne se présentaient pas à l'audience ou à une reprise de celle-ci, l'arbitre de grief pourrait régler l'affaire sur le fondement de la preuve et des observations présentées à l'audience, sans autre avis à leur intention.

16 Les deux avis d'audience ont été expédiés par courrier recommandé au fonctionnaire s'estimant lésé.

17 Le 17 septembre 2007, à 9 h 30, l'avocat de l'employeur était présent et prêt à commencer, mais le fonctionnaire s'estimant lésé était absent. J'ai temporairement ajourné l'audience pour que la Commission communique avec le fonctionnaire s'estimant lésé et s'assure qu'il avait reçu l'avis d'audience modifié.

18 À 10 h 15, j'ai été informé que l'avis modifié d'audience envoyé le 29 août 2007 au fonctionnaire s'estimant lésé lui avait été livré et avait été signé par lui ce jour-là. J'ai également été informé que la Commission avait cherché à communiquer avec le fonctionnaire s'estimant lésé par téléphone mais n'avait pu le joindre ni lui laisser un message chez lui parce qu'il n'avait pas de répondeur. Ainsi, à 10 h 35, la Commission a envoyé au fonctionnaire s'estimant lésé le courriel suivant :

[Traduction]

[…]

Monsieur Jeewanjee,

Avez-vous été avisé que l'audition de votre cause a lieu aujourd'hui le 17 septembre à l'hôtel Radisson à partir de 9 h 30?

Veuillez nous en faire part.

[…]

19 À 11 h 30, j'ai informé l'avocat de l'employeur que la Commission continuait de chercher à communiquer avec le fonctionnaire s'estimant lésé et que l'audience était donc suspendue pour le reste de la journée et serait reprise à 9 h 30 le lendemain, soit le 18 septembre 2007.

20 À 20 h 25 le 17 septembre 2007, le fonctionnaire s'estimant lésé a envoyé à la Commission le courriel suivant :

[Traduction]

[…]

Oui, je me suis rendu compte que j'avais été informé de l'audience et du lieu de celle-ci par vous à un moment donné la semaine dernière.

J'ai bien peur que les choses n'aillent pas très bien pour moi. Il y a maintenant presque trois ans que j'essaie de me refaire un nom et d'être réintégré dans mon poste à l'ACDI (d'où j'ai été licencié après avoir refusé d'être mêlé à ce que je considérais comme une mesure non éthique et frauduleuse de la part de mon superviseur).

Dans le processus, j'ai engagé des ressources financières importantes - pour avoir des conseils juridiques et m'occuper de ma famille -, mais il semble que je n'aie pas très bien réussi, quoique ma cause ait été débattue en conférence de presse le 6 juin 2007, puis au Parlement le 8 juin 2007, et qu'elle soit en outre l'objet d'une enquête de la Commission canadienne des droits de la personne.

Je suis actuellement insolvable (ayant une dette totale de 120 000 $CAN); j'ai dû renoncer à mes droits de garde à l'égard de mes deux enfants le mois dernier; de plus, je suis sur le point de perdre mon actuel lieu de résidence.

Étant donné tout cela, je ne savais pas trop comment procéder quant à l'audience prévue au sujet de ma cause devant la commission des relations de travail.

[…]

21 Le 18 septembre 2007, à 8 h 33, la Commission a reçu du fonctionnaire s'estimant lésé un autre courriel :

[Traduction]

[…]

Comme suite à mon courriel d'hier et à notre conversation téléphonique, je voudrais demander un ajournement de mon audience sur l'affaire relative à l'ACDI.

Comme je l'ai mentionné dans mon courriel d'hier, mes circonstances personnelles depuis quelques mois ne m'ont pas permis de bien me préparer pour l'audience, quoique la majeure partie de mon information de base soit prête.

[…]

22 À 8 h 40 ce matin-là, la Commission a répondu comme suit au fonctionnaire s'estimant lésé :

[Traduction]

[…]

J'accuse réception de votre courriel du 18 septembre 2007.

Veuillez prendre note que l'audience a lieu comme prévu.

SACHEZ que, si vous ne vous présentez pas à l'audience ou à une reprise de celle-ci, l'arbitre de grief pourra régler l'affaire sur le fondement de la preuve et des observations présentées à l'audience, sans autre avis à votre intention.

Toutes questions dont vous souhaitez discuter peuvent être exposées devant l'arbitre de grief.

[…]

23 Le 18 septembre 2007, à 9 h 30, l'avocat de l'employeur était à nouveau présent, mais le fonctionnaire s'estimant lésé était absent. (Je signale que la demeure du fonctionnaire est à trois rues du lieu de l'audience.) J'ai repris l'audience à 10 h et commencé à entendre les observations de l'avocat de l'employeur. L'avocat de l'employeur a déposé sept pièces mais n'a appelé aucun témoin. Il a fait référence à deux pièces, E-6 et E-7, en tant que plaintes de partenaires de l'ACDI concernant l'attitude et le comportement du fonctionnaire s'estimant lésé à l'égard de projets auxquels il avait travaillés.

24 L'avocat de l'employeur a déclaré que le fonctionnaire s'estimant lésé avait été renvoyé en cours de stage pour des raisons liées à l'emploi et qu'il appartenait au fonctionnaire s'estimant lésé de prouver que c'était de la frime ou du camouflage.

25 L'avocat de l'employeur a conclu en affirmant que, puisque le fonctionnaire s'estimant lésé n'était pas présent à l'audience, le grief devrait être rejeté.

Motifs

26 Comme je l'ai précédemment souligné, le fonctionnaire s'estimant lésé ne s'est pas présenté à 9 h 30 pour l'audience le 17 septembre 2007. Afin de respecter les règles de justice naturelle et d'équité procédurale, j'ai suspendu l'audience pour le reste de la journée pour permettre à la Commission de communiquer avec le fonctionnaire s'estimant lésé.

27 Comme la Commission n'a pu joindre par téléphone le fonctionnaire s'estimant lésé le 17 septembre 2007 à 10 h 35, un courriel a été envoyé au fonctionnaire s'estimant lésé pour lui demander s'il avait été avisé que l'audience était prévue pour 9 h 30 ce jour-là à l'hôtel Radisson. La Commission n'a eu aucune réponse du fonctionnaire s'estimant lésé avant la fermeture des bureaux. Le lendemain matin, c'est-à-dire le 18 septembre à 8 h 33, le fonctionnaire s'estimant lésé a répondu à la Commission et demandé un ajournement de l'audience devant commencer à 9 h 30 ce jour-là. À 8 h 40, la Commission a, par courriel, informé le fonctionnaire s'estimant lésé que l'audience commencerait comme prévu et que toutes questions dont il voulait discuter pourraient être exposées à l'arbitre de grief. Le courriel disait également :

[Traduction]

[…]

SACHEZ que, si vous ne vous présentez pas à l'audience ou à une reprise de celle-ci, l'arbitre de grief pourra régler l'affaire sur le fondement de la preuve et des observations présentées à l'audience, sans autre avis à votre intention.

[…]

28 Le 18 septembre 2007, à 9 h 30, le fonctionnaire s'estimant lésé était à nouveau absent.

29 Le fonctionnaire s'estimant lésé avait pleinement connaissance des répercussions d'une omission de se présenter à l'audience prévue. Il a été informé à trois occasions distinctes que, s'il ne se présentait pas à l'audience ou à une reprise de celle-ci, l'arbitre de grief pourrait régler l'affaire sur le fondement de la preuve et des observations présentées à l'audience, sans autre avis à son intention. Dans les circonstances, je dois conclure que le grief est réputé avoir été abandonné.

30 Le présent grief est donc rejeté, et le dossier de la Commission, fermé.

31 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

32 J'ordonne le rejet du grief et la fermeture du dossier de la Commission.

Le 18 octobre 2007.

Traduction de la C.R.T.F.P.

D.R. Quigley,
arbitre de grief

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