Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Dans la plainte, déposée en vertu de l’alinéa 23(1)a) de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (l’ancienne Loi), les plaignants ont allégué violation des alinéas 8(2)a) et c) de l’ancienne Loi - les plaignants sont des agents de libération conditionnelle en établissement (ALCE) qui ont droit, en vertu de l’article 58 de leur convention collective, à une indemnité de facteur pénologique (IFP) - le droit à l’IFP dépend du niveau de sécurité de l’établissement et du degré d’exposition aux détenus - la plainte a découlé de faits survenus immédiatement après que les plaignants ont conclu, avec l’aide d’un médiateur, une entente concernant leur griefs portant sur leur droit à l’IFP - l’entente prévoyait que les fonctionnaires s’estimant lésés recevraient l’IFP au taux de l’exposition continuelle pour la période allant du 1er avril 2002 au 31 mars 2003, et ce sous toutes réserves et sans établir de précédents quant aux droits ou intérêts des parties dans un autre dossier - à leur retour au travail après la conclusion de l’entente, les plaignants ont appris que leur IFP serait réduite du taux de l’exposition continuelle au taux de l’exposition fréquente - les plaignants ont prétendu que l’employeur avait pris des mesures de représailles à leur endroit parce qu’ils avaient exercé leur droit de déposer un grief - au moment où ils ont déposé leurs griefs, les plaignants travaillaient dans un secteur différent de celui où ils travaillaient lors de la médiation - pendant la médiation, l’employeur a pris connaissance de ce fait et a décidé d’examiner les IFP versées aux titulaires de postes d’agents de libération conditionnelle en établissement afin d’en assurer la cohérence - tous les autres ALCE travaillant dans le même secteur étaient rémunérés au taux de l’exposition fréquente, même si certains éléments de preuve démontraient que deux ALCE, qui avaient travaillé dans l’unité d’isolement mais étaient retournés à l’unité des fonctionnaires s’estimant lésés, recevaient toujours le taux de l’exposition continuelle - la Commission a jugé qu’il était sensé de mener un examen dès l’instant où l’employeur avait pris conscience du manque de cohérence et des erreurs dans les taux d’IFP - il n’y a pas eu tentative de miner l’entente ou d’intimider ou de pénaliser les plaignants - l’entente n’interdisait pas à l’employeur de réviser ou de modifier l’IFP dans le futur - le fait que l’employeur n’ait pas procédé à un examen paninstitutionnel ou panrégional des taux de l’IFP ne permettait pas de conclure à l’existence d’un sentiment antisyndical ou d’une sanction - la Commission a rejeté l’argument voulant que l’absence d’examen pour les deux ALCE touchant un taux de l’exposition continuelle démontrait que les plaignants avaient été ciblés - le fardeau de la preuve incombait aux plaignants, et la Commission a refusé de tirer une conclusion défavorable du fait que l’employeur n’a pas appelé à témoigner deux des défendeurs ayant participé à l’examen. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2007-06-14
  • Dossier:  561-02-64
  • Référence:  2007 CRTFP 62

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

BARRIE OWEN ET RANDALL DAVID VOTH

plaignants

et

SERVICES JURIDIQUES DU CONSEIL DU TRÉSOR, STU MCLEAN,
ALEX LUBIMIV ET MAUREEN HINES

défendeurs

Répertorié
Owen et Voth c. Services juridiques du Conseil du Trésor et al.

Affaire concernant une plainte visée à l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Paul Love, commissaire

Pour les plaignants:
Debra Seaboyer, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour les défendeurs:
Richard Fader, avocat

Affaire entendue à Abbotsford (Colombie Britannique),
les 12 et 13 décembre 2006.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

I. Plainte devant la Commission

1 Il s'agit d'une plainte qui a été déposée le 5 novembre 2004 par Barrie Owen et Randall David Voth (aussi connu sous le nom de Randy Voth) en vertu de l'alinéa 23(1)a) de l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (« l'ancienne Loi »), contre les Services juridiques du Conseil du Trésor, Stu McLean (aussi connu sous le nom de Stewart McLean), Alex Lubimiv et Maureen Hines.

2 Le texte de la plainte est reproduit en partie ci-après :

[Traduction]

  1. Les défendeurs ont réduit le degré d'exposition de l'indemnité de facteur pénologique (l'« IFP ») payée aux plaignants Barry [sic] Owen et Randy Voth (les « fonctionnaires s'estimant lésés ») au motif qu'ils ont exercé le droit que leur accorde la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (« LRTFP ») de renvoyer à l'arbitrage les griefs faisant l'objet des dossiers de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (« CRTFP ») 166-2-31979 et 31980.
  2. Dès lors, les défendeurs ont contrevenu aux dispositions suivantes de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (« LRTFP »), soit :

a)       L'alinéa 8(2)a), en ce qu'ils ont refusé d'employer ou de continuer d'employer les fonctionnaires s'estimant lésés, ou encore ont fait des distinctions injustes à leur endroit, en ce qui concerne l'emploi ou l'une quelconque des dispositions d'emploi en raison de leur appartenance à l'Alliance de la Fonction publique du Canada (le « syndicat ») et du fait qu'ils ont exercé le droit que leur accorde le paragraphe 92(1) de la LRTFP de déposer un grief et de le porter à l'arbitrage;

b)       L'alinéa 8(2)c), en ce qu'ils ont cherché, par intimidation, par menace de destitution et d'autres types de menaces et par l'imposition de sanctions et d'autres moyens, à obliger les fonctionnaires s'estimant lésés et d'autres membres de l'unité de négociation à s'abstenir d'exercer les droits que leur accorde la LRTFP;

c)       L'article 6, en ce qu'ils ont porté atteinte aux droits des fonctionnaires s'estimant lésés et d'autres membres de l'unité de négociation d'adhérer à une organisation syndicale et de participer à l'activité légitime de celle-ci.

3 Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « nouvelle Loi »), édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 39 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, la Commission des relations de travail dans la fonction publique (« la Commission ») demeure saisie de cette plainte.

4 Les deux avocats ont convenu que le dépôt de la plainte auprès de la Commission, le 5 novembre 2004, cristallisait les droits des plaignants et que l'affaire doit être instruite sous le régime de l'ancienne Loi : Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale et section locale 147 de l'Association nationale des travailleurs correctionnels fédéraux c. Service correctionnel Canada, Conseil du Trésor et Don Graham, 2005 CRTFP 50; Rioux c. LeClair, 2006 CRTFP 12; et Garcia Marin c. Marshall, 2006 CRTFP 26.

II. Résumé de la preuve

5 Les plaignants occupent à temps plein le poste de durée indéterminée d'agent de libération conditionnelle en établissement (ALCE) au Service correctionnel du Canada (SCC) à l'établissement Kent, un pénitencier à sécurité maximale situé près d'Abbotsford (Colombie-Britannique). M. Owen et M. Voth cumulent respectivement 18 et 23 années de service. L'un des défendeurs désignés dans les plaintes est Alex Lubimiv, qui était directeur de l'établissement Kent durant la période pertinente et qui n'a pas témoigné à l'audience.

6 M. Owen et M. Voth ont droit à une indemnité de facteur pénologique (IFP), en vertu de l'article 59 de leur convention collective, parce qu'ils « […] assument des responsabilités supplémentaires de garde des détenus autres que celles qu'assument les membres du groupe Services correctionnels, et [qu'ils sont] exposés à des risques immédiats de blessures corporelles par suite d'agressions et à d'autres conditions désagréables. » L'admissibilité à l'IFP est énoncée dans la convention collective ainsi que dans une directive portant sur l'administration et l'application de l'indemnité de facteur pénologique (IFP) et s'articule autour du niveau de sécurité de l'établissement et du degré d'exposition, laquelle peut être continuelle, fréquente ou limitée. Chacune de ces trois catégories d'exposition est définie de la façon suivante dans la directive :

[Traduction]

Continuelle - désigne l'exposition journalière et pendant toute la journée aux conditions énoncées à la section 3 ci-dessus.

Fréquente - désigne l'exposition pendant une ou plusieurs parties de la journée de travail et généralement journalière aux conditions énoncées dans la section 3 ci-dessus.

Limitée - désigne l'exposition, à l'occasion, aux conditions énoncées à la section 3 ci-dessus.

7 La méthode de calcul de l'IFP est décrite dans un passage tiré de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l'Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) expirée le 20 juin 2003 (pièce E-2).

8 La plainte en instance résulte de faits qui sont survenus immédiatement après la tenue d'une audience d'arbitrage, le 29 juin 2004, durant laquelle l'arbitre de grief D.R. Quigley, agissant à titre de médiateur, a aidé les parties à conclure une entente (audience d'arbitrage et de médiation). Les parties ont chacune signé une entente de principe qui fixait l'IFP au taux de l'exposition continuelle pour la période allant du 1er avril 2002 au 31 mars 2003 relativement au grief faisant l'objet du dossier de la CRTFP 166-02-31980 dans le cas de M. Voth et du dossier de la CRTFP 166-02-31979 dans le cas de M. Owen (pièce G-3). L'entente indique aussi expressément qu'elle est conclue sous toutes réserves et sans établir de précédents quant aux droits ou intérêts des parties dans un autre dossier. D'ordinaire, les ententes de principe qui interviennent à l'issue d'un processus de médiation ont valeur de documents confidentiels; or, dans ce cas-ci, étant donné que la plainte est reliée au contenu de l'entente, les plaignants ont produit le document en preuve sans que les défendeurs s'y opposent.

9 À son premier jour de travail après la médiation, M. Voth a été estomaqué et stupéfait d'apprendre, de Stewart McLean, gestionnaire d'unité, que l'IFP que lui-même et M. Owen recevaient au taux de l'exposition continuelle allait être réduite au taux de l'exposition fréquente et que le SCC était susceptible de recouvrer le montant qu'il prétendait leur avoir payé en trop au taux supérieur.

10 À l'audience, j'ai entendu les témoignages des plaignants, et ceux de Bryden Nelmes, de Stewart McLean et de Maureen Hines, pour le compte de l'employeur.

11 M. Voth a déclaré qu'il occupait le poste d'ALCE à l'établissement Kent depuis 1989. Il avait notamment la charge de 25 délinquants et s'acquittait de toutes les fonctions reliées à la préparation des dossiers, y compris l'évaluation des risques à l'intention de la Commission nationale des libérations conditionnelles en vue des libérations conditionnelles, des libérations conditionnelles de jour, des libérations d'office et des maintiens en incarcération. Il préparait également des évaluations des risques à l'intention du directeur relativement au transfert de délinquants, à leur transférabilité et à leur admissibilité à des visites familiales privées. Ses fonctions l'amenaient aussi à offrir des services de counselling aux délinquants et à les rencontrer dans leurs unités résidentielles. M. Voth a précisé que les ALCE exerçaient tous des fonctions semblables.

12 Il fut un temps où les ALCE étaient dispersés dans divers secteurs de l'établissement au lieu d'être regroupés au même endroit. Durant leur carrière à l'établissement Kent, les plaignants et les autres ALCE ont ainsi travaillé dans divers secteurs de l'établissement. M. Voth a indiqué qu'il avait été affecté, notamment, au secteur de l'administration, à l'unité d'isolement, au secteur situé à proximité de l'unité d'isolement, au bureau situé à l'intérieur des unités résidentielles et au secteur de la gestion des cas situé au-dessus des locaux de CORCAN. Au moment de la présentation de leur plainte, les plaignants travaillaient dans le secteur de la gestion des cas et avant cela, dans le secteur de l'hôpital, aussi décrit comme le secteur à l'extérieur du gymnase.

13 M. Owen a déclaré qu'il s'acquittait sensiblement des mêmes fonctions que M. Voth. À titre d'ALCE, il avait été appelé à travailler dans divers secteurs de l'établissement. Il a dit qu'il a aussi occupé le poste d'agent d'unité résidentielle. Dans ses fonctions d'ALCE, il a d'abord travaillé dans le secteur de l'administration, puis dans le bureau situé à l'extérieur de l'unité d'isolement, dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN et dans le secteur de l'hôpital situé à proximité du gymnase. Il a ensuite été affecté au gymnase à titre d'agent des activités récréatives pendant quatre ou cinq mois avant de réintégrer le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, où il travaille depuis juillet ou août 2003.

14 J'utilise l'acronyme « CORCAN » dans la présente décision sans en donner la définition, car c'est un terme qui est en usage depuis si longtemps à l'établissement Kent que les témoins ont été incapables de m'en expliquer la signification à l'audience. J'en déduis qu'il s'agit d'un programme de formation professionnelle ou industrielle.

15 On retrouve aussi dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN des commis et du personnel administratif, des gestionnaires d'unité, le coordonnateur de la gestion des cas (CGC) et un spécialiste de l'informatique. M. Voth ne savait pas quels taux d'IFP étaient payés aux autres employés qui travaillaient près de lui mais qui n'étaient pas des ALCE.

16 M. Voth a dit que lorsqu'il a quitté le secteur de l'hôpital pour emménager dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, l'employeur ne l'a pas avisé que cela allait occasionner un examen de son IFP. Il savait que deux personnes recevaient l'IFP au taux de l'exposition continuelle, à ce moment-là. Or, il n'a jamais entendu dire que leur IFP avait été ramenée au taux de l'exposition fréquente.

17 M. Voth a déclaré qu'à la suite de la médiation, M. McLean l'a abordé au sortir d'une séance d'information destinée aux gestionnaires et lui a demandé s'il pouvait s'entretenir avec lui en privé. M. McLean lui a alors dit qu'il avait appris que certains ALCE recevaient le taux de l'exposition continuelle et qu'il avait reçu instruction de réduire l'IFP de M. Voth et de M. Owen au taux de l'exposition fréquente. M. Voth fut contrarié par cette discussion, car il croyait que le problème avait été réglé par la médiation et il en était à sa première journée de travail après la conclusion de ce processus.

18 M. McLean s'est entretenu de nouveau avec M. Voth ce jour-là et lui a dit qu'il examinait l'IFP de tous les ALCE qui travaillaient dans le secteur  de la gestion des cas situé au-dessus des locaux de CORCAN. Même s'il ne nourrissait aucune animosité personnelle à l'endroit de M. McLean, M. Voth était contrarié; il estimait que l'employeur prenait des mesures de représailles à son endroit pour ce qui s'était passé le jour auparavant. Il a demandé à M. McLean pourquoi cet examen des IFP avait été décidé et pourquoi précisément à ce moment-là. M. McLean a répondu qu'il n'était pas en mesure de lui fournir des explications.

19 M. Voth téléphona par la suite à M. Owen à son domicile, du fait qu'il était en congé, étant donné que la diminution du taux d'IFP le touchait également. Il communiqua aussi avec Glen Chochla, agent de griefs à l'AFPC, qui les avait représentés à l'audience d'arbitrage et de médiation.

20 Les plaignants ont dit que personne, à l'établissement Kent, n'a communiqué avec eux ni ne les a interviewés au sujet d'un examen de l'IFP après l'audience d'arbitrage et de médiation. C'est en examinant leur talon de chèque de paie qu'ils ont constaté que leur IFP était passée du taux de l'exposition continuelle au taux de l'exposition fréquente, le 23 septembre 2004. En fin de compte, le SCC n'a pas cherché à recouvrer le montant payé en trop au taux supérieur.

21 M. Voth a indiqué que le changement de taux ne représentait pas une grosse somme, mais que cela ne l'empêchait pas de croire que M. Owen et lui étaient victimes d'une injustice qu'il voulait voir [traduction] « […] corrigée pour mémoire ».

22 Durant son interrogatoire principal, M. Voth a déclaré qu'il y avait des ALCE dont l'IFP correspondait au taux de l'exposition continuelle. En contre-interrogatoire, il a dit que Ronan Byrne, le CGC, était l'un de ceux-là, mais il a hésité avant de révéler le nom de l'autre personne. Ce n'est qu'après que Me Fader, l'avocat de l'employeur, eut indiqué que l'employeur lui avait donné l'assurance qu'il n'entendait pas recouvrer quelque montant que ce soit si de nouvelles déclarations ou enquêtes révélaient que le taux d'IFP payé à d'autres employés était erroné, que M. Voth a déclaré qu'il croyait que Chris de Haan, un autre ALCE, continuait de recevoir l'IFP au taux de l'exposition continuelle.

23 En contre-interrogatoire, M. Voth a dit que l'employeur avait procédé à un examen de l'IFP en février 2001. Il travaillait alors dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN et l'IFP lui était payée au taux de l'exposition fréquente. Il a déposé un grief au premier palier de la procédure de règlement des griefs, mais un représentant de l'agent négociateur lui a conseillé d'abandonner la partie à l'issue d'une audition au deuxième palier, ce qu'il a fait. Il a déclaré que l'IFP lui avait été payée au taux de l'exposition fréquente quand il avait travaillé dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN auparavant, mais au taux de l'exposition continuelle quand il était passé à l'unité d'isolement.

24 M. Voth a également témoigné qu'il avait perçu les propos de M. McLean comme une menace, mais que ce dernier ne lui avait pas fait de menaces. Il a précisé que M. McLean lui avait présenté la problématique sur un ton très cordial lors de leur première rencontre après la médiation. Rien ne permet de penser que l'attitude de M. McLean a changé lors de la deuxième rencontre.

25 C'est par M. Voth que M. Owen a été mis au courant de l'examen de son IFP. Il n'a jamais discuté du changement avec un gestionnaire.

26 M. Owen n'était pas content du changement. Il a dit qu'il [traduction] « […] y voyait là une sorte de vendetta personnelle ou quelque chose du genre ». Il a dit qu'il est devenu partie à la plainte parce qu'il estimait que la mesure était [traduction] « […] dirigée contre nous » et qu'il se sentait injustement ciblé. Il a déclaré : [traduction] « […] s'ils avaient procédé à un examen approprié et passé en revue tous les postes, je ne serais pas ici aujourd'hui ».

27 M. Owen a admis en contre-interrogatoire qu'il avait travaillé dans divers secteurs de l'établissement Kent. Au début des années 1990, il travaillait dans les bureaux situés à proximité des locaux de CORCAN et l'IFP lui était payée au taux de l'exposition continuelle. Le directeur de l'époque, Paul Urmison, avait fait effectuer un examen de l'IFP en 2001 et l'IFP avait alors été ramenée au taux de l'exposition fréquente. Il avait ensuite été affecté au secteur situé à l'extérieur du gymnase, ce qui lui avait de nouveau donné droit au taux de l'exposition continuelle, taux qu'il avait conservé quand il était retourné dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN.

28 M. Owen a admis que l'entente des griefs antérieurs du 29 juin 2004 s'appliquait à la période allant du 1er avril 2002 au 31 mars 2003, soit la période où il était en affectation dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase. Il a dit que lorsqu'il avait travaillé dans le secteur des locaux de CORCAN auparavant, l'IFP lui avait été payée au taux de l'exposition fréquente avant d'être haussée au taux de l'exposition continuelle à son arrivée dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase.

29 Un autre ALCE, M. Byrne, a informé M. Owen que son IFP lui était payée au taux de l'exposition continuelle. M. Owen a également témoigné que c'était aussi le cas de M. de Haan et que celui-ci exerçait essentiellement les mêmes fonctions que les plaignants. Il a admis en contre-interrogatoire que M. de Haan était vraisemblablement en congé au moment de l'examen de l'IFP en 2004 à la suite de l'audience d'arbitrage et de médiation et que M. Byrne occupait le poste de gestionnaire par intérim de l'unité d'isolement. Il a aussi admis que 11 ALCE travaillaient dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN et qu'à sa connaissance, tous, sauf M. de Haan et le CGC, recevaient l'IFP au taux de l'exposition fréquente.

30 Aucun des plaignants n'occupait une charge de dirigeant à l'AFPC (« l'agent négociateur ») quand leur IFP est passée du taux de l'exposition continuelle au taux de l'exposition fréquente à la suite de la médiation. M. Owen a déclaré qu'il avait occupé le poste de premier vice-président de la section locale de l'agent négociateur deux ou trois ans auparavant, avant la réduction de son taux d'IFP en septembre ou octobre 2004.

31 Bryden Nelmes, conseiller régional en matière de sécurité auprès de SCC dans la région du Pacifique, a déclaré qu'il occupait le poste d'agent correctionnel (CX-02) à l'établissement Mission et qu'il était en détachement à l'administration centrale à titre de conseiller régional en matière de sécurité en juin 2000, quand il a procédé à un examen de l'IFP sous la supervision de Maureen Hines, chef régionale des relations de travail et de la rémunération à SCC. Il a dit qu'après diverses réunions avec M. Urmison et Mme Hines à l'établissement Kent, d'autres gestionnaires et des représentants de l'agent négociateur et une étude de l'IFP, il a produit une feuille de calcul (pièce E-3) sur laquelle étaient indiqués les divers postes existant dans l'établissement, le titulaire de chacun et le principe de la directive sur l'administration et l'application de l'indemnité de facteur pénologique qui s'appliquait dans chaque cas afin d'établir le taux d'IFP pertinent.

32 M. Owen et M. Voth travaillaient alors dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN au moment de la création de la feuille de calcul. M. Nelmes a déclaré que le principe 9 s'appliquait pour interviewer des détenus, que le taux avait reçu l'approbation finale de Mme Hines et qu'il avait été rajusté à la baisse, c'est-à-dire du taux de l'exposition continuelle au taux de l'exposition fréquente. L'objectif consistait à uniformiser le taux d'IFP payé aux ALCE après l'examen de 2000-2001. M. Nelmes ne savait pas s'il y avait eu des griefs à la suite du rajustement des taux.

33 Après la réunion initiale, M. Nelmes a consacré le reste de son mandat au « contrôle de la qualité » des formulaires de demande d'approbation d'IFP reçus des établissements. Il a indiqué que l'examen avait entraîné des modifications ou des rajustements du taux d'IFP dans divers établissements de la région du Pacifique.

34 M. Nelmes a témoigné qu'il avait été mis à contribution dans les griefs antérieurs de M. Voth et de M. Owen qui ont été réglés le 29 juin 2004 en apportant son soutien technique à Mme Hines à l'audience d'arbitrage et de médiation. Dans le cadre de cette audience, il a participé à une visite de l'établissement Kent avant d'assister à une audience à Abbotsford. La visite leur a permis de constater, Mme Hines et lui, que les fonctionnaires s'estimant lésés ne travaillaient plus à l'endroit qu'ils indiquaient dans leurs griefs précédents, c'est-à-dire dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase. M. Nelmes a déclaré que la médiation précédente se rapportait à un rajustement de l'IFP parce que M. Voth et M. Owen avaient quitté le secteur situé à proximité des locaux de CORCAN pour emménager dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase. Durant la période d'examen de l'IFP en 2000-2001, les plaignants travaillaient aussi dans le secteur situé à proximité de CORCAN.

35 M. Nelmes et Mme Hines se sont rendu compte, lors de la visite sur place, que les plaignants ne travaillaient plus dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase et qu'ils étaient retournés dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. C'est à ce moment-là qu'ils ont décidé d'examiner la situation de tous les ALCE qui travaillaient à l'établissement Kent pour voir si le taux d'IFP qui leur était payé s'accordait avec les résultats de l'examen de 2000-2001. Une réunion a été organisée peu de temps après entre M. Nelmes, Mme Hines et Meena Chima, de la section des Ressources humaines. M. Nelmes ne savait pas qui avait été chargé de l'examen à l'établissement Kent, mais il a dit avoir reçu une demande d'approbation d'une IFP/ISD pour chaque plaignant.

36 M. Nelmes a dit qu'on tenait compte de deux éléments pour établir le taux d'IFP, soit le niveau de sécurité de l'établissement et la fréquence des contacts avec les détenus. L'établissement Kent est un pénitencier à sécurité maximale. M. Nelmes a déclaré que les plaignants n'avaient pas été traités de façon plus sévère que les autres et que l'examen de 2000-2001 avait établi que le taux qui s'appliquait était celui de l'exposition fréquente. N'ayant pas reçu de formulaire des autres ALCE, il avait conclu qu'ils recevaient tous le taux approprié.

37 En contre-interrogatoire, M. Nelmes a déclaré qu'il s'attendait à ce qu'on procède à une évaluation du taux d'IFP chaque fois qu'un ALCE changeait de lieu de travail ou de poste. Son contact à l'établissement Kent était le directeur adjoint des Services de gestion (DASG), mais il supposait que les évaluations étaient confiées à un autre gestionnaire. Il a dit qu'il échangeait régulièrement avec le DASG au sujet de questions de santé et de sécurité et qu'il lui arrivait d'aborder la question de l'IFP. Il a aussi déclaré que c'est à l'issue de l'audience d'arbitrage et de médiation qu'on s'est posé la question consistant à savoir si les ALCE recevaient tous le même taux d'IFP. Il a témoigné que ni lui ni Mme Hines n'avaient vérifié, après l'examen de 2000-2001, si l'établissement se conformait aux directives relatives à l'IFP et aux taux établis par l'examen. Il a admis que si les fonctionnaires s'estimant lésés n'avaient pas témoigné à l'audience d'arbitrage et de médiation, leur IFP aurait probablement été maintenue au taux maximal de l'exposition continuelle.

38 En 2004, M. McLean occupait le poste de gestionnaire d'unité à l'établissement Kent. Il occupe aujourd'hui un poste identique, mais à l'établissement Mountain cette fois. À l'époque pertinente, il partageait la responsabilité de la gestion du secteur de la gestion des cas avec un autre gestionnaire d'unité en même temps qu'il était responsable de l'effectif des agents de libération pour l'ensemble de la population des détenus. Il a témoigné qu'entre 2000 et 2005, l'IFP était payée aux ALCE au taux de l'exposition fréquente.

39 M. McLean a dit qu'à l'époque où il avait effectué son examen, M. Byrne était le gestionnaire par intérim de l'unité d'isolement et qu'il ne travaillait pas dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. Kathleen Duncanson occupait son poste de CGC à titre intérimaire et l'IFP lui était payée au taux de l'exposition fréquente.

40 À l'issue d'une réunion qui s'est tenue à l'établissement en matinée le lendemain de la médiation, le directeur a demandé à M. McLean d'examiner le taux d'IFP des ALCE qui travaillaient dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. Il croit qu'on lui a confié cette tâche parce qu'il était le seul gestionnaire d'unité en titre et que tous les autres gestionnaires exerçaient leurs fonctions à titre intérimaire. Pour mener à bien l'examen en question, il a consigné les noms des ALCE qui relevaient des autres gestionnaires d'unité, puis il a demandé à Mark Langer, chef du personnel des ressources humaines, d'effectuer une vérification auprès de la Section de la rémunération et des avantages. En prenant connaissance des résultats qui lui ont été communiqués un ou deux jours plus tard, il a constaté que tous les ALCE étaient payés au taux de l'exposition fréquente, à l'exception de M. Voth et de M. Owen, qui, eux, étaient payés au taux maximal de l'exposition continuelle. Il a ensuite transmis cette information à Whitney Mullen, DASG par intérim; il en a également discuté avec elle en plus de lui demander conseil sur la suite à donner.

41 M. McLean a ensuite rempli un formulaire de demande d'approbation d'une IFP/ISD au taux de l'exposition fréquente pour chacun des plaignants en plus de se faire transmettre par courriel le principe qui s'appliquait à chacun (pièce E-6). Sur la pièce E-6, la date de la demande d'IFP inscrite à la machine est le 1er août 2003, mais cette date a été biffée et on y a substitué une autre date, le 1er octobre 2004, à la main en ajoutant les initiales « MH ». Je présume que ce sont les initiales de Mme Hines qui a aussi signé le formulaire d'approbation de l'IFP au taux maximal de l'exposition fréquente pour les deux plaignants. M. Nelmes a témoigné que la date dactylographiée sur le formulaire correspond à la date à laquelle les plaignants ont été affectés au secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN et que la date manuscrite est celle de l'entrée en vigueur du taux modifié approuvé par Mme Hines.

42 M. McLean a dit que M. de Haan n'avait pas été inclus dans l'examen étant donné qu'il était rattaché à l'unité d'isolement et que l'IFP lui était payée au taux maximal de l'exposition continuelle. De plus, il était en congé au moment de l'examen. C'est M. Byrne qui occupait le poste de CGC à l'unité d'isolement et il avait droit au taux maximal d'exposition continuelle.

43 M. McLean a confirmé qu'il s'était entretenu avec M. Voth au sujet de l'examen de l'IFP et qu'il lui avait dit que son IFP était susceptible de passer du taux de l'exposition continuelle au taux de l'exposition fréquente. M. Voth lui avait demandé s'il allait être obligé de rembourser le trop-payé, mais M. McLean avait été incapable de lui donner une réponse claire. Il a dit qu'il ne s'était pas entretenu avec M. Owen, qui relevait d'un autre gestionnaire et qui était en congé à ce moment-là. Il a indiqué que la conversation avec M. Voth s'est déroulée sur un ton cordial. Il a aussi déclaré qu'il n'avait pas essayé d'intimider ou de harceler les plaignants par suite de leurs griefs, lesquels avaient été réglés à l'audience d'arbitrage et de médiation.

44 Au moment où il a eu ces échanges, M. McLean n'était pas au courant des modalités de l'entente de règlement des griefs précédents. Il se serait trouvé par hasard au même hôtel que les plaignants pour régler un tout autre grief le jour où M. Owen et M. Voth ont participé à l'audience d'arbitrage et de médiation de leurs griefs précédents.

45 En contre-interrogatoire, M. McLean a déclaré qu'il ne savait pas à quelle date exactement on lui avait demandé d'examiner les taux d'IFP des ALCE, mais il a confirmé que c'est le jour même où le directeur lui a confié cette tâche qu'il s'est entretenu avec M. Voth. Il a dit qu'il avait de la difficulté à se souvenir des noms de toutes les personnes dont il avait examiné l'IFP, mais il a réussi à en nommer six. Il a ajouté qu'il avait examiné l'IFP de plus ou moins 11 ALCE. On lui a fourni la feuille de calcul et les principes à appliquer pour mener à bien l'examen, mais les données consignées n'étaient pas à jour. À sa connaissance, il n'existait pas de système de suivi des taux d'IFP des employés qui passaient d'un secteur à l'autre dans l'établissement. Il a confirmé qu'il avait basé son examen sur les documents dont il disposait et qu'il n'avait interrogé aucun des ALCE. Il a déclaré qu'il n'avait pas été étonné par cette demande d'examen, car c'est dans l'ordre des choses quand on est gestionnaire d'examiner divers aspects du travail de temps à autre.

46 M. McLean a dit se rappeler qu'un certain nombre d'ALCE avaient quitté le secteur situé à l'extérieur du gymnase pour emménager dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, le 7 juin 2004. Il est certain de la date car il l'a vérifiée. Personne dans l'établissement ne lui avait dit qu'il fallait procéder à un examen de l'IFP chaque fois qu'un employé changeait de secteur. Il a déclaré qu'il n'y avait aucun système en place pour faire le suivi dans ces cas-là. Avant d'arriver à l'établissement Kent, il occupait le poste de DASG dans un autre établissement, où il était responsable de la gestion de l'IFP pour le personnel de l'endroit. Il a dit qu'il ne travaillait pas à l'établissement Kent au moment de l'examen de 2000-2001.

47 M. McLean a confirmé qu'il n'avait pas examiné le taux d'IFP de M. de Haan à son retour de congé. Il a dit qu'il n'avait pas eu d'entretien avec lui et qu'il s'agissait d'un oubli de sa part, car M. Byrne travaillait dans un autre secteur.

48 Il ressort d'un échange de courriels datés du 28 juillet 2004 et produits sous les cotes E-4 et E-6, qu'à cette date-là à tout le moins, M. McLean ne savait pas si les montants payés en trop allaient être recouvrés, ni pourquoi il y avait un examen du taux d'IFP. Dans un courriel expédié à 12 h 47, M. Nelmes écrit ce qui suit à M. McLean et à Mme Mullin :

[Traduction]

J'essaie de savoir exactement quelle information a été communiquée aux ALCE concernant leur taux d'IFP à la suite du récent processus de médiation de griefs ayant trait à l'IFP. Ce que je cherche surtout à savoir, c'est si on leur a dit qu'il allait y avoir recouvrement des montants payés en trop. La règle est habituellement de faire en sorte que toute diminution du taux prenne effet à la date de l'examen.

49 M. McLean lui a répondu ceci à 13 h 20 :

[Traduction]

Les modalités de l'entente qui est intervenue dans le cadre de la récente médiation dirigée par la CRTFP en vue de régler les griefs de Randy et Val ne peuvent pas être communiquées, me dit-on. Pour ce qui est de la situation actuelle, Randy Voth et Barrie Owen reçoivent le taux maximal de l'exposition continuelle parce qu'ils travaillaient dans un autre secteur; ils travaillent maintenant dans le secteur situé au-dessus des locaux de Corcan. On m'a demandé de réduire leur IFP au taux de l'exposition fréquente; j'ai demandé aux RH de m'expliquer pourquoi, car je n'ai aucun document qui me permet de dire que c'est le taux qui s'applique ou comment on en est arrivé à ce taux pour ce secteur. Je dois autoriser un changement que je ne peux justifier. Les deux employés ont dit qu'ils allaient déposer un grief si leur taux est modifié. J'ai donc besoin de cette information pour justifier ce changement. Je ne sais pas s'il y aura recouvrement des montants payés en trop; le les RH me demandent d'indiquer la date à laquelle ils ont changé de secteur sur le formulaire de demande d'approbation de l'IFP[…]

Je sais que Dave et toi avez effectué cet examen à l'établissement Kent il y a quelque temps déjà, mais personne ici n'a encore été capable de me fournir l'information dont j'ai besoin.

50 Mme Mullin a répondu par retour de courriel que selon la section 4 - degré d'exposition - de la directive sur l'administration et l'application de l'indemnité de facteur pénologique, le secteur de la gestion des cas était considéré comme un secteur à exposition fréquente et que le principe 12 s'appliquait étant donné que les ALCE sont appelés à interviewer des détenus.

51 Mme Hines possédait, par délégation du sous-commissaire de SCC, le pouvoir d'approuver le taux d'IFP. Elle avait commencé à procéder à un examen de l'IFP dans chacun des établissements de la région du Pacifique en juin 2000 et qu'elle avait délégué à M. Nelmes la responsabilité de rencontrer les représentants de la direction et de l'agent négociateur dans les divers établissements de la région du Pacifique. La direction de l'établissement de Kent avait fait l'examen demandé et transmis les formulaires de demande d'approbation à M. Nelmes, qui avait préparé une feuille de calcul et lui avait ensuite communiqué les résultats de son examen. Chaque fois qu'elle avait des questions, il communiquait avec l'établissement Kent pour obtenir des renseignements supplémentaires. Une fois convaincue d'avoir toute l'information nécessaire, elle avait approuvé le taux d'IFP de chaque poste. La feuille de calcul, produite sous la cote E-3, a été signée par Mme Hines le 12 février 2001.

52 Mme Hines s'est intéressée de près aux griefs des plaignants qui ont été réglés dans le cadre de la médiation. Elle a déclaré que l'entente établissait le taux d'IFP des plaignants durant la période où ils avaient travaillé dans le secteur situé à l'extérieur du gymnase et que l'employeur n'avait pas négocié le taux d'IFP pour d'autres secteurs durant la médiation.

53 Mme Hines a déclaré que ce n'était pas vrai que la réduction des taux d'IFP des fonctionnaires s'estimant lésés tenait au fait qu'ils avaient présenté des griefs. Elle a dit qu'elle avait constaté, durant la médiation, qu'il y avait un manque de cohérence dans les taux d'IFP payés aux ALCE et qu'elle avait conclu que [traduction] « […] nous devrions demander à l'établissement de vérifier les taux d'IFP en vue d'assurer une cohérence ».

54 Elle a déclaré qu'elle cumulait 22 années de service à SCC au moment de la médiation et qu'elle avait participé au règlement de centaines de griefs. Elle a affirmé que l'entente intervenue le 29 juin 2004 ne l'avait nullement contrariée.

55 En contre-interrogatoire, Mme Hines a déclaré qu'elle avait chargé le DASG de vérifier les taux d'IFP à l'établissement Kent afin de s'assurer qu'ils étaient actuels et à jour. Elle a dit que le DASG avait assurément reçu de l'information sur l'IFP durant l'examen de 2000. Elle s'attendait à ce qu'il fasse le nécessaire pour que les gestionnaires remplissent les formulaires de demande d'approbation de l'IFP quand des employés changeaient de secteur. Elle a dit qu'il n'y avait pas de système de suivi en place et qu'elle n'exerçait pas de surveillance pour s'assurer que les taux étaient à jour. Par exemple, le nom de l'établissement est indiqué sur le talon de chèque de paie des employés, mais pas le secteur de travail. Après avoir constaté, à l'audience d'arbitrage et de médiation, qu'il y avait un manque de cohérence dans les taux d'IFP des ALCE, elle n'a pas demandé qu'on procède à un examen paninstitutionnel des taux d'IFP de tous les employés et elle ne saurait dire si un examen de ce genre a été effectué ailleurs.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour les plaignants

56 Les plaignants ont admis qu'il leur incombait de démontrer qu'il y avait eu violation de l'article 23 de l'ancienne Loi. Ils ont dit que les défendeurs avaient contrevenu aux alinéas 8(2)a) et c) de l'ancienne Loi immédiatement après la médiation.

57 À leur point de vue, je dois déterminer si les défendeurs ont cherché à les intimider ou à les punir, par leurs actes ou leur propos, pour avoir exercé leur droit de porter leurs griefs à l'arbitrage dans les dossiers de la CRTFP 166-02-31979 et 31980. Leur preuve non contredite était qu'ils croyaient que l'employeur avait pris des mesures de représailles à leur endroit, en insistant tout particulièrement sur le moment choisi pour apporter les changements, c'est-à-dire juste après la médiation, et sur leurs sentiments d'incrédulité. Le décideur devrait appliquer le critère établi dans Faryna v. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354 (BCCA) pour apprécier la crédibilité des témoins.

58 Les plaignants ont dit que la violation de leurs droits prenait une forme subtile et que les violations de l'article 23 supposaient souvent un amalgame de faits subtils étant donné que les faits flagrants n'aboutissent jamais à l'arbitrage. Ils ont rejeté l'argument selon lequel l'employeur cherchait simplement à régler un problème dans l'administration de l'IFP qui venait d'être porté à leur attention et que la direction avait le droit de procéder de la sorte. Ils disent que la rapidité avec laquelle l'employeur a réagi à l'information qu'il a obtenue durant la séance de médiation tranche totalement avec le relâchement qui caractérisait généralement l'administration de l'IFP à l'établissement Kent jusqu'à ce moment-là. De plus, c'est la première fois que M. McLean était chargé de procéder à un examen de l'IFP, tâche pour laquelle il a dû recevoir de la formation et dont il s'est acquitté dans un autre établissement. Il est difficile de croire qu'il ne connaissait pas la raison du changement qu'on lui a demandé d'apporter au taux d'IFP. Mme Hines et M. Nelmes ont fait eux-mêmes la démonstration de leur incapacité à administrer l'IFP avec compétence et application au niveau régional en admettant qu'il n'y avait pas eu de suivi, dans les quatre ou cinq années qui se sont écoulées depuis l'examen de 2002, pour vérifier que l'IFP satisfaisait à la norme. C'est un gaspillage éhonté de ressources que d'avoir procédé à un premier examen en 2002 et de ne pas avoir fait de suivi par la suite.

59 Les plaignants sont les deux seuls employés dont l'IFP a été réduite. L'employeur les a ciblés. Le fait que l'employeur ait finalement décidé de ne pas recouvrer les montants payés en trop ne change rien au fait qu'il avait l'intention de le faire au départ. Sûrement que l'employeur avait la question des taux encore bien présente à l'esprit quand M. de Haan est revenu de son congé, et pourtant, son taux d'IFP est resté inchangé. Cette différence de traitement montre bien que les plaignants ont été ciblés. Tout ce qui différencie leur situation de celle de M. de Haan est qu'ils ont déposé des griefs pour contester leur taux d'IFP et que ces griefs ont abouti à l'arbitrage.

60 De plus, la décision de Mme Hines de modifier la date d'entrée en vigueur de la révision du taux d'IFP se voulait un moyen de les empêcher de déposer un grief en faisant en sorte qu'il n'y ait pas de recouvrement du montant payé en trop.

61 Les plaignants ont aussi dit que seuls les ALCE étaient visés par l'examen sur dossier de l'IFP qui avait été confié à M. McLean et que la décision de ne pas étendre cet examen à l'ensemble de l'établissement montre bien que les défendeurs cherchaient à cibler les plaignants.

62 Les plaignants reconnaissent la gravité de leurs allégations de pratique déloyale de travail et admettent qu'une décision qui serait défavorable aux défendeurs pourrait compromettre leurs carrières. Il reste que c'est le cas de toutes les plaintes de pratique déloyale de travail, qui doivent nécessairement entraîner des conséquences. L'arbitre de grief doit apprécier soigneusement la preuve pour s'assurer qu'il n'en résulte pas de nouvelle injustice. Les plaignants avancent que la preuve étaye leur position.

63 Ils me renvoient à Dubreuil c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada) et al., 2006 CRTFP 20, aux paragr. 62 et 70. Dans l'éventualité où je conclurais qu'il y a eu violation des articles 8 et 23 de l'ancienne Loi, ils demandent que j'ordonne aux défendeurs de cesser de contrevenir à l'ancienne Loi, qu'une copie de la décision soit distribuée à tous les membres de l'unité de négociation et que je demeure saisi du dossier aux fins de l'exécution de la décision.

B. Pour les défendeurs

64 L'employeur a défendu la thèse que les pratiques déloyales de travail constituent le [traduction] « […] summum des actes délictuels en relations de travail ». Il appartenait aux plaignants de démontrer que leurs droits n'avaient pas été respectés; or, ils ont failli à cette tâche.

65 Le décideur ne doit pas conclure que le défaut de l'employeur d'expliquer pourquoi des employés ont été traités différemment témoigne d'un sentiment antisyndical. Des éléments de preuve sont nécessaires pour tirer une telle conclusion. L'intention de faire des distinctions injustes doit être présente : Association des employé(e)s en sciences sociales c. Canada (Procureur général), 2004 A.C.F. no 741 (CAF). La conviction subjective des plaignants qu'ils ont été traités de manière inéquitable ne constitue pas une preuve suffisante de l'existence d'un sentiment antisyndical. Ils doivent faire la preuve d'actes, de paroles ou de communications écrites qui corroborent l'existence d'un sentiment antisyndical et l'intention de les intimider ou de les empêcher d'exercer un droit que leur accorde l'ancienne Loi : Cloutier c. Leclair, 2006 CRTFP 5.

66 Dans le même ordre d'idées, le décideur ne doit pas conclure à l'existence d'un sentiment antisyndical ou d'une intention d'intimider les plaignants ou de les empêcher d'exercer les droits que leur accorde l'ancienne Loi du fait que l'examen de l'IFP a coïncidé avec la médiation. Les plaignants ne peuvent pas s'acquitter du fardeau de la preuve en invoquant le concept de « la chose parle par elle-même » (res ipsa loquitor). L'employeur a expliqué en détail pourquoi il avait décidé d'examiner l'IFP qui s'appliquait aux ALCE. Ses raisons ou sa défense pour procéder à cet examen et modifier le taux des plaignants après la conclusion d'une entente de médiation étaient dénuées de malice. Ce n'est qu'à la suite de la procédure de règlement des griefs et de médiation que les défendeurs ont pris conscience du manque de cohérence dans l'application de l'IFP et du fait que le taux des plaignants ne concordait pas avec le degré d'exposition associé à leur secteur de travail. Concrètement parlant, l'absence de suivi pour s'assurer de l'application cohérente de l'IFP dans un milieu de travail dynamique caractérisé par de nombreux mouvements de personnel est un faux argument, car dès lors que le problème de cohérence a été mis au jour, les représentants de l'employeur ne pouvaient passer cette situation sous silence, puisque cela aurait été contraire à la Loi sur la gestion des finances publiques, L.R.C. (1985), ch. F-11. Quand les plaignants travaillaient dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, en 2002, il a été établi que le secteur présentait un degré d'exposition fréquente aux fins de l'IFP; or, ils n'ont pas contesté cette évaluation. Au demeurant, la preuve établit de façon indéniable que l'intention de l'employeur était d'appliquer les mêmes taux à tous les ALCE. Rien ne permet de conclure à l'existence d'une intention de porter atteinte aux droits des plaignants ou de faire des distinctions injustes à leur endroit.

67 Mme Hines avait participé au règlement de centaines de griefs avant l'audience d'arbitrage de juin 2004. Elle a bien dit que l'entente intervenue dans ce cas-ci ne l'avait pas contrariée. Rien dans le fait que l'employeur a cherché à appliquer le même taux d'IFP aux ALCE travaillant dans le même secteur ne permet de conclure à l'existence d'une intention de contrevenir à l'ancienne Loi. Rien ne permet non plus de conclure que les défendeurs ont contraint, menacé ou intimidé les plaignants : Sabir et al. c. Richmond et al., 2006 CRTFP 118.

68 Au moment de l'examen, l'IFP de M. Byrne lui était payée à juste titre au taux de l'exposition continuelle puisqu'il était alors rattaché à l'unité d'isolement. M. de Haan, pour sa part, était affecté de façon continuelle à l'unité d'isolement avant de prendre un congé prolongé. Il était d'ailleurs en congé au moment de l'examen. Dans un milieu de travail dynamique et stimulant où la préoccupation quotidienne est la sécurité des détenus, la [traduction] « […] réalité concrète est qu'on ne peut exiger la perfection ». La règle consistant à ne pas recouvrer les montants payés en trop au titre de l'IFP atteste que l'employeur ne dispose pas des ressources nécessaires pour assurer le suivi de l'IFP; tout paiement en trop est une erreur et les employés ne devraient pas en souffrir.

69 Les plaignants ont prétendu que la « rapidité » avec laquelle l'employeur avait procédé à l'examen accréditait le traitement discriminatoire; il reste que dès lors que l'employeur était au fait du problème, c'était un processus très simple et très rapide que de situer le poste sur la grille, d'autant plus que l'administration régionale avait délégué cette responsabilité à l'établissement. Tout le monde est censé recevoir le même taux et l'employeur n'a pas cherché à recouvrer tout montant payé en trop. Le fait d'avoir harmonisé la situation des plaignants avec celle des autres ALCE qui travaillaient dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN ne peut donner matière à une plainte de pratique déloyale de travail.

70 En terminant, le décideur ne doit pas tirer de conclusion défavorable du fait que l'employeur n'a pas appelé le directeur ou le DASG à témoigner. Il reste que c'est aux plaignants qu'incombe le fardeau de la preuve et que c'est Mme Hines, au bureau régional, qui a pris la décision d'examiner l'IFP à la suite de la médiation.

C. Réplique des plaignants

71 Les plaignants ont répliqué que rien n'obligeait les employés à aviser l'employeur que leur taux d'IFP était erroné. L'employeur aurait facilement pu procéder à un examen sur dossier du taux payé à tous les employés. Le moment choisi pour effectuer l'examen, le caractère circonscrit de cet examen, l'absence de suivi et le fait que le taux de M. de Haan soit resté inchangé à son retour de congé témoignent de l'intention de faire des distinctions injustes à l'endroit des plaignants : Association des employé(e)s en sciences sociales. Il s'agit d'un traitement discriminatoire subtil, mais qui contrevient néanmoins aux articles 8 et 23 de l'ancienne Loi.

IV. Motifs

72 Les dispositions essentielles de l'ancienne Loi qui s'appliquent en l'espèce sont les articles 23 et le paragraphe 8(2), dont voici le texte :

  23.(1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle l'employeur ou une organisation syndicale ou une personne agissant pour le compte de celui-là ou de celle-ci n'a pas, selon le cas :

a) observé les interdictions énoncées aux articles 8, 9 ou 10;

    (2) Dans les cas où, en application du paragraphe (1), elle juge l'employeur, une organisation syndicale ou une personne coupable d'un des manquements qui y sont énoncés, la Commission peut, par ordonnance, lui enjoindre d'y remédier ou de prendre toute mesure nécessaire à cet effet dans le délai qu'elle estime approprié.

8. (2) Sous réserve du paragraphe (3), il est interdit :

a) de refuser d'employer ou de continuer à employer une personne, ou encore de faire des distinctions injustes fondées, en ce qui concerne l'emploi ou l'une quelconque des conditions d'emploi d'une personne, sur l'appartenance de celle-ci à une organisation syndicale ou sur l'exercice d'un droit que lui accorde la présente loi;

c) de chercher, notamment par intimidation, par menace de destitution ou par l'imposition de sanctions pécuniaires ou autres, à obliger un fonctionnaire :

(ii) à s'abstenir d'exercer tout autre droit que lui accorde la présente loi.

73 Les protections accordées par l'ancienne Loi relativement à l'exercice des droits prévus par la convention collective sont importantes; cela étant dit, c'est aux plaignants qu'incombe le fardeau de démontrer qu'il y a eu violation de leurs droits, selon la prépondérance des probabilités. Or, il m'apparaît qu'ils ont failli à la tâche à cet égard.

74 J'ai pris en considération la crédibilité de tous les témoins et j'en suis venu à la conclusion que leurs témoignages étaient crédibles et dignes de foi. Il s'agit d'un cas où je dois surtout tirer des conclusions à partir des faits essentiels qui m'ont été soumis.

75 Selon moi, les parties ont établi, à l'audience d'arbitrage ou de médiation l'IFP payable à M. Voth et M. Owen dans le secteur situé à proximité du gymnase. Le taux d'IFP approprié pour cet endroit était le taux maximal de l'exposition continuelle. Durant l'audience du 29 juin 2004, Mme Hines et M. Nelmes ont constaté qu'il y avait un manque de cohérence en ce qui a trait au taux d'IFP des ALCE à l'établissement Kent et aussi que les plaignants travaillaient désormais dans un secteur différent de celui dont il était question dans leurs griefs. C'est à ce moment-là que l'employeur a décidé de procéder à un examen de l'IFP de tous les ALCE en poste à l'établissement Kent. L'examen de M. McLean a permis de déterminer que le taux d'IFP approprié était le taux maximal de l'exposition fréquente pour le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. Or, c'est le taux qui avait été payé aux plaignants quand ils avaient travaillé dans ce secteur avant d'être affectés au secteur situé à proximité du gymnase.

76 L'employeur a omis de rajuster le taux d'IFP quand les plaignants sont passés du CORCAN au secteur situé à l'extérieur du gymnase mais il a également omis de rajuster le taux d'IFP quand les plaignants sont revenus au secteur au-dessus de CORCAN. Il ressort clairement des témoignages de Mme Hines, de M. Nelmes et de M. McLean que l'employeur n'avait pas de système pour surveiller les incidences sur l'IFP lorsque les employés changeaient de secteur dans l'établissement. Mme Hines estimait qu'il incombait aux DASG de lui transmettre une nouvelle demande d'approbation d'une IFP/ISD chaque fois qu'un employé changeait de secteur dans l'établissement.

77 Le rajustement du taux d'IFP est survenu après l'audience de médiation, mais il ne faisait pas partie des modalités de l'entente de règlement; de plus, ce n'est qu'après avoir pris part à la visite de l'établissement durant l'audience d'arbitrage et de médiation que Mme Hines, qui était responsable de l'administration de l'IFP dans la région du Pacifique par délégation de pouvoir, s'est rendu compte que le taux était erroné.

78 Les plaignants ont trouvé que le moment choisi pour l'examen mené par M. McLean de l'IFP était suspect puisqu'ils venaient tout juste de conclure une entente sur le sujet à la médiation; pourtant, la preuve dont je dispose montre de manière irréfutable que les plaignants ont été payés par erreur au taux de l'exposition continuelle quand ils travaillaient dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. C'est une situation dont Mme Hines a été mise au fait durant la procédure de règlement des griefs et la médiation et dont elle ignorait l'existence jusque-là. C'est un fait que l'examen a eu lieu après la médiation; on peut même présumer que, n'eût été l'audience d'arbitrage ou de médiation, M. Voth et M. Owen auraient peut-être continué à recevoir le taux maximal de l'exposition continuelle. Cela étant dit, le taux d'IFP n'est pas immuable et il est notamment établi en fonction du lieu d'affectation de l'employé.

79 À mon sens, dès l'instant où l'employeur a pris conscience du manque de cohérence et des erreurs dans les taux d'IFP, il était tout à fait sensé qu'il veuille savoir s'il y avait un problème quelconque du côté des ALCE, en procédant à un examen de l'IFP à l'établissement Kent. En tant que responsable, par délégation de pouvoir, de l'administration de l'IFP, Mme Hines se devait d'obtenir la certitude que l'IFP était administrée correctement dans la région. Je ne perçois aucune tentative de la part de Mme Hines ou des autres défendeurs de miner l'entente de règlement des griefs précédents intervenue lors de la médiation ou de pénaliser les plaignants pour avoir participé aux processus de règlement des griefs, d'arbitrage ou de médiation ou encore de les intimider ou de les pénaliser pour avoir exercé les droits que leur accorde la convention collective. L'entente de principe indique expressément que l'entente est conclue [traduction] « […] sous toutes réserves et sans établir de précédents quant aux droits ou intérêts des parties dans un autre dossier ». La question réglée était les griefs liés au taux d'IFP approprié qui s'appliquait au secteur situé à proximité du gymnase et non au secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. L'entente n'interdisait pas à l'employeur de réviser ou de modifier le taux à l'avenir.

80 En fait, l'employeur n'a pas pénalisé les plaignants en recouvrant le montant avancé pour le taux d'IFP erroné durant leur affectation dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. Il ressort clairement du témoignage oral de M. McLean qu'il n'était pas au courant de la règle s'appliquant au recouvrement des trop-payés quand il a effectué son examen. Ce témoignage n'a pas été contesté et il m'a paru véridique. Il ressort aussi clairement de la preuve orale et documentaire dont je dispose que le recouvrement des montants payés en trop a commencé à partir du moment où l'employeur s'est rendu compte de son erreur et non pas rétroactivement à la date du changement de secteur qui aurait dû occasionner un examen du taux d'IFP. C'était la règle qui avait été établie, selon M. Nelmes, et qui était décrite dans le courriel qui a été expédié à M. McLean à 12 h 47, le 28 juillet 2004 (pièce E-5). Même si M. McLean a inscrit, sur la demande d'approbation d'une IFP/ISD, la date à laquelle les plaignants sont retournés travailler dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, Mme Hines a fait en sorte que le changement ne prenne effet que le 1er octobre 2004. En contre-interrogatoire, l'avocat des plaignants n'a pas cherché à lui faire dire qu'elle visait à dissuader les plaignants de déposer un grief, si bien que le changement de date me semble en accord avec la règle décrite par M. Nelmes et voulant que l'employeur ne recouvre pas rétroactivement les montants d'IFP qui ont été payés en trop par erreur. Cela s'accorde avec une optique selon laquelle l'employeur n'a pas pénalisé un employé pour son manque de suivi des incidences d'un rajustement du taux d'IFP à la suite d'un changement de secteur dans l'établissement.

81 L'employeur n'a pas procédé à un examen paninstitutionnel des taux d'IFP après avoir pris conscience du problème concernant les taux des plaignants. M. Owen, à tout le moins, en a pris ombrage et c'est notamment pour cela qu'il a présenté une plainte. Je me suis employé à déterminer s'il s'agit là de discrimination pouvant m'amener à conclure à l'existence d'un sentiment antisyndical ou d'une sanction qui a été infligée aux plaignants pour avoir exercé leurs droits de se prévaloir de la procédure de règlement des griefs. À mon sens, le fait de ne pas avoir procédé à une vérification paninstitutionnelle ou panrégionale des taux après la mise au jour d'un problème touchant les taux des plaignants et le fait d'avoir circonscrit la vérification de l'IFP aux ALCE ne permet pas de conclure à l'existence d'un sentiment antisyndical ou d'une sanction infligée aux plaignants pour avoir exercé leurs droits de contester le taux d'IFP dans leurs griefs précédents. En ramenant l'IFP des plaignants au niveau de l'exposition fréquente, l'employeur ne faisait que rétablir le taux approprié, celui que les plaignants avaient reçu quand ils avaient jadis été affectés à ce secteur. L'intention de l'employeur était de faire en sorte que tous les ALCE soient traités de la même manière sur le plan du taux d'IFP.

82 Il est regrettable que l'employeur n'ait pas examiné les taux des deux autres ALCE qui travaillaient dans l'unité d'isolement ou qui étaient en congé et qui auraient eu droit au taux maximal de l'exposition continuelle. Faute de système de suivi, le taux de M. de Haan n'a pas bénéficié d'un rajustement quand il est retourné travailler dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN. À la lumière de la preuve, je n'accepte pas la prétention des fonctionnaires s'estimant lésés voulant qu'ils aient été délibérément ciblés et que leur taux ait été modifié en guise de punition ou de sanction pour avoir contesté le taux d'IFP plus tôt.

83 Dans un monde parfait, peut-être que l'employeur procéderait à un examen paninstitutionnel ou à une vérification panrégionale en apprenant l'existence d'un problème d'uniformité dans les taux d'IFP payés à un groupe d'ALCE. On peut s'étonner du fait que l'employeur n'avait aucun système en place pour bien contrôler et mettre à jour les taux d'IFP payés aux employés. Une vérification nécessiterait évidemment la mobilisation de ressources de gestion. Il incombe toutefois à l'employeur de gérer ses effectifs et de décider si les IFP feront l'objet d'un contrôle ou d'une vérification. Qu'il s'agisse d'une vérification ou d'un examen, les deux formules nécessitent la mobilisation de ressources; de surcroît, c'est à la direction qu'appartient la décision d'examiner ou non l'IFP. Le fait que l'employeur ait examiné les taux d'IFP sans avoir de système de suivi ou sans procéder à une vérification panrégionale ne constitue pas une preuve d'une pratique déloyale de travail ou de l'existence d'un sentiment antisyndical à l'endroit des plaignants.

84 La représentante des plaignants m'a invité à tirer une conclusion défavorable du fait que l'employeur n'avait pas appelé M. Lubimiv, le directeur, ou le DASG à témoigner, mais je refuse de le faire ici, car c'est aux plaignants qu'incombe le fardeau de la preuve dans les plaintes visées à l'article 23. Dans ce cas-ci, il ressort clairement de la preuve que c'est Mme Hines qui a pris la décision d'examiner les taux d'IFP payés aux ALCE après avoir constaté, durant la visite de l'établissement, que les deux plaignants travaillaient désormais dans le secteur situé au-dessus des locaux de CORCAN, et avoir appris, à la médiation, qu'il y avait un manque de cohérence dans les taux d'IFP payés aux ALCE. C'est à ce moment-là que le DASG a été chargé de s'assurer que les taux étaient actuels et à jour depuis l'examen de 2000. La preuve indique aussi clairement que l'employeur n'avait pas de système pour faire le suivi des taux d'IFP quand un employé changeait de secteur de travail à l'intérieur de l'établissement. La règle en vigueur était qu'on apportait le changement que dès qu'on se rendait compte que le taux d'IFP ne correspondait plus à la réalité, mais sans recouvrer rétroactivement le montant qui avait été payé en trop. C'est un fait que le directeur de l'établissement a chargé M. McLean de l'examen de l'IFP après la médiation, mais il ne fait aucun doute que cet examen est la conséquence de l'information obtenue durant le processus de médiation, notamment le constat que les employés avaient changé de secteur de travail entre la date de présentation de leurs griefs et le moment de la médiation. Selon moi, l'employeur n'avait nullement besoin de faire témoigner le directeur ou le DASG pour se défendre contre la plainte puisque le changement de taux résulte d'une décision de Mme Hines. Pour ces motifs, je refuse de tirer une conclusion défavorable dans ce cas-ci.

85 Pour ces motifs, la Commission rend l'ordonnance qui suit :

Ordonnance

86 La plainte est rejetée.

Le 14 juin 2007.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Paul Love,
commissaire

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