Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Demande d’annulation d’assignations à comparaître - Pertinence des assignations à comparaître Un témoin assigné à comparaître et l’employeur ont demandé que l’arbitre de grief annule des assignations à comparaître émises à la demande du fonctionnaire s’estimant lésé - l’arbitre de grief a conclu que la comparution de certains des témoins auxquels le fonctionnaire s’estimant lésé avait signifié une citation à comparaître n’était pas nécessaire dans les circonstances ou pertinente au grief. Demande accueillie en partie. Demande de divulgation - Rapport d’enquête sur une plainte de harcèlement - Compétence Le fonctionnaire s’estimant lésé avait demandé à l’employeur une copie d’un rapport d’enquête sur une plainte de harcèlement - l’employeur a partiellement divulgué l’information en se fondant sur la Loi sur l’accès à l’information - le fonctionnaire s’estimant lésé a déposé une plainte devant les Commissariats à l’information et à la protection de la vie privée - il a aussi demandé que l’arbitre de grief ordonne la divulgation complète du rapport - l’arbitre de grief a conclu qu’il avait compétence pour ordonner que le rapport soit divulgué, compte tenu des mesures nécessaires pour assurer la protection des renseignements personnels contenus dans le rapport. Demande accueillie en partie. Allégation de mesure disciplinaire déguisée - Fardeau de la preuve Le fonctionnaire s’estimant lésé a contesté la décision de son superviseur de lui assigner de nouvelles tâches parce qu’elles constitueraient une sanction disciplinaire déguisée - l’arbitre de grief a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’était pas acquitté du fardeau de la preuve et n’avait pas démontré que la décision de son superviseur constituait une forme de mesure disciplinaire prise en réponse à un présumé manquement à la discipline ou à une présumée inconduite - l’arbitre de grief a aussi noté que l’article 7 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35, reconnaît le pouvoir de l’employeur d’assigner des tâches aux employés - enfin, l’arbitre de grief a conclu que le fonctionnaire s’estimant lésé ne s’était vu imposer aucune suspension ni sanction pécuniaire. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2007-01-11
  • Dossier:  166-02-36185
  • Référence:  2007 CRTFP 6

Devant un arbitre de grief


ENTRE

EDWARD SYNOWSKI

fonctionnaire s’estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de la Santé)

employeur

Répertorié
Synowski c. Conseil du Trésor (ministère de la Santé)

Affaire concernant un grief renvoyé à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Ian R. Mackenzie, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même

Pour l'employeur:
Neil McGraw, avocat

Pour l'Association canadienne des employés professionnels:
Michelle Flaherty, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 21 au 23 août et du 30 octobre au 1er novembre 2006.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

I. Grief renvoyé à l’arbitrage

1 Edward Synowski, le fonctionnaire s'estimant lésé, était chef, Affaires internationales, au Bureau des affaires internationales et réglementaires (BAIR) de la Direction générale des produits de santé et des aliments de Santé Canada. Le 17 août 2004, il a présenté le grief suivant alléguant une mesure disciplinaire déguisée :

[Traduction]

[…]

Conformément à la stipulation 40.02 de la convention collective, j'estime avoir été traité de manière injuste et avoir été lésé par les efforts et les mesures continus de l'employeur en vue de m'empêcher de reprendre les fonctions de mon poste d'attache. L'employeur a fait des déclarations officielles mais non fondées ayant des conséquences négatives en me désignant à titre d'élément à problème dans le lieu de travail. J'estime être victime d'une mesure disciplinaire déguisée, comme en témoignent les déclarations officielles préjudiciables à mon endroit. Je présenterai au cours de la procédure de règlement du grief, une série de mesures et d'événements orchestrés par la direction qui établiront et confirmeront ma prétention selon laquelle je fais l'objet d'une mesure disciplinaire déguisée.

MESURE CORRECTIVE DEMANDÉE

Que la direction mette immédiatement un terme à toute forme de mesure disciplinaire déguisée et que je reprenne sans attendre les fonctions de mon poste d'attache qui consistent à gérer les dossiers internationaux et le personnel.

Je réserve le droit de prescrire d'autres mesures correctives dans le cadre de la procédure de règlement du grief.

[…]

2 Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur.  En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ce renvoi à l'arbitrage de grief doit être décidé conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35 (l' « ancienne Loi »).

3Le présent grief a été renvoyé à l'arbitrage de grief le 8 juin 2005. M. Synowski a ensuite été congédié de son poste. Ce congédiement fait l'objet d'un autre grief dont je n'ai pas été saisi. L'employeur a demandé que le présent renvoi à l'arbitrage de grief soit suspendu en attendant la réponse au dernier palier de la procédure de règlement du grief de M. Synowski concernant son congédiement. Le président a consenti à la demande de l'employeur. Les parties ont ensuite tenté de régler le présent grief par la voie de la médiation, mais sans succès. Une audience d'arbitrage avait été fixée initialement en mai 2006. Le fonctionnaire s'estimant lésé a demandé le report de l'audience, et le président a accepté. Le 21 avril 2006, l'employeur a demandé la suspension du présent grief jusqu'à la tenue de l'audience d'arbitrage et au prononcé de la décision concernant le grief sur le congédiement de M. Synowski. Ce dernier s'est opposé à cette demande, et elle a été rejetée.

II. Questions préliminaires

4Au début de l'audience, plusieurs questions devaient être réglées : assignations à comparaître, communication des documents et portée de l'audience. Mes décisions relativement à ces questions sont exposées ci-dessous.

A. Demande de modification du grief

5M. Synowski a modifié son grief au cours de la procédure de règlement. J'ai déclaré que, comme seul le grief initial avait été renvoyé à l'arbitrage de grief, je n'avais pas la compétence pour permettre la modification du grief, sans le consentement de l'autre partie. La modification portait sur des événements survenus après la date de dépôt du grief initial ayant été renvoyé à l'arbitrage de grief. L'employeur a accepté que le libellé du grief initial soit modifié de sorte à inclure « congédiement déguisé », mais a refusé que soient inclus les événements survenus à la suite du dépôt du grief. Le grief comporte donc cette seule modification et se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

[…] une série de mesures et d'événements orchestrés par la direction qui établiront et confirmeront ma prétention à l'effet que j'ai été victime d'un congédiement déguisé.

[…]

[Je souligne]

Par conséquent, la preuve entendue devra porter uniquement sur la période précédant le 17 août 2004.

6Il est ressorti clairement à l'audition des observations sur la portée de la communication des documents que certaines questions se posaient également au sujet de la période visée par le grief. M. Synowski a voulu présenter des éléments de preuve datant d'événements survenus en 2002 et 2003. L'employeur a soutenu que le grief devait porter uniquement sur les événements du printemps de 2004. J'ai statué que le grief se limiterait aux événements ayant précédé immédiatement le printemps de 2004 jusqu'au 17 août 2004.

B. Pertinence des assignations à comparaître

7Au début de l'audience, il y avait plusieurs questions à régler concernant les assignations à comparaître demandées par M. Synowski.

8M. Synowski a assigné Claude Archambault, agent des relations du travail pour l'Association canadienne des employés professionnels (ACEP), à témoigner. L'assignation à comparaître demandait à M. Archambault d'apporter des documents que l'ACEP détenait. L'ACEP représentait initialement M. Synowski dans le cadre de son grief, mais elle n'était plus son représentant au moment de l'audience. À la première journée de l'audience, l'ACEP s'est opposé à l'assignation. J'ai annulé l'assignation. Après avoir rendu ma décision relativement à la portée de l'audience et compte tenu du règlement de certaines questions touchant la communication des documents (voir ci-dessous), j'ai conclu que le témoignage de M. Archambault n'était pas nécessaire dans les circonstances.

9L'employeur s'est engagé à faire appel à Judith Lockett, directrice générale du BAIR (superviseure de M. Synowski) dans le cadre du cas. M. Synowski a donc accepté de retirer sa citation à comparaître visant Mme Lockett.

10 L'employeur s'est opposé au témoignage de Karen Dodds, directrice exécutive de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire à Santé Canada, parce qu'elle n'était pas la superviseure directe de M. Synowski pendant la période en question. M. Synowski a prétendu qu'elle avait pris part directement à certaines décisions, étant donné que Mme Lockett lui avait expliqué qu'elle agissait selon les instructions de Mme Dodds. C'est pourquoi, j'ai maintenu la citation à comparaître, sous réserve de satisfaire aux nécessités techniques du service. M. Synowski a finalement décidé de ne pas faire témoigner Mme Dodds.

11  L'employeur s'est aussi opposé à la comparution de Patrick Borbey qui était sous-ministre délégué à Santé Canada au moment du grief. M. Synowski a allégué que M. Borbey avait pris part aux décisions relativement à une plainte de harcèlement déposée par M. Synowski et qu'il avait participé à la conduite de la Direction des services des ressources humaines de Santé Canada. J'ai conclu que cette citation à comparaître devait être annulée, compte tenu qu'aucune allégation contenue dans le grief ne visait directement M. Borbey.

C. Communication des documents

12 En ce qui concerne la communication, j'ai statué que M. Synowski pouvait fournir une liste détaillée des documents demandés à l'employeur, mais que je n'ordonnerais pas une communication générale des documents, ce qui constituerait une « expédition de pêche ». M. Synowski a fait valoir que l'employeur avait en sa possession la correspondance entre son agent négociateur et lui-même, compte tenu que l'accès à son bureau avait été bloqué et qu'on ne lui avait pas permis de recouvrer ces documents. J'ai ordonné à l'employeur de chercher ces documents et de fournir à M. Synowski les documents qu'il détenait. L'employeur a fourni les documents le jour suivant. M. Synowski a demandé un ajournement jusqu'au lendemain pour lui permettre d'examiner les documents. L'employeur ne s'y est pas opposé. J'ai accordé l'ajournement.

13 M. Synowski a déclaré que, dès la reprise de l'audience (le jour suivant), il souhaitait traiter des documents déjà en sa possession, sans être retardé davantage en attendant que l'employeur réponde à une demande de communication détaillée. J'ai informé M. Synowski des risques associés à cette manière de procéder et je lui ai expliqué qu'il renonçait ainsi à son droit de soulever des questions liées à la communication dans le cadre de toute autre procédure. M. Synowski a insisté pour aller de l'avant, et j'ai donné mon aval.

14 Le 23 août 2006, M. Synowski a demandé un autre ajournement afin de prendre connaissance des documents lui ayant été transmis la veille (à la suite des demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels). J'ai accordé l'ajournement.

15 M. Synowski a demandé que l'employeur soit tenu de défrayer les coûts liés aux services de représentation. J'ai statué que je n'avais pas la compétence nécessaire pour rendre une telle ordonnance.

16 M. Synowski a demandé que je réexamine mes décisions de la journée précédente relativement à la portée de l'audience. Je lui ai expliqué que mes décisions étaient définitives et que le seul moyen de les contester était de présenter une demande de contrôle judiciaire d'une décision définitive.

17 M. Synowski a demandé « l'annulation du procès » pour lui permettre de s'adresser directement à la Cour fédérale pour contester mes décisions. Je lui ai expliqué qu'aucune disposition de l'ancienne Loi ne prévoyait une telle décision.

18 Il est devenu évident que l'audience devait se poursuivre. J'ai demandé aux parties de soumettre à mon attention toutes questions non réglées concernant la communication de documents afin d'en traiter avant la reprise de l'audience, par voie d'observations écrites ou d'une  conférence. Avant la reprise de l'audience, une question a été soulevée relativement à la communication d'un rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement.

19 Dans un courriel daté du 23 octobre 2006, l'employeur m'a avisé que M. Synowski souhaitait obtenir une copie intégrale du rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement auprès de la Direction de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels de Santé Canada. M. Synowski avait reçu une copie expurgée du rapport qui contenait des renseignements personnels protégés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. L'employeur a affirmé qu'il était disposé à fournir une copie intégrale du rapport aux conditions suivantes : la copie intégrale devait demeurer confidentielle, n'être utilisée que dans le contexte des renvois à l'arbitrage de grief et être retournée au terme des procédures.

20 M. Synowski a répondu ce qui suit, le 24 octobre 2006 :

[Traduction]

[…]

[…] Ce rapport est fort pertinent pour la défense de ma cause.

Je m'engage à en assurer la confidentialité conformément à la Loi sur la protection des renseignements personnels et à retourner le document à la fin des procédures, mais je n'accepte aucune autre restriction future quant à l'utilisation de ce document et de l'information qu'il contient. Si le document démontre de manière évidente que Santé Canada ou des fonctionnaires du gouvernement peuvent être visés par une action au civil ou autre action en justice, je me réserve alors le droit d'utiliser la version intégrale du rapport. Je ne renonce pas non plus à mon droit de présenter une demande auprès d'autres tribunaux ou fonctionnaires afin d'obtenir le document dans le futur.

[…]

21 Le 26 octobre 2006, l'employeur a retiré son offre concernant le rapport, avant la reprise de l'audience.

22 Au début de l'audience, j'ai entendu les observations des deux parties relativement à la communication de ce document. M. Synowski a répété sa demande en vue d'obtenir la version intégrale du rapport. Il acceptait les conditions énoncées par l'employeur, dans son courriel du 23 octobre 2006, à l'exception de la condition concernant l'utilisation du document à l'extérieur de l'audience d'arbitrage.

23 L'employeur a fait valoir que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement ne faisait pas partie du présent arbitrage. Il savait que M. Synowski avait déposé une plainte auprès du Commissaire à la protection de la vie privée. Même si son offre à l'égard de la communication du document témoignait de sa bonne foi, l'employeur a néanmoins allégué que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement n'était pas pertinent pour le présent grief. Subsidiairement, il a expliqué que, si l'information s'avérait pertinente, son utilisation devrait se limiter aux présentes procédures. L'employeur a convenu que ces procédures pourraient comprendre un contrôle judiciaire éventuel de la décision.

24 M. Synowski a affirmé que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement était pertinent parce qu'il explicitait le fondement de ses allégations à savoir que les mesures de harcèlement de l'employeur étaient punitives et constituaient un congédiement déguisé.

25 L'employeur a déclaré qu'il faudrait établir un lien entre le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement et l'attribution de nouvelles fonctions à l'aide de témoignages. À son avis, il revenait au Commissaire à la protection de la vie privée d'expurger le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement, et la présente audience d'arbitrage ne devrait pas servir à contourner le processus établi par la Loi sur la protection des renseignements personnels. L'employeur a soumis qu'il incombait à M. Synowski de démontrer que l'information était pertinente dans le cadre de l'arbitrage du présent grief.

26 M. Synowski a aussi fait valoir qu'il n'avait reçu que les documents que j'avais ordonné de communiquer, ce qui, selon lui, témoignait du refus constant de l'employeur de fournir de l'information et de sa volonté de retarder les procédures. L'employeur s'est excusé d'avoir tardé à envoyer les documents à M. Synowski et a expliqué qu'il s'agissait d'une erreur administrative.

27 J'ai statué qu'une copie intégrale du rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement devait être communiquée à M. Synowski. J'ai noté qu'il existait une différence entre ordonner la communication d'un document et admettre celui-ci en preuve. Ces procédures sont séparées et distinctes de toute procédure en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels ou de la Loi sur l'accès à l'information. Il ne m'appartient pas d'intervenir dans ces procédures. C'est pourquoi, j'ai expliqué que je n'avais pas besoin d'attendre les conclusions ou les décisions du Commissaire à la protection de la vie privée. Je peux ordonner la communication d'une copie intégrale du rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement, tout en imposant des conditions nécessaires à la protection des renseignements personnels. J'ai ordonné la communication et imposé les conditions initialement proposées par l'employeur, dans son courriel du 23 octobre 2006. En ce qui concerne la condition de ne pas utiliser le document dans le cadre d'autres procédures, j'ai fait peu de commentaires. Le document est produit uniquement aux fins de la présente audience et ma décision n'a pas force exécutoire dans le cadre d'une autre procédure. L'employeur ne perd pas son droit de s'opposer à la production du document dans toute autre procédure.

28 Après avoir examiné la copie intégrale du rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement, M. Synowski l'a retournée à l'employeur et a déclaré qu'il utiliserait la copie expurgée qu'il avait déjà en sa possession.

29 Les parties ont fait de brèves déclarations préliminaires. J'ai ensuite passé en revue avec M. Synowski les procédures à suivre pour présenter un cas. Après discussion, j'ai accordé un ajournement jusqu'au lendemain pour permettre à M. Synowski de se préparer.

III. Résumé de la preuve

30 M. Synowski occupait un poste de ES-06. Selon sa description de travail (pièce E-1), ses principales activités étaient les suivantes :

[Traduction]

[…]

Amorcer, planifier et diriger des projets et des études afin de recueillir et d'analyser de l'information et des données statistiques concernant les programmes et initiatives d'envergure internationale liés aux produits de santé et aux aliments et d'élargir la base des connaissances du Canada.

Élaborer, mettre en oeuvre et maintenir de vastes processus de consultation auprès des intervenants clés; coordonner, présider et diriger des collaborations interministérielles sur les questions touchant les produits de santé et les aliments internationaux afin de connaître les préoccupations du public / des intervenants et du gouvernement et de les intégrer dans l'élaboration de politiques et de programmes.

Fournir des conseils experts au directeur général, au sous-ministre délégué de la DGPSA, au ministre et au sous-ministre de Santé Canada sur les répercussions, au plan socio-économique et de la santé, des politiques, accords et programmes internationaux et recommander de nouveaux programmes ou de nouvelles initiatives pour soutenir l'élaboration de stratégies globales visant à améliorer la santé.

Coordonner et représenter les intérêts de la Direction générale des produits de santé et des aliments dans le cadre de forums multilatéraux et entreprendre des activités bilatérales à l'appui de l'élaboration et de la mise en oeuvre de programmes, d'accords et de politiques internationaux et de l'avancement des positions du Canada aux forums.

Veiller au perfectionnement personnel et à l'utilisation efficace du personnel de la Division et promouvoir les interactions efficaces avec les collègues de l'ensemble de la DGPSA et du Ministère, ainsi que d'autres organismes; planifier et gérer l'attribution des ressources en tenant compte des coûts.

Fournir des rapports analytiques et statistiques et de l'information sur les négociations et activités internationales aux collègues du Ministère oeuvrant à l'élaboration de politiques nationales, de plans et de stratégies et à la préparation de rapports à l'intention du directeur général, du sous-ministre délégué de la DGPSA, du ministre et du sous-ministre de Santé Canada.

Cerner et préciser les occasions et les contraintes liées à l'élaboration de stratégies, de programmes et de politiques en vue de promouvoir l'action mondiale relativement aux questions prioritaires touchant les produits de santé et les aliments.

Contribuer, à titre de membre de l'équipe de gestion du directeur général, à la planification du programme stratégique du bureau et aux cadres généraux en matière de politiques et de prestation des services et agir comme chef de file de la mise en oeuvre d'éléments déterminés du programme recoupant différentes directions de la Direction générale et soutenir l'exécution d'initiatives internationales.

Amorcer, planifier et diriger la préparation de documents et de matériel d'information à l'intention du directeur général, du sous-ministre délégué de la DGPSA, du sous-ministre et du ministre; examiner et  réviser le contenu des documents du Cabinet faisant valoir la nécessité de financer le programme et d'élaborer des politiques et fournir des conseils connexes.

Superviser le personnel, organiser et diriger le travail des consultants en recherche, des rédacteurs, des étudiants et des membres des équipes de projet.

[…]

31 En novembre 2003, M. Synowski a déposé une plainte de harcèlement contre sa superviseure de l'époque. Il a déclaré que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement (terminé en octobre 2004) avait conclu en sa faveur. M. Synowski a aussi affirmé que les actions de l'employeur afin de se [traduction] « débarrasser de lui » étaient directement reliées aux conclusions de l'enquête sur le harcèlement. Il a également prétendu que l'ancien sous-ministre délégué (SMD) de la Direction générale des produits de santé et des aliments avait pris part aux efforts en vue de se [traduction] « débarrasser de lui ». L'employeur a contesté l'admissibilité du rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement. J'ai permis la production du rapport (pièce G-9) afin que M. Synowski puisse contre-interroger Mme Lockett relativement à la motivation de son interaction avec lui et non pour établir la véracité de son contenu. M. Synowski n'a pas accusé Mme Lockett d'avoir été influencée dans ses agissements par le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement.

32 Mme Lockett est arrivé au BAIR, en octobre 2003. Elle a déclaré que la situation du BAIR n'était pas reluisante à l'époque. Le directeur général avait quitté neuf mois auparavant et le personnel du BAIR était découragé et se sentait abandonné. Elle avait pour mandat de restructurer le BAIR afin qu'il apporte une contribution valable à la Direction générale des produits de santé et des aliments. Elle devait notamment faire du BAIR un centre d'expertise de tous les aspects internationaux pour qu'il puisse jouer un rôle stratégique en matière de politiques.

33 M. Synowski devait quitter pour une formation en français en novembre 2003. Mme Lockett lui a demandé de retarder le début de sa formation afin de l'aider à rédiger un protocole d'accord. Le 14 novembre 2006, MmeLockett a rencontré M. Synowski. Dans un courriel daté du 25 novembre 2003 (pièce G-2), Mme Lockett a résumé les résultats de sa rencontre comme suit :

[Traduction]

[…]

  • Vous continuerez votre formation linguistique jusqu'à mars 2004 ou jusqu'à ce que vous atteigniez le niveau requis
  • Pendant ce temps, vous chercherez un autre emploi
  • Pendant ce temps, je vous aiderai en vous informant des occasions d'emploi dont j'ai connaissance ou en vous fournissant des références
  • Si vous n'avez pas un nouvel emploi au terme de votre formation linguistique, vous retournerez au BAIR
  • À votre retour au BAIR, vous conserverez votre niveau et votre titre actuels, mais vous serez sous ma supervision directe et vous travaillerez à des projets spéciaux

34 Selon Mme Lockett, M. Synowski considérait clairement la formation linguistique comme un tremplin vers d'autres postes. M. Synowski a répliqué au courriel, le 28 novembre 2003 (pièce G-2), en affirmant que la conversation ne s'était pas terminée comme elle le prétendait. Il a écrit dans son courriel qu'il n'avait pas donné son d'accord pour travailler à des projets spéciaux à son retour au BAIR.

35 Le 17 novembre 2003, M. Synowski a commencé sa formation linguistique.

36 Le 27 janvier 2004, Mme Lockett a rencontré M. Synowski dans un restaurant près de l'école de langue de M. Synowski, à la fin de sa journée d'école. La rencontre avait pour but de le mettre à jour au sujet de la réorganisation du BAIR. Mme Lockett rencontrait chaque employé individuellement. Elle lui a dit que l'on procédait à la réécriture de sa description de travail et que les changements seraient importants. Compte tenu de l'importance des changements, elle lui a expliqué qu'il s'agissait vraisemblablement d'un nouvel emploi et qu'il devrait participer à un concours pour obtenir le poste. M. Synowski lui a demandé pourquoi il n'était pas déclaré excédentaire, ce à quoi elle a répondu qu'aucun poste n'avait encore été déclaré excédentaire. Dans un courriel envoyé ultérieurement à Mme Lockett, M. Synowski a déclaré qu'il estimait avoir été écarté de son poste de manière injuste (pièce E-3). À l'audience, M. Synowski a soutenu qu'il lui avait semblé non professionnel de tenir une telle rencontre à un restaurant. Il en a fait part à Mme Lockett lors du contre-interrogatoire. Elle a répondu que cela ne lui semblait pas inapproprié et qu'elle avait rencontré du personnel dans des restaurants à d'autres occasions.

37 Le jour suivant la réunion du 27 janvier 2004, M. Synowski a pris un congé de maladie. Initialement, il a informé Mme Lockett qu'il serait en congé de maladie jusqu'au mois de mars 2004 (commencement du placement de sa nouvelle formation linguistique). Son médecin a ultérieurement émis un certificat médical indiquant que M. Synowski serait en congé de maladie jusqu'au 1er juillet 2004.

38 M. Synowski a écrit un courriel à Mme Lockett, le 5 mai 2004, pour l'aviser de son retour au travail le 24 mai 2004 (pièce E-5). Dans son courriel, il expliquait qu'il n'avait plus de crédits de congé et qu'il serait mieux en mesure de faire progresser son dossier en étant au bureau. Il déclarait également ne pas être prêt à retourner en formation linguistique avant que les questions le concernant ne soient réglées :

[Traduction]

[…]

[…] La raison de mon stress existe toujours. Mais, le travail ne comporte pas la même pression, ce qui nous permettrait  de faire des progrès en vue de la restructuration en inscrivant l'ensemble des faits dans un dialogue ouvert et honnête.

[…]

39 Mme Lockett a répondu par courriel, le 10 mai 2004 (pièce E-5), en se disant préoccupée du retour au travail de M. Synowski compte tenu que son médecin estimait que son congé devrait se prolonger jusqu'au 1er juillet 2004. Elle a écrit ce qui suit : [traduction] « [...] Je me préoccupe du fait qu'un retour précoce au travail pourrait être préjudiciable pour votre santé. » Elle a ajouté qu'elle demanderait à Santé Canada d'évaluer son aptitude à reprendre le travail. M. Synowski a répondu ce qui suit par courriel le lendemain (pièce E-5) :

[Traduction]

[…]

[…]  Je dépose une plainte de harcèlement contre vous pour diverses raisons, l'une d'elles étant la discrimination contre une personne en raison de son invalidité (catégorie des droits de la personne). Vous savez très bien que j'étais tendu et stressé, et vous avez agi de sorte à ajouter à mon stress et à la tension pendant que j'étais à l'extérieur du bureau. C'est à ce moment que je suis parti en congé lié au stress. Vous êtes la source première et l'un des principaux éléments m'ayant mené à prendre un congé en raison du stress, ainsi qu'un des principaux facteurs intrinsèques de l'environnement de travail empoisonné et hostile […] Mais le stress est apparu lorsque vous avez agi derrière mon dos. Si j'étais au bureau, je serais plus adéquatement informé de vos actions.

[…]

[…]  Ma plainte contre vous est liée au fait que vous faites tout en votre pouvoir (autorités légales et agissements secrets) pour me garder à distance. Il s'agit d'un autre de ces agissements.

[…]

40 Dans sa lettre demandant l'évaluation de son aptitude à retourner au travail (pièce G-4), le Ministère a écrit ceci :

[Traduction]

[…]

M. Synowski a indiqué qu'il imputait son stress à des situations survenues au travail au cours de l'année (et qui ont toujours cours);

  • plaintes de harcèlement déposées par lui, ce qui comprend une autre plainte que M. Synowski a l'intention de loger à l'endroit de Mme Lockett
  • l'incidence possible de la réorganisation en cours du BAIR sur son poste et son emploi au Bureau (on réécrit présentement les fonctions de son poste et, selon l'issue de l'évaluation de la classification, il pourrait devoir participer à un concours s'il veut obtenir le poste)

Récemment, M. Synowski a manifesté un niveau accru de stress. La correspondance qu'il a envoyée à son gestionnaire et à d'autres, au cours des dernières semaines, a été marquée par l'utilisation d'un langage accusatoire, des remarques personnelles méprisantes et une interprétation teintée de l'information factuelle. Par exemple, les mises à jour au sujet de la structure de l'organisation sont converties en allégations selon lesquelles Mme Lockett tenterait de se débarrasser de lui. Il prétend que  Mme Lockett contribue à créer un « environnement de travail empoisonné et hostile » et qu'elle et d'autres personnes à l'extérieur de son milieu de travail immédiat se liguent contre lui. Ce que la gestionnaire écrit à M. Synowski est en grande partie relié à de l'information factuelle. Ses réponses indiquent qu'il n'a pas absorbé les faits et qu'il réagit à ce qu'il croit être les « motifs » ou les « tactiques derrière son dos » de sa gestionnaire. En raison du ton et du contenu des communications écrites, la gestionnaire soupçonne que le niveau de stress de M. Synowski n'a pas diminué, compte tenu de la volatilité croissante de ses propos au cours des dernières semaines.

Il est important de noter qu'en raison de l'état de M. Synowski, relié au stress qu'il vit au travail, il est difficile pour la direction de maintenir un milieu de travail sain pour le personnel.

[…]

41 L'évaluation a conclu que M. Synowski était apte à retourner au travail. M. Synowski a allégué que le médecin l'ayant examiné avant fait des commentaires sur le caractère inapproprié de la lettre demandant l'évaluation. Dans un courriel adressé à M. Synowski, daté du 21 mai 2004 (pièce G-6), Mme Lockett a indiqué que, comme elle ne s'attendait pas à ce qu'il reprenne le travail aussi rapidement, elle n'avait pas pris les dispositions nécessaires à son retour. Elle précisait qu'elle devrait lui donner un briefing et annoncer son retour aux membres du personnel. Elle lui demandait de travailler de la maison pendant une semaine. M. Synowski a répondu que sa situation ne lui permettait pas de travailler de la maison et qu'il serait au bureau le 25 mai 2004. Le matin du 25 mai 2004, Mme Lockett lui a demandé de ne pas revenir au bureau avant que les dispositions aient été prises en vue de sa réintégration et lui a assuré que son salaire serait maintenu (pièce G-7). M. Synowski a rencontré Mme Lockett plus tard dans la journée, à la demande de celle-ci. Lors de cette réunion, elle a proposé de le réaffecter au Secrétariat du renouveau législatif de Santé Canada. M. Synowski s'est opposé aux nouvelles fonctions lui ayant été assignées au motif qu'il n'avait ni expérience ni connaissance de l'initiative du renouveau législatif et qu'il serait inapproprié de l'affecter à cette initiative. Dans un courriel adressé à Mme Lockett, il déclarait ce qui suit (pièce G-7) :

[Traduction]

[…]

[…] il semble que vous tentiez activement de m'écarter du bureau en m'affectant à une tâche qui pourrait nuire à ma réputation en raison de mon manque complet d'expérience dans ce secteur. Je vous demande de revenir sur votre décision […]

[…]

42 Mme Lockett a répondu qu'elle acceptait de réexaminer l'affectation proposée (pièce G-7). M. Synowski a répondu :

[Traduction]

Afin de clarifier ma position relativement à cette affectation potentielle : ma perception est que vous m'écartez du bureau et j'aimerais savoir pourquoi. Le fait de m'affecter à un poste temporaire […] est punitif du fait que je suis placé dans une situation vouée à l'échec compte tenu de mon inexpérience du domaine du renouveau législatif et, avant de me familiariser avec le dossier, je serai de retour au BAIR […]

Existe-t-il une raison de me garder à l'écart du BAIR dont je devrais être informé? […]

[…]

43 Mme Lockett a écrit à M. Synowski, le 27 juin 2003, pour l'informer qu'elle n'avait plus l'intention de le réaffecter au Secrétariat du renouveau législatif  parce qu'il l'avait convaincue en raison de l'inconfort qu'il avait manifesté face à cette affectation (pièce G-8). Elle avait plutôt décidé de l'affecter à des tâches au sein du BAIR reliées aux dossiers internationaux. Dans son courriel, elle précisait ce qui suit :

[Traduction]

[…]

Pendant ce temps, vous serez sous ma supervision directe. Vous conserverez votre salaire actuel, ainsi que votre niveau et titre  actuels. Votre lieu de travail sera le BAIR, comme cela était le cas auparavant.

[…]

44 Mme Lockett a préparé une liste détaillée de ses fonctions (pièce E-2) comportant les six tâches suivantes :

[Traduction]

  • Résumé des travaux internationaux par pays
  • Analyse de la contribution potentielle aux objectifs de la SAPT [Stratégie d'accès aux produits thérapeutiques]de nos travaux menés en collaboration avec la TGA, la EMEA et la FDA
  • Liens entre les priorités énoncées par le PM en matière de santé et le travail en matière de réglementation internationale de la Direction générale
  • Liens entre les travaux internationaux et le renouveau législatif
  • Organismes internationaux/liens
  • Communications reçues au BAIR et sortantes

45 Mme Lockett a déclaré que ces fonctions étaient pratiquement sans limite et consistaient à étudier la manière de fusionner les approches opérationnelles et stratégiques du BAIR. Il s'agissait, à son avis, d'une affectation excellente pour M. Synowski.

46 Le 14 juin 2003, Mme Lockett a rencontré M. Synowski afin de discuter d'un plan d'action pour les tâches lui ayant été assignées. M. Synowski n'avait pas de plan. Mme Lockett a résumé ses préoccupations au sujet de retards, dans un courriel datant du 16 juin 2003 (pièce G-13). M. Synowski a répondu qu'il fallait du temps pour se familiariser avec les nouvelles initiatives. Il a aussi mentionné ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] Par ailleurs, il a fallu pas mal d'efforts et d'activités afin de régler mes plaintes de harcèlement et quelques-uns des problèmes que j'ai présentement avec votre bureau. Je comprends que ces questions sont secondaires, mais, encore une fois, il faut en traiter maintenant parce qu'elles concernent le BDG [bureau du directeur général] ainsi que vos récentes activités.

[…]

M. Synowski a également écrit dans son courriel que le manque d'accès au personnel nuisait au progrès de son travail, que ce travail aurait dû être effectué en partie par un employé de niveau inférieur et que certaines tâches recoupaient le travail effectué par un consultant. M. Synowski a déclaré en contre-interrogatoire que ces fonctions étaient conçues pour qu'il échoue et pour le maintenir occupé.

47 À l'audience, Mme Lockett a passé en revue la liste des fonctions qu'elle avait préparée pour M. Synowski et l'a comparée à la description de travail de son poste d'attache (pièce E-7). Elle a indiqué où elle estimait que la liste des fonctions s'inscrivait dans sa description de travail.

IV. Résumé de l'argumentation

A.  Pour le fonctionnaire s'estimant lésé

48 M. Synowski a fait valoir que son grief était la conséquence des agissements de Mme Lockett, qui constituaient des représailles pour une enquête sur une plainte de harcèlement ayant conclu en sa faveur. L'employeur a démontré sa partialité à son endroit par un congédiement déguisé et une mesure disciplinaire déguisée. La plainte de harcèlement a été déposée parce que l'employeur a décidé de se débarrasser de lui. La décision de l'employeur de changer unilatéralement ses fonctions, sans son consentement, a eu pour effet de modifier son contrat d'emploi.

49 Selon M. Synowski, la lettre demandant l'évaluation de son aptitude à reprendre le travail (pièce G-4) le diffamait et prouvait l'animosité que Mme Lockett entretenait à son endroit.

50 M. Synowski a affirmé que ses nouvelles fonctions lui avaient été imposées et diminuaient ses responsabilités. Il estimait qu'il ne serait jamais en mesure de satisfaire aux exigences de Mme Lockett dans le cadre de ses nouvelles fonctions. Certaines des tâches relevaient d'une classification inférieure et étaient effectuées par un employé de niveau inférieur. Il a effectué d'autres tâches, mais Mme Lockett les a rejetées. Il a élaboré un plan de travail, qui a aussi été rejeté. À son avis, quoi qu'il fasse, il serait confronté à un rejet de la part de Mme Lockett.

51 M. Synowski a expliqué qu'une mesure disciplinaire déguisée se produisait lorsqu'un gestionnaire, dont l'animosité à l'égard d'un employé était connue, était appelé à prendre part à une décision touchant cet employé. À son avis, la lettre demandant l'évaluation de son aptitude à retourner au travail démontrait de l'animosité. Il a invoqué les décisions suivantes : Laird c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration), dossier de la CRTFP 166-02-19981 (19901207), Mallett c. Conseil du Trésor (Affaires indiennes et du Nord), dossiers de la CRTFP 166-02-15344 et 15623 (19860711). En conclusion, il a déclaré que les mesures prises par l'employeur constituaient un congédiement déguisé.

B. Pour l'employeur

52 L'employeur a prétendu que, dans le cadre d'une allégation de mesure disciplinaire déguisée, le fardeau de la plainte appartenait au fonctionnaire s'estimant lésé, et que celui-ci ne s'était pas acquitté de ce fardeau. Rien dans la preuve ne démontrait que la décision de la direction d'affecter M. Synowski à de nouvelles fonctions constituait une mesure disciplinaire. Rien ne démontrait que l'employeur avait tenté de corriger ou de punir M. Synowski.

53 L'employeur a fait valoir qu'il avait le droit absolu d'assigner des tâches en vertu de l'article 7 de l'ancienne Loi et qu'il n'était pas nécessaire d'obtenir le consentement de l'employé. Mme Lockett était un témoin crédible et il n'y avait aucune raison de douter de son témoignage. Il n'y avait pas de preuve d'intention malveillante ou de mauvaise foi de sa part. Les fonctions ayant été assignées à M. Synowski s'inscrivaient dans sa description de travail. Il ressortait clairement de la preuve que Mme Lockett avait pour mandat de restructurer le BAIR. Rien ne démontrait que la réorganisation était un subterfuge ou n'avait aucune valeur réelle. Aucun employé n'a le droit de demander à ce que les choses reviennent à ce qu'elles étaient; les employés doivent exécuter les fonctions qui leur sont assignées.

54 Selon l'employeur, pour conclure à l'existence d'une mesure disciplinaire déguisée, un arbitre de grief doit  être convaincu que l'employeur a sévi contre une forme quelconque d'inconduite (Robertson c. Conseil du Trésor (ministère du Revenu national), dossier de la CRTFP 166-02-454 (19710628)). Aucune preuve n'a été présentée en ce sens. M. Synowski n'a pas prouvé ses allégations et personne n'a témoigné à l'appui de celles-ci.

55 L'employeur a expliqué que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement (pièce G-9) n'avait aucune valeur réelle pour le présent grief. La seule question consistait à savoir si Mme Lockett avait tenu compte du rapport d'enquête pour prendre sa décision. M. Synowski ne lui a posé aucune question sur le rapport d'enquête lors du contre-interrogatoire. Mme Lockett n'a rien eu à voir avec le rapport d'enquête.

56 L'employeur a soutenu qu'aucune preuve ne démontrait que M. Synowski avait fait l'objet d'une sanction pécuniaire. Il a continué d'être rémunéré au groupe et niveau ES-06. Il n'avait clairement pas été renvoyé. Dans Browne et al. c. Conseil du Trésor (Revenu Canada - Douanes, Accise et Impôt), dossiers de la CRTFP 166-02-27650 à 27661 (19971201), un arbitre de grief a examiné la réorganisation de fonctions et a conclu qu'il n'avait pas la compétence, notamment parce que la classification des fonctionnaires s'estimant lésés n'avait pas changée et qu'ils n'avaient donc pas subi de sanction pécuniaire. Dans le cas de M. Synowski, la question portait en définitive sur l'attribution des fonctions, et qu'il ait été d'accord ou non avec ses nouvelles fonctions, cela ne constitue pas une mesure disciplinaire. Il a été démontré que les fonctions ayant été assignées à M. Synowski lors de son retour au travail s'inscrivaient dans sa description de travail.

57 En ce qui concerne l'évaluation de l'aptitude du fonctionnaire s'estimant lésé à retourner au travail, l'employeur a soutenu qu'il était de son devoir de s'assurer que M. Synowski était apte au plan médical à reprendre le travail, étant donné que le congé de maladie était lié au stress.

58 L'employeur a fait valoir que rien ne démontrait que Mme Lockett entretenait de l'animosité à l'endroit de M. Synowski ou qu'elle avait décidé de se débarrasser de lui. Par conséquent, la décision dans Laird n'était pas pertinente dans le présent grief.

C. Réfutation du fonctionnaire s'estimant lésé

59 M. Synowski a soutenu que les cas invoqués par l'employeur ne s'appliquaient pas aux faits en l'espèce. À son avis, la preuve démontrait l'animosité de l'employeur à son endroit. L'employeur n'a pas un droit absolu en matière d'attribution des fonctions. Mme Lockett n'était pas un témoin crédible et ses comportements portent à croire à une intention malveillante de sa part.

60 M. Synowski a soutenu qu'il n'était pas vrai que les fonctions lui ayant été assignées s'inscrivaient dans sa description de travail. Deux des tâches faisaient appel à des connaissances et de l'expérience concernant la Stratégie d'accès thérapeutique et l'initiative du Renouveau législatif, ce qu'il n'avait pas. Il faudrait des mois de recherche pour acquérir les connaissances nécessaires.

61 M. Synowski a soutenu que le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement impliquait le sous-ministre délégué (SMD) et que les mesures de Mme Lockett reflétaient celles du SMD. Il a affirmé que la lettre d'accompagnement de la demande d'évaluation de son aptitude à retourner au travail était extrêmement inappropriée et que le médecin l'ayant examiné avait fait cette même observation.

V. Motifs

62 Le droit de renvoyer un grief à l'arbitrage de grief en vertu de l'ancienne Loi est énoncé comme suit au paragraphe 92(1) :

92.(1) Après l'avoir porté jusqu'au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, un fonctionnaire peut renvoyer à l'arbitrage tout grief portant sur :

a) l'interprétation ou l'application, à son endroit, d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale;

b) dans le cas d'un fonctionnaire d'un ministère ou secteur de l'administration publique fédérale spécifié à la partie I de l'annexe I ou désigné par décret pris au titre du paragraphe (4), soit une mesure disciplinaire entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire, soit un licenciement ou une rétrogradation visé aux alinéas 11(2)f) ou g) de la Loi sur la gestion des finances publiques;

[…]

63 M. Synowski allègue qu'il y a eu mesure disciplinaire déguisée et congédiement déguisé. Les événements visés par le présent grief sont survenus antérieurement à l'éventuel congédiement de M. Synowski (faisant l'objet d'un autre grief dont je n'ai pas été saisi). Aux termes de l'ancienne Loi, M. Synowski doit démontrer que l'attribution des nouvelles fonctions par l'employeur constituait une mesure disciplinaire entraînant la suspension ou une sanction pécuniaire. Il doit non seulement prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la mesure prise par l'employeur était de nature disciplinaire, mais également démontrer que cette mesure a entraîné une suspension ou une sanction pécuniaire.

A. Mesure disciplinaire déguisée

64 Il a été question de la mesure disciplinaire déguisée dans Robertson. Dans ce cas, l'arbitre de grief en était venu à la conclusion suivante :

[…]

[…] La Loi sur l'administration financière ainsi que l'article 106 [du Règlement sur les conditions d'emploi] font mention en termes précis de pénalités en cas d'infraction à la discipline ou d'inconduite. Les termes employés comportent la notion de culpabilité : infractions volontaires ou négligence coupable; ces attitudes peuvent entraîner tous deux l'adoption de mesures punitives. Je crois toutefois que les termes employés ne se réfèrent pas à certains cas de manquements ou de déficiences, tels que l'incompétence involontaire ou l'incapacité (causée par l'inexpérience ou la vieillesse); dans les deux cas, on ne remarque aucune volonté de nuire.

Il me semble que la « mesure disciplinaire » à laquelle se réfère l'article 91(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique a été adoptée pour sévir contre toute « infraction à la discipline ou inconduite » ou, en d'autres mots, pour pallier à tout ce que l'employeur considère comme agissement coupable, quel que soit le terme inscrit dans les dossiers à cet effet.

[…]

[Les passages soulignés le sont dans l'original]

65 Il incombe au fonctionnaire s'estimant lésé de démontrer que la décision de l'employeur constitue une forme de mesure disciplinaire déguisée adoptée pour sévir contre une infraction à la discipline ou une inconduite. M. Synowski allègue qu'une plainte de harcèlement ayant été tranchée en sa faveur a motivé l'employeur à prendre une mesure disciplinaire contre lui. La preuve n'a pas démontré de lien entre le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement et la décision de l'employeur d'assigner de nouvelles fonctions au fonctionnaire s'estimant lésé ou de demander une évaluation de son aptitude à reprendre le travail. Mme Lockett n'a pas été contre-interrogée relativement à ce lien présumé. Son témoignage justifiant l'attribution de nouvelles fonctions était crédible, et il était de son droit à titre de gestionnaire d'assigner des fonctions dans le lieu de travail. Le rapport d'enquête sur une plainte de harcèlement (pièce G-9) ne constitue pas, en soi, une preuve de mesure disciplinaire déguisée.

66 M. Synowski a aussi allégué que la lettre demandant l'évaluation de son aptitude à retourner au travail (pièce G-4) a causé un préjudice à sa réputation. Dans son grief, il qualifie la lettre de la manière suivante : [traduction] « [...] des déclarations officielles mais non fondées ayant des conséquences négatives en me désignant à titre d'élément à problème dans le lieu de travail [...] » Les observations négatives dans cette lettre ne semblent pas avoir eu une incidence sur l'évaluation de son aptitude à retourner au travail, puisqu'il a été conclu que M. Synowski était apte à reprendre le travail. La lettre a également été distribuée à un nombre restreint de personnes. Je conclus que la lettre n'était pas de nature disciplinaire.

67 M. Synowski a fait valoir que l'attribution de fonctions spéciales constituait un congédiement déguisé et une mesure disciplinaire déguisée. L'ancienne Loi reconnaît clairement à l'article 7 l'autorité de l'employeur en matière d'attribution des fonctions. Après avoir examiné les nouvelles fonctions et la description de travail de son poste d'attache, je suis convaincu que ses nouvelles fonctions concordaient avec les fonctions énoncées dans la description de travail.

68 Les faits contenus dans les décisions invoquées par M. Synowski (Laird et Mallett) diffèrent de ceux en l'espèce et ces décisions ne s'appliquent pas au présent grief.

B. Suspension ou sanction pécuniaire

69 Comme M. Synowski n'a pas allégué qu'il avait fait l'objet d'une suspension, je n'ai pas à traiter de cette question.

70 M. Synowski n'a pas présenté d'éléments de preuve ayant démontré qu'il avait fait l'objet d'une sanction pécuniaire à la suite de l'attribution de ses nouvelles fonctions. Il a continué d'être rémunéré au groupe et niveau ES-06. En l'absence d'une sanction pécuniaire, son grief alléguant qu'il y avait eu mesure disciplinaire ne peut pas être renvoyé à l'arbitrage de grief. Si M. Synowski avait pu démontrer autrement qu'il y avait eu mesure disciplinaire, je n'aurais pas eu compétence pour instruire le grief.

71 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

72 Le grief est rejeté.

Le 11 janvier 2007.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Ian R. Mackenzie,
arbitre de grief

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