Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s'estimant lésée a présenté deux griefs - un grief alléguant une mesure disciplinaire déguisée et ayant trait à la décision de l'employeur de la placer en congé non payé jusqu'à ce qu'elle fournisse un certificat de Santé Canada indiquant qu'elle était apte à travailler - l'autre grief a été déposé à la suite de son licenciement, après qu'elle a omis de fournir le certificat exigé - l'arbitre de grief a statué que le comportement de la fonctionnaire s'estimant lésée soulevait un certain nombre de préoccupations valides concernant sa capacité de fonctionner en milieu de travail - la décision de l'employeur de placer l'employée en congé non payé n'était pas disciplinaire - l'arbitre de grief a conclu qu'il n'avait pas la compétence voulue pour statuer sur le premier grief - cependant, en ce qui concerne le deuxième grief, l'arbitre de grief a statué que l'employeur n'avait pas prévenu la fonctionnaire s'estimant lésée qu’il avait l’intention de mettre fin à la relation d'emploi si elle omettait de fournir le certificat d'aptitude au travail - l'arbitre de grief a ordonné que la relation d'emploi soit rétablie - la fonctionnaire s'estimant lésée demeurerait en congé non payé jusqu'à ce qu'elle fournisse le certificat d'aptitude au travail exigé - si la fonctionnaire s'estimant lésée omettait de fournir le certificat dans les six mois suivant la décision, l'employeur pouvait mettre fin à la relation d'emploi. Un grief rejeté. Un grief accueilli.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2007-08-07
  • Dossier:  166-02-31842, 166-02-31857
  • Référence:  2007 CRTFP 82

Devant un arbitre de grief


Entre

ESTELLE LEGAULT

fonctionnaire s'estimant lésée

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences)

employeur

Répertorié
Legault c. Conseil du Trésor
(ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences)

Affaire concernant des griefs renvoyés à l'arbitrage en vertu de l'article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Georges Nadeau, arbitre de grief

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée:
Elle-même

Pour l'employeur:
Neil McGraw, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
du 5 au 8 septembre 2006.
(Traduction de la C.R.T.F.P.)

I. Griefs renvoyés à l'arbitrage

1 Estelle Legault (la « fonctionnaire s'estimant lésée »), qui occupait un poste à Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDC ou l'« employeur »), a déposé un grief, le 27 août 1999, dans lequel elle alléguait que le congé non rémunéré que lui avait imposé l'employeur constituait une mesure disciplinaire déguisée. Le grief a été renvoyé à l'arbitrage de grief le 16 janvier 2003. Le 18 mai 2001, Mme Legault a déposé un second grief dans le but de contester son licenciement, survenu le 2 avril 2001. Ce grief a été renvoyé à l'arbitrage de grief le 4 décembre 2002.

2 L'employeur défend la thèse selon laquelle les mesures ayant donné lieu aux griefs n'étaient clairement pas d'ordre disciplinaire, car il s'agissait dans les deux cas de mesures administratives qui avaient été imposées pour un motif valable.

3 Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l'article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l'article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ces renvois à l'arbitrage de grief doivent être décidés conformément à l'ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P­35 (« l'ancienne Loi »).

II. Résumé de la preuve

4 Le premier témoin de l'employeur a été Chantal Daigle, qui cumule 18 années de service dans l'administration fédérale, dont 11 aux Opérations internationales de la Direction générale des programmes de la sécurité du revenu (DGPSR). Elle occupe actuellement le poste de gestionnaire de projet par intérim, qui est classifié au niveau PM­5. La DGPSR traite diverses demandes ayant trait aux programmes de la sécurité du revenu et au Régime de pensions du Canada qui proviennent de personnes travaillant ou vivant dans des pays avec lesquels le Canada a conclu des accords internationaux.

5 À l'époque où Mme Daigle travaillait à la DGPSR, la direction comptait environ 80 employés et quatre gestionnaires. Chaque groupe de 12 à 20 employés était dirigé par un gestionnaire. Le rôle de Mme Daigle, à ce titre, consistait à gérer le travail et le personnel de l'un des groupes.

6 Mme Legault s'est jointe au groupe que dirigeait Mme Daigle à la fin de 1999, à titre de commis préposée au traitement des demandes de prestations étrangères. À cette époque­là, la formation se faisait sur le tas, avec l'aide de formateurs et des collègues; des cas plus complexes étaient attribués aux analystes à mesure qu'ils progressaient dans leur apprentissage. Mme Legault a fait très bonne impression à Mme Daigle dès leur première rencontre. Elle semblait assimiler facilement l'information, s'acquitter de ses tâches avec efficacité et poser des questions pertinentes.

7 Au début, Mme Daigle faisait la tournée des employés de son groupe de façon régulière, deux fois par jour, s'arrêtant au bureau de chacun pour s'assurer que tout allait bien. Au fil du temps et à mesure que les employés prenaient de l'assurance dans leur travail, elle réduisait le nombre de ses visites. Elle pratiquait aussi la politique dite de la « porte ouverte » et encourageait les employés à venir la voir chaque fois qu'ils avaient un problème qu'elle pouvait les aider à résoudre.

8 Les problèmes avec Mme Legault ont commencé au printemps de 1999. Mme Daigle a été un jour convoquée au bureau de Sharon Mahdi, directrice, Opérations internationales, qui l'informait que Mme Legault expédiait depuis un certain temps des notes et des courriels déplacés à André Thivierge, directeur, Affaires étrangères. Mme Mahdi lui a demandé alors d'observer le comportement de Mme Legault et de vérifier son travail de manière à déterminer s'il y avait des problèmes.

9 Le groupe comptait notamment une conseillère technique, Shuley Kachra, qui avait pour tâche de vérifier le travail des analystes et de déceler les problèmes. Mme Daigle lui a demandé de vérifier le travail de Mme Legault pendant deux ou trois jours. À cette époque­là, les analystes fermaient en moyenne une dizaine de dossiers par jour. Il a ressorti de l'examen des dossiers confiés à Mme Legault qu'elle en traitait de un à six par jour et que son taux d'erreur s'établissait à 33 pour cent.

10 Mme Daigle a noté aussi que Mme Legault, qui, jusque-là, était toujours habillée convenablement au travail, arrivait maintenant au bureau vêtue de survêtements d'entraînement sous deux ou trois manteaux et les pieds chaussés d'espadrilles. Ses vêtements étaient dans un état de propreté douteux et ses ongles étaient sales. C'était tout à fait inhabituel.

11 Un jour, alors qu'elle se trouvait dans le bureau de Mme Legault, Mme Daigle a remarqué qu'elle mangeait des carottes, non lavées, à même un sac de deux livres posé sur son bureau. Elle croquait une carotte, la déposait au coin de son bureau et en prenait une autre. Elle a continué ce manège jusqu'à ce qu'il se fut accumulé un assez grand nombre de carottes sur le coin de son bureau. Une autre fois, Mme Legault mangeait du chou-fleur qui n'était manifestement plus de première fraîcheur. Mme Daigle l'a vu aussi manger directement à même une boîte de fèves.

12 Sur une période de 154 jours, Mme Legault a travaillé 105 jours et s'est absentée à diverses reprises pour des visites chez le médecin. Sa journée de travail commençait à 7 h et se terminait à 15 h, mais elle a commencé à arriver au travail entre 7 h 30 et 7 h 40.

13 Mme Daigle a témoigné que le bureau de Mme Legault était en désordre. Des dossiers ouverts étaient éparpillés sur son bureau et il y en avait même qui s'empilaient sur sa corbeille à papier. Mme Daigle craignait qu'elle égare des documents originaux, dont certains provenaient de l'étranger et pouvaient être très difficiles, voire quasiment impossibles à remplacer. Elle a demandé à Mme Legault de déplacer les dossiers qui se trouvaient sur sa corbeille à papier.

14 Il y a également eu un changement dans l'attitude de Mme Legault à l'égard de ses collègues durant les réunions. Elle est devenue plus opiniâtre et il lui arrivait parfois de se mettre en retrait en tournant le dos à ses collègues pour regarder par la fenêtre. Son comportement était différent d'une réunion à l'autre.

15 Mme Daigle a admis qu'elle était présente lors d'une réunion entre Mme Mahdi et un représentant des Relations du travail, mais qu'elle y avait principalement joué le rôle d'observatrice. Elle était également présente quand on avait demandé à Mme Legault de se soumettre à une évaluation à Santé Canada pour déterminer si elle était apte à exercer ses fonctions. Elle a également participé à la rédaction des documents qui ont été transmis à Santé Canada (pièces 3.4 à 3.9 et 3.11).

16 Elle a indiqué qu'un policier les avait rencontrés, elle et d'autres employés qui étaient nommés dans une lettre que Mme Legault avait distribuée dans une centaine de boîtes aux lettres dans un quartier d'Ottawa (pièce E­4). La lettre, qui prétendait prévenir les citoyens, alléguait, entre autres choses, que Mme Daigle et trois autres personnes, Mme Mahdi, Christine Albert et Kim Ladouceur, lui avaient fait des menaces, avaient endommagé sa propriété et l'avaient battue. Mme Daigle a nié s'être livrée à de telles activités. Elle a ajouté qu'elle avait été appelée à témoigner à un procès pénal mettant en cause Mme Legault relativement à cette lettre.

17 On a demandé à Mme Daigle si elle portait ou avait déjà porté une arme à feu chargée au travail. Elle a répondu qu'elle n'avait jamais possédé ni porté d'arme à feu, ni participé à une introduction par effraction à la résidence de Mme Legault.

18 En contre-interrogatoire, Mme Daigle a dit ne pas se rappeler quand la norme quotidienne des 10 dossiers avait été établie, ni quand la section 4 avait été créée. Elle a indiqué que de 10 à 12 employés de niveau CR­4 y travaillaient et que la section était aux prises avec un arriéré de 4 000 dossiers. Elle a ajouté qu'on avait toujours tenu un compte des dossiers et que la norme de traitement était de 10 dossiers par jour.

19 On a montré à Mme Daigle les données relatives à la section, ainsi que les fiches de production individuelle de Mme Legault (pièce G-1). Elle a admis que ces documents étaient utilisés pour colliger des données sur le rendement individuel. Les moyennes suivantes sont celles de Mme Legault :

Semaine du :  
8 février 199913 dossiers par jour
15 février 199914,5 dossiers par jour
22 février 199911,5 dossiers par jour
22 mars 19998,2 dossiers par jour
3 mai 19998,8 dossiers par jour
10 mai 199915 dossiers par jour
17 mai 1999 7 dossiers par jour
24 mai 199912 dossiers par jour
22 juin 19998 dossiers par jour
28 juin 19997,2 dossiers par jour
5 juillet 199910,5 dossiers par jour
12 juillet 199910 dossiers par jour

20 Mme Daigle a également admis que l'arriéré avait pratiquement doublé durant cette période et que les employés de la section avaient trouvé la situation éprouvante.

21 On a également montré à Mme Daigle des demandes de congé de Mme Legault qu'elle avait approuvées (pièce G-2). Elle a admis que Mme Legault avait suivi les règles pour obtenir des congés et qu'elle appelait le matin pour prévenir qu'elle ne serait pas au travail ce jour-là.

22 On a demandé à Mme Daigle dans quelles circonstances avait été rédigée une note de service (pièce G-14), en date du 15 juillet 1999, attestant que Mme Legault avait obtenu trois jours de congé pour raisons familiales, en juin 1999, sans que ces congés soient défalqués de ses crédits de congé. Elle a répondu qu'elle se rappelait juste que Mme Legault avait dit qu'il y avait une querelle familiale au sujet d'une maison dont elle était propriétaire avec son défunt fiancé. Mme Daigle a indiqué qu'aucun membre de la famille n'avait communiqué avec elle et qu'elle ignorait si d'autres membres du Ministère avaient reçu des appels.

23 Elle a indiqué que c'est Mme Mahdi qui l'avait mise au courant de la situation concernant M. Thivierge et que c'est à la demande de Mme Mahdi qu'elle avait préparé un rapport d'absentéisme (pièce E-3.4). Elle a confirmé que les observations contenues dans le rapport étaient les siennes. Les circonstances qui sont à l'origine des lettres que Mme Legault a distribuées en juin (pièces G-3 et G-4) sont exposées dans la section du rapport réservée aux observations qui se rapportent à l'absence du 1er au 15 mars 1999.

24 Interrogée sur le calcul du nombre de jours où Mme Legault avait été présente au travail, à la dernière page du rapport d'absentéisme (pièce E-3.4), Mme Daigle a répondu qu'elle pouvait certes avoir commis une erreur. Concernant les observations contenues dans le document intitulé [traduction] « Rendement et comportement général (pièce E-3.5), Mme Daigle a expliqué que, en ce qui concerne les 26 dossiers mentionnés au troisième paragraphe, il y avait eu un surplus de travail et des étudiants avaient été embauchés pour venir à bout de l'arriéré. On leur avait toutefois confié les dossiers les plus faciles.

25 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Daigle a déclaré qu'elle s'était rendue au bureau de Mme Legault, le 20 mai 1999, pour lui rappeler les procédures de traitement des dossiers et qu'elle avait soulevé la question des dossiers qui s'empilaient sur sa corbeille à papier. Elle a admis qu'elle n'avait pas consigné les réponses de Mme Legault dans son rapport.

26 Concernant ses observations sur le comportement général de Mme Legault (pièce E-3.5), Mme Daigle a admis qu'il n'existait pas de code vestimentaire, mais elle a ajouté que c'était le changement dans l'habillement de Mme Legault qui l'avait alarmée. Elle a poursuivi en disant qu'elle avait observé que les survêtements d'entraînement que portait Mme Legault étaient tachés, comme si elle s'assoyait dans la saleté, et qu'elle portait aussi parfois plusieurs chandails sous son manteau au travail.

27 Mme Daigle a dit ne pas avoir discuté de la question avec Mme Legault, puisqu'on lui avait seulement demandé d'observer son comportement et de faire rapport à ce sujet. Concernant l'incident des carottes, Mme Daigle a admis qu'elle­même et d'autres employés avaient aussi mangé des carottes. N'empêche que les carottes de Mme Legault n'étaient pas pelées. Mme Daigle a aussi vu Mme Legault pleurer à deux occasions, et d'autres employés lui ont également signalé que Mme Legault pleurait au travail. Elle a admis que c'était probablement arrivé après le 9 juin 1999. Elle a aussi confirmé qu'elle avait demandé à Mme Legault comment elle se sentait, comme en témoignent ses notes des réunions et des discussions qu'elle a eues avec elle (pièce E-3.8).

28 Au sujet des notes concernant le rendement de la fonctionnaire s'estimant lésée (pièce E-3.6), Mme Daigle a déclaré qu'elle ne se rappelait pas si Mme Legault avait été avisée que son rendement faisait l'objet d'un suivi. Elle a précisé que le document en question avait été préparé à l'intention de Mme Kachra.

29 Elle a confirmé que Mme Legault était arrivée en retard à trois reprises en juin et au début de juillet 1999, comme en font foi les notes consignées dans le document sur le comportement général (pièce E-3.7), mais elle ne pouvait pas dire si cela s'était produit à d'autres moments, ni n'avait consigné d'autres retards. Elle a corroboré le fait que Mme Legault regardait par la fenêtre durant une réunion, mais elle ne se rappelait si on lui avait adressé des questions. À une question de Mme Legault, Mme Daigle a répondu qu'elle ne pouvait pas dire si un employé avait empoigné Mme Legault par le col de sa blouse juste avant le début de la réunion. Elle a ajouté que Mme Legault argumentait avec ses collègues, tout en admettant qu'elle n'avait pas consigné ce fait dans ses observations (pièce E-3.7).

30 Mme Daigle a été interrogée au sujet des observations consignées dans le document intitulé [traduction] « Rendement et comportement général » (pièce E-3.11). Au sujet des fréquentes absences de Mme Legault, elle a indiqué que cette dernière ne lui disait pas où elle allait, mais elle ne se rappelait pas si elle s'était enquise de la raison de ces absences et de leur durée. Priée d'expliquer l'observation consignée dans le document au sujet des changements perceptibles d'humeur, Mme Daigle a déclaré qu'on retrouvait parfois Mme Legault en pleurs dans les toilettes alors qu'un peu plus tôt, elle affichait une bonne humeur apparente à son bureau. Elle pouvait aussi se montrer impolie, comme en témoignent les notes du 29 juin 1999 (pièce E-3.8).

31 Au sujet de la réunion du 14 juin 1999 dont il est question dans les notes (pièce E-3.11), Mme Daigle pouvait seulement dire que Calvell Townley, conseillère en relations du travail, avait un jour demandé que Mme Legault subisse une évaluation médicale, mais elle ne souvenait pas si c'était le 15 juin 1999.

32 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Daigle a confirmé que Mme Legault avait continué de pleurer, d'utiliser son téléphone portable, de porter les mêmes vêtements, etc. après le 16 juin 1999, tel qu'il est indiqué dans ses notes (pièce E-3.11). L'information contenue dans les derniers paragraphes de ses notes, et qui se rapporte à M. Thivierge, lui a été fournie par Mme Mahdi.

33 Toujours en réponse aux questions de Mme Legault, Mme Daigle a dit qu'elle avait été interrogée par des enquêteurs du ministère relativement à une allégation selon laquelle elle portait une arme à feu. Le rapport d'enquête a été produit en preuve (pièce G-5). Mme Daigle a également corroboré la déclaration qu'elle a signée le 10 décembre 2001 (pièce G-6). Elle a aussi confirmé que la lettre à laquelle elle fait référence dans sa déclaration, et qui a été distribuée en octobre 2001, est bien le document qui a été produit en tant que pièce E-4. Elle a ajouté que les accusations contenues dans cette lettre étaient fausses. Quand Mme Legault lui a demandé pourquoi elle considérait comme bizarre le fait que Mme Legault avait envoyé des lettres au sous-ministre, au sous-ministre adjoint, au commissaire à la protection de la vie privée, à la Gendarmerie royale du Canada (GRC), au bureau de la sécurité de RHDC, à la Commission des droits de la personne et au Service de la police d'Ottawa, Mme Daigle a répondu qu'elle n'était pas capable de l'expliquer. Elle a ajouté qu'elle craignait pour sa sécurité personnelle.

34 En réinterrogatoire, Mme Daigle a précisé que Mme Legault n'avait pas un comportement normal à ses yeux. Elle a poursuivi en disant qu'elle n'avait pas toujours pris des notes, mais qu'elle se rappelait distinctement avoir vu Mme Legault vêtue d'une multitude de manteaux qu'elle avait enfilés les uns par-dessus les autres. Elle ne pouvait toutefois pas dire combien de fois c'était arrivé.

35 Le témoin suivant a été Scott Fitzgerald, détective au Service de police d'Ottawa, où il travaille depuis 18 ans. Il est actuellement affecté à la section des incendies criminels. À l'époque où il était en charge du dossier de Mme Legault, il travaillait à la section des enquêtes générales.

36 Le détective Fitzgerald résidait sur Grenadier Way à Barrhaven quand il a reçu une lettre signée de la main de Mme Legault (pièce E-5), en octobre 2001, puis une seconde, en novembre 2001 (pièce E-6). Le contenu de la lettre le troubla. Il y était question de sécurité publique et d'un prédateur sexuel qui rôdait dans Barrhaven. Ayant aperçu la personne qui distribuait la lettre sur Grenadier Way, il a téléphoné au poste de police et a prévenu l'agent Frank Nadaynay qu'il s'apprêtait à intercepter quelqu'un. L'agent Nadaynay lui a dit qu'il se mettait immédiatement en route.

37 Le détective Fitzgerald est allé à la rencontre de la personne (Mme Legault). Après s'être identifié, il lui a dit qu'il voulait s'entretenir avec elle au sujet du contenu de la lettre. Mme Legault transportait un sac rempli de lettres pliées. Il a engagé la conversation avec elle pour connaître ses motifs et en apprendre davantage sur ses préoccupations au sujet du prédateur sexuel. Il cherchait à déterminer si Mme Legault était en possession d'information légitime sur de possibles actes criminels qui seraient perpétrés dans la communauté, ainsi qu'à évaluer son état mental. À l'arrivée de l'agent Nadaynay, les deux policiers se sont dirigés vers la voiture de Mme Legault, qu'ils trouvèrent jonchée de papiers et de vêtements. Il en a déduit qu'elle vivait dans sa voiture. Ils ont ensuite procédé à une vérification au cas où Mme Legault serait sous le coup d'un mandat d'arrestation et ils ont décidé que, en dépit du caractère troublant de la lettre, il n'y avait pas de raison légale de la mettre en état d'arrestation. Ils l'ont prévenu de ne plus distribuer la lettre car la distribution d'un tel document pouvait constituer un acte criminel. Le détective Fitzgerald est rentré ensuite chez lui et l'agent Nadaynay a poursuivi son enquête.

38 Le détective Fitzgerald a déclaré que l'impression qu'il avait gardée de cet incident est que Mme Legault souffrait soit d'une déficience mentale, soit d'un trouble mental et qu'elle avait besoin d'aide. Il a appris par la suite que les personnes mentionnées dans la lettre avaient déposé une plainte au Service de la police d'Ottawa, si bien que le dossier lui a été transmis pour qu'il en assure le suivi.

39 Le détective Fitzgerald s'est rendu au lieu de travail de Mme Legault afin de recueillir les déclarations des personnes mentionnées dans les deux lettres (pièce E-7). Elles lui dirent qu'elles vivaient dans la peur car les incidents allaient en s'intensifiant. Il en a conclu qu'il existait des motifs raisonnables de croire à du harcèlement criminel. Or, avant même qu'on puisse procéder à l'arrestation de Mme Legault, elle a déposé une plainte auprès du Service de police d'Ottawa relativement à la conduite du détective Fitzgerald et de l'agent Nadaynay. Il s'ensuivit que le dossier a été réattribué à l'agent Leon Blais, à titre d'enquêteur principal, de manière à éviter toute apparence de conflit d'intérêts. La plainte de Mme Legault a été ultérieurement jugée sans fondement.

40 Mme Legault a été convoquée au poste de police et mise en état d'arrestation pour méfait et pour harcèlement criminel. Il a supervisé l'entrevue dirigée par l'agent Blais, au cours duquel Mme Legault a déclaré que plus d'une centaine de personnes étaient parties à un complot contre elle. Elle a prétendu qu'elle était suivie par des personnes du Moyen-Orient. Compte tenu de ces propos et du contenu de la lettre, Mme Legault a été gardée en détention en attendant la tenue d'une audience de justification et d'une évaluation de sa santé mentale. Les données sur les présumées infractions (pièces E-8 et E-9) ainsi que l'engagement de ne pas troubler l'ordre public (pièce E-10) ont été produits en preuve. Mme Legault a été remise en liberté à la condition expresse de ne pas communiquer avec les présumées victimes.

41 En contre-interrogatoire, on a montré au détective Fitzgerald le document de la cour attestant que les accusations étaient retirées vu que Mme Legault avait signé un engagement de ne pas troubler l'ordre public (pièce G-8). Il a dit se rappeler qu'au moment du procès, les victimes avaient déclaré qu'elles ne voulaient pas que Mme Legault soit jugée coupable d'un acte criminel, qu'elles voulaient seulement que cesse le harcèlement.

42 Le troisième témoin a été Sharon Mahdi, qui occupe actuellement le poste de directrice de la Mise en ouvre fonctionnelle, Traitement et Opérations, à Service Canada. Elle fait carrière dans la fonction publique depuis mars 1966. Elle occupait le poste de directrice des Affaires internationales, Prestations internationales et Affaires étrangères (PIAE), à RHDC, qu'elle a quitté au début de l'été de 2001, quand on lui a offert son poste actuel.

43 Mme Mahdi a déclaré que le service des PIAE comportait deux volets : les Affaires étrangères, qui sont responsables de la négociation des accords en matière de sécurité sociale avec d'autres pays, et les Opérations, qui administrent ces accords. Les activités consistaient à échanger avec les pays étrangers l'information obtenue des clients qui présentaient des demandes en vue d'obtenir des prestations canadiennes ou internationales. Lorsqu'elle est devenue directrice, Mme Mahdi supervisait 130 personnes avec l'aide de cinq gestionnaires. Elle relevait de Ed Tamagno, directeur général du service des PIAE, avec un autre gestionnaire, M. Thivierge.

44 Mme Mahdi s'est rappelé que sa première rencontre avec Mme Legault a eu lieu car Mme Daigle, la gestionnaire de Mme Legault, lui avait demandé d'intervenir parce qu'elle s'inquiétait de son comportement et de l'utilisation de ses congés de maladie. Mme Mahdi a donc convoqué Mme Legault à une réunion pour discuter avec elle de l'utilisation de ses congés de maladie et lui rappeler qu'elle devait fournir un certificat médical. Elle a noté la façon dont Mme Legault était habillée; elle avait également aperçu les morceaux de carotte et de chou-fleur sur son bureau. Il y avait aussi eu la fois où Mme Kachra était venue lui dire que Mme Legault pleurait dans les toilettes. Mme Mahdi a dit qu'elle s'était rendue aux toilettes afin de convaincre Mme Legault d'en sortir et qu'elle avait réussi. Même si Mme Legault était visiblement bouleversée, elle avait refusé d'expliquer pourquoi elle pleurait et elle était retournée à son bureau.

45 Mme Mahdi a eu d'autres entretiens avec Mme Legault au fur et à mesure que son comportement empirait. Comme elle continuait de prendre des congés de maladie, Mme Mahdi lui a rappelé à diverses reprises qu'elle devait fournir un certificat médical. Mme Legault avait aussi commencé à envoyer des notes à M. Thivierge, dont une carte de Saint-Valentin, en février 1999, ce qui amena M. Tamagno à convoquer une réunion avec Mme Mahdi, M. Thivierge et un représentant des Relations du travail pour discuter du cas de Mme Legault. La décision a été prise de rencontrer Mme Legault pour lui dire de mettre un terme à ses communications avec M. Thivierge et pour déterminer les moyens à prendre pour l'aider à modifier son comportement et à régler son problème d'absentéisme.

46 Mme Mahdi a précisé que c'est M. Tamagno qui avait surtout parlé durant la réunion. M. Thivierge avait dit clairement à Mme Legault qu'il ne s'intéressait pas à elle personnellement et Mme Mahdi lui avait expliqué les règles à suivre concernant les congés. La réunion a été de courte durée car Mme Legault gardait le silence le plus total. On a décidé également de l'envoyer consulter la conseillère du Programme d'aide aux employés (PAE), Évelyne Girard.

47 Les problèmes de comportement, d'absentéisme et de productivité ont persisté après la réunion. D'autres membres du personnel ont commencé à exprimer leurs inquiétudes soit directement à Mme Mahdi, soit à Mme Daigle. On a décidé de tenir une autre réunion avec Mme Legault et de lui demander de se soumettre à une évaluation à Santé Canada. L'employeur souhaitait seulement que Mme Legault revienne au travail et se comporte convenablement; c'est pourquoi l'évaluation à Santé Canada semblait la solution appropriée.

48 Mme Mahdi a déclaré qu'elle et Mme Daigle ont préparé la demande d'évaluation à Santé Canada, qui a été remise ensuite à M. Tamagno (pièces E-1 à E-3). Mme Mahdi a participé aussi aux discussions sur le contenu de la correspondance qui a été adressée à Mme Legault (pièces E-14 et E-16). L'employeur a attendu longtemps que Mme Legault fournisse la preuve qu'elle était apte à travailler, mais en vain.

49 Mme Mahdi a déclaré que M. Tamagno et elle-même avaient participé à la rédaction de la recommandation qui avait été transmise au sous-ministre adjoint, Paul Migus, en vue du licenciement de Mme Legault (pièce E-17) et dont copie a été envoyée à Barry Auger, représentant de l'agent négociateur de Mme Legault.

50 Par la suite, Mme Mahdi a reçu un appel d'une personne de Barrhaven qui avait reconnu son nom dans la lettre et qui voulait savoir si elle en connaissait l'existence (pièce E-5). Tout ce qui était écrit dans la lettre était faux. La police a été prévenue. Après distribution d'une seconde lettre, la police a recueilli les déclarations des quatre personnes qui y étaient mentionnées (pièce E-7). Mme Mahdi était la personne-ressource désignée, mais chacun avait préparé sa déclaration, qu'elle avait remis ensuite à la police. Mme Legault a été ultérieurement inculpée. Mme Mahdi a assisté à la comparution de Mme Legault. Les accusations ont été suspendues après que la fonctionnaire s'estimant lésée eut accepté de signer un engagement de ne pas troubler l'ordre public.

51 Quand on lui a demandé si on l'avait mise au courant des plaintes déposées par Mme Legault, Mme Mahdi a déclaré qu'il y avait effectivement eu des plaintes et que M. Tamagno lui en avait communiqué certains détails. La situation semblait empirer car Mme Legault formulait des plaintes de plus en plus bizarres et totalement invraisemblables. Mme Mahdi a été accusée de s'être introduite par effraction dans le domicile de Mme Legault à Hawkesbury et d'avoir installé un dispositif d'écoute dans son poste de travail. Onze personnes ont aussi fait l'objet d'une enquête de harcèlement après que Mme Legault eut déposé des plaintes contre elles. Un cabinet externe a été embauché pour faire enquête et a conclu que les plaintes étaient sans fondement.

52 En contre-interrogatoire, Mme Mahdi a déclaré qu'elle n'avait jamais vu le document produit sous la cote G-31 et qu'elle n'était pas la source des renseignements qu'il contenait. Elle a précisé que l'adresse de Mme Legault, consignée dans une note manuscrite datée du 11 juin 1999 (pièce G-9), lui avait été fournie par Mme Legault elle-même. Concernant la mention « Stocker » qui se trouve dans la note, Mme Mahdi a dit qu'il s'agissait du nom de famille d'un autre employé, mais elle ne se rappelait pas pourquoi ce nom se trouvait dans la note.

53 Mme Mahdi a confirmé qu'elle avait rédigé les pages 3.2 et 3.3 de la pièce E-3 et qu'elle avait révisé celles rédigées par Mme Daigle. Quand on lui a demandé s'il s'agissait (pièces E-3.1 à E-3.11) d'une évaluation de rendement officielle, elle a répondu que ce n'en était pas une et que le document avait été préparé en vue de l'évaluation à Santé Canada. Elle ne savait toutefois pas si Mme Legault en avait reçu une copie car c'était Mme Townley qui aurait dû se charger de lui en envoyer une.

54 Mme Mahdi ne se rappelait pas à quelle date exactement avait eu lieu la réunion avec Mme Legault. Elle se souvenait qu'on y avait discuté des communications avec M. Thivierge, de l'utilisation des congés de maladie et du comportement de Mme Legault. Elle n'avait pas tenté de joindre Mme Legault à son domicile. Elle savait qu'une lettre recommandée avait été expédiée à l'adresse domiciliaire de Mme Legault car Mme Daigle n'arrivait pas à la joindre par téléphone.

55 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Mahdi a dit que c'est probablement Mme Ladouceur qui était venue lui dire que Mme Legault pleurait dans les toilettes. Elle a réitéré qu'elle avait demandé à Mme Legault de lui dire ce qui la perturbait, mais qu'elle n'avait pas obtenu de réponse. Elle avait aussi demandé à Mme Kachra de raccompagner Mme Legault à son bureau.

56 Interrogée au sujet de la désactivation du laissez-passer de Mme Legault, qui lui permettait d'avoir accès aux locaux, Mme Mahdi a déclaré qu'elle savait que la carte avait été désactivée en août 1999 parce que le personnel s'était plaint que Mme Legault continuait de venir au bureau, mais elle ignorait que la même chose s'était produite en mars 1999.

57 Concernant la réunion avec Mme Legault et M. Tamagno pour discuter des communications avec M. Thivierge, Mme Mahdi croyait se rappeler que la réunion avait été convoquée peu de temps après la Saint-Valentin, mais elle ne se rappelait pas à quelle date exactement.

58 Mme Legault a demandé à Mme Mahdi si elle savait qu'à la suite de l'incident de la carte de Saint-Valentin, ses collègues avaient commencé à dire qu'elle avait menacé M. Thivierge et ses enfants avec une arme à feu. Mme Mahdi a répondu qu'elle n'avait jamais rien entendu de tel et que c'est à la lecture du rapport préparé par le cabinet Quintet Consulting (pièce G-50) relativement à la plainte de harcèlement qu'elle avait appris l'existence de cette rumeur.

59 Mme Legault a ensuite demandé à Mme Mahdi si elle était au courant des conseils que M. Donnelly, conseiller en relations du travail, avait donnés à M. Thivierge afin de mettre un terme aux marques d'affection indésirables de Mme Legault. Mme Mahdi a répondu qu'elle en avait entendu parler à la réunion. En réponse à d'autres questions de Mme Legault, Mme Mahdi a nié qu'elle avait dit aux employés, après le 17 février 1999, que Mme Legault était hystérique. Elle a aussi nié qu'elle avait installé une caméra dans le bureau de Mme Legault ou ailleurs, ou caché un microphone dans le bureau de Mme Legault, ou discuté du comportement de cette dernière avec des collègues, ou encore, qu'elle l'avait vue hyperventiler. Elle a déclaré que Mme Daigle ne lui avait jamais rapporté que Mme Legault l'avait agressée physiquement. Elle a nié qu'on avait filmé Mme Legault, en compagnie d'un ami non identifié et de M. Thivierge, sur bande vidéo.

60 Quand Mme Legault lui a demandé pourquoi elle avait dit au policier que Mme Legault se montrait agressive à l'endroit de son gestionnaire (pièce E-7), Mme Mahdi a répondu que Mme Legault demeurait sourde aux directives de Mme Daigle et lui avait dit [traduction] « Je n'ai pas d'ordres à recevoir de toi! ».

61 Mme Mahdi a déclaré que cela constituait à ses yeux un comportement agressif.

62 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Mahdi a déclaré qu'il se pouvait qu'elle eût demandé à Mme Daigle d'observer le comportement de Mme Legault et de suivre son rendement de près.

63 Mme Mahdi a aussi confirmé qu'il y avait un arriéré de travail au service des PIAE et que les employés étaient impatients d'en venir à bout. Elle ne pouvait toutefois pas dire si des employés avaient pris des congés de maladie en raison du surcroît de travail.

64 Mme Legault a demandé à Mme Mahdi si elle était allée chez elle à Hawkesbury, mais Mme Mahdi a nié être allée à Hawkesbury. Mme Legault a alors affirmé que plusieurs personnes lui avaient dit que Mme Mahdi était allée chez elle. Mme Mahdi a rétorqué que si on lui avait dit ça, c'est qu'on lui avait raconté des histoires.

65 Mme Legault a montré à Mme Mahdi un courriel de Mme Townley à M. Tamagno en date du 2 juin 1999 (pièce G-11) et lui a demandé s'il l'aidait à situer la date de la réunion à la fin de mai 1999. Mme Mahdi a répondu qu'elle se souvenait que la réunion s'était tenue plus près de la Saint-Valentin. Elle a ajouté qu'il s'agissait en quelque sorte d'une réunion de counselling qui avait pour but de conseiller Mme Legault et de l'amener à abandonner son comportement déplacé à l'endroit de M. Thivierge. Priée de dire si Mme Legault était accusée de harceler sexuellement M. Thivierge, Mme Mahdi a déclaré que c'était en partie le message qu'on voulait lui transmettre en plus de lui faire comprendre qu'elle devait mettre un terme à ce comportement. Elle a admis qu'il n'y avait pas eu d'enquête et qu'elle ne connaissait pas la teneur des courriels que Mme Legault avait envoyés à M. Thivierge. Elle a aussi indiqué qu'on avait préféré régler le dossier dans le cadre d'une réunion et que M. Thivierge n'avait pas déposé de plainte officielle.

66 Mme Legault a demandé à Mme Mahdi pourquoi on avait jugé bon de mettre Santé Canada (pièce E-3.11) au courant des incidents mettant en cause M. Thivierge. Mme Mahdi a répondu qu'il fallait préciser les raisons de la demande d'évaluation et que ces incidents en faisaient partie. Elle a aussi admis qu'elle avait communiqué avec la conseillère du PAE, Mme Girard, pour dresser la liste des heures où Mme Legault avait été absente du travail en précisant qu'elles n'avaient pas discuté de son cas. Elle a également déclaré qu'elle n'avait jamais parlé aux beaux-parents de Mme Legault.

67 Mme Mahdi a confirmé que Mme Legault avait avisé l'employeur que son fiancé était malade et mourant et qu'elle avait besoin d'un congé. Elle ne pouvait toutefois pas dire si on lui avait accordé un congé pour raisons familiales. Elle n'avait aucunement demandé à Ron Houlahan ou à Mme Albert de vérifier l'état de santé de Mme Legault. Elle a admis qu'elle avait dit à Quintet Consulting que la raison pour laquelle Mme Legault pleurait était que son fiancé était malade et qu'on l'avait dirigée vers un conseiller du PAE car son comportement au travail était devenu intolérable.

68 Mme Mahdi a admis qu'elle avait demandé à Mme Daigle de préparer un rapport d'absentéisme et de lui fournir un rapport de productivité. Elle a aussi indiqué qu'elle avait demandé à Mme Townley de lui expliquer la procédure à suivre pour présenter une demande d'évaluation à Santé Canada.

69 En réponse à des questions au sujet d'une avance de crédits de congé de maladie, Mme Mahdi a confirmé qu'elle avait expédié un courriel, le 14 juillet 1999, pour autoriser cette avance, mais elle ne pouvait pas dire si c'était à la suite d'une demande de Mme Legault.

70 Au sujet de l'échange qu'il y a eu entre Mme Legault, Mme Townley, M. Auger, Mme Girard et Mme Mahdi lors de la réunion où Mme Legault s'est fait remettre la lettre (pièce G-16) qui la mettait en congé, Mme Mahdi a dit que Mme Townley lui avait expliqué la teneur de la lettre et les raisons de la décision. Le message qui lui était communiqué était qu'elle ne pouvait pas revenir au travail tant qu'elle n'était pas déclarée apte à travailler. En réponse à une question au sujet de la présence de M. Auger à la réunion, Mme Mahdi a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'une réunion d'ordre disciplinaire et que la réunion avait uniquement pour but de s'assurer que Mme Legault recevait les soins nécessaires pour revenir au travail.

71 Mme Mahdi a aussi mentionné qu'à la fin de la réunion, Mme Legault avait déclaré qu'elle n'avait rien à dire, après quoi elle avait quitté la pièce en compagnie de M. Auger.

72 En réponse à des questions, Mme Mahdi a déclaré qu'elle n'avait pas tenté personnellement de joindre Mme Legault, que c'était la tâche des Relations du travail et de Mme Daigle. Elle a dit être au courant des lettres qui avaient été envoyées à Mme Legault relativement aux rendez-vous médicaux (pièces E-13 et E-14). Quand Mme Legault lui a demandé si elle savait que son dossier médical avait été subtilisé dans le cabinet de son médecin personnel, la Dre Susan Adamowski, Mme Mahdi a répondu qu'elle n'était pas au courant de cet incident.

73 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Mahdi a nié avoir fait appel aux services d'un détective privé pour recueillir de l'information et faire prendre Mme Legault en filature. Elle a aussi indiqué que la plainte que Mme Legault avait adressée à la GRC (pièce G-20) et dont le cabinet du sous-ministre avait reçu copie était sans fondement. Mme Mahdi a déclaré qu'elle avait trouvé le document injurieux et que la façon dont Mme Legault percevait les événements lui avait fait craindre pour sa sécurité.

74 Mme Mahdi a nié s'être rendue au River Park Retirement Home, où Mme Legault travaillait. Mme Legault a alors fait la lecture d'une plainte adressée à Jane Stewart, ministre de RHDC (pièce G-21), dans laquelle elle alléguait que Mme Mahdi et Mme Albert avaient rendu visite au directeur de la maison de retraite pour le prévenir que Mme Legault n'avait pas le droit de travailler et d'habiter à Ottawa. Mme Mahdi a déclaré n'avoir jamais tenu les propos que lui prêtait Mme Legault.

75 Mme Legault a poursuivi son contre-interrogatoire en demandant à Mme Mahdi si elle connaissait Jimmy Lafleur, Claire Poulin, Frank Roger, Tracy Ryan Silverman, Michele Leblanc, Vicky Apperly et Julie Rollwagen. Mme Legault a déclaré que certaines de ces personnes avaient été payées pour voler une disquette ou pour la suivre partout. Mme Mahdi a affirmé qu'elle ne connaissait pas ces personnes et qu'elle n'était pas au courant des incidents dont lui parlait Mme Legault.

76 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Mahdi a admis qu'elle connaissait Sarah Parson, mais elle doutait fortement que celle-ci eût appelé dans une auberge de jeunesse pour savoir si Mme Legault y résidait; elle n'avait pas non plus demandé à Mme Parson de faire un appel de ce genre. Elle a confirmé qu'elle connaissait Steven Mahdi, qui est le fils de sa belle-sour. Elle ignorait toutefois qu'il aurait suivi Mme Legault jusqu'à une auberge de jeunesse, une éventualité qui lui apparaissait totalement improbable. Elle a aussi nié avoir demandé à une entreprise du nom de Ensign Securities ou Securitas de prendre Mme Legault en filature. Elle ignorait que quelqu'un avait lancé une brique en direction de la voiture de Mme Legault en janvier 2002. Mme Mahdi a également affirmé qu'elle ne connaissait pas Dan Fisher, Mark Lazarobitz, le Dr John Fedoroff, Bruce Hagel, Barbara Campagno, Tamara Bloom et Joe Burke.

77 Mme Mahdi a déclaré ne pas connaître une personne du nom de « Mahdi » qui aurait subtilisé une enveloppe au Centre d'emploi situé au Centre commercial Lincoln Fields, dans laquelle se trouvait une lettre de Mme Legault à la ministre Stewart. Elle a également indiqué qu'elle ne croyait pas que quelqu'un avait fait une telle chose.

78 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Mahdi a indiqué qu'elle s'était sentie menacée par le contenu des lettres que Mme Legault avait envoyées à la ministre, à la police et aux autres. Elle a soutenu que la vie de Mme Legault n'était pas menacée au travail et qu'elle ignorait que sa vie avait été menacée en dehors du travail. Elle a nié avoir communiqué avec le médecin personnel de Mme Legault, la Dre Adamowski, et connaître une personne du nom de « Jaffa ». Elle a aussi affirmé qu'elle n'entretenait pas de contacts avec le Dr Fedoroff, ni avec l'infirmière Hutchison, qui travaillait prétendument dans son cabinet, ni avec Maura Amoroso, chargée par l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario de faire enquête sur les plaintes de Mme Legault contre le Dr Fedoroff. Mme Mahdi a déclaré qu'elle n'avait jamais dit à Mme Amoroso que l'employeur voulait tuer Mme Legault. Elle a nié connaître un certain Dr Paul ou lui avoir dit que Mme Legault souffrait de schizophrénie de type paranoïde, en ajoutant qu'elle n'était pas médecin et qu'elle n'était pas en mesure de diagnostiquer le trouble de la fonctionnaire s'estimant lésée.

79 Toujours en contre-interrogatoire, Mme Legault a interrogé Mme Mahdi au sujet d'allégations voulant que l'employeur ait communiqué avec plusieurs personnes pour les mettre en garde contre elle ou pour obtenir des renseignements à son sujet. Mme Mahdi a nié connaître les personnes en question ou avoir eu connaissance de quelque activité ministérielle de ce genre.

80 L'employeur a ensuite appelé André Thivierge, gestionnaire principal, Politiques et accords internationaux, à Développement social Canada, qui cumule 36 années de service dans l'administration publique. Il est rattaché, depuis 1980, à la Section internationale, qui est responsable de la négociation et de l'administration des accords en matière de sécurité sociale avec d'autres pays. Il occupe actuellement le poste de négociateur principal au sein de la division. De 1990 à 1999, il était directeur des Opérations internationales.

81 Le premier échange entre M. Thivierge et Mme Legault est survenu le 15 décembre 1998, quand M. Thivierge a reçu un courriel de Mme Legault l'invitant à faire une promenade avec elle. Croyant à prime abord qu'elle s'était trompée de destinataire, il demanda par retour de courriel si le message s'adressait bien à lui. Elle lui répondit que oui et qu'il avait le droit de refuser son invitation en ajoutant ceci : [traduction] « Tout le monde a ses convictions quant aux complexités de la vie » (pièce E-18). M. Thivierge a trouvé que c'était une réponse plutôt bizarre. Il a demandé à son adjointe, Kim Ladouceur, qui était Mme Legault et a appris qu'elle travaillait à la Division des opérations internationales. Il a laissé le courriel sans réponse et n'y a plus repensé.

82 Le deuxième échange est survenu durant la première semaine de janvier 1999. Mme Legault s'est présentée au bureau de M. Thivierge en disant qu'elle voulait lui parler dans la salle de conférence. Curieux de savoir de ce qu'elle avait à lui dire et croyant qu'elle se sentait gênée ou embarrassée de lui avoir envoyé le courriel, il l'a suivi jusque dans la salle de conférence, dont elle a refermé la porte. Elle s'est retournée ensuite vers lui et a essayé de l'embrasser sur la joue en lui disant qu'elle voulait lui offrir ses voux pour la nouvelle année. En d'autres circonstances, il ne se serait guère formalisé d'un tel geste. N'empêche que sa réaction en a été une de surprise et de confusion. En dépit de la gêne qu'il ressentait, il n'a rien dit et a quitté la pièce. De retour à son bureau, il a raconté à Mme Ladouceur ce qui était arrivé. Le lendemain, il a reçu un courriel (pièce E-19) de Mme Legault qui disait regretter de lui avoir causé des problèmes et comprendre qu'un directeur avait des responsabilités. Elle mentionnait ensuite qu'elle devait se montrer plus prudente car on la surveillait. M. Thivierge lui a répondu en lui disant que ses relations avec les employés étaient strictement d'ordre professionnel et qu'il espérait qu'elle le comprendrait.

83 Le jour de la Saint-Valentin, ou peu de temps après, M. Thivierge a trouvé sur son bureau une carte de Saint-Valentin portant la signature de Mme Legault et accompagnée d'une petite épinglette en forme de cour, qu'il a montré à Mme Ladouceur parce qu'il estimait qu'elle devait être mise au courant de la situation. Mme Legault avait ajouté un « x » et un « o » à sa signature sur la carte.

84 M. Thivierge a reçu un autre courriel de Mme Legault, le 17 février 1999, qui disait vouloir s'entretenir avec lui quelques minutes. Il lui a répondu qu'il ne voulait pas qu'elle lui envoie d'autres messages (pièce E-20).

85 Quatre à huit semaines plus tard, probablement en avril 1999, Mme Legault s'est présentée au bureau de M. Thivierge, qui s'est levé et l'a prié de partir. Mme Legault lui a dit alors qu'elle était allée à un endroit en Ontario, où elle avait rencontré quelqu'un qui le connaissait et qu'elle voulait lui en parler. M. Thivierge lui a demandé de qui il s'agissait, mais elle n'a pas répondu; elle a semblé bouche bée et figée sur place. M. Thivierge l'a prié de quitter son bureau puisqu'il n'y avait rien dont ils avaient besoin de discuter et lui a dit qu'elle n'avait aucune raison de venir à son bureau.

86 M. Thivierge est devenu très préoccupé après ces incidents. Mme Legault a poursuivi ses avances malgré les propos assez durs qu'il lui avait tenus. Il a alors décidé d'en parler à M. Tamagno et Mme Mahdi. Il commençait à se sentir harcelé et tous convinrent que le moment était venu de prendre des mesures administratives si Mme Legault persistait dans sa conduite. Mme Townley a également été mise au courant de la situation.

87 À son retour d'un voyage d'affaires en Europe, en mai ou juin 1999, M. Thivierge a trouvé à nouveau une carte de Mme Legault sur son bureau. Elle lui écrivait qu'il lui avait manqué et qu'elle lui envoyait des baisers (pièce G-29). M. Thivierge en a été très contrarié et a appelé M. Tamagno et Mme Mahdi. M. Tamagno a convoqué Mme Legault à une réunion pour lui faire savoir, en présence de Mme Mahdi et de M. Thivierge, que le ministère était très préoccupé par son comportement et qu'elle devait y mettre un terme immédiatement. Il lui a interdit aussi d'avoir quelque contact avec M. Thivierge. Il lui a demandé si elle comprenait les directives qu'il venait de lui donner et si elle était consciente de la gravité de la situation. Elle a demeuré silencieuse mais a fait un signe de la tête pour dire qu'elle avait compris. On lui a recommandé également de consulter un conseiller du PAE (pièce E-21).

88 Après la réunion du 24 août 1999, M. Thivierge a reçu un message de Mme Legault dans sa boîte vocale. Elle lui présentait ses excuses pour avoir été impolie envers lui le lundi précédent.

89 M. Thivierge a déclaré que durant les quelques mois suivants, M. Tamagno s'est absenté souvent pour affaires et c'est Mme Mahdi et M. Thivierge qui allaient le remplacer. C'est ainsi que M. Thivierge a été mis au courant des problèmes concernant Mme Legault et des allégations qu'elle formulait dans ses lettres à M. Tamagno.  Il a déclaré que les allégations étaient extrêmement choquantes. Elle y indiquait que M. Thivierge avait fait un enfant à deux employées, que Mme Ladouceur partageait un appartement avec lui et qu'il avait l'intention d'épouser Mme Legault. Elle prétendait également que Mme Albert et Mme Ladouceur avaient mis leurs menaces contre elle à exécution par pure jalousie. Copie de cette correspondance avait également été envoyée au sous-ministre. M. Thivierge a déclaré qu'il n'avait jamais eu de relation intime avec une employée, qu'il est marié depuis 29 ans et qu'il a deux enfants.

90 M. Thivierge a indiqué qu'il entretenait une relation d'amitié avec Mme Albert, qui travaille sous sa supervision depuis le milieu des années 1980, et que leurs familles socialisaient ensemble.

91 Il a ajouté que les allégations contenues dans la plainte de Mme Legault (pièce E-23, page 10) voulant qu'il lui ait rendu plusieurs fois visite à Hawkesbury à partir de juillet 1999, lui ait fixé des rendez-vous galants, lui ait acheté une bague de fiançailles et qu'il ait annoncé à d'innombrables personnes, depuis mars 1999, qu'il allait l'épouser, étaient totalement fausses et très étranges.

92 En contre-interrogatoire, M. Thivierge a dit qu'il avait remis les cartes (pièces G-27, G-28 et G-29) à un agent de sécurité. Il a nié avoir demandé à Mme Kachra de dire à Mme Legault qu'il voulait la voir et avoir eu une conversation avec Mme Albert, que Mme Legault avait surprise, durant laquelle Mme Albert lui avait demandé pourquoi il voulait épouser Mme Legault puisqu'elle était folle.

93 M. Thivierge a nié que la rumeur circulait dans le bureau qu'il avait été menacé avec une arme à feu. Il a affirmé ne pas connaître une personne du nom de Lewitski qui aurait dit à Mme Legault que M. Thivierge appréciait le cadeau (la petite épinglette) qu'elle lui avait donné. Il a nié avoir dit à un certain M. Klein qu'il voulait partir en voyage avec Mme Legault. En réponse à des questions au sujet de la présence de la fille de M. Thivierge au bureau et d'une conversation avec Mme Albert qui lui avait demandé qui allait devenir la belle-mère de sa fille, M. Thivierge a déclaré qu'il ne savait pas si sa fille était venue au bureau et qu'il trouvait ces remarques absurdes. Il a affirmé qu'il ne s'était pas entretenu avec la conseillère du PAE, Mme Girard, et qu'il ne se trouvait pas à Hawkesbury le 15 avril 2001.

94 M. Thivierge a déclaré qu'il ne croyait pas, à sa connaissance, que sa mère et son époux s'étaient rendus à Hawkesbury le 15 avril 1999 pour parler à Mme Legault. Il a affirmé qu'il ne connaissait aucun des membres de la famille de Mme Legault et qu'il n'avait aucunement tenté de leur parler. Il a déclaré qu'il ne savait pas pourquoi Mme Legault s'était fait refuser l'accès au lieu de travail en juillet 1999.

95 Ce fut ensuite au tour de Christine Albert de témoigner. Mme Albert s'est jointe à la fonction publique en 1981, au ministère de la Santé nationale et du Bien-être social. Depuis septembre 1985, elle occupe un poste aux Opérations internationales. Elle travaille avec M. Thivierge depuis 20 ans et le considère à la fois comme un collègue et comme un ami. Mme Albert a indiqué que leurs familles, enfants et époux compris, socialisaient ensemble.

96 Elle a déclaré qu'elle n'avait aucune relation professionnelle avec Mme Legault, sauf pour lui poser une question de temps à autre, à l'instar de beaucoup d'autres employés de la direction. Elle ne savait pas qui était Mme Legault ni où se trouvait son bureau avant que les problèmes surgissent.

97 Elle a déclaré que M. Thivierge lui avait confié recevoir des notes, des courriels et des cartes de Mme Legault. Elle n'a plus entendu parler de rien jusqu'en décembre 2000, quand M. Tamagno a reçu une lettre de 50 pages de Mme Legault, qui accusait 11 personnes d'avoir fait et dit toutes sortes de choses (pièce G-23). On a donné à lire à Mme Albert des passages de cette lettre, notamment ceux contenant les accusations contre elle, qui était toutes sans fondement. Peu de temps après, elle a appris que Mme Legault avait présenté des demandes d'accès à l'information. En octobre 2001, Mme Albert a pris connaissance de la lettre (pièce E-5) que Mme Legault distribuait dans les boîtes aux lettres de Barrhaven et a rencontré les policiers avec les autres collègues concernés. Vu que les accusations étaient fausses, Mme Albert s'était interrogé sur la santé mentale de Mme Legault et craignait pour sa sécurité personnelle et celle de sa famille. Elle a fait part de ses craintes à la police. Elle a fourni une description de Mme Legault à ses enfants en les prévenant de ne pas lui ouvrir la porte et d'appeler plutôt la police. Mme Legault a distribué une seconde lettre dans laquelle, en plus de réitérer ses accusations, elle déclarait qu'un prédateur sexuel, qui était vraisemblablement associé de près aux quatre personnes concernées, rôdait dans le secteur de Barrhaven (pièce E-6). Mme Albert a fait une déclaration à la police (pièces 7.5 et 7.6) et a reçu ultérieurement une assignation à comparaître dans une affaire mettant en cause Mme Legault. Elle s'est présentée à l'audience, mais n'a pas été appelée à témoigner.

98 En août 2005, Mme Albert a reçu un appel d'une représentante de l'Ordre des infirmières et infirmiers de l'Ontario qui faisait enquête sur une plainte que Mme Legault avait déposée contre une infirmière. Elle a demandé à Mme Albert si elle connaissait l'infirmière en question, ce à quoi elle a répondu que non.

99 En contre-interrogatoire, on a demandé à Mme Albert si elle avait discuté de son témoignage actuel avec Mme Daigle ou Mme Mahdi. Mme Albert a répondu que non. Elle a ajouté qu'elle entretenait seulement une relation occasionnelle avec Mme Mahdi. À la question de savoir si elle s'était plainte de Mme Legault à Mme Mahdi, elle a répondu qu'après avoir été mise au courant de l'existence des lettres (pièces E-5 et E-6), elle avait effectivement discuté des idées délirantes de Mme Legault et exprimé des doutes sur sa santé mentale au vu des accusations contenues dans les lettres.

100 En réponse aux questions, Mme Albert a nié avoir fourni à Mme Townley de l'information qui avait été subtilisée ou qui faisait référence au domicile de Mme Legault à Hawkesbury.

101 Mme Albert a confirmé qu'elle s'était plainte de Mme Legault à Mme Daigle après avoir été mise au courant des lettres qui avaient été distribuées à Barrhaven. Elle a déclaré qu'elle entretenait une relation professionnelle avec Mme Daigle.

102 Mme Albert a confirmé qu'elle était amie avec Mme Ladouceur et qu'elles travaillaient ensemble depuis 10 ans.

103 Mme Albert a été priée de dire ce que M. Thivierge lui avait dit au sujet des courriels de Mme Legault. Elle a répondu qu'il lui avait fait part de ses inquiétudes car les courriels étaient déplacés et qu'il avait demandé à Mme Legault de cesser de lui écrire. Elle ne l'intéressait pas et cette situation le mettait mal à l'aise. Mme Albert a déclaré que M. Thivierge en avait parlé à ses subalternes et qu'ils avaient discuté de la situation. Mme Albert a nié avoir fait circuler la rumeur, vers le mois de décembre 1998, que Mme Legault avait harcelé M. Thivierge.

104 Mme Albert a nié avoir dit à des collègues, en décembre 1998, que Mme Legault était folle. La question de sa santé mentale s'est posée seulement après que Mme Albert eut été mise au courant des accusations formulées par Mme Legault.

105 Mme Albert a nié être en colère contre Mme Legault parce qu'elle avait invité M. Thivierge à faire une promenade avec elle et a nié que M. Thivierge lui avait confié, le 24 décembre 1998, qu'il avait l'intention de quitter sa femme et d'épouser Mme Legault. Elle a affirmé qu'elle ne s'était jamais plainte à Mme Mahdi, en janvier 1999, que la salle de formation était en désordre et que c'était la faute de Mme Legault. À la question de savoir si M. Thivierge lui avait dit, en février 1999, qu'il avait peur de Mme Legault, Mme Albert a répondu qu'il ne lui avait rien dit de tel. Elle a également nié avoir dit à Mme Daigle que Mme Legault avait menacé M. Thivierge et ses enfants avec une arme à feu, le 17 février 1999. À sa connaissance, Mme Mahdi n'avait jamais installé une caméra dans le bureau de Mme Legault dans le but de l'espionner et Mme Ladouceur n'avait aucunement partagé un appartement avec M. Thivierge de mars 1999 à décembre 2000.

106 Mme Albert a nié s'être introduite dans le domicile de Mme Legault à Hawkesbury. Elle n'a jamais au grand jamais dit à Mme Townley que la maison de Mme Legault avait grand besoin de réparations. Elle a nié avoir retiré des boîtes du domicile de Mme Legault, ou visité l'intérieur de la maison avec un certain Guy Bonin ou avoir parlé avec les voisins de Mme Legault.

107 Elle a nié avoir communiqué avec les beaux-parents de Mme Legault pour leur dire qu'elle était folle et répugnante, qu'elle avait harcelé un directeur et qu'on lui avait fait subir une évaluation à Santé Canada. Elle a également nié avoir dit aux beaux-parents que Mme Legault avait provoqué la mort de son partenaire juste en le touchant ou en le regardant. Elle a déclaré qu'elle n'avait jamais eu de contact avec les beaux-parents de Mme Legault.

108 Mme Albert a nié avoir demandé à un enquêteur privé de suivre Mme Legault en tout temps et avoir communiqué avec un certain M. Houlahan pour obtenir de l'information sur Mme Legault et sur son partenaire. Elle a catégoriquement nié avoir dit à ses collègues que Mme Legault était capable de les tuer juste en les touchant ou en les regardant. Elle a aussi nié avoir appelé aux services des Relations de travail, en juillet 1999, pour obtenir de l'information au sujet de Mme Legault.

109 Mme Albert a déclaré qu'elle avait pris connaissance d'une copie de la plainte de Mme Legault au Service de police d'Ottawa (pièce G-25), mais qu'elle ne pouvait pas dire qui la lui avait montrée. Ni la GRC ni le Service de la police d'Ottawa n'avaient communiqué avec elle au sujet de cette plainte. Elle n'en connaissait pas suffisamment le contenu pour dire s'il y avait matière à s'alarmer.

110 Mme Albert a déclaré que la seule explication qu'elle pouvait trouver pour justifier la plainte de Mme Legault contre elle est qu'elle était amie avec M. Thivierge. Elle a dit qu'elle ne s'était pas sentie menacée ni n'avait été fâchée d'apprendre que Mme Legault avait adressé une plainte à M. Tamagno, le 15 décembre 2000. Elle en avait été estomaquée et contrariée, certes, mais pas fâchée.

111 Elle croyait se rappeler que le sous-ministre adjoint avait fait appel à un expert-conseil externe pour déterminer si la plainte de Mme Legault était fondée. Elle a confirmé qu'elle avait indiqué, dans sa déclaration du 7 décembre 2001 (pièce E-7.5), qu'il s'agissait d'une entreprise du nom de Ensign Securities. Quand Mme Legault l'a corrigée en lui disant que l'entreprise portait le nom de Quintet Consulting, Mme Albert a observé qu'elle avait été interviewée par une femme au sujet des allégations de Mme Legault.

112 Mme Albert ne pouvait pas confirmer qu'elle avait été mise au courant d'une plainte que Mme Legault avait déposée devant le Commissaire à la protection de la vie privée ni qu'elle avait pris connaissance de la plainte de Mme Legault à la ministre Stewart.

113 Elle a nié avoir fait appel à Ensign Securities, Burns International Services, Securitas, International ou Pinkerton pour faire enquête sur Mme Legault, avoir distribué la photo de Mme Legault à des amis et s'être enquise de ses allées et venues.

114 Mme Legault a poursuivi le contre-interrogatoire de Mme Albert en lui demandant si elle connaissait les personnes suivantes ou si elle avait communiqué avec elles : Elizabeth Voroley, Tracy Ryan Silverson, Michel Leblanc, Michael Tate, Vicky Apperly, Julie Rollwagen, Georgette Scission, Shirley Scott, le Dr Sam Smolkin, la Dre Naomi Groves, la Dre Lenora Tilley, Jane Algire et quelques autres personnes que Mme Legault a identifiées par leur nom. Mme Albert a répondu qu'elle ne connaissait aucune de ces personnes ni n'avait communiqué avec elles. Mme Legault s'est ensuite employée à faire dire à Mme Albert qu'elle avait embauché ou payé certaines de ces personnes pour la suivre partout, la prendre en filature, etc. Mme Albert a catégoriquement nié avoir fait quoi que ce soit du genre, ainsi que d'avoir rendu visite à M. Tate, le directeur du River Park Retirement Home, avec Mme Mahdi, pour lui dire que Mme Legault était sale et répugnante et qu'elle n'avait pas le droit de travailler ou vivre à Ottawa. Mme Legault a demandé à Mme Albert si elle avait quelque objection à ce que Mme Legault vive ou travaille à Ottawa. Mme Albert a répondu que cela ne lui posait aucun problème et qu'elle espérait seulement que Mme Legault obtiendrait l'aide dont elle avait véritablement besoin.

115 Mme Albert a admis qu'elle connaissait Mme Parson, la secrétaire de Mme Mahdi, et Steven Mahdi, qui travaille au ministère et qui est le neveu de Mme Mahdi. Elle a dit qu'elle craignait pour sa sécurité personnelle et pour celle de sa famille. Elle voulait que Mme Legault mette un terme à son comportement. Elle a indiqué que lors d'une rencontre avec les policiers, Mme Daigle, Mme Ladouceur et Mme Mahdi et elle avaient dit qu'elles étaient prêtes à ne pas engager de poursuites contre Mme Legault si celle-ci acceptait de se faire soigner. À la fin de son contre-interrogatoire, Mme Legault a cherché à savoir si Mme Albert consultait un psychiatre ou si elle avait des problèmes de santé mentale. Mme Albert a répondu que non en ajoutant qu'elle n'avait jamais eu de problèmes de santé mentale.

116 L'employeur a appelé ensuite Cavell Townley.

117 Mme Townley fait carrière dans l'administration publique depuis 1977, plus particulièrement à titre de conseillère en relations du travail depuis 1991. Après une absence de cinq ans, de 1994 à 1999, elle a occupé un poste à la DGPSR, à titre de conseillère en relations du travail, de janvier à décembre 1999. Elle est actuellement rattachée à la Commission de la fonction publique.

118 Mme Townley a déclaré que Mme Mahdi avait communiqué avec elle, en mars 1999, pour discuter du cas de Mme Legault, qui était absente du travail depuis février 1999 et dont on était sans nouvelles. Elle lui avait conseillé de communiquer avec le conseiller en rémunération, qui avait peut-être communiqué avec Mme Legault. La réponse ayant été négative, Mme Townley a conseillé alors à Mme Mahdi d'envoyer une lettre recommandée au domicile de Mme Legault pour l'aviser qu'elle était en congé non autorisé et qu'elle devait communiquer avec l'employeur. La lettre a été retournée avec la mention « non distribuable ». Environ à la même époque, le ministère a envisagé sérieusement d'appeler la police pour faire intercepter Mme Legault, que Mme Mahdi avait aperçue à l'extérieur de l'immeuble. Mme Townley croyait se rappeler que Mme Legault justifiait son absence en disant que son fiancé était en phase terminale. Après le retour de Mme Legault au travail, Mme Mahdi a communiqué avec Mme Townley pour lui signaler que Mme Legault avait des problèmes de rendement et de comportement. Elle était perturbée émotionnellement et se comportait de manière inacceptable à l'endroit des autres employés. Ajoutons à cela que les problèmes d'absentéisme et de rendement persistaient. Mme Townley a appris également que la charge de travail de Mme Legault avait été réduite et que les dossiers complexes avaient été attribués à d'autres personnes. On en vint à s'interroger sur l'état affectif de Mme Legault. Mme Mahdi a demandé à Mme Townley si elle possédait la délégation de pouvoir voulue pour accorder une semaine de congé pour raisons familiales à Mme Legault. Mme Townley lui a répondu qu'elle pouvait lui accorder un congé rémunéré pour d'autres raisons. Mme Townley croyait se rappeler que l'offre de congé avait été présentée à Mme Legault, mais qu'elle l'avait refusée. Mme Mahdi a alors sollicité l'aide de Mme Townley pour convaincre Mme Legault d'accepter l'offre. Mme Townley, accompagnée de Mme Girard, conseillère du PAE, a donc rencontré Mme Legault dans le but de lui expliquer à quel point ses problèmes personnels nuisaient à son travail. Afin de l'aider à mettre de l'ordre dans sa vie personnelle, elles lui ont conseillé d'accepter l'offre de congé. Mme Legault continuait malgré tout à hésiter et leur dit qu'elles ne pouvaient pas la contrôler. Tout au long de l'échange, Mme Legault tenait son téléphone portable à la main car elle attendait apparemment un appel de la banque, qui devait lui dire si sa demande d'hypothèque avait été approuvée. Quand l'appel est arrivé enfin, Mme Townley a cru comprendre que la demande avait été refusée. Mme Legault s'est alors mise dans tous ses états et a éclaté en sanglots. Mme Girard et Mme Townley ont tenté à nouveau de la convaincre d'accepter l'offre de Mme Mahdi et y ont parvenu en partie.

119 Peu de temps après le retour de Mme Legault au travail, Mme Mahdi a appelé Mme Townley pour lui signaler que le rendement et le comportement de Mme Legault ne s'étaient aucunement améliorés et que son hygiène personnelle laissait de plus en plus à désirer. Mme Townley a témoigné qu'elle avait vu Mme Legault porter les mêmes vêtements plusieurs jours de suite, dans un état de propreté de plus en plus douteux de jour en jour. Mme Mahdi a relaté aussi à Mme Townley les incidents des carottes et du chou-fleur. Vu les problèmes d'absentéisme de Mme Legault, Mme Townley lui a conseillé de demander à Santé Canada d'évaluer si elle était apte à travailler. Comme la situation continuait à empirer et commençait à avoir une incidence sur le moral des employés, on en est venu à se demander si c'était une bonne chose que Mme Legault demeure au travail. Mme Mahdi, Mme Girard et Mme Townley ont eu une discussion à ce sujet et Mme Mahdi a décidé que Mme Legault ne pouvait pas rester au travail tant que le ministère n'aurait pas reçu la confirmation de Santé Canada qu'elle était apte à travailler.

120 Mme Townley a fait part de cette décision à Barry Auger, représentant de l'agent négociateur de Mme Legault, à la mi-juillet 1999. Mme Legault a été convoquée à une réunion pour discuter de la question de savoir si elle était apte à travailler. On lui a indiqué qu'elle pouvait se faire accompagner par le représentant de son agent négociateur ainsi que par un membre de sa famille. Durant la réunion, Mme Townley lui a expliqué qu'en raison de son absentéisme, de ses problèmes de comportement et de son rendement, elle ne pouvait plus continuer à travailler pour l'instant. On lui a également dit que même si le ministère avait demandé une évaluation pour savoir si elle était apte à travailler, rien ne l'obligeait à s'y soumettre. On lui a toutefois indiqué qu'elle ne pouvait pas revenir au travail tant qu'elle n'était pas déclarée apte à travailler.

121 Lors de cette réunion, Mme Legault s'est aussi fait remettre un [traduction] « Relevé d'emploi » car elle avait épuisé tous ses crédits de congé de maladie, ainsi que les formulaires requis pour présenter une demande de prestations d'invalidité de longue durée. Mme Legault a déclaré qu'elle avait le sentiment de se faire infliger une suspension pour raisons disciplinaires. Toutes les personnes présentes ont rétorqué que ce n'était pas le cas. Mme Mahdi a même ajouté qu'elle avait hâte que Mme Legault revienne au travail.

122 Mme Townley a transmis la demande d'évaluation à Santé Canada et un rendez-vous a été pris pour Mme Legault, qui s'y est présentée. Mme Townley a reçu par la suite une lettre l'informant que Santé Canada voulait que Mme Legault soit examinée par un spécialiste mais que dans l'intervalle elle avait été jugée inapte à travailler. Un rendez-vous a été pris, mais Mme Townley a appris de Santé Canada que Mme Legault ne s'y était pas présentée. Un autre rendez-vous a été fixé, mais Mme Legault ne s'y est pas présentée non plus. Ils n'ont pu fixer un autre rendez-vous.

123 Mme Legault a appelé Mme Townley vers la fin de septembre 1999 pour lui faire part de ses inquiétudes à la suite d'une discussion avec le médecin de Santé Canada. Mme Townley a alors écrit à Mme Legault pour lui exposer les divers choix qui s'offraient à elle pour faciliter son retour au travail et lui a demandé de lui faire part de sa décision.

124 La lettre est restée sans réponse, mais Mme Townley a reçu un courriel de M. Auger indiquant que Mme Legault lui avait dit qu'elle allait prendre rendez-vous avec un spécialiste médical. Mme Townley lui a demandé de lui communiquer la date du rendez-vous. Après un certain temps, elle a envoyé un courriel à M. Auger pour savoir si la consultation avait eu lieu. M. Auger lui a répondu qu'il n'avait pas eu de nouvelles de Mme Legault.

125 Mme Townley a reconnu les documents que contenait le dossier qu'elle avait transmis à Santé Canada (pièces E-1, E-2 et E-3.1 à E-3.9) ainsi que les documents qu'elle avait remis à Mme Legault le 15 juillet 1999 (pièce G-16), et a examiné l'échange de correspondance qu'elle avait eue avec Santé Canada (pièces E-12 to E-15) pour fixer les rendez-vous de Mme Legault. Elle a aussi produit la lettre qu'elle avait expédiée à Mme Legault, le 12 octobre 1999, pour lui expliquer les divers choix qui s'offraient à elle pour régler la situation (pièce E­16).

126 Durant le contre-interrogatoire dirigé par Mme Legault, Mme Townley a indiqué que c'est en février 1999 qu'elle croyait avoir pris connaissance du courriel du 15 décembre 1998 (pièce E­18). Elle a déclaré que M. Thivierge lui avait remis ce courriel en même temps que d'autres courriels et documents en lui faisant part de ses préoccupations et en lui demandant conseil pour mettre un terme à la situation. Elle lui avait demandé s'il avait clairement dit à Mme Legault de ne plus lui envoyer de messages. Avant la réunion avec Mme Legault, Mme Townley avait encore demandé à M. Thivierge de dire à nouveau à Mme Legault de ne plus lui envoyer de tels messages et de laisser entrevoir la possibilité d'une plainte de harcèlement.

127 Mme Legault a poursuivi son contre-interrogatoire en demandant à Mme Townley si elle était au courant des rumeurs voulant que Mme Legault ait menacé M. Thivierge et ses enfants avec une arme à feu, que Mme Mahdi ait installé une caméra dans le bureau de Mme Legault et que cette dernière ait sauté sur Mme Daigle. Mme Townley a répondu qu'elle n'avait pas entendu parler de ces incidents.

128 Mme Townley a indiqué qu'elle n'avait pas participé à la rédaction de la lettre du 15 mars 1999 dans laquelle la direction demandait à Mme Legault (pièce G-3) de fournir un certificat médical et qu'elle en avait pris connaissance à une date ultérieure seulement. Elle ignorait que le laissez-passer de Mme Legault avait été désactivé du 16 au 31 mars 1999. Elle a affirmé ne pas être l'auteur de la note datée du 30 avril 1999 (pièce G-31).

129 Au sujet de la réunion du 25 mai 1999, au cours de laquelle Mme Legault avait été priée de cesser de communiquer avec M. Thivierge, et dont Mme Townley avait été informée par un courriel (pièce G-11) daté du 2 juin 1999, Mme Townley a dit qu'elle croyait se rappeler qu'il n'y avait pas eu de plainte de harcèlement officielle et que la réunion était un moyen de désamorcer la situation avant qu'on en arrive à ça.

130 En réponse aux questions de Mme Legault, Mme Townley a déclaré que Mme Mahdi ne lui avait pas dit qu'elle avait reçu un appel des beaux-parents de Mme Legault. Elle a nié que Mme Mahdi ou elle-même les avaient appelés. Elle a démenti la prétention de Mme Legault voulant que Mme Townley ait dit, lors d'une réunion, le 15 juin 1999, que les beaux-parents de Mme Legault s'inquiétaient pour le bien-être de celle-ci et qu'ils voulaient que son fiancé soit réadmis à l'hôpital. Mme Townley a également démenti un certain nombre de déclarations que Mme Legault lui prêtait, dont une selon laquelle Mme Legault était censée faire l'objet d'une évaluation d'une durée de deux semaines à partir du 15 juin 1999.

131 Mme Townley a indiqué que les notes contenues dans la pièce G-32 avaient été rédigées durant une rencontre avec Mme Mahdi, où elle avait examiné des documents que cette dernière avait préparés et lui avait demandé d'être plus précise.

132 Interrogée au sujet d'une réunion qui aurait eu lieu le 14 juillet 1999, Mme Townley a répondu qu'elle n'en gardait aucun souvenir, quoiqu'il eût été sensé de tenir une réunion avant le 15 juillet 1999 afin de permettre à Mme Legault de se faire accompagner par le représentant de son agent négociateur. Elle a nié avoir dit à Mme Legault que la période d'évaluation était terminée et que les résultats allaient lui en être communiqués le lendemain.

133 En ce qui concerne la réunion du 15 juillet 1999, Mme Townley ne se rappelait pas que M. Auger avait dit que les mesures prises par l'employeur équivalaient à une suspension sans rémunération. Elle a nié avoir dit à Mme Legault qu'elle allait retirer de l'argent de son compte bancaire et avoir dit à M. Auger qu'aucun document, à l'exclusion d'une lettre de recommandation, n'allait être envoyé à Santé Canada. Elle a également nié que Mme Mahdi avait dit à Mme Legault [traduction] « Ramasse tes affaires et quitte l'immeuble immédiatement » et qu'elle-même avait dit à Mme Mahdi [traduction] « Ne mets pas Estelle en colère. Elle risque de sauter sur toi. »

134 Interrogée au sujet d'une note non datée versée au dossier (pièce G-33), Mme Townley a répondu que la direction n'était pas disposée à accepter un certificat médical du médecin traitant de Mme Legault et que Santé Canada voulait poursuivre son évaluation.

135 Mme Townley a admis que Mme Legault aurait dû recevoir une copie du dossier qui a été transmis à Santé Canada en ajoutant qu'il s'agissait d'une erreur administrative.

136 Le premier témoin de Mme Legault a été le Dr John Fedoroff, psychiatre judiciaire à l'Hôpital Royal d'Ottawa et titulaire d'un permis de pratique de la médecine en Ontario. Le Dr Fedoroff est titulaire d'un diplôme en médecine de l'Université Saskatoon et d'un diplôme en psychiatrie de l'Université John Hopkins.

137 Le Dr Fedoroff a reçu, en sa qualité de psychiatre judiciaire, une demande visant à déterminer si Mme Legault était apte à subir son procès à la suite de son arrestation et de sa détention. Il a témoigné devant le juge Wright qu'elle était, à son avis, apte à subir son procès. Durant l'audience, on a soulevé la question de savoir si Mme Legault satisfaisait au critère établi pour faire valoir qu'elle n'était pas criminellement responsable de ses actes en vertu de l'article 16 du Code criminel. Le juge a ordonné que Mme Legault revienne devant lui pour subir une évaluation relativement à cette question. Le Dr Fedoroff a rencontré Mme Legault, le 15 mars 2002, à titre de patiente externe. Il a ensuite écrit au juge Wright pour lui exposer les grandes lignes de son opinion sur cette question (pièce G-12).

138 Prié par Mme Legault de dire qui lui avait demandé cette évaluation, le Dr Fedoroff a répondu que la demande lui était venue du tribunal, mais que c'était probablement le procureur de la couronne qui avait soulevé la question. En ce qui concerne l'évaluation du 15 mars 2002, le Dr Fedoroff a déclaré qu'il s'agissait de déterminer si Mme Legault souffrait d'un trouble mental qui la rendait incapable de comprendre la nature ou les conséquences de ses actes au moment même où elle les commettait, ce qui conduisait à son accusation. Pour répondre à cette question, le Dr Fedoroff a indiqué qu'il avait mené une entrevue psychiatrique complète en faisant spécifiquement référence à cette question.

139 Le Dr Fedoroff a indiqué qu'il avait demandé à Mme Legault si elle avait des hallucinations, en ajoutant que les questions qu'on posait durant les entrevues psychiatriques étaient toujours sensiblement les mêmes. Ce qui distingue ce type d'entrevue d'une évaluation en vertu de l'article 16 du Code criminel c'est que certaines questions visent spécifiquement à évaluer dans quel état mental se trouvait la personne au moment où l'incident est survenu. Il croyait se rappeler que l'incident se rapportait à la distribution de lettres que d'autres percevaient comme des lettres de menaces et de harcèlement et qui avaient conduit à des accusations de harcèlement criminel et de méfait. Il a reconnu la lettre qu'il avait adressée au juge Wright, le 2 avril 2002 (pièce G-12), et il a admis que le compte rendu de l'instance (pièce G-14) s'accordait avec le souvenir de ce qui s'était passé le 6 mars 2002.

140 Le Dr Fedoroff a nié qu'il avait parlé avec l'employeur et que Mme Legault s'était fait imposer des conditions qui faisaient en sorte qu'elle pouvait seulement retourner au service des PIAE et qu'elle n'avait pas le droit de travailler ailleurs dans l'administration fédérale. Il a nié que lui seul pouvait autoriser des demandes de mutation à un autre poste, que l'employeur avait demandé que des médicaments lui soient prescrits ou qu'elle soit traitée par lui à l'Hôpital Royal d'Ottawa. Le Dr Fedoroff a aussi démenti d'autres allégations de Mme Legault en ajoutant qu'il ne pouvait pas imaginer pourquoi il aurait tenu de tels propos ou même été autorisé à donner de telles directives. Il a déclaré que son rôle était de répondre à la question ayant trait à l'article 16 du Code criminel pour le tribunal et que ce que Mme Legault mentionnait n'avait rien à voir avec cette question.

141 Le Dr Fedoroff a indiqué que Mme Legault avait déposé 37 plaintes contre lui auprès de l'Ordre des médecins et chirurgiens de l'Ontario. Elle l'accusait de toutes sortes de choses allant d'avoir manqué à son devoir de confidentialité jusqu'à l'avoir espionnée.

142 L'Ordre des médecins et chirurgiens l'a disculpé de toutes les accusations. Les plaintes ont également été rejetées par le Comité d'appel.

143 En contre-interrogatoire, le Dr Fedoroff a indiqué qu'il n'avait pas consulté les autres médecins susceptibles d'avoir traité Mme Legault, ni pris connaissance de son dossier médical. Il a dit que la première rencontre, à la prison, avait duré une demi-heure, et que la seconde, à son cabinet, avait duré deux heures.

144 Le Dr Fedoroff a été interrogé au sujet de l'observation contenue dans sa lettre du 2 avril 2002, selon laquelle il envisageait de modifier son opinion et de recommander une autre évaluation psychiatrique pour déterminer si Mme Legault souffrait d'un trouble de paranoïa avec idées délirantes, si cette dernière ne cessait pas de déposer des plaintes contre lui l'accusant de complot. Il a observé qu'il était difficile d'établir un diagnostic précis après une ou deux rencontres seulement. Il soupçonnait que le trouble était présent, mais il manquait d'information pour poser un diagnostic.

145 Le Dr Fedoroff a expliqué que les personnes qui présentent ce trouble psychologique ont des idées délirantes reposant sur de fausses croyances. Elles s'imaginent généralement qu'elles sont victimes de persécution ou qu'il existe un complot contre elles. Elles ont généralement l'air normal. C'est seulement quand on commence à leur parler de ce qui provoque leurs idées délirantes que le trouble devient apparent. À prime abord, elles ont des rapports normaux avec les autres et ne montrent pas de signes de dépression. On traite ce trouble au moyen de psychotropes et de séances de counselling.

146 Le Dr Fedoroff a soutenu que les tribunaux étaient réticents à déclarer une personne inapte à subir son procès en indiquant que les critères préliminaires à remplir étaient rigoureux et que la personne doit répondre à diverses exigences avant d'être déclarée inapte.

147 On présume que tous sont aptes à subir leur procès, sauf si les faits démontrent le contraire. Il s'ensuit que la plupart des personnes qui souffrent de troubles mentaux sont aptes à subir leur procès et, partant, qu'elles ne peuvent pas invoquer l'article 16 du Code criminel.

148 En ce qui concerne le trouble de paranoïa avec idées délirantes, le Dr Fedoroff a indiqué que l'un des problèmes reliés à cet état est qu'il s'accompagne souvent d'une escalade de la violence. La personne qui entretient l'idée délirante qu'elle est persécutée et qui conclut que les autorités ne peuvent l'aider risque de vouloir se faire justice elle-même.

149 En réinterrogatoire, le Dr Fedoroff a insisté sur le fait qu'il ne se prononçait pas aujourd'hui sur l'état mental de Mme Legault. Il témoignait au sujet de l'information qu'il avait fournie en 2002 et qui expliquait l'opinion qu'il avait formulée à ce moment-là.

150 Mme Legault a témoigné pour son compte. Elle a commencé à travailler à la DGPSR en juin 1993, où elle a occupé plusieurs postes de durée déterminée consécutifs. En 1998, on lui a offert un poste CR-4 par intérim au service des PIAE, à titre de préposée au traitement des demandes de prestations étrangères. En mars 1999, alors qu'elle occupait toujours le poste par intérim, on lui a offert un poste CR-3 de durée indéterminée, toujours au service des PIAE. Elle a travaillé au service des PIAE du 2 novembre 1998 au 15 juillet 1999. Mme Kachra a été sa formatrice jusqu'à son départ en juillet 1999. Dans une lettre d'offre produite en preuve (pièce G-43-1), il est indiqué qu'elle a été mutée à un autre poste CR-3 en date du 21 juin 2000.

151 Pour s'acquitter des fonctions qu'elle occupait à titre intérimaire, il fallait qu'elle se familiarise avec 33 accords avec des pays étrangers, une tâche, lui a­t­on dit, qui allait lui prendre deux ans environ. En juillet 1999, elle en connaissait 22. La formation était dispensée de façon continuelle. Mme Daigle est devenue sa supérieure en décembre 1998. Au début, Mme Legault faisait partie d'un groupe de quatre nouveaux préposés au traitement des demandes de prestations internationales au sein d'une équipe de 10 personnes. En janvier 1999, l'équipe comptait trois préposés de moins. En décembre 1998, on a fait le compte du nombre de dossiers en retard, qui s'élevait à 5 000. Au mois de janvier, les préposés ont commencé à faire de nombreuses heures supplémentaires pour venir à bout de l'arriéré. Mme Legault a dit qu'elle avait fait beaucoup d'heures supplémentaires en janvier et en février.

152 Mme Legault a déclaré que le courriel qu'elle avait expédié à M. Thivierge, le 15 décembre 1998, n'était pas du harcèlement. Beaucoup d'employés envoyaient des courriels à M. Thivierge pour l'inviter à prendre un café ou à faire une promenade. Elle a ajouté qu'elle faisait juste comme tout le monde à ce moment-là et que ce n'était pas le début d'une relation personnelle. Tout le monde voulait prendre un café avec M. Thivierge pour discuter du travail, etc. En ce qui concerne le courriel (pièce E-19) du 6 janvier 1999, elle a déclaré que cela ne voulait pas dire qu'elle voulait avoir une relation personnelle avec lui et elle a ajouté qu'elle avait compris sa réponse au sujet des relations strictement professionnelles.

153 Mme Legault a poursuivi son témoignage en disant que c'est un collègue qui lui avait dit que M. Thivierge voulait recevoir une carte pour la Saint-Valentin. Elle ne comprenait pas pourquoi vu le courriel qu'elle avait reçu de M. Thivierge, mais elle lui avait quand même envoyé une carte le 15 février 1999, ne se doutant pas qu'elle était probablement victime d'une mauvaise plaisanterie. La même chose s'était produite dans le cas du petit cadeau (pièce G-28). Mme Legault a ajouté que le cadeau et la carte (pièce G-27) n'avaient aucune connotation sexuelle. Elle avait également envoyé un courriel à M. Thivierge le 17 février 1999 et avait été étonnée de sa réponse (pièce E-20). Elle a raconté que le jour où elle était allée pleurer dans les toilettes, peu après 13 h, Mme Kachra l'avait suivie pour lui dire que M. Thivierge voulait lui présenter ses excuses pour le courriel. Mme Legault lui avait alors dit qu'elle ne pouvait pas quitter les lieux immédiatement. Quand elle était sortie des toilettes, Mme Kachra l'avait empoignée par la main en lui disant de la suivre. C'est à ce moment-là que Mme Mahdi est entrée dans les toilettes et a vu que Mme Kachra essayait de l'entraîner. Elle leur avait alors emboîté le pas et avait suivi leur conversation dans le corridor. Mme Kachra disait que M. Thivierge voulait la voir pour lui offrir ses excuses. Mme Legault était incommodée par la présence de Mme Mahdi, qui les surveillait, si bien qu'elle a dit à Mme Kachra qu'elle voulait rentrer chez elle. Mme Kachra lui en avait donné l'autorisation, vu que Mme Daigle était en congé de maladie.

154 Mme Legault a raconté qu'une cérémonie de remise de prix s'est tenue, le 18 février 1999, dans une grande salle de conférence, en présence de M. Tamagno, de Mme Mahdi et d'une dizaine de collègues. En entrant dans la salle, M. Thivierge avait demandé à Mme Kachra comment se portait Mme Legault, elle lui avait répondu qu'elle allait bien. C'est alors que des collègues avaient dit que Mme Legault leur avait fait quelque chose. Mme Legault s'était alors  mise à hyperventiler, mais elle avait réussi à reprendre son calme et à quitter la réunion avec les autres.

155 Ce même après-midi, à la suite d'une demande que Mme Mahdi avait adressée aux employés, Mme Legault s'est portée volontaire pour expédier de nouvelles demandes, ce qui lui valut une réprimande de la part de Mme Daigle, le 24 février 1999, à son retour de congé de maladie. Mme Daigle lui reprocha également de ne pas avoir appliqué correctement les procédures de traitement des dossiers. Le lendemain, un collègue, M. Gagné, avait dit à d'autres collègues que Mme Legault avait sauté sur Mme Daigle. Mme Legault croyait que c'est de là qu'était partie la rumeur selon laquelle elle avait sauté sur Mme Daigle.

156 Mme Legault a poursuivi son témoignage en indiquant que vers 10 h 30, le 26 février 1999, elle a reçu un appel d'un certain M. Lekewsi qui se présenta comme un ami de M. Thivierge et qui lui a dit que celui-ci voulait l'épouser. Elle ne savait pas s'il s'agissait d'une mauvaise plaisanterie, mais elle a poursuivi néanmoins la conversation, qu'elle avait trouvée bouleversante. Elle ne se sentait pas bien car elle avait une infection aux oreilles et avait décidé dès lors de rentrer chez elle. Elle a reçu ultérieurement des soins pour une infection à l'oreille et on lui a conseillé de rester à la maison pendant deux semaines. Elle a dit qu'elle avait appelé chaque jour au travail pour laisser un message dans la boîte vocale de Mme Daigle. Le 8 mars 1999, Mme Daigle a laissé un message sur son répondeur lui demandant de lui communiquer sa date de retour au travail. Mme Legault a rappelé Mme Daigle, qui lui donnait jusqu'au 12 mars 1999 pour indiquer sa date de retour au travail. Elle a appelé Mme Daigle le 12 mars 1999, vers 8 h, croyait-elle, car elle n'avait pas vérifié l'heure, pour lui dire qu'elle allait la rappeler le 15 mars 1999. Ce jour-là, elle s'est rendue à la salle d'urgence d'un hôpital où on lui a conseillé de rester encore un autre mois à la maison et de consulter son médecin le plus rapidement possible. Elle a oublié de demander un certificat médical. Elle a appelé ensuite son médecin, qui ne pouvait toutefois lui fixer un rendez-vous avant le 20 mars 1999. Elle a appelé ensuite Mme Daigle pour lui dire qu'elle revenait au travail le lendemain, à temps partiel. À 17 h, elle a reçu une lettre de Mme Daigle à son domicile (pièce G-3), ce qui l'étonna car elle avait cru comprendre que Mme Daigle était disposée à attendre jusqu'au 22 mars 1999 pour obtenir le certificat médical. En arrivant au travail le lendemain, Mme Legault s'est rendue au bureau de Mme Daigle pour lui dire qu'elle ne pouvait pas obtenir le certificat médical avant le 22 mars 1999. Mme Daigle lui a répondu que c'était correct. Le 18 mars 1999, Mme Daigle lui a remis une note (pièce G-4). Quand elle l'a montrée à ses collègues, ceux-ci lui ont dit que Mme Daigle n'avait pas respecté la procédure établie.

157 À son retour au travail le 15 mars 1999, Mme Legault a constaté que son laissez-passer avait été désactivé. Elle en a demandé la raison à Mme Daigle, qui lui a dit que le directeur du Personnel avait fait une erreur et qu'elle ne savait pas quand la situation allait être corrigée. Mme Legault a découvert toutefois par la suite que de nouveaux codes avaient été attribués à ses collègues. Linda Klein lui a dit aussi que personne n'était autorisé à les lui communiquer, ce que Mme Legault trouva très étrange.

158 Le 22 mars 1999, Mme Legault a fourni le certificat médical exigé, qui indiquait qu'elle pouvait seulement travailler à temps partiel. Il a été convenu avec Mme Daigle que sa journée commencerait à 7 h et se terminerait à 13 h, avec une pause à 10 h 30. Faisant allusion au rapport d'absentéisme (pièce E-3.4), Mme Legault a observé qu'elle avait été autorisée à prendre une demi-journée de congé le 4 mai pour consulter son médecin. Son absence du 25 mai aurait dû s'accompagner du code « autre type de congé » car Mme Mahdi l'avait autorisée à rentrer chez elle. De plus, ses absences des 26 et 27 mai auraient dû être consignées comme des congés annuels.

159 Avant de s'absenter pour aller à un rendez-vous médical, le 19 mai 1999, Mme Legault avait prévenu Mme Daigle et s'était fait dire qu'elle n'avait pas besoin de fournir un certificat médical. Or, à son retour au travail, Mme Daigle lui a demandé un certificat médical et a exigé qu'elle s'en fasse envoyer un immédiatement par télécopieur. Mme Legault lui a alors dit qu'elle allait lui fournir le certificat le lendemain.

160 Mme Legault a poursuivi son témoignage en indiquant que durant la fin de la semaine du 30 mai 1999, son partenaire de longue date, Hendricks Bongers, qu'elle fréquentait depuis 10 ans, lui a remis une bague de fiançailles et lui a demandé de l'épouser. Il lui a dit qu'il avait consulté son médecin et qu'il attendait un appel pour connaître les résultats de divers tests. Il lui dit qu'il ne se sentait pas bien et qu'il n'était pas très optimiste quant aux résultats des tests. Elle était restée auprès de lui car elle était inquiète. Le médecin a appelé et a dit à M. Bongers de se rendre immédiatement à la salle d'urgence de l'hôpital. Il a été admis le 7 juin 1999. Mme Legault l'a accompagné à l'hôpital où on lui a fait subir de nouveaux tests. Il était alors paralysé d'un côté. Les spécialistes leur ont dit qu'il devait subir un tomodensitogramme et que les nouvelles risquaient d'être mauvaises. Mme Legault a accompli sa journée de travail le 8 juin 1999, puis s'est rendue à l'hôpital où son partenaire l'a informée que le médecin lui avait annoncé qu'il était en phase terminale. Il a décidé dès lors de demander son congé de l'hôpital et de retourner à la maison, ce à quoi le médecin a donné son accord. En quittant l'hôpital, ils ont rencontré un de ses fils dans le couloir. Le fils s'est mis en colère et a demandé à son père de signer deux documents. Ce dernier ne pouvait pas voir ce qu'il signait et ne voulait pas vraiment signer les documents. C'est alors que le fils a pris Mme Legault par la gorge. Elle était incapable de parler car il l'étranglait. Il a ensuite approché son autre poing près du nez de Mme Legault et lui a dit : [traduction] « Je vais t'arranger la face. Je vais te tuer; je vais te battre et je vais te tuer. » M. Bongers a alors dit à son fils de relâcher Mme Legault et de la laisser tranquille, mais le fils l'a repoussé. Le père a accepté de signer les documents à la condition que son fils laisse Mme Legault tranquille. Le fils a desserré son étreinte et l'a laissée aller. Personne n'a été témoin de cet incident, qui s'est déroulé dans les couloirs de l'hôpital. Mme Legault a ajouté qu'après être retournée dans l'une des deux maisons qu'elle possédait avec M. Bongers, elle avait reçu de huit à dix appels par jour des enfants de M. Bongers qui la suppliaient pour que leur père retourne à l'hôpital. M. Bongers craignait pour la vie de Mme Legault. Sa santé déclinait de jour en jour. Elle l'a fait admettre de nouveau à l'hôpital le 14 juin 1999. Le cancer s'était généralisé; il est décédé le 29 juillet 1999.

161 Mme Legault s'est présentée au travail le 9 juin 1999 et s'est rendue au bureau de Mme Mahdi pour lui dire qu'elle s'était fiancée et que son partenaire était en phase terminale. Elle lui a demandé un congé spécial et un congé annuel au titre de ses absences du 28 mai au 7 juin 1999. Mme Mahdi lui a répondu qu'elle ne croyait pas que Mme Legault avait encore des crédits de congé de maladie et est partie voir Mme Daigle. Celle-ci est arrivée avec son dossier et a confirmé qu'il ne lui restait plus de congés de maladie ni de congés annuels. Mme Legault a alors demandé un congé pour raisons familiales et Mme Mahdi lui a répondu qu'on allait examiner cela. Mme Legault a dit alors qu'elle devait partir immédiatement car elle voulait être avec son partenaire. Mme Daigle lui a dit que dans ce cas-là, elle devait fournir un certificat médical. C'est ce qui explique le certificat médical visant la période du 28 mai au 14 juin 1999. Le 14 juin 1999, Mme Legault a téléphoné à Mme Daigle pour lui dire qu'elle serait de retour au travail le lendemain.

162 À son retour au travail, le 15 juin 1999, Mme Legault a été convoquée à une réunion au bureau de Mme Mahdi, en présence de Mme Townley et de Mme Daigle. Mme Townley a indiqué que Mme Mahdi et Mme Daigle avaient demandé la tenue de cette réunion pour discuter des problèmes qui étaient survenus depuis mars 1999. Elles se faisaient toutes deux du souci pour le bien-être de Mme Legault, à l'instar de nombreux collègues d'ailleurs. Mme Townley a poursuivi en disant qu'elle croyait comprendre que Mme Legault avait mis ses supérieurs au courant de sa situation personnelle et aussi que la famille de son partenaire se faisait beaucoup de souci pour lui et qu'elle voulait qu'il retourne à l'hôpital. Mme Townley a mentionné que ce n'était peut-être pas une bonne idée que Mme Legault continue de travailler. Elle a ajouté que sa supérieure essayait de lui venir en aide depuis le mois de mars et qu'elle s'inquiétait du fait que Mme Legault vivait une situation très stressante. Le stress l'avait d'ailleurs amenée à faire des choses déplacées comme envoyer une carte de Saint-Valentin à M. Thivierge malgré le fait qu'il lui avait demandé à deux reprises, par courriel, de ne pas communiquer avec lui.

163 Mme Townley a observé ensuite que le ministère croyait qu'elle avait peut-être besoin de consulter un spécialiste vu qu'on l'avait trouvée en larmes. Elle a mentionné également que Mme Legault rencontrait une conseillère du PAE.

164 Mme Townley et Mme Daigle ont encouragé Mme Legault à demander des prestations d'invalidité de longue durée. Mme Legault leur a répondu que son partenaire était hospitalisé et qu'elle ne pouvait rien faire d'autre que se rendre à l'hôpital après le travail pour être auprès de lui. On lui a dit alors que si elle décidait de demeurer au travail, on l'obligerait à se soumettre à une évaluation de deux semaines à Santé Canada.

165 Mme Legault a indiqué qu'elle voulait continuer à travailler parce qu'elle avait de lourdes dettes à rembourser et que sa productivité n'avait pas changé depuis décembre 1998. Selon ses estimations, elle traitait de 10 à 15 dossiers par jour sans commettre trop d'erreurs. Mme Legault a produit des notes qu'elle avait prises à la réunion du 15 juin (pièce G-48).

166 Durant la journée, Mme Legault a appris de certains collègues que Mme Mahdi leur avait conseillé, lors d'une réunion qui s'était tenue plus tôt, de ne pas lui adresser la parole. Ils avaient ajouté qu'ils savaient que son fiancé était mourant et qu'ils allaient passer outre la consigne et continuer de lui parler. Mme Legault avait trouvé bizarre que Mme Mahdi donne semblable consigne.

167 Le 16 juin 1999, Mme Mahdi a offert à Mme Legault de lui accorder une semaine de congé pour s'occuper de ses affaires personnelles. Ayant refusé l'offre, Mme Legault a été convoquée à une réunion avec Mme Girard, conseillère du PAE, et Mme Townley, qui l'ont encouragée à accepter l'offre de congé. Mme Legault a indiqué que l'offre n'était autre que de la fausse compassion et qu'on lui avait refusé un congé pour raisons familiales la semaine précédente quand elle en avait eu besoin. On a fini par convaincre Mme Legault d'accepter de prendre congé. C'est durant cette période que Mme Mahdi l'a aperçue au guichet automatique qui se trouvait près du bureau. Mme Legault a communiqué son adresse domiciliaire à Mme Mahdi, à la demande de celle-ci, et lui a demandé d'aviser Mme Daigle qu'elle prévoyait retourner au travail le 21 juin 1999.

168 À son retour au travail le 21 juin 1999, Mme Legault a constaté qu'on ne lui avait pas attribué de dossier, ce qui l'inquiétait car elle croyait que c'était la période d'évaluation. Elle a donc demandé à Mme Kachra de lui donner du travail. Mme Kachra a essayé de lui trouver du travail auprès des autres commis, mais ils ont déclaré qu'ils n'avaient pas le droit de donner des dossiers à Mme Legault. Le lendemain, Mme Legault a attendu une demi-heure avant de recevoir du travail. Mme Daigle est venue la voir pour lui dire qu'elle ne l'attendait pas avant le mercredi suivant.

169 Mme Legault a précisé que l'écart entre le nombre de dossiers indiqués dans les pièces E-3.6 et G-1.37 s'expliquait par le fait que des dossiers avaient été rangés.

170 Mme Legault a expliqué que durant la semaine du 5 juillet 1999, les dossiers des quatre sections du service des PIAE avaient été rangés dans des boîtes pendant qu'on procédait à l'aménagement de la nouvelle salle des dossiers. Durant cette semaine-là, aucun des commis du service n'a reçu de dossier à traiter. Or, dans la matinée du 5 juillet 1999, Mme Daigle lui a remis dix dossiers, tous rédigés en langue étrangère, qui se rapportaient à des accords qu'elle n'avait encore jamais appliqués. Elle savait que le délai de traduction était d'une semaine et qu'aucun des dossiers n'était traduit. Sur les conseils de Mme Kachra, elle a sollicité l'aide de collègues qui comprenaient les diverses langues et a réussi à traiter les dossiers, en maintenant une moyenne quotidienne de dix dossiers cette semaine-là (pièce G-1.43).

171 Mme Legault s'est souvenu d'un incident où Mme Ladouceur lui a dit qu'elle avait vexé une collègue parce qu'elle avait regardé des photographies de famille sur son bureau. L'employée craignait que quelque chose arrive à ses enfants. Mme Legault a répondu qu'elle avait regardé les photographies par curiosité et que tout le monde avait des photographies sur son bureau et qu'elle avait simplement eu l'intention de les regarder et rien d'autre. Vers la même époque, l'employeur a informé les employés d'ôter leurs effets personnels de leur bureau parce qu'on était à la recherche de dossiers et qu'on fouillerait dans chaque bureau. 

172 Mme Legault a décrit un autre incident auquel étaient mêlés quelques collègues. Une collègue a dit à une autre, en la présence de Mme Legault, qu'elle était allée prendre un café après le travail avec M. Thivierge, qui s'était montré très insistant et l'avait touchée sans arrêt. La collègue a dit qu'elle souhaitait qu'il demande à Mme Legault de sortir avec lui, puis qu'il mette fin à leur relation, afin qu'elle­même puisse commencer une relation avec lui. Cette collègue a ajouté qu'elle craignait que Mme Legault tue M. Thivierge la première fois où ils auraient des rapports sexuels, parce que cela faisait tellement longtemps qu'elle n'en avait pas eu. Les collègues ont échangé des remarques soulignant combien exigeante Mme Legault était sur ce point ainsi que des ouï-dire selon lesquels elle était une obsédée sexuelle. 

173 On a fait un commentaire selon lequel Mme Daigle transférerait peut-être Mme Legault à un autre secteur, parce qu'elle avait peur que Mme Legault s'en prenne physiquement à l'un de ses collègues. Mme Legault était bouleversée par le fait qu'on parlait ainsi d'elle et vers 9 h, elle a demandé à Mme Mahdi si elle pouvait rentrer chez elle. Mme Daigle, qui a été appelée, lui a demandé de soumettre un certificat médical si elle rentrait chez elle en congé de maladie. Puis, Mme Legault a quitté pour la journée.

174 Mme Legault s'est souvenue d'un autre incident qui est survenu le 13 juillet 1999. À 8 h, il devait y avoir une réunion du personnel de l'unité dans la salle de conférence. Juste avant la réunion, Mme Legault s'est rendue à la porte de la salle des dossiers adjacente à la salle de conférence. Dans la salle des dossiers, il y avait six étudiants qui y travaillaient avec l'un des préposés. L'une de ses collègues de l'unité, Mme Moreau, est venue vers elle et l'a éloignée de la porte en tirant sur le dessus de la manche gauche de sa blouse. Mme Moreau a dit à Mme Legault qu'elle [traduction] « n'avait pas le droit d'y entrer et de parler à ces gens; vous n'avez pas le droit de parler à quiconque; vous ne connaissez personne qui s'y trouve; vous êtes censée vous trouver dans la salle de conférence avec les autres pour assister à la réunion ». Mme Moreau a tiré sur le dessus de sa blouse, qui est sortie de sa jupe. Mme Legault a précisé que la situation était très désagréable et qu'elle a dit à Mme Moreau de ne pas la toucher et qu'elle serait présente à la réunion dans une minute après avoir dit bonjour à quelques amis. Puis, Mme Moreau s'est tournée vers les étudiants et a dit ce qui suit : [traduction] « Est-ce qu'elle vous embête? Est-ce que je peux porter plainte à sa patronne en votre nom? » Un étudiant l'a saluée en disant bonjour tandis qu'un autre a dit [traduction] « Je ne la connais pas. Je ne veux pas lui parler ». Mme Legault a témoigné qu'elle s'est alors rendue à la réunion dans la salle de conférence. Mme Legault a identifié trois autres employés qui auraient été témoins de l'incident et a précisé qu'ils n'ont rien dit. Durant la réunion qui suivit, Mme Daigle la dévisageait. Elle s'est sentie mal à l'aise et a regardé par la fenêtre tout en écoutant la discussion. Mme Legault a ajouté qu'elle ne s'est pas plainte de l'incident.

175 Mme Legault a poursuivi son témoignage en décrivant une discussion qu'elle a eue avec Mme Daigle à propos de la signature des formulaires de demande de congé durant les mois de mai, juin et juillet 1999. La discussion portait sur la question de savoir s'il lui restait des crédits de congé de maladie et si elle était en mesure de prendre des jours de congé annuel pour couvrir les absences restantes. Elles sont arrivées à un accord, et une demande a été envoyée aux Ressources humaines. Le lendemain, Mme Mahdi a appelé Mme Legault à son bureau pour avoir une réunion avec elle à 10 h. Elle n'était pas disposée à reporter la réunion afin de permettre à Mme Legault de joindre M. Auger. Mme Mahdi a dit à Mme Legault que sa demande de congé annuel avait été refusée et l'a implorée de présenter une demande d'assurance-emploi. Mme Mahdi l'a rappelée à son bureau l'après-midi. En la présence de Mme Townley, elle a dit à Mme Legault que son rapport d'évaluation était prêt et que les résultats lui seraient communiqués le lendemain. On lui a suggéré de venir en la compagnie d'un membre de sa famille qui pourrait lui fournir un soutien. Mme Legault a précisé qu'elle essaierait de venir en la compagnie du représentant de son agent négociateur.

176 Mme Legault a présenté un document qui relate les faits qui se sont produits durant la réunion du 15 juillet 1999 (tels qu'elle s'en souvient), document qui fait partie des notes produites en tant que pièce G-49. Les notes décrivent la conversation qui a eu lieu et qui portait sur les raisons pour lesquelles on lui demandait de rentrer chez elle et d'y rester jusqu'au moment où une attestation indiquant qu'elle était apte à travailler serait fournie. On a suggéré que cela pourrait peut-être se faire en deux semaines. Mme Legault a mentionné dans ces notes que M. Auger se posait des questions sur la nature disciplinaire de la décision. Mme Legault a affirmé que Mme Townley aurait dit, en parlant de Mme Legault et de l'endroit où elle devrait s'asseoir : [traduction] « Elle pourrait sauter sur vous. Ne faites rien qui risque de la mettre en colère parce qu'elle pourrait sauter sur vous. » Mme Legault a également attribué à Mme Townley les commentaires suivants : [traduction] « Nous avons le pouvoir de la forcer à voir un médecin. Elle a fait des choses. Nous pouvons prendre de l'argent dans son compte bancaire. Nous en avons le pouvoir. Nous préférons qu'elle fasse ce qu'on lui dit de faire. »

177 Mme Legault a dit qu'après la réunion, elle n'était pas sûre si elle faisait l'objet d'une suspension ou si elle était en congé de maladie. Mme Girard, la conseillère du PAE, lui a demandé ce qu'elle ferait et l'a appelé le lendemain pour fixer un rendez-vous. Mme Legault a répondu qu'elle prendrait ses affaires et partirait. Pendant qu'elle préparait ses affaires, des collègues sont venus la voir pour lui dire qu'on leur avait dit qu'elle serait en vacances pendant deux semaines. Mme Kachra était surprise par la tournure des événements parce qu'elle lui avait donné une excellente évaluation de rendement. Mme Legault a témoigné qu'elle a gardé le contact avec Mme Girard jusque vers 2001 et a ajouté que par l'intermédiaire de celle-ci, un rendez-vous a été fixé avec la Dre Joan Lloyd-Jones, à Santé Canada, le 16 août 1999, à 7 h 45.

178 Mme Legault a témoigné que son partenaire est décédé le 29 juillet 1999, et que le lendemain, elle est allée au bureau pour obtenir les talons de chèque de paye pour des raisons liées à sa demande d'assurance-emploi. Pendant qu'elle était au bureau, elle y a rencontré Mme Albert et la fille de M. Thivierge. Ron Smith est arrivé et a commencé à parler avec Mme Albert. Il lui a demandé où elle allait avec la fille de M. Thivierge, et Mme Albert a répondu ce qui suit : [traduction] « À un endroit très spécial avec ma bonne amie [la fille de M. Thivierge]. » M. Smith lui a demandé depuis quand elle était une si bonne amie de la fille de M. Thivierge et a ajouté [traduction] « Elle ne vous a jamais aimée. Vous êtes celle qui a mis fin au mariage de ses parents. » Mme Albert a répondu : [traduction] « Nous sommes d'excellentes amies maintenant. » Puis, M. Smith a fait un commentaire selon lequel il était fort étonné de la manière dont Mme Albert avait réussi à le faire, a demandé où était son mari et a ajouté [traduction] « A-t-il toujours l'intention d'épouser Mme Legault? ». Mme Albert a répondu ce qui suit : [traduction] « Il ne l'aime même pas. Il pense qu'elle est folle et qu'elle va faire du tort à lui et à ses enfants. » La conversation s'est poursuivie, alors que M. Smith a accusé Mme Albert d'être méchante envers Mme Legault et d'être jalouse d'elle. Mme Legault a témoigné qu'elle a assisté à cette conversation sans dire quoi que ce soit. Mme Legault est allée saluer des collègues pour les informer que son fiancé était décédé. Elle a été arrêtée par un gardien de sécurité qui lui a dit qu'il avait reçu l'ordre de prendre son laissez-passer et de l'escorter jusqu'à la sortie de l'immeuble.

179 Mme Legault a témoigné qu'elle s'est rendue au rendez-vous avec la Dre Lloyd­Jones le 16 août 1999. Mme Legault était surprise par les questions qu'elle lui posait et a remarqué qu'elle feuilletait un document en même temps. Elle a demandé ce que c'était et a découvert qu'il s'agissait d'un rapport que l'employeur lui avait envoyé. La Dre Lloyd­Jones lui a permis d'y jeter un coup d'oil, mais a précisé que si elle souhaitait en obtenir une copie, elle devrait en faire la demande au ministère. La DreLloyd-Jones a expliqué également à Mme Legault que même si elle ne semblait pas déprimée ou qu'elle ne prenait aucun médicament, elle serait obligée de la diriger vers le Dr Peter Ely en raison du contenu du rapport. La Dre Lloyd­Jones a envoyé une lettre au Dr Ely (pièce G-52). L'évaluation devait être effectuée le plus rapidement possible, en raison des graves difficultés financières auxquelles faisait face Mme Legault. Mme Legault ne savait pas comment la Dre Lloyd­Jones était au courant de ses graves difficultés financières, puisque ce fait n'était pas indiqué dans le rapport et qu'elle n'y avait fait aucune allusion, de quelque façon que ce soit.

180 Mme Legault a témoigné que le lendemain, elle a présenté une demande en vue d'obtenir une copie du rapport. Le 26 août 1999, Larry Dress lui a demandé de la suivre au bureau de Santé Canada pour remplir une deuxième demande. Puis, il a jeté les deux premières demandes à la poubelle.

181 Mme Legault lui a dit ensuite qu'elle voulait remplir une troisième demande. Le 31 août 1999, elle a reçu une copie du rapport.

182 Lors de son témoignage, Mme Legault a déclaré que le 26 août 1999, Suzanne Bertrand, du bureau de la Dre Lloyd-Jones, lui a posé la question suivante : [traduction] « Avez-vous reçu ma lettre concernant le rendez-vous avec le Dr Ely? » (pièce G-51). Mme Legault a répondu qu'elle ne l'avait pas reçue. On lui a donné alors une copie de la lettre précisant la date du rendez-vous (pièce E-13) et on lui a demandé si elle pouvait se présenter au rendez-vous le lendemain. Elle a répondu qu'elle ne pouvait pas et a demandé qu'un nouveau rendez-vous soit fixé. Mme Bertrand lui a dit que ce n'était pas un problème et a précisé que le ministère ne serait pas facturé, étant donné que l'erreur avait été commise par le cabinet. L'évaluation a été reportée au 7 septembre 1999.

183 Le 3 septembre 1999, Mme Legault est allée chercher la lettre concernant le rendez-vous avec le Dr Ely. Puis, elle s'est rendue au cabinet du Dr Ely pour fixer un nouveau rendez-vous, car le rendez-vous fixé à l'origine ne lui convenait pas, du fait qu'il y avait un problème lié à la succession de son fiancé. La secrétaire lui a dit qu'il n'y aurait aucun problème à fixer un nouveau rendez-vous puisqu'elle en était avisée 48 heures avant le premier rendez-vous. La secrétaire a indiqué qu'elle devait appeler Mme Bertrand d'abord et qu'elle l'appellerait ensuite pour l'informer de la nouvelle date. Mme Legault a indiqué qu'elle n'a jamais reçu cet appel. Le 7 septembre 1999, elle est allée au rendez-vous. Elle a appuyé sur la sonnette, du fait que la porte était verrouillée. Le Dr Ely a ouvert la porte et lui a demandé son nom et son identité. Il a dit à Mme Legault qu'il ne pouvait pas la recevoir cette journée-là. Elle a informé le Dr Ely qu'elle avait tenté de changer le rendez-vous le vendredi précédent mais qu'elle n'avait reçu aucune confirmation de sa secrétaire. Il lui a dit de rappeler Mme Bertrand. Mme Legault a précisé qu'elle a suivi ses instructions, mais qu'on lui a dit qu'on ne fixerait pas un autre rendez-vous, étant donné qu'elle avait manqué les deux précédents. On lui a dit qu'il n'était pas approprié pour elle de se rendre au cabinet du Dr Ely pour changer le rendez-vous. Elle aurait dû passer par le ministère ou par Santé Canada.

184 Mme Legault a également témoigné que son propre médecin a indiqué qu'elle était apte à travailler. La correspondance demandant à son médecin d'évaluer sa capacité de retourner au travail et sa réponse ont été déposées comme preuves (pièces G-53 et G-54). Elle a également reçu une copie d'une lettre datée du 16 septembre 1999, envoyée par la Dre Lloyd-Jones à Mme Townley (pièce E-15), dans laquelle la Dre Lloyd-Jones demandait une autre évaluation.

185 Mme Legault a témoigné que le 29 septembre 1999, elle a pris un rendez-vous pour voir son dossier en la présence de M. Auger et de Mme Townley. Au moment de l'examen du contenu de la lettre de Mme Townley datée du 15 septembre 1999 (pièce E-14), Mme Legault s'inquiétait du fait que le ministère considérait les rendez-vous annulés comme des rendez-vous manqués. Elle a eu une discussion avec Mme Townley. Elle lui a expliqué qu'elle s'était rendue au cabinet du Dr Ely le 7 septembre 1999 pour fixer un nouveau rendez-vous. Mme Townley a dit que le ministère n'était pas disposé à fixer un nouveau rendez-vous. M. Auger est intervenu, mais Mme Townley maintenait catégoriquement que le ministère n'était pas disposé à fixer un autre rendez-vous. Selon Mme Legault, il y a ensuite eu une discussion portant sur les options que la Dre Lloyd-Jones lui avait présentées et sur des allégations selon lesquelles le ministère aurait reçu des appels téléphoniques de la belle-famille de Mme Legault.

186 Mme Legault a témoigné qu'après cette réunion, elle est allée voir son médecin, la Dre Adamowski, et il a été décidé qu'elle irait voir un psychiatre, le Dr Jean Ouellette. Elle a aussi reçu une lettre de Mme Townley, datée du 16 octobre 1999, lui expliquant les options qui s'offraient à elle (pièce E-16). Elle a visité le DrOuellette deux ou trois fois d'octobre à décembre 1999. Le docteur lui a dit qu'il rédigerait un rapport indiquant qu'elle était apte à retourner au travail et lui a demandé quand le rapport était requis.

187 Mme Legault a témoigné qu'elle avait déposé un grief et que la réponse à celui-ci est arrivée le jour où elle a reçu la lettre de Mme Townley datée du 16 octobre 1999. Elle a discuté de la question avec M. Auger, et ils ont décidé de renvoyer le grief au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs et de présenter le rapport à l'audience au deuxième palier. Le rapport coûtait entre 300 $ et 600 $, et Mme Legault touchait de l'assistance sociale. Mme Legault a également indiqué que M. Auger lui a demandé de reporter l'audience au deuxième palier, étant donné qu'elle n'avait pas de rendez-vous avec le psychiatre à ce moment précis. Étant donné qu'elle recevait de l'assistance sociale, Mme Legault a décidé de chercher un emploi dans le secteur privé.

188 Mme Legault a témoigné qu'elle a accepté un poste de préposée aux soins de santé dans une entreprise de soutien à domicile pour personnes âgées qui s'appelle Nepean Senior Home Support. Au début, il s'agissait d'un poste à temps partiel mais elle a fini par y travailler à plein temps. Elle a travaillé pratiquement à plein temps de juin 2000 à mars 2002. Durant cette période, elle louait une chambre à Gatineau, mais logeait également dans une auberge de jeunesse à Ottawa.

189 Le 15 décembre 2000, Mme Legault a déposé une plainte auprès de M. Tamagno, alléguant qu'elle était victime de harcèlement et de discrimination (pièce G-23) de la part d'employés du service des PIAE. Mme Legault a indiqué que l'entreprise Quintet Consulting avait été engagée pour mener une enquête après qu'elle eut déposé une plainte contre Mme Townley et 11 autres employés du ministère. Le [traduction] « Rapport d'examen de la plainte » a été produit en tant que pièce G-50.

190 Mme Legault a ajouté qu'en septembre 2000, elle a déposé une plainte contre l'employeur auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP), mais la CCDP a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment de preuves pour donner suite à la plainte. En février 2001, Mme Legault a déposé une plainte auprès du Commissariat à la protection de la vie privée. De nouveau, on a décidé que sa plainte n'était pas fondée. Elle a également déposé des plaintes auprès du Service de la police d'Ottawa (pièce G-25) et auprès de la GRC (pièce G-20) en novembre 2000.

191 Mme Legault a ensuite décrit plusieurs incidents allégués qu'elle mentionnait dans sa lettre à la GRC. Parmi ces allégations, il y avait des ouï-dire voulant qu'elle aurait accusé Mme Daigle d'amener une arme à feu au bureau, que l'employeur faisait courir des rumeurs selon lesquelles Mme Legault aurait menacé M. Thivierge et ses enfants, et qu'elle était folle. La GRC a répondu que les allégations ne relevaient pas de sa compétence. Mme Legault a également témoigné que, plus ou moins à la même époque, en novembre 2000, elle a déposé une plainte auprès du bureau de la sécurité à Place du Portage. Elle a précisé que le rapport d'enquête avait été déposé en tant que pièce G-5.

192 Elle a décrit, en détail, des allégations selon lesquelles une disquette aurait été volée de sa chambre à Gatineau et qu'une personne, qu'elle a décrite comme étant le petit ami de Mme Ladouceur, était impliquée. Elle a précisé que la disquette a apparemment été retrouvée sur un banc à Place Vanier et a fini par lui être retournée. La disquette renfermait les lettres de réclamation qu'elle avait envoyées à différents fonctionnaires. Elle a déposé une plainte auprès du Service de la police de Gatineau le 26 avril 2001 (pièce G-26). Pendant qu'elle était au Centre d'emploi dans l'ouest de la ville, elle a entendu quelqu'un du nom de Frank Ranger parler à l'un de ses amis, lui disant qu'il avait reçu une importante somme d'argent pour voler la disquette et qu'il avait eu de nombreuses rencontres avec le directeur du service des PIAE. Par la suite, on lui avait offert un poste au service des PIAE. Mme Legault a décrit une situation où des personnes qui avaient retenu ses services pour qu'elle aide une personne âgée ont commencé à recevoir des appels téléphoniques les informant qu'elle était folle et que sa voiture était sale. Elle a décrit une autre situation où deux personnes qui travaillaient avec elle au River Park Retirement Home avaient été payées pour la prendre en filature et que l'une d'elles s'était vu offrir un poste de PM­2 au service des PIAE.

193 Mme Legault a témoigné que durant la première semaine d'avril 2001, elle a loué un lit dans une auberge de jeunesse à Ottawa. Un jour de cette semaine-là, pendant qu'elle s'enregistrait à la réception, la secrétaire de Mme Mahdi, Mme Parson, a appelé et a parlé au préposé à la réception. Elle a demandé si Mme Legault y logeait et, apparemment, a voulu savoir quel était le numéro du lit loué à Mme Legault. Elle n'a pas laissé de message. Mme Legault a ajouté que quelques jours plus tard, toujours à l'auberge, elle a remarqué que Steven Mahdi entrait dans le bâtiment et a demandé à connaître le numéro du lit qui lui avait été attribué. Cependant, lorsqu'il a vu Mme Legault, il a quitté les lieux. Elle s'est souvenue aussi d'un autre incident impliquant une personne portant le nom de « Jaffa », qui affirmait avoir été payé pour la trouver.

194 Mme Legault a témoigné que le 15 avril 2001, pendant qu'elle était dans un magasin à Hawkesbury, elle a rencontré trois adultes et trois enfants. Une personne s'est présentée comme la mère de M. Thivierge. Elle était accompagnée de la sour et du beau-frère de M. Thivierge et de leurs trois enfants. Mme Legault a reconnu la sour de M. Thivierge, puisqu'elle venait au bureau de temps en temps. La mère de M. Thivierge a appelé Mme Legault sa nouvelle fille et lui a souhaité la bienvenue dans la famille. Elle a dit à Mme Legault qu'elle ne voulait plus que Mme Albert l'appelle chez elle. Mme Legault a également indiqué qu'elle apercevait M. Thivierge à l'occasion à Hawkesbury, mais qu'elle ne lui parlait pas.

195 Mme Legault a témoigné que le 16 avril 2001, elle s'est rendue au River Park Retirement Home. Lorsqu'elle est passée devant le bureau de M. Tate, elle a vu que Mme Mahdi et Mme Albert y étaient assises. Elles ne l'ont pas vue. Mme Legault a entendu Mme Mahdi dire à M. Tate qu'elle était sale, répugnante et folle.

196 Mme Legault a témoigné que le 18 mai 2001, pendant qu'elle travaillait dans un domicile sur Grenadier Way à Barrhaven et qu'elle y nettoyait des fenêtres, elle a entendu la voisine, Julie Rollwagen, parler au téléphone pendant qu'elle se trouvait sur le porche. Cette personne répétait à voix haute ce qu'on lui disait au téléphone, ce qui lui a permis de savoir le sujet de la conversation. Après que la voisine eut dit à son interlocuteur [traduction] « Elle est ici. », l'autre personne a dit [traduction] : « Vous allez dire au tribunal qu'elle est un danger pour la société, qu'elle est dangereuse et qu'il faut l'enfermer et la placer dans une institution. » Lorsque la voisine s'est rendu compte que Mme Legault écoutait la conversation, elle est rentrée dans sa maison.

197 Mme Legault a également témoigné à propos d'un autre incident qui est survenu durant l'été de 2001 au bureau de poste de Beechwood. Lorsqu'elle s'est présentée au comptoir pour y obtenir une lettre recommandée, la préposée lui a dit d'attendre parce qu'elle parlait au téléphone. La préposée répétait à voix haute ce que la personne, une femme, lui disait au téléphone. La femme a dit ceci : [traduction] « Est-elle venue chercher son courrier recommandé? » et [traduction] « Elle m'a menacée ainsi que mes enfants. J'ai peur d'elle ». La préposée a dit qu'il ne s'agissait pas d'un bon moment pour parler et a mis fin à la conversation. Mme Legault a supposé qu'il s'agissait de Mme Albert.

198 Mme Legault a témoigné qu'à partir de mars 2001, pendant qu'elle travaillait sur Grenadier Way, elle a remarqué qu'une voiture était stationnée en face de la maison, de l'autre côté de la rue. Chaque fois qu'elle regardait dans cette direction, elle voyait qu'il y avait un homme assis dans la voiture. Lorsqu'elle quittait à bord de sa voiture, il la suivait. Un jour, elle a décidé d'aller lui demander ce qu'il faisait là, mais il est parti à bord de sa voiture. Puis, elle l'a suivi jusqu'à un dépanneur. Il semblait nerveux. Elle a pris en note sa plaque d'immatriculation, et il a arrêté de la suivre.

199 En mars 2001, au moment où elle se rendait au Commissariat à la protection de la vie privée, elle était suivie par une petite voiture sur laquelle apparaissait le logo Ensign Security. Le même type d'incident est survenu avec une voiture de Pinkerton. Une voiture de Burns International l'a également suivie. Lorsqu'elle est entrée dans un hôtel, l'homme dans la voiture l'a suivie et est allé parler au réceptionniste. Puis, Mme Legault est entrée dans l'ascenseur. Mme Legault a ajouté que lorsqu'elle louait une chambre à l'auberge de jeunesse, des voitures de Burns International, de Pinkerton et de Ensign Securities étaient toujours stationnées à l'extérieur.

200 Mme Legault a également témoigné que durant l'été de 1999, pendant qu'elle touchait de l'assistance sociale, un voisin a porté plainte à son sujet à la banque alimentaire en disant qu'elle avait de l'argent, puisqu'elle réparait son porche. Elle a également remarqué que ce voisin la suivait. Elle a décidé à un certain moment d'aller lui parler et s'est rendue à son domicile. Elle lui a demandé pourquoi il déposait des plaintes à son sujet. Il lui a dit que c'était pour l'empêcher de se marier avec [traduction] ce « gars ». D'après Mme Legault, cette personne continue de la surveiller.

201 Mme Legault a parlé d'un incident qui est survenu au Centre d'emploi du Centre commercial de Lincoln Fields lorsqu'elle y utilisait un ordinateur pour rédiger sa lettre de réclamation adressée à la ministre Stewart. Une personne qui s'est présentée comme M. Mahdi lui a dit qu'il l'avait surveillée toute la matinée et qu'il voulait la disquette qu'elle avait utilisée, puisqu'il avait vu son nom à l'écran de l'ordinateur. Il a saisi la disquette et est parti en courant. Mme Legault n'a jamais récupéré la disquette. Mme Legault a également identifié un certain nombre de personnes qui avaient reçu des appels téléphoniques leur demandant de la congédier. C'est à ce moment­là qu'elle décida de distribuer les lettres dans le quartier de Barrhaven.

202 Mme Legault témoigné avoir reçu une lettre de M. Migus mettant fin à son emploi le 5 mai 2001 (pièce E-17). À ce moment­là, elle ne voyait pas pourquoi il serait nécessaire pour elle d'essayer de rencontrer l'employeur pour parler avec lui du grief qu'elle avait déposé, étant donné que l'employeur avait pris sa décision. Elle a décidé d'attendre l'audience au troisième palier. Elle n'a pas reçu de lettre indiquant quand cette audience aurait lieu. On est arrivé à une décision en son absence et elle a reçu la réponse au dernier palier le 22 novembre 2002.

203 Mme Legault a témoigné qu'elle n'avait pas de rapport psychiatrique au moment où son grief a été entendu au troisième et dernier palier de la procédure de règlement des griefs. Le représentant de son agent négociateur lui avait conseillé de trouver un emploi à l'extérieur du gouvernement pour prouver qu'elle était capable de travailler. Elle aurait reçu le même conseil du Dr Ouellette. En ce qui concerne les accusations criminelles portées contre elle, elles ont toutes été annulées.

204 Durant le contre­interrogatoire, Mme Legault a indiqué que la Dre Lloyd-Jones lui a dit qu'elle avait décidé qu'elle était incapable de travailler à cause du rapport qu'elle avait reçu de son employeur. Mme Legault a précisé que selon elle, le rapport n'était pas une preuve médicale, mais renfermait plutôt des ouï-dire. Elle a ajouté qu'elle n'avait pas de rendez­vous avec le Dr Callary le 27 août 1999, mais qu'elle avait un rendez-vous avec le Dr Ely le 7 septembre 1999. Elle est allée au rendez-vous, mais le Dr Ely a refusé de la laisser entrer. Elle lui a dit qu'elle s'était rendue à son cabinet le 3 septembre 1999 pour changer le rendez­vous, mais il refusait toujours de la laisser entrer. Mme Legault a confirmé que la secrétaire du Dr Ely devait appeler la secrétaire de la Dre Lloyd-Jones et qu'elle la rappellerait. Elle n'a pas reçu d'appel et elle est donc allée au rendez-vous du 7 septembre 1999. Lorsqu'on l'a interrogée au sujet de la pièce E-13, Mme Legault a répondu qu'elle avait appelé Mme Bertrand, qui lui avait dit qu'elle appellerait l'employeur. À la question de savoir si elle avait envoyé une réponse à la lettre précisant qu'elle avait manqué le rendez­vous avec le Dr Ely (pièce E­14), elle a répondu qu'elle­même et M. Auger ont parlé à Mme Townley le 29 septembre 1999. Mme Legault a ajouté que durant cette conversation, on lui a dit de ne pas aller au cabinet du Dr Ely, qu'il était un consultant payé par l'employeur et qu'elle n'avait pas le droit de changer le rendez­vous ni de se présenter à son cabinet. Elle ne savait pas quoi faire.

205 Mme Legault a témoigné que les options qu'on lui a données ont fait l'objet de discussions avec Mme Townley et avec M. Auger. Elle n'a pas répondu par écrit à la lettre (pièce E-16) de Mme Townley expliquant ces options. Elle a dit à Mme Townley qu'elle passerait par son médecin de famille et qu'elle avait fixé un rendez­vous à cette fin en janvier 2000. M. Auger en a informé Mme Townley, ce qui est confirmé par un courriel (pièce G-34). Mme Legault a indiqué que c'était sur le conseil de M. Auger qu'elle avait décidé d'attendre jusqu'à l'audience de deuxième palier pour fournir un rapport du psychiatre. Ils craignaient que Santé Canada refuse le rapport.

206 Lorsqu'on lui a demandé si elle n'avait jamais envoyé un rapport du Dr Ouellette, Mme Legault a répondu que, lorsqu'elle a vu le Dr Ouellette, celui-ci lui a dit d'aller travailler en dehors du gouvernement pour prouver qu'elle était apte à travailler. Elle a ajouté que son médecin, la Dre Adamowski, a dit qu'elle était apte à travailler mais que son employeur n'était pas d'accord (pièce G-33). Elle a confirmé que le Dr Ouellette n'a jamais dressé un rapport parce qu'elle ne lui a pas demandé de le faire. Elle devait prouver qu'elle était apte au travail en trouvant un emploi à l'extérieur du gouvernement. Durant l'été 2000, il y a eu un certain nombre d'incidents avec l'employeur. Elle a été harcelée et placée sous surveillance. Elle a vu le Dr Ouellette quatre ou cinq fois. Elle n'a pas eu de contact avec l'employeur, jusqu'au moment où elle a reçu la lettre de licenciement en mai 2001. Elle n'a pas assisté à l'audience de troisième palier avec M. Migus.

207 On a présenté à Mme Legault les plaintes qu'elle avait déposées auprès de la GRC (pièce G-20), de la ministre Stewart (pièce G-21) et de M. Tamagno (pièce G-23). Lorsqu'on lui a demandé si elle pensait toujours que les allégations étaient véridiques, Mme Legault a répondu qu'elle pensait qu'elles l'étaient.

208 Durant le réinterrogatoire, Mme Legault a indiqué que certaines des allégations étaient à caractère criminel et que [traduction] « beaucoup de choses s'étaient produites ». Son intention à l'audience n'était pas de prouver les plaintes. Elle ne cherchait aucunement à prouver ou à réfuter ce que les témoins avaient affirmé.

209 Mme Legault a appelé la Dre Evelyne Girard à témoigner. La Dre Girard a indiqué qu'elle est maintenant docteur en psychologie clinique, mais qu'à l'époque où elle recevait la visite de Mme Legault, elle était conseillère du PAE à RHDC. Elle a obtenu son doctorat en novembre 2000.

210 La Dre Girard a témoigné que l'employeur lui avait demandé de voir Mme Legault. À l'époque, son rôle était d'aider des employés dans le cadre du PAE, de fournir un soutien aux gestionnaires, de donner de l'information de prévention, de fournir des services de médiation et de soumettre des rapports.

211 La Dre Girard ne se souvenait que vaguement de sa première rencontre avec Mme Legault. Elle a indiqué que Mme Daigle avait renvoyé d'autres employés vers elle. Elle se souvenait d'avoir assisté à une réunion avec Mme Legault, Mme Mahdi et Mme Townley mais ne se souvenait pas exactement de ce qui s'était passé à cette occasion. Le 15 juillet 1999, à la demande de Mme Townley, elle a appelé l'avocat de Mme Legault pour vérifier l'existence du partenaire de celle­ci. Elle s'est souvenue aussi d'une réunion dans la salle de conférence au deuxième étage, où il était question d'un congé pour raisons familiales. Elle se souvenait que Mme Legault avait dit que ce n'était pas nécessaire, mais ne se rappelait pas que Mme Townley aurait dit que le compte bancaire de Mme Legault serait saisi ou que son salaire arrêterait d'être versé à compter de ce jour­là.

212 La Dre Girard se souvenait que Mme Townley lui a demandé d'informer Mme Legault de ses rendez­vous. On ne lui a pas demandé d'évaluer l'aptitude au travail de Mme Legault.

213 Lorsqu'on lui a demandé de parler d'un échange de courriels avec M. Thivierge qui avait été porté à son attention (pièce G-30), la Dre Girard a répondu qu'elle ne s'en souvenait pas comme tel, mais qu'elle se rappelait le contexte. À son avis, le lien avec le problème du retour au travail était ténu. D'après elle, il s'agissait d'une réaction à un décès et d'une demande de s'absenter du travail. Elle n'a participé à aucune des discussions ayant trait à M. Thivierge. Elle a insisté que son rôle n'était pas de fournir un diagnostic mais d'aider l'employée. Elle se souvenait qu'on avait interdit l'accès à l'immeuble à Mme Legault. Elle avait cru comprendre que Mme Legault n'aurait pas accès aux lieux de travail jusqu'au moment où l'on déterminerait qu'elle était apte au travail.

214 La Dre Girard a témoigné qu'elle a continué à rencontrer Mme Legault à différents endroits après le 15 juillet 1999, à sa demande. Mme Legault communiquait avec elle pour vérifier l'évolution de son cas.

215 Durant le contre­interrogatoire, la Dre Girard a confirmé qu'on ne lui avait jamais dit de ne pas offrir ses services à Mme Legault.

216 Mme Legault a demandé à la Dre Susan Adamowski de témoigner. La Dre Adamowski est un médecin de famille qui exerce à Vanier. Elle a déclaré que Mme Legault est une patiente à la clinique où elle travaille depuis 1979 et que Mme Legault était sa patiente de juillet 1998 à avril 2001.

217 La Dre Adamowski a témoigné que durant les mois de juin, juillet et août 1999, elle a reçu la visite de Mme Legault à 11 occasions différentes. Elle ne se souvenait pas d'avoir eu une conversation avec la Dre Lloyd-Jones mais se rappelle qu'il y avait eu un échange de correspondance (pièces G-53 et G-54). Lorsqu'on lui a demandé de faire des commentaires à propos de sa note datée du 31 août 1999 selon laquelle Mme Legault était apte à retourner au travail, la Dre Adamowski a précisé qu'elle parlait du fait que Mme Legault avait eu des problèmes médicaux mineurs qui n'étaient pas particulièrement sévères. En réponse aux questions de Mme Legault, qui lui demandait si un quelconque grave problème empêcherait son retour au travail, la Dre Adamowski a répondu que rien ne l'empêchait de retourner au travail, du point de vue médical.

218 Durant le contre­interrogatoire, lorsqu'on lui a demandé de fournir les détails de son diagnostic, la Dre Adamowski a indiqué que la patiente souffrait d'insomnie, de pression artérielle élevée, d'anxiété, d'une infection à la vessie et du syndrome de l'oil sec. Lorsqu'on lui a demandé de parler des graves tensions psychologiques mentionnées, la Dre Adamowski a confirmé qu'elle ne donnait pas un avis sur l'état psychologique de Mme Legault. Elle ne connaissait pas le Dr Ouellette, mais lui a renvoyé le cas de Mme Legault, à la suggestion de cette dernière. Elle ne savait pas la raison pour laquelle Mme Legault a arrêté de lui rendre visite en avril 2001. En parlant de ses notes (pièce G-59), la Dre Adamowski a indiqué qu'un grand nombre des questions soulevées par Mme Legault en ce qui concernait sa situation portaient à confusion.

219 La Dre Adamowski a indiqué qu'elle a renvoyé Mme Legault au Dr Ouellette. Elle pensait que ce renvoi était nécessaire afin de permettre à Mme Legault d'acquérir les outils qui lui permettraient de faire face au stress et au harcèlement qu'elle subissait à la fois au travail et de la part de la famille de son défunt fiancé.

220 Mme Legault a demandé au Dr Jean Ouellette de témoigner. Le Dr Ouellette est un psychiatre qui exerce à Hawkesbury, en Ontario.

221 Le Dr Ouellette a témoigné qu'il a vu Mme Legault pour la première fois le 12 décembre 1999. Elle voulait obtenir une évaluation indépendante de sa capacité à travailler. Il a effectué l'évaluation, ce qui s'est avéré être un long processus. Il a rencontré Mme Legault à deux autres occasions, soit le 3 et le 31 janvier 2000. L'évaluation était toujours incomplète et il n'a pas porté de diagnostic. L'évaluation devait continuer et, pendant un an et demi, des rendez­vous étaient fixés, mais Mme Legault les a tous annulés. Les raisons données pour les annulations étaient qu'elle avait commencé à travailler et qu'elle était trop occupée. Il s'est souvenu qu'au début de janvier 2000, elle lui a apporté un document de 103 pages. Il lui a demandé de le résumer en deux pages et elle lui a présenté un document lors de son dernier rendez­vous le même mois. Le Dr Ouellette a indiqué qu'après un an et demi, l'évaluation a été abandonnée. Plus tard, en 2003, Mme Legault est revenue et a demandé une évaluation. Il avait toutefois changé de travail et ne pouvait accéder à sa requête, et il l'a donc orientée ailleurs. Lorsque Mme Legault lui a demandé s'il pouvait lui fournir une évaluation tout de suite, le Dr Ouellette a refusé, en précisant que trop de temps était passé depuis qu'il l'avait vue.

222 Mme Legault a demandé au Dr Ouellette de se prononcer sur son niveau de fonctionnement sans fournir de diagnostic quand il l'a vue à la fin de 1999 et au début de 2000 en utilisant l'[traduction] « Échelle d'évaluation globale du fonctionnement » (pièce G-60). Le Dr Ouellette a précisé que cette échelle est utilisée par les psychiatres pour établir le niveau de fonctionnement d'une personne.

223 Le Dr Ouellette a témoigné qu'il avait constaté qu'il y avait de nombreux facteurs de stress et que la patiente réagissait à ces facteurs. Parmi ces facteurs de stress, il y avait le décès de son fiancé, le conflit avec ses beaux­parents et le conflit avec sa supérieure. Elle s'était fiancée au moment où elle avait su que son fiancé était mourant. Elle s'est occupée de lui jusqu'à son décès. Elle avait souffert d'une infection rénale en février­mars 1999. Elle faisait face également à un conflit au travail et avait été forcée de quitter son emploi. Lorsqu'elle venait le voir, Mme Legault recevait de l'assistance sociale, souffrait du diabète, visitait la banque alimentaire et avait de graves soucis financiers. Il a également constaté des symptômes causés par ces facteurs de stress, comme de la fatigue et un manque d'énergie. Elle exprimait de l'amertume en ce qui concernait les événements qui l'avaient forcée à quitter son travail. Elle n'était pas découragée et n'avait pas de pensées suicidaires, et il n'y avait pas d'indications chez elle d'un abaissement de soi ou de sentiments de culpabilité. Il n'a pas constaté de psychose ni un manque de contact avec la réalité. Sa mémoire était bonne et elle tenait des propos cohérents. Il lui aurait donné 75 sur l'échelle. Évaluant sa situation durant les mois précédents, le Dr Ouellette a précisé que son niveau se situait probablement à 58 à ce moment-là et qu'elle avait des crises de panique et d'hyperventilation. S'il ôtait les facteurs de stress liés au travail, il l'évaluerait à 65. À son avis, le conflit au travail rendait son cas plus sévère qu'il ne l'aurait été si ce conflit n'avait pas existé. Pour faire son évaluation, il s'est fondé sur de l'information fournie par Mme Legault durant ses rendez­vous, qui duraient une heure et demie chacun. Il n'était pas en mesure d'évaluer son niveau de fonctionnement actuel. Le Dr Ouellette a indiqué que lorsqu'une personne obtient 75 à l'échelle, elle est considérée comme apte à travailler; en dessous de 60, la personne a d'importants problèmes avec ses collègues.

224 Durant le contre­interrogatoire, le Dr Ouellette a indiqué qu'avant de témoigner à l'audience, il avait passé en revue les notes qu'il avait prises. Il ne pouvait apporter avec lui le dossier, puisque celui­ci appartenait à l'hôpital.

225 Lorsqu'on lui a demandé ce qu'il restait à évaluer pour conclure l'évaluation, le Dr Ouellette a répondu qu'il avait besoin de comprendre les motifs derrière les conflits impliquant Mme Legault. Une question serait de savoir pourquoi elle était retournée vivre avec son fiancé si sa relation avec lui était difficile. L'évaluation était difficile à effectuer dès le départ, puisqu'elle résultait d'une requête faite par l'employeur et que Mme Legault hésitait à être franche, puisqu'elle craignait que l'employeur se serve peut­être des résultats contre elle. Il était difficile d'établir une relation de confiance avec elle. Elle faisait, par exemple, l'affirmation suivante : [traduction] « Vous découvrirez des problèmes, et ils s'en serviront contre moi. » Le Dr Ouellette a indiqué que pour pouvoir faire une évaluation, le patient doit être honnête et sincère. Dans le cas de Mme Legault, elle voyait l'évaluation comme quelque chose qui pourrait se retourner contre elle.

226 Lorsqu'on lui a demandé comment il pouvait établir son aptitude à travailler en dépit de ce problème, qui était présent dès le départ, le Dr Ouellette a admis qu'il ne pouvait le faire. Il a indiqué qu'il ne s'agissait cependant pas d'un problème insurmontable. Il aurait fallu plus de temps pour effectuer l'évaluation. L'évaluation qu'il avait faite plus tôt durant son témoignage était basée sur les observations qu'il avait faites à l'époque, et ces observations étaient incomplètes. Il n'aurait pas présenté un rapport écrit en se fondant sur ses observations, puisque le degré d'incertitude était trop important, et il n'aurait pas pu assumer la responsabilité pour le retour au travail de Mme Legault. Ce qu'il restait à faire était de remettre en question les affirmations que Mme Legault présentait comme des faits. Lorsqu'il avait tenté d'explorer ces faits, elle lui avait dit qu'il cherchait à trouver des problèmes. Il continuait à essayer de comprendre les faits avant de les remettre en question.

227 Le Dr Ouellette a indiqué qu'il ne savait pas qu'elle avait allégué qu'une supérieure disposait d'une arme à feu, que sa superviseure s'était introduite par effraction dans son domicile ou qu'elle avait une relation personnelle avec M. Thivierge. Il savait qu'elle avait allégué qu'une caméra avait été installée pour la surveiller au travail. Le Dr Ouellette a indiqué que la prochaine étape pour lui serait d'explorer ses motifs et d'essayer de déterminer son contact avec la réalité. Il n'était pas dans une position lui permettant d'évaluer sa capacité à travailler, mais s'il se fondait sur l'information limitée obtenue à l'époque, il lui attribuerait la cote de 75 sur l'échelle. Il a admis que son avis était fourni sans qu'il sache en quoi consistait la réalité objective.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour l'employeur

228 L'avocat de l'employeur a indiqué que Mme Legault avait déposé deux griefs : l'un alléguant qu'elle avait été victime d'une mesure disciplinaire déguisée, puisque l'employeur avait refusé de lui permettre d'accéder aux lieux de travail, et l'autre, après son licenciement.

229 En ce qui concerne le premier grief, l'avocat a déclaré qu'il n'y avait aucune preuve qui permettrait de conclure que la mesure prise par l'employeur était une mesure disciplinaire déguisée. La décision de l'employeur était fondée sur le besoin de faire effectuer une évaluation visant à établir si Mme Legault était apte au travail. Elle n'avait pas commis d'actes répréhensibles et il n'était pas nécessaire de la punir. Il s'agit d'un cas ayant trait au droit de l'employeur d'exiger qu'un employé ou une employée montre qu'il ou qu'elle est apte à travailler. L'employeur avait des motifs raisonnables de soupçonner que Mme Legault n'était pas apte à travailler. Un employé a le droit de refuser de se soumettre à une évaluation d'aptitude au travail effectuée par Santé Canada, mais il le fait à ses propres périls. Un employé ne peut retourner au travail jusqu'au moment où il a obtempéré ou a pris d'autres mesures pour résoudre la situation. S'il reste des congés de maladie au crédit de l'employé, l'employé sera en congé de maladie rémunéré; autrement, il est placé en congé de maladie non rémunéré. Selon l'avocat, la preuve montre qu'il y avait des motifs raisonnables justifiant la décision de l'employeur.

230 L'avocat a fait valoir que les éléments de preuve postérieurs au licenciement en l'espèce sont utiles pour déterminer si les décisions de l'employeur étaient raisonnables en juillet 1999 et en avril 2001. S'il y a des doutes quant à la véracité des faits présentés par les témoins appelés par l'employeur, il est utile d'examiner les éléments de preuve concernant tous les événements qui sont survenus depuis le licenciement. L'avocat a mentionné les lettres distribuées à Barrhaven après le licenciement et a précisé que cette preuve aidait à déterminer si l'on devait croire les faits relatés par l'employeur ou plutôt ceux relatés par Mme Legault.

231 L'avocat a déclaré que l'ensemble de la preuve appuie la conclusion de l'employeur en ce qui a trait aux événements de 1999. Les incidents qui sont survenus au travail ont amené l'employeur à douter de l'aptitude au travail de Mme Legault.

232 L'employeur ne savait pas et ne sait toujours pas de quelles maladies Mme Legault souffrait ou souffre, si maladie il y a. Tout ce que l'employeur sait découle de l'observation de son comportement sur les lieux de travail. L'employeur hésitait et n'était pas convaincu de l'aptitude de Mme Legault à être au travail. Si Mme Legault souffrait effectivement d'une maladie ou avait un problème médical, l'employeur ne sait pas si cela faisait obstacle à l'exécution de ses fonctions ou à sa présence sur les lieux de travail. Le but du renvoi était de demander à un professionnel médical qui comprenait la nature des lieux de travail et des fonctions du poste et qui avait une connaissance des questions médicales d'examiner la situation et d'indiquer à l'employeur si l'employée était apte à travailler ou, si elle ne l'était pas, quels arrangements il y aurait lieu d'envisager.

233 L'avocat a affirmé qu'à moins que je conclue que la mesure prise par l'employeur était de nature disciplinaire, je n'ai pas compétence en la matière. En vertu de l'ancienne Loi, la compétence d'un arbitre de grief est limitée à une violation de la convention collective, à une mesure disciplinaire aboutissant à une suspension ou à une sanction pécuniaire ou à un licenciement. De l'avis de l'avocat, si je décide que j'ai compétence, je serais obligé de conclure que l'employeur a imposé de la discipline pour un comportement répréhensible et pour de l'insubordination en ne permettant pas à Mme Legault de retourner au travail. Si la conclusion est que l'employeur a simplement demandé qu'elle se soumette à une évaluation de son aptitude au travail et qu'il n'accepterait pas sa présence sur les lieux du travail jusqu'à ce qu'elle se soumette à une telle évaluation, je n'aurais pas compétence en la matière. L'avocat a ajouté que quoi qu'il en soit, les faits en l'espèce appuient le caractère raisonnable de la mesure prise par l'employeur.

234 En ce qui concerne le grief relatif au licenciement, l'avocat a précisé que, pendant près de deux ans, Mme Legault n'a fourni aucune information et, essentiellement, n'a coopéré d'aucune manière pour indiquer si elle ne serait jamais apte à retourner au travail. L'employeur lui a clairement communiqué les différentes options qui s'offraient à elle pour coopérer. Aucune des options n'était déraisonnable, et Mme Legault n'a jamais coopéré de quelque façon que ce soit. Lorsqu'un employé ou une employée refuse de coopérer, il ou elle le fait à ses propres périls. Si la relation d'emploi est rompue, l'employeur n'a aucunement l'obligation de garder l'employé.

235 L'avocat a ajouté que lorsqu'un employé est envoyé à la maison, l'employeur peut seulement suggérer des mesures que peut prendre l'employé pour résoudre la situation. L'employeur ne peut forcer l'employé à prendre ces mesures. Si, au bout du compte, après une période raisonnable, il n'y a toujours pas de possibilité raisonnable que l'employé soit apte à retourner au travail, l'employeur a le droit de mettre fin à la relation d'emploi. L'avocat a fait valoir qu'il y a une exigence, au moment du licenciement ou à l'arbitrage, relative au dépôt des preuves qu'un retour au travail est possible. En l'espèce, Mme Legault n'a présenté aucune preuve de ce genre.

236 L'avocat a poursuivi en indiquant que l'employeur avait agi de bonne foi et, à de nombreuses occasions, avait essayé de prendre des arrangements qui convenaient à Mme Legault. Elle a constamment refusé de coopérer ou elle a perçu les mesures prises par l'employeur comme négatives. L'avocat a passé en revue sa réponse à l'offre d'une semaine de congé pour raisons familiales, congé perçu par Mme Legault comme quelque chose de négatif.

237 L'avocat a déclaré que l'employeur avait agi de bonne foi et avait pris toutes les mesures raisonnables pour maintenir la relation, mais qu'en raison du manque de coopération de la part de Mme Legault, il n'avait pas d'autres options que celle de mettre fin à l'emploi.

238 L'avocat a fait des observations à propos de certains faits relatifs au cas. Il a fait remarquer que l'assertion de Mme Legault selon laquelle elle était peut­être victime d'une mauvaise blague n'était appuyée par aucun témoin ni aucune preuve documentaire. Rien ne vient appuyer ses affirmations, qui n'ont aucun sens. La deuxième carte qu'elle a envoyée à M. Thivierge (pièce G-29) n'a pas été envoyée parce qu'elle était poussée par d'autres personnes à le faire; cet envoi était plutôt motivé par son propre comportement. L'avocat m'a demandé d'examiner les plaintes et les nombreux documents que Mme Legault avait écrits (pièces G-20, G-21, G-23 à G-26, E-23 et E-4 à E-6) et de comparer les croyances qu'elle avait à l'époque à celles qu'elle avait aujourd'hui. L'avocat a attiré l'attention sur le haut de la page 10 de la lettre adressée à la ministre, Mme Stewart (pièce E-23), où Mme Legault déclare que M. Thivierge lui avait demandé d'emménager avec lui, qu'il était allé la voir à Hawkesbury, qu'il l'avait appelée pour lui demander de sortir avec lui et qu'il avait dit à tout le monde qu'il allait l'épouser. L'avocat a noté que ces allégations sont répétées au deuxième paragraphe, à la page 18 du même document, où elle allègue que M. Thivierge planifiait un voyage avec elle à Toronto. Il a fait observer qu'il ne s'agissait que d'un exemple des divers faits présentés par Mme Legault dans sa preuve lorsqu'elle interrogeait des témoins et dans les différentes plaintes qu'elle avait déposées. L'avocat a fait valoir qu'en dernière analyse, les commentaires de Mme Legault elle-même laissaient supposer que la décision de l'employeur était raisonnable.

239 L'avocat a ajouté que même si les faits racontés par Mme Legault comportaient peut­être quelques petits éléments de vérité, il est impossible de distinguer la vérité de la fiction. Aucun témoin appelé n'a corroboré sa version des faits. Aucune personne n'avait connaissance des circonstances ou incidents qu'elle a décrits comme étant survenus au travail.

240 L'avocat a déclaré qu'il n'est pas surprenant qu'après sept ou huit ans, certains des témoins avaient de la difficulté à se souvenir des événements. Cependant, leurs souvenirs étaient clairs en ce qui concernait les incidents inhabituels qui avaient eu lieu. Les incidents allégués par Mme Legault ne se sont pas produits. Mme Daigle se souvient clairement de ne jamais avoir apporté une arme à feu au travail. Les témoins de l'employeur n'avaient aucune raison de mentir et lorsqu'ils ne se souvenaient pas des faits, ils l'ont affirmé.

241 L'avocat a soutenu que même si Mme Legault n'était pas heureuse de l'information fournie à Santé Canada, il incombait à l'employeur de fournir autant d'information que possible afin que la décision prise puisse être une décision informée.

242 L'avocat a noté que l'affirmation faite par la Dre Adamowski selon laquelle Mme Legault était apte à travailler concernait strictement son aptitude physique. Elle ne prenait pas en considération les problèmes psychologiques qui pouvaient réduire son aptitude à exercer ses fonctions. Mme Legault a fait des allégations très inhabituelles, par exemple, en affirmant qu'aussi bien Mme Mahdi que Mme Albert étaient allées voir ses employeurs pour la discréditer ou qu'elles avaient communiqué avec le Dr Fedoroff, le psychiatre nommé par la cour. Il n'y a aucune preuve appuyant ces allégations, qui sont par ailleurs très inhabituelles. Il n'y a aucun élément de preuve confirmant que ces événements ont eu lieu.

243 En ce qui concerne la preuve fournie par le Dr Ouellette, l'avocat est d'avis que le Dr Ouellette n'était pas bien placé pour fournir une opinion médicale en 1999, 2000 ou même aujourd'hui. L'évaluation du Dr Ouellette selon laquelle il semblait que Mme Legault obtenait une cote de 75 à l'échelle d'aptitude au travail ne représentait qu'une supposition fondée sur de l'information limitée et insuffisante. Le Dr Ouellette a admis qu'il n'avait jamais terminé l'évaluation et que, dès le début, il avait des préoccupations concernant Mme Legault.

244 L'avocat a noté qu'on avait dit à Mme Legault qu'elle pouvait aller voir un médecin de son choix (pièce E-16) pour subir l'évaluation d'aptitude au travail, mais qu'elle a omis de se rendre jusqu'au bout du processus. Sans une évaluation d'aptitude au travail, l'employeur n'avait aucun renseignement sur lequel il pouvait se fonder pour déterminer si elle était apte à exercer ses fonctions. Dans ces circonstances, l'employeur pouvait uniquement conclure que la relation d'emploi était rompue pour cause d'incapacité.

245  L'avocat a fait observer que le refus d'un employé de se soumettre à une évaluation médicale ne constitue pas une raison valide justifiant la prise d'une mesure disciplinaire. L'employeur ne peut forcer un employé à se soumettre à une telle évaluation.

246 L'avocat a déclaré que l'employeur a agi en se conformant aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP). L'avocat s'est fondé sur la décision rendue dans Blackburn c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2006 CRTFP 42, où l'arbitre de grief a statué que le licenciement était justifié, du fait que le fonctionnaire s'estimant lésé n'avait fourni aucun renseignement permettant à l'employeur de conclure qu'il était apte à travailler. L'avocat a fait valoir que c'était à Mme Legault de faire le nécessaire. On l'avait informée de ses options et après presque deux ans, elle n'avait fourni aucun renseignement qui aurait permis à l'employeur d'en arriver à n'importe quelle autre conclusion. À aucun moment, d'avril 2001 à septembre 2006, Mme Legault n'a fourni de l'information qui confirmait qu'elle était apte à travailler. Elle n'a pas dit qu'elle pouvait obtenir un rapport et n'a pas demandé que l'on réexamine la décision. Elle ne l'a pas fait durant la procédure de règlement du grief ni à la présente audience. L'avocat m'a également renvoyé aux décisions Beattie c. Conseil du Trésor (Défense nationale), 2000 CRTFP 12, et Campbell c. Conseil du Trésor (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), dossier de la CRTFP 166-2-25616 (19960513).

247 L'avocat a demandé que les deux griefs soient rejetés et que la cessation d'emploi soit maintenue, du fait que cette mesure était raisonnable et conforme à la loi. Tout rétablissement causerait des difficultés à toutes les parties concernées.

B. Pour la fonctionnaire s'estimant lésée

248 En son propre nom, Mme Legault a soutenu que la lettre confirmant la décision de l'envoyer chez elle le 15 juillet 1999, signée par Mme Townley, aurait dû être signée par Mme Mahdi, qui était sa supérieure et qui avait le pouvoir délégué d'agir comme l'employeur. Mme Legault affirme que sa rémunération a pris fin le 15 juillet 1999, tel qu'indiqué dans les documents qui faisaient partie du dossier qu'elle a reçu de Mme Townley (pièce G-16).

249 Mme Legault a fait valoir qu'elle faisait l'objet d'une suspension sans rémunération. Lorsque M. Auger, le représentant de son agent négociateur, a demandé à l'employeur s'il s'agissait d'une suspension, les deux représentants de l'employeur présents ont indiqué qu'il s'agissait d'une mesure administrative. M. Auger a insisté sur le fait qu'il était censé être informé des sanctions disciplinaires et a indiqué qu'il ne l'avait pas été. De nouveau, les représentants de l'employeur ont nié qu'il s'agissait d'une suspension. Mme Legault a précisé que les documents montraient qu'il s'agissait d'une suspension, même si l'employeur le niait.

250  Mme Legault a indiqué que lorsqu'elle a rencontré Mme Townley et Mme Mahdi le 15 juillet 1999, Mme Daigle avait eu des réunions avec ses collègues et leur avait dit que Mme Legault était malade et qu'on l'envoyait à Santé Canada pour une évaluation. Selon Mme Legault, c'est ce que ses collègues lui ont dit lorsqu'elle est retournée au bureau. Elle a ajouté que la secrétaire de M. Tamagno est allée la voir et lui a dit qu'on l'avait informée qu'elle serait en vacances pendant deux semaines. Selon Mme Legault, l'employeur n'a pas suivi les procédures établies par le Conseil du Trésor relativement aux suspensions et mesures disciplinaires.

251 Mme Legault a déclaré que ce cas concerne son incapacité à remplir les fonctions de son poste de CR-4 à titre de préposée au traitement des demandes de prestations étrangères, tel qu'indiqué dans le document préparé en vue de l'évaluation de Santé Canada (pièce E3.2). Mme Mahdi avait écrit que les causes du renvoi à Santé Canada étaient son taux élevé d'absentéisme, ses problèmes de productivité et le harcèlement d'un directeur (M. Thivierge), qui avait reçu des messages et des cartes non désirés. Mme Legault a précisé qu'il s'agissait là des circonstances de la demande d'évaluation soumise à Santé Canada et qu'il s'agissait des éléments que l'employeur, en tant que première étape, devait prouver.

252 La deuxième étape pour l'employeur, toujours selon Mme Legault, était qu'il devait prouver que Mme Townley avait envoyé à cette dernière deux lettres indiquant qu'elle ne s'était pas présentée aux rendez­vous fixés par Santé Canada et qu'elle n'avait pas participé à l'évaluation qui avait pour but d'établir si elle était apte à travailler.

253 Mme Legault a fait référence aux pages 6 et 7 de la pièce G-61, qui décrivent les circonstances appropriées dans lesquelles un employeur peut demander une évaluation et les éléments d'une telle demande qui sont considérés comme raisonnables. Mme Legault estime que l'employeur n'avait pas de motifs raisonnables pour demander un examen médical parce qu'à l'époque, elle était en mesure de travailler et ne bénéficiait d'aucun programme d'aide. Elle n'avait pas quitté le travail depuis six mois. Au contraire, elle avait travaillé jusqu'au 15 juillet 1999, lorsqu'elle avait fait l'objet d'une suspension sans rémunération.

254 Mme Legault a indiqué que, selon les formulaires de demande de congé, elle a pris 25 jours de congé de maladie sur une période de 9 mois, et que 11 de ces jours ont été pris entre le 28 mai et le 14 juin 1999. L'employeur a refusé de l'autoriser à prendre un congé spécial et un congé annuel lorsque son fiancé était mourant. Elle a ajouté que le 15 juillet 1999, elle ne travaillait pas, mais a été placée en congé de maladie anticipé tel que demandé par Mme Mahdi, après l'imposition de la suspension sans rémunération.

255 Mme Legault a indiqué qu'il y avait un grave conflit avec Mme Daigle, et que ce conflit a abouti à une plainte déposée auprès de M. Tamagno le 15 décembre 2000 (pièce G-3). Elle a mentionné également que la LGFP accorde à l'employeur le pouvoir de demander qu'un employé se soumette à une évaluation médicale, mais que d'après le Conseil du Trésor, l'employeur ne possédait pas ce pouvoir, puisqu'il ne s'agissait pas d'une norme d'évaluation de santé périodique reposant sur une disposition contractuelle ou législative accordant un tel pouvoir législatif à l'employeur.

256 Mme Legault a ajouté que le cas a trait à la question des congés de maladie et que les dispositions de la loi, même dans les situations où elles s'appliquaient, n'obligent pas l'employé à obtenir une évaluation médicale. L'employeur peut seulement l'encourager. Elle a aussi noté que la convention collective (pièce G-62) n'accorde pas un tel pouvoir à l'employeur et que les droits de l'employé et ceux de l'employeur sont mentionnés dans la pièce G­61 (aux pages 8 et 10).

257 Mme Legault a indiqué qu'à son avis, son cas comporte de nombreuses facettes et fait ressortir le conflit qu'il y avait entre elle et Mme Daigle, le conflit entre elle et certaines collègues (Mmes Albert, Ladouceur, Gagné et Moreau), la mesure disciplinaire déguisée prise par Mme Daigle et Mme Mahdi et le fait que ces deux personnes notaient son utilisation des congés de maladie et lui ont refusé un congé spécial le 9 juin et le 14 juillet 1999.

258 Mme Legault a soutenu que l'employeur a omis d'appliquer ses propres normes en ce qui concernait l'évaluation de l'aptitude au travail. Se fondant sur la pièce G­61, elle a noté que la participation à une évaluation doit se faire de plein gré, que l'employé doit être informé des raisons d'un renvoi et que l'exercice est volontaire. L'employeur doit démontrer qu'il y a des circonstances raisonnables et appropriées pour présenter une telle demande. Mme Legault a souligné le fait qu'on ne lui a jamais fourni une copie du document de 25 pages (pièce E-3) que l'employeur avait envoyé à Santé Canada. Mme Townley lui avait promis de lui fournir une copie de la lettre de renvoi mais ne l'a pas fait. Mme Legault affirme aussi que Mme Townley aurait dit expressément qu'aucun rapport ne serait envoyé à Santé Canada, pour découvrir plus tard qu'un rapport avait été envoyé le 14 juillet 1999. La pièce E­3.10 montre que Mme Townley et la Dre Girard ont préparé le document. La Dre Girard a témoigné qu'elle a rédigé le document présenté en tant que pièce E­3.11, et Mme Mahdi a témoigné qu'elle­même et Mme Daigle avaient rédigé une partie du document. Mme Legault a noté qu'elle n'a reçu une copie du rapport que le 3 septembre 1999, soit après que la Dre Lloyd­Jones lui ait montré le document et après qu'elle en ait demandé une copie à l'employeur.

259 Mme Legault a déclaré qu'entre décembre 1998 et le 15 juillet 1999, il n'y a absolument pas eu de réunions ou de comptes rendus de réunions entre elle et Mme Daigle au sujet des questions soulevées dans les deux rapports. Elle a noté aussi que Mme Mahdi ne se rappelait pas la réunion du 15 juin 1999 et a confirmé qu'aucune évaluation de rendement officielle n'avait été faite pour elle. Elle a noté que Mme Townley se souvenait de la tenue de la réunion et de certaines des choses qui y avaient été dites. Mme Legault a affirmé que, lors de la réunion du 15 juin 1999, Mme Townley a confirmé que l'employeur suivrait toutes les règles énoncées dans la convention collective aux fins de l'évaluation qui serait effectuée entre le 15 juin et le 14 juillet 1999. Mme Legault a également déclaré qu'aucune des règles n'a été suivie par Mme Daigle.

260 En ce qui concerne la relation avec Mme Daigle, Mme Legault a affirmé qu'il ne s'agissait pas de la meilleure relation et qu'elle n'était pas accueillie favorablement par tous les employés, particulièrement Mme Albert et Mme Ladouceur. Elle a déclaré que les fouilles effectuées dans son bureau par Mme Daigle et par d'autres employés à la demande de celle­ci étaient des exemples illustrant ce conflit et a ajouté que Mme Daigle fouillait ainsi dans les bureaux d'autres collègues et dans des effets personnels. Durant la période allant de décembre 1998 à janvier 1999, Mme Daigle a rencontré Mme Legault et trois autres employés pour les informer qu'elle avait fouillé dans leurs bureaux et effets personnels et qu'elle savait qui avait présenté des demandes pour des emplois en dehors du service des PIAE. Mme Daigle leur a également dit qu'elle avait le droit d'effectuer ainsi des fouilles, que le fait de travailler pour le service des PIAE était différent du travail dans le restant de la fonction publique et que si elles voulaient quitter, elle les aiderait.

261 Mme Legault a noté qu'à deux ou trois reprises durant la période de neuf mois où elle travaillait au service des PIAE, Mme Daigle a fait enlever tous les dossiers de cas de son bureau pour les examiner. Par conséquent, elle n'avait plus de travail. Mme Legault a également souligné que lorsqu'elle est revenue de son congé, le 15 mars 1999, sa carte de sécurité avait été annulée. Elle a dû appuyer sur la sonnette pour entrer dans le bureau afin de pouvoir travailler. Ses collègues lui ont dit que la raison que Mme Daigle leur avait donnée pour justifier l'annulation de sa carte de sécurité était que Mme Legault était allée à une convention à Toronto avec M. Thivierge.

262 Mme Legault a mentionné un autre exemple de harcèlement dont elle aurait été victime au travail. Elle s'est plainte du fait que Mme Ladouceur répandait des rumeurs selon lesquelles elle aurait menacé M. Thivierge et ses enfants avec une arme à feu. Ses collègues lui auraient dit que Mme Daigle les avait informés de ne pas lui donner de dossiers et, par conséquent, elle ne pouvait pas accomplir de travail.

263 Mme Legault a expliqué que l'utilisation des congés signalée à Santé Canada n'était pas exacte. À la dernière page du rapport (pièce E­3.4), on lit qu'elle n'a travaillé que 105 jours sur 154 jours entre le 2 novembre 1998 et le 14 juin 1999. Or, elle a examiné tous les formulaires de demande de congé et a relevé qu'elle avait pris six jours de congés annuels et 25,6 jours (188 heures) de congé de maladie. Elle a aussi souligné le fait que sa demande initiale de congé spécial avait été refusée et a noté qu'elle s'est plainte de cela dans sa lettre du 15 décembre 2000 adressée à M. Tamagno (pièce E­23).

264 Mme Legault a indiqué que même si Mme Albert l'a nié dans sa déclaration, elle a dit à six collègues, en la présence de Mme Legault, que l'employeur vérifiait si Mme Legault habitait avec son partenaire et qu'il avait découvert que ce n'était pas le cas. C'est la raison pour laquelle la demande de congé spécial avait été refusée. Mme Legault a noté que la Dre Girard a confirmé qu'elle avait communiqué avec l'avocat de son partenaire, à la demande de Mme Townley, pour confirmer que son partenaire existait bel et bien. Mme Legault a également indiqué que le 29 septembre 1999, Mme Townley a dit à M. Auger et à elle­même qu'elle devrait prouver que son partenaire existait. Mme Legault a ajouté que Mme Townley a demandé qu'elle lui présente ses documents d'assurance automobile pour montrer qu'elle habitait avec son partenaire et puis a ajouté que, même si c'était le cas, l'employeur ne souhaitait pas discuter davantage de la question.

265 Mme Legault a également souligné que les certificats médicaux qu'elle avait fournis à l'employeur n'ont pas été remis à Santé Canada. Elle a ajouté que Mme Daigle avait exigé qu'elle fournisse des certificats médicaux pour justifier ses absences lorsque, le 9 juin 1999, on lui a refusé un congé spécial et annuel pour s'occuper de son fiancé mourant. Mme Legault a ajouté qu'un événement similaire est survenu le 9 juillet 1999, lorsque Mme Daigle a insisté pour qu'elle obtienne un certificat médical lorsqu'elle a demandé à nouveau de quitter le travail pour s'occuper de son fiancé.

266 À l'appui de ses griefs, Mme Legault a noté que le 14 juillet 1999, Mme Mahdi l'a fait venir dans son bureau pour l'informer qu'une erreur avait été commise par le commis à la rémunération et aux avantages sociaux et que sa demande de congé annuel visant à couvrir ses absences survenues entre le 28 mai et le 14 juin 1999 avait été refusée. Par conséquent, elle a appris qu'elle devait six crédits de congés de maladie au ministère. Mme Legault a attiré l'attention sur le courriel de Mme Mahdi (pièce G-15) demandant au commis à la rémunération et aux avantages sociaux de lui avancer 53,87 heures de congé de maladie. Mme Legault a également fait remarquer que même après la suspension sans rémunération, les documents montrent qu'elle était en congé de maladie le 16 juillet 1999.

267 Mme Legault a fait valoir que l'utilisation de 25,06 jours de congé de maladie ne constitue pas un motif raisonnable pour demander qu'on se soumette à une évaluation d'aptitude au travail. Elle a ajouté qu'elle ne s'était pas absentée pendant six mois, n'avait pas participé à un programme d'aide aux employées (PAE) et avait travaillé jusqu'au moment de sa suspension.

268 Mme Legault a déclaré qu'en ce qui a trait à la question du harcèlement vis­à­vis de M. Thivierge, que l'employeur invoquait comme l'une des deux principales raisons pour laquelle il exigeait qu'elle obtienne une évaluation d'aptitude au travail, il aurait dû y avoir une enquête. D'après les règles établies par le Conseil du Trésor, lorsque des accusations de harcèlement sont portées, il doit y avoir enquête. Il n'y a pas eu enquête et, qui plus est, M. Thivierge a témoigné qu'elle ne l'a jamais harcelé.

269 Mme Legault a noté que l'une des raisons invoquées pour justifier l'obtention d'une évaluation d'aptitude au travail était l'allégation qu'elle n'était pas en mesure de faire son travail et que sa production était nettement inférieure à la norme (pièces E-3.2, E­3.6 et E­3.11). Or, les rapports de productivité (pièce G-1) portant sur la période allant du 15 décembre 1998 au 14 juillet 1999 montrent qu'elle traitait de 10 à 15 dossiers par jour, ce qui était comparable à la norme mentionnée par Mme Daigle et à la productivité de ses collègues. Elle a également souligné que le rapport établi par Mme Kachra (pièce E­6) n'incluait pas tous les dossiers, mais uniquement ceux qui étaient classés. Elle a ajouté que, durant la période sur laquelle portait l'évaluation de rendement officielle, on ne lui avait pas donné 10 à 15 dossiers par jour, mais seulement 6 ou 7. La dernière semaine, on lui a seulement confié 10 dossiers pour toute la semaine, du fait que tous les dossiers se trouvant au service des PIAE avaient été placés dans des boîtes. Par ailleurs, elle a précisé que les 10 dossiers étaient tous rédigés dans une langue étrangère qu'elle ne comprenait pas. Alors que Mme Daigle le savait, elle a insisté pour que Mme Legault accomplisse le travail en se fondant sur l'information concernant les dossiers. Mme Legault a fait observer que d'après le rapport dressé par Mme Kachra, il y avait seulement cinq erreurs mineures dans les 29 dossiers qu'elle avait examinés.

270 Mme Legault a noté que, dans la pièce E­3.11, Mme Daigle avait écrit que Mme Legault n'inscrivait pas les dossiers au registre et a mentionné, à titre d'exemple, le fait que le 31 mai 1999, Mme Daigle a trouvé 26 dossiers dans le bureau de Mme Legault. Mme Legault soutient que tous ces dossiers avaient été traités et étaient terminés. À l'époque, Mme Kachra lui a dit de laisser les dossiers dans son bureau et qu'elle s'en occuperait plus tard.

271 En ce qui concerne l'allégation selon laquelle son bureau était désorganisé, Mme Legault a répondu que chaque semaine les commis préposés au traitement recevaient 50 dossiers. De plus, on leur donnait en moyenne cinq dossiers urgents par jour. Ils devaient répondre au téléphone et, le 3 mai 1999, chacun a reçu 160 dossiers additionnels à traiter. Durant le mois de mai 1999, tous les employés se plaignaient du fait qu'ils avaient trop de dossiers.

272 Mme Legault a fait observer que, d'après les feuilles de productivité déposées en tant que preuve (pièce G­1), sa productivité se situait entre 10 et 15 dossiers par jour et que cela montre clairement qu'il n'était pas nécessaire de la soumettre à une évaluation d'aptitude au travail.

273 En réponse à l'allégation faite dans la pièce E­3.11, voulant qu'elle quittait son poste de travail sans avertir Mme Daigle, Mme Legault a déclaré qu'un collègue lui avait conseillé d'afficher une note jaune indiquant où elle allait et la raison. Mme Legault a soutenu qu'elle était la seule employée obligée de le faire.

274 En ce qui a trait aux commentaires contenus dans la pièce E­3.11 à propos de son comportement, Mme Legault a répondu ce qui suit. Il est faux qu'elle portait des survêtements d'entraînement au travail. Il n'est pas vrai non plus qu'elle mangeait des carottes, sauf durant les pauses, et elle a maintenu que les carottes étaient pelées et lavées. Mme Daigle elle­même a admis qu'elle mangeait des carottes à son bureau. Mme Legault a ajouté que le fait de manger des carottes au travail n'est pas un grave problème. Elle a ajouté qu'il n'était pas vrai que ses ongles étaient sales. Elle a expliqué qu'il se pouvait qu'elle ait eu le regard trouble parce qu'à l'époque elle avait de nouvelles lunettes qui lui donnaient mal aux yeux. Et, en ce qui concerne l'incident où on l'a découverte en train de pleurer dans les toilettes, Mme Legault se souvient que c'était Mme Kachra qui était venue aux toilettes pour lui dire que M. Thivierge voulait s'excuser auprès d'elle et a demandé à Mme Legault de la suivre afin qu'il puisse lui présenter ses excuses. Elle se souvient également d'avoir demandé à Mme Kachra si elle pouvait rentrer, puisque Mme Daigle était absente cette semaine-là. Elle se souvient que cela s'est produit après qu'elle ait envoyé le deuxième courriel à M. Thivierge et qu'il ait répondu de façon grossière (pièce E­20).

275 En ce qui concerne les allégations concernant ses sautes d'humeur, Mme Legault a noté que durant son témoignage, Mme Daigle n'a pas fourni de détails à propos de ce comportement allégué. D'après elle, les allégations concernant son isolement social étaient fausses. Elle a indiqué qu'elle était amie avec tous les « anciens » puisqu'elle était considérée comme étant « au même niveau qu'eux ». Elle prenait des pauses avec eux. En ce qui a trait à l'incident du chou­fleur, Mme Legault a précisé qu'elle avait coupé le chou­fleur en de petits morceaux, qu'elle avait placés dans un bol avec de la vinaigrette. Il n'était pas éparpillé sur tout son bureau. Elle ne se souvient pas d'avoir mangé des fèves directement dans la boîte, mais se souvient qu'un collègue mangeait directement dans une boîte à l'heure du déjeuner. Elle n'était pas impolie, mais elle trouvait le fait que Mme Daigle exigeait qu'elle fournisse un certificat médical injustifié dans les circonstances. Elle n'était pas au travail le 14 juin, tel que mentionné dans le document. Elle est revenue au travail le 15 juin et a accepté trois des cinq jours de congé spécial qu'on lui a offerts. Mme Legault soutient qu'elle lui a fourni l'adresse de son domicile lorsqu'elle a déménagé à Hawkesbury en avril 1999, et l'a fournie de nouveau le 11 juin 1999 (pièce G­9). Elle a ajouté qu'après le 16 juin 1999, elle n'a pas pleuré et a utilisé son téléphone cellulaire uniquement en dehors du travail, et que les observations au sujet de ses vêtements étaient fausses, de même que les observations concernant son comportement lors des réunions du 5 et du 13 juillet 1999.

276 Mme Legault a affirmé que si on lui avait donné plus de travail, elle aurait obtenu de meilleurs résultats. Elle a ajouté qu'elle est arrivée en retard seulement trois matins, qu'elle a rattrapé le temps chaque jour et qu'elle l'a mentionné à Mme Daigle.

277 Mme Legault a souligné que c'était Mme Mahdi qui avait rédigé le paragraphe concernant M. Thivierge dans la pièce E­3.11. Elle se souvenait de l'appel téléphonique qu'elle avait reçu au bureau le 26 février 1999, d'une personne qui s'est présentée comme un ami de M. Thivierge et qui lui a annoncé que ce dernier voulait l'épouser. Puis, elle a ajouté que M. Thivierge ne lui a pas rendu visite à Hawkesbury et ne l'a pas appelée à cet endroit. Elle a noté qu'elle avait fait une erreur dans le paragraphe en haut de la page 10 de sa lettre adressée à la ministre Stewart le 25 mai 2001. En ce qui a trait aux commentaires figurant à la page 18 de la même lettre, Mme Legault a indiqué que c'était un collègue qui lui avait dit que M. Thivierge planifiait un voyage avec elle. Elle a ajouté qu'elle n'aurait pas dû écrire que c'était M. Thivierge qui lui avait dit ces choses­là, mais plutôt qu'elle en avait été informée par des collègues.

278 Mme Legault ne croit pas qu'elle a harcelé M. Thivierge et a indiqué que si son comportement était perçu ainsi, il y aurait dû y avoir une enquête. Mme Mahdi a fait des déclarations à Santé Canada sans que soit menée une enquête pour faire la lumière sur les incidents.

279 Mme Legault a fait valoir qu'on aurait dû lui donner une copie du rapport qui accompagnait la demande d'évaluation d'aptitude au travail. En ne lui fournissant pas une copie du rapport, l'employeur ne s'est pas conformé à la politique du Conseil du Trésor sur le harcèlement. Elle a ajouté qu'on ne l'a pas informée de la requête selon laquelle on voulait qu'elle aille voir un psychologue. Mme Legault a ajouté que la Dre Lloyd-Jones lui a dit que si la Dre Adamowski décidait qu'elle était apte à travailler, on ne pourrait l'envoyer au Dr Ely. Elle a souligné le fait que, le 31 août 1999, la Dre Adamowski a dit qu'elle était apte à travailler (pièce G-54). Elle affirme qu'elle a changé le rendez­vous du 3 septembre 1999 avec la secrétaire du Dr Ely, qui a confirmé qu'il n'y aurait aucun problème. Toutefois, elle s'est rendue au cabinet du Dr Ely le 3 septembre 1999, mais le docteur a refusé de la voir.

280 Mme Legault a indiqué que le 29 septembre 1999, lorsqu'elle a rencontré Mme Townley en la compagnie de M. Auger, elle a été informée de 18 conditions qui devaient être satisfaites pour qu'elle puisse retourner au travail et on lui a dit qu'elle travaillerait avec les employés qui avaient porté plainte contre elle auprès de la police, et qui étaient à l'origine des accusations criminelles portées contre elle.

281 Mme Legault a souligné le fait qu'après avoir reçu la lettre de Mme Townley datée du 12 octobre 1999 (pièce E­16), elle a pris rendez­vous avec un psychiatre, le Dr Ouellette, et elle lui a rendu visite à trois reprises. Mme Legault a indiqué qu'après trois consultations avec le Dr Ouellette, elle lui a dit qu'un représentant de son agent négociateur pensait qu'il serait mieux pour elle de trouver un emploi en dehors du gouvernement. Elle a suivi ce conseil et a travaillé à plein temps pendant deux ans pour une entreprise de services de soutien à des personnes âgées à Nepean (Nepean Senior Home Support). Elle travaillait sept jours par semaine et était de service en tout temps. Elle a ajouté qu'à partir de 2000, elle a commencé à avoir vent du fait que Mme Mahdi et trois collègues avaient communiqué avec plusieurs de ses employeurs et leur avaient demandé de la congédier. Ces personnes disaient à ses employeurs qu'elle était folle, sale et répugnante. Cela l'a bouleversée, du fait qu'un grand nombre des personnes avec lesquelles elle travaillait étaient des personnes plutôt âgées. Elle a cru comprendre que certaines de ces personnes âgées recevaient des appels téléphoniques, tandis que d'autres étaient abordées individuellement et, dans certains cas, par des voisins. On demandait à toutes ces personnes âgées de la congédier. Mme Legault en a donné un exemple à la police que l'on peut trouver dans la pièce G-7.

282 Mme Legault a indiqué qu'elle n'était pas présente à l'audience de deuxième palier où il était question du grief qu'elle avait déposé en août 1999. M. Auger lui aurait conseillé de ne présenter aucun document, à moins qu'il ne fût présent. La réponse au grief était datée du 2 avril 2001. Elle a précisé qu'elle a reçu la lettre de licenciement (pièce E­17) le 5 mai 2001.

283 Mme Legault a indiqué que Mme Mahdi et Mme Albert sont allées voir M. Tate, l'un de ses employeurs, le 16 avril 2001, et qu'elles lui ont dit qu'elle était sale, répugnante et folle et qu'elles ne voulaient pas qu'elle habite et travaille à Ottawa. Elle se trouvait près de la porte du bureau de M. Tate et a écouté la conversation. M. Tate aurait dit à Mme Mahdi et à Mme Albert qu'elles la diffamaient. Mme Legault a indiqué que c'était la raison pour laquelle elle avait présenté des plaintes au Service de la police d'Ottawa (pièce G­5), à la GRC (pièce G­20) et à la ministre Stewart (pièce G­21).

284 Mme Legault a indiqué que ses deux griefs ont été entendus au palier final de la procédure de règlement des griefs le 22 novembre 2001, et qu'elle n'avait pas l'occasion d'assister à l'audience. Même si elle avait demandé à y être présente, l'audience s'est déroulée sans elle.

285 Mme Legault a déclaré que les accusations criminelles portées contre elle le 5 mai 2002, par le détective Fitzgerald, au nom de Mme Mahdi, de Mme Albert, de Mme Ladouceur et de Mme Daigle, ont toutes été retirées le 12 novembre 2003.

286 Mme Legault a déclaré que le Dr Fedoroff lui a dit, lors de leur rencontre du 15 mars 2002, que Mme Mahdi lui avait parlé et que, par conséquent, il lui imposait les mêmes conditions pour son retour au travail que celles que Mme Townley lui avait communiquées auparavant. Elle affirme qu'elle a entendu le Dr Fedoroff dire à un autre médecin qu'il souhaitait voir Mme Legault en maillot de bain.

287 Mme Legault a fait valoir que c'est à l'employeur qu'incombe le fardeau de la preuve et de démontrer qu'il y a un motif valable pour le licenciement, et qu'il est important pour l'employeur, dans un pareil cas, de documenter les lacunes de l'employé dans son dossier personnel. L'employeur est tenu de transmettre des avertissements par écrit et de fournir à l'employé des occasions de corriger les lacunes avant d'envisager de mettre fin à son emploi.

288 Mme Legault a précisé que l'employeur ne lui avait fourni aucun type d'avertissement écrit. L'employeur a fourni un rapport, mais il manquait d'objectivité; il était trop subjectif. L'employeur a fait preuve de mauvaise foi en ne la traitant pas avec honnêteté, dignité et compassion. Elle n'a pas reçu de copies de la correspondance envoyée à Santé Canada. L'employeur a fait preuve de malhonnêteté.

289 Mme Legault a indiqué qu'on n'a pris aucun arrangement pour l'aider durant cette période difficile. Aucune partie de son travail n'a été confiée à des collègues, et le seul moment où l'on a réduit sa charge de travail était quand l'employeur a procédé à une évaluation officielle de son rendement. Par ailleurs, on a demandé à Mme Kachra de passer en revue tout le travail qu'elle avait accompli pendant tout le mois. Mme Legault a indiqué que, quand elle était en retard, elle se rattrapait par la suite. Quand elle est allée voir la conseillère du PAE, c'était en dehors des heures de travail.

290 Mme Legault a affirmé qu'en ce qui concerne la question relative à sa crédibilité et à celle de Mme Mahdi, il convient de noter que Mme Mahdi a nié avoir parlé à M. Tate ou à son cousin. Mme Legault a admis que ni M. Tate ni son cousin n'ont témoigné, mais elle estime que je devrais cependant accorder la préséance à sa déclaration.

291 Mme Legault a déclaré que la preuve médicale présentée à l'audience par le Dr Fedoroff répond à la question de savoir si elle souffre ou non d'une maladie mentale.

292 Mme Legault a fait valoir que le fait que Mme Townley avait demandé à Mme Girard, la conseillère du PAE, de vérifier auprès de l'avocat de son partenaire si celui­ci existait réellement était du harcèlement de la part de l'employeur. Elle a noté que Mme Mahdi a nié avoir parlé à l'avocat directement ou indirectement.

293 Mme Legault a indiqué qu'elle a fourni à l'employeur un rapport (pièce G­54) établi par la Dre Adamowski concernant son aptitude au travail. À l'époque, la Dre Adamowski était son médecin depuis quatre ans. Elle a ajouté que les médecins de famille sont entraînés à détecter et à traiter les maladies mentales. La Dre Adamowski a témoigné qu'en 1999 son cas était simple. Elle suivait des séances de psychothérapie chaque semaine, de juillet à septembre 1999. Les facteurs de stress qui avaient un impact sur sa vie avaient été résolus le 31 août 1999. À sa demande, la Dre Adamowski l'a renvoyée vers un certain nombre de psychiatres pour prouver qu'elle était en mesure de retourner au travail.

294 Mme Legault a conclu ses arguments en affirmant qu'elle avait vu le Dr Ouellette à Hawkesbury à trois reprises. Elle a travaillé pendant un an et demi à Ottawa et n'a pas pu se rendre à ses rendez­vous avec le Dr Ouellette. Toujours d'après Mme Legault, même s'il n'a pas pu terminer l'évaluation, le Dr Ouellette a identifié les facteurs de stress qui l'affectaient et lui a attribué une cote de 75 sur l'échelle d'aptitude au travail (pièce G­60).

C. Réfutation

295 Durant la réfutation, l'avocat de l'employeur a noté que celui­ci admet volontiers que l'information n'a pas été envoyée initialement à Mme Legault, mais a souligné que cette information lui a été fournie par la Dre Lloyd­Jones. Même si l'information aurait dû lui être donnée au moment où elle a été envoyée à la Dre Lloyd-Jones, celle­ci a corrigé la situation en montrant le document à Mme Legault. Cela ne dénote pas de la mauvaise foi.

296 L'avocat a précisé que le document d'information intitulé [traduction] « Évaluation d'aptitude au travail » (pièce G­61) n'est pas une politique de l'employeur. Il s'agit d'un document d'information qui aide à déterminer dans quelles circonstances il est raisonnable de demander une évaluation d'aptitude au travail. Dans la situation de Mme Legault, l'employeur ne mettait pas fin à son emploi à l'époque. L'employeur avait pris de nombreuses mesures pour donner à Mme Legault l'occasion d'obtenir une évaluation d'aptitude au travail et, comme la preuve le montre, Mme Legault comprenait cette requête et a pris les mesures nécessaires pour faire effectuer une telle évaluation. Toutefois, Mme Legault n'est jamais allée jusqu'au bout du processus. La seule preuve médicale dont disposait l'employeur était la conclusion de Santé Canada contenue dans la lettre de la Dre Lloyd-Jones datée du 17 août 1999 (pièce E­12). L'omission de Mme Legault de continuer à faire le nécessaire pour obtenir l'évaluation médicale a fini par causer d'autres difficultés. Le Dr Ouellette ne pouvait fournir une opinion qui aurait annulé la conclusion à laquelle était arrivé la Dre Lloyd-Jones.

297 L'avocat a fait observer que, dans ses arguments, Mme Legault a parlé d'un certain nombre de faits qui différaient de son témoignage initial. Les faits relatés par elle ont commencé à changer. Les faits originaux soulevaient de nombreuses questions quant à son aptitude d'être au travail.

298 En ce qui concerne le rendement, l'avocat a indiqué que les documents soumis par Mme Legault ne fournissent à l'arbitre de grief aucune preuve sur ce point. Selon l'avocat, les documents préparés par l'employeur étaient suffisamment clairs et, pour ne pas en tenir compte, je serais obligé de conclure que l'employeur avait agi de mauvaise foi. L'avocat a ajouté que l'employeur n'examinait pas chaque question séparément.

299 En ce qui concerne la question de l'absentéisme, Mme Legault a reconnu qu'elle avait été absente pendant 25 jours, en congé de maladie. Même si cela n'est pas extrême, il s'agit d'une période considérable. Il s'agissait d'un motif suffisant pour que l'employeur se demande si elle devrait être présente ou non sur les lieux de travail. Par exemple, l'opinion qu'avait Mme Daigle du comportement de Mme Legault pendant qu'elle mangeait des carottes était tellement inhabituelle qu'elle soulevait des préoccupations. Tous les incidents qui sont survenus ont suscité des inquiétudes valables sur lesquelles il fallait se pencher. Au plan de la crédibilité, l'avocat a noté qu'il n'y avait pas de preuve indiquant que Mme Daigle aurait quelque raison que ce soit d'inventer une telle histoire. Tous les éléments de preuve, à l'exception de ceux présentés par Mme Legault, vont dans le même sens. Les seuls éléments de preuve contraires sont contenus dans les déclarations faites par Mme Legault elle­même.

300 L'avocat a déclaré que l'employeur avait suffisamment de raisons de croire que Mme Legault n'était pas apte à être au travail. C'est pourquoi l'employeur a demandé une évaluation médicale d'aptitude au travail. De septembre 1999 à septembre 2006, Mme Legault a omis de fournir un quelconque rapport confirmant son aptitude au travail. L'évaluation du Dr Fedoroff portait sur une norme complètement différente et, en réalité, renferme des préoccupations préliminaires concernant la santé mentale de Mme Legault.

301 En tant que dernier commentaire, Mme Legault a ajouté que la question entourant M. Thivierge semble avoir occupé une place considérable durant l'audience. Elle a remis en question son importance puisqu'il n'y a eu qu'une seule réunion avec elle où cette préoccupation a été soulevée. Elle a attiré l'attention sur le deuxième paragraphe de la page 18 de sa plainte adressée à la ministre Stewart (pièce E­23) où elle note que M. Thivierge lui avait dit qu'il irait prendre un café avec elle si elle travaillait dans une autre section.

IV. Motifs

302 En l'espèce, où je suis appelé à arbitrer deux griefs présentés par une fonctionnaire s'estimant lésée qui s'est défendue elle­même et qui a été licenciée, une plus grande latitude a été accordée à Mme Legault pour présenter et défendre ses arguments. Les éléments de preuve n'ont pas toujours été produits selon les règles, et certains éléments de preuve ont été inclus à ses arguments, en dépit d'avertissements qui lui avaient été donnés à cet égard au stade initial de l'audience. Une grande partie des éléments de preuve avaient trait à des événements qui sont survenus après son licenciement. À certains moments, les questions posées par Mme Legault aux témoins me semblaient, à tout le moins, tirées par les cheveux, voire tout à fait surprenantes, et je peux comprendre certaines des réactions des témoins aux questions ou affirmations qui leur étaient adressées. Sa tendance à faire de telles allégations pourrait également expliquer certains des problèmes de mémoire des témoins. La description donnée par Mme Legault de certains des événements qui, selon elle, se seraient produits est extrêmement difficile à accepter, même si je suis convaincu qu'elle­même croit dire la vérité. Durant tout le déroulement de l'audience, Mme Legault a fait preuve de respect, a collaboré et a présenté, d'une façon suffisamment bien organisée, ce qui, d'après elle, constituait les points saillants des faits à l'appui de ses griefs. Je continue d'avoir le sentiment général que l'arbitre de grief a peu de moyens à sa disposition pour déterminer si un ou une fonctionnaire s'estimant lésé, dont la perception de la réalité est douteuse, est en mesure de se représenter lui-même ou elle-même, surtout lorsque les conséquences de l'incapacité à présenter des arguments convaincants peuvent se traduire par une confirmation d'un licenciement.

303 Dans son premier grief, Mme Legault allègue que la décision de lui faire prendre un congé non rémunéré est une mesure disciplinaire déguisée qui est sans raison valable et qui est injustifiée et injuste. L'employeur, quant à lui, considère qu'il s'agit d'une mesure administrative appropriée compte tenu du comportement, de l'absentéisme et du manque de productivité dont a fait preuve Mme Legault durant les six mois précédents.

304 En dépit du fait qu'il y a quelques faiblesses dans les éléments de preuve fournis par l'employeur à l'appui de ses arguments, surtout en ce qui concerne la question de la productivité, il n'y a aucun doute dans mon esprit que Mme Legault affichait un comportement qui a soulevé un certain nombre de préoccupations valables quant à son aptitude à être au travail. Son absentéisme, ses croyances et son comportement vis­à­vis de M. Thivierge, le fait qu'elle ait pleuré au bureau, ses vêtements et ses habitudes alimentaires convergent tous vers une seule et même conclusion. Sa propre mémoire des faits soulève de graves préoccupations quant à son bien­être à l'époque et aujourd'hui. Même si, examiné séparément, chaque incident peut sembler mineur, ensemble, ils tendent à dénoter une détérioration de la santé. Je n'ai pas réussi à trouver un élément de preuve lié à ce grief qui aurait pu m'amener à conclure qu'elle avait été disciplinée par l'employeur ou que ses superviseurs ou d'autres fonctionnaires du ministère agissaient de mauvaise foi. Si elle s'était soumise à l'exigence d'obtenir une évaluation d'aptitude au travail, son absence du travail aurait pu être beaucoup plus courte et elle aurait probablement suivi le traitement dont elle avait besoin. Malheureusement, tel n'était pas le cas et sa situation s'est détériorée davantage, comme le montre la preuve. Même s'il aurait été préférable pour l'employeur de fournir à Mme Legault les raisons pour lesquelles il lui demandait d'obtenir une évaluation d'aptitude au travail, ce fait en soi ne me convainc pas que la décision de l'employeur était à caractère disciplinaire. Par conséquent, je conclus que je n'ai pas compétence en la matière et que je ne peux statuer sur ce grief.

305 Le deuxième grief a été présenté après la décision de l'employeur de licencier Mme Legault, décision qui lui a été communiquée dans une lettre datée du 2 avril 2001. Cette situation est nettement plus complexe.

306 La preuve révèle qu'après les problèmes initiaux rencontrés, soit le fait que Mme Legault ne se présentait pas aux rendez­vous fixés par l'intermédiaire de Santé Canada en vue de l'évaluation de son aptitude au travail, Mme Townley a clairement énoncé les conditions que devait respecter Mme Legault pour pouvoir revenir au travail. Ces conditions lui ont été communiquées par écrit le 12 octobre 1999. Nulle part dans cette lettre ni dans aucune correspondance précédente fait­on mention du fait que l'employeur avait l'intention de mettre fin à la relation d'emploi si elle n'obtenait pas une telle évaluation.

307 Mme Legault semble avoir compris les options qui lui avaient été transmises, puisqu'elle a pris des arrangements pour subir une telle évaluation, même si c'était quelque peu contre son gré, auprès du Dr Ouellette, un psychiatre exerçant à Hawkesbury. Malheureusement, elle a décidé de ne pas aller jusqu'au bout de l'évaluation parce que, comme elle l'a expliqué, elle travaillait à Ottawa.

308 Il semble qu'à l'automne 2000, sa condition s'était détériorée davantage alors qu'elle a déposé des plaintes auprès du Service de la police d'Ottawa (pièce G­25) et de la GRC (pièce G­20) alléguant des événements qui n'ont été corroborés par aucun autre témoin et qui ont également été niés sans équivoque par les personnes qui, d'après elle, étaient impliquées dans ces incidents.

309 Ces incidents, et nommément le port d'une arme à feu sur les lieux du travail, la mise en danger de la vie de ses collègues et la fouille de son domicile par l'employeur, peuvent uniquement être décrits comme les fruits d'une imagination détachée de la réalité. Mme Legault a réitéré ses allégations et en a fait d'autres dans une lettre de 49 pages adressée au directeur général du service des PIAE le 15 décembre 2000.

310 Le ministère a engagé un entrepreneur privé et l'a chargé d'ouvrir une enquête pour vérifier ses allégations. Quintet Consulting a mené l'enquête et a produit un rapport le 31 octobre 2001 (pièce G­50). Dans ce rapport, l'enquêteur concluait que la plainte de Mme Legault n'avait aucun fondement et que la direction avait rempli ses responsabilités vis­à­vis de Mme Legault à titre d'employée ayant des problèmes personnels.

311 Cependant, avant l'établissement de ce rapport, le ministère a pris des mesures pour mettre fin à la relation d'emploi. Paul Migus, sous-ministre adjoint de la DGPSR à RHDC, a informé Mme Legault dans une lettre datée du 2 avril 2001 de sa décision de la licencier conformément à l'alinéa 11(2)g) de la LGFP à compter de la fin de la journée de travail, cette journée­là. Cet alinéa autorise le licenciement pour des raisons autres que disciplinaires. Ces licenciements peuvent être soumis à l'examen d'un arbitre de grief nommé pour entendre un grief.

312 Mme Legault a fait valoir que le fardeau de la preuve incombait à l'employeur, qui devait montrer qu'il y avait une raison valable pour le licenciement, et qu'il est important pour l'employeur, dans un pareil cas, de documenter les lacunes de l'employé dans le dossier personnel de celui-ci. Il est du devoir de l'employeur de fournir des avertissements écrits et de donner à l'employé des occasions de corriger les lacunes avant d'envisager le licenciement.

313 Je partage son avis.

314 Il ne fait aucun doute qu'il n'est pas chose facile pour un employeur d'être aux prises avec une employée tourmentée. Forcer une employée tourmentée à quitter les lieux et à ne pas se présenter au travail jusqu'à ce qu'elle ait obtenu un certificat d'aptitude au travail est une mesure extrême qui exige des communications claires et sans équivoque. Bien que j'aie rejeté le premier grief pour le motif que la mesure prise par l'employeur n'était pas à caractère disciplinaire, je n'étais pas impressionné par l'omission de l'employeur de fournir à Mme Legault une copie du rapport qui accompagnait le renvoi fait à Santé Canada. Je suis encore plus déconcerté par l'omission de l'employeur d'informer Mme Legault qu'elle risquait de perdre son emploi si elle ne fournissait pas un certificat d'aptitude au travail. Une telle omission suffit pour invalider le licenciement.

315 En réponse aux préoccupations exprimées au sujet de l'absence d'un avertissement, l'avocat de l'employeur a indiqué que les éléments de preuve postérieurs à la cessation d'emploi devraient me convaincre que Mme Legault n'est toujours pas apte à travailler et n'est toujours pas en mesure de fournir un certificat d'aptitude au travail et que, par conséquent, la décision de licenciement est justifiée. Même si j'ai un doute quant à l'amélioration de la situation de Mme Legault, je ne puis utiliser les éléments de preuve postérieurs au licenciement sauf pour déterminer la crédibilité ou les dommages à prévoir. Il y a lieu de se pencher sur la décision de l'employeur au moment où celle-ci a été rendue et sur les motifs sur lesquels elle reposait. Lorsque je fais cela, je peux uniquement conclure que la décision de mettre fin à l'emploi de Mme Legault était prématurée, étant donné que Mme Legault n'avait pas été avertie des conséquences de son inaction. Par conséquent, je rétablis la relation d'emploi.

316 Si l'employeur avait congédié Mme Legault pour des raisons disciplinaires, parce qu'elle avait fait de fausses accusations, la situation aurait peut­être eu un aboutissement complètement différent.

317 Je ne suis pas prêt à accorder à Mme Legault une indemnisation pour sa perte de revenu ou d'avantages sociaux durant la période qui s'est écoulée entre son licenciement et la date de la présente décision autre que ce à quoi a droit normalement un employé en congé de maladie. J'estime également que Mme Legault devrait rester en congé de maladie non rémunéré pendant une certaine période durant laquelle elle devra subir une évaluation d'aptitude au travail effectuée par un psychiatre, qui doit être informé de son comportement et de sa conduite au cours des dernières années. Si elle refuse de participer de plein gré à une telle évaluation ou si l'on décide qu'elle n'est pas apte à travailler, l'employeur pourra alors mettre fin à l'emploi de Mme Legault, s'il en décide ainsi.

318 J'espère qu'en réponse à cette éventualité, Mme Legault prendra les mesures nécessaires pour faire soigner ses problèmes de santé.

319 Pour ces motifs, je rends l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

320 La relation d'emploi doit être rétablie.

321 Mme Legault doit être placée en congé de maladie non rémunéré jusqu'au moment où elle pourra présenter une évaluation d'aptitude au travail effectuée par un psychiatre confirmant qu'elle est apte à travailler. Cette période de congé ne devrait pas dépasser six mois.

322 Si elle omet de présenter un tel certificat, l'employeur peut mettre fin à son emploi sans autre notification. 

323 L'employeur doit informer le psychiatre de son comportement et de sa conduite au cours des dernières années ainsi que de ses fonctions, de ses responsabilités et de son environnement de travail, y compris de l'effet de son comportement sur ses collègues.

324 Finalement, il y a lieu d'examiner son dossier pour déterminer si elle est admissible à des prestations payables ou offertes à un employé malade.

Le 7 août 2007.

Traduction de la C.R.T.F.P.

Georges Nadeau,
arbitre de grief

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