Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a transmis sa plainte par le truchement du courrier interne du gouvernement un jour avant la fin du délai prescrit pour porter plainte. Le Tribunal l’a reçue quatre jours après la fin de ce délai. La plaignante a déclaré avoir compris qu'elle avait jusqu'à la fin du délai prescrit pour déposer sa plainte, et non que sa plainte devait être reçue au plus tard à cette date. L’intimé a soutenu que la plainte avait été déposée hors délai. Décision : Le délai prescrit pour présenter une plainte est un délai de rigueur. Le Tribunal a conclu que la plaignante aurait pu transmettre la sienne par courriel ou par télécopieur afin de respecter le délai. Aucune circonstance exceptionnelle ne justifiait une prorogation de délai. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

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Dossier:
2006-0250
Rendue à:
Ottawa, le 24 janvier 2007

JOSIANNE RICHARD
Plaignante
ET
LE SOUS-MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS ET SERVICES GOUVERNEMENTAUX CANADA
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Demande concernant le délai pour déposer une plainte
Décision:
La plainte est rejetée
Décision rendue par:
Sonia Gaal, vice-présidente
Langue de la décision:
Français
Répertoriée:
Richard c. Sous-ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et al.
Référence neutre:
2007 TDFP 0002

Motifs de la décision

Introduction

1 Le 11 décembre 2006, le Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) a reçu une plainte de Mme Josianne Richard datée du 28 novembre 2006, en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP). La plainte porte sur une nomination intérimaire faite par le sous-ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (l’intimé). L’intimé soulève que la plainte est hors délai. La plainte est rejetée.

Contexte

2 La plaignante a participé au processus de sélection numéro 2006–SVC–IA–HQ–92647 pour se qualifier pour un poste de traducteur(trice) conseil (Programme de relève) au sein du ministère Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

3 Le 31 octobre 2006, la plaignante reçoit un courriel de Mme Gaétane Morin, coordonnatrice du recrutement, l’informant que sa candidature au processus de nomination était rejetée.

4 Le 1er novembre 2006, la plaignante reçoit un courriel de Mme Agathe Paquette l’informant que les entrevues auront lieu du 8 au 15 novembre. Le 6 novembre, Mme Paquette lui envoie un deuxième courriel s’excusant du fait qu’elle n’aurait pas dû recevoir le courriel du 1er novembre puisque sa candidature n’était pas retenue.

5 Le 22 novembre 2006, la plaignante reçoit un courriel de Mme Morin l’avisant de la liste des candidats qualifiés dont elle ne fait pas partie. Le courriel indique que le délai pour porter plainte au Tribunal est le 7 décembre 2006. La plaignante a envoyé sa plainte à partir de Montréal le 6 décembre en utilisant le courrier interne du gouvernement.

Observations des parties

6 Le 20 décembre 2006, la plaignante explique dans un courriel au Tribunal qu’elle attendait des nouvelles du recrutement afin d’obtenir des précisions. Elle a envoyé sa plainte le 6 décembre pensant que la date limite pour déposer sa plainte était le 7 décembre.

7 Le 5 janvier 2007, l’intimé avise le Tribunal que la plainte a été déposée hors délai puisqu’elle est datée du 11 décembre 2006 et que la date limite pour le dépôt de la plainte était le 7 décembre.

Questions en litige

8 Le Tribunal doit trancher les questions suivantes :

  1. La plainte est-elle déposée hors délai ?
  2. Le Tribunal doit-il exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 5 du Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS/2006-6, (le Règlement) et proroger le délai pour le dépôt de la plainte ?

Analyse

Question I: La plainte est-elle déposée hors délai?

9 L’article 10 du Règlement, disponible sur le site web du Tribunal, indique clairement que la plainte doit être déposée à l’intérieur des 15 jours suivant l’avis de nomination :

10. (1) La plainte est présentée au Tribunal au plus tard quinze jours après la date :

a) où l'avis de mise en disponibilité, de révocation, de nomination ou de proposition de nomination en faisant l'objet été reçu;

b) figurant sur l'avis, s'il s'agit d'un avis public.

10 Le Guide de procédures (le Guide), également disponible sur le site web du Tribunal, explique en détail au chapitre 5 « Comment déposer une plainte », sous « Information concernant la transmission de la plainte » qu’une plainte peut être acheminée au Tribunal de plusieurs manières :

Le plaignant doit veiller à ce que la plainte soit déposée avant la date d’expiration du délai de 15 jours civils.

La plainte peut être transmise par courrier électronique, par télécopieur, par messager, par la poste ou remise en mains propres. Si une plainte est transmise par télécopieur ou par courrier électronique, une copie doit également être postée au directeur exécutif.

Les plaintes transmises par télécopieur ou par courrier électronique sont considérées reçues à la date où elles sont transmises. Les plaintes transmises par messager ou remises en mains propres sont réputées avoir été reçues le jour de leur livraison.

Pour obtenir une preuve de livraison, on suggère que les plaintes soient envoyées par courrier recommandé.

11 Il est donc important d’utiliser un mode de transmission adéquat pour s’assurer que le Tribunal reçoive la plainte dans le délai prescrit. L’envoi par courrier électronique ou par télécopieur est évidemment le plus rapide car la date de transmission est la date de réception. Le plaignant envoie par la suite l’original signé mais la date pour le calcul du délai de 15 jours est celle de la transmission par télécopieur ou courrier électronique.

12 Dans les cas où la plainte est postée, elle doit être déposée à l’intérieur du délai de l’article 10 du Règlement. Il devrait y avoir un cachet de la poste ou une empreinte postale afin de déterminer avec certitude la date d’envoi. Ceci s’avère utile si un argument est soulevé voulant que la plainte soit hors délai. Il incombe toutefois au plaignant de prouver que l’envoi par la poste a été fait dans le délai prescrit.

13 Le Tribunal, dans la décision MacDonald c. L’administrateur général de Service Canada et als., [2006] TDFP 0002, traite d’une requête en prorogation de délai pour le dépôt de la plainte envoyée par la poste et reçue à l’extérieur des délais prévus dans le Règlement. Le Tribunal a fait ces commentaires :

[6] Comme l’a déterminé la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Allard c. Canada (Commission de la fonction publique), [1982] 1 C.F. 432, et dans Lalancette c. Canada (Comité d’appel de la Commission de la Fonction publique), [1982] 1 C.F. 435, le délai pour déposer une plainte est un délai de rigueur. (…) Toutefois, selon la Cour fédérale dans Lalancette, supra, il semblerait équitable de considérer qu’une plainte a été déposée en vertu de l’article 10 du Règlement dès que la plainte est mise à la poste, si l’on peut facilement prouver la date d’envoi.

[7] Le droit de porter plainte au Tribunal est exercé par des personnes se trouvant n’importe où au Canada et parfois même à l’extérieur du pays. La plaignante a expliqué par écrit qu’elle a posté sa plainte de la Nouvelle-Écosse le 16 juin 2006, soit quatre jours avant la date de clôture pour déposer une plainte. Ceci est confirmé par l’affranchissement apposé sur l’enveloppe par la machine postale. Aucune explication sur les raisons pour lesquelles la plainte a pris 11 jours pour parvenir au Tribunal n’a été fournie par la plaignante. Il pourrait s’agir d’une erreur d’acheminement ou d’un retard dans le traitement du courrier. Heureusement, l’affranchissement apposé par la machine postale le 16 juin 2006 figure sur l’enveloppe. S’il n’y avait pas eu cet affranchissement ou s’il avait été illisible, la plaignante n’aurait peut-être pas eu de preuve additionnelle pour corroborer son affirmation, auquel cas le Tribunal pourrait avoir rendu une toute autre décision.

(Nos soulignés)

14 Dans le cas qui nous occupe, la plaignante a choisi d’envoyer sa plainte le 6 décembre 2006 en utilisant le courrier interne du gouvernement. Toutefois, ce service n’offre pas la possibilité d’obtenir un cachet postal ou un affranchissement d’une machine postale. Ce cachet aurait permis de prouver la date d’envoi de façon certaine.

15 Par ailleurs, le Tribunal a au dossier une étampe apposée le jour de la réception de la plainte au Tribunal, soit le 11 décembre 2006.

16 Par conséquent, la plainte est hors délai car elle a été reçue après le 7 décembre 2006 qui était la date limite du délai pour déposer la plainte.

Question II: Le Tribunal doit-il exercer son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 5 du Règlement et proroger le délai pour le dépôt de la plainte ?

17 La plaignante n’a pas demandé explicitement de prorogation de délai mais a par contre expliqué au Tribunal la raison du délai du dépôt de sa plainte. Ce genre de renseignement est habituellement inclus dans une requête en prorogation de délai qui est expliquée dans le Guide du Tribunal.

18 En vertu de l’article 9 du Règlement, le Tribunal considère qu’il s’agit d’un vice de forme qui n’invalide pas la demande de prorogation. Le Tribunal entend donc l’adresser.

19 Le délai pour déposer une plainte selon l’article 10 du Règlement est de rigueur tel qu’indiqué dans la décision MacDonald, supra, mais le Tribunal peut le proroger. Par contre, cette prorogation n’est pas automatique et la plaignante doit pouvoir démontrer qu’elle a une raison exceptionnelle pour justifier son retard. Cette question a été traitée dans l’affaire Casper c. Sous-ministre de Citoyenneté et Immigration et al., [2006] TDFP 0010 :

[22] Il est important que les parties sachent que les délais doivent être respectés pour que la procédure se déroule convenablement. Par souci d’équité, le Tribunal peut proroger des délais stricts de présentation d’une plainte. La plaignante a le fardeau de fournir les motifs relatifs à la demande de prorogation. À moins de circonstances exceptionnelles, le Tribunal n’accordera pas de prorogation.

20 La plaignante a tenté de justifier le retard en expliquant qu’elle croyait qu’elle avait jusqu’au 7 décembre 2006 pour acheminer sa plainte au Tribunal : « (…) je me rends bien compte que le 7 décembre était la date à laquelle le tribunal devait avoir mon dossier. Je pensais honnêtement que la date limite pour envoyer le dossier était le 7 décembre, c’est pourquoi je l’ai envoyé [sic] le 6 décembre ».

21 Le Tribunal ne peut accepter comme raison l’ignorance ou l’erreur d’une partie pour proroger les délais. Le Tribunal a d’ailleurs adressé ce point dans la décision Casper, supra :

[25] Tous les plaignants ont la responsabilité de s’assurer qu’ils connaissent parfaitement les délais et les procédures applicables au processus de plainte du Tribunal. Le fait qu’un plaignant ne soit pas ainsi au courant de cette exigence, surtout en tenant compte de l’information diffusée par le Tribunal, ne constitue pas une circonstance exceptionnelle pouvant justifier une prorogation de délai.

Toute l’information est facilement disponible sur le site web du Tribunal. De plus, un numéro de téléphone sans frais existe pour rejoindre le personnel du greffe du Tribunal pour toutes questions ou clarifications.

22 Le Guide indique les dates de réception et suggère d’utiliser le courrier recommandé pour obtenir une preuve de livraison pour un document envoyé par la poste. Il est également à noter que l’envoi par courrier électronique et par télécopieur est le moyen le plus rapide d’acheminer une plainte au Tribunal surtout lorsque la date limite pour déposer une plainte approche. La plaignante aurait pu envoyer la sienne le 6 décembre 2006 en utilisant un de ces modes de transmission. La plainte aurait alors été reçue par le Tribunal le 6 décembre, donc à l’intérieur du délai prescrit.

23 Malgré que le Tribunal puisse proroger le délai, aucune raison exceptionnelle ne justifie l’octroi de cette prorogation.

Décision

24 Pour tous ces motifs, le Tribunal rejette la plainte puisqu’elle est hors délai.

Sonia Gaal

Vice-présidente

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2006-0250
Intitulé de la cause:
Josianne Richard et le Sous-ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et al.
Audience:
Demande écrite; décision rendue sans comparution des parties
Date des motifs:
Le 24 janvier 2007
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