Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a formulé à l’encontre de l’intimé des allégations d’abus de pouvoir dans l’application des critères de mérite et le choix du processus de dotation se rapportant à neuf nominations intérimaires effectuées dans certains cas sous le régime de l’ancienne LEFP. Il cherchait à obtenir des éléments d’information tels que les avis liés aux affectations intérimaires et aux prolongations; le processus de présélection utilisé et les notes prises, le sommaire des détails concernant chaque candidat, la confirmation que les candidats possédaient ou non les qualifications requises et le nom des postulants pris en considération pour les postes à doter. Le plaignant a fait valoir que les renseignements demandés étaient pertinents en l’espèce. L’intimé a répliqué que lesdits renseignements n’avaient aucun rapport avec la plainte. L'intimé et la Commission de la fonction publique ont soutenu que le Tribunal n'avait pas compétence pour se prononcer sur six des nominations faites en vertu de l'ancienne LEFP, et que la plainte présentée à l'encontre des trois autres nominations l'avait été en dehors du délai prescrit. L’intimé a déclaré que les employés sont informés de toutes les nominations au moyen d’un système électronique. Aux dires du plaignant, il n’a jamais été mis au courant de ces nominations intérimaires et celles-ci n’avaient pas été affichées sur Publiservice. Il a fait valoir que sa plainte devait être considérée comme valide et déposée dans les délais prescrits car l’intimé n’avait fourni aucun avis approprié. Décision : Le Tribunal a jugé qu’il avait compétence pour instruire la plainte au regard de certaines nominations intérimaires dont la prolongation s’est poursuivie sous le régime de la nouvelle LEFP, et que ladite plainte a été déposée en partie dans les délais prescrits. Pour ce qui concerne les autres nominations intérimaires, certains éléments de la plainte ont été présentés hors délai; le Tribunal n’avait donc pas compétence pour statuer sur cet aspect du dossier. S’agissant de la demande d’ordonnance de communication de renseignements, le Tribunal a fait remarquer que les allégations du plaignant ne portaient pas sur des anomalies dans l’établissement des critères de mérite. Celui-ci n’avait pas établi en l’espèce la pertinence des renseignements concernant la présélection, les évaluations, les notes et les sommaires des détails relatifs aux candidats retenus. Comme la plainte portait sur les raisons pour lesquelles le plaignant n’avait pas été choisi en vue d’une autre nomination intérimaire, le Tribunal a conclu à la pertinence des renseignements liés à l’examen ou à l’évaluation de ce dernier par rapport aux nominations intérimaires des candidats reçus. Requête accordée en partie.

Contenu de la décision

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Dossier:
2006-0102
Rendue à:
Ottawa, le 21 mars 2007

PAUL CHAVES
Plaignant
ET
LE COMMISSAIRE DU SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Demande d'ordonnance de communication de renseignements
Décision:
La demande est accueillie en partie
Décision rendue par:
Helen Barkley, membre
Langue de la décision:
Anglais
Répertoriée:
Chaves c. Commissaire du Service correctionnel du Canada et al.
Référence neutre:
2007 TDFP 0009

Motifs de la décision

Introduction

1 Le plaignant présente une demande d’ordonnance au Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) pour la communication de renseignements liés à une plainte déposée en vertu du paragraphe 77(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP). L’intimé fait valoir que le Tribunal n’a pas compétence pour entendre cette plainte.

Contexte

2 Le 31 août 2006, Paul Chaves a déposé une plainte auprès du Tribunal concernant des nominations intérimaires se rapportant à neuf postes d’agent de libération conditionnelle (WP-04) à l’établissement de Millhaven, situé à Bath, en Ontario, pour le Service correctionnel du Canada. La plainte a été déposée à l’encontre des nominations intérimaires de Frederic Héran, Joanne Rutley, Kevin White, Margaret Tudor, Kathryn Patterson, Andrew Vanhorn, Rose Spicer, Louise Flanagan et Paul Pindred.

3 Le plaignant occupe actuellement un poste d’agent des programmes sociaux à l’établissement de Millhaven. Il déclare avoir éré nommé à des postes intérimaires d’agent de libération conditionnelle de juillet 2004 à août 2005. Le plaignant affirme que malgré l’intérêt qu’il a montré, on a refusé de lui accorder d’autres nominations intérimaires, alors que d’autres personnes ont pu être bénéficiaires de plusieurs nominations intérimaires supplémentaires.

4 Dans sa plainte, le plaignant indique qu’il y a eu abus de pouvoir en ce qui concerne l’application des critères de mérite et le choix du processus de dotation se rapportant aux nominations intérimaires en question.

5 Le commissaire du Service correctionnel du Canada (l’intimé) déclare que six de ces nominations (Frederic Héran, Joanne Rutley, Kevin White, Margaret Tudor, Kathryn Patterson et Andrew Vanhorn) avaient d’abord été faites en 2005 en vertu de l’ancienne Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.R.C. 1985, ch. P-33 (l’ancienne LEFP), puis prolongées en 2006.

6 Une rencontre aux fins de communication de renseignements a eu lieu entre les parties. Lors de cette rencontre, le plaignant a obtenu une partie des renseignements demandés, notamment en ce qui concerne les nominations intérimaires, les dates et les copies des énoncés de qualités/des critères de mérite, ainsi que les copies des avis de chaque droit d’appel liés aux nominations intérimaires.

7 Le plaignant n’a pas reçu les autres renseignements demandés, soit : les avis liés aux affectations intérimaires et aux prolongations; le processus de présélection utilisé pour déterminer les candidats retenus (y compris les évaluations faites et les notes prises au cours du processus); tout résumé concernant chacun des candidats (y compris le plaignant, car ce dernier affirme qu’il faisait partie du bassin de candidats initial); la confirmation que les candidats respectaient ou ne respectaient pas les qualités requises; et les noms des personnes faisant partie du bassin de candidats retenus aux fins de sélection des postes à doter.

8 L’intimé est d’avis que les renseignements demandés n’ont aucun rapport avec la plainte. Il affirme aussi que le Tribunal n’a pas compétence pour se prononcer sur les six nominations intérimaires faites en vertu de l’ancienne LEFP. De plus, l’intimé indique que la plainte concernant les nominations intérimaires de Rose Spicer, Louise Flanagan et Paul Pindred, faites en vertu de la LEFP, a été déposée en dehors des délais prescrits. L’intimé a demandé que la plainte soit rejetée.

Questions en litige

9 Le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :

  1. Le Tribunal a-t-il compétence pour examiner la plainte concernant les nominations intérimaires des personnes ci-après, ou de certaines d’entre elles : F. Héran, J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson et A. Vanhorn?
  2. La plainte concernant les nominations de R. Spicer, P. Pindred et L. Flanagan a-t-elle été déposée en dehors des délais prescrits et, dans l’affirmative, une prorogation devrait-elle être accordée?
  3. Si le Tribunal a compétence pour entendre la plainte, devrait‑il prononcer une ordonnance de communication de renseignements?

Observations du plaignant

10 Le plaignant affirme qu’il n’a jamais été informé au sujet de l’une ou l’autre de ces nominations intérimaires. Il ajoute qu’aucun avis public n’a été affiché et qu’il a fait une recherche concernant les notifications dans le site Web Publiservice du gouvernement du Canada. Il a effectué une recherche dans les liens menant aux Annonces et notifications de dotation de la fonction publique (nouvelle Loi sur l’emploi dans la fonction publique) et aux avis de dotation de la fonction publique (avant la nouvelle Loi sur l’emploi dans la fonction publique). Le plaignant affirme que sa plainte doit être considérée comme valide et déposée dans les délais prescrits, car l’intimé n’a fourni aucun avis approprié.

11 En ce qui concerne la troisième question, le plaignant déclare que tous les renseignements qu’il a demandés constituaient « un élément essentiel de notre présentation d’un cas précis, honnête et factuel fondé sur tous les faits connexes se rapportant à la plainte » [Traduction]. Ainsi, le plaignant affirme que tous les renseignements demandés sont applicables à sa plainte.

Observations de l’intimé

12 L’intimé indique que F. Héran, J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson et A. Vanhorn ont été nommés de façon intérimaire en vertu de l’ancienne LEFP, et que ces nominations étaient sujettes à un droit d’appel en vertu de cette loi. M. Héran a été nommé à partir d’une liste d’admissibilité, et le droit d’appel a été affiché en juillet 2006. Les Avis de droit d’appel liés aux autres nominations ont été affichés en mai 2006. Le 24 octobre 2006, la Commission de la fonction publique a décidé que l’appel interjeté par le plaignant à l’encontre de la nomination intérimaire de M. Héran était sans objet et que les appels à l’encontre des autres nominations intérimaires avaient été interjetés en dehors des délais prescrits aux termes de l’article 21 du Règlement sur l’emploi dans la fonction publique (2000), DORS/2000-80. Comme ces nominations ont été faites en vertu de l’ancienne LEFP, l’intimé prétend que le Tribunal n’a pas compétence pour statuer sur la plainte de M. Chaves à l’encontre de ces nominations.

13 L’intimé ajoute que R. Spicer, L. Flanagan et P. Pindred ont été nommés de façon intérimaire en 2006 en vertu de la LEFP, mais que le plaignant a omis de se prévaloir de son droit de porter plainte au cours de la période prévue à cet effet (du 2 au 15 mai 2006, et du 1er au 15 juin 2006). M. Chaves a déposé sa plainte à l’encontre des neuf nominations le 31 août 2006.

14 L’intimé déclare que, bien qu’aucun avis ne soit envoyé aux employés individuellement, la pratique relative à la notification n’a pas changé par rapport à ce qu’elle était sous le régime de l’ancienne LEFP, c’est‑à‑dire qu’un système électronique est utilisé pour informer les employés au sujet de toutes les nominations. Comme l’intimé l’indique dans sa réponse : « La méthode antérieure, à savoir l’envoi d’avis électroniques aux employés faisant partie de la zone de sélection, et plus récemment de la zone de recours, reste inchangée. » [Traduction].

15 L’intimé affirme que les procédures de notification, appliquées à l’ensemble de ces nominations intérimaires, répondaient aux exigences énoncées dans l’article 13 du Règlement sur l’emploi dans la fonction publique, DORS/2005-334, c’est‑à‑dire que les avis informaient par écrit les personnes faisant partie de la zone de recours (les employés du Service correctionnel du Canada en poste dans la région de l’Ontario, y compris le plaignant) des noms des personnes nommées ou proposées en vue d’une nomination, de même que de leur droit de porter plainte et des motifs pour le faire. Ainsi, contrairement à la situation décrite dans la décision Sherif c. le Sous‑ministre d’Agriculture et Agroalimentaire Canada et al., [2006] TDFP 0003, les avis en question n’étaient ni incomplets, ni irréguliers.

16 L’intimé soutient que la responsabilité de déposer une plainte dans les délais prescrits incombait au plaignant. Ce dernier était au travail pendant la période où les avis ont été diffusés. Il avait accès au système de notification, mais il a omis de déposer une plainte dans les délais indiqués dans les avis. La plainte a été déposée en dehors des délais prescrits, et le plaignant n’a fait la preuve d’aucune circonstance exceptionnelle qui pourrait justifier la prorogation du délai lui permettant de déposer sa plainte.

17 Finalement, en ce qui concerne la dernière question, l’intimé prétend que puisque le Tribunal doit déterminer qu’il n’a pas compétence pour statuer sur les six premières nominations, et puisque le plaignant n’a pas déposé de plainte dans les délais prescrits en ce qui concerne les trois autres nominations, « il n’est pas utile de fournir les renseignements demandés » [Traduction].

Observations de la Commission de la fonction publique

18 La Commission de la fonction publique (la CFP) affirme que les nominations de F. Héran, J. Rutley, K. White, M. Tudor, K Patterson et A. Vanhorn ont été faites à la suite de processus de dotation menés en vertu de l’ancienne LEFP et que le Tribunal n’a donc pas compétence en l’espèce.

19 En ce qui concerne les nominations de R. Spicer, L. Flanagan et P. Pindred, la CFP prétend que le plaignant a déposé sa plainte presque deux mois après la période limite et n’a demandé aucune prorogation au Tribunal pour déposer sa plainte de façon tardive. La CFP recommande que la plainte soit rejetée dans son ensemble.

Analyse

Question I: Le Tribunal a-t-il compétence pour examiner la plainte concernant les nominations intérimaires, prétendument faites en vertu de l’ancienne LEFP, des personnes ci-après, ou de certaines d’entre elles : F. Héran, J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson et A. Vanhorn?

20 Comme ces six nominations intérimaires ont initialement été faites avant le 31 décembre 2005, mais qu’elles se sont poursuivies après cette date, il est nécessaire d’examiner les dispositions transitoires de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22(la LMFP). Les articles 70 et 71 de la Partie 5 de la LMFP sont ainsi rédigés :

70. L’entrée en vigueur du paragraphe 29(1) de la nouvelle loi est sans effet sur la tenue des concours déjà ouverts ou sur les procédures de sélection en cours sous le régime de la loi modifiée.

71. Les listes d’admissibilité établies sous le régime de la loi modifiée avant l’entrée en vigueur du paragraphe 29(1) de la nouvelle loi continuent d’être valides pour la durée fixée au titre du paragraphe 17(2) de la loi modifiée, jusqu’à concurrence de six mois suivant cette entrée en vigueur.

21 Ainsi, une nomination effectuée après le 31 décembre 2005 peut relever de l’ancienne LEFP si le processus de sélection était en cours le 31 décembre 2005, ou si la nomination a été effectuée à partir d’une liste d’admissibilité valide à cette date.

22 L’intimé a indiqué que les nominations intérimaires de M. Héran ont eu lieu au terme du concours 05–CSC–ONT–401–CC–40. Ces nominations couvraient la période allant du 31 octobre 2005 jusqu’à ce que M. Héran soit nommé pour une durée indéterminée le 31 juillet 2006. La dernière nomination intérimaire a eu lieu le 31 mai 2006. Le Tribunal estime que la liste d’admissibilité était valide le 31 décembre 2005, de même que lorsque la dernière nomination intérimaire a eu lieu le 31 mars 2006. Par conséquent, la nomination de M. Héran a été faite en vertu de l’ancienne LEFP. Le Tribunal n’a pas compétence pour examiner une plainte concernant cette nomination.

23 Les nominations intérimaires initiales de Mme Rutley, M. White, Mme Tudor, Mme Patterson et M. Vanhorn ont été faites sans concours en vertu de l’ancienne LEFP, à la fin de 2005. L’intimé prétend que les nominations intérimaires de ces personnes faites après le 31 décembre 2005 n’étaient que des prolongations des nominations intérimaires initiales et, par conséquent, qu’elles ont eu lieu en vertu de l’ancienne LEFP.

24 Le Tribunal a examiné la question relative à la nature de la « prolongation » d’une nomination intérimaire dans la décision Wylie c. le Président de l’Agence des services frontaliers du Canada et al., [2006] TDFP 0007, aux paragraphes 19 et 20 :

19 Le libellé de l'article 58 de la LEFP stipule clairement que les prolongations de nominations intérimaires constituent des nominations. Ainsi, l'article 58 de la LEFP stipule ce qui suit :

58. (1) Sous réserve de l'article 59, le fonctionnaire nommé ou muté pour une durée déterminée perd sa qualité de fonctionnaire à l'expiration de la période fixée ou de toute période de prolongation fixée en vertu du paragraphe (2).

(2) L'administrateur général peut prolonger la durée déterminée; cette prolongation ne constitue pas une nomination ni une mutation et ne donne à personne le droit de présenter une plainte en vertu de l'article 77.

(3) Le présent article ne s'applique pas aux nominations intérimaires.

[20] Alors que le paragraphe 58(2) de la LEFP permet de prolonger une nomination pour une durée déterminée sans qu'il soit nécessaire de faire une nouvelle nomination, le paragraphe 58(3) exclut expressément cette latitude en ce qui a trait à la prolongation des nominations intérimaires. Ainsi, le Tribunal est d'avis que chaque nomination faite pour une période intérimaire et chaque prolongation d'une telle nomination constituent une nomination assujettie aux exigences de la LEFP et de son règlement, y compris celles en matière de recours.

25 En l’espèce, les nominations intérimaires suivantes ont eu lieu :

J. Rutley : Du 14 mars au 31 mai 2006 et du 1er juin au 31 août 2006;
K. White : Du 9 mars au 31 mai 2006 et du 1er juin au 31 août 2006;
M. Tudor : Du 9 mars au 31 mai 2006 et du 1er juin au 31 août 2006;
K. Patterson : Du 14 mars au 31 mai 2006 et du 1er juin au 31 août 2006;
A. Vanhorn : Du 7 mars au 31 mai 2006 et du 1er juin au 31 août 2006.

26 Le Tribunal juge que les nominations intérimaires de J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson et A. Vanhorn ont été faites en vertu de la LEFP. Comme la période cumulative des nominations était de plus de quatre mois, celles‑ci pourraient faire l’objet d’une plainte en vertu de l’article 77 de la LEFP.

27 L’intimé a donné avis de ces nominations en mai 2006 en affichant un avis de droit d’appel auprès de la Commission de la fonction publique dans un système électronique auquel avaient accès toutes les personnes se trouvant dans la zone de recours. Ce faisant, l’intimé a utilisé la mauvaise procédure concernant l’affichage des avis.

28 L’article 13 du REFP établit les obligations relatives à la notification des personnes faisant partie de la zone de recours en ce qui concerne une nomination intérimaire :

13. Lorsque les nominations ci-après sont faites ou proposées dans le cadre d’un processus de nomination interne, la Commission avise par écrit les personnes qui sont dans la zone de recours, au sens du paragraphe 77(2) de la Loi, du nom de la personne qu’elle propose ainsi de nommer ou qu’elle a ainsi nommée, selon le cas, de leur droit de porter plainte et des raisons pour lesquelles elles peuvent le faire :

a) la nomination intérimaire de quatre mois ou plus;

b)la nomination intérimaire portant la durée cumulative de la nomination intérimaire d’une personne à quatre mois ou plus.

29 Le Tribunal conclut que les personnes faisant partie de la zone de recours, y compris le plaignant, n’ont pas été informées convenablement en ce qui concerne les motifs de plainte et leur droit de déposer une plainte auprès du Tribunal.

30 Comme il est expliqué dans la décision Sherif c. le Sous‑ministre d’Agriculture et Agroalimentaire Canada et al., [2006] TDFP 0003, si la notification est incomplète ou incorrecte, elle n’est pas considérée comme étant convenable. Si la notification a été faite de façon inappropriée, la plainte n’est pas considérée comme ayant été déposée de façon tardive.

31 Comme M. Chaves n’a pas été avisé de façon convenable de son droit de déposer une plainte auprès du Tribunal en ce qui concerne les nominations intérimaires de Mme Rutley, M. White, Mme Tudor, Mme Patterson et M. Vanhorn faites en 2006, la plainte en ce qui concerne ces nominations est considérée comme ayant été déposée dans les délais prescrits. En conséquence, le Tribunal a compétence pour entendre sa plainte en ce qui concerne ces nominations intérimaires. Comme il est expliqué dans la décision Sherif (supra), le Tribunal n’a pas besoin de reporter l’examen de ces nominations jusqu’à ce qu’une notification convenable ait eu lieu en vertu de l’article 13 du REFP.

Question II: La plainte concernant les nominations de R. Spicer, P. Pindred et L. Flanagan a-t-elle été faite en dehors des délais prescrits et, dans l’affirmative, une prorogation doit-elle être accordée?

32 L’intimé a indiqué que ces nominations avaient été faites en vertu de la LEFP. Il a fourni au Tribunal des copies de l’Avis de nomination de R. Spicer et P. Pindred. L’intimé déclare que des avis ont été transmis par système électronique aux personnes faisant partie de la zone de recours. La période prévue pour déposer une plainte à l’encontre de la nomination de R. Spicer était du 12 au 26 mai 2006, et dans le cas de P. Pindred, du 1er au 15 juin 2006. L’intimé n’a fourni aucun renseignement concernant la nomination intérimaire de Louise Flanagan, à l’exception du fait que la période cumulative était du 16 janvier au 31 mai 2006.

33 Le plaignant affirme qu’il n’y a eu aucun avis public concernant ces nominations intérimaires. Par conséquent, la plainte relative à ces nominations intérimaires ne peut pas être considérée comme ayant été déposée en dehors des délais prescrits. Le paragraphe 10. (1) du Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS 2006-6 (le Règlement du TDFP), est ainsi rédigé :

10. (1) La plainte est présentée au Tribunal au plus tard quinze jours après la date :

a) où l’avis de mise en disponibilité, de révocation, de nomination ou de proposition de nomination en faisant l’objet été reçu;

b) figurant sur l’avis, s’il s’agit d’un avis public.

34 Les personnes faisant partie de la zone de recours doivent être informées des nominations et, dans les cas de nominations intérimaires, les exigences relatives à la communication d’un avis en vertu de l’article 13 du REFP doivent être respectées. Ni la LEFP, ni le REFP ne précise de quelle façon l’avis doit être transmis aux personnes faisant partie de la zone de recours.

35 Le Tribunal estime que les avis concernant ces nominations intérimaires affichés dans le système électronique de l’intimé constituaient des avis publics, et donc que le plaignant devait se conformer à l’alinéa 10b) du Règlement du TDFP.

36 Le plaignant a déposé sa plainte le 31 août 2006 et, par conséquent, la plainte a été présentée en dehors des délais prescrits en ce qui concerne les nominations de R. Spicer et de P. Pindred. Le Tribunal devrait-il exercer son pouvoir discrétionnaire aux termes de l’article 5 du Règlement du TDFP pour proroger le délai maximal de 15 jours prévu pour déposer une plainte concernant les nominations intérimaires de R. Spicer et de P. Pindred? La question a été abordée dans la décision Casper c. le Sous-ministre de Citoyenneté et Immigration Canada et al., [2006] TDFP 0010. Au paragraphe 22 de cette décision, le Tribunal a déclaré ce qui suit :

[22] Il est important que les parties sachent que les délais doivent être respectés pour que la procédure se déroule convenablement. Par souci d’équité, le Tribunal peut proroger des délais stricts de présentation d’une plainte. La plaignante a le fardeau de fournir les motifs relatifs à la demande de prorogation. À moins de circonstances exceptionnelles, le Tribunal n’accordera pas de prorogation.

37 Le Tribunal est convaincu que le plaignant a été informé de ces nominations par la méthode habituelle utilisée par le ministère, à savoir un système électronique interne. Il a omis de présenter des circonstances exceptionnelles pour expliquer pourquoi sa plainte n’a pas été déposée dans les délais prescrits. Aucune prorogation de délai ne sera accordée.

38 La nomination intérimaire de L. Flanagan a été faite pour une période plus courte. L’intimé a indiqué que Mme Flanagan avait d’abord été nommée de façon intérimaire, à savoir du 16 janvier au 13 avril 2006. Cette nomination a été « prorogée » du 14 avril au 31 mai 2006, pour une période cumulative de plus de quatre mois. L’intimé a donc été obligé, conformément à l’article 13 du REFP, d’aviser les personnes faisant partie de la zone de recours au sujet de l’identité de la personne nommée, ainsi que de leur droit de porter plainte et des motifs connexes. Comme M. Chaves n’a pas été informé convenablement de son droit de porter plainte auprès du Tribunal en ce qui concerne la nomination intérimaire de Mme Flanagan, la plainte relative à cette nomination intérimaire est considérée comme ayant été déposée dans les délais prescrits. En l’espèce, il n’est donc pas nécessaire de se pencher sur la question de savoir si une prorogation doit être accordée en vertu de l’article 5 du Règlement du TDFP.

Question III: Si le Tribunal a compétence pour entendre la plainte, devrait‑il accorder une ordonnance de communication de renseignements?

39 L’article 16 du Règlement du TDFP exige que l’administrateur général et le plaignant échangent tous les renseignements pertinents à la plainte. Au paragraphe 22 de la décision Oddie c. le Sous-ministre de la Défense nationale et al., [2006] TDFP 0009, le Tribunal a déclaré ce qui suit:

[22] (…) La plaignante doit démontrer à la satisfaction du Tribunal qu'il y a un lien très clair, ou en d'autres mots, un lien concret entre les renseignements demandés et la question à l'étude. En outre, la demande doit être suffisamment précise de sorte qu'il n'y ait aucune ambiguïté quant à ce qui est demandé. Enfin, le Tribunal doit être convaincu que la communication des renseignements ne causera aucun préjudice indu.

40 Le fondement de la plainte est lié au fait qu’en 2005, le plaignant a été écarté d’un certain nombre de nominations intérimaires au poste d’agent de libération conditionnelle après une période d’un an, alors que d’autres employés ont bénéficié de nominations intérimaires plus longues. Le plaignant veut savoir si sa candidature a été examinée pour d’autres nominations intérimaires et pourquoi il n’a jamais eu d’autres occasions d’occuper des postes intérimaires.

41 Ainsi, le fondement de la plainte est axé sur le fait que le plaignant n’a pas été choisi pour bénéficier d’une autre nomination intérimaire, alors que neuf autres personnes l’ont été (soulignement ajouté). Il n’a pas prétendu qu’il y avait des anomalies dans l’établissement des critères de mérite. Dans la décision Visca c. le Sous-ministre de la Justice et al., [2006] TDFP 0016 rendue par le Tribunal, la LEFP n’exige pas l’établissement d’un classement ou d’une évaluation comparative. En conséquence, les évaluations des personnes nommées ne sont pas automatiquement pertinentes au regard du dépôt d’une plainte. Pour établir la pertinence, le plaignant doit démontrer l’existence d’un lien clair entre la plainte et les évaluations des autres personnes. Le plaignant prétend qu’il y a eu abus de pouvoir dans l’application (ou l’absence d’application) des critères de mérite dans son cas. Il ne s’est pas acquitté de sa responsabilité d’établir la pertinence des renseignements concernant la présélection, les évaluations, les notes et les résumés se rapportant aux personnes nommées par rapport à sa plainte.

42 En l’espèce, le manque de précision de la demande de documents constitue une difficulté supplémentaire. Le plaignant ne précise pas quels documents ont déjà été fournis par l’intimé, ni quels documents en particulier sont encore nécessaires.

43 Le plaignant a déjà reçu des copies des avis de nomination (qu’il a nommés « affiches » [traduction]) et des énoncés des critères de mérite. Comme sa plainte porte sur les raisons pour lesquelles il n’a pas été choisi en vue d’une autre nomination intérimaire, le Tribunal est convaincu que les renseignements, s’il en est, qui sont liés à l’examen ou à l’évaluation du plaignant par rapport aux nominations intérimaires de J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson, A. Vanhorn et L. Flanagan, sont pertinents en l’espèce.

Décision

44 Le Tribunal a compétence pour entendre la plainte de M. Chaves concernant les nominations intérimaires de J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson, A. Vanhorn et L. Flanagan, et pour statuer à cet égard.

45 Le Tribunal n’a pas compétence pour entendre la plainte de M. Chaves concernant les nominations intérimaires de F. Héran, R. Spicer et P. Pindred.

46 La demande d’ordonnance de communication de renseignements présentée par le plaignant est accueillie en partie.

Ordonnance

47 Le Tribunal ordonne à l’intimé de fournir au plaignant tous les renseignements relatifs à l’examen ou à l’évaluation, le cas échéant, de la candidature de M. Chaves dans le cadre des processus de sélection qui ont mené aux nominations intérimaires de J. Rutley, K. White, M. Tudor, K. Patterson, A. Vanhorn et L. Flanagan. Si les renseignements en question sont disponibles, ils doivent être communiqués au plaignant dans les 10 jours suivant la date de la présente décision.

48 L’intimé dispose d’un délai de 15 jours à compter de la date de la présente décision pour répondre aux allégations. Les autres délais sont ajustés en conséquence.

Helen Barkley

Membre

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2006-0102
Intitulé de la cause:
Paul Chaves et le Commissaire du Service correctionnel du Canada et al.
Audience:
Demande écrite; décision rendue sans comparution des parties
Date des motifs:
Le 21 mars 2007
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