Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant n’a pas été nommé au poste de juriste-expert par suite d’un processus selon lequel les qualifications essentielles ont été classées par ordre d’importance. Les candidats qualifiés devaient obtenir au moins la cote << Distinction >> pour chacun des critères de mérite aux fins de présélection. L’application de cette cote aux deux premiers critères a permis la présélection de trois candidats. Étant donné que le plaignant n’avait obtenu que la cote << Réussite >> pour le deuxième critère (jugement), sa candidature n’a pas été retenue. Le plaignant a présenté les quatre allégations suivantes : le comité de sélection a modifié de façon arbitraire et injuste la qualification essentielle annoncée << expérience approfondie et récente >>; les critères de mérite n’ont pas été évalués correctement dans la mesure où seuls les candidats ayant obtenu la cote la plus élevée en matière d’expérience ont pu passer à l’étape suivante de présélection; le comité de sélection l’a mal évalué par rapport au critère de jugement; il était injuste de la part du comité de sélection de faire appel à plusieurs jurys pour mener les entrevues. L’intimé a présenté dans son argumentation les points suivants : l’expérience des candidats a été évaluée sous deux angles - l’étendue et la nouveauté - à importance égale; il y avait des raisons légitimes de classer en premier la qualification essentielle << expérience approfondie et récente >>. Ce classement a été établi en vertu de l’article 31 de la LEFP et traduisait les exigences du poste; le plaignant a eu la possibilité de démontrer sa capacité de discernement; la LEFP vise expressément à donner la marge de manœuvre nécessaire dans le choix des méthodes d’évaluation; il n’y aucune exigence par rapport à l’uniformité d’un comité; l’utilisation de plusieurs jurys est une pratique bien ancrée dans la fonction publique fédérale. La Commission de la fonction publique (CFP) a soutenu que le Tribunal devrait adopter une définition étroite de l’abus de pouvoir et que même si ce dernier optait pour une définition plus large, il faudrait alors une part d’intention illégitime. Par exemple, le Tribunal pourrait imputer la mauvaise foi en cas de preuve d’insouciance ou d’imprudence grave. Décision: Conclusion du Tribunal : l’erreur de formatage du guide de cotation s’apparentait à une simple faute typographique et ne constituait pas un abus de pouvoir; d’ailleurs cette erreur n’a eu aucun effet sur l’évaluation des critères de mérite; l’expression << divers moyens >> était utilisée dans l’annonce dans un sens suffisamment large pour englober les méthodes d’évaluation choisies dans le processus de nomination; il n’y a pas eu abus de pouvoir dans l’évaluation du critère << jugement >>; l’utilisation de plusieurs jurys fait partie intégrante du pouvoir discrétionnaire considérable octroyé aux gestionnaires en vertu de la LEFP; Il incombe au plaignant de prouver ses allégations d’abus de pouvoir. Or, il n’a apporté aucun élément de preuve convaincant. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Coat of Arms - Armoiries
Dossier:
2006-0096
Rendue à:
Ottawa, le 31 mai 2007

RICK VISCA
Plaignant
ET
LE SOUS-MINISTRE DE LA JUSTICE
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Plainte d'abus de pouvoir en vertu de l'alinéa 77(1)(a) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique
Décision:
La plainte est rejetée
Décision rendue par:
Guy Giguère, président
Langue de la décision:
Anglais
Répertoriée:
Visca c. Sous-ministre de la Justice et al.
Référence neutre:
2007 TDFP 0024

Motifs de la décision

Introduction

1 Le plaignant, Rick Visca, porte plainte au motif qu’il n’a pas été nommé au poste de juriste-expert, Équipe des poursuites contre la drogue, au ministère de la Justice (le MJ) pour cause d’abus de pouvoir dans l’application des critères de mérite.

Contexte

2 Le plaignant a participé à un processus de sélection annoncé (Numéro 06‑Jus‑Tor‑CC-29431) visant à doter un poste de juriste-expert au sein de l’Équipe des poursuites contre la drogue, groupe et niveau LA-2B, au MJ, Service fédéral des poursuites (le SFP), à Toronto. Vingt demandes ont été reçues. Dix-sept candidats, dont M. Visca, ont vu leur candidature retenue à la présélection, puis ont été évalués dans le cadre d’une entrevue et jugés qualifiés.

3 Dans le cadre du processus d’évaluation, le MJ a choisi de classer les qualifications essentielles par ordre d’importance. Des questions étaient prévues pour chacune des qualifications essentielles, et les réponses des candidats étaient cotées. La sélection aux fins de nomination parmi les candidats qualifiés s’est faite en se servant de, la cote « Distinction » comme point de démarcation. Ce point de démarcation a été utilisé dans l’évaluation des qualifications essentielles en débutant par la plus importante. Les trois candidats retenus ont été désignés de cette façon, après examen des deux premières qualifications essentielles.

4 M. Visca n’a pas été nommé au poste de juriste-expert à la suite du processus susmentionné. Le 22 août 2006, il a présenté une plainte auprès du Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP).

5 M. Visca a présenté quatre allégations relativement à sa plainte. En premier lieu, il allègue que le comité de sélection a modifié de façon arbitraire et injuste le critère annoncé « Vaste expérience récente », en accordant plus de poids au qualificatif « récent ». En deuxième lieu, il allègue que les critères de mérite n’ont pas été évalués correctement, car seuls les candidats ayant reçu la cote la plus élevée pour leur expérience ont pu passer à l’étape suivante, soit l’évaluation des autres qualifications essentielles et des qualifications constituant un atout. En troisième lieu, il se plaint que le comité de sélection l’a mal évalué par rapport au critère de jugement. Enfin, il prétend qu’il était injuste de la part du comité de sélection de faire appel à plusieurs jurys pour mener les entrevues.

RÉSUMÉ DES ÉLÉMENTS DE PREUVE PERTINENTS

6 La carrière du plaignant a débuté au MJ en novembre 1994, au bureau régional de l’Ontario du SFP, à Toronto. Il a travaillé à la réalisation d’un projet pilote au Old City Hall de 1994 à 1997 où, en raison de son rôle très actif devant les tribunaux, il a acquis des connaissances juridiques et développé ses compétences en qualité de plaideur. L’expérience aidant, il a pu prendre part à des procès de plus en plus complexes. De 1997 à 2003, il s’est occupé de causes inscrites à la Cour supérieure avec ou sans jury. C’est au cours de la dernière partie de cette période qu’il est devenu membre de l’Équipe de la lutte contre le crime organisé au MJ.

7 En 2001, il a pris part à un processus de dotation visant à doter un poste d’avocat principal au SFP, et son nom a été inscrit sur une liste d’admissibilité pour un poste de groupe et niveau LA-2B en février 2002. La période de validité de la liste d’admissibilité a été prolongée jusqu’en février 2004 sans qu’il soit nommé au poste d’avocat principal.

8 En 2002, M. Visca a demandé à être détaché au Bureau de la concurrence, à Toronto. Il a consulté M. Leising, alors directeur du SFP, qui était d’avis qu’un détachement ne nuirait pas à ses possibilités de carrière, car il pourrait ainsi acquérir une expérience plus vaste.

9 Le plaignant a été détaché au Bureau de la concurrence pour une période de deux ans, de 2003 à 2005, au cours de laquelle il a assumé les responsabilités d’avocat principal pour les dossiers touchant le télémarketing frauduleux.

10 M. Visca a traité environ 40 dossiers d’appel alors qu’il oeuvrait au sein de l’Équipe de la lutte contre le crime organisé. Au cours de son détachement au Bureau de la concurrence, il a continué à s’occuper de quelques dossiers d’appel relevant de l’Équipe de la lutte contre le crime organisé.

11 À son retour au SFP, en mai 2005, il a rencontré le directeur du Service, Morris Pistyner, pour lui faire part de son désir d’être affecté à des dossiers d’extradition au sein de l’Équipe de l’entraide internationale et, sinon, à des grands dossiers de poursuites contre les trafiquants de drogue au sein de l’Équipe de la lutte contre le crime organisé. M. Pistyner lui a plutôt demandé de joindre les rangs de l’Équipe du Revenu au sein de laquelle M. Pistyner avait été chef d’équipe, ce que M. Visca a fait.

12 Au début de l’année 2006, M. Kevin Wilson, directeur adjoint, Unité des initiatives stratégiques, au bureau régional de l’Ontario du SFP, s’est occupé de la préparation des processus de sélection visant à doter certains postes de juristes-experts au sein de l’Équipe des poursuites contre la drogue. M. Wilson a témoigné que l’énoncé des critères de mérite et le classement des critères par ordre d’importance ont été préparés au début du processus de nomination, et avant que l’on connaisse le nom des candidats.

13 Le classement des critères traduisait les exigences du poste de juriste‑expert, Équipe des poursuites contre la drogue, lesquelles comprenaient des questions de droit complexes en matière d’écoute électronique et le besoin que la personne nommée puisse accomplir toutes les fonctions du poste dès son entrée en fonction. La personne nommée serait amenée à diriger des poursuites complexes en matière d’écoute électronique et à jouer le rôle de mentor dès le départ. C’est donc la raison pour laquelle le critère classé en premier était le suivant : « Vaste expérience récente de l’exécution de poursuites complexes intentées en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, notamment des poursuites exigeant l’interception de communications. »

14 Il a été décidé que quatre avocats du bureau régional de l’Ontario du SFP feraient partie du comité de sélection. Étant donné leur disponibilité limitée et le nombre de candidats à interviewer, il a été décidé de constituer aussi des jurys de sélection. M. Wilson ferait partie de chaque jury de sélection, en compagnie de deux des trois autres avocats. Il y aurait également un conseiller en ressources humaines au sein de tous les jurys. Une fois les entrevues terminées, tous les membres des jurys se sont rencontrés, en qualité de comité de sélection, pour examiner les évaluations et choisir les candidats qui seraient nommés.

15 M. Wilson a expliqué qu’il ne fallait accorder aucune importance à l’inversion des termes vaste et récente des critères de mérite, qui devenaient en effet récente et vaste dans le guide de cotation. Il s’agissait d’une erreur typographique, et il ne s’en est rendu compte qu’au moment de la présentation de la plainte. Aucun des deux termes n’était prioritaire, car l’on recherchait une combinaison des deux. Selon M. Wilson, une expérience de 15 ans pouvait être vaste, mais peu à jour. À l’inverse, une personne possédant une expérience récente, mais peu vaste, dans le domaine de l’écoute électronique ne serait pas en mesure de traiter des dossiers complexes.

16 M. Wilson a également indiqué que le deuxième critère en importance était le jugement, car le poste exigeait de porter régulièrement des jugements importants. L’exercice de ce jugement consistait notamment à répondre aux questions suivantes : Y a-t-il une chance raisonnable d’obtenir une déclaration de culpabilité? Est-ce dans l’intérêt public de poursuivre?

17 À la fin de février 2006, des annonces ont été affichées pour les postes de juriste‑expert, Entraide internationale; juriste-expert, Unité de revenu; et juriste‑expert, Équipe des poursuites contre la drogue, tous au bureau régional de l’Ontario du SFP. M. Visca a posé sa candidature aux deux derniers processus de sélection.

18 La candidature de M. Visca au poste de juriste-expert, Unité de revenu, n’a pas été retenue à la présélection. L’expérience vaste et récente de l’exécution de poursuites complexes intentées en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, de la Loi sur la taxe d’accise ou de l’article 380 du Code criminel a été évaluée à l’étape de la présélection. Comme l’arrivée de M. Visca à l’Unité de revenu était récente, on a jugé qu’il ne satisfaisait pas à la qualification essentielle « Vaste expérience récente ».

19 La candidature de M. Visca au poste de juriste-expert, Équipe des poursuites contre la drogue, ayant été retenue à la présélection, il a été reçu en entrevue le 24 mai 2007. Le jury de sélection qui a interrogé le plaignant se composait de Kevin Wilson, de Bob Hubbard, avocat général principal à l’époque, et de Kelly Gorman, alors chef d’équipe. La conseillère en ressources humaines était Theresa Herreria.

20 Chaque membre du jury de sélection devait remplir le même guide de cotation pour chaque candidat et évaluer chaque réponse. Le barème de correction était le suivant : Échec (É); Réussite (R); Distinction (D); Supérieur (S) [Traduction]. Selon le guide de cotation, la cote « Échec » était réservée au postulant qui ne satisfait pas aux critères; la cote « Réussite » indiquait que le postulant satisfaisait au critère; le postulant qui satisfaisait amplement aux critères recevait la cote « Distinction »; enfin, la cote « Supérieur » était réservée au postulant exceptionnellement doué. Dans certains cas, les jurys ont décidé de qualifier davantage l’évaluation en attribuant un plus (+) ou un moins (-).

21 M. Wilson a précisé que les jurys de sélection ont appliqué les critères de mérite après avoir reçu la formation sur la nouvelle législation. Même si l’on dispose d’un plus grand pouvoir discrétionnaire en dotation aujourd’hui, il incombe aux gestionnaires de documenter et de justifier leurs choix. M. Wilson a déclaré dans son témoignage que si vous avez à qualifier un grand nombre de candidats et à choisir la personne nommée à même ce répertoire de candidats, vous devez d’abord déterminer les critères les plus importants.

22 M. Visca a reçu la cote « R » pour l’expérience, car il possédait une expérience relativement vaste dans les dossiers touchant l’écoute électronique, principalement en qualité d’avocat débutant et, par la suite, en qualité d’avocat principal dans une affaire importante en 2002-2003. Toutefois, d’autres candidats avaient une expérience aussi vaste mais plus récente.

23 En ce qui a trait au critère « jugement », les candidats devaient fournir deux exemples de situations où ils ont fait preuve de jugement. De l’avis du jury de sélection, le premier exemple fournit par M. Visca dénotait un jugement sûr, mais non pas le deuxième. Dans ce dernier cas, M. Visca a déclaré au jury avoir préparé un mémoire recommandant l’appel comme on lui avait demandé, mais sans trop d’enthousiasme, car il n’était pas d’accord avec la recommandation. M. Hubbart, membre du jury de sélection, a donné son point de vue concernant le critère « jugement », car il avait travaillé avec M. Visca et était au courant du deuxième exemple. De l’avis de M. Hubbard, M. Visca avait tendance « à compliquer des questions simples de droit » [Traduction]. M. Wilson a précisé que le jury de sélection avait attribué la cote « R » au critère « jugement » à M. Visca, car il ne pensait pas que ce dernier avait un mauvais jugement, mais qu’il n’atteignait pas le niveau « Distinction ».

24 M. Wilson a été contre-interrogé sur ce dernier point. Il a expliqué que M. Hubbard avait participé à environ 12 entrevues sur 17. Selon l’annonce de possibilité d’emploi, les qualifications essentielles seraient évaluées de différentes façons. Quelques méthodes d’évaluation ont été mentionnées, mais non utilisées, par exemple le jeu de rôle. Il a également été décidé de ne pas utiliser, tel qu’il avait prévu à l’origine, le Rapport d’évaluation et étude du rendement (REER). Il est à noter que dans le REER de M. Visca figurait une évaluation de rendement exceptionnel comme membre de l’Équipe des poursuites de Revenu.

25 Le plaignant a fourni au comité de sélection le nom de deux répondants pour la vérification des références. Les questions posées à ces personnes avaient trait aux critères de mérite. Les deux ont indiqué que M. Visca avait un excellent jugement et l’une d’entre elles a donné des exemples de son expérience de travail avec lui, dans le cadre de procès en matière de drogues. Les références ont circulé parmi les membres du comité de sélection.

26 Tous les membres des jurys se sont réunis en comité de sélection en juillet 2006 pour sélectionner les candidats qui seraient nommés. Ils ont commencé par le critère le plus important, soit la vaste expérience récente. Tous les candidats ayant reçu la cote D ou S voyaient leur candidature retenue aux fins de la nomination. Le plaignant ayant reçu la cote R, sa candidature n’a donc pas été retenue ni évaluée par rapport au deuxième critère, le jugement. Le comité de sélection a été en mesure de désigner les trois candidats qui seraient nommés après l’examen du deuxième critère.

27 M. Wilson a déclaré dans son témoignage que si le plaignant avait reçu la cote Distinction plutôt que la cote Réussite au regard des deux premiers critères, cela n’aurait fait aucune différence. En effet, chacun des candidats retenus avait reçu la cote S ou D+ dans des domaines où le plaignant avait reçu un D.

28 M. Wilson a déclaré être pleinement conscient aujourd’hui que dans le cas du plaignant, il n’avait examiné qu’un seul critère et avait mis de côté les autres. Dans les processus à venir, a-t-il ajouté, il serait porté à examiner tous les critères. Toutefois, même s’il l’avait fait dans ce cas-ci, il n’y aurait eu aucune différence, car les résultats du plaignant étaient en deçà de ceux de deux des trois candidats retenus pour ce qui est des deux premiers critères, et qu’ils n’étaient pas supérieurs pour ce qui est des autres critères.

Questions en litige

29 Le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :

  1. Le comité de sélection a-t-il accordé plus d’importance à l’expérience récente qu’à la vaste expérience dans le cadre de l’évaluation des candidats et, dans l’affirmative, cela constitue-t-il un abus de pouvoir?
  2. La décision du comité de sélection de ne pas poursuivre l’évaluation du plaignant constitue-t-elle un abus de pouvoir?
  3. Y a-t-il eu abus de pouvoir dans la façon dont le critère « jugement » a été évalué?
  4. (iv) L’utilisation de plusieurs jurys pour évaluer les candidats constitue-t-elle un abus de pouvoir?

Question I: Le comité de sélection a-t-il accordé plus d’importance à l’expérience récente qu’à la vaste expérience dans le cadre de l’évaluation des candidats et, dans l’affirmative, cela constitue-t-il un abus de pouvoir?

Observations

30 Le plaignant estime qu’il y a eu abus de pouvoir en raison du fait que le comité de sélection a modifié l’ordre dans lequel l’expérience vaste et récente était évaluée. Les notes inscrites dans les guides de cotation de M. Hubbard et de Mme Herreira démontrent que l’on a accordé plus d’importance au terme « récente » que « Vaste ». Ce faisant, le comité de sélection a favorisé certains candidats au détriment d’autres. À son avis, c’était une erreur grave d’intervertir les termes « Vaste » et « récente », et ce n’était pas raisonnable.

31 L’intimé soutient que, contrairement aux allégations du plaignant, l’expérience récente ne reléguait pas au second plan la vaste expérience dans le processus de sélection. L’évaluation de l’expérience des candidats s’est faite sur deux plans, la durée et son caractère récent. Le changement dans l’ordre des mots décrivant le critère « expérience » dans l’énoncé et dans le guide de cotation a eu lieu lors du formatage du guide de cotation.

32 La CFP soutient qu’en raison du régime de responsabilisation énoncé dans la LEFP, le Tribunal devrait adopter une définition étroite de l’abus de pouvoir, car les administrateurs généraux rendent compte à la CFP, laquelle rend compte au Parlement. La CFP affirme également que les cinq catégories d’abus de pouvoir énoncées par David Philip Jones et Anne S. de Villars, dans leur ouvrage intitulé Principles of Administrative Law (Toronto : Thomson Carswell, 2004) ne s’appliquent pas à la plainte d’abus de pouvoir. Et si le Tribunal choisit effectivement d’utiliser ces cinq catégories dans son analyse, il faut alors qu’il y ait une part d’intention illégitime. Ainsi, dans les plaintes où il y a preuve d’insouciance ou d‘imprudence grave, le Tribunal pourrait imputer la mauvaise foi.

Analyse

33 La plainte a été présentée en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la LEFP, qui renvoie au paragraphe 30(2) de la Loi. Les dispositions visées sont rédigées comme suit :

77. (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement du Tribunal, présenter à celui-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a) abus de pouvoir de la part de la Commission ou de l’administrateur général dans l’exercice de leurs attributions respectives au titre du paragraphe 30(2);

(…)

30. (…)

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies

a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;

b) la Commission prend en compte

(i) toute qualification supplémentaire que l’administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l’administration, pour le présent ou l’avenir,

(ii) toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l’administration précisée par l’administrateur général,

(iii) tout besoin actuel ou futur de l’administration précisé par l’administrateur général.

34 Dans le préambule de la LEFP figure un objet législatif clé : les gestionnaires devraient disposer d’un pouvoir discrétionnaire considérable en ce qui a trait aux questions de dotation. Afin que les gestionnaires disposent de la marge de manoeuvre dont ils ont besoin, le législateur a choisi de s’éloigner de l’ancien régime de dotation fondé sur des règles, sous l’ancienne LEFP. Il n’y a pas de règles strictes dans la LEFP sur la façon d’établir les qualifications, sur la méthode d’évaluation qui devrait être utilisé ou encore sur la façon de choisir, aux fins de nomination, le candidat qui satisfait aux qualifications essentielles et aux qualifications constituant un atout. Le législateur a plutôt préféré fournir aux personnes détenant les pouvoirs de dotation, les moyens d’exercer l’aspect discrétionnaire de ces pouvoirs, en faisant appel à leur jugement. Cependant, comme le Tribunal l’a déclaré dans la décision Tibbs c. Sous-ministre de la Défense nationale, [2006] TDFP 0008, le pouvoir absolu n’existe pas; les gestionnaires ne peuvent pas prendre n’importe quelle mesure dans les dossiers de dotation, pour n’importe quel motif ni sous n’importe quel prétexte, si abusif soit-il, alors que l’exercice du pouvoir discrétionnaire est contraire à la nature, à l’objet et à l’intention de la LEFP.

35 Le plaignant allègue que le comité de sélection a accordé plus d’importance à l’expérience récente qu’à la vaste expérience dans les dossiers en matière d’écoute électronique, et que cette façon de faire constitue un abus de pouvoir au regard de l’évaluation des critères de mérite. Le plaignant n’allègue pas que le comité de sélection a agi par favoritisme personnel ou de mauvaise foi.

36 S’il s’en tenait à la définition étroite de l’abus de pouvoir avancé par la CFP, le Tribunal mettrait fin à son analyse de la plainte d’abus de pouvoir aux présentes, car il n’y a aucune allégation d’intention illégitime, et la mauvaise foi pour cause d’imprudence ou d’insouciance ne pourrait être imputée. Cette définition serait trop limitative et mènerait à des situations qui vont clairement à l’encontre de l’objet et du sens de la LEFP. Ainsi, en vertu du paragraphe 30(2) de la LEFP, pour qu’une nomination soit faite sur la base du mérite, il faut que la personne possède les qualifications essentielles. Selon l’intention claire du législateur, nommer une personne qui ne satisfait pas aux qualifications essentielles, constitue un abus de pouvoir qu’il y ait ou non intention illégitime. De même qu’il est expliqué dans la décision Tibbs, supra :

[74] (…) Le législateur n’aurait pas pu envisager qu’il n’y aurait aucun recours en vertu de la LEFP lorsque, par exemple, un gestionnaire, de façon involontaire, procèderait à une nomination qui donnerait lieu à un résultat déraisonnable ou discriminatoire. Lorsqu’un gestionnaire involontairement procède à une nomination qui va clairement à l’encontre de la logique et des renseignements disponibles, cela peut ne pas constituer un acte de mauvaise foi, un acte répréhensible intentionnel ou une conduite irrégulière, mais le gestionnaire peut avoir abusé de son pouvoir discrétionnaire.

37 L’intimé a expliqué qu’il y avait eu une erreur dans le formatage du guide de cotation. L’ordre des mots utilisés pour décrire le critère « expérience » dans l’énoncé et dans le guide de cotation a été inversé. M. Wilson a déclaré dans son témoignage que l’évaluation du critère portait également sur les deux qualificatifs, car cette combinaison était essentielle pour occuper le poste de juriste‑expert, Équipe des poursuites contre la drogue.

38 Selon le Tribunal, la preuve prépondérante est qu’il s’agissait d’une simple erreur typographique et, à ce titre, ce n’est pas un abus de pouvoir. Il est manifeste que ce genre d’erreur n’est pas grave et qu’il n’est révélateur d’aucun acte répréhensible susceptible de constituer un abus de pouvoir. De plus, cette erreur typographique n’a eu aucun effet sur l’évaluation du critère visé. Tout comme le Tribunal l’a conclu dans la décision Tibbs, supra,au paragraphe 65 : « Il ressort clairement du préambule et de la LEFP dans son ensemble que l’intention du législateur était qu’il fallait plus que de simples erreurs ou omissions pour constituer un abus de pouvoir. »

39 Le Tribunal juge qu’il n’y a aucun abus de pouvoir dans l’évaluation du critère de mérite « Vaste expérience récente ».

Question II: La décision du comité de sélection de ne pas poursuivre l’évaluation du plaignant constitue-t-elle un abus de pouvoir?

40 De l’avis du plaignant, il était inapproprié de pondérer les différents critères et de ne faire passer à l’étape suivante que les candidats ayant reçu la cote « Distinction » ou « Supérieur » pour les deux premiers critères. Il se plaint qu’il aurait dû être évalué par rapport à tous les critères de mérite. Il ajoute que la sélection des candidats ayant obtenu les notes les plus élevées est similaire à l’ancienne LEFP et que, de ce fait, le comité de sélection ne disposait d’aucun pouvoir discrétionnaire de choisir la bonne personne pour occuper le poste.

41 L’intimé explique qu’il y avait des raisons légitimes de classer en premier le critère « Vaste expérience récente ». L’employeur a élaboré des critères de mérite et établi un ordre d’importance pour évaluer ces critères conformément à l’article 31 de la LEFP afin de trouver les candidats qui convenaient pour les postes. Le classement des critères traduisait les exigences du poste de juriste‑expert, Équipe des poursuites contre la drogue, lesquels comprennent le traitement de dossiers relativement complexes en matière d’écoute électronique et le besoin que la personne nommée puisse accomplir toutes les fonctions du poste dès son entrée en fonction.

Analyse

42 Aux termes du paragraphe 30(2) de la LEFP, les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour établir les qualifications liées au poste qu’ils souhaitent doter et pour choisir la personne qui non seulement satisfait aux qualifications essentielles mais représente la bonne personne pour occuper le poste visé. Un pouvoir discrétionnaire semblable est prévu à l’article 36 de la LEFP à l’intention des personnes qui détiennent les pouvoirs de dotation pour choisir et utiliser les méthodes d’évaluation qui permettront de déterminer si la personne satisfait aux qualifications essentielles. Le Tribunal a examiné le pouvoir discrétionnaire prévu à l’article 36 au regard du choix de la méthode d’évaluation dans la décision Jolin c. Administrateur général de Service Canada et al., [2007] TDFP 0011, paragraphes 26 à 28.

43 La pondération des critères de mérite et l’utilisation de points de démarcation en fonction du rendement des candidats représentent des méthodes qui s’inscrivent dans le cadre du vaste pouvoir discrétionnaire accordé aux gestionnaires en vertu de la LEFP. Les gestionnaires ont en effet toute la marge de manoeuvre nécessaire pour décider des critères qui sont les plus importants pour un poste donné, au moment du processus de sélection. M. Wilson a pris cette décision et opté pour une méthode d’évaluation qui met l’accent sur deux critères en particulier, la vaste expérience récente, et le jugement.

44 En vertu de l’ancienne LEFP, il y avait motif d’appel lorsque le mérite relatif n’était pas réalisé. Le processus était normatif, le classement était obligatoire et tout écart par rapport au processus risquait de se traduire par un appel accueilli. Aujourd’hui, en vertu du paragraphe 30(2) de la LEFP, le gestionnaire dispose d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour choisir, parmi les postulants qui répondent aux qualifications essentielles, la personne qui, selon son jugement, est la bonne personne pour occuper le poste. Dès lors, il n’est plus nécessaire de classer les candidats ni d’établir une liste d’admissibilité. De l’avis du Tribunal, cette ancienne pratique consistant à classer les candidats ne devrait pas être favorisée, car elle ne reflète pas l’esprit de la LEFP. Bien sûr, il n’est pas interdit aux gestionnaires de le faire et, d’ailleurs, le classement ne constitue pas en soi un abus de pouvoir. Dans les cas où le classement est utilisé pour la sélection des candidats, le Tribunal se penchera alors sur l’application qu’il en est fait afin de déterminer s’il y a eu abus de pouvoir dans le processus de sélection.

45 Le comité de sélection n’a pas utilisé uniquement les cotes, mais aussi les qualifications essentielles qu’il considérait comme étant les plus importantes au regard des postes à doter, pour nommer les bonnes personnes pour occuper les postes. Selon la preuve non contredite, ce sont les personnes ayant obtenu les cotes les plus élevées dans les deux plus importantes qualifications qui ont été nommées. M. Wilson a déclaré dans son témoignage que même si le plaignant avait reçu la cote « Distinction » plutôt que la cote « Réussite » pour les deux premiers critères, cela n’aurait rien changé. Chacun des candidats choisis a reçu une cote « Supérieur » ou « Distinction » pour les deux critères susmentionnés et tous les autres critères, de sorte que leurs résultats auraient toujours été supérieurs à ceux du plaignant.

46 Selon l’évaluation faite du plaignant au regard du premier critère, il avait une vaste expérience en qualité d’avocat débutant, et en qualité d’avocat principal dans un dossier important en 2003-2005; cependant, cette expérience n’était pas récente. L’évaluation était juste, car le plaignant n’avait mené aucun dossier en matière d’écoute électronique au cours des trois années précédant l’entrevue dans le cadre du présent processus de sélection. M. Wilson a déclaré que les autres candidats avaient reçu une cote supérieure à celle du plaignant au regard de ce critère.

47 Les candidats ont tous été évalués de la même manière relativement aux critères de mérite. Le plaignant a reconnu que les personnes nommées satisfaisaient aux critères de mérite. Il n’a allégué aucune intention illégitime ni résultat irrégulier. M. Wilson a fourni une explication rationnelle pour appuyer l’importance que le comité de sélection avait accordée au critère « Vaste expérience récente ». Le Tribunal est d’avis qu’il n’y a eu aucun abus de pouvoir en pondérant les critères de mérite et en utilisant les points de pondération fondés sur le rendement des candidats.

Question III: Y a-t-il eu abus de pouvoir dans la façon dont le critère « jugement » a été évalué?

Observations

48 Le plaignant soutient que le comité de sélection a abusé de son pouvoir en n’évaluant pas sa réponse de façon appropriée. Il se plaint également que la connaissance personnelle qu’a M. Hubbard du plaignant a servi à évaluer le critère « jugement », et a été un facteur important dans l’évaluation du critère. Or, la connaissance personnelle ne faisait pas partie des outils établis que le comité de sélection pouvait utiliser pour évaluer les candidats dans le cadre du présent processus de sélection.

49 L’intimé précise que le plaignant a eu la possibilité de fournir des exemples qui démontrent son bon jugement. L’article 36 de la LEFP est expressément conçu pour donner la marge de manoeuvre nécessaire dans le choix des méthodes d’évaluation. Le rendement antérieur et les réalisations font clairement partie des moyens d’évaluation énoncés à l’article 36 et, en conséquence, il était tout à fait logique et correct que M. Hubbard mette à profit sa connaissance des différents candidats devant le comité de sélection. Avocat général principal à l’époque, M. Hubbard pouvait très bien connaître de nombreux candidats, car le domaine visé est un domaine spécialisé et restreint. Tous les candidats pouvaient être touchés de la même façon.

Analyse

50 Le plaignant conteste l’évaluation faite de sa réponse à la question concernant le critère « jugement ». Pourtant, M. Wilson a déclaré dans son témoignage que le comité de sélection n’a pas jugé que le deuxième exemple fourni par le plaignant était un bon exemple de jugement supérieur. Le comité de sélection était d’avis que les exemples donnés par le plaignant n’atteignaient pas le niveau « Distinction ».

51 Aux termes de l’article 36 de la LEFP, les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable dans la sélection et l’utilisation des méthodes d’évaluation pour déterminer si un candidat satisfait aux qualifications établies pour un poste donné. Il importe toutefois de préciser, comme le Tribunal l’a indiqué dans la décision Jolin, supra, que ce pouvoir discrétionnaire n’est pas absolu et qu’une personne qui n’a pas été nommée peut porter plainte en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la LEFP, en alléguant qu’il y a eu abus de pouvoir dans la sélection et l’utilisation d’une méthode d’évaluation.

52 L’article 36 de la LEFP est rédigé comme suit :

36. La Commission peut avoir recours à toute méthode d’évaluation – notamment prise en compte des réalisations et du rendement antérieur, examens ou entrevues – qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications visées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i).

(Nos italiques)

53 Comme le démontre clairement les termes « peut avoir recours à toute méthode d’évaluation », l’article 36 de la LEFP est non normatif; le comité de sélection peut choisir à partir d’un large éventail d’outils et de méthodes d’évaluation. Il ne fait aucun doute que la connaissance personnelle d’un membre du comité de sélection constitue une méthode d’évaluation acceptée et qu’elle pourrait être traitée comme un outil de vérification des références. Le plaignant a allégué qu’il y avait abus de pouvoir parce que la connaissance personnelle n’était pas expressément désignée comme une méthode d’évaluation utilisée dans le processus de nomination en l’espèce.

54 Dans l’annonce de possibilité d’emploi relative au présent poste et parue sur Publiservice, il était indiqué que « l’évaluation de toutes les autres qualités essentielles fera appel à divers moyens ». Il était également précisé qu’il y aurait des vérifications des références, y compris auprès du gestionnaire actuel et des gestionnaires précédents. Dans ce contexte, l’utilisation de la connaissance personnelle du membre du comité de sélection, Bob Hubbard, n’aurait pas dû être une surprise pour le plaignant.

55 M. Wilson a expliqué que les nouveaux processus sous le régime de la LEFP n’étaient pas encore tout à fait maîtrisés et que les méthodes d’évaluation ont été déterminées tardivement dans le processus. I l est à noter également que le commentaire de M. Hubbard portait expressément sur le critère « jugement », qui était semblable à la vérification des références sur la question.

56 Le Tribunal estime que l’utilisation des termes « divers moyens » dans l’annonce était suffisamment large pour englober les méthodes d’évaluation choisies dans le processus de nomination en espèce. Même si les faits en l’occurrence ne mènent pas à une conclusion d’abus de pouvoir, le fait d’informer les personnes qui seront évaluées, en temps utile, des méthodes d’évaluation utilisées, notamment la connaissance personnelle, pourraient éviter des allégations de cette nature. Par ailleurs, il importe de faire preuve d’une grande prudence et faire en sorte que la connaissance que possède un membre du comité de sélection au sujet du candidat concerne les critères de mérite évalués, et soit traitée comme une vérification des références.

57 Le Tribunal juge qu’il n’y a pas eu abus de pouvoir dans l’évaluation du critère « jugement » ni dans le fait que la connaissance personnelle d’un membre du comité de sélection ait été utilisée dans le cadre de l’évaluation.

Question IV: L’utilisation de plusieurs jurys pour évaluer des candidats constitue-t-elle un abus de pouvoir?

Observations

58 Selon les allégations du plaignant, il y a eu abus de pouvoir de la part du comité de sélection en raison du fait qu’il a mis sur pied plusieurs jurys de sélection pour mener les entrevues et évaluer les candidats. Un seul jury uniforme aurait dû évaluer tous les candidats, particulièrement au vu de la manière dont le critère « Vaste expérience récente » a été appliqué. En l’espèce, il n’était pas essentiel d’avoir plusieurs jurys.

59 L’intimé fait valoir que l’utilisation de plusieurs jurys est une pratique bien établie au sein de la fonction publique fédérale. Il n’y a aucune exigence quant à l’uniformité d’un comité. Tout a été mis en oeuvre pour garantir l’équité et l’homogénéité. M. Wilson a été membre de tous les jurys, et tout le groupe s’est rencontré pour mettre en commun l’information recueillie au cours du processus de sélection.

Analyse

60 L’utilisation de plusieurs jurys s’explique fort bien par le pouvoir discrétionnaire considérable octroyé aux gestionnaires en vertu de la LEFP. Le plaignant déclare que l’utilisation de plusieurs jurys n’était ni nécessaire, ni propice à assurer une évaluation uniforme des critères de mérite.

61 Il incombe au plaignant de faire la preuve de ces allégations d’abus de pouvoir. Il revenait au plaignant de démontrer par une preuve convaincante que l’utilisation de plusieurs jurys dans le processus de nomination en l’espèce a mené à un abus de pouvoir du type examiné par le Tribunal dans la décision Tibbs, supra. Or, le plaignant n’a fourni aucune preuve de la sorte. Au contraire, le Tribunal est convaincu, au vu des éléments de preuve présentés, que le processus choisi pour la présentation des rapports des jurys, et le fait que M. Wilson était un membre de tous ces jurys, assuraient une présentation uniforme des rapports au comité de sélection au regard des critères de mérite dans le processus de nomination en l’espèce, ainsi qu’une évaluation uniforme par le comité.

Décision

62 Pour tous ces motifs, la plainte est rejetée.

Guy Giguère

Président

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2006-0096
Intitulé de la cause:
Rick Visca et le Sous-ministre de la Justice et al.
Audience:
Les 2 et 3 avril 2007
Toronto, Ontario
Date des motifs:
Le 31 mai 2007

Comparutions:

Pour le plaignant:
Jacques Dupont
Pour l'intimé:
Karen Clifford
Pour la Commission
de la fonction publique:
John Unrau
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