Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

L’Alliance de la Fonction publique du Canada (la <<plaignante>>) a allégué que le Sénat du Canada (le <<défendeur>>) avait négocié de mauvaise foi- deux dispositions de la convention collective prévoient un mécanisme de maintien du traitement qui permet aux membres de l’unité de négociation de prendre congé pour préparer la négociation de la convention collective ou pour y participer, et le remboursement par la plaignante au défendeur du traitement complet des membres et d’un pourcentage du traitement qui correspond au coût des avantages sociaux- le défendeur a d’abord demandé l’augmentation du pourcentage remboursé au titre des avantages sociaux, mais la plaignante a refusé au motif qu’elle préférait conserver le statuquo- le défendeur a ensuite proposé de supprimer les deuxdispositions de la convention collective prévoyant le maintien du traitement, proposition que la plaignante a assimilée à la négociation à horizon fuyant- la Commission a statué qu’elle ne se prononcerait pas sur le contenu des propositions et qu’elle interviendrait seulement s’il s’agissait effectivement de négociation de mauvaise foi- la Commission a jugé que tel n’était pas le cas - le défendeur a présenté des données pour justifier la hausse demandée: il n’a pas changé subitement de position ni présenté de proposition complètement nouvelle- rien ne portait à croire que le défendeur cherchait à éviter de conclure une convention collective. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations
de travail au Parlement

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2008-11-28
  • Dossier:  448-SC-10
  • Référence:  2008 CRTFP 100

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

plaignante;

et

SÉNAT DU CANADA

défendeur

Répertorié
Alliance de la Fonction publique du Canada c. Sénat du Canada

Plainte déposée aux termes de l’article 10 alléguant la contravention de l’article 38 de la Loi sur les relations de travail au Parlement

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Marie-Josée Bédard, vice présidente

Pour la plaignante:
David Yazbeck, avocat

Pour le défendeur :
Carole Piette, avocate

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 16 octobre 2008.
(Traduction de la CRTFP)

I. Plainte devant la Commission

1 L’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC ou la « plaignante ») a déposé une plainte contre le Sénat du Canada (le « défendeur ») alléguant qu’il avait négocié de mauvaise foi et, plus particulièrement, qu’il avait pratiqué la négociation à horizon fuyant, contrairement aux exigences de l’article 38 de la Loi sur les relations de travail au Parlement (LRTP).

II. Résumé de la preuve

2 La plainte porte sur des propositions et des discussions qui ont eu lieu au cours des négociations collectives préalables au renouvellement de la convention collective du groupe de l’exploitation, échue le 30 septembre 2007, entre l’AFPC et le Sénat du Canada (la « convention collective »). Plus particulièrement, le différend a trait à des propositions et à des discussions concernant les dispositions suivantes de l’article 13 de la convention collective :

[…]

13.10 - Lorsque les nécessités du service le permettent, l'employeur accorde un congé non payé à l'employé qui assiste aux séances de négociations contractuelles au nom de l'Alliance.
13.11 - Lorsque les nécessités du service le permettent, l'employeur accorde un congé non payé à un nombre raisonnable d'employés pour leur permettre d'assister aux réunions préparatoires aux négociations contractuelles.

[…]

13.15 - Pourvu que l’Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux séances de négociations contractuelles au nom de l'Alliance. Celle-ci accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé aux termes de la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi pour cent (15,5 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu un congé aux termes de la présente disposition.
13.16 - Pourvu que l'Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux réunions préparatoires aux négociations contractuelles. L'Alliance accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé selon la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi pour cent (15,5 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu congé aux termes de la présente disposition.

[…]

3 Au début de l’audience, les avocats des deux parties ont déposé un exposé conjoint des faits, dont voici un extrait :

[Traduction]

[…]

  1. L’Alliance de la Fonction publique du Canada est l’agent négociateur des employés du groupe de l’exploitation au Sénat du Canada. La Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) lui a délivré un certificat le 8 mai 1987.
  2. Depuis lors, l’AFPC (le « syndicat ») et le Sénat du Canada (l’« employeur ») ont conclu cinq conventions collectives, dont la plus récente est annexée aux présentes et constitue le document 1. Un avis de négocier a été donné au syndicat le 27 septembre 2007.
  3. Les parties ont tenu neuf (9) séances de négociation collective aux dates suivantes : le 4 décembre 2007 et le 17 janvier, les 5, 20 et 21 février, les 16 et 22 avril, le 5 mai et le 10 juin 2008.
  4. Le 4 décembre 2007, les parties ont présenté leurs propositions respectives en prévision du sixième cycle de négociation. Les documents 2 et 3 ci-joints sont des copies des propositions de négociation initiales faites par l’employeur et le syndicat respectivement.

    L’employeur souhaitait, notamment, apporter les diverses modifications suivantes à l’article 13 :

[…]

13.15Pourvu que l'Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux séances de négociations contractuelles au nom de l'Alliance. Celle-ci accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé aux termes de la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi vingt pour cent (15,5 % 20 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu un congé aux termes de la présente disposition.
13.16Pourvu que l'Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux réunions préparatoires aux négociations contractuelles. L'Alliance accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé selon la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi vingt pour cent (15,5 % 20 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu congé aux termes de la présente disposition.
  1. Le 17 janvier 2008, l’employeur a expliqué les motifs des changements qu’il souhaitait apporter à l’article 13. Le syndicat a fait savoir qu’il voulait que les clauses 13.01 à 13.13 inclusivement demeurent inchangées. Il a ajouté qu’il informerait plus tard l’employeur de sa position à l’égard des clauses 13.08, 13.15 et 13.16.
  2. Le 5 février 2008, l’employeur a informé le syndicat que sa proposition visant les clauses 13.15 et 13.16 était motivée par le coût accru des avantages sociaux. Il a ajouté qu’il présenterait au syndicat, à la demande de celui-ci, une analyse du coût en question.
  3. Le 20 février 2008, l’employeur a fourni au syndicat une analyse du coût des avantages sociaux (document 4). Le syndicat l’a avisé qu’il examinerait l’analyse.
  4. Le 21 février 2008, l’employeur a indiqué qu’il était disposé à retirer ses propositions visant les clauses 13.08 et 13.13, mais qu’il ne modifierait pas sa position sur les autres propositions intéressant le même article. Le syndicat a fait savoir qu’il voulait que l’article 13 demeure inchangé, étant donné qu’il faisait partie de la convention collective depuis longtemps et qu’il ne voyait aucune raison de le modifier.
  5. Le 16 avril 2008, l’employeur a déclaré qu’il allait maintenir ses propositions sur les clauses 13.01 à 13.06 inclusivement, qu’il était disposé à retirer ses propositions relatives aux clauses 13.08 et 13.13, et qu’il attendait la réponse du syndicat concernant les clauses 13.15 et 13.16. Plus tard le même jour, le syndicat a annoncé qu’il n’était pas disposé à envisager de rembourser le coût accru des avantages sociaux.
  6. Le 22 avril 2008, les parties se sont concentrées sur des questions d’ancienneté.
  7. Le 5 mai 2008, l’employeur a informé le syndicat que, vu la position de celui-ci sur les clauses 13.15 et 13.16, l’employeur allait proposer leur suppression.
  8. Le 7 mai, le négociateur du syndicat […] a transmis à la négociatrice de l’employeur […] le courriel suivant (document 5) :

    […] Je vous ai laissé un message vocal lundi après-midi après la séance de négociations du Sénat, et, comme vous ne m’avez pas répondu, je vous adresse le présent courriel. Depuis la première séance des parties en décembre l’andernier, le Sénat a proposé de modifier les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective des parties en portant de 15,5 % à 20 % le coût des avantages sociaux remboursé par le syndicat lorsque des employés se voient consentir un congé rémunéré pour participer aux négociations contractuelles.

    Au cours des sept séances de négociation qui ont suivi notre première rencontre, le syndicat n’a pas consenti à la proposition de l’employeur et a préconisé le statu quo. Lundi dernier, le Sénat a fait savoir, à la table de négociation, que, si le syndicat ne consentait pas à sa proposition de rembourser le coût accru des avantages sociaux aux termes des clauses 13.15 et 13.16, le Sénat présenterait un nouveau libellé qui modifierait lesdites clauses, si bien que le congé accordé en vertu de ces dernières ne serait plus rémunéré. Je vous informe par les présentes que, si votre client donne suite à son intention, le syndicat déposera auprès de la CRTFP une plainte pour pratique déloyale de travail au motif que, en présentant sa nouvelle demande, le Sénat négocie de mauvaise foi et se livre à la négociation à horizon fuyant.

[…]

  1. Le 8 mai 2008, [l’avocate du défendeur] a offert la réponse suivante (document 6) :

[…]

J’ai examiné la position du syndicat de concert avec mon client, et je peux offrir les conseils suivants :

1. Vous affirmez dans votre courriel que le syndicat a préconisé le statu quo au cours des sept premières séances de négociations qui ont suivi la première réunion des parties. Or, cela est inexact. Depuis notre première rencontre, l’employeur a cherché à connaître le point de vue du syndicat sur les clauses en question. Le syndicat n’a cessé de reporter sa réponse. Enfin, après de nombreuses demandes de la part de l’employeur, le syndicat a fait connaître sa position le 22 avril 2008, auquel moment il a déclaré préconiser le statu quo. Lors de la dernière journée de négociations tenue le lendemain, l’employeur a fait connaître son intention de proposer l’abrogation des clauses, puisque l’AFPC ne semblait pas disposée à assumer les frais salariaux raisonnables engagés par l’employeur pour que les employés soient payés lorsqu’ils sont en congé non rémunéré pour affaires syndicales.

2. Nous sommes incapables de comprendre comment la position de l’employeur sur la question peut être apparentée le moindrement à la négociation de mauvaise foi. Il est évident que ce n’est pas le cas.

3. Soyez avisés que votre menace de déposer une plainte pour pratique déloyale de travail ne modifiera aucunement la position de l’employeur.

[…]

  1. Le syndicat a annulé les négociations collectives prévues pour le 2 juin 2008, car le négociateur en chef du syndicat […] était déjà engagé et devait assister à une autre séance de négociations.
  2. Le 10 juin 2008, l’employeur a expliqué les motifs de sa demande de suppression des clauses 13.15 et 13.16. Il a fait valoir que les clauses 13.10 et 13.11 prévoyaient des congés non payés pour que des employés assistent à des réunions  préparatoires aux négociations et participent aux négociations. Les clauses 13.15 et 13.16 prévoyaient la rémunération des employés concernés et le remboursement de leurs frais salariaux par l’AFPC. L’employeur a expliqué son désir de recouvrer du syndicat le coût accru des avantages sociaux. Comme le syndicat n’était pas disposé à envisager une hausse du coût des avantages sociaux recouvré, l’employeur demandait la suppression des dispositions sur le maintien du traitement des employés concernés. L’AFPC pouvait payer directement les employés. Le défendeur a présenté les propositions suivantes (les clauses 13.10 et 13.11 sont également reproduites ci-dessous à titre indicatif) :
    13.15Pourvu que l'Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux séances de négociations contractuelles au nom de l'Alliance. Celle-ci accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé aux termes de la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi pour cent (15,5 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu un congé aux termes de la présente disposition.
    13.16Pourvu que l'Alliance donne à l'employeur un préavis suffisant, l'employeur accorde un congé payé à un maximum de trois (3) employés pour leur permettre d'assister aux réunions préparatoires aux négociations contractuelles. L'Alliance accepte de remettre à l'employeur un montant équivalent au taux de rémunération journalier de chaque employé autorisé à prendre congé selon la présente disposition, majoré du coût des avantages sociaux calculés en fonction de l'échelle de rémunération, soit quinze et demi pour cent (15,5 %) de chaque journée pour laquelle l'employé a obtenu congé aux termes de la présente disposition.
  3. C’est la première fois que le syndicat dépose une plainte pour négociation de mauvaise foi contre l’employeur.

[…]

[Les passages en gras le sont dans l’original]

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour la plaignante

4 La plaignante allègue que le défendeur n’a pas honoré son obligation de négocier de bonne foi et n’a pas fait tout effort raisonnable pour conclure une convention collective lorsqu’il a changé de façon inacceptable ses propositions touchant les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective. Selon la plaignante, le défendeur s’est comporté de manière contraire à l’objectif de conclure une convention collective et s’est livré à la négociation à horizon fuyant.

5 L’avocat de la plaignante a décrit à grands traits les principes sous-jacents de l’obligation de négocier de bonne foi et a fait valoir qu’elle vise à faciliter des discussions rationnelles tout au long du processus de négociation. Il a ajouté que, bien que le processus de négociation soit parfois ardu, il doit néanmoins viser à faciliter la discussion rationnelle. Il incombe à chaque partie d’engager des discussions rationnelles dans le dessein de conclure une convention collective. Au cours de leurs entretiens, les deux parties doivent s’efforcer de trouver un terrain d’entente pour concilier leurs intérêts divergents, et une partie ne doit pas déposer une proposition dont elle sait que l’autre ne pourra jamais l’accepter. En outre, une partie ne peut créer un « horizon fuyant » en modifiant la délimitation initiale des négociations en cours de route, c’est-à-dire en remplaçant une proposition initiale par une autre, plus restrictive. Les changements de position fondamentaux en cours de négociation doivent être justifiés par des preuves irréfutables et des circonstances sensiblement transformées.

6 L’avocat de la plaignante a fait valoir que, lorsqu’elle évalue une situation, la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») doit considérer le contexte dans lequel la plainte est déposée (y compris les antécédents de négociation collective des parties), le comportement des parties et l’effet de leurs actions sur le processus de négociation. La Commission doit déterminer si la conduite du défendeur était propice à des discussions rationnelles et si elle a aidé les parties à résoudre leur différend. Elle doit également se demander si la conduite du défendeur a eu un effet destructeur sur le processus de négociation.

7 En ce qui concerne les antécédents des parties et le contexte, l’avocat de la plaignante a indiqué qu’il s’agit de la première plainte pour négociation de mauvaise foi depuis que les parties participent à des négociations collectives. Leurs rapports remontent à 1987, et les parties ont toujours pu parvenir à une entente. Du point de vue de la plaignante, le dépôt d’une plainte pour négociation de mauvaise fois illustre la gravité de la question.

8 L’avocat de la plaignante a ajouté que celle-ci a présenté un petit nombre de propositions au début du processus de négociation et qu’elle ne cherchait pas à modifier en profondeur la convention collective. En revanche, le défendeur aurait déposé de nombreuses propositions et déclaré qu’il présentait plusieurs demandes en vue de réexaminer des points importants de la convention et de remettre en question des principes établis de longue date.

9 En ce qui concerne l’article 13 de la convention collective, qui est la pomme de discorde, l’avocat de la plaignante a avancé qu’il ressort clairement des propositions présentées par celle-ci au début du processus de négociation qu’elle ne cherchait pas à modifier l’article 13, et que, par conséquent, elle souhaitait maintenir le statu quo en ce qui a trait à ses dispositions.

10 L’avocat de la plaignante a insisté sur l’importance des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective, grâce auxquelles un maximum de trois employés peuvent participer au processus de négociation. Elles facilitent leur participation en prévoyant le maintien de leur traitement lorsqu’ils assistent à des réunions préparatoires et à des séances de négociation. Il a ajouté que, en raison de sa grande taille, la plaignante emploie ses propres négociateurs, qu’elle affecte aux différentes tables de négociation. Les négociateurs sont secondés par des membres de l’unité de négociation, dont la participation au processus de négociation est importante pour plusieurs raisons : ils constituent une ressource précieuse grâce à leur connaissance du milieu de travail; ils sont directement touchés par la convention collective; ils font fonction d’agents de liaison auprès des membres de l’unité; leur présence accrédite le processus de négociation collective dans son ensemble.

11 L’avocat de la plaignante a soutenu que les modifications initiales que le défendeur a demandé d’apporter aux clauses 13.15 et 13.16 ne remettaient pas en question les principes qui y étaient décrits, ni le mécanisme de maintien du traitement. L’étendue de la question à discuter à la table de négociation était clairement limitée au montant remboursé à l’employeur par l’agent négociateur pour couvrir le coût des avantages sociaux liés au traitement des employés qui participaient aux négociations. Le défendeur voulait porter de 15,5 % à 20 % le pourcentage du taux de rémunération quotidien servant à couvrir les avantages sociaux calculés en fonction de l’échelle de rémunération. Pour reprendre les propos de l’avocat de la plaignante : [traduction] « [c]’était là le fond de la question, la base sur laquelle les parties menaient leurs négociations ».

12 L’avocat de la plaignante a indiqué que le processus de négociation de l’article 13 de la convention collective a progressé normalement et de façon satisfaisante jusqu’au 5 mai 2008. Le défendeur a déposé sa proposition le 4 décembre 2007 et la plaignante a fait savoir à ce moment qu’elle répondrait aux changements proposés aux clauses 13.15 et 13.16. Le 5 février 2008, le défendeur a expliqué que sa proposition était motivée par l’augmentation du coût des avantages sociaux, après quoi la plaignante a demandé une analyse du coût en question, que le défendeur a soumise à son examen à la séance du 20 février 2008. Le 21 février 2008, la plaignante a fait connaître sa volonté de maintenir le statu quo concernant l’article 13. Le 16 avril 2008, le défendeur a dit attendre la position de la plaignante sur sa proposition à l’égard des clauses 13.15 et 13.16. Le même jour, la plaignante a répété qu’elle souhaitait maintenir le statu quo en ce qui concerne les clauses et a fait savoir qu’elle n’était pas disposée à envisager le remboursement du coût accru des avantages sociaux.

13 La plaignante a soutenu que le processus de négociation a avorté le 5 mai 2008 lorsque le défendeur a réagi à son refus d’envisager le remboursement du coût accru des avantages sociaux en annonçant son intention de présenter une proposition qui visait à supprimer les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective. L’avocat de la plaignante a fait valoir que la proposition du défendeur était le contre-pied de sa proposition initiale et représentait une modification importante de la question en litige. La nouvelle position du défendeur laissait entendre que des restrictions seraient imposées au droit des employés de bénéficier de congés à des fins de négociation, restrictions que les clauses en litige passent sous silence et que la proposition initiale ne prévoyait pas.

14 L’avocat de la plaignante a soutenu que le comportement du défendeur à compter du 5 mai 2008 est incompatible avec l’obligation de négocier de bonne foi.

15 Selon l’avocat de la plaignante, le négociateur de celle-ci a signalé la gravité de la question le 7 mai 2008 dans un courriel adressé à la négociatrice du défendeur. Il l’avait informée que, à son avis, [traduction] « […] en présentant sa nouvelle demande, le Sénat négociait de mauvaise foi et se livrait à la négociation à horizon fuyant […] ». Il avait ajouté que la plaignante déposerait une plainte pour négociation de mauvaise foi auprès de la Commission si le défendeur restait sur ses positions et proposait d’abroger les clauses 13.15 et13.16 de la convention collective.

16 L’avocat de la plaignante a affirmé que le défendeur a mal réagi au courriel. Lorsqu’il l’a reçu, il avait l’occasion de revenir à la table de négociation pour chercher une solution avec la plaignante ou remettre les discussions sur les rails, mais le défendeur a choisi plutôt de maintenir sa position. Le 10 juin 2008, le défendeur a déposé sa proposition de supprimer les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective et a expliqué le raisonnement sur lequel reposait sa position révisée, que décrit le paragraphe 15 de l’énoncé conjoint des faits :

[Traduction]

15.[…] [L’employeur a fait valoir que les clauses 13.10 et 13.11  prévoyaient des congés non payés pour que des employés assistent à des réunions préparatoires aux négociations et participent aux négociations. Les clauses 13.15 et 13.16 prévoyaient la rémunération des employés concernés et le remboursement par l’AFPC des traitements versés. L’employeur a expliqué son désir de recouvrer du syndicat le coût accru des avantages sociaux. Comme le syndicat n’était pas disposé à envisager une hausse du coût des avantages sociaux recouvré, l’employeur demandait la suppression des dispositions sur le maintien du traitement des employés concernés. L’AFPC pouvait payer directement les employés […]

[…]

17 Selon l’avocat de la plaignante, l’explication révèle que le défendeur a minimisé l’importance des droits prévus par les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective en affirmant que leurs dispositions n’avaient d’autre fin que de prévoir le maintien du traitement des employés visés. Il a soutenu que, mis à part le mécanisme de maintien du traitement, les clauses 13.15 et 13.16 différaient « diamétralement » des clauses 13.10 et 13.11. La suppression des clauses 13.15 et 13.16 engendrerait un éventail de conséquences pour les congés des employés. L’avocat de la plaignante a souligné que, aux termes des clauses 13.15 et 13.16, un maximum de trois employés avaient droit inconditionnellement à des congés, pourvu que l’employeur reçoive un préavis suffisant. Au contraire, les congés prévus par les clauses 13.10 et 13.11 dépendent des nécessités du service de l’employeur. Il a insisté pour dire qu’il ne laissait pas entendre que le défendeur recourait aux clauses 13.10 et 13.11 à des fins inacceptables, mais il a ajouté que, si l’agent négociateur devait dépendre des clauses 13.10 et 13.11, l’employeur aurait plus de facilité qu’avant à refuser la participation des employés au processus de négociation.

18 L’avocat de la plaignante a fait valoir que l’employeur négociait de mauvaise foi et se livrait à la négociation à horizon fuyant en substituant à sa proposition initiale une proposition révisée plus restrictive en réaction au refus de la plaignante d’accepter de rembourser le coût accru des avantages sociaux.

19 L’avocat de la plaignante a déclaré que le défendeur a adopté une position extrême et que le remplacement de sa proposition initiale par une proposition plus restrictive est incompatible avec l’obligation de faciliter des discussions rationnelles. La conduite du défendeur n’était pas propice à des discussions rationnelles et n’a pas contribué à la qualité des échanges.

20 L’avocat de la plaignante a affirmé que, en vertu de l’obligation de négocier de bonne foi, le défendeur aurait dû adopter une démarche différente visant à poursuivre les échanges sur la question ou à la mettre en veilleuse. Le défendeur a plutôt adopté une position extrême qui a changé les paramètres des négociations en amenant des changements beaucoup plus restrictifs que ceux qu’il avait voulu effectuer à l’origine. L’avocat de la plaignante a résumé ainsi la conduite du défendeur : [traduction]« L’employeur a dit, comme vous refusez de nous donner raison, nous allons vous compliquer la vie. »

21 L’avocat de la plaignante était d’avis que le changement de position du défendeur équivalait à la négociation à horizon fuyant, étant donné que les deux parties avaient clairement convenu, au début des négociations, que les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective seraient conservées. En remplaçant sa proposition initiale par une proposition beaucoup plus restrictive, le défendeur a modifié l’étendue des négociations. L’avocat de la plaignante estimait que la seconde position différait diamétralement de la première et représentait un changement « important » du différend qui opposait les parties. Il a ajouté que le défendeur n’avait aucun motif concluant qui justifiait l’adoption d’une nouvelle position. Il a soutenu que son « aversion » pour la position adoptée par la plaignante à l’égard de la proposition initiale du défendeur ne peut être interprétée comme justifiant un changement de point de vue aussi radical. L’avocat de la plaignante a cru également que la conduite du défendeur et son changement de position ont eu un effet destructeur sur le processus de négociation.

22 L’avocat de la plaignante a fondé ses arguments sur les affaires suivantes : United Electrical, Radio and Machine Workers of America v. DeVilbiss (Canada) Limited, C.L.R.B.R. File No. 1124-75-U (19760309); Association nationale des employés et techniciens en radiodiffusion c. CKLW Radio Broadcasting Limited (1977), 23 di 51 (CCRT); Ontario Nurses’ Association v. The Board of Health of Haliburton Kawartha, Pine Ridge District Health Unit and H.E. Good, [1977] OLRB Rep. 65; Local 1979 Retail Clerks International Union Affiliated with the Canadian Labour Congress, AFL-CIO v. Wilson Automotive (Belleville) Ltd., [1980] OLRB Rep. 1136; Eastern Provincial Airways Ltd. v. Canadian Air Line Pilots’ Association, 3 CLRBR (NS) 75; United Steelworkers of America, Local 9011 v. Radio Shack Division of Tandy Electronics Limited, [1985] OLRB Rep. 1789; Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 148-02-196 (19910916); Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail), [1996] 1 R.C.S. 369; Association des employeurs maritimes  c. Syndicat des débardeurs, section locale 375 du Syndicat canadien de la fonction publique [1999] décision no 26 du CCRI; Global Television (Global Lethbridge, une division de CanWest Global Communication Corp.) c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, 2004 CAF 78; Ontario Labour Relations Board Law and Practice, 3e édition, Sack Mitchell Price, Butterworths, janvier 2006; Georges W. Adams, Canadian Labour Law, 2e édition, diffusion no 31, juin 2008.

B. Pour le défendeur

23 Le défendeur a interprété et caractérisé différemment les échanges qui ont eu lieu au sujet de l’article 13 de la convention collective au cours du processus de négociation, et il a répondu aux allégations de la plaignante.

24 À l’instar de l’avocat de la plaignante, l’avocate du défendeur a fait valoir que le devoir de négocier de bonne foi oblige les parties à engager et à mener des négociations sérieuses dans le dessein de conclure une convention collective. L’obligation exige d’elles que les parties expliquent leurs positions respectives et favorisent des discussions rationnelles et averties.

25 Selon l’avocate du défendeur, c’est effectivement ce que celui-ci a fait. Dès le début des négociations, il a expliqué pourquoi il demandait la modification des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective. Son avocate a expliqué que, le 4 décembre 2007, les parties ont déposé leurs propositions respectives. Au cours de la séance de négociation suivante, tenue le 17 janvier 2008, le défendeur a indiqué que ses propositions visaient à recouvrer le coût majoré des avantages sociaux. Le 20 février 2008, le défendeur a fourni à la plaignante une description détaillée de la hausse du coût des avantages sociaux. La plaignante a opposé un refus catégorique à la proposition.

26 L’avocate du défendeur a soutenu que ce dernier a changé de position à cause de l’intransigeance de la réponse de la plaignante. Face à cette intransigeance, le défendeur a proposé un autre moyen d’éviter d’assumer la hausse du coût des avantages sociaux, soit la suppression du mécanisme de maintien du traitement. Du point de vue du défendeur, la suppression du mécanisme ne modifierait pas le principe selon lequel les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective prévoient des congés non payés et aurait simplement pour conséquence que la plaignante paierait les employés directement. L’avocate du défendeur a noté que celui-ci a expliqué pourquoi il avait changé de position.

27 En réponse à l’allégation de la plaignante que le défendeur n’a pas participé à des discussions rationnelles en présentant sa nouvelle proposition, l’avocate du défendeur a indiqué que c’est la plaignante qui n’a pas encouragé des discussions rationnelles et averties, d’abord en adoptant une position intransigeante vis-à-vis de la proposition initiale et ensuite en déposant une plainte plutôt qu’en faisant une contre-proposition. La plaignante aurait pu proposer une version modifiée des clauses 13.10 et 13.11 de la convention collective, une hausse du pourcentage accordé ou un autre moyen de poursuivre les discussions. L’avocate du défendeur a soutenu que l’attitude de la plaignante ne pouvait être qualifiée de rationnelle ni apparentée à un mode de négociation averti.

28 L’avocate du défendeur a engagé la Commission à évaluer prudemment la question de savoir si le défendeur a déployé tout effort raisonnable pour parvenir à une convention collective ou s’il cherchait à éviter l’entente. Elle a fait valoir que l’intervention de la Commission ne doit pas être consentie aisément et que celle-ci doit distinguer la négociation de façade de la négociation serrée. Selon elle, les preuves présentées ne peuvent accréditer la conclusion qu’il y a eu négociation de façade.

29 En ce qui concerne le concept de la négociation à horizon fuyant, l’avocate du défendeur a expliqué qu’une partie s’y livre lorsqu’elle présente, au moment où le processus de négociation est bien engagé, une nouvelle proposition importante qui perturbe le cadre de négociation. L’avocate du défendeur a indiqué que la jurisprudence a défini des critères à appliquer pour déterminer l’existence de la négociation à horizon fuyant. La Commission doit déterminer si l’action du défendeur visait à détruire le cadre de négociation. Elle doit également examiner l’ampleur et le moment du changement de position. De plus, elle doit se pencher sur les antécédents de négociation des parties afin d’y déceler, le cas échéant, une tendance à la négociation déloyale.

30 L’avocate du défendeur a noté que le contexte dans lequel celui-ci a présenté sa proposition révisée ne peut conduire à la conclusion qu’il a pratiqué la négociation à horizon fuyant. Selon elle, face à l’intransigeance de la position de la plaignante, le défendeur a reformulé ses tactiques et était fondé à réviser sa proposition. La réaction de la plaignante à la proposition initiale du défendeur a justifié le changement de position de celui-ci. La proposition révisée visait à atteindre l’objectif initial d’éviter de devoir assumer le coût majoré des avantages sociaux. Dans ces circonstances particulières, le défendeur a révisé sa position sur la question bien avant la fin des négociations. La proposition révisée ne représentait pas une proposition entièrement nouvelle sur une question qui n’avait jamais été présentée : elle s’enchaînait simplement avec l’ancienne. Selon l’avocate du défendeur, la proposition révisée répond à la norme en vigueur dans le secteur et, à ce titre, elle n’a pu ébranler la plaignante et ne peut être qualifiée de nuisible au processus de négociation. À l’appui de son point de vue, elle a invoqué 21 conventions collectives en vigueur dans la fonction publique qui ne contiennent pas de dispositions sur le maintien du traitement. De plus, elle a insisté pour dire que, si les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective étaient si importantes pour la plaignante, celle-ci aurait dû présenter une contre-proposition. Le défendeur a ajouté que la plaignante n’a pas cherché à trouver de terrain d’entente et s’est contentée de servir un « non » catégorique.

31 L’avocate du défendeur m’a renvoyée aux cas suivants à l’appui de ses arguments : Fashion Craft Kitchens Inc. v. C.J.A., Local 3054, [1979] O.L.R.B. Rep. 967; G.A.U., Local 12-L v. Graphic Centre (Ontario) Inc., [1976] O.L.R.B. Rep. 221; United Food and Commercial Workers Union, Local 401 v. Gateway Casinos G.P. Inc., 2008 CanLII 51130 (AB L.R.B.); United Food and Commercial Workers, Local Union No. 401 v. Ferraro’s Limited, [1992] Alta. L.R.B.R. 379; Ontario Nurses’ Association v. The Board of Health of Haliburton Kawartha, Pine Ridge District Health Unit and H.E. Good, [1977] O.L.R.B. Rep. 65; Finning (Canada) a Division of Finning International Inc. v. International Association of Machinists and Aerospace Workers, Local Lodge 99, [2005] Alta. L.R.B.R. 356; Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail, [1996] 1 R.S.C. 369.

IV. Motifs

32 Je dois déterminer si le défendeur a manqué à son obligation de négocier de bonne foi en vertu de l’article 38 de la LRTP,qui se lit comme suit :

       38. Le plus tôt possible, dans les vingt jours suivant celui où un avis de négocier collectivement a été donné ou dans le délai supplémentaire éventuellement convenu par les parties, l’agent négociateur et les représentants de l’employeur doivent se rencontrer et entamer de bonne foi des négociations collectives et faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective.

33 La disposition ci-dessus est conforme aux dispositions sur l’obligation de négocier de bonne foi adoptées par d’autres administrations au Canada. La jurisprudence des conseils canadiens du travail a établi des principes qui circonscrivent l’obligation de négocier de bonne foi et qui orientent les conseils dans l’évaluation des plaintes pour négociation de mauvaise foi. Les deux parties ont invoqué plusieurs cas qui offrent un bon survol des principes applicables et que je résume ci-après.

34 Le principe sous-jacent de l’obligation de négocier de bonne foi prescrit de favoriser un processus de négociation collective solide et efficace. L’obligation en la matière a été définie en ce qu’elle a trait à la façon dont les parties se conduisent au cours du processus de négociation. Elles doivent engager des discussions sérieuses, ouvertes et rationnelles dans le but sincère de conclure une convention collective. Cette obligation laisse entendre que les parties doivent se comporter d’une manière propice à un échange complet de points de vue.

35 Dans CKLW Radio Broadcasting Limited, le Conseil canadien des relations du travail a cité l’extrait suivant de Canadian Industries Limited, [1976] O.L.R.B. Rep. 199, qui offre une description utile de l’obligation de négocier de bonne foi :

[Traduction]

[…]

[…] Le Conseil a fait savoir clairement que la façon dont les négociations sont menées, et non le contenu des propositions présentées à la table de négociation, détermine la satisfaction de l’obligation de négocier de bonne foi […]

[…]

La conduite des négociations est évaluée en fonction non seulement de la reconnaissance réciproque, mais aussi de la qualité des discussions. Le dernier facteur mentionné s’applique quelque peu plus largement, et il s’étend aux situations dans lesquelles peut exister l’objectif commun de conclure une convention collective, mais sans qu’il y ait quelque volonté de discuter de la façon de parvenir à cet objectif commun

[…]

36 Si l’obligation de négocier de bonne foi dicte le déroulement du processus de négociation, elle ne donne pas à entendre que les parties doivent effectivement conclure une convention collective. Elle exige toutefois que les parties engagent le processus de négociation de façon sérieuse et honnête, dans l’intention de conclure une convention collective. Comme l’a déclaré la Cour suprême dans Royal Oak Mines Inc., « […] chaque partie doit s’engager à chercher honnêtement à trouver un compromis. Les deux parties doivent se présenter à la table des négociations avec de bonnes intentions […] » Toutefois, l’obligation de négocier de bonne foi n’exclut pas les négociations serrées, et il importe de les distinguer des négociations de façade.

37 La Commission doit évaluer avec circonspection une plainte pour négociation de mauvaise foi. Elle n’est pas un tribunal qui dénoue les impasses de la négociation ou module l’équilibre des pouvoirs entre les parties. Elle doit se garder de s’immiscer excessivement dans le processus de négociation ou de saper la liberté des parties de négocier et de définir des tactiques de négociation. En règle générale, la Commission ne doit pas apprécier le caractère raisonnable des positions prises par les parties. Toutefois, elle ne doit pas hésiter à intervenir lorsqu’elle juge que le comportement d’une partie révèle sa mauvaise foi ou empêche des discussions averties et rationnelles. En outre, la Commission doit évaluer les positions prises par une partie lorsqu’elles sont présumées illégales, contraires à la politique ou perturbatrices, par ailleurs, du processus de négociation et de la capacité décisionnelle de l’autre partie. Pour rendre une décision sur le comportement des parties, la Commission doit considérer la relation de négociation entre elles et le contexte des négociations.

38 Dans Royal Oak Mines Inc., la Cour suprême a interprété l’obligation de négocier de bonne foi et a défini des normes à appliquer à l’évaluation du comportement des parties. La Cour a également recensé des situations dans lesquelles les propositions pouvaient signaler une dérogation à l’obligation de négocier de bonne foi, ce dont témoignent les extraits suivants :

[…]

       XLII. L’alinéa 50a) du Code canadien du travail prévoit une double obligation. Non seulement les parties doivent négocier de bonne foi, mais encore elles doivent faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective. Les deux éléments sont d’égale importance et une partie déroge à cette disposition si elle ne remplit pas les deux obligations. Il peut fort bien y avoir des exceptions mais, en règle générale, l’obligation d’entamer des négociations de bonne foi doit être appréciée selon une norme subjective alors que celle de faire tout effort raisonnable pour conclure une convention doit être évaluée selon une norme objective, le Conseil prenant en considération les normes et pratiques comparables dans le secteur d’activités. C’est la deuxième partie de l’obligation qui empêche une partie de se dérober en prétendant qu’elle tente sincèrement de conclure une entente alors qu’objectivement ses propositions sont tellement éloignées des normes acceptées dans le secteur d’activités qu’elles doivent être tenues pour déraisonnables.

       XLII. Aux termes du sous-al. 50a)(ii), les parties doivent «faire tout effort raisonnable pour conclure une convention collective». Par conséquent, présenter une proposition ou adopter une position inflexible alors que l'on devrait savoir que l'autre partie ne pourra jamais l'accepter constitue nécessairement un manquement à cette obligation. Comme la notion d'«effort raisonnable» doit être appréciée objectivement, le Conseil doit déterminer, en fonction des normes du secteur d'activités, si d'autres employeurs ont refusé d'insérer une clause type d'arbitrage des griefs dans une convention collective. S'il est de notoriété publique que l'absence d'une telle clause serait inacceptable pour tout syndicat, alors il n'est pas possible d'affirmer qu'une partie comme l'appelante en l'espèce a négocié de bonne foi.

[…]

39 Dans CKLW Radio Broadcasting Limited, le Conseil canadien des relations du travail a décrit comme il suit le rôle d’un conseil du travail saisi d’une plainte pour négociation de mauvaise foi :

[…]

Le Conseil n’est pas un tribunal devant lequel se règlent les différends en matière de négociation; les procédures entamées devant le Conseil ne constituent pas un substitut à la négociation collective libre et à la lutte économique qui l’accompagne. Par conséquent, le Conseil ne devrait pas se prononcer sur la valeur des positions adoptées à la table des négociations, à moins que celles-ci ne soient nettement illégales, contraires à l’ordre public, ou n’indiquent une négociation de mauvaise foi. La négociation collective étant un exercice de «donnant, donnant» assujetti aux menaces ou aux contraintes, le Conseil doit veiller à ne pas nuire à l’équilibre des pouvoirs et à ne pas restreindre l’exercice de ces pouvoirs par l’imposition de règles obligeant les parties à agir convenablement et poliment. Le Conseil doit tout de même s’assurer qu’une partie n’essaie pas d’affaiblir le droit de l’autre à entamer des négociations ou d’agir de façon à empêcher l’étude totale, avertie et rationnelle des questions litigieuses.»

[…]

40 L’obligation de négocier de bonne foi doit être envisagée dans le contexte de la réalité des négociations collectives, qui ne se déroulent pas en milieu statique. En effet, le milieu évolue progressivement, et il est susceptible d’être touché par des facteurs externes et internes. L’obligation de négocier de bonne foi ne contraint pas les parties à des positions immuables. Elles doivent plutôt avoir la latitude nécessaire pour rajuster leur comportement au fil du temps et à mesure que change le contexte. Toutefois, l’obligation limite la manière dont elles peuvent moduler leurs tactiques et leurs positions. La jurisprudence a établi clairement qu’une partie ne peut pas se conduire de manière à nuire à la capacité décisionnelle de l’autre partie. Le concept fréquemment invoqué de la négociation à horizon fuyant délimite la marge de manœuvre des parties.

41 Il y a négociation à horizon fuyant lorsque, au moment où le processus de négociation est bien avancé, une partie présente ou retire de toutes pièces un sujet de négociation ou fait valoir  une exigence clairement inacceptable, si bien que la portée du litige est sensiblement modifiée. De tels changements tardifs doivent s’accompagner d’une justification irréfutable. Toutefois, pour que la Commission intervienne, un changement de position doit être interprété comme perturbateur du processus de négociation et de la capacité décisionnelle de l’autre partie. D’une certaine manière, la conduite doit révéler l’intention de ne pas conclure de convention collective.

42 Dans Gateway Casinos GP Inc., la Commission des relations de travail de l’Alberta a fait un tour d’horizon du concept et examiné la jurisprudence sur la question en ces termes :

[Traduction]

[…]

49. Je conclus des affaires tranchées par la Commission des relations de travail de l’Ontario que sa jurisprudence sur la négociation de mauvaise foi qui interdit certains changements tardifs à la position de négociation est soit l’écho du concept de la négociation à « horizon fuyant », soit étroitement liée à celui-ci. Elle vise les pratiques de négociation les plus destructrices, celles qui sont contraires à la volonté de conclure quelque convention collective que ce soit. Le fait de présenter une nouvelle demande punitive clairement inacceptable, tandis qu’une convention semble imminente (Wilson Automotive), est un exemple du concept. De plus, la présentation de points importants supplémentaires à la table de négociation lorsque le processus est bien avancé, soit en faisant valoir des exigences carrément nouvelles (Graphic Centre (Ontario)), soit en renonçant à des points sur lesquels les parties se sont entendues (Fashion Craft Kitchen), révèle également le plus souvent l’intention de ne pas parvenir à une entente.

50. Les causes albertaines mentionnées dans l’argumentation répondent, à mon avis, à une perspective restreinte de l’interdiction d’apporter des changements injustifiés à la position de négociation lorsque le processus est bien avancé […] Toutes ces affaires, à l’instar de celles de l’Ontario, concernent l’ajout ou la suppression d’un point de négociation complet et constituent donc un changement important de l’étendue du différend […]

51. La négociation de bonne foi exige impérieusement que les parties connaissent l’étendue des questions en litige. À défaut de considérations contraires concluantes, les tactiques de négociation qui entravent profondément ou rendent futiles les efforts qu’une partie engage pour considérer et formuler sa position enfreignent le Code. La présentation de points nouveaux ou ressuscités à la table de négociation lorsque le processus est bien avancé « détruit le cadre décisionnel », car elle menace de renverser toutes les négociations préalables, qui ont nécessité de nombreux jugements réfléchis sur les priorités et compromis acceptables. Cette façon de faire trahit une intention de renverser tout ce que les négociateurs ont déjà réalisé et de retarder ou de prévenir la conclusion d’une entente.

52. À mon avis, toutefois, l’interdiction d’apporter à la position de négociation des changements qui « détruisent le cadre décisionnel » lorsque le processus est bien avancé est limitée, comme il se doit, à la présentation injustifiée de nouveaux points importants. Elle ne doit pas servir à empêcher une partie de proposer une approche sensiblement différente d’un point de négociation connu afin de dénouer une impasse.

[…]

43 Dans Finning (Canada) a Division of Finning International Inc., le Conseil des relations de travail de l’Alberta définit les facteurs à appliquer pour déterminer si un changement détruit le cadre décisionnel :

[Traduction]

[…]

25. De nombreux facteurs déterminent si des changements apportés à la position de négociation sont suffisamment destructeurs pour justifier une intervention (l’un d’eux est la question de savoir si les changements « détruisent en pratique le cadre décisionnel »). Deux des plus importants sont l’ampleur des changements et l’étape des négociations à laquelle ils sont présentés. Les conseils sont le plus susceptibles de conclure qu’il y a dérogation à l’obligation de négocier là ou une ou plusieurs propositions entièrement nouvelles sur des points importants sont présentées, tandis qu’une convention collective est en passe d’être conclue. C’est dans de telles circonstances que les conseils des relations de travail exigent qu’un changement de position repose sur une « justification irréfutable ». Si les parties ne sont pas en passe de conclure une convention collective, un changement de position doit représenter une extension ou une redéfinition importantes du différend en négociation avant que l’intervention du conseil compétent soit recommandée.

[…]

44 Dans Wilson Automotive (Belleville) Ltd., la Commission des relations de travail de l’Ontario a défini comme il suit les changements apportés à la position de négociation considérés comme incompatibles avec la volonté de conclure une convention collective :

[Traduction]

[…]

7. […] Toutefois, l’opinion de la Commission telle qu’elle est énoncée dans l’affaire Pine Ridge District Health Unit ci-dessus ne peut être considérée comme une autorisation de modifier sa position de négociation à tout moment et pour n’importe quelle raison. En clair, la modification d’une position dans le dessein de saboter le cadre décisionnel capital nécessaire à la négociation collective serait contraire à l’article 14 de la Loi. (Voir Graphic Centre (Ontario) Inc.[1976] OLRB Rep. May 221). Dans la même optique, l’adoption d’une position conçue expressément pour être rejetée trahirait l’intention de ne pas conclure de convention collective, contrairement à l’obligation imposée par l’article 14 de la Loi. Il suit que, même si les parties peuvent adapter leur conduite à leurs propres intérêts et modifier leur position de négociation en réponse à l’évolution des conditions pertinentes, une partie qui modifie sa position de négociation s’expose éventuellement à l’accusation de négocier de mauvaise foi. Dans de telles affaires, il incombe à la Commission d’examiner la preuve à la lumière de la dynamique des relations de travail et d’en tirer les conclusions appropriées.

[…]

45 Je conclus, en appliquant les principes établis relativement à l’obligation de négocier de bonne foi, que la conduite du défendeur se situait dans les périmètres de la négociation de bonne foi.

46 Les antécédents de négociation des parties montrent que ni l’une ni l’autre n’a eu tendance à négocier de mauvaise foi ou à déposer des plaintes au motif de négociation de mauvaise foi. Les parties ont une relation de longue date et ont montré, au fil des ans, leur capacité à conclure une convention collective. Par conséquent, j’estime que la plaignante n’a pas déposé sa plainte spontanément et de façon capricieuse, et je reconnais qu’elle juge la question sérieuse.

47 J’examinerai maintenant le contexte et le déroulement des événements qui ont débouché sur la plainte.

48 Je constate qu’un examen du contenu des clauses en litige de la convention collective éclaire les propositions que les parties ont présentées et leur conduite. Les clauses 13.15 et 13.16 autorisent les employés à se préparer aux négociations et à y participer. Elles leur permettent, de plus, de profiter d’un mécanisme de maintien de leur traitement lorsqu’ils bénéficient d’un congé à cette fin. Toutefois, les clauses prévoient également que l’agent négociateur assumera en bout de ligne le coût des congés. Le mécanisme de maintien du traitement prévoit le remboursement à l’employeur à la fois du traitement et des coûts des avantages sociaux des employés. À l’origine, les coûts précités étaient calculés à raison de 15,5 % du taux de rémunération quotidien de l’employé.

49 Le défendeur a présenté une proposition initiale visant à modifier les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective afin de recouvrer la hausse du coût des avantages sociaux qu’il ne souhaitait pas acquitter. Le raisonnement qui sous-tendait la proposition était expliqué clairement au début du processus de négociation, et le défendeur a fourni à la plaignante l’analyse des coûts sur laquelle reposait sa demande.

50 Il était loisible à la plaignante de décider de la réponse à donner à la demande du défendeur, qui souhaitait recouvrer la hausse du coût des avantages sociaux, mais en refusant d’envisager toute hausse du montant recouvré, elle ne pouvait s’attendre raisonnablement à ce que le défendeur laisse simplement tomber la question. Je suis également d’avis que la plaignante aurait pu s’attendre raisonnablement à ce que le défendeur réagisse. En réagissant à la position de la plaignante, le défendeur a modifié sa position d’origine et a proposé la suppression des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective. La plaignante estime que, ce faisant, le défendeur a agi de mauvaise foi et s’est livré à la négociation à horizon fuyant. Pour les motifs exposés ci-après, je ne suis pas d’accord avec ce point de vue.

51 Je reconnais que, lorsque le défendeur a proposé initialement de modifier les clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective, il n’a pas mis en doute le droit des employés de bénéficier de congés ni cherché à éliminer le mécanisme de maintien du traitement. Je suis d’accord avec la plaignante pour dire que la proposition révisée présentée par le défendeur diffère sensiblement de la proposition d’origine. Toutefois, je crois qu’il est nécessaire de situer en contexte le comportement du défendeur et le contenu de la proposition révisée.

52 Face au refus de la plaignante d’envisager toute hausse du coût des avantages sociaux recouvré par le défendeur, celui-ci a choisi de proposer l’élimination du mécanisme de maintien du traitement pour parvenir à son objectif qui consistait à ne pas assumer lui-même la hausse du coût des avantages sociaux liés aux congés. Le défendeur avait fait connaître clairement son objectif au début des discussions. De plus, il a expliqué clairement les motifs qui l’ont incité à modifier sa position. Dans son courriel du 8 mai 2008, l’avocate du défendeur a annoncé l’intention de celui-ci de proposer la suppression des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective [traduction] « […] car l’AFPC ne semble pas disposée à couvrir les coûts raisonnables du traitement engagés par l’employeur pour maintenir la rémunération des employés en congé non rémunéré pour affaires syndicales […] ». Le 10 juin 2008, le défendeur a expliqué le raisonnement qui sous-tendait sa position de négociation révisée, et il a fait connaître son désir [traduction] « […] de recouvrer du syndicat la hausse du coût des avantages sociaux » et son intention « de proposer la suppression des dispositions de maintien du traitement […] ».

53 J’estime que l’abrogation des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective et l’obligation qu’auraient dès lors les employés de s’en remettre aux seules clauses 13.10 et 13.11 pour se prévaloir de congés pour préparer les négociations collectives et y participer dépassaient la simple suppression du mécanisme de maintien du traitement, car elles imposaient des conditions au droit de bénéficier des congés précités. Cependant, à mon avis, la seule intention qu’avait le défendeur en proposant la suppression des dispositions susmentionnées était d’éliminer le mécanisme de maintien du traitement. D’ailleurs, son intention a été communiquée clairement à la plaignante. Le paragraphe 15 de l’énoncé conjoint des faits en traite en ces termes : [traduction] « Comme le syndicat n’était pas disposé à envisager une hausse du coût des avantages sociaux recouvré, l’employeur demandait la suppression des dispositions sur le maintien du traitement des employés concernés. L’AFPC pouvait payer directement les employés. »

54 Dans le contexte décrit ci-dessus, je crois que le défendeur a remanié son approche afin de réaliser son objectif initial et de provoquer une réaction. Le défendeur n’a peut-être pas choisi la meilleure stratégie en proposant la radiation intégrale des clauses 13.15 et 13.16 de la convention collective, mais la preuve dont je suis saisie ne me porte pas à conclure que, en présentant sa proposition révisée, le défendeur a agi de mauvaise foi ou dans l’intention de compromettre le processus de négociation.

55 Je peux comprendre que le changement de position du défendeur ait pu contrarier la plaignante, mais je peux également comprendre que le défendeur ait voulu redéfinir ses tactiques, compte tenu de la réponse rigide de la plaignante à la proposition initiale du défendeur. J’estime que les deux parties ont adopté des positions rigides qui ne favorisaient pas le dialogue et qui ont mené à une impasse. Dans un sens, ni l’une ni l’autre des parties n’ont cherché à trouver un terrain d’entente pour concilier leurs intérêts divergents, qui étaient légitimes dans les deux cas. Cependant, compte tenu des circonstances, je ne pense pas que le changement de position du défendeur ait témoigné de sa mauvaise foi ou qu’il ait compromis ou sapé la capacité décisionnelle de la plaignante.

56 Je n’estime pas que la conduite du défendeur révèle l’intention de ne pas conclure de convention collective. Je ne considère pas non plus que le défendeur se soit livré à la négociation de façade. À mon avis, la présentation de la proposition révisée s’apparentait davantage à un moyen regrettable utilisé par le défendeur pour remanier ses tactiques et souligner l’importance de la question.

57 Bien que la proposition révisée ait différé sensiblement de la proposition initiale, le changement de position opéré dans ce contexte n’était pas d’une ampleur telle que je puisse conclure au recours à la négociation à horizon fuyant. La proposition révisée ne consistait pas à présenter un nouveau point à la table de négociation ni à retirer un point présenté préalablement. Bien que la proposition révisée ait été plus restrictive que l’initiale, elle s’inscrivait dans une suite cohérente. La plaignante avait été saisie dès le début des négociations de la question du maintien du traitement et de la volonté du défendeur de recouvrer le coût accru lié aux congés. En présentant sa proposition révisée, le défendeur entendait réaliser l’objectif initial, soit de ne pas assumer le coût lié aux congés. Le contexte avait évolué, étant donné la position adoptée par la plaignante, et le défendeur a proposé une approche différente d’un point connu. Bien que la position révisée ait augmenté l’étendue du différend, je n’estime pas, dans les circonstances, qu’elle l’ait modifié de façon appréciable. Qui plus est, le changement n’a pas été effectué au moment où une entente semblait imminente. La preuve montre que les parties avaient tenu neuf séances de négociation, mais elle n’indique pas qu’elles étaient près de s’entendre. Il est clair qu’elles se trouvaient dans une impasse vis-à-vis de la question, mais je ne crois pas que la capacité décisionnelle de la plaignante ait été compromise.

58 En ce qui concerne le contenu de la proposition révisée, à mon avis il ne revient pas à la Commission d’évaluer le caractère raisonnable des propositions et, quoi qu’il en soit, je ne crois pas que la proposition puisse être jugée inacceptable ou déraisonnable au point d’avoir compromis le processus de négociation dans son ensemble.

59 En résumé, je n’estime pas que la conduite du défendeur a détruit le cadre décisionnel de la plaignante, ni qu’il a eu l’effet prévisible de le détruire. Par contre, je comprends la réaction et l’irritation de la plaignante, et je crois que les deux parties auraient avantage à adopter une approche plus ouverte de la question et de leurs négociations en général, car cela favoriserait de bons échanges et des négociations efficaces. Les antécédents de négociation des parties montrent qu’elles ont pu parvenir à des ententes, et je leur souhaite de faire un nouveau départ et d’aborder leur différend sous un nouvel angle.

60 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

61 La plainte est rejetée.

Le 28 novembre 2008.

Traduction de la CRTFP

Marie-Josée Bédard,
vice-présidente

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