Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a demandé une remise de l’audience pour permettre à son avocat, nouvellement engagé, de se préparer - les dates de l’audience étaient fixées depuis plus de cinq mois - le fonctionnaire s’estimant lésé a attendu jusqu’à la semaine précédant l’audience pour engager un avocat pour le représenter - l’arbitre de grief, tout en reconnaissant le droit à l’avocat, a noté que ce droit n’est pas absolu - dans l’exercice de sa discrétion, elle a tenu compte du manque de diligence du fonctionnaire s’estimant lésé à prendre des mesures pour défendre ses intérêts. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2008-03-18
  • Dossier:  566-02-416
  • Référence:  2008 CRTFP 16

Devant un arbitre de grief


ENTRE

RICHARD SIOUI

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

employeur

Répertorié
Sioui c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)

Décision intérimaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Rénald Labbé, avocat

Pour l'employeur:
Karl Chemsi, avocat

Affaire entendue à Québec (Québec),
le 10 mars 2008.

1 La présente décision porte sur une demande de remise d’audience déposée le jeudi 6 mars en fin d’après-midi pour une audience prévue à Québec le lundi 10 mars 2008 et d’une demande au même effet présentée en début d’audience le 10 mars 2008.

2 Richard Sioui, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), était un agent correctionnel à l’Établissement de Donnacona. Le 15 mai 2006, le fonctionnaire dépose un grief au dernier palier de la procédure de règlement de grief contestant son licenciement. Le 26 juin 2006, le grief est renvoyé à l’arbitrage par l’agent négociateur. Le Service correctionnel du Canada (l’« employeur ») fournit sa réponse au dernier palier de la procédure de règlement des griefs le 7 juillet 2006 rejetant la demande de réintégration.

3 L’affaire est fixée pour audience une première fois par la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») du 9 au 12 janvier 2007. L’audience est reportée en raison d’une entente entre les parties pour tenter de régler le dossier par voie de médiation. Une séance de médiation est fixée du 10 au 12 janvier 2007.

4 Le 29 janvier 2007, la Commission est avisée que les parties ont conclu une entente pendant la séance de médiation. L’agent négociateur doit communiquer la finalité de l’entente à la Commission avant le début de mars 2007. N’ayant pas reçu de nouvelles des parties, la Commission leur écrit le 7 août 2007 leur demandant une mise à jour. Les parties demandent un délai additionnel pour y répondre. Le 20 août 2007, l’agent négociateur précise qu’il veut une prorogation jusqu’à la fin de 2007 pour répondre. L’employeur s’objecte à la demande de l’agent négociateur au motif que les parties ne sont pas en mesure de mettre en œuvre l’entente conclue lors de la médiation. L’employeur demande que l’affaire soit mise au rôle des audiences de la Commission.

5 Le 24 septembre 2007, la Commission informe les parties qu’elle refuse la demande de prolongation des délais et que l’affaire sera mise au rôle. Le 11 octobre 2007, l’agent négociateur informe la Commission qu’il ne représente plus le fonctionnaire. Le 16 octobre 2007, la Commission écrit aux parties les avisant du retrait de l’agent négociateur, demande au fonctionnaire s’il tient toujours à procéder dans le dossier et, le cas échéant, si quelqu’un d’autre le représentera. Entretemps, le fonctionnaire est consulté directement au sujet du choix des dates de l’audience. La Commission par la suite avise les parties que les dates d’audience du 10 au 14 mars 2008 sont fixées provisoirement au rôle et demande une confirmation écrite de leur disponibilité au plus tard le 29 octobre 2007.

6 Par courriel en date du le 17 octobre 2007, le fonctionnaire acquiesce aux dates d’audience proposées par la Commission. L’employeur avise la Commission par courriel le 30 octobre 2007, qu’il est aussi disponible aux dates proposées.

7 Dans l’entremise, il y a un échange de correspondance entre le fonctionnaire, la Commission et les parties concernant la représentation du fonctionnaire à l’arbitrage. Le 17 octobre 2007, alors qu’il confirme sa disponibilité pour l’audience, le fonctionnaire confirme également qu’il sera désormais représenté par un autre avocat « exclusivement sur la cause de l’emploi convenable », mais qu’il s’attend à être représenté par l’agent négociateur par rapport à son congédiement. Le 18 octobre 2007, la Commission confirme aux parties que le fonctionnaire est maintenant représenté par Me Marc Bellemare.

8 Le 31 octobre 2007, la Commission avise que Me Bellemare et le représentant de l’employeur, Drew Heavens, que les dates d’audience du 10 au 14 mars 2008 sont « fermes ». Le 16 novembre 2007, la Commission confirme de nouveau les dates d’audience en avisant que l’audience se tiendra à Québec. Les parties, dont Me Bellemare, sont avisées formellement par la Commission des dates et du lieu de l’audience le 18 janvier 2008.

9 Le 21 janvier 2008, Me Bellemare envoie un avis à la Commission par télécopieur qu’il n’a jamais confirmé son mandat d’agir pour le fonctionnaire devant la Commission. Le 22 janvier 2008, la Commission avise le fonctionnaire et l’employeur de la correspondance de Me Bellemare et confirme les dates d’audience de nouveau. Comme aide à la préparation du dossier par une partie qui se représente elle-même, la Commission fait parvenir au fonctionnaire par courrier enregistré le 23 janvier 2008, une copie d’un vidéo intitulé : Les deux côtés de la médaille : L’arbitrage formel et accéléré de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Le 23 janvier 2008, la Commission envoie un avis d’audience directement au fonctionnaire et à l’employeur au même effet que sa lettre du 18 janvier 2008. Le 25 janvier 2008, Postes Canada confirme la réception du vidéo par le fonctionnaire.

10 Le 8 février 2008, l’employeur écrit à la Commission pour lui demander son intervention afin de confirmer la présence du fonctionnaire à l’audience puisqu’il va engager des frais pour faire comparaître un témoin expert. La Commission répond aux parties que l’arbitre n’a pas l’intention d’intervenir à ce stade puisque les conséquences du défaut de comparaître à une audience ont été signalées dans l’avis d’audience du 23 janvier 2008.

11 Le 25 février 2008, l’employeur fait parvenir au fonctionnaire, une copie d’une expertise médicale qu’il entend déposer à l’audience et en vertu de laquelle témoignera un expert. La Commission reçoit une copie de la lettre, mais non du rapport.

12 Le 27 février 2008, le fonctionnaire écrit à la Commission lui demandant son intervention afin qu’elle ordonne à l’agent négociateur de le représenter à l’audience à ses frais, en raison de la complexité du dossier. Il demande l’enregistrement de l’audience. La Commission accuse réception de cette missive le 28 février 2008. Le 3 mars 2008, la Commission refuse d’intervenir et indique qu’elle n’a pas compétence pour ordonner à un agent négociateur de représenter un fonctionnaire s’estimant lésé. Elle souligne également que le fonctionnaire aurait avantage à consulter un avocat en pratique privée s’il y a lieu. La demande d’enregistrement est rejetée entre autres motifs parce que la décision de l’arbitre de grief tient compte de la preuve entendue à l’audience et des observations des parties.

13 Le 6 mars 2008, la Commission reçoit une demande de remise de la part du cabinet d’avocats apparemment retenu pour représenter le fonctionnaire s’estimant lésé. La demande ne fait valoir aucune autre justification pour expliquer la communication tardive du client avec son procureur.

14 La lettre dit ce qui suit :

[…]

Monsieur Sioui a contacté le soussigné hier, le 5 mars 2006 [sic]. Il désire lui confier le mandat pour l’audition de son dossier prévu [sic] du 10 au 14 mars 2008 à l’Hôtel Dominion à Québec.

Le soussigné n’a pas eu le temps de prendre connaissance de tout le dossier. Il n’est donc pas en mesure de savoir s’il accepte le mandat que désire lui confier Monsieur Sioui.

Nous demandons une remise dans la présente affaire aux dates sur lesquelles nous pourrons nous entendre si nous acceptons le mandat.

À défaut de recevoir une réponse avant la date fixée pour le début de l’audition le 10 mars à 13 h 30, nous nous présenterons et demanderons une remise à ce moment.

[…]

15 La Commission accuse réception de la demande de remise le 7 mars 2008 et demande à l’employeur d’y répondre au plus tard à midi le même jour. L’employeur répond en s’opposant à la demande de remise au motif qu’elle est tardive puisque le fonctionnaire connaît les dates d’audience depuis le mois d’octobre 2007 et qu’il a été avisé à ce moment-là que l’agent négociateur ne le représentait plus. À cela, l’employeur ajoute que le fonctionnaire a été informé le 25 février 2008 de la convocation d’un témoin expert et qu’on lui a fait parvenir une copie de l’expertise médicale.

16 Après avoir tenu compte des éléments ci-dessus, le 7 mars 2008, j’ai refusé la demande de remise, motifs à suivre. Les parties ont été avisées de ma décision en mi-après-midi.

17 Le 10 mars 2008, au début de l’audience, le fonctionnaire se présente avec son procureur. Par l’entremise de son procureur, le fonctionnaire réitère à nouveau la demande de remise en ajoutant comme fait nouveau qu’il a fait une demande d’aide juridique. Une première rencontre avec l’aide juridique est prévue pour le 2 avril 2008. Le procureur demande que l’audience soit reportée après cette date.

18 L’employeur s’objecte à la demande de remise au motif que la demande n’est pas raisonnable et fait valoir la préparation qui a été nécessaire pour présenter ce lourd dossier. Toutefois, l’employeur plaide que si j’accède à la demande de remise, il y a lieu d’imposer des conditions de procédure strictes afin d’éviter que l’affaire perdure.

19 En réponse à mes questions, j’apprends que le fonctionnaire a discuté avec son procureur de la possibilité d’obtenir un mandat d’aide juridique et n’a consulté les services d’aide juridique que pendant la matinée précèdant l’audience qui débute en après-midi. J’apprends que sa demande d’aide juridique est fondée sur le fait qu’il est présentement étudiant et qu’il a été licencié de son emploi et non sur tous les faits de l’affaire; il n’y a aucune preuve de l’acceptation du mandat de représentation par l’aide juridique, seulement les dires du fonctionnaire.

20 Le fonctionnaire me confirme qu’il sait que le syndicat refuse de le représenter depuis le mois d’octobre 2007. Il admet ne pas connaître un recours possible par rapport au défaut de représentation équitable par le syndicat en vertu de l’article 187 de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22 (la « Loi »). Il admet ne pas avoir consulté le site Web de la Commission pour s’informer du processus d’arbitrage et ne pas avoir pris connaissance des documents électroniques que lui a fournis la Commission lorsqu’elle a appris qu’il se représentait lui-même.

21 J’apprends également que lorsque le fonctionnaire a consulté Me Labbé la semaine dernière en vue de le représenter dans la présente affaire, il lui a dit qu’il avait les moyens de payer ses honoraires. Me Labbé confirme ce fait. Toutefois, le fonctionnaire s’est ravisé en fin de semaine. Apparemment, il a reçu un héritage mais n’entend pas le dilapider pour défendre ses droits dans la présente affaire. Il s’attend à se faire représenter par l’aide juridique. Me Labbé n’accepte pas les mandats d’aide juridique.

MOTIFS

22 Les motifs qui suivent visent les décisions du 7 et du 10 mars 2008. Même si la demande de remise avait été refusée et comuniquée aux parties le 7 mars, j'ai pris le temps d'écouter les arguments du fonctionnaire au début de l'audience du 10 mars et j'en ai tenu compte dans ma décision.

23 Le droit à la représentation par avocat découle du principe de justice naturelle qui est le droit de se faire entendre. Le but du droit à la représentation par avocat est d’assister le justiciable en lui permettant de faire valoir ses moyens ou sa défense. Bien que le droit à la représentation ait acquis un statut constitutionnel en vertu de l’article 7 de la Chartre canadienne des droits et libertés (la Charte), il ne s’agit pas d’un droit absolu, tel que nous l’apprend le juge Thurlow dans Howard c. Établissement de Stony Mountain, [1984] 2 C.F. 642 (C.A.F.) :

[…]

Je suis d’avis que l’adoption de l’article 7 n’a pas créé aucun droit absolu d’être représenté par avocat dans toute procédure de ce genre. Il est sans aucun doute de la plus grande importance que la personne dont la vie, la liberté ou la sécurité sont en jeu ait l’occasion d’exposer sa cause aussi pleinement et adéquatement que possible. Les avantages de l’assistance d’un avocat à cette fin ne sont pas contestés. Cependant, ce qui est exigé c’est l’occasion d’exposer sa cause adéquatement et je ne crois pas qu’on puisse affirmer qu’il n’existe pas de cas où une telle occasion ne peut être fournie sans qu’il faille également accorder le droit d’être représenté par avocat à l’audition.

[…]

[Je souligne]

24 Le juge Thurlow ajoute que le droit d’être représenté par avocat dépend des circonstances de l’espèce, de sa nature, de sa gravité, de sa complexité, de l’aptitude à comprendre la cause et à présenter sa défense.

25 Le droit à la représentaiton repose sur des principes qui ont d'abord été établis par les tribunaux puis « enchâssés » par l'article 7 de la Charte. L’article 34 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec fait maintenant de la représentation par avocat un droit absolu devant les tribunaux administratifs quand ces derniers exercent des pouvoirs qualifiés de quasi judiciaires. Toutefois, cette loi ne s’applique pas à un tribunal administratif fédéral. Par conséquent, ce sont les principes du droit commun qui s’appliquent en l’instance.

26 Le professeur Yves Ouellette, dans son ouvrage intitulé Les tribunaux administratifs au Canada (1997 - Thémis), dit pertinemment ce qui suit à la page 143 :

Le droit à la représentation par avocat

Le droit commun n’a jamais reconnu au Canada un droit général et absolu à la représentation par avocat devant un tribunal administratif tenu de respecter les règles de justice naturelle, dans l’intérêt sans doute de l’efficacité de la procédure. On a plutôt considéré que le tribunal administratif dispose en cette matière d’une mesure de discrétion, mais qu’il faut accorder ce droit lorsque l’absence de représentation par avocat équivaut à déni de justice ou empêche une personne de faire valoir ses moyens. Le tribunal doit alors prendre en considération l’impact d’une décision sur le gagne-pain ou la réputation d’une personne, la complexité du dossier, le coût et les délais qu’implique la représentation par avocat.

[Je souligne]

27 Les principes qui s’appliquent au droit à l’avocat s’appliquent également en ce qui a trait à une demande de remise d’audience pour retenir les services d’un avocat. Ce droit n’est pas absolu. Tout comme le droit à la représentation, le tribunal a une grande discrétion (voir à ce sujet : Meunier c. Luc Jean, Extermination 7/24, [2000] D.T.T.Q. no 118).

28 Les tribunaux ont à plusieurs reprises été confrontés à des demandes de remise reliées au droit d’être représenté par avocat. Me Denis Lemieux dans son ouvrage intitulé Droit public et administratif, Collection de droit 2004-2005, École du Barreau du Québec, vol. 7, 2004 (cité dans Mario Boily c. Armoires Orléans 2005 QCCRT 609), s’exprime comme suit :

[…]

Une personne pourra demander un ajournement ou une suspension de l’instance afin d’obtenir un délai raisonnable pour exercer pleinement son droit à une défense pleine et entière. Cette demande pourra se fonder sur la nécessité de prendre connaissance de certains faits nouveaux, de demander l’assistance d’un avocat ou de produire des témoins ou des documents. Un organisme administratif jouira d’un pouvoir discrétionnaire d’accorder ou de rejeter une telle demande d’ajournement. Toutefois, un refus d’ajournement pourra être illégal s’il en résultait un préjudice irréparable pour la personne concernée, sans que ce préjudice ne découle de sa propre négligence ou de celle de son procureur.

[…]

29 Je partage les propos de la juge Handman dans Autobus scolaire Fortier Inc. c. Syndicat des chauffeurs d’autobus scolaires, région de Québec (CSD), [2000] D.T.T.Q. no118 concernant les limites raisonnables du droit de remise pour retenir les services d’un procureur :

[18] Le droit à la représentation par avocat, par contre, n’est pas absolu. Il appartient au tribunal d’apprécier, suivant les circonstances et la nature du litige, si une remise est nécessaire à une défense pleine et entière ou s’il s’agit d’un moyen qui n’est qu’abusif. Un tribunal inférieur, étant maître de sa procédure, détient une discrétion à cet égard. Seul le refus arbitraire d’ajournement peut entraîner un déni de justice et justifier l’intervention judiciaire. […]

30 Par conséquent, le droit à la représentation par avocat n’étant pas un droit absolu, je dois tenir compte du sérieux des motifs justifiant la demande de remise, y compris s’il s’agit d’une manœuvre visant à retarder le déroulement des procédures, l’impératif de temps, l’intérêt des parties à bénéficier d’une procédure rapide et efficace et l’économie générale de la Loi.

31 J’ai tenu compte des faits particuliers de ce dossier, soit qu’il ne s’agit pas de la première demande de remise, que le dossier a été renvoyé à l’arbitrage il y a plus de 18 mois et qu’il y a eu de nombreuses communications de la Commission avec le fonctionnaire lui demandant s’il allait continuer son dossier en l’absence d’un procureur. Il y a eu des avis répétés de confirmation d’audience, avec l’indication qu’il s’agissait de dates finales. Je suis d’avis que le fonctionnaire n’a pas eu l’intention de se faire représenter par un procureur jusqu’à ce que l’employeur, le 25 février 2008, lui communique une copie d’un rapport d’expertise et lui signifie son intention de faire entendre un expert. C’est à ce moment que le fonctionnaire a réagi en demandant à la Commission d’ordonner au syndicat de le représenter, ce que la Commission a décliné de faire pour les raisons mentionnées ci-dessus.

32 Par contre, ce n’est que le 5 mars 2008 que le fonctionnaire communique avec un avocat pour se faire représenter. Qui plus est, lorsque la Commission refuse la demande de remise le 7 mars 2008, le fonctionnaire s’adresse à l’aide juridique le 10 mars 2008, le matin même de l’audience, et tente de faire valoir ce moyen pour obtenir une remise. L’admission qu’il a retenu les services d’un avocat de la pratique privée à ses frais la semaine dernière puis s’est ravisé par la suite pour se faire représenter par un avocat de l’aide juridique quatre jours plus tard dessert sa cause.

33 Dans de telles circonstances, si préjudice il y a, il découle uniquement de la négligence du fonctionnaire d’avoir attendu jusqu’à la toute dernière minute pour obtenir des services de représentation. Le fonctionnaire se devait d’agir en vue de se faire représenter, si telle était son intention, dès qu’il a reçu l’avis d’audience. Le fonctionnaire n’a présenté aucune justification qui soutient une difficulté ou une impossibilité à consulter un avocat dans un délai qui lui aurait permis de se préparer adéquatement pour l’audience. Il n’a pas été question d’avoir été surpris par des faits nouveaux, ou encore de l’impossibilité de produire des témoins ou des documents nécessaires à la cause en raison de la preuve déjà communiquée par l’employeur.

34 De plus, je suis d’avis que la fonctionnaire a pris le processus à la légère en ne prenant pas soin de s’informer de ses droits et en ne prenant pas connaissance des outils qui étaient à sa disposition afin de prendre une décision éclairée, que ce soit de se représenter seul, ou de se faire représenter par un avocat s’il se sentait dépassé par l’affaire.

35 Je suis consciente qu’il s’agit d’un grief de congédiement, mais ce motif en lui-même ne justifie pas d’accorder la remise eu égard aux autres facteurs présents dans le dossier. Le fonctionnaire n’a présenté aucun argument quant à l’impossibilité de se défendre compte tenu de la complexité de la cause, ou de son manque d’aptitude à la comprendre.

36 Je tiens compte aussi des conséquences liées à une demande de remise à la dernière minute qui auraient pu être évitées si le fonctionnaire avait fait diligence. Ici, l’employeur n’a pas à subir l’incurie du fonctionnaire, puisqu’il a pris la précaution de l’avertir à l’avance de la preuve qu’il allait présenter à l’audition et de s’enquérir de sa présence. L’impératif de temps, l’intérêt des parties à bénéficier d’une procédure rapide et efficace et l’économie générale de la Loi font en sorte qu’il n’y a pas lieu que j’exerce ma discrétion.

37 Dans de pareilles circonstances, il ne s’agit pas d’une négation du droit à l’avocat, mais bien d’un refus de remettre l’audience pour ce prétexte. À cet égard, je me rallie aux conclusions de la Commission des relations de travail du Québec dans Mario Boily ainsi qu’à celles dans Chow c. Conseil du Trésor (Statistique Canada), 2006 CRTFP 71. Je conclus que dans les circonstances, la demande de remise n’est qu’une manœuvre visant à gagner du temps en cherchant à retarder des audiences planifiées depuis longtemps.

38 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

39 La demande de remise est rejetée.

Le 18 mars 2008.

Michele A. Pineau,
arbitre de grief

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