Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a vécu une situation conflictuelle avec son employeur et était en absence rémunérée du travail - il a été convoqué à une réunion avec l’employeur pour discuter de son retour au travail - au moment de la rencontre, le syndicat avait en main trois certificats médicaux qui confirmaient que le plaignant était sain d’esprit et qu’il pouvait retourner travailler - le plaignant était accompagné à la rencontre de M. Hogan, un des défendeurs et un représentant syndical au niveau local, qui était d’avis que la rencontre s’était bien passée - plutôt que de se présenter au travail, il a transmis à l’employeur une lettre de démission, qui a été acceptée par son employeur - le plaignant a, par la suite, demandé à l’employeur de reconsidérer sa décision, ce qu’il a refusé de faire - quatre mois plus tard, le plaignant a écrit à ses deux représentants syndicaux pour demander quels étaient ses recours et ils ont répondu qu’il n’existait aucun recours contre la décision de l’employeur - il a déposé une plainte contre les deux représentants alléguant qu’ils avait fait preuve de mauvaise foi et qu’ils avaient avait agi de manière arbitraire - le plaignant a soulevé l’allégation de congédiement déguisé et a soulevé son allégation qu’il s’était senti menacé lors de la rencontre seulement lors de l’audience sur sa plainte - le plaignant s’est objecté au fait que l’employeur aurait fait parvenir à l’agent intérimaire de gestion des cas deux déclarations assermentées des défendeurs en réponse à sa plainte, au lieu de les envoyer au directeur général de la Commission - la Commission a rejeté l’objection préliminaire en statuant que la pratique de la Commission de traiter la correspondance adressée à un agent du greffe comme étant adressée au directeur général est tout à fait conforme à l’esprit du Règlement - les défendeurs ont soulevé une objection préliminaire voulant que le plaignant n’était plus un fonctionnaire au moment où il a déposé la plainte et donc que l’article 187 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (<<la Loi>>)ne s’appliquait pas à lui - le commissaire a décidé que même si le plaignant ne payait plus de cotisations, le syndicat avait encore des obligations envers lui - le commissaire a tenu compte seulement des éléments de preuve ayant trait à la plainte telle qu’elle a été écrite - l’article 187 de la Loi n’impose pas au syndicat une obligation de représentation dans tous les cas - le syndicat ne savait pas que le plaignant s’était senti menacé lors de la rencontre portant sur sa réintégration - un syndicat ne peut agir sur une situation qu’il ne connaît pas - le fait que le syndicat avait en main deux avis médicaux qui lui avaient été transmis par l’employeur ne prouve pas qu’il y a eu une sorte de collusion ou une complicité entre l’employeur et le syndicat à l’encontre du plaignant - les défendeurs n’ont pas agi de manière arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2008-04-24
  • Dossier:  561-02-156
  • Référence:  2008 CRTFP 26

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

ALAIN LAFERRIÈRE

plaignant

et

STANISLAUS HOGAN ET LUCIE BAILLAIRGÉ

défendeurs

Répertorié
Laferrière c. Hogan et Baillairgé

Affaire concernant une plainte visée à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, commissaire

Pour le plaignant:
Lui-même

Pour les défendeurs:
Gaston Nadeau, avocat

Affaire entendue à Montréal (Québec),
les 17 et 18 mars 2008.

Plainte devant la Commission

1 Le 10 avril 2007, Alain Laferrière (le « plaignant »), employé de l’Agence spatiale canadienne jusqu’au 28 novembre 2006, a déposé auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») une plainte en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22,(la « Loi ») contre Stanislaus Hogan et Lucie Baillairgé (les « défendeurs ») en leur qualité de représentants de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (l’« Institut »). M. Laferrière allègue dans sa plainte que M. Hogan a agi de mauvaise foi en omettant de l’informer, lors d’un échange le 19 mars 2007, de l’existence du droit de renvoi du grief à l’arbitrage. Le plaignant allègue aussi que Mme Baillairgé a agi de manière arbitraire en prenant partie pour son employeur lors d’une demande d’aide qu’il lui a formulée le 21 mars 2007.

2 M. Laferrière a été embauché à titre d’ingénieur classifié EN-ENG-05 par l’Agence spatiale canadienne le 2 octobre 2000. Son poste d’attache était celui de gestionnaire, matériel, sécurité et assurance de mission. En juillet 2006, alors qu’il occupait un poste classifié EN-ENG-06 de façon intérimaire, M. Laferrière a vécu une situation conflictuelle très sérieuse avec son employeur, l’Agence spatiale canadienne. Comme conséquence à cette situation conflictuelle, M. Laferrière a été en absence rémunérée du travail entre le 19 juillet et le 24 novembre 2006.

3 Le 22 novembre 2006, Carole Lacombe, présidente intérimaire de l’Agence spatiale canadienne, a convoqué M. Laferrière à une rencontre le 24 novembre 2006 à 13 h 30 dont le but était de discuter du retour au travail de M. Laferrière à compter du 27 novembre 2006. M. Hogan, un des défendeurs, accompagnait M. Laferrière à la rencontre. Plutôt que de se présenter au travail le 27 novembre 2006, M. Laferrière a transmis ce même jour à Mme Lacombe une lettre de démission. Le 30 novembre 2006, Mme Lacombe a écrit à M. Laferrière pour l’informer qu’elle acceptait sa démission entrant en vigueur à la fermeture des bureaux le 28 novembre 2006.

4 Avant même le début de l’audience, les deux parties ont soumis des objections préliminaires à la Commission. Lors de l’audience, j’ai réservé ma décision sur ces objections et aussi entendu toute l’affaire sur le fond. Je me pencherai d’abord sur les objections préliminaires et je reviendrai par la suite sur le fond.

Objections préliminaires soulevées par le plaignant

5 Le 1er mai 2007, Erik Mackay, agent des relations de travail au bureau de Montréal de l’Institut, a fait parvenir à l’agent intérimaire de gestion de cas de la Commission deux déclarations assermentées des défendeurs en réponse à la plainte du plaignant. Le 4 mai 2007, le plaignant s’est objecté à la procédure utilisée par les défendeurs à savoir que les documents n’avaient pas été soumis au directeur général de la Commission. Lors de l’audience, le plaignant a indiqué qu’il maintenait cette objection.

6 L’essence de l’objection formulée se lit comme suit :

[…]

Je désire apporter [sic] à votre attention le fait que la soumission des défendeurs constituée de la lettre de Me Erik Mackay, […], est adressée directement à […] [l’]Agent intérimaire de gestion de cas de la CRTFP, et ce en non-conformité aux dispositions de l’article 7 (1) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

L’article 7 (1) du Règlement stipule que : « Sous réserve de l’article 8, tout document présenté après le document introductif est déposé auprès du Directeur Général ». La soumission des défendeurs, […], est donc en violation des dispositions de l’article 7 (1) du Règlement.

Sur la base de la non-conformité de la soumission des défendeurs aux dispositions de l’article 7 (1) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, je demande à la Commission de ne pas tenir compte de la soumission non-conforme des défendeurs dans la poursuite de la procédure d’instruction de la plainte citée en rubrique.

[…]

[Les passages en caractères gras le sont dans l’original]

7 Le 17 juillet 2007, le directeur général de la Commission a répondu au plaignant. Je reprends ici certaines sections de sa réponse.

[…]

Il convient de situer cette exigence et la pratique dans une perspective plus générale, celle d’assurer un traitement efficace des dossiers tout en assurant aux parties l’équité procédurale. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre l’article 7 du Règlement qui vise deux objectifs principaux : la bonne gestion des documents déposés, et la signification aux autres parties des documents déposés. La mention qui est faite au paragraphe (1) du directeur général sert à donner une adresse générale pour le dépôt des documents. C’est le directeur général à tire [sic] de responsable des opérations de la Commission qui est visé par cette disposition, et non le directeur général à tire personnel. En pratique, toute correspondance qui parvient au directeur général et qui concerne un dossier en instance est acheminé au greffe.

[…]

Le fait de considérer la correspondance adressée à un agent du greffe comme étant adressée au Directeur général, pour les fins de conformité au paragraphe 7(1), est une pratique qui s’est développée pour assurer le traitement sans heurt des dossiers de la Commission. Encore une fois, il faut éviter que les parties traitent directement avec les décideurs. Elles doivent plutôt traiter avec le greffe, dont le chef ultime est le directeur général, puisque la directrice des opérations relève directement du directeur général. La correspondance est donc reçue par le greffe au nom du directeur général. Cette pratique, au fil des années, a été et continue d’être à l’avantage de toutes les parties, soit les fonctionnaires, les syndicats, les employeurs et les intervenants, puisqu’elle permet un traitement plus expéditif des dossiers.

[…]

Par ailleurs, on peut mentionner que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, au paragraphe 241(1), prévoit que les procédures prévues ne sont pas susceptibles d’invalidation pour vice de forme ou de procédure. La Loi a bien sûr préséance sur le Règlement, qui est adopté sous son régime et qui ne sert qu’à prescrire les formes et la procédure. Le fait d’adresser la correspondance directement au greffe, plutôt qu’au Directeur général, pourrait s’assimiler tout au plus à un vice de forme, qui ne peut invalider une procédure donnée.

[…]

8 Je partage l’opinion exprimée par le directeur général et je considère que la pratique de la Commission de traiter la correspondance adressée à un agent du greffe comme étant adressée au directeur général est tout à fait conforme à l’esprit du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (le « Règlement »). Le bureau du directeur général est indiqué dans le Règlement comme point unique de réception de la documentation soumise par les parties afin de leur simplifier la tâche. Puis, au cours du processus d’échange de correspondance dans la gestion du dossier, divers intervenants de la Commission communiquent avec les parties et, à partir de là, les parties répondent directement à ces intervenants au lieu de s’adresser au directeur général. Il pourrait d’ailleurs difficilement en être autrement compte tenu que la Commission traite plusieurs milliers de cas par an, chacun des cas générant plusieurs échanges de correspondance. Quoiqu’il en soit, le fait d’accepter l’objection du plaignant n’aurait rien changé dans la cause car les défendeurs auraient été en plein droit de produire les déclarations assermentées comme élément de preuve lors de l’audience.

9 Le plaignant a soulevé une deuxième objection préliminaire alléguant que les défendeurs ne s’étaient pas conformés au paragraphe 7(2) du Règlement en omettant de soumettre au plaignant une lettre que les défendeurs ont adressé à la Commission le 30 octobre 2007. Rappelons que le paragraphe 7(2) du Règlement prévoit entre autre que les documents soumis à la Commission par une partie doivent aussi être soumis par cette même partie à l’autre partie. Me Gaston Nadeau, au nom des défendeurs, affirme dans un courriel du 12 novembre 2007 avoir transmis la lettre du 30 octobre 2007 au plaignant par courriel et par la poste. Le plaignant dit n’avoir jamais reçu ces envois. Puis, Me Nadeau a fait parvenir au plaignant le 12 novembre 2007 une nouvelle copie de la lettre du 30 octobre 2007. Le plaignant admet avoir reçu la lettre le 12 novembre 2007.

10 Il est difficile de conclure à partir de la preuve déposée si les défendeurs ont manqué ou non aux obligations que leur impose le Règlement. Ils disent avoir transmis la lettre du 30 octobre 2007 au plaignant en même temps qu’ils ont transmis la lettre à la Commission mais aucune preuve n’a été déposée à cet effet lors de l’audience. Pour des raisons inexplicables, le plaignant n’a alors pas reçu la lettre. Immédiatement après qu’il s’en soit rendu compte, il l’a signalé et les défendeurs lui ont fait parvenir une nouvelle copie de la lettre. Les droits du plaignant à l’équité procédurale n’ont ainsi en rien été brimés par cet incident car même si je concluais qu’il y a eu manquement dans la transmission de l’information, l’erreur a été corrigée bien avant l’audience, ce qui a donné le temps au plaignant de se préparer et de répliquer. Autrement dit, il n’y a eu aucun effet surprise causé par le prétendu manquement empêchant le plaignant de répondre à l’objection soumise le 30 octobre 2007.

Objection préliminaire soulevée par les défendeurs

11 Le 30 octobre 2007, les défendeurs ont écrit à la Commission pour soulever une objection préliminaire voulant que le plaignant n’était plus un fonctionnaire au moment où il a déposé la plainte dont il est ici question. Ils ont réitéré cette objection lors de l’audience. L’objection soumise initialement le 30 octobre 2007 se lit comme suit :

[…]

Le moyen préliminaire en droit que nous entendons soulever est relativement simple. Le plaignant, monsieur Laferrière, reproche aux représentants de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada d’avoir manqué à leur devoir de représentation suite à des évènements survenus au mois de mars 2007. Or à cette époque, le plaignant avait cessé depuis quelques mois d’être un fonctionnaire au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ayant donné sa démission comme employé de l’Agence spatiale canadienne au mois de novembre 2006. En conséquence, en mars 2007, le plaignant n’était plus un fonctionnaire, il ne faisait plus partie de l’unité de négociation dont l’Institut est l’agent négociateur. Dès lors, l’article 187 de la loi est sans application en l’espèce.

[…]

12 À l’appui de sa prétention relative à l’objection, l’avocat des défendeurs a déposé l’article 63 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, et les décisions suivantes : Murray, Bews, Young et Boyko c. Fraternité des wagonniers d’Amérique et du Canada et Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, [1986] CCRI no 545; Palmer c. Association des employés du service canadien du renseignement de sécurité, 2005 CRTFP 41; Downer c. Alliance de la Fonction publique et al., dossiers de la CRTFP 161-02-846 à 848 (19980604); Haley c. Section locale 269 de l’Association internationale des débardeurs, 1999 CCRI décision-lettre 77 (19990528); Bouchard et al. c. Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 687 et al., [2003] CCRI no 259; Powell c. Section locale 938 de la Fraternité internationale des Teamsters et al., [2000] CCRI no 97.

13 Comme réponse à l’objection préliminaire soulevée par les défendeurs, le plaignant estime que l’objection est mal fondée car elle repose sur une présomption de la véritable nature de sa volonté. Le plaignant a demandé à l’employeur le 6 décembre 2006 de le réembaucher, mais ce dernier a refusé. Selon le plaignant, il s’agit là d’un congédiement déguisé. Le plaignant estime aussi que l’objection est incorrecte puisque les événements mis en cause sont survenus entre le 26 juillet 2006 et le 21 mars 2007 et qu’il était employé de l’Agence spatiale canadienne pendant près de la moitié de la période en cause. Les violations de l’article 187 se sont produites en partie au moment où le plaignant était un fonctionnaire et l’ensemble des faits et gestes, qu’ils se situent avant ou après le 28 novembre 2006, forment un tout indissociable. Selon le plaignant, l’objection devrait donc être rejetée.

14 Pour trancher la question de cette objection préliminaire, je rappelle tout d’abord les dispositions de la Loi qui doivent être examinées :

       187.  Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

       2. (1) […] « fonctionnaire » Sauf à la partie 2, personne employée dans la fonction publique, à l’exclusion de toute personne : […]

       (2). La personne ne cesse d’être employée dans la fonction publique du seul fait qu’elle a cessé d’y travailler par suite d’une grève ou par suite d’un licenciement contraire à la présente loi ou à toute autre loi fédérale.

[…]

       190.(1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

a) l’employeur a contrevenu à l’article 56 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

b) l’employeur ou l’agent négociateur a contrevenu à l’article 106 (obligation de négocier de bonne foi);

c) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 107 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

d) l’employeur, l’agent négociateur ou l’administrateur général a contrevenu au paragraphe 110(3) (obligation de négocier de bonne foi);

e) l’employeur ou l’organisation syndicale a contrevenu aux articles 117 (obligation de mettre en application une convention) ou 157 (obligation de mettre en œuvre la décision arbitrale);

f) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 132 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

       (2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

[…]

15 L’article 63 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, cité par les défendeurs en appui de leur argument, se lit comme suit.

       63. Le fonctionnaire qui a l’intention de démissionner de la fonction publique en donne avis, par écrit, à l’administrateur général; il perd sa qualité de fonctionnaire à la date précisée par écrit par l’administrateur général au moment de l’acceptation indépendamment de la date de celle-ci.

16 Tous les éléments de preuve soumis par écrit et qui ont été déposés à l’audience convergent : le plaignant a démissionné de son poste à l’Agence spatiale canadienne le 24 novembre 2006. En vertu de l’article 63 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique et pour les fins de cette même loi, le plaignant a perdu sa qualité de fonctionnaire le 28 novembre 2006, date à laquelle l’administrateur général, en l’occurrence la présidente de l’Agence spatiale canadienne, a accepté sa démission. L’avocat des défendeurs en conclut que le 10 avril 2007, date à laquelle le plaignant a déposé sa plainte, ce dernier n’était donc plus un fonctionnaire au sens de l’article 187 de la Loi. Cet argument ne suffit pas pour donner droit à l’objection compte tenu qu’il me faut plutôt établir à partir de quel moment le plaignant aurait perdu son statut de fonctionnaire aux fins des recours que lui confère la Loi.

17 La preuve démontre que le plaignant s’est adressé à son ancien employeur le 22 janvier 2007 pour lui demander de changer sa décision eu égard au refus de reconsidérer sa démission. Le 12 mars 2007, la directrice des ressources humaines a répondu au plaignant pour l’aviser que l’employeur considérait son dossier « clos », en d’autres termes qu’il n’était pas question de reconsidérer sa démission. Par la suite, le 19 mars 2007, le plaignant a communiqué avec le syndicat pour demander quels étaient ses recours à la suite de la réponse du 12 mars 2007 de l’employeur. M. Hogan, le 19 mars 2007, puis Mme Baillairgé, le 21 mars 2007, ont répondu au plaignant qu’il n’existait aucun recours contre la décision de l’employeur.

18 À la suite de ces réponses de M. Hogan et de Mme Baillairgé, le plaignant a déposé le 10 avril 2007 la présente plainte. Il est donc clair que la plainte a été déposée à l’intérieur du délai de 90 jours prévu au paragraphe 190(2) de la Loi. Il reste à savoir si le plaignant était toujours un fonctionnaire au sens de l’article 187 de la Loi lorsqu’il a déposé sa plainte le 10 avril 2007.

19 Pour trancher cette question, il me faut examiner la portée du paragraphe 2(2) de la Loi en relation avec la preuve déposée et la situation particulière du plaignant. Cette disposition figure dans la Loi pour ne pas enlever le droit de recours d’un employé qui serait congédié, par exemple. Ainsi, on ne pourrait soulever une objection à un grief ou un renvoi à l’arbitrage du seul fait que le fonctionnaire congédié n’était plus un fonctionnaire au moment du dépôt du grief. Ce serait un non sens qu’il en soit autrement, le fonctionnaire ne pouvant contester le congédiement avant qu’il ne se produise, c’est-à-dire quand il était un fonctionnaire. En apparence, cette situation diffère de celle du plaignant parce que ce dernier a démissionné de son poste. Par contre, à l’audience, le plaignant a prétendu lors de son témoignage et dans des documents écrits, que sa démission constituait plutôt un licenciement déguisé même s’il n’en était nullement mention dans sa plainte.

20 Compte tenu de l’objet de l’audience des 17 et 18 mars 2008, je ne peux me prononcer dans le cadre de la présente affaire sur cette allégation du plaignant. En mars 2007, lorsque le plaignant s’est adressé à son syndicat pour s’enquérir des recours existants, il était hors délai pour déposer un grief relativement à sa démission du 28 novembre 2006. Néanmoins, le plaignant, ou le syndicat en son nom, aurait alors pu s’adresser au président de la Commission pour demander une prorogation de délai selon l’article 61 du Règlement. La question n’est pas ici de spéculer sur les chances de succès ou le mérite d’une telle requête, mais simplement de mentionner son existence. En mars 2007, le plaignant ne payait plus de cotisations à son syndicat, mais les obligations de ce dernier envers le plaignant n’étaient pas pour autant éteintes. Le plaignant avait encore le droit de demander l’aide du syndicat en mars 2007 et, à cet égard, le syndicat avait encore des obligations envers le plaignant.

21 Les faits relatifs à la présente affaire diffèrent substantiellement de certaines des décisions déposées par les défendeurs. Dans Palmer, la classification du plaignant faisait en sorte qu’il ne pouvait être syndiqué. Dans Downer, la plaignante occupait un poste de gestion et par le fait même, était exclue de façon statutaire de l’unité pour laquelle le syndicat était accrédité au moment où les incidents donnant lieu à sa plainte s’étaient produits. Le cas Powell est comparable à Downer car les tâches de la plaignante ne faisaient pas partie des types de tâches des membres couverts par l’unité de négociation.

22 Dans Murray, le tribunal a rejeté la plainte contre le syndicat car les plaignants ne faisaient plus partie de l’unité de négociation lorsque les événements à l’origine de la plainte étaient survenus. Par contre, le tribunal a pris soin d’établir une distinction entre l’affaire en question et le devoir de représentation équitable qui « continue de s’appliquer aux employés après leur congédiement ». Dans Haley, le tribunal rejette aussi la plainte sur la base que le plaignant ne faisait plus partie de l’unité de négociation. Cependant, il s’agit ici d’une plainte relative aux droits reconnus par une convention collective et non pas reliée à un congédiement ou un congédiement déguisé, comme ce pourrait être le cas dans la présente affaire.

23 Dans Bouchard, le tribunal ne se prononce pas sur l’objection préliminaire soulevée par le syndicat voulant que les plaignants, en l’espèce des retraités, n’étaient plus membres de l’unité de négociation lors du dépôt de leur plainte. Toutefois, le tribunal rappelle l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Tremblay c. Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 57, [2002] 2 R.C.S. 627, où la Cour écrit entre autres ce qui suit :

[…]

21 Cette obligation résulte d’un mandat légal de représentation qui vaut pour l’ensemble d’une unité de négociation, dont la composition varie nécessairement dans le temps. La nature continue de cette obligation à l’égard de l’ensemble d’unités susceptibles de se modifier continuellement ne permet pas de conclure que le départ d’un salarié fait disparaître toute conséquence de l’exécution de l’obligation de représentation à son endroit. Une situation juridique peut s’être constituée de telle façon que le syndicat devra continuer à agir et à représenter le salarié pour en régler les conséquences. […]

[…]

24 L’arrêt Tremblay diffère de la présente affaire, car ila trait à la négociation de la rétroactivité salariale pour une employée qui avait quitté son emploi au moment de la signature d’une nouvelle convention collective. Néanmoins, le principe demeure le même : l’obligation de représentation ne s’éteint pas nécessairement avec le départ d’un salarié et le bris de la relation d’emploi. Le plaignant, dans la présente affaire, prétend que sa démission est plutôt un congédiement déguisé. Il s’est adressé au syndicat en mars 2007 après le refus de la direction de reconsidérer sa démission. Dès lors, le syndicat avait une obligation d’examiner la situation que lui soumettait alors le plaignant et de le faire avec diligence, sans discrimination et de bonne foi, même si le plaignant n’était plus un employé. Je rejette donc l’objection préliminaire soulevée par les défendeurs.

Résumé de la preuve

25 En plus des déclarations assermentées et des documents transmis avant l’audience, les parties ont produit un grand nombre de documents lors de l’audience. Le plaignant a déposé 5 cahiers comprenant entre 3 et 16 documents et les défendeurs, un cahier comprenant 7 documents en plus de 8 autres documents déposés séparément. Le plaignant et les deux défendeurs, M. Hogan et Mme Baillairgé, ont témoigné. Je me limiterai à reprendre ici l’essence des éléments de preuve nécessaires à rendre une décision sur la plainte.

26 Le plaignant reproche à M. Hogan, délégué syndical de l’Institut, d’avoir omis de l’informer en mars 2007 de l’existence du droit de recours au renvoi à l’arbitrage. Le plaignant reproche aussi à Mme Baillairgé, agente des relations de travail à l’Institut, d’avoir pris parti pour l’employeur lorsqu’il lui a demandé quels étaient ses recours en mars 2007.

27 Rappelons tout d’abord que le plaignant a vécu à partir de juillet 2006 une situation conflictuelle très sérieuse avec son employeur, l’Agence spatiale canadienne. Il en est résulté que le plaignant a été en absence rémunérée du 19 juillet au 24 novembre 2006. Le 24 novembre 2006, lors d’une rencontre entre le plaignant et la haute direction de l’Agence, rencontre à laquelle a participé M. Hogan, il a été convenu des modalités de retour au travail du plaignant pour le 27 novembre 2006. Plutôt que de se présenter au travail ce jour-là, le plaignant a remis sa démission à la direction qui l’a acceptée à compter de la fermeture des bureaux le 28 novembre 2006. Puis, le 6 décembre 2006, le plaignant a demandé à la direction de l’Agence de reconsidérer sa démission et de le réintégrer dans son poste. Le 12 janvier 2007, la direction a répondu au plaignant qu’elle refusait sa demande de réintégration. Le 22 janvier 2007, le plaignant a de nouveau écrit à la direction au sujet de sa réintégration. Enfin, le 12 mars 2007, la direction lui a répondu qu’elle considérait le dossier clos, rappelant l’acceptation de la démission ayant pris effet le 28 novembre 2006.

28 Après cette dernière réponse de l’employeur, le plaignant s’est adressé au syndicat le 19 mars 2007 pour demander de l’aide quant aux recours qui s’offraient à lui. Insatisfait des réponses alors reçues des représentants syndicaux, il a déposé la présente plainte. Je limiterai donc l’analyse de la preuve aux documents et aux éléments de témoignage qui portent sur les actions des défendeurs en mars 2007, la question étant ici de savoir si les défendeurs se sont alors acquittés correctement de leur devoir de représentation. Certes, le plaignant a fait référence lors de l’audience à ses échanges avec les défendeurs et à la représentation reçue par ces derniers entre juillet 2006 et le début de mars 2007. Ce ne sont cependant pas sur ces éléments que porte la plainte, mais plutôt sur ceux qui suivent la réponse de la direction datée du 12 mars 2007.

29 Le 19 mars 2007, M. Hogan a répondu par courriel au plaignant qu’il n’avait pas de recours à la suite du refus du 12 mars 2007 de l’employeur de reconsidérer la démission de novembre 2006. Selon M. Hogan, le plaignant n’était plus un employé de l’Agence et rien ne pouvait être fait pour forcer la direction à le réintégrer dans ses anciennes fonctions. À la suite de la réception du courriel, le plaignant n’a pas communiqué de nouveau avec M. Hogan pour discuter de sa réponse du 19 mars 2007.

30 Le 21 mars 2007, Mme Baillairgé a répondu par courriel au plaignant en l’avisant que ses démarches de griefs ou de plaintes contre son ancien employeur seraient infructueuses. Après avoir rappelé au plaignant qu’il avait démissionné de son poste et qu’il ne s’agissait pas d’une mesure disciplinaire, Mme Baillairgé a écrit (voir l’annexe à la plainte) :

[…]

Par ailleurs, vous avez demandé à l’Agence de renconsidérer [sic] vore [sic] décision de démissionner. L’Agence vous a répondu qu’elle ne ferait cette reconsidération. Encore là, ce n’est pas un cas pour aller devant la CRTFP.

Si j’analyse la situation dans laquelle vous avez pris votre décision de démissionner, je ne vois pas de recours que vous pourriez utiliser pour forcer l’ASC à vous reprendre à son emploi.

Vous avez été déclaré apte à faire vos fonctions par votre médecin traitant, l’expert médical de l’IPFPC et le médecin de Santé Canada. L’employeur vous a proposé en présence de votre représentant syndical un plan de retour au travail. Vous deviez retourner au travail la semaine suivante. Vous ne vous êtes pas présenté au travail comme prévu étant donné que vous aviez pris la décision d’envoyer une lettre de démission.

[…]

31 Suite à la réception du courriel de Mme Baillairgé, le plaignant n’a pas communiqué de nouveau avec elle pour discuter de la réponse du 21 mars 2007. De plus, en aucun temps avant le début l’audience, soit le 17 mars 2008, le plaignant n’a discuté avec elle de la possibilité d’un congédiement déguisé, plus particulièrement qu’il s’était senti menacé lors de la rencontre du 24 novembre 2006 qui portait sur les modalités de sa réintégration au travail. Avant de répondre au plaignant, Mme Baillairgé a fait une recherche dans la jurisprudence et elle ne voyait aucun recours qui s’offrait à lui à partir des éléments qu’elle avait en sa possession. De surcroit, elle avait en main les certificats médicaux qui avait été préparés peu de temps avant le 24 novembre 2006 et qui confirmaient que le plaignant était sain d’esprit.

Résumé de l’argumentation

32 Le plaignant a présenté une argumentation par écrit lors de l’audience. Je reprends ici l’essence de ses arguments et je m’en tiendrai à ce qui a trait aux actions des défendeurs qui sont reprochées dans la plainte, soit celles qui résultent de la demande adressée le 19 mars 2007 par le plaignant aux défendeurs. En appui à ses arguments, le plaignant a déposé l’arrêt de la Cour suprême du Canada Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon, [1984] 1 R.C.S. 509, et en a rappelé les principes.

33 Le plaignant reproche à M. Hogan une « représentation faite de mauvaise foi » faisant référence à sa réponse du 19 mars 2007 où M. Hogan lui écrit qu’il n’y a pas de recours. Le plaignant reproche aussi à M. Hogan d’avoir agi de manière arbitraire et comme « libre arbitre » en signant le 19 avril 2007 une déclaration assermentée voulant que le plaignant avait démissionné librement de son poste le 27 novembre 2006.

34 Le plaignant reproche à Mme Baillairgé d’avoir agi de manière arbitraire lorsqu’elle lui a écrit le 21 mars 2007 en prenant parti pour l’employeur. Il lui reproche aussi d’avoir « usé de présomption » et d’avoir agi comme « libre arbitre » en signant le 1er mai 2007 une déclaration assermentée voulant que le plaignant avait librement et volontairement démissionné de son poste le 27 novembre 2006.

35 Enfin, le plaignant accuse les défendeurs d’un manque d’intégrité à la suite du dépôt, en preuve, par les défendeurs de deux opinions médicales produites par un médecin de Santé Canada et portant la mention « SANTÉ CANADA-PROTÉGÉ ». Compte tenu que ces opinions ont été fournies aux défendeurs par l’employeur, le plaignant allègue que ces derniers ont « joui de la faveur complice » de l’employeur.

36    Après des commentaires d’ordre général sur le manque de fondement de la plainte, les défendeurs soulignent que les allégations du plaignant ayant trait à la représentation syndicale offerte dans la période où il a démissionné, devraient être rejetées compte tenu du libellé de la plainte et du délai de 90 jours qui était expiré en avril 2007 lors du dépôt de la plainte.

37    Les défendeurs rejettent les allégations du plaignant. Lorsque le plaignant a communiqué avec les défendeurs le 19 mars 2007, il avait déjà démissionné depuis le 27 novembre 2006. M. Hogan a répondu au plaignant qu’il n’avait alors aucun recours. Mme Baillairgé a examiné son dossier, révisé la jurisprudence et est arrivée à la même conclusion que M. Hogan. En aucun temps entre le moment de sa démission et l’audience de la plainte le plaignant n’a informé le syndicat qu’il s’était senti menacé lors de sa démission de novembre 2006. Le syndicat ne pouvait donc explorer cette avenue pour voir si elle ouvrait des recours au plaignant. La règle est bien établie à savoir que le fonctionnaire qui recherche la représentation ou qui blâme le syndicat a une obligation de collaborer avec lui et de l’informer. Or, non seulement le syndicat ne savait pas que le plaignant s’était senti menacé, de surcroit, il n’avait aucune raison de s’en douter.

38    Les défendeurs ont déposé les décisions suivantes en appui de leur argumentation : Griffiths c. Métallurgistes unis d’Amérique, TCA-Canada, section locale 101,[2002] CCRI no 208; TY VO v. Canadian Auto Workers, Local 444 (2006), 129 CLRBR (2d) 276; Norris v. IWA-Canada, Local Union 1-424 (1994), 23 CLRBR (2d) 52; Lemi c. TCA-Canada, section locale 4351, [1999] CCRI no 24.

Motifs

39    Pour trancher la présente plainte, je tiendrai compte que des éléments de preuve qui ont trait à la plainte elle-même et qui portent sur les actions des défendeurs qui font suite à la demande d’aide formulée par le plaignant le 19 mars 2007. Certes, comme l’avance le plaignant, ce qui s’est passé entre juillet 2006 et mars 2007 est lié, en ce sens qu’il s’agit d’une même problématique qui a commencé par un conflit entre le plaignant et l’employeur, a été suivie d’une démission et qu’elle est devenue dans la présente affaire un conflit entre le plaignant et le syndicat. Par contre, là n’est pas la question. Si le plaignant croyait avoir été traité de façon injuste par son syndicat à l’été 2006 ou en novembre 2006, il lui fallait déposer une plainte dans les 90 jours. Il ne l’a pas fait et il a attendu au 10 avril 2007 pour se plaindre spécifiquement des actions des défendeurs de mars 2007. Ce ne sont donc que ces actions qui seront examinées.

40    Les faits relatifs à la plainte sont les suivants : le 19 mars 2007, le plaignant a demandé aux défendeurs quels étaient ses recours; les défendeurs lui ont répondu qu’il n’avait pas de recours. M. Hogan n’a fourni aucune explication dans sa réponse du 19 mars 2007. Mme Baillairgé a expliqué que, compte tenu de l’analyse qu’elle avait faite de la situation, elle était d’avis que les « démarches de griefs ou de plaintes » contre l’ancien employeur du plaignant seraient infructueuses. Le plaignant a conclu de ces réponses que les défendeurs ont agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire contrevenant ainsi à l’article 187 de la Loi.

41    L’article 187 de la Loi n’impose pas au syndicat une obligation de représentation dans tous les cas; il interdit plutôt au syndicat d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi. Le syndicat doit donc exercer son pouvoir discrétionnaire en respectant ces balises. Dans Gagnon, la Cour suprême du Canada précise à la page 510 ce qui suit :

[…]

[…] Cette discrétion toutefois doit être exercée de bonne foi, de façon objective et honnête, après une étude sérieuse du dossier, tout en tenant compte de l’importance du grief et des conséquences pour le salarié, d’une part, et des intérêts légitimes du syndicat d’autre part. En somme, la décision du syndicat ne doit pas être arbitraire, capricieuse, discriminatoire, ni abusive.

[…]

42    Le 19 mars 2007, lorsque le plaignant s’est adressé aux défendeurs, ces derniers ne savaient pas qu’il s’était senti menacé lors de la rencontre du 24 novembre 2006 qui portait sur sa réintégration et qui a précédé sa démission. Les défendeurs étaient convaincus que tout s’était bien déroulé. Selon eux, la démission du plaignant le 27 novembre 2006 était volontaire et sans contrainte. Les défendeurs ne pouvaient donc pas tenir compte de cette information dans la réponse qu’ils ont fournie au plaignant. Un syndicat ne peut agir sur une situation qu’il ne connaît pas puis accepter par la suite le blâme de son inaction de la part d’un de ses membres qui ne lui a pas fourni l’information. Ce point de vue est sensiblement le même que celui exprimé dans Griffiths au paragraphe 37.

43    Mme Baillairgé a pris soin de consulter la jurisprudence afin de voir s’il n’y avait pas de recours possible. Avec ce qu’elle avait en main, elle ne pouvait présumer que le plaignant s’était senti menacé lors de la rencontre du 24 novembre. Elle a par contre exploré la situation de l’état de santé mentale du plaignant au moment de sa démission. Elle avait en main trois avis médicaux préparés peu de temps avant et qui confirmaient que le plaignant était sain d’esprit. Mme Baillairgé a donc conclu de son analyse que le plaignant n’avait pas de recours.

44    Comme le prétend le plaignant, il est vrai que l’employeur a transmis deux avis médicaux le concernant au syndicat. Le plaignant était d’ailleurs déjà au courant en novembre 2006 qu’un des deux avis avait été transmis au syndicat, ce dernier étant en copie conforme de la lettre de couverture qui a été envoyée au plaignant le 6 novembre 2006. À partir de la preuve soumise, je ne peux dire si le plaignant savait en novembre 2006 que le deuxième avis médical avait été transmis au syndicat. Quoiqu’il en soit, on ne peut conclure de ces envois, comme le fait le plaignant, qu’il y a eu une sorte de collusion ou de complicité entre l’employeur et le syndicat à l’encontre du plaignant. Ces avis médicaux ne servaient d’ailleurs qu’à établir que le plaignant était apte à réintégrer son poste en novembre 2006. Sur ce, la transmission de ces documents au syndicat pourrait même être considérée comme souhaitable compte tenu de la responsabilité de représentation du syndicat à l’égard du plaignant.

45    Compte tenu de la preuve soumise, de l’article 187 de la Loi et de la jurisprudence sur le sujet, je conclus que le plaignant n’a pas satisfait aux obligations qui lui incombent. Les défendeurs n’ont pas agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi. Après une étude sérieuse du dossier et à la lumière des renseignements qu’ils avaient en leur possession, les défendeurs ont informé le plaignant qu’ils étaient d’avis qu’il n’avait pas de recours. Ils étaient en plein droit d’agir ainsi.

46    Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

47    Je rejette les deux objections préliminaires formulées par le plaignant.

48    Je rejette l’objection préliminaire formulée par les défendeurs.

49    Je rejette la plainte.

Le 24 avril 2008.

Renaud Paquet,
commissaire

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