Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant était mécontent de son évaluation de rendement et a porté plainte contre l’employeur - celui-ci a fait valoir que la plainte portait sur une allégation de harcèlement psychologique, et qu’elle ne relevait donc pas de la compétence de la Commission - la Commission a donné raison à l’employeur - elle a conclu que le plaignant aurait pu soit se prévaloir du recours prévu dans la politique sur la prévention du harcèlement soit présenter un grief - en l’espèce, la Commission n’avait pas compétence pour décider de la plainte. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2008-05-20
  • Dossier:  561-33-83
  • Référence:  2008 CRTFP 35

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

MARTIN CYR

plaignant

et

AGENCE PARCS CANADA

défenderesse

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

intervenante

Répertorié
Cyr c. Agence Parcs Canada

Affaire concernant une plainte visée à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, vice-présidente

Pour le plaignant:
Lui-même

Pour la défenderesse:
Neil McGraw, avocat

Pour l'intervenante : James Cameron, avocat

Affaire entendue à Sept-Iles (Québec),
le 21 août 2007.

Plainte devant la Commission

1 Le plaignant, Martin Cyr, occupe un poste saisonnier de durée indéterminée à l’Agence Parcs Canada (« l’employeur ») depuis 1983. Il relève de l’unité de gestion qui exploite le site touristique de la réserve du parc national de l’archipel de Mingan (Basse-Côte-Nord). Il est classifié GL-MAN-04, et fait partie d’une unité de négociation représentée par l’Alliance de la Fonction publique du Canada.

2 La présente affaire vise une plainte de pratique déloyale déposée en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi ») déposée le 11 octobre 2005. Le plaignant allègue que la mise au point des attentes de l’employeur au début de la saison 2005-2006 et l’évaluation de rendement qui a suivi constituent du harcèlement psychologique. Il adresse ses reproches à Daniel Landry, président de la section locale du syndicat, qui exerce des fonctions de gestion à son égard.

Résumé de la preuve

3 En raison de sa conduite au travail et la suite de certaines plaintes d’employés et du public, le plaignant s’est vu imposé au cours de l’été 2003 trois sanctions disciplinaires. Ces sanctions ont été contestées par voie de griefs. Les griefs ont fait l’objet d’un renvoi à l’arbitrage. Une des sanctions disciplinaires a été maintenue (voir Cyr c. Agence Parcs Canada,2005 CRTFP 15), et deux ont été réduites (voir Cyr c. Agence Parcs Canada, 2005 CRTFP 16, et Cyr c. Agence Parcs Canada, 2005 CRTFP 17).

4 Après la troisième sanction, le plaignant a démissionné comme président du syndicat et a été remplacé par Daniel Landry. Il a demandé à M. Landry et au délégué du syndicat, Yves Méthot, de l’aider dans ses démarches pour défendre ses intérêts concernant la troisième sanction.

5 Le plaignant a été insatisfait des démarches du syndicat et a porté plainte à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») alléguant un défaut de juste représentation en vertu de l’article 23 de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35. Cette plainte a été entendue par l’arbitre Tessier et rejetée (voir Cyr c. Alliance de la fonction publique du Canada, 2006 CRTFP 57).

6 Le 24 mai 2005, au début de la saison d’opération 2005-2006, l’employeur envoie au plaignant une lettre dans laquelle il fait référence aux événements qui ont mené aux sanctions disciplinaires, ainsi qu’aux attentes de travail pour la saison fondées sur ces événements.

7 Le 10 juin 2005, les représentants de l’employeur rencontrent le plaignant pour donner suite à la lettre du 24 mai 2005. Le plaignant soulève alors que l’employeur, à tort, revient sur ses comportements de 2003 alors que ces événements sont clos. Il conteste le contenu de la lettre du 24 mai 2005 comme étant un retour constant vers le passé plutôt qu’une appréciation de son travail actuel. Il dit que les tâches monotones qu’on lui assigne depuis les sanctions disciplinaires sont du harcèlement.

8 Le plaignant est de nouveau rencontré le 20 juillet 2005 pour une autre mise au point. Il soulève le fait que la période de deux ans fait en sorte que les sanctions disciplinaires n’existent plus dans son dossier. À la demande du plaignant, l’employeur se dit d’accord de modifier la lettre d’embauche pour la saison. Ses supérieurs lui disent que son rendement à ce moment est satisfaisant.

9 Le plaignant reçoit en octobre une évaluation de son rendement couvrant la période du 23 mai au 8 octobre 2005. Le 11 octobre 2005, il dépose la présente plainte de son évaluation. Bien que la cote de rendement soit « satisfaisant », l’évaluation du rendement contient des remarques que le plaignant juge comme étant négatives et injustifiées, tout particulièrement sur la quantité de travail accompli et son esprit de collaboration. L’employeur consent à réviser l’évaluation en question. Le 28 février 2006, le chef des services techniques lui envoie une note de service dans laquelle il fait état des révisions qui ont été apportées à l’évaluation de rendement contestée. L’employeur refuse cependant la demande du plaignant de ne plus relever de la supervision de M. Landry et le rassure que le suivi des attentes en regard des objectifs de rendement sera faite de plus près la prochaine saison afin de créer un bon climat de travail.

Résumé de l’argumentation

10 Le plaignant plaide que les sanctions disciplinaires qui lui ont été imposées n’existent plus puisqu’il n’y a pas eu de récidive depuis deux ans. Il soutient qu’en 2002, il y a eu une entente résultant de la médiation de plusieurs griefs antérieurs et qu’il a fait confiance à l’employeur pour effacer le passé et passer au présent. Il attribue ses problèmes de santé en 2005 au stress que lui a causé l’employeur eu égard aux reproches qu’on lui fait depuis plusieurs années. Il est déçu que l’employeur revienne sans cesse sur ses actions passées alors qu’il met des efforts sérieux à assurer un bon rendement.

11 L’employeur fait valoir que la plainte devant moi n’est pas une plainte de représailles au sens de la Loi, mais une plainte de soi-disant harcèlement psychologique à l’égard de laquelle la Commission n’a pas compétence. Une lettre au début de la saison d’opération et une évaluation de rendement ne font pas la preuve d’une pratique déloyale. Le processus de plainte devant la Commission n’a pas pour but de revoir si une évaluation de rendement était juste ou non. Les documents déposés remontent à 1999 et ne peuvent servir à soutenir cette plainte. La partie de la plainte qui traite de la lettre envoyée au début de la saison d’opération est hors délai puisqu’elle a été déposée plus de 90 jours après que le plaignant ait eu connaissance des faits. L’employeur soumet que le fait qu’il a modifié l’évaluation de rendement rend cette partie de la plainte sans objet. Par conséquent, la plainte du plaignant ne satisfait pas aux critères établis par l’alinéa 190 (1)g) de la Loi. Au soutien de sa position, l’employeur me réfère à Duclos c. Bujold, 2006 CRTFP 98.

12 M. Landry, par l’entremise de son procureur, plaide qu’il n’est aucunement impliqué dans la lettre d’embauche pour la saison et qu’il n’y a pas de preuve que la cote de rendement donnée au plaignant a été influencée par le différend qu’il a eu avec lui devant la Commission. D’ailleurs, la cote « satisfaisant » n’est pas la partie contestée de l’évaluation, mais bien celle ayant trait à la justification de la cote. De toute façon, la justification a été modifiée subséquemment à la satisfaction du plaignant. Aucun motif ne justifie une plainte de pratique déloyale contre M. Landry.

Motifs

13 Lors de l’audience, le plaignant a eu l’occasion de présenter tout son dossier et d’exposer ses allégations. Bien que le plaignant n’ait pas répondu à l’objection de l’employeur quant à la recevabilité de sa plainte, il a présenté des explications et des documents qui me permettent de conclure que la plainte à sa face même n’est pas de la compétence de la Commission.

14 La mise au point d’objectifs de travail et l’évaluation du rendement sont du ressort exclusif de l’employeur. Un fonctionnaire qui est insatisfait peut utiliser la procédure de grief pour se plaindre, mais ce grief n’en est pas un qui peut faire l’objet d’un renvoi à l’arbitrage en vertu du paragraphe 209(1) de la Loi. Le plaignant ne peut contourner cet empêchement en invoquant les dispositions ayant trait à une plainte de pratique déloyale.

15 Dans la mesure où le plaignant allègue du harcèlement au travail, il peut avoir recours au processus prévu dans la politique sur la prévention du harcèlement de l’employeur ou il peut déposer un grief en vertu de sa convention collective. Il n’a entrepris ni l’une ni l’autre de ces démarches et la Commission n’a pas la compétence pour y remédier.

16 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

17 La plainte est rejetée.

Le 20 mai 2008.

Michele A. Pineau,
vice-présidente

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