Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant, un employé exclu, alléguait que l’employeur n’avait pas mis en œuvre une décision arbitrale, contrairement à ce que prévoit l’article157 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique - l’employeur s’est opposé à la plainte, au motif que la Commission n’avait pas la compétence voulue pour statuer sur cette question, étant donné que la décision arbitrale visait uniquement les employés qui faisaient partie de l’unité de négociation - la Commission a accueilli l’objection en statuant que le plaignant ne pouvait pas se prévaloir de l’article157 puisqu’il était un employé exclu - la Commission a rejeté la plainte. Objection accueillie. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

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  • Date:  2008-08-06
  • Dossier:  561-02-124
  • Référence:  2008 CRTFP 63

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

FERMIN GARCIA MARIN

plaignant

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

défendeur

Répertorié
Garcia Marin c. Conseil du Trésor (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, commissaire

Pour le plaignant:
lui même

Pour le défendeur:
Sean F. Kelly, avocat

Affaire entendue à Ottawa (Ontario),
le 15 juillet 2008.
(Traduction de la CRTFP)

I. Plainte devant la Commission

1 Le 22 septembre 2006, Fermin Garcia Marin (le « plaignant ») a déposé une plainte en vertu de l’alinéa 190(1)e) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi ») contre le Conseil du Trésor (le « défendeur »).

2 Le plaignant occupe un poste exclu de PG-06 au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le « MTPSG »). Le texte de la plainte déposée auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») est reproduit ci-après :

[Traduction]

[…]

Le Conseil du Trésor a contrevenu aux dispositions de l’article 157 de la Loi en ne mettant pas en œuvre les modalités de la décision arbitrale d’avril 2005 s’appliquant au niveau PG-06 conformément à l’interprétation de l’employeur selon laquelle un échelon équivaut à deux augmentations dans l’échelle de rémunération des PG-06, tel qu’il est indiqué dans le communiqué au personnel no 92-07 en date du 27 janvier 1992 (voir la rubrique Objet à la page 1 et la rubrique Calculs à la page 3).

Cela à un effet paradoxal, en ce que l’augmentation accordée aux PG-06 équivaut environ à la moitié de celle consentie aux PG-05, ce qui réduit sensiblement l’écart qui existe entre les deux niveaux, contrairement à ce que prévoit l’article 67 de la LRTFP.

[…]

3 Le plaignant demande à la Commission de rendre une ordonnance rétroactive au 22 juin 2003 afin de corriger la situation décrite dans sa plainte.

4 Le défendeur s’oppose à la plainte au motif que le plaignant occupe un poste exclu et qu’il n’est pas visé par la décision arbitrale à laquelle il fait référence dans sa plainte. Il avance également que la plainte est hors délai du fait qu’elle renvoie à une question qui remonte à avril 2005.

II. Résumé de la preuve relative aux objections

5 Le défendeur a déposé 11 documents et le plaignant en a déposé 10. Le défendeur a appelé Normand Masse comme témoin, tandis que le plaignant a témoigné pour son compte.

6 M. Masse occupe le poste de directeur général, Gestion des services et des approvisionnements spéciaux, au MTPSG. Lorsque les événements ayant donné lieu à la plainte sont survenus en 2005, il dirigeait une centaine d’employés avec l’aide de cinq gestionnaires, dont le plaignant, qui était alors chef de la division de l’achat des vêtements et textiles.

7 Le plaignant occupait un poste de direction et de confiance et dirigeait de 20 à 25 personnes. Son poste était exclu de l’unité de négociation depuis 1996 lorsqu’il a déposé sa plainte. Le plaignant a admis à l’audience qu’il occupait un poste exclu à la date de présentation de sa plainte.

8 L’échelle de rémunération applicable au plaignant en tant qu’employé exclu est contenue dans le document du Conseil du Trésor intitulé Taux de traitement pour certains employés exclus et non représentés.

9 Le 11 avril 2005, la Commission a rendu une décision arbitrale relativement au groupe Vérification, commerce et achat (AV). Le plaignant a jugé que cette décision réduisait considérablement l’écart salarial qui existait entre les PG-06 et les PG-05. Cela le préoccupait beaucoup et il s’en est ouvert à diverses reprises à M. Masse. Il a également fait part de ses préoccupations à ses collègues PG-06, à la haute direction du MTPSG, au Conseil du Trésor, ainsi qu’à l’agent négociateur du groupe AV. La preuve indique que ces démarches ont été effectuées entre avril 2005 et mai 2006.

10 Aucun des membres des organismes avec lesquels le plaignant a communiqué n’a voulu lui prêter son concours pour corriger le problème. La dernière réponse du Conseil du Trésor, qui portait la signature d’Hélène Laurendeau, secrétaire adjointe, Relations de travail et Opérations de rémunération, lui est parvenue le 26 juin 2006. Constatant qu’il était incapable de résoudre le problème par la filière interne, le plaignant a déposé la plainte en instance auprès de la Commission.

III. Résumé de l’argumentation relative aux objections

11 Le défendeur avance que le plaignant occupe un poste exclu qui est régi par les Conditions d’emploi (Politique) et le Règlement régissant les conditions d’emploi dans la fonction publique et non pas par la convention collective ou la décision arbitrale auxquelles il fait référence dans la plainte.

12 Le défendeur fait valoir que le plaignant n’est pas partie à la décision arbitrale ni à la convention collective. Qui plus est, ce n’est pas un fonctionnaire au sens de l’article 2 de la Loi. Il s’ensuit que la Commission ne possède pas la compétence nécessaire pour instruire la plainte.

13 Le défendeur avance également que la plainte n’a pas été déposée dans le délai de 90 jours prescrit par le paragraphe 190(2) de la Loi. La preuve montre que le plaignant était au courant de l’existence de la décision arbitrale à la fin d’avril 2005, mais que ce n’est qu’en septembre 2006 qu’il a déposé sa plainte.

14 Pour étayer ses arguments, l’avocat du défendeur m’a renvoyé à Richmond c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2008 CRTFP 22; Castonguay c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 78 et à Dumont et al. c. ministère du Développement social, 2008 CRTFP 15.

15 Le plaignant défend pour sa part la position que le libellé du paragraphe 190(1) de la Loi est limpide. Il soutient que n’importe qui peut déposer une plainte et que ce recours n’est pas réservé aux fonctionnaires tels qu’ils sont définis à l’article 2 de la Loi. Il ajoute à cela que les articles 13 et 14 de la Loi ne disent pas que les services d’arbitrage de la Commission sont limités aux fonctionnaires tels qu’ils sont définis à l’article 2.

16 Le plaignant avance que les modifications qui sont apportées à une décision arbitrale ou à une convention collective s’appliquent aux employés exclus puisqu’elles ont une incidence directe sur les Conditions d’emploi (Politique) établies par le Conseil du Trésor.

17 Sur la question du respect du délai de présentation, le plaignant précise qu’il a commencé par épuiser tous les recours internes qui s’offraient à lui pour corriger le problème avant de se tourner vers la Commission. Il a déposé sa plainte auprès de la Commission dans les 90 jours suivant la date à laquelle il a reçu la dernière réponse du Conseil du Trésor.

IV. Motifs

18 Je commencerai par examiner la première objection du défendeur, laquelle renvoie aux dispositions suivantes de la Loi :

[…]

2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

[…]

« fonctionnaire » Sauf à la partie 2, personne employée dans la fonction publique, à l’exclusion de toute personne :

[…]

(i) occupant un poste de direction ou de confiance;

[…]

  190. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

[…]

e) l’employeur ou l’organisation syndicale a contrevenu aux articles 117 (obligation de mettre en application une convention) ou 157 (obligation de mettre en oeuvre la décision arbitrale);

[…]

157. Sous réserve de l’affectation, par le Parlement ou sous son autorité, des crédits dont l’employeur peut avoir besoin à cette fin, les parties commencent à appliquer les conditions d’emploi sur lesquelles statue la décision arbitrale dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date à compter de laquelle la décision arbitrale lie les parties ou dans le délai plus long dont celles-ci peuvent convenir ou que la Commission peut, sur demande de l’une d’elles, accorder.

[…]

19 La preuve dont je dispose établit que le plaignant occupait un poste de direction et de confiance au moment où il a déposé sa plainte. Il n’était pas un fonctionnaire au sens de l’article 2 de la Loi. Il n’était pas membre d’une unité de négociation et n’était pas non plus représenté par un agent négociateur.

20 Le paragraphe 190(1) de la Loi ne dit pas que le recours prévu par cette disposition est limité aux fonctionnaires tels qu’ils sont définis dans la Loi. Il n’en demeure pas moins que la plainte a été déposée en vertu de l’alinéa 190(1)e), qui fait référence aux articles 117 et 157 de la Loi. Or, le plaignant n’est pas partie à la décision arbitrale ni à la convention collective. Il n’est pas membre de l’unité de négociation pour le compte de laquelle l’agent négociateur a présenté une demande d’arbitrage qui a abouti à la décision arbitrale du 11 avril 2005.

21 Il est possible que la décision arbitrale ait une incidence sur la politique du Conseil du Trésor régissant la rémunération des employés exclus, comme le soutient le plaignant. Il reste que, juridiquement parlant, rien n’oblige le Conseil du Trésor à modifier la politique pour tenir compte des modalités de la décision arbitrale. L’article 157 contraint l’employeur à mettre en œuvre la décision arbitrale, mais il n’en étend pas l’application aux employés qui ne font pas partie de l’unité de négociation.

22 Même si le plaignant a raison d’affirmer que les services de la Commission ne sont pas réservés aux fonctionnaires tels qu’ils sont définis à l’article 2 de la Loi, le fait est qu’il ne peut pas exercer un recours en vertu de l’alinéa 190(1)e) de la Loi.

23 Étant donné que j’accueille la première objection du défendeur, il ne m’est pas nécessaire de statuer sur la question du respect du délai de présentation de la plainte.

24 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

25 L’objection du défendeur ayant trait à la compétence de la Commission est accueillie.

26 La plainte est rejetée.

Le 6 août 2008.

Traduction de la CRTFP

Renaud Paquet,
commissaire

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