Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a soutenu que la méthode d’évaluation n’était pas transparente ni juste parce qu’elle contenait des erreurs. Elle a ajouté que 13 des 19 questions ne comportaient aucune échelle de notation pour les éléments de réponse sur la grille de correction. L’intimé a répondu qu’il n’y avait aucune preuve démontrant que la plaignante avait été traitée différemment des autres candidats ou que le barème de correction était injuste. L’intimé a fait valoir que le barème de correction et les erreurs présumées ou même admises concernant la grille de correction ou le document de travail n’avaient aucune incidence sur le résultat final; que la plaignante n’a produit aucune preuve démontrant que le barème de correction avait été trafiqué ou conçu d’une manière qui avantage ou désavantage un candidat. La Commission de la fonction publique a fait valoir que même si le barème ne figurait pas sur la grille de correction, cette erreur n’a pas eu d’impact fondamental sur les résultats de la plaignante. La plaignante a obtenu la plus haute note à l’examen écrit. Décision : Le Tribunal a conclu qu’en vertu de la LEFP, les gestionnaires délégataires disposaient d’une marge de manœuvre considérable en ce qui concerne le choix des méthodes d’évaluation et qu’il n’y avait aucune preuve en l’espèce démontrant que les méthodes élaborées étaient déraisonnables ou que leur application avait entraîné un résultat injuste. Le Tribunal a aussi statué que le comité d’évaluation s’était trompé en n’indiquant pas les points accordés par élément de bonne réponse et en ne corrigeant pas l’erreur; il a toutefois jugé qu’il s’agissait de simples erreurs ou omissions qui ne constituaient pas un abus de pouvoir. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

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Dossier:
2006-0169
Rendue à:
Ottawa, le 28 janvier 2008

DENISE TRACHY
Plaignante
ET
LE SOUS-MINISTRE DES TRANSPORTS, DE L'INFRASTRUCTURE ET DES COLLECTIVITÉS
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Plainte d'abus de pouvoir aux termes de l'alinéa 77(1)a) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique
Décision:
La plainte est rejetée
Décision rendue par:
Francine Cabana, membre
Langue de la décision:
Français
Répertoriée:
Trachy c. Sous-ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités et al.
Référence neutre:
2008 TDFP 0002

Motifs de la décision

Introduction

1 Le 13 octobre 2006, Mme Denise Trachy a présenté une plainte auprès du Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP).  La plaignante a posé sa candidature à un poste de surveillant de licences du personnel (numéro de processus 05-MOT-CC-DOR-6144) (PM-04) au ministère des Transports.

2 La plaignante affirme que l’intimé, le sous-ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités, a abusé de son pouvoir de trois façons.  Premièrement, en se soustrayant à ses obligations législatives, notamment de l’article 36 de la LEFP, et des Lignes directrices de la Commission de la fonction publique en matière de nomination (ci‑après Lignes directrices de la CFP) puisque l’intimé n’a pas établi ni utilisé une méthode d’évaluation juste et transparente. Le pointage attribué aux candidats ne démontre pas que l’évaluation a été impartiale, juste et transparente.  Deuxièmement, la plaignante affirme que l’intimé a fait preuve de favoritisme en faveur de la personne nommée évitant ainsi l’exercice de reclassification de son poste.  Finalement, elle affirme que le fait qu’elle ait été en absence prolongée à cause d’une condition médicale aurait été pris en considération par le comité d’évaluation.

3 En début d’audience, la plaignante, par l’entremise de son représentant, a informé le Tribunal qu’une seule question demeurait en litige, soit que l’intimé se serait soustrait à ses obligations législatives, notamment des dispositions de l’article 36 de la LEFP, ainsi que des dispositions de l’article 16 qui traite desLignes directrices de la CFP.

Éléments de preuve pertinents

4 La plaignante est employée au ministère des Transports depuis 20 ans à la Direction de l’aviation générale. Elle est titulaire d’un poste d’agente de délivrance de licences aux groupe et niveau PM-02 depuis 2000.

5 La plaignante a occupé un poste des groupe et niveau PM-04 de façon intérimaire à quelques reprises. Lors de ces périodes intérimaires, elle a participé à l’étude et la mise en place des nouveaux centres du ministère dans la région du Québec. Principalement, elle était responsable de monter les centres ainsi que de former les employés sur place.

6 Suite à la publication de l’avis de nomination, la plaignante a rencontré M. Jean Desjardins, gestionnaire responsable du poste, à deux reprises.

7 Lors de ces deux rencontres avec M. Desjardins, la plaignante n’a pas obtenu d’explications satisfaisantes à ses questions relatives à la grille de correction de l’examen écrit et des points à être accordés aux éléments de bonnes réponses fournis. La plaignante affirme que l’intimé aurait cherché à cacher les informations pertinentes.

8 La plaignante explique que sur la grille de correction plusieurs questions n’indiquent pas le nombre de points qui seront attribués pour chacun des éléments de bonnes réponses, ni le maximum de points par question, plus précisément, pour les questions 3, 6, 8, 9 et 11 à 19 inclusivement.

9 La plaignante s’est sentie lésée puisque les candidats n’ont pas été évalués de façon juste et transparente.  Elle croit que les omissions et les erreurs commises par le comité d’évaluation démontrent un manque de transparence et représentent de l’abus de pouvoir.

10 M. Desjardins a également témoigné. Depuis janvier 2004, il est le gestionnaire régional, Direction de l’aviation générale du Québec, et il est employé dans la fonction publique depuis 19 ans. Ses responsabilités comprennent entre autres plusieurs unités dont la formation, licences du personnel, l’immatriculation et aussi les événements spéciaux.

11 Suite à l’annonce du départ de M. Normand Joly, M. Desjardins a décidé de mener un processus de dotation interne annoncé afin de doter le poste de surveillant de licences du personnel, des groupe et niveau PM-04. Il précise que l’énoncé des critères de mérite a été élaboré avec la participation de M. Joly et de M. Michel Lessard, un représentant des ressources humaines. Les méthodes d’évaluation ont été établies avec la participation de MM. Desjardins et Lessard.

12 M. Desjardins a affirmé avoir attribué les points de façon juste et équitable pour tous les candidats. Les points ont été accordés au prorata des éléments de bonne réponse fournis. M. Desjardins a fourni un exemple en utilisant la question 5 pour expliquer la manière d’accorder les points. Le maximum de points était de 20 points pour quatre éléments de bonne réponse. La plaignante a fourni trois éléments de bonne réponse et a donc obtenu la note de 15 sur 20. 

13 M. Desjardins a expliqué qu’il a commis une erreur en n’indiquant pas sur  la grille de correction le maximum de points à accorder pour plusieurs réponses.  Il a aussi expliqué qu’avant la correction de l’examen écrit, il a préparé un document de travail avec le pointage maximum à être accordé pour chacune des questions, ainsi que pour faciliter la transposition des résultats obtenus par les candidats à chacune des questions. Ce document représente simplement la transcription des points obtenus par les candidats aux questions de l’examen écrit ainsi que de l’entrevue.

14 M. Desjardins a reconnu ne pas avoir corrigé cette erreur puisque celle-ci  n’avait aucun impact sur le résultat final du processus. Il a confirmé à nouveau qu’il a coté les réponses fournies par les candidats au prorata des points maximums pour chacune des questions et de la même manière pour chacun des candidats.  M. Desjardins a de plus expliqué qu’il n’a pas jugé bon d’indiquer sur la grille de correction les informations contenues sur le document de travail mais qu’il n’avait aucune mauvaise intention.

15 M. Desjardins a conclu en expliquant qu’il a effectué la correction ainsi que la cotation des réponses fournies de façon honnête et juste du début à la fin et que lorsqu’une réponse était bonne en partie, il a accordé les points en conséquence.

16 Lorsque questionné sur le fait qu’il n’a pas corrigé les erreurs sur la grille de correction tel qu’il est prévu dans les Lignes directrices de la CFP, M. Desjardins a indiqué qu’il a effectivement corrigé des erreurs puisque deux candidats avaient été éliminés et que, suite à une discussion informelle, ces personnes ont été réintégrées dans le processus de nomination.

17 Finalement, M. Desjardins a indiqué avoir coté les réponses fournies en fonction de la grille de correction pour ce qui est des éléments des réponses attendues et que tous les candidats ont été cotés de la même façon. Il précise aussi que le fait que les points accordés par élément de bonne réponse n’ont pas été indiqués sur la grille de correction n’est qu’un simple oubli et qu’il ne pense pas avoir commis d’erreur sur l’attribution des points aux candidats.

Questions en litige

18 Le Tribunal doit répondre aux questions suivantes :

  1. L’intimé a-t-il fait preuve d’abus de pouvoir dans le choix et l’application  des méthodes  d’évaluation ?
  2. L’intimé a-t-il fait preuve d’abus de pouvoir en n’indiquant pas les points à être accordés par élément de bonne réponse sur la grille de correction et en ne corrigeant pas les erreurs?

Argumentation

A) Argumentation de la plaignante

19 La plaignante soutient qu’en vertu de l’article 36, l’intimé peut choisir les méthodes d’évaluation des candidats, mais que ces méthodes doivent être justes, équitables et transparentes.  La plaignante soutient aussi que la grille de correction n’est pas transparente, ni claire, et ne peut constituer un fondement solide pour effectuer des nominations selon le principe du mérite.

20 La plaignante affirme que les Lignes directrices de la CFP indiquent clairement à la page 20 sous la rubrique « Objectif des lignes directrices », deuxième paragraphe, que si des erreurs sont identifiées, l’intimé doit les corriger.  Elle soutient que l’intimé a pris connaissance des erreurs dans la grille de correction et des divergences entre celle-ci et le document de travail, mais a choisi de ne pas procéder aux corrections. La plaignante argumente qu’il importe peu que les erreurs aient été commises volontairement ou non, cela n’excuse aucunement la faute. 

21 La plaignante argumente que 13 des 19 questions ne comportent aucune échelle de pointage pour les éléments de réponse sur la grille de correction.  Elle soutient aussi que le document de travail n’a aucune valeur face à l’évaluation des candidats. La plaignante avance que la méthode d’évaluation utilisée est incomplète et démontre des erreurs graves qui ne permettent pas d’établir de manière transparente et juste quel était le pointage accordé aux éléments de réponse aux questions 3, 6, 8, 9 et 11 à 19.

22 Selon la plaignante, il est clair que l’intimé a commis des erreurs et en conséquence, n’a pas respecté la LEFP, plus précisément les articles 16 et 36.

23 la plaignante fait valoir que, selon elle, la méthode utilisée est viciée et son application ne reflète pas l’intention de la LEFP, ni les dispositions des Lignes directrices de la CFP. Elle soutient que l’intention du législateur est de favoriser la confiance dans les décisions relatives aux nominations et dans l’intégrité du système de nominations tel que décrit à la page 4 des Lignes directrices de la CFP.

24 En conclusion, la plaignante fait valoir que les faits démontrent clairement que l’intimé a abusé de son pouvoir en se soustrayant à ses obligations législatives et n’a pas établi une méthode juste et transparente.

25 La plaignante demande au Tribunal de faire droit à sa plainte, de révoquer la nomination et d’annuler l’ensemble du processus de nomination.

B) Argumentation de l’intimé

26 L’intimé soutient que le nœud du litige porte sur les motifs pour lesquels la plaignante n’a pas fait l’objet d’une nomination ou d’une proposition de nomination, en fonction des méthodes choisies, ainsi que les motifs pour lesquels l’intimé a préféré la personne nommée. 

27 L’intimé soutient que la preuve démontre que la préférence accordée à la personne nommée n’est aucunement fondée sur la mauvaise foi, sur le favoritisme personnel ou sur un autre motif inclus dans l’abus de pouvoir.

28 L’intimé soutient que la jurisprudence du Tribunal est constante et établit clairement que le fardeau de prouver l’abus de pouvoir repose sur la plaignante.  L’intimé fait également valoir que d’utiliser un rang ou un pointage n’a pas pour effet de renverser le fardeau de preuve qui incombe à la plaignante. L’intimé n’a pas à convaincre le Tribunal qu’il n’a pas agi de mauvaise foi, abusé de son pouvoir ou fait preuve de favoritisme.

29 L’intimé soutient que la plaignante n’a produit aucune preuve démontrant qu’elle a été traitée différemment des autres candidats.

30 L’intimé fait valoir que les barèmes tels qu’établis par M. Desjardins, les erreurs alléguées et même admises concernant la grille de correction ou le document de travail, n’ont pas pour effet d’affecter le résultat final. 

31 L’intimé argumente que la plaignante n’a produit aucune preuve démontrant que ce barème ait été trafiqué ou conçu d’une manière qui avantage ou désavantage un candidat.

32 L’intimé fait valoir que la plaignante demande au Tribunal de révoquer la nomination de la personne nommée sans avoir prouvé que la nomination n’est pas fondée sur le mérite. La plaignante n’a pas prouvé d’acte fautif, de mauvaise foi, de favoritisme personnel qui aurait pu affecter l’évaluation.

33 En conclusion, l’intimé avance qu’il n’y a aucune preuve d’abus de pouvoir démontrant que les erreurs ont affecté les résultats et auraient influencé la décision.

C) Argumentation de la Commission de la fonction publique

34 La Commission de la fonction publique (la CFP) soutient que les erreurs commises pourraient être qualifiées de cléricales et non pas des erreurs pouvant être interprétées comme des signes de mauvaise foi, de favoritisme personnel ou d’abus de pouvoir.

35 La CFP fait valoir que des insinuations ne constituent pas la preuve d’un abus de pouvoir.

36 La CFP avance que même si les cotes ne se trouvent pas sur la grille de correction, cette erreur n’a pas fondamentalement eu d’impact sur le résultat de la plaignante.  De plus, la CFP note que malgré cette erreur, la plaignante a obtenu la plus haute cote à l’examen écrit.

37 La CFP argumente que les Lignes directrices de la CFP traitent du processus de nomination comme tel et que l’erreur doit être en rapport avec le processus lui-même. 

38 La CFP soutient qu’il doit exister un lien concret entre l’erreur et l’abus de pouvoir allégué.  La CFP fait valoir que la preuve démontre une erreur de fait ne viciant pas la nomination. Aucune preuve n’a été produite qui pourrait démontrer que l’intimé a abusé de son pouvoir discrétionnaire, qu’il y aurait eu négligence grossière ou que les points ont été accordés de façon arbitraire.

39 Finalement, la CFP affirme que la plaignante ne s’est pas acquittée de son fardeau de démontrer que les erreurs sont de nature à constituer de l’abus de pouvoir. 

Analyse

Question I: L’intimé a-t-il fait preuve d’abus de pouvoir dans le choix et l’application des méthodes d’évaluation ?

40 La plainte a été présentée en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la LEFP qui se lit comme suit :

77. (1) Lorsque la Commission a fait une proposition de nomination ou une nomination dans le cadre d’un processus de nomination interne, la personne qui est dans la zone de recours visée au paragraphe (2) peut, selon les modalités et dans le délai fixés par règlement du Tribunal, présenter à celui-ci une plainte selon laquelle elle n’a pas été nommée ou fait l’objet d’une proposition de nomination pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a) abus de pouvoir de la part de la Commission ou de l’administrateur général dans l’exercice de leurs attributions respectives au titre du paragraphe 30(2);

(…)

41 L’article 30(2) de la LEFP se lit comme suit :

30. (1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique faites par la Commission sont fondées sur le mérite et sont indépendantes de toute influence politique.

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;

b) la Commission prend en compte :

  1. toute qualification supplémentaire que l’administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l’administration, pour le présent ou l’avenir,
  2. toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l’administration précisée par l’administrateur général,
  3. tout besoin actuel ou futur de l’administration précisé par l’administrateur général.

(…)

42 La plaignante allègue que l’intimé s’est soustrait à ses obligations législatives, notamment à l’article 36 de la LEFP et des Lignes directrices de la CFP.  L’article 36 est énoncé comme suit :

36. La Commission peut avoir recours à toute méthode d’évaluation — notamment prise en compte des réalisations et du rendement antérieur, examens ou entrevues — qu’elle estime indiquée pour décider si une personne possède les qualifications visées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i).

43 Le Tribunal a traité des méthodes d’évaluation dans la décision Jolin c. Administrateur général de Service Canada et al., [2007] TDFP 0011, plus précisément au paragraphe 77 qui se lit comme suit :

[77] L’article 36 de la LEFP prévoit que l’administrateur général peut avoir recours à toute méthode d’évaluation indiquée dans un processus de nomination interne. Pour que le Tribunal considère qu’il y ait abus de pouvoir dans le choix des méthodes d’évaluation, la plaignante doit démontrer que le résultat est inéquitable et que les méthodes d’évaluation sont déraisonnables et ne peuvent évaluer les qualifications prévues à l’énoncé des critères de mérite, qui n’ont aucun lien avec ceux-ci ou qu’elles sont discriminatoires.

44 Dans le cas qui nous occupe, la plaignante n’a fourni aucune preuve au Tribunal pouvant démontrer que le choix et l’application de la méthode d’évaluation ont eu pour effet de produire un résultat inéquitable ou que celle-ci  était déraisonnable. Au contraire, M. Desjardins a témoigné qu’il a attribué les points de façon juste et équitable pour tous les candidats. Il a aussi expliqué qu’avant la correction de l’examen écrit, il a préparé un document de travail avec le pointage maximum à être accordé pour chacune des questionsafin de faciliter la transposition des résultats obtenus par les candidats à chacune des questions. Ces faits non contestés et la crédibilité du témoin convainquent le Tribunal que l’intimé n’a pas  traité la plaignante de façon déraisonnable, inéquitable ou abusive.

45 Le Tribunal juge que l’intimé n’a aucunement abusé de son pouvoir dans le choix et l’application des méthodes d’évaluation.

Question II: L’intimé a-t-il fait preuve d’abus de pouvoir en n’indiquant pas les points à être accordés par élément de bonne réponse sur la grille de correction et en ne corrigeant pas les erreurs?

46 Dans la décision Tibbs c. le Sous-ministre de la Défense nationale et al., [2006] TDFP 0008,  paragraphe 65, le Tribunal a indiqué qu’il faut plus qu’une simple erreur ou omission pour qu’il y ait abus de pouvoir :

[65] Il ressort clairement du préambule et de la LEFP dans son ensemble que l’intention du législateur était qu’il fallait plus que de simples erreurs ou omissions pour constituer un abus de pouvoir. Par exemple, en vertu de l’article 67 de la LEFP, les motifs de révocation d’une nomination par un administrateur général après une enquête sont l’erreur, l’omission et une conduite irrégulière. Ces motifs de révocation sont clairement moins élevés que ceux requis en vue de constater un abus de pouvoir. Le choix de différents mots par le législateur est important : Sullivan et Driedger, supra, à la p. 164. L’abus de pouvoir constitue plus qu’une simple erreur ou omission.

47De plus, dans la décision Portree c. Administrateur général de Service Canada et al., [2006] TDFP 0014, le Tribunal a précisé que les erreurs doivent être de la nature d’un acte répréhensif grave ou d’une faute majeure pour constituer un abus de pouvoir :

[47] L’allégation d’abus de pouvoir est une question très grave et ne doit pas être prise à la légère. En résumé, pour obtenir gain de cause devant le Tribunal, une plainte d’abus de pouvoir doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il y a un acte répréhensif grave ou une faute majeure dans le processus, qui constitue plus qu’une simple erreur, omission ou conduite irrégulière justifiant l’intervention du Tribunal.

(Nos italiques)

48 La plaignante a démontré que l’intimé a commis des erreurs et qu’il a choisi de ne pas les corriger. Toutefois, ce ne sont que de simples erreurs ou omissions qui ne relèvent pas de l’acte répréhensif ou d’une faute majeure. La plaignante n’a pas démontré que ces erreurs ont eu un impact sur le résultat final. Aucune preuve n’a été produite afin de démontrer que si les erreurs avaient été corrigées le résultat en aurait été affecté ou aurait été fondamentalement différent. Malgré tout, la plaignante a obtenu la plus haute cote à l’examen écrit ce qui pourrait difficilement mener à la conclusion que les erreurs relèvent de l’acte répréhensif ou d’une faute majeure.

49 La preuve démontre que l’intimé a appliqué la même grille de correction à chacun des candidats, y compris les erreurs qui y apparaissent.

50 Le Tribunal juge que même si l’intimé a fait erreur en n’indiquant pas les points à être accordés par élément de bonne réponse sur la grille de correction et en ne corrigeant pas les erreurs, ce sont de simples erreurs ou omissions qui ne constituent pas un abus de pouvoir.  Clairement, l’intimé n’a pas abusé de son pouvoir.

Décision

51 Pour tous ces motifs, le Tribunal rejette la plainte.

Francine Cabana

Membre

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2006-0169
Intitulé de la cause:
Denise Trachy et le Sous-ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités et al.
Audience:
Les 13 et 14 septembre 2007
Montréal, (Québec)
Date des motifs:
Le 28 janvier 2008

Comparutions:

Pour le plaignant:
M. Claude Faust
Mme Lise Dupont
Pour l'intimé:
Me Martin Desmeules
Me Christine Landry
Pour la Commission
de la fonction publique:
MeLili Ste-Marie
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