Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a déposé deux plaintes alléguant que son agent négociateur a manqué à son devoir de le représenter équitablement dans une série de conflits qui l’opposaient à son employeur - la Commission a d’abord passé en revue les principes généraux de droit qui s’appliquent au devoir de représentation d’un agent négociateur à l’endroit d’un employé faisant partie de l’unité de négociation - la Commission a par la suite conclu que le plaignant n’avait pas fait la preuve d’une représentation arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi de la part de son agent négociateur à son égard - la Commission a également jugé que, en fait, son agent négociateur et ses représentants s’étaient acquittés de toutes leurs obligations juridiques à l’endroit du plaignant, et lui avaient fourni des évaluations prudentes et judicieuses de ses conflits avec son employeur. Plaintes rejetées.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-11-19
  • Dossier:  561-02-180 et 201
  • Référence:  2009 CRTFP 154

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

DAVID IAN TENCH

plaignant

et

ASSOCIATION CANADIENNE DES EMPLOYÉS PROFESSIONNELS

défenderesse

Répertorié
Tench c. Association canadienne des employés professionnels

Affaire concernant des plaintes visées à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Bruce P. Archibald, commissaire

Pour le plaignant:
lui-même

Pour la défenderesse:
Fiona Campbell et Amy Groothius, avocates

Affaire entendue à Halifax (Nouvelle-Écosse),
du 6 au 8 mai et du 15 au 17 décembre 2008.
(Traduction de la CRTFP)

I. Plaintes devant la Commission

1 La présente décision porte sur deux plaintes déposées par David Ian Tench (le « plaignant ») à l’encontre de son agent négociateur, l’Association canadienne des employés professionnels (l’« Association »), selon lesquelles l’agent négociateur s’est livré à des pratiques déloyales de travail en agissant « […] de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi […] » dans la représentation du plaignant, en violation de l’article 187 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »). Le plaignant est un gestionnaire des relations avec la clientèle à la Division des services ministériels, aux opérations de Génie construction (formation) (GCF) du ministère de la Défense nationale (le « ministère ») dans la région Atlantique. Il soutient que l’Association, dont il est le seul membre dans son lieu de travail, ne l’a pas bien représenté dans de nombreux griefs ou incidents, qui se fondaient selon lui sur de la discrimination raciale de la part du ministère et de ses employés.

2 Les allégations principales qui sont contenues dans les deux plaintes doivent être énoncées au complet. La première plainte (la « plainte un »), déposée officiellement en vertu de l’article 190 de la Loi, datée du 17 septembre 2007 et signée par le plaignant, dans laquelle il disait « se représenter lui-même », renferme les quatre énoncés suivants sous la rubrique comprise dans la formule qui mentionne [traduction] « Bref énoncé de chaque geste, omission ou autre question qui fait l’objet de la plainte, dont les dates et les noms des personnes en cause » :

[Traduction]

1.       À partir du 4 janvier 2006 ou vers cette date, des représentants de l’ACEP m’ont convaincu de ne pas déposer de grief de classification à l’encontre de mon employeur – la Défense nationale (MDN) – à la suite d’une reclassification, parce que les représentants de l’ACEP m’ont certifié que la « conversion » à venir apaiserait mes préoccupations.

2.       Des représentants de l’ACEP ont établi et présenté une demande de la CRTFP en mon nom, en date du 22 juin 2007. Ils ont refusé de me permettre de prendre part à sa préparation. Ils ont commis des erreurs considérables. L’ACEP refuse maintenant de rectifier les erreurs et a inséré dans la demande des conditions qui sont injustes et déraisonnables.

3.       Depuis septembre 2006, mon employeur m’a agressé physiquement et verbalement, a commis de la discrimination à mon endroit pour des motifs illicites, a abusé de son pouvoir à mon égard, a miné ma réputation professionnelle, et a omis de prendre les mesures prescrites pour tenir compte de mon invalidité. Malgré mes arguments et mes protestations, les représentants de l’ACEP m’ont complètement refusé l’accès à la procédure de règlement de grief et, parfois, se sont rangés du côté de mon employeur et ont comploté avec lui.

4.       Des représentants de l’ACEP m’ont refusé le statut de délégué syndical et ont conspiré avec mon employeur pour me punir en raison de rumeurs selon lesquelles je déposerais une plainte à la CRTFP.

[…]

Il y avait également quatre pages de détails exposant de l’information sur les prétentions. Au moyen d’un recours ou d’une [traduction] « [m]esure corrective […] prévue par le paragraphe 192(1) de la […] Loi », le plaignant demandait le retrait des conditions imposées par l’Association relativement aux prochaines étapes de la procédure de règlement de grief, le versement de dommages-intérêts par l’Association, qui seraient établis à une date ultérieure, et [traduction] « [une] lettre d’excuses très sincères de l’Association ».

3 La deuxième plainte (« plainte deux »), déposée en vertu de l’article 190 de la Loi, était datée du 20 novembre 2007 et était également signée de la main du plaignant. Le « bref énoncé » des questions qui font l’objet de la plainte se lit comme suit :

[Traduction]

Le 21 septembre 2007 ou vers cette date, le plaignant a reçu une lettre de la défenderesse selon laquelle sa plainte portant le numéro de référence 566-02-1327, qui avait été déposée le 22 juin 2007, avait été retirée. Aucun préavis n’avait été donné au plaignant et la demande a été retirée par lettre de M. Archambault adressée à la Commission en date du 23 août 2007. Le plaignant fait valoir que les gestes de la défenderesse sont malicieux, arbitraires, de mauvaise foi et discriminatoires. Le 20 octobre 2007, le président local de la NÉ, M. Ben Black, a ordonné que le plaignant s’[traduction] « abstienne d’agir à quelque titre officiel que ce soit » tant que je n’aurai pas réglé mes différends avec l’ACEP. Aucune inconduite de ma part ne justifie cette directive. La procédure dans le cadre de laquelle le règlement de la NÉ a été adopté par la section locale était arbitraire et discriminatoire. Le 2 octobre 2007 ou vers cette date, ainsi qu’en plusieurs autres occasions, j’ai demandé conseils à la défenderesse en ce qui concerne la conversion aux EC qui était en cours. On m’a assuré que je recevrais ma NPP d’ici le 6 novembre 2007. Je n’ai pas reçu encore ma NPP même si d’autres membres de ma section locale oeuvrant dans d’autres ministères ont reçu la leur. Mon employeur me certifie que la conversion aux EC a maintenant franchi une nouvelle étape et je n’ai pas encore reçu ma NPP ou le nouveau texte de ma description de travail. Je désire contester cette inconduite de mon employeur et d’autres inconduites de sa part, mais je ne peux le faire, car la défenderesse m’a bloqué l’accès. L’inconduite de la défenderesse est délibérée et calculée et a eu lieu de concert avec l’employeur, ce qui est à l’origine de ma perte.

Des détails n’étaient pas joints à la présente plainte. Toutefois, la preuve et l’argumentation ont révélé que les trois premières phrases font référence au retrait de la plainte un par l’Association. La mention de la « conversion aux EC » concerne une procédure de reclassification qui a touché de nombreux membres de l’Association qui, dans les faits, est mentionnée dans le paragraphe 1 de la plainte un (voir le paragraphe 2 de la présente décision). La NPP est une notification personnelle préalable, qui s’inscrivait dans la procédure de reclassification dont il sera fait mention plus loin dans cette décision. Qu’il suffise de dire qu’un certain nombre de plaintes sont mentionnées dans cette affaire contre l’Association et que les plaintes un et deux se dédoublent. Les mesures correctrices demandées dans la plainte deux sont les suivantes : a) 30 000,00 $ pour le retrait par l’Association de la plainte un; b) 300 000,00 $ en [traduction] « […] dommages-intérêts pour perte de revenus futurs […] »; c) 100 000,00 $ en [traduction] « […] dommages-intérêts punitifs pour comportement malveillant […] » de l’Association; d) 250 000,00 $ en [traduction] « […] des dommages-intérêts alourdis pour comportement intentionnel et malveillant […] » de l’Association; e) 1 million de dollars en dommages-intérêts exemplaires [traduction] « […] devant être versés à un fonds juridique indépendant […] ». Subsidiairement, le plaignant a demandé [traduction] « […] l’autorisation de la Commission de demander aux tribunaux de statuer sur toute question qui, de l’avis de la Commission, n’est pas de son ressort ». Le montant des dommages-intérêts réparateurs demandés révèle bien la tendance empruntée par le plaignant, qui est apparue de façon manifeste dans les témoignages et la preuve, de faire valoir des éléments qui ne se défendaient ni en droit ni dans les faits.

4 Il convient de dire quelques mots de la longueur de la présente décision. Les plaintes pour représentation inéquitable doivent souvent, pour être réglées, comporter une explication des différends entre l’employé plaignant et son employeur avant qu’il soit possible d’analyser les allégations formulées par un plaignant à l’encontre d’un agent négociateur pour défaut de le représenter adéquatement dans le cadre de tels différends. Ainsi, bien que les allégations analysées ici soient celles du plaignant à l’encontre de l’Association, il est possible de comprendre ce différend d’ordre secondaire seulement si l’on saisit le contexte, qui est le différend sous-jacent entre le plaignant et le ministère. C’est particulièrement le cas lorsqu’un plaignant semble avoir de sérieuses difficultés avec un employeur et invoque des arguments plausibles, tout au moins à leur face même, sur les motifs pour lesquels l’agent négociateur n’a pas bien pris fait et cause dans sa lutte contre le ministère.

II. Devoir de représentation équitable : principes généraux

5 Tel qu’il est mentionné précédemment, la source législative principale du devoir de représentation équitable en l’espèce provient de l’article 187 de la Loi. Cette disposition expose le principe suivant :

187.  Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

L’article 185 de la Loi déclare que la violation de cette disposition est une « pratique déloyale de travail », et l’alinéa 190(1)g) de la Loi impose à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») l’obligation d’« instrui[re] toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle : […] l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré[e] à une pratique déloyale au sens de l’article 185 ». Toutefois, les deux parties à ces plaintes reconnaissent que le point de départ jurisprudentiel de l’analyse de la pratique déloyale de travail se trouve dans la décision de la Cour suprême du Canada dans Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon et al., [1984] 1 R.C.S. 509, aux pages 521 à 527, qui est antérieure à certains énoncés législatifs. La Cour suprême du Canada a résumé la jurisprudence de la façon suivante aux pages 526 et 527 :

[…]

Le devoir de représentation trouve sa source dans le pouvoir exclusif qui est reconnu à un syndicat d’agir à titre de porte-parole des employés faisant partie d’une unité de négociation.

Dans Syndicat catholique des employés de Magasins de Québec Inc. c. Compagnie Paquet Ltée, [1959] R.C.S. 206, le juge Judson, au nom de la majorité de cette Cour, décrit ainsi, à la p. 212, le caractère de représentant exclusif de tous les salariés membres de l’unité d’accréditation conféré au syndicat accrédité :

[TRADUCTION] Étant constitué conformément à la Loi sur les syndicats professionnels et accrédité conformément à la Loi des relations ouvrières le syndicat est le représentant de tous les employés de l’unité pour les [page527] fins de la négociation de la convention de travail. Les négociations privées entre l’employeur et employé n’ont plus leur place. Il est certain qu’au regard des matières visées par la convention collective, la liberté contractuelle entre maître et employé individuel est supprimée.

De la jurisprudence et de la doctrine consultées se dégagent les principes suivants, en ce qui touche le devoir de représentation d’un syndicat relativement à un grief.

1. Le pouvoir exclusif reconnu à un syndicat d’agir à titre de porte-parole des employés faisant partie d’une unité de négociation comporte en contrepartie l’obligation de la part du syndicat d’une juste représentation de tous les salariés compris dans l’unité.

2. Lorsque, comme en l’espèce et comme c’est généralement le cas, le droit de porter un grief à l’arbitrage est réservé au syndicat, le salarié n’a pas un droit absolu à l’arbitrage et le syndicat jouit d’une discrétion appréciable.

3. Cette discrétion doit être exercée de bonne foi, de façon objective et honnête, après une étude sérieuse du grief et du dossier, tout en tenant compte de l’importance du grief et des conséquences pour le salarié, d’une part, et des intérêts légitimes du syndicat d’autre part.

4. La décision du syndicat ne doit pas être arbitraire, capricieuse, discriminatoire, ni abusive.

5. La représentation par le syndicat doit être juste, réelle et non pas seulement apparente, faite avec intégrité et compétence, sans négligence grave ou majeure, et sans hostilité envers le salarié.

[…]

Ont découlé de ces principes de nombreuses décisions de jurisprudence rendues par des commissions des relations du travail et des tribunaux de tout le pays; voir MacNeil, Lynk et Engelmann, Trade Union Law in Canada, édition à feuilles mobiles, chapitre 7. Les décisions de jurisprudence pertinentes ont été citées au cours des discussions sur chacune des questions en litige dans la présente affaire. Toutefois, il semble qu’il soit possible de régler la question en analysant les faits en regard du libellé de l’article 187 de la Loi et des principes de Gagnon et al. énoncées précédemment.

III. Discussion sur la preuve

6 Pendant les six jours d’audience, cinq témoins ont témoigné. Trois ont été convoqués par le plaignant (lui-même, sa femme et Tony Cranford, un employé de longue date sur le lieu de travail du plaignant qui est délégué syndical à l’Alliance de la Fonction publique du Canada). Deux témoins ont été convoqués par l’Association (Claude Archambault, un agent des relations du travail de l’Association, et Jean Ouellette, le directeur des relations du travail de l’Association). Les témoins ont présenté en preuve plus de 120 documents, en plus des précédents produits pour étayer l’argumentation. La majeure partie de la preuve documentaire était constituée de copies de courriels échangés par les principaux intervenants des événements pertinents. Les avocates de l’Association ont largement contribué à faire ressortir des centaines de pages de documents la substance des plaintes formulées par le plaignant à l’encontre de l’Association. L’Association a donc fait valoir à juste titre qu’il y avait au moins huit allégations spécifiques et une allégation générale contre l’Association qui sous-tendent les deux plaintes. La preuve et l’argumentation concernant chacune des plaintes seront étudiées.

A. Le grief du commissionnaire

7 La première question en litige, qui est, dans les faits, la question qui est au coeur de la plainte un, était que le plaignant estimait avoir été représenté injustement et inadéquatement par l’Association dans ce qu’il percevait comme de la discrimination raciale de la part d’un membre du Corps canadien des commissionaires (le « commissionnaire ») affecté à des tâches de sécurité dans son lieu de travail. Le plaignant a rempli la formule du Conseil du Trésor relativement à la présentation d’un grief individuel portant sur les gestes posés par le commissionnaire le 14 novembre 2006. Il a été approuvé par Ben Black à titre de représentant de l’Association, qui est le président de la section locale de la Nouvelle-Écosse, à la même date, et le superviseur du plaignant, le capitaine Chris M. Quillan, en a accusé réception à titre de représentant du ministère. Les faits tels qu’ils ont été allégués par le plaignant étaient exposés dans la formule dans les termes suivants :

[Traduction]

 Ce qui suit est sous toute réserve. Je me réserve le droit d’indiquer d’autres détails du grief et/ou d’autres domaines ayant fait l’objet d’une violation de la convention collective de l’ACEP au cours de la médiation et/ou de la procédure de règlement de grief. Je présente un grief concernant le fait que le 3 septembre et les 26 et 31 octobre 2006, le ministère de la Défense nationale a manqué à son devoir de me fournir un milieu de travail exempt de discrimination raciale, conjugale et personnelle, en violation de la clause 16.01 de la convention collective. Voici les détails pertinents : 1) le 3 septembre 2006, vers 12 h 30, j’ai été arrêté à l’entrée du Parc Willow, endroit où je travaille depuis plus de 5 ans, par une agente de sécurité qui m’a demandé de fournir des pièces d’identité. J’ai néanmoins fourni à cette agente des pièces d’identité tel que demandé et elle a fini par me permettre d’entrer dans l’enceinte et dans l’immeuble. 2) Le 26 octobre 2006, vers 14 h 45, alors que j’étais debout à l’intérieur de la clôture à proximité de l’entrée du Parc Willow, la même agente de sécurité s’est approchée de moi et m’a demandé de montrer des pièces d’identité. Je lui ai demandé de vérifier auprès de l’agent qu’elle relevait. 3) Le 26 octobre 2006, vers 14 h 55, j’ai rencontré ma femme, qui était déjà entrée dans l’enceinte de sécurité et lorsque nous nous apprêtions à quitter, la même agente de sécurité nous a abordés et a demandé de voir les pièces d’identité de ma femme. 4) Le 31 octobre 2006, vers 15 h, un employé m’a informé que des policiers militaires présents dans l’immeuble désiraient me parler. L’employé croyait que cela pouvait avoir un lien avec un incident de sécurité, mais il ne pouvait pas en être certain. On m’a demandé de me dépêcher pour tenter de parler à mon syndicat. Comme je n’y suis pas parvenu, j’ai écrit une courte lettre aux policiers militaires et je la leur ai remise. Ils ont dit qu’ils désiraient obtenir une déclaration de ma part au sujet de l’incident de sécurité. Je leur ai dit que ce que j’avais à dire sur la question ce jour-là était expliqué dans ma lettre. Je leur ai remis ma lettre, puis je suis sorti de la pièce.

À titre de mesure corrective, le plaignant a demandé trois choses : 1) que le commissionnaire ne puisse plus travailler au ministère pendant le reste de la carrière du plaignant au ministère; 2) que la sécurité à son lieu de travail soit assurée en tout temps par un commissionnaire et un policier militaire; 3) que le commissionnaire se fasse infliger une amende de 1 000 $ payable au plaignant.

8 L’Association a représenté le plaignant dans le cadre de la procédure à trois paliers de règlement de grief applicable à cette affaire dans ce qui est devenu une affaire longue et litigieuse, qui s’est étirée dans le temps. Claude Archambault était l’agent des relations du travail de l’Association qui a été affecté au règlement de l’affaire. M. Archambault, qui avait par conséquent la charge du grief pour le compte de l’Association, a d’abord examiné la possibilité d’avoir recours à la médiation avec Heather Kilby, une conseillère en ressources humaines du ministère. Toutefois, en date du 4 décembre 2006, M. Archambault a informé Mme Grant, du ministère, que la médiation n’intéressait pas le plaignant. Les 5 et 7 décembre 2006, il y a eu un échange de longs courriels entre M. Archambault et le plaignant dans le cadre duquel il a été question de la nature de la procédure de règlement de grief, du fardeau de la preuve, des stratégies de présentation de la preuve, du rôle d’un arbitre de grief et de la possibilité d’un contrôle judiciaire. Au cours de cet échange, M. Archambault a expliqué qu’en vertu de la clause 16.01 de la convention collective et des faits, la discrimination fondée sur l’état conjugal ou sur la situation de famille ne pouvait constituer une question en litige. En guise de réponse, le plaignant a fait valoir que [traduction] « […] une autre procédure est nécessaire pour régler la question du traitement réservé à mon épouse […] », et ce en réaction apparente à la déclaration, correcte, de M. Archambault selon laquelle l’Association n’était pas tenue de représenter les personnes qui ne sont pas des employés de l’unité de négociation. M. Archambault était présent, avec le plaignant, à la réunion d’examen du grief au premier palier tenue le 13 décembre 2006, et a fait valoir un argument concernant la situation du plaignant qui reposait sur la discrimination raciale. Le 8 janvier 2007, le plaignant a reçu une lettre du capitaine Jason Porteous informant le plaignant que son grief avait été rejeté; copie de cette lettre a été également envoyée à M. Archambault. La lettre de deux pages et demie exposait les résultats d’une « enquête » menée par le capitaine Porteous (qui a parlé au commissionnaire et à la police militaire), lettre dans laquelle il acceptait une version des événements qui différait de ceux que le plaignant faisait valoir et dans laquelle il résumait qu’il n’était [traduction] « […] pas en mesure de conclure que vous avez été traité de manière différente, négative ou défavorable en raison de votre race ou de votre état matrimonial pendant l’incident en question ».

9 Ce même jour, l’affaire a été transmise au deuxième palier de la procédure de règlement du grief à la demande du plaignant et avec l’autorisation de l’Association. La réunion d’examen du grief au deuxième palier a été fixée au 31 janvier 2007 et au cours de la période menant à cette date, le plaignant a demandé et reçu du ministère plusieurs courriels et autres documents. Les documents ont amené le plaignant à conclure que le commissionnaire mentait et que [traduction] « […] le capitaine Porteous avait tout foutu en l’air […] », pour citer un long courriel daté du 30 janvier qui a été envoyé à Mme Kilby, avec copie aux agents principaux du ministère et à M. Archambault et M. Black. La réunion s’est tenue le 31 janvier 2007, mais à la suite d’un échange de courriels entre M. Archambault et Mme Grant au nom du ministère, on a demandé plus de temps pour rendre une décision. M. Archambault, Mme Grant et le plaignant ont échangé des courriels peu concluants sur la question de la mesure corrective. Lorsque l’Association a constaté que le ministère n’avait pas rendu de décision au deuxième palier en date du 26 février 2007, elle a, au nom du plaignant, transmis le grief au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, ce qu’a reconnu le ministère. Toutefois, en date du 12 avril 2007, aucune réponse n’avait encore été obtenue du représentant de la direction. À cette date, M. Archambault a fait parvenir un courriel acerbe à Mme Klassen, une représentante de la direction, avec copie au plaignant, courriel se lisant comme suit :

[Traduction]

Pour faire suite à mon courriel daté du 4 avril 2007 concernant la question susmentionnée, il est impératif que le grief de discrimination déposé par M. Tench, portant le numéro de dossier MDN LAB-06-01-HAFY-00100-0211, soit inscrit au rôle dès que possible, suivant les dates proposées en avril 2007. La réunion d’examen du grief au deuxième palier relative au grief de M. Tench s’est tenue le 31 janvier 2007 et à ce jour, la réponse de l’employeur n’a pas encore été communiquée en conformité avec les délais prescrits dans la convention collective de l’ACEP. En conséquence de ces délais graves, il y a eu dépôt et accusé de réception d’une formule de transmission de grief au troisième palier de la procédure de règlement des griefs par la direction le 26 février 2007. Les retards de la part de la direction à répondre à la procédure de deuxième palier sont inacceptables, portent préjudice à notre membre, et sapent les droits de M. Tench de bénéficier d’un traitement juste et équitable en temps opportun, ce qui, en définitive, enfreint la doctrine de la justice procédurale et naturelle. JUSTICE DIFFÉRÉE EST JUSTICE REFUSÉE.

Par conséquent, à la lumière de ces mesures préjudiciables, il est crucial que l’audition du grief de M. Tench ait lieu dès que possible au troisième palier, et à défaut d’une confirmation de date de réunion relative au grief au dernier palier d’ici le 18 avril 2007, l’Association n’aura d’autre choix que de renvoyer le grief à l’arbitrage sans délai.

Nous vous saurions gré de nous répondre sur cette question dès que possible.

Il semble que ce message a porté ses fruits.

10 L’audience sur le grief au troisième palier devait avoir lieu à Ottawa le 26 avril 2007. Le 19 avril 2007, le plaignant a fait parvenir à M. Archambault un long courriel dans lequel il expliquait à ce dernier de quelle façon il voulait qu’il présente son dossier. M. Archambault a répondu le 20 avril 2007 dans les termes suivants :

[Traduction]

Je vous remercie Ian. Je présenterai votre grief le 26 avril 2006 en votre nom. Je vous remercie de m’avoir communiqué les éléments importants mentionnés dans votre courriel et je m’y reporterai au cours de ma présentation. Après l’audition du grief, je vous appellerai pour faire le point avec vous.

En ce qui concerne la question de la prise en charge dont il est fait état dans votre courriel ci-après, la procédure pour laquelle l’ACEP examine les griefs afin de déterminer si un grief sera soutenu en arbitrage vous a été envoyée dans un courriel en date du 6 décembre 2006 à 15 h 56. Je vous ai envoyé une copie de ce courriel (voir ci-après). La procédure d’examen telle qu’elle est expliquée dans mon courriel du 6 décembre 2006 correspond à l’approche que nous adoptons pour tous les griefs dans le cadre desquels l’ACEP a des droits de prise en charge, qui nécessitent l’approbation de l’agent négociateur. Dans le cas de tous les autres griefs qui ne portent pas sur l’interprétation ou sur l’application d’une disposition de la convention collective, l’ACEP effectuera le même examen judicieux. Toutefois, si l’ACEP décide qu’elle ne soutiendra pas le grief, le membre peut déposer le grief à l’arbitrage sans l’approbation de l’ACEP.

Le 28 mai 2007, le plaignant a reçu de Monique Paquin, directrice générale des Relations du travail et de la rémunération, la réponse au troisième palier. M. Archambault, Mme Grant et Mme Kilby ont également reçu une copie. La réponse se lit comme suit :

[Traduction]

Voici la réponse au dernier palier au grief susmentionné et à la présentation faite par votre représentant syndical, M. Claude Archambault, au dernier palier de la procédure ministérielle de règlement de grief.

D’après votre grief, le ministère de la Défense nationale a manqué à son obligation de vous fournir un lieu de travail exempt de discrimination raciale, conjugale et personnelle en contravention de la clause 16.01 de la convention collective du groupe Économique et services de sciences sociales.

Après examen de votre grief, je conclus qu’il n’existe aucune preuve de discrimination fondée sur les motifs illicites prévus dans la clause 16.01 de votre convention collective. Les commissionnaires sont chargés d’assurer la sécurité du personnel ainsi que la protection des biens, de l’information et de l’équipement. En exerçant cette responsabilité et conformément à la procédure établie, les commissionnaires doivent vérifier les cartes d’identité des membres du personnel qui entrent sur les lieux pour s’assurer que seul le personnel autorisé y a accès.

En l’espèce, la procédure adéquate a été suivie et aucun élément de preuve n’indique que vous avez été traité différemment de manière incompatible avec les fonctions et les politiques applicables aux commissionnaires.

Par conséquent, votre grief est rejeté et la mesure corrective demandée n’est pas accordée.

Après cette réponse, les rapports entre le plaignant et l’Association se sont envenimés, mais pas immédiatement.

11  Au début de juin 2007, le plaignant a pris part pendant deux jours à des séances de formation organisées par l’Association. Ces séances avaient pour but de permettre aux participants d’acquérir les compétences nécessaires pour se faire nommer au poste de délégué syndical de l’Association. M. Archambault a dirigé certaines de ces formations. Elles portaient sur des questions comme l’ABC de la convention collective et le rôle d’un délégué syndical dans le traitement des griefs ainsi que sur les plaintes de harcèlement et les questions de santé et de sécurité au travail, et les participants ont reçu des cartables de documents, dont un protocole sur les liens de représentation entre l’Association et les employés membres de l’unité de négociation. Le 12 juin 2007, le plaignant a fait parvenir à M. Archambault un courriel dans lequel il déclarait ce qui suit au sujet de la formation de délégué syndical :

[Traduction]

Vous-même et l’ensemble des formateurs m’avez certes impressionné. L’expérience s’est révélée pour moi très agréable et mémorable. Je vous remercie et je remercie tous les intéressés de l’ACEP des possibilités offertes.

Toutefois, le plaignant a également mentionné trois questions de fond. La première était sa volonté de déposer un grief en matière de classification (question qui sera traitée de manière exhaustive plus loin dans la présente décision). La deuxième était un différend sur une affectation professionnelle impliquant le capitaine Quillan (dont il sera question de façon plus détaillée plus loin, encore une fois). La troisième était une demande de discuter avec l’Association du grief concernant le commissionnaire [traduction] « […] qui devrait être acheminée à la CRTFP; l’objectif de cette démarche consiste seulement à m’assurer que je comprends bien la procédure ». La réponse faite par M. Archambault au plaignant relativement à ce courriel a sans aucun doute constitué le début du désenchantement du plaignant à l’égard de l’Association. En ce qui concerne la première question de fond, M. Archambault a déclaré qu’il avait besoin de plus de renseignements du plaignant avant que l’Association puisse décider si et comment elle pouvait être habilitée à le représenter. En ce qui a trait au différend avec le capitaine Quillan, M. Archambault a prévenu le plaignant que son comportement pourrait être considéré comme de l’insubordination et qu’il devrait s’inspirer de l’adage bien connu « obéir d’abord, se plaindre ensuite ». Enfin, en ce qui touche le grief relatif au commissionnaire, M. Archambault a informé le plaignant d’une décision qui est dorénavant le noeud de la présente affaire. Voici le texte de sa réponse au courriel :

[Traduction]

En ce qui concerne la dernière question, j’ai examiné minutieusement tout le bien-fondé de votre grief de discrimination actuel à l’encontre [du commissionnaire] avec le directeur des relations du travail de l’ACEP, et l’ACEP décide de ne pas renvoyer le grief à l’arbitrage en vue d’une audition sur le fond. Malgré ce fait, l’ACEP renverra sous condition le grief susmentionné à l’arbitrage pour la seule fin de tenter de régler la question au moyen de la médiation, ce qu’offrira la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

Si vous et/ou l’employeur refusez la médiation tel qu’il est mentionné précédemment, ou si la médiation ne permet pas de régler la question à la satisfaction des parties, le renvoi du grief de discrimination à l’arbitrage sera retiré par l’ACEP.

Avant de lancer la procédure de médiation, je dois passer en revue avec vous les mesures correctives que vous cherchez à faire appliquer par la présentation du grief et qui, en partie, ne sont pas appuyées par la jurisprudence.

Je vous appellerai cet après-midi pour discuter de la question. Cordialement.

Le plaignant n’était pas content.

12 Dans sa réponse envoyée par courriel à M. Archambault le 19 juin 2007, le plaignant a réaffirmé sa position selon laquelle il avait une bonne cause, le commissionnaire mentait et la décision de l’Association aurait un effet privatif sur lui et sa famille. Le plaignant a conclu son courriel par les paragraphes suivants :

[Traduction]

[…]

L’Association devrait présenter une demande d’arbitrage auprès de la CRTFP en attendant la médiation, car il semble absurde que l’Association puisse proposer qu’elle soit nécessaire, pour ne pas y donner suite ultérieurement. Toutefois, je ne vois pas de quelle façon mes propos font quelque différence que ce soit pour l’Association et j’estime que penser différemment équivaudrait à faire preuve d’une grande paresse. Je présenterai quand même ma propre demande à la CRTFP à titre individuel malgré ce que fait l’Association ou le ministère ou malgré leurs objections quelles qu’elles soient, car j’estime que l’Association a non seulement outrepassé ses limites, mais également me prive, ainsi que ma famille, qui a également subi ses discriminations, d’une véritable possibilité d’obtenir un règlement juste.

Je ne m’oppose pas à la médiation. En fait, j’appuie la médiation comme solution. Le traitement du dossier par l’Association laisse largement à désirer. Telle est ma position : je ne m’oppose pas à la médiation avec le ministère, si celle-ci est possible. Toutefois, je m’oppose et je m’opposerai toujours farouchement à la logique de l’alternative et je ne céderai pas au chantage de l’Association ou du ministère.

Il vaut la peine de citer intégralement la réplique de M. Archambault :

[Traduction]

Je vous remercie de votre courriel Ian.

Votre courriel n’établit pas clairement si vous procéderez vous-même au renvoi à la CRTFP du grief déposé en vertu de l’article 16. Si tel est le cas, comme le grief traite de l’application et/ou de l’interprétation de la convention collective, le greffier de la CRTFP contactera l’ACEP afin de déterminer si nous appuyons ou non le renvoi comme l’exige la LRTFP.

Suivant notre protocole sur la représentation, le directeur des relations du travail décide si l’ACEP portera un cas en arbitrage ou non. Comme vous savez, j’ai discuté de votre grief avec lui et il approuve le renvoi aux conditions dont vous avez déjà été informé. La nature conditionnelle du renvoi demeurera confidentielle, c’est-à-dire que ni la CRTFP ni l’employeur ne sera informé que le renvoi est conditionnel, et ce afin que la connaissance de ce fait n’ait pas d’impact sur la position de l’employeur dans la procédure de médiation dans l’éventualité où les parties donnent leur accord.

Veuillez indiquer si vous entendez renvoyer le grief à l’arbitrage ou si vous voulez que l’ACEP le fasse. Si vous renvoyez le grief directement à la CRTFP, nous informerons celle-ci que nous appuyons le renvoi lorsqu’elle nous contactera.

Ultérieurement, nous informerons la CRTFP et l’employeur que nous acceptons la médiation. Nous vous contacterons à cette fin si l’employeur donne son accord en ce sens.

M. Archambault n’a reçu aucune réponse du plaignant parce que ce dernier a décidé de soumettre la question directement au directeur des relations du travail de l’Association, Jean Ouellette.

13 Le 20 juin 2007, M. Ouellette a eu une conversation d’une durée d’environ 25 minutes avec le plaignant. M. Ouellette a dit qu’il a tenté d’expliquer la raison d’être d’un renvoi conditionnel à l’arbitrage, soit la possibilité d’avoir recours à la procédure de médiation, si à la fois le plaignant et les représentants de la direction acceptent la médiation. Toutefois, selon le témoignage de M. Ouellette, le plaignant estimait qu’un renvoi conditionnel aux fins de la médiation était inadéquat. Il souhaitait un renvoi complet aux fins de l’obtention d’une décision d’arbitrage. M. Ouellette a affirmé que d’après le plaignant, une telle décision était nécessaire pour [traduction] « faire cesser le racisme » et que le plaignant [traduction] « préférerait mourir » que d’avoir recours à la médiation. M. Ouellette a témoigné qu’au cours de sa conversation avec le plaignant, ce dernier était très agressif et interrompait sans cesse M. Ouellette s’il tentait de dire quelque chose qui suscitait le désaccord du plaignant. M. Ouellette a témoigné que le plaignant a décrit le point de vue de M. Ouellette comme [traduction] « de la foutaise », a dit que M. Ouellette [traduction] « ne le comprenait pas » et a mentionné à M. Ouellette [traduction] « Ne me traite pas comme un imbécile. » M. Ouellette a dit qu’il était incapable d’exprimer son argumentation justifiant la ligne de conduite projetée de l’Association parce qu’il était constamment interrompu.

14 Dans son témoignage, le plaignant a nié avoir été agressif ou impoli avec M. Ouellette ou l’avoir empêché d’expliquer complètement sa position. Toutefois, il a confirmé qu’il n’a jamais donné son accord, pendant cette conversation, à un renvoi conditionnel à l’arbitrage visant à obtenir un règlement par médiation. Cependant, M. Ouellette ne s’est pas laissé démonter. Dans le cadre de son examen avec M. Archambault, il a conclu que le plaignant n’avait pas un bon cas et en particulier que les demandes de redressement du plaignant étaient irréalistes. M. Ouellette n’avait pas non plus cédé au sujet de la possibilité d’une issue obtenue par médiation, qui constituait selon lui la meilleure option si le plaignant et les représentants de la direction pouvaient être convaincus d’adopter cette façon de faire. M. Ouellette a autorisé M. Archambault à renvoyer le grief du commissionnaire à l’arbitrage, à la condition que l’objet de la démarche soit la médiation, et non un arbitrage complet de la question. Il a également autorisé M. Archambault à donner l’avis requis à la Commission canadienne des droits de la personne (la « CCDP ») qu’un renvoi à l’arbitrage comportait une allégation de discrimination en contravention d’un motif illicite prévu par la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. (1985), ch. H-6, afin que la CCDP puisse intervenir si tel est son désir. Les représentants de la direction ont été informés des étapes officielles, mais l’Association a choisi, stratégiquement, de ne pas les informer que l’objet de l’exercice était simplement la médiation et que le renvoi serait abandonné si l’employeur ou le plaignant refusait de prendre part à la médiation.

15 Malgré un courriel du plaignant daté du 21 juin 2007, dans lequel il s’est de nouveau opposé à la ligne de conduite projetée de l’Association, M. Archambault a renvoyé le grief à l’arbitrage, a donné avis à la CCDP et a fait parvenir des copies des documents au plaignant le 22 juin 2007. Le 26 juin 2007, le plaignant a envoyé un courriel à M. Archambault dans lequel il mentionnait notamment que l’Association devrait lui laisser jouer un rôle accru dans le traitement du renvoi à l’arbitrage du grief concernant le commissionnaire et que [traduction] « […] l’approche tout à fait humiliante de l’Association gêne non seulement moi, mais également les représentants locaux de cette région ». À la même date, M. Archambault a envoyé un courriel en réplique dans lequel il mentionnait que la procédure de l’Association était une procédure standard visant les agents négociateurs de la fonction publique fédérale et que le plaignant recevrait des copies de la documentation. Le 28 juin 2007, le plaignant a fait parvenir à MM. Archambault et Ouellette un courriel dans lequel il accusait réception des formules, se plaignait de ne pas [traduction] « […] avoir pris part à la préparation de la demande […] » et soutenait que l’avis donné à la CCDP constituait une « erreur » parce qu’il mentionnait comme motifs de la plainte seulement la « race » et non [traduction] « […] l’état matrimonial, le sexe, voire [un motif] personnel […] ». Le 11 juillet 2007, le plaignant a envoyé un courriel de suivi, notamment pour obtenir des éclaircissements sur la question de savoir si l’Association avait rectifié l’« erreur » au niveau du champ d’application de son grief. M. Archambault a répondu le même jour en affirmant qu’[traduction] « […] il n’y a pas d’erreurs dans la présentation de votre grief à la CRTFP […] », que les sujets étaient ceux qui faisaient l’objet « du grief initial » et qu’étant donnée la jurisprudence de la Cour fédérale, il était impossible d’ajouter de nouveaux motifs aux motifs initiaux.

16 Dans l’intervalle, le 29 juin 2007, la CCDP a informé le greffe de la Commission qu’elle ne souhaitait pas intervenir en l’instance. Par la suite, le 12 juillet 2007, l’employeur a informé le greffe de la Commission qu’il [traduction] « […] n’entend pas participer à la médiation à ce stade ». Toutefois, l’Association, d’après M. Archambault (qui avait consulté M. Ouellette), a décidé de ne pas retirer le grief immédiatement et de demander que les représentants de la direction reconsidèrent la médiation. Le 1er août 2007, il a été convenu de mettre le grief en suspens en attendant une décision de l’employeur relativement à la demande de l’Association et de donner comme échéance de réplique le 17 août 2007.

17 À cette date, le plaignant était d’avis que la représentation que faisait l’Association était injuste. Le 23 juillet 2007, le plaignant a parlé à M. Ouellette. Il lui a alors dit qu’il avait déjà demandé à l’Association des renseignements sur son mécanisme d’appel relativement aux décisions sur la représentation des membres. Dans un courriel envoyé plus tard ce jour-là, M. Ouellette a confirmé cette conversation téléphonique, a mentionné qu’il ne se souvenait pas de la demande précédente et a fourni au plaignant l’adresse Internet de l’Association en vue de l’obtention d’une copie du protocole d’appel approprié. Dans un échange de courriels avec Claude Danik, directeur exécutif de l’Association, entre le 3 août et le 11 août 2007, le plaignant a fait valoir la procédure interne d’appel, mais en vain. Les détails de cette correspondance seront passés en revue plus loin dans la présente décision, car elle porte non seulement sur le grief relatif au commissionnaire, mais également sur une autre question, généralement qualifiée par les parties de « grief de harcèlement ».

18 Pour compléter l’exposé narratif portant sur le grief du commissionnaire, l’Association, pour différentes raisons, dont les vacances estivales de M. Archambault, a demandé une prorogation jusqu’au 23 août 2007 à un arbitre de grief afin de l’informer de la question de savoir si l’Association retirerait ou non le grief. Dans l’intervalle, l’Association avait reçu la correspondance qui précisait que l’employeur suspendait son refus de la médiation. L’Association a retiré le grief au retour de vacances de M. Archambault, soit le 23 août 2007, et M. Archambault dit avoir envoyé une copie de la correspondance avec le greffe de la Commission au plaignant à la même date. Le plaignant a déclaré qu’il n’a jamais reçu la correspondance. L’Association a mis en preuve une copie de l’enveloppe renfermant la correspondance ayant été envoyée à la bonne adresse du plaignant par courrier recommandé par l’intermédiaire de Postes Canada, mais qui est revenue à l’Association après avoir été estampillée par le service postal : « Non réclamé ». Aucune preuve satisfaisante n’a été produite sur le motif pour lequel cela a pu se produire.

B. Grief de harcèlement

19 Les paragraphes qui suivent décrivent les éléments de preuve produits dans le cas du premier « incident de harcèlement » mentionné dans la plainte un (voir le point 3 du paragraphe 2 de la présente décision). Cet incident de harcèlement se serait produit le 19 décembre 2006. Dans les détails joints à la plainte un, le plaignant décrit l’incident et la réponse de l’Association dans les termes suivants :

[Traduction]

Le 19 décembre 2006, le plaignant a de nouveau été agressé physiquement et verbalement par son superviseur, le capitaine J. Porteous, pendant que le plaignant se trouvait dans son bureau en train de faire tranquillement son deuil à la suite du décès récent de son père (février 2006) le jour de ce qui aurait été l’anniversaire de son père. Le plaignant a informé des représentants de l’ACEP des événements et s’est plaint à son employeur (dépôt d’une plainte pour harcèlement) et a signalé l’incident à la police militaire. La défenderesse a omis d’informer le plaignant qu’il pourrait et devrait déposer un grief de discrimination contre son superviseur qui enfreignait la convention collective, car le superviseur se trouvait dans le bureau du plaignant pour lui signifier une lettre disciplinaire sans avoir donné de préavis écrit ou oral à la défenderesse ou au plaignant.

La preuve révèle que le superviseur du plaignant, le capitaine Porteous, a rencontré le plaignant dans son bureau le 19 décembre 2006. Le capitaine Porteous a produit une lettre adressée au plaignant intitulée [traduction] « Consultation en matière de rendement – Rapport sur les absences ». Elle porte sur deux discussions antérieures tenues en octobre 2006 concernant ce qui devait constituer le prétendu défaut du plaignant d’informer le ministère de son absence du travail en raison d’une maladie ou pour d’autres motifs, puis mentionne deux absences inexpliquées en décembre et expose une procédure que devait suivre le plaignant relativement à un avis de congé non approuvé. La lettre se terminait en informant le plaignant de l’existence du Programme d’aide aux employés et en indiquant que le rendement du plaignant en termes de présence au travail serait réexaminé dans quatre mois. Il était également mentionné dans la lettre qu’une copie de celle-ci serait déposée dans le dossier personnel du plaignant.

20 Le plaignant a présenté une plainte de « harcèlement » au commandant de l’unité de Génie construction (formation), le lieutenant-colonel J.M. Bruno Simard, le 9 janvier 2007. Le lieutenant-colonel Simard a répondu le 1er mars 2007 en mentionnant qu’il avait étudié la plainte et un rapport contradictoire du capitaine Porteous et qu’en l’absence de quelque preuve corroborante d’un autre témoin, il avait conclu qu’un complément d’enquête n’était pas nécessaire et que l’incident ne constituait pas du harcèlement. La lettre prenait fin en laissant entendre qu’il pourrait exister des [traduction] « problèmes de relations interpersonnelles » entre le plaignant et le capitaine Porteous qui pourraient tirer profit d’un mode substitutif de règlement des différends.

21 Le plaignant a déposé un grief de harcèlement relativement au prétendu incident de harcèlement en vertu de l’article 208 de la Loi le 4 avril 2007, après avoir consulté par téléphone la veille (et peut-être avant) M. Archambault. Dans la formule, sous l’en-tête « Détails du grief », le plaignant a énoncé ce qui suit :

[Traduction]

Le fonctionnaire s’estimant lésé se réserve le droit d’ajouter de nouveaux éléments à son grief.

Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste la décision du lieutenant-colonel Simard datée du 1er mars 2007 relativement à la plainte de harcèlement du fonctionnaire s’estimant lésé datée du 9 janvier 2007 sous prétexte qu’elle est discriminatoire. Il se fonde sur les clauses 16.01-.02 et 35.01-.06.

La décision du lieutenant-colonel Simard selon laquelle il n’y a pas eu de harcèlement est erronée, ce qui donne lieu à une situation dans laquelle les clauses de la convention collective ne sont pas respectées par la direction de GCF.

Plus précisément, le capitaine Porteous a omis, en contravention des clauses 35.01-06, d’informer par écrit ou autrement le fonctionnaire s’estimant lésé avant de le rencontrer dans le bureau de ce dernier que cette rencontre avait pour but de lui imposer une sanction disciplinaire. Bien que cela n’ait pas constitué le seul élément de harcèlement du point de vue de la réunion avec le fonctionnaire s’estimant lésé, il s’agit d’un aspect qui s’apparente nettement à du harcèlement. La décision selon laquelle il n’y a pas eu de harcèlement représente nécessairement un défaut de tenir compte de cet élément de la réunion. Il est inacceptable que le lieutenant-colonel Simard ignore ce fait, et malgré le fait que la décision constitue un geste et que le geste est discriminatoire.

Sous la rubrique [traduction] « Date à laquelle chaque geste, omission ou autre question ayant donné lieu au grief est survenu », le plaignant a inscrit « 1er mars 2007 » sans faire mention du 19 décembre 2006. Puis, sous la rubrique [traduction] « Mesure corrective demandée », le plaignant a écrit ce qui suit :

[Traduction]

1.       Faire rouvrir et réexaminer par un fonctionnaire du tribunal la plainte de harcèlement déposée par le fonctionnaire s’estimant lésé et obtenir une décision du fonctionnaire du tribunal.

2.       Aucune mesure disciplinaire à l’encontre du fonctionnaire s’estimant lésé ne peut être prise par le lieutenant-colonel sans le consentement explicite du commandant de base.

3.       Aucune des questions en litige découlant de ce grief et de la plainte de harcèlement ne peut être utilisée comme base d’une rétrogradation PER/PAS du fonctionnaire s’estimant lésé.

4.       La discrimination a un prix.. Bien qu’elle n’était peut-être pas intentionnelle, il était possible de l’éviter et l’on en ressent néanmoins les effets : 1 500,00 $.

Voilà pour le fond du grief. Toutefois, le contexte procédural revêt une grande importance dans le différend du plaignant avec l’Association.

22 Le plaignant a discuté de ce grief avec M. Archambault le 3 avril 2007, et M. Archambault a envoyé au plaignant une confirmation par courriel le 4 avril 2007 indiquant qu’avant que l’Association puisse donner son aval au grief, M. Archambault doit passer en revue tous les faits et les documents. Le courriel exposait avec soin les distinctions entre les violations de la convention collective, d’une part, et les violations de la politique sur le harcèlement du Conseil du Trésor, d’autre part, et les différences procédurales entre les deux pour l’Association. Malgré cette mise en garde, le plaignant a déposé le grief et a faussement mentionné que l’original avait été signé par M. Archambault, qui aurait dit approuver au nom de l’Association l’allégation du fonctionnaire s’estimant lésé selon laquelle il y avait eu violation de la convention collective. Toutefois, le plaignant a acheminé des documents au sujet de son grief à M. Archambault, qui a incité ce dernier à répondre comme suit :

[Traduction]

Pour faire suite à mon courriel daté du 4 avril 2007, veuillez prendre note que j’ai reçu des documents dont nous avons discuté sur les questions qui entourent le grief que vous avez déposé le 4 avril 2007. Comme vous faites valoir que la clause 35.01 a été violée, avant que l’ACEP puisse appuyer une soi-disant violation d’une clause de la convention collective, elle devra procéder à un examen minutieux des faits et du bien-fondé. J’ai remarqué que vous avez mentionné dans la formule de grief que j’ai signé le grief initial. Veuillez prendre note que tel n’est pas le cas, car je vous ai clairement indiqué par téléphone le 3 avril 2007 que comme vous faites valoir qu’une clause de la convention collective a été violée, l’ACEP ne peut avaliser votre grief tant qu’elle n’aura pas eu l’occasion d’examiner à fond les faits et le bien-fondé de celui-ci. Ian, il importe que vous suiviez la directive que je vous donne. Si, à l’avenir, vous ne suivez pas mes instructions, la représentation que l’ACEP vous offre pourrait être mise en péril. Cela s’applique à tous les membres, et veuillez ne pas considérer cela comme une menace. Cependant, je dois souligner qu’il importe de suivre mes instructions au nom de l’ACEP, en particulier lorsqu’elles font l’objet d’une entente.

En outre, comme il en a été question précédemment, s’ajoute au fond de votre grief le fait que les questions en litige qui donnent lieu à la supposée violation de la clause 35.01 ont été soumises en dehors des délais de dépôt d’un grief. Malgré tout, l’ACEP se penchera sur le bien-fondé de votre grief, et tant que nous n’aurons pas reçu les renseignements et les documents nécessaires pour effectuer un examen, l’ACEP ne peut appuyer votre grief. La position susmentionnée est une position à laquelle l’ACEP se tient pour toutes les demandes de grief qui impliquent l’interprétation et l’application des dispositions de la convention collective.

Si vous avez des questions au sujet de ce qui précède, veuillez communiquer avec moi.

Dans les circonstances, il s’agissait d’une réponse prudente et mesurée à un membre de l’Association qui commençait vraisemblablement à avoir un comportement inadéquat et avec lequel il était difficile de composer. Un agent des relations du travail moins expérimenté aurait pu, par frustration, avoir une réaction teintée de colère. Le comportement de M. Archambault représente un modèle de patience et de convenance.

23 Toutefois, le plaignant n’était pas insensible à la position de M. Archambault et le 12 avril 2007, il a envoyé un courriel exhaustif à ce dernier pour lui expliquer pourquoi il estimait nécessaire d’agir pour le compte de l’Association (courriel dans lequel il indiquait avoir obtenu l’autorisation de M. Archambault), pourquoi il croyait qu’il était justifié d’agir ainsi et pourquoi il estimait que le grief n’était pas hors délai car à son avis, l’événement ayant déclenché la violation de la convention collective était la décision du lieutenant-colonel Simard en date du 1er mars 2007 et non les gestes originaux du capitaine Porteous posés le 19 décembre 2006. Le plaignant a conclu son courriel par la phrase suivante :

[Traduction]

J’en demeurerai là et j’espère que vous mettrez de côté votre indignation face à ma « soif de faire avancer les choses » par le dépôt d’un grief, parce que je ne l’ai pas fait pour enflammer ou pour soulever, mais seulement pour accélérer ce que vous auriez fait et auriez voulu faire si vous aviez connu plus tôt toute l’ampleur des questions en litige.

Cette réponse n’a pas eu l’effet désiré sur l’Association du point de vue du plaignant.

24 Après une conversation téléphonique avec le plaignant, M. Archambault lui a envoyé le courriel suivant en date du 16 avril 2007, l’informant pourquoi l’Association n’appuierait pas son grief du 4 avril 2007 :

[Traduction]

Comme nous en avons discuté, l’ACEP a étudié de manière exhaustive les faits et le bien-fondé de votre grief contestant la décision du lieutenant-colonel Simard datée du 1er mars 2007, pour le motif qu’elle enfreignait les clauses 16.01 et 35.01 de la convention collective de l’ACEP. L’ACEP a décidé de ne pas appuyer votre grief dans lequel vous alléguez qu’il y a eu violation de la clause 35.01 sur la base des conclusions suivantes, ainsi qu’une allégation de violation de la clause 16.01. L’ACEP réexaminera sa position concernant un appui éventuel à cette partie du grief si des renseignements additionnels et/ou des éléments de preuve supplémentaires qui sont fournis peuvent justifier une violation des motifs illicites prévus dans la clause 16.01.

Violation alléguée de la clause 35.01. Les questions en litige qui ont donné lieu à la violation alléguée de la clause 35.01 ont pris naissance le 19 décembre 2006. Selon les délais prévus conformément à la procédure de règlement des griefs, vous disposiez de 25 jours ouvrables pour contester la question après avoir pris connaissance d’un geste ou d’une situation qui a donné naissance au grief. Comme vous n’avez pas déposé votre grief dans le délai prévu, soit le 26 janvier 2006, votre grief daté du 4 avril 2006 est hors délai et à ce titre, l’ACEP ne peut avaliser la partie de votre grief traitant de la clause 35.01.

Violation alléguée de la clause 16.01. Les questions en litige que vous avez soulevées dans votre plainte de harcèlement en date du 9 janvier 2007 constituaient expressément une plainte de harcèlement qui ne faisait mention d’aucune violation alléguée des motifs illicites prévus dans la clause 16.01 de la convention collective. Pour que le ministère fasse enquête sur une allégation de discrimination fondée sur un motif de distinction illicite aux termes de la clause 16.01, une allégation sur cette question doit être formulée au moment du dépôt de la plainte, ce qui aurait permis au ministère de faire une enquête adéquate sur l’allégation. Les exigences susmentionnées sont cohérentes avec la Politique du Conseil du Trésor sur le harcèlement en milieu de travail. Le ministère peut seulement faire enquête dans les cas où les allégations sont présentées au moment où une plainte est déposée, et comme vous avez omis d’inclure l’incident allégué du 19 décembre 2006 entre vous-même et le capitaine Porteous, vous ne pouvez pas présumer que le ministère aurait dû faire enquête sur cette question. En outre, si vous aviez déposé l’incident du 19 décembre 2006 comme allégation, l’ACEP est d’avis que les questions et les éléments de preuve que vous avez présenté relativement à l’incident en question ne justifient ni n’établissent que des motifs illicites ont été violés aux termes de la clause 16.01 de la convention collective. Dans les cas où des allégations graves sont formulées, telles qu’une allégation de discrimination, le membre et l’ACEP sont tenus de produire des preuves claires, précises et fortes à l’appui des allégations, à défaut de quoi l’ACEP n’approuvera ni ne soutiendra un grief alléguant qu’il y a eu violation de la clause 16.01. Par conséquent, veuillez fournir au soussigné, dans les meilleurs délais et avant le XX DATE, toute preuve dont vous disposez qui peut appuyer une allégation de discrimination raciale.

Comme votre grief porte sur l’interprétation et/ou l’application de la convention collective et à la lumière de ce qui précède, l’ACEP n’autorisera pas ce grief et en informera l’employeur, sauf si nous obtenons des preuves qui peuvent soutenir votre allégation. Comme nous vous l’avons déjà mentionné, avant de présenter un grief portant sur une disposition de la convention collective, il est nécessaire d’obtenir l’approbation de l’ACEP.

Le plaignant a envoyé un courriel détaillé de six paragraphes à M. Archambault plus tard ce jour-là dans lequel il tente de réfuter la position de M. Archambault et présente ses arguments sur les motifs pour lesquels l’Association avait tort de ne pas appuyer son grief. M. Archambault et l’Association sont demeurés indifférents face au raisonnement du plaignant, mais M. Archambault a témoigné que conformément à la mention de la « DATEXX » ouverte dans son courriel, l’Association ne retirerait pas le grief, mais le mettrait plutôt en suspens afin que le plaignant puisse avoir l’occasion de soumettre d’autres preuves factuelles pour étayer sa prétention de discrimination raciale.

25 La preuve révèle peu ou pas d’activité en ce qui concerne le grief qui touche le commissionnaire ou le grief de harcèlement au cours du mois de mai 2007. On pourrait conclure que tant l’Association que le plaignant attendaient la décision de la direction sur le grief relatif au commissionnaire, qui a été envoyée aux deux le 28 mai 2007, sous forme de lettre de Mme Paquin énoncée au paragraphe 10 de la présente décision. Le plaignant et l’Association étaient également engagés dans d’autres questions, qui seront décrites ultérieurement dans la présente décision. Toutefois, le plaignant a assisté à un atelier de formation pour les délégués syndicaux au début de juin. Bien qu’aucune mention spécifique n’ait été mise en preuve relativement à cette question, on pourrait conclure que l’Association espérait que la participation du plaignant à l’atelier de formation pourrait lui faire mieux connaître les structures et les responsabilités décisionnelles internes de l’Association et faire en sorte qu’il y soit plus réceptif. Par ailleurs, le plaignant a pu tenter d’améliorer sa connaissance de l’Association et son statut au sein de celle-ci pour faire progresser plus efficacement ses griefs. Si l’on met de côté ces conclusions plutôt spéculatives concernant les motivations des parties, M. Archambault a fourni une preuve claire sur les renseignements transmis pendant l’atelier. Plus particulièrement, M. Archambault a établi que l’atelier portait sur une note de service intitulée « Le point sur la représentation en matière de redressement » datée du 7 février 2007, qui renfermait un document intitulé « Protocole 1 – La représentation en matière de redressement et l’ACEP ».

26 Ce document décrit le rôle de l’Association et de ses représentants dans les procédures de redressement. Les procédures de redressement visées comprennent la représentation informelle; les griefs déposés aux termes de la convention collective (et les griefs déposés devant le Conseil national mixte (le « CNM »)); les griefs qui ne sont pas visés par la convention collective; les griefs de classification; les plaintes de harcèlement; les griefs de harcèlement; les lettres d’appel devant le CNM; les plaintes en matière de dotation; les plaintes présentées à la CCDP; les appels relatifs à l’indemnisation des accidents du travail; les procédures de réintégration d’un employé en milieu de travail. Les « principes généraux » qui s’appliquent à toutes les procédures qui précèdent sont décrits comme constituant l’engagement de l’Association à l’égard de relations du travail « professionnelles »; l’acceptation du devoir de représentation équitable de l’Association; l’autorité obligatoire conférée à l’Association aux termes de la convention collective, en vertu de laquelle elle doit être tenue strictement redevable; les questions de représentation volontaire dans le cadre desquelles l’Association peut accepter d’aider un membre et accepter l’obligation d’être entièrement redevable à l’égard des membres; la nécessité d’assumer une responsabilité financière dans la représentation des membres. En ce qui concerne les modalités particulières de la représentation, le document énonce plusieurs rôles et attentes dans les termes suivants :

[Traduction]

3.  Représentation

A) Généralités

  1. La responsabilité de la représentation en matière de relations de travail et d’emploi à l’ACEP incombe aux agents des relations de travail, qui relèvent du directeur des relations du travail.
  2. L’agent des relations de travail peut demander de l’aide à un dirigeant de section locale dans une question de représentation, notamment signer une formule de grief ou une formule de transmission de grief, communiquer des renseignements à un membre ou assurer la représentation même devant le représentant de l’employeur.
  3. Le rôle de l’ACEP en matière de représentation consiste notamment à renseigner le membre, évaluer son cas, fournir des conseils et préparer la représentation devant le représentant de l’employeur, un fournisseur de services, un conseil d’arbitrage ou d’autres tribunaux administratifs.
  4. L’ACEP plaide en faveur du membre; elle n’est pas un médiateur.
  5. Dans le cas où le membre ne lui fournit pas les renseignements ou les documents pertinents en temps opportun, l’Association refusera automatiquement de le représenter.
  6. Le directeur des relations du travail peut, en tout temps, décider de déroger au Protocole n° 1, pourvu que de telles dérogations soient dans l’intérêt de l’Association et de l’ensemble des membres.
  7. Le directeur des relations du travail décidera si l’ACEP soumettra un cas à l’arbitrage et/ou à la Cour fédérale. Si le membre a les options de se représenter lui-même ou de se faire représenter par une autre partie, il en sera informé par l’ACEP.
  8. Lorsque l’ACEP représente un membre individuel dans un cas, elle tient compte de son obligation légale envers ses membres et les groupes d’équité en matière d’emploi.

Dans son témoignage, le plaignant n’a pas reconnu de façon catégorique que ces questions ont fait l’objet de l’atelier sur la formation des délégués syndicaux auquel il a participé. Toutefois, elles sont tout à fait fondamentales, et j’accepte le témoignage de M. Archambault selon lequel elles s’inscrivaient dans le programme. Non seulement dans cette section, mais également pour les autres fonctions de représentation, le document note explicitement que l’Association prend des décisions en matière de représentation [traduction] « […] dans l’intérêt des membres en général et dans les intérêts du membre désireux de déposer un grief […] » ou pour que l’Association le représente d’une autre façon. Le plaignant a de la difficulté à comprendre ce principe ou à en accepter la pertinence en regard de situations particulières dans lesquelles il s’est retrouvé avec l’Association.

27 L’exposé qui précède au sujet de l’atelier sur la formation des délégués syndicaux constitue une mise en contexte importante pour ce qui suit. Le 14 juin 2007, le plaignant a envoyé un courriel au capitaine Quillan avec copies au lieutenant-colonel Simard et à Mme Kilby. Le courriel mentionnait que le plaignant désirait [traduction] « […] mettre fin à la suspension de son grief et le poursuivre individuellement ». Il a en outre [traduction] « […] mentionné qu’aucune prorogation à quelque niveau que ce soit sera accordée ». Toutefois, il n’a pas amendé le grief de façon à retirer la mention des violations de la convention collective. M. Archambault a répondu le 15 juin 2007 dans un courriel qui se lit comme suit :

[Traduction]

Tel qu’il a été mentionné précédemment dans le courriel que je vous ai envoyé en date du 13 avril 2007, l’ACEP vous a fait savoir qu’elle n’appuyait pas votre grief alléguant qu’il y a eu violation des clauses 16.01 et 35.01. Vous pouvez faire valoir votre allégation de harcèlement par vous-même sans être représenté par l’ACEP. Cependant, en ce faisant, vous ne pouvez pas invoquer les clauses 16.01 et 35.01. À cette fin, je vous demande respectueusement de confirmer ce qui précède à la direction et aux Ressources humaines dans votre secteur de travail d’ici le 19 juin 2007, sans quoi j’informerai les parties que vous ne pouvez pas faire valoir les clauses 16.01 et 35.01 dans votre grief. Ces éléments ne devraient pas vous surprendre, car les motifs justifiant la position de l’ACEP relativement à cette question vous ont été clairement communiqués dans un courriel en date du 13 avril 2007. Cordialement.

M. Archambault aurait également pu mentionner la formation des délégués syndicaux. Quoi qu’il en soit, il y a eu d’autres escarmouches entre le plaignant et M. Archambault le 28 juin, le 3 juillet et le 6 juillet 2007, au cours desquelles chaque partie a réitéré son point de vue respectif concernant le grief relatif au commissionnaire et la prochaine question qui fera l’objet de la présente décision.

28 Du point de vue de l’Association, le grief relatif au commissionnaire a franchi une certaine étape le 8 juillet 2007, date à laquelle le plaignant a envoyé le courriel suivant à M. Archambault :

[Traduction]

J’ai informé l’ACEP et le ministère, employeur, que l’Association n’appuie pas le grief auquel vous faites référence ci-dessous, qui porte le numéro 0093. J’ai avisé l’employeur de ce fait frappant lorsque la mise en suspens du grief a été levée. À cette fin, l’employeur a demandé si j’ai l’intention de modifier le grief en vertu de la clause 40.05, ce que je pourrais faire, car d’autres dispositions réglementaires pourraient être citées; quoi qu’il en soit, cette question n’est plus ni de votre ressort ni de celui de l’Association. Je me contenterai d’affirmer, pour d’autres motifs et avant que je prenne quelque mesure que ce soit, que je désirais donner à l’Association une dernière chance de reconsidérer sa position. L’Association, d’après votre courriel ci-après, l’a fait dans une certaine mesure, quoiqu’elle ne l’ait pas fait à ma satisfaction. Je me soucie peu de ce qu’est la politique de l’Association à l’égard de ce genre de chose, car la politique est peu professionnelle et lâche. Nonobstant ce qui précède, je crois que des décisions judiciaires récentes relatives à la recevabilité de la preuve ont conclu que les courriels peuvent être utilisés dans certaines situations comme preuves matérielles. Je devrai vérifier cette question plus minutieusement.

Comme l’Association m’a clairement mentionné qu’elle n’est pas partie à cette question, j’accepterai et je respecterai cette position. L’Association ne sera plus impliquée dans cette question. En outre, à titre de citoyen et de membre, j’ordonne à l’Association de se retirer et de s’abstenir de présenter des demandes, de s’impliquer à quelque degré que ce soit ou de prendre part à quelque communication ou correspondance sur la question.

Vous parlez des instructions de l’ACEP et vous mentionnez qu’elles sont « claires ». Je ne suis pas en possession de ces instructions claires. Je devrai les examiner à mon lieu de travail, si elles existent toujours, car mon employeur a pris connaissance illégalement de mes courriels.

Je ne voudrais pas que l’Association le prenne de la mauvaise façon, comme s’il s’agissait d’une menace; cependant, toute tentative de l’Association de manœuvrer ou d’enquêter dans mon dos, de [traduction] « faire des vérifications sur mon compte », ou de recueillir plus de renseignements concernant cet incident pour quelque motif que ce soit, sera considérée comme une obstruction, une instigation et de la mauvaise foi et sera réglée rapidement et avec rigueur. De fait, je ne veux pas entendre parler du tout du grief 0093 par l’Association pour quelque motif que ce soit. Est-ce bien clair? J’aurai le dernier mot sur cette question, comme je l’ai exprimé.

Bien qu’il soit possible de formuler différentes observations au sujet du ton de ce courriel, il constituait certes, et à juste titre du point de vue de l’Association, l’acceptation par le plaignant des obligations procédurales qu’il devait respecter uniquement pour donner suite à un grief individuel et une acceptation apparente de la décision de l’Association de ne pas le représenter dans la concrétisation de ce grief en particulier.

C. Mesure disciplinaire du 30 mars 2007

29 Entre avril et juin 2007, période au cours de laquelle le grief relatif au commissionnaire et le grief de harcèlement étaient à l’avant-scène des préoccupations entre le plaignant et l’Association, est survenu un autre conflit entre le plaignant et le ministère qui a également eu des répercussions sur sa relation avec l’Association. Dans ce cas, l’origine du conflit entre le plaignant et le ministère n’a pas été complètement examinée dans le cadre de la preuve, car aucun des participants principaux, à part le plaignant, n’a témoigné. Toutefois, une série de courriels ont été produits à partir desquels il est possible de déduire le contexte. Il semble qu’en sa qualité de gestionnaire des relations avec la clientèle, le plaignant a proposé que des [traduction] « employés volontairement en attente » dans le cadre d’une activité de divertissement en particulier participent à un « atelier » sur l’« accueil » devant être organisé par un consultant externe connu sous le nom de « Chrysalis Performance Strategies ». S’en sont suivies des discussions entre le plaignant et certains gestionnaires, dont le capitaine Quillan, ainsi qu’entre les gestionnaires, sur la question de savoir si des fonds pouvaient être mis à la disposition des intéressés à cette fin, et dans l’affirmative, à même quel budget. Des divergences de vue sont apparues sur la question de savoir si un tel atelier pouvait être considéré comme de la « formation » ou des « études », ce qui aurait pu exercer un impact sur la disponibilité des fonds demandés par le plaignant. Le capitaine Quillan a indiqué au plaignant ce qui, selon lui, constituait la source de financement appropriée et a ordonné au plaignant de suivre cette voie. Le plaignant estimait que la voie proposée ne pourrait être suivie à temps pour financer l’atelier avant l’événement, ce qui annulerait ses plans. En outre, il croyait que le capitaine Quillan était peu sincère et qu’il tentait vraiment de saboter l’atelier en proposant une méthode futile de collecte de fonds. Le 30 mars 2007, il a écrit le courriel suivant au capitaine Quillan :

[Traduction]

La réussite de cet événement n’est pas fonction dans une large mesure du recours par GCF aux services de Chrysalis; ainsi, vos tentatives de faire dérailler l’événement sans être considéré comme celui qui est à l’origine de ce déraillement échoueront également. Peut-être croyez-vous que si cet événement échoue, vous serez en mesure de m’en imputer la responsabilité. DE TELS ÉVÉNEMENTS N’ÉCHOUENT PAS. IL N’Y A PAS DE RÉUSSITE/D’ÉCHEC.

Peut-être prévoyez-vous ne pas occuper votre poste très longtemps. Vous poursuivrez votre chemin et obtiendrez des promotions et des accolades et votre carrière ne sera absolument pas touchée par ce qui se passe au cours de ce bref moment d’une importance secondaire avec ces gens.

Je vous dirais de ne pas vous inquiéter. Aucun croque-mitaine ne viendra vous chercher au cours de la nuit et aucun dieu courroucé et vengeur ne vous punira lorsque vous finirez par mourir. J’ignore si vous vous êtes rendu compte que parfois, en ce monde, des gens font des choses horribles et dégueulasses à d’autres personnes et s’en tirent. Ces personnes font ces choses sciemment et malicieusement et causent des ravages partout où elles passent et s’en tirent indemnes. Elles s’en tirent toujours sans dommage. Ces personnes possèdent le pouvoir, leurs amis possèdent le pouvoir, et ils en abusent constamment.

Mais je m’écarte du sujet.

Comme ce que j’ai mentionné importe peu, ce devrait être la même chose relativement à ce que vous avez proposé ou à ce que vous me recommandez comme comportement différent du vôtre. Toutefois, j’agirai différemment d’une façon principale. Lorsque des membres du personnel me demanderont pourquoi l’atelier n’a pas lieu, je ne leur mentirai pas; je leur dirai la vérité. Bonne journée!

Le plaignant a reçu immédiatement un courriel du lieutenant-colonel Simard, dont voici la teneur :

[Traduction]

J’estime que le contenu et le ton de votre courriel sont tout à fait inacceptables et nous ne les accepterons plus. Nous vous intimons donc de mettre immédiatement fin à ce type de comportement.

En ce qui concerne la question de la demande de formation, elle doit être traitée suivant la réglementation existante et conformément aux instructions du capitaine Quillan […]

Ce contre-temps a pris de l’importance pour les relations entre le plaignant et l’Association parce que le lieutenant-colonel Simard a non seulement envoyé une copie de sa réponse à M. Archambault, mais également parce qu’il a apparemment inclus toute la chaîne de courriels qui a provoqué le déferlement électronique du plaignant.

30 M. Archambault a fait face à un membre de l’Association qui était déjà engagé dans deux autres différends avec les principaux intervenants de la direction dans cet échange de courriels et l’Association était impliquée, ou potentiellement impliquée, dans la représentation de ce membre — le plaignant. Assez raisonnablement, M. Archambault a décidé de mettre le plaignant en garde. Le même jour, soit le 30 mars 2007, il a envoyé au plaignant le courriel suivant :

[Traduction]

Je recommande que vous vous conformiez aux instructions de M. Simard. Le ton et les insinuations de votre courriel sont inacceptables et ne sont pas conformes aux principes d’un milieu de travail respectueux. Ils pourraient donc entraîner des mesures disciplinaires si vous poursuivez dans la même voie. Je me rends compte de tout ce que vous vivez à l’heure actuelle et je sympathise avec vous, mais il est dans votre intérêt de cesser d’envoyer ce type de courriels.

Cordialement

Le plaignant a répondu à M. Archambault par courriel en date du 2 avril 2007 dans les termes suivants :

[Traduction]

Monsieur, je ne suis pas un lâche. Vous abandonnez trop tôt. La paix ne sera pas rétablie tant que ces racistes n’auront pas cessé leurs conneries.

31 Le 2 avril, à 10 h 14, le plaignant a répliqué par courriel au lieutenant-colonel Simard dans les termes suivants : [traduction] « Je vous demanderais s’il vous plaît de m’indiquer ce qui est « inacceptable » dans mon message et pourquoi ce l’est d’ici 12 h aujourd’hui. » Le 4 avril 2007, le lieutenant-colonel Simard a envoyé au plaignant un courriel débutant comme suit : [traduction] « […] les renseignements que vous demandez vous seront fournis de manière plus formelle sous peu ». Le courriel mentionnait en outre que le plaignant serait dégagé de la responsabilité d’organiser l’événement qui était au cœur de la controverse initiale sur le financement. Une procédure disciplinaire a été lancée à l’encontre du plaignant peu après relativement à son courriel du 30 mars. Toutefois, la lettre disciplinaire qu’il a reconnu avoir reçue n’a jamais été mise en preuve dans cette procédure. En outre, pour des motifs qui se clarifieront plus loin dans la présente décision, l’Association n’a jamais reçu non plus de copie de la lettre.

32 Le ministère, vraisemblablement du début à la mi-avril, a entrepris une enquête sur les circonstances qui ont mené à l’envoi par le plaignant de son courriel du 30 mars 2007. Il y a eu des discussions entre le plaignant et M. Archambault concernant l’éventualité et la façon de représenter de la meilleure manière le plaignant dans le cadre d’une « réunion d’enquête » à venir à laquelle ce dernier aurait apparemment été convoqué par le ministère. Le 12 avril 2007, M. Archambault a envoyé au plaignant un courriel relatif au courriel du 30 mars et au grief relatif au commissionnaire dont il a été question plus tôt dans la présente décision. Dans la mesure où ce dernier élément est concerné, M. Archambault a écrit ce qui suit :

[Traduction]

Tel qu’il a été discuté ce matin, la présente a pour but de confirmer que vous souhaitez que je sois présent, par vidéoconférence ou par conférence téléphonique, à la réunion d’enquête à venir qui portera sur la question susmentionnée. Sachez que si vous souhaitez que je sois présent à Halifax pour cette réunion, je peux prendre des dispositions pour y être.

En ce qui concerne la position que vous désirez adopter à la réunion d’enquête, il est dans votre intérêt de répondre aux questions qui seront formulées, car l’employeur s’en remettra à tous les faits qui seront soupesés dans sa décision. Pour que l’ACEP conteste adéquatement les conclusions du ministère, il importe que vous communiquiez tous les faits qui nous placeront dans la meilleure position. Comme je serai le représentant de l’ACEP en votre nom, je ferai également valoir que des éléments de procédure et de protection de la vie privée n’ont pas été respectés au cours de l’enquête, ce qui a porté préjudice à vos droits.

Le plaignant a répondu comme s’il commençait à croire que l’Association et le ministère étaient parties prenantes à un complot contre lui. Le 17 avril 2007, il a écrit ce qui suit :

[Traduction]

Comme je l’indiquais dans mon courriel de ce matin, je ne suis pas tout à fait certain encore que je souhaite être représenté par l’ACEP dans cette enquête. J’ai moi-même quelques questions pour lesquelles je dois obtenir une réponse et l’ACEP devra répondre à ces questions avant de pouvoir adopter le noble statut de représentant en mon nom dans cette affaire disciplinaire. J’ai également de nombreuses questions auxquelles le ministère doit répondre avant que je participe à son enquête, pour alléger mes préoccupations qui m’amènent à croire que cette soi-disant enquête est un peu plus qu’une chasse aux sorcières. Une fois que les deux camps auront répondu à ces questions à ma satisfaction, je prendrai une décision sur ce à quoi je m’assujettirai ou non. La mesure dans laquelle le ministère ou l’ACEP criera au scandale, protestera ou prendra des mesures à l’égard de ma position m’importe peu, car des pressions ne m’amèneront pas à me sacrifier.

M. Archambault, en réponse au plaignant le 18 avril 2007, a indiqué que le plaignant pourrait subir des conséquences disciplinaires défavorables s’il omettait d’assister à la réunion et a mentionné ce qui suit : [traduction] « Si vous refusez de vous conformer aux recommandations de l’ACEP d’assister à une réunion disciplinaire tel que mentionné précédemment, cette décision pourrait avoir une incidence sur notre capacité de vous représenter. » Il a alors conclu en rappelant que le plaignant avait le droit de contester les conclusions et les mécanismes du ministère.

33 D’autres éléments préoccupaient les parties au cours du mois de mai 2007. Il en sera question ultérieurement dans la présente décision. Toutefois, le 28 juin 2007, le plaignant a envoyé un courriel à M. Archambault concernant le grief relatif au commissionnaire et son renvoi à l’arbitrage (avec un avis à la CCDP), le grief de harcèlement, et la mesure disciplinaire rattachée au courriel du 30 mars 2007. En ce qui concerne les deux dernières questions susmentionnées, le plaignant demandait maintenant [traduction] « […] une lettre signée, sur papier à en-tête de l’Association […] », mentionnant clairement [traduction] « […] que l’ACEP ne le représenterait pas dans ces différends ». Le 3 juillet 2007, M. Archambault et le plaignant ont eu une conversation au sujet de la « représentation par l’association » relativement aux trois questions alors en litige. Le plaignant a alors envoyé à M. Archambault un long courriel de confirmation, qu’il termine en répétant sa demande formelle d’une [traduction] « déclaration de l’ACEP » selon laquelle elle ne le représenterait pas dans le grief de harcèlement et dans la mesure disciplinaire du 30 mars. Le passage suivant du courriel expose le ton de la réflexion du plaignant à ce moment-là :

[Traduction]

[…]

Comme nous l’avons clarifié pendant notre discussion, l’Association n’a pas affirmé qu’elle ne me représenterait pas concernant les questions qui touchent les mesures disciplinaires prises par mon unité; toutefois, compte tenu de la position partiale de l’Association sur le ton du courriel sur laquelle mon employeur a exercé une influence, et de sa directive de me mettre en garde au sujet du ton de mon courriel, je crois que je ne serais pas bien servi par l’Association sur cette question. Je dis que l’Association est partiale parce qu’elle a rendu un jugement hâtif sans disposer de tous les faits et renseignement. Je ne fournirai pas non plus tous les faits et tous les renseignements, parce que j’en ai plus qu’assez d’avoir à prouver mes prétentions à l’Association. J’estime que l’Association accepte de manière beaucoup trop complaisante la souveraineté de l’employeur et tout ce qui l’accompagne et qu’elle est beaucoup trop empressée de nier ma position.

[…] [En ce qui concerne différentes questions]

On s’attend et on exige que je me comporte de manière à respecter des normes beaucoup plus élevées que toute autre personne qui fait partie de cette unité. Pourtant, même lorsque l’Association obtient des preuves d’illégalité de la part de mon employeur, elle tente de nier cette preuve et de me compliquer effectivement la tâche. L’Association n’applique pas de norme cohérente à l’acceptation de prétentions et si elle le fait, elle garde certes le secret et ne le révèle pas. Je crois que l’Association a largement excédé ce qui est raisonnable.

[…]

Le plaignant a également ajouté ce qui suit : [traduction] « Je crois très sincèrement que je livre un combat pour mon honneur, ma réputation et ma vie professionnelle au sein du gouvernement, essentiellement au sein de la direction de cette unité. » Ces propos ont tous été rédigés après la discussion ayant débouché sur une confrontation entre le plaignant et M. Ouellette avant le retrait formel du grief relatif au commissionnaire.

34 M. Archambault, qui craignait peut-être à ce stade que le plaignant allègue une violation éventuelle du devoir de représentation équitable, a tout simplement refusé de dire au plaignant que l’Association ne le représenterait pas dans la procédure disciplinaire relative au courriel daté du 30 mars. Le 6 juillet 2007, il a fait parvenir au plaignant un courriel qui mentionnait essentiellement que l’Association ne possédait pas assez de renseignements pour prendre une décision sur la question. Le courrielrédigé avec soin se lit comme suit :

[Traduction]

Pour faire suite à votre courriel du 3 juillet 2007, je vous remercie d’avoir clarifié la position de l’Association selon laquelle celle-ci ne vous représentera pas relativement aux questions qui touchent une allégation d’inconduite découlant d’un courriel que vous avez fait parvenir au capitaine Quillan en date du 30 mars 2007, qui a entraîné la tenue d’une enquête menée par la direction. Votre commentaire contenu dans votre courriel du 3 juillet 2007 selon lequel l’Association fait preuve de partialité dans cette affaire n’est pas fondé et, bien honnêtement, est inutile en l’instance.

Aucune mention n’a été versée au dossier qui suggérerait ou confirmerait que l’Association ne vous représenterait pas dans cette affaire. De fait, dans un courriel que je vous ai fait parvenir le 12 avril 2007, je vous ai conseillé de vous préparer à la réunion d’enquête et je vous ai offert de prendre part à la réunion par conférence téléphonique. Vous m’avez répondu dans un courriel daté du 17 avril 2007 que vous n’étiez pas tout à fait certain que vous souhaitiez que l’ACEP vous représente dans le cadre de l’enquête.

Ce n’est que le 28 juin 2007 que vous avez de nouveau porté la question susmentionnée à mon attention. Vous avez alors demandé que l’Association vous fournisse une lettre signée, sur papier à en-tête de l’Association, indiquant qu’à l’égard des mesures disciplinaires prises par l’employeur à votre endroit à la suite de son enquête, l’Association ne vous représenterait pas relativement à ces questions.

Prenez note que l’Association examinera avec soin le bien-fondé de cette affaire conformément au protocole de l’ACEP sur la représentation. À cette fin, pour procéder à l’examen de cette question, il me faudra obtenir la lettre de mise en garde qui vous a été envoyée à la suite de l’enquête de la direction. Une fois que j’aurai reçu la lettre, je vous communiquerai une décision sur la question de savoir si l’Association vous représentera ou non.

Si vous décidez de contester par grief les mesures disciplinaires prises récemment par l’employeur, vous devez déposer le grief dans les 25 jours ouvrables qui suivent la date à laquelle vous avez reçu la lettre de mise en garde, et tel qu’il a été mentionné précédemment, vous ne pouvez pas faire valoir des clauses ou des articles de la convention collective sans autorisation expresse de l’Association.

Le 11 juillet 2007, le plaignant a répondu, essentiellement en faisant valoir qu’il avait fourni tous les renseignements dont l’Association avait besoin pour prendre une décision et en se plaignant que l’Association refusait de lui dire si elle le représenterait dans le grief de nature disciplinaire concernant le courriel du 30 mars, qu’il dit maintenant avoir lui-même déposé auprès du ministère dans la période de 25 jours qui convient et dans lequel il alléguerait une violation de la clause 16.05 de la convention collective sur la discrimination raciale. Le document de grief lui-même, s’il existe, n’a jamais été mis en preuve. D’après M. Archambault, l’Association n’a jamais reçu la documentation ou les renseignements de nature factuelle dont elle avait besoin pour établir si elle pouvait appuyer le grief. Malgré les prétentions du plaignant à l’effet contraire, il n’a soumis aucune preuve qui établit son argumentation selon la prépondérance des probabilités, et le témoignage de M. Archambault, étayé par le courriel au dossier, est crédible et convaincant. Enfin, le 11 juillet 2007, M. Archambault a envoyé le courriel suivant, qui réitère la position de l’Association en termes brefs et explicites :

[Traduction]

Je vous remercie de votre patience. Je reviens tout juste des bureaux de Statistique Canada, après deux jours de négociations.

En réponse à votre question, je peux vous communiquer la position de l’Association concernant la question susmentionnée à laquelle j’avais déjà répondu partiellement le 6 juillet 2007. Comme vous le comprendrez, pour que l’Association puisse procéder à une évaluation adéquate de votre dossier, nous devons recevoir tous les renseignements qui sont disponibles. Comme je l’ai démontré dans le courriel que je vous ai envoyé le 6 juillet 2007, je n’ai pas complètement pris part à cette instance pour respecter votre volonté, et je n’ai pas non plus reçu une copie de la décision de l’employeur qui a mené à une lettre de mise en garde. Pour que l’Association effectue une évaluation adéquate et juste du bien-fondé de cette affaire, je dois recevoir une copie de la lettre de mise en garde qui fournira d’autres faits dont j’ai besoin pour mon évaluation.

D’après les renseignements et les faits dont je dispose à ce jour, y compris l’information que vous m’avez fournie, et après un examen minutieux, l’Association estime que sur la base des faits et de la preuve qui me sont soumis, l’Association ne soutiendra pas le grief que vous avez déposé par vous-même, dans lequel vous alléguez qu’il y a eu violation de la clause 16.01. Tel qu’il a été mentionné précédemment, prenez note que vous n’êtes pas autorisé à faire valoir la clause 16.01 ou toute autre clause de la convention collective de l’ACEP.

L’Association reconsidérera sa position d’appuyer votre grief si elle obtient la lettre de mise en garde produite par l’employeur et/ou tout autre nouveau renseignement ou fait que vous pouvez fournir à l’Association.

Les parties étaient apparemment dans une impasse sur la question de la mesure disciplinaire du 30 mars. Toutefois, le plaignant avait le fardeau de la preuve dans cette situation et doit subir les conséquences de son défaut d’informer adéquatement l’Association du fondement factuel de la preuve qu’il devrait présenter si celle-ci décidait de le représenter.

D. Sondage pour les employés sur les paramètres

35 Dans la mesure où le plaignant et le ministère étaient concernés, la majeure partie du mois de mai 2007 a fait l’objet d’un différend au sujet des paramètres d’un sondage à l’intention des employés (les « paramètres ») que le ministère avait demandé au plaignant de remplir avant la fin de novembre de cette année-là. Le plaignant avait mené de tels sondages par le passé, mais la direction avait maintenant modifié les paramètres et les délais. Le 14 mai 2007, le capitaine Quillan a demandé que la direction approuve officiellement la réalisation par le plaignant du sondage en fonction des nouveaux paramètres. Le lieutenant-colonel Simard a donné le feu vert le 17 mai 2007, renseignement qui a été transmis au plaignant le même jour. Le plaignant a répondu immédiatement que les paramètres comportaient [traduction] « […] des erreurs substantielles et enfreignaient la convention collective de l’Association […] » et a ajouté [traduction] « [v]euillez réviser les paramètres, à défaut de quoi je devrai déposer un grief ». Le capitaine Quillan a répondu le 23 mai 2007 en faisant valoir que les paramètres avaient été [traduction] « […] élaborés avec le plus grand soin et ne comportent pas de modifications substantielles par rapport à la version précédente […] que vous avez utilisé par le passé ». Il a conclu : [traduction] « Vous êtes tenu de vous conformer aux paramètres fournis et nous vous ordonnons de le faire. » Le même jour, le plaignant a répondu en formulant un certain nombre d’objections à la tâche dans les termes suivants : 1) le rapport d’étape mensuel était nouveau et il est permis de croire qu’il va au-delà de sa description de travail; 2) les paramètres ne pourraient être réalisés au moyen d’outils de mesure connus; 3) [traduction] « […] je n’accolerai pas mon nom et ma réputation professionnelle à une manœuvre procédurale conçue pour produire sciemment une série de fausses données simulées afin de les mettre à la disposition des intéressés »; 4) il ferait rapport de la question au vérificateur général et déposerait une plainte formelle pour « corruption »; 5) [traduction] « [m]aintenant, vous pouvez soit modifier le document pour corriger ce que j’estime être un grave manquement à votre devoir soit ne pas le faire ». Le 29 mai 2007, le plaignant a envoyé une série de courriels dans lesquels il demande une réponse au précédent, demande des prorogations, demande au lieutenant-colonel Simard de fournir des instructions écrites pour effectuer la tâche et demande d’être dégagé de l’obligation de rapport mensuel pour le mois en cours, sans parler de la corruption, du manquement au devoir, des rapports aux autorités supérieures, etc. Le capitaine Quillan a répondu ce qui suit le même jour au courriel initial du plaignant daté du 23 mai 2007, en faisant preuve d’une retenu et d’une brièveté admirables :

[Traduction]

Réponse au courriel du 23 mai (4 paragraphes rédigés le 23 mai)

Point 1. Un calendrier de rapport de 1 mois est plus que raisonnable. Si une clause de votre convention collective ou de votre description de travail prévoit que vous n’êtes pas tenu de faire rapport de vos progrès au travail à votre superviseur/à la direction, veuillez l’indiquer.

Point 2. Le calendrier de réalisation du sondage est suffisant et les paramètres ont été approuvés par l’OGCF. Voir la réponse au courriel (23 mai, 12 h 38).

Point 3. Il n’y a aucune intention subversive.

Point 4. Vous devez respecter les paramètres approuvés comme il vous est donné instruction de le faire.

Ce même jour, d’autres courriels sur la signification, la mise en œuvreet la modification des paramètres ont été échangés.

36 Le 31 mai 2007, le plaignant a fait parvenir au capitaine Quillan un courriel comportant 14 points dans lequel il énumère ses objections à l’attribution de paramètres. Dans ce courriel, il se désigne à la troisième personne comme « le GRC » (gestionnaire des relations avec la clientèle). Le courriel comportant 14 points se termine par les deux paragraphes suivants :

[Traduction]

Vous avez attribué une tâche, donné un échéancier de réalisation de cette tâche, et affecté la responsabilité de la réalisation de celle-ci; cependant, vous avez négligé d’indiquer sur quelle base la tâche sera accomplie, quelle méthode et quels outils doivent être utilisés pour obtenir le degré d’intensité souhaité et vous avez refusé d’apporter des modifications et vous vous êtes incrusté dans votre position.

Je ne vois pas d’autre possibilité que celle de déposer des accusations contre vous et l’unité, car la demande représente non seulement un écart important par rapport au travail auquel on s’attend du GRC, mais indique également que vos échecs constituent du harcèlement et de la discrimination, car même l’unité elle-même ne peut clarifier la situation ni exposer un fondement hiérarchique qui justifierait la demande. Je m’excuse, mais il n’existe aucune autre façon de faire parce que l’unité a creusé son propre trou. En outre, tant que ces questions de grief et de harcèlement n’auront pas été clarifiées, on ne peut s’attendre à ce que le GRC livre ces produits finis.

Le plaignant a acheminé une copie de ce courriel à M. Archambault le 12 juin 2007 en pièce jointe à un courriel qui portait sur le problème des paramètres et sur d’autres questions. En ce qui concerne le problème des paramètres, le plaignant a demandé que l’Association approuve le libellé d’un projet de grief afin qu’il puisse le présenter d’ici le 15 juin. Toutefois, M. Archambault a répondu le 13 juin. Voici une partie de sa réponse :

[Traduction]

[…]

En ce qui a trait à votre première question, avantque l’ACEP assure une représentation dans ce type de grief, et avant d’avaliser le grief, je devrai examiner le fondement du grief que vous entendez déposer. S’il touche une question de classification, les règles qui permettent à un employé de contester son niveau de classification sont rigoureusement prescrites par la politique du Conseil du Trésor. À titre d’employeur, le Conseil du Trésor possède des droits exclusifs en matière de classification en vertu de l’article 7 de la LRTFP. En résumé, pour contester votre niveau de classification, vous devez avoir une décision officielle de l’employeur établissant que votre poste a été examiné et évalué, décision qui sera suivie d’une décision formelle en matière de classification qui portera sur votre poste. Vous serez alors informé par écrit que vous pouvez contester la décision sur la classification dans les 25 jours ouvrables suivants. Avant de pouvoir vous faire part d’une position claire sur cette question, vous devrez me fournir tous les détails au sujet de cette question. Après l’examen de cette question par l’ACEP, dans l’éventualité où l’ACEP ne vous représente pas, vous pouvez déposer le grief par vous-même.

En ce qui concerne le courriel que vous avez fait parvenir au capitaine Quillan le 31 mai 2007, les préoccupations dont vous lui faites part sont raisonnables et justes. Cependant, votre refus implicite de réaliser les produits finis qui a été établi par la direction pourrait être considéré comme de l’insubordination. À moins que votre santé et votre sécurité ne soient en péril, vous ne pouvez pas refuser d’exécuter les fonctions qui vous sont demandées par l’employeur. Il y a un énoncé bien connu en relations du travail qui résume ce concept juridique : « Obéir d’abord, se plaindre ensuite ».

[…]

Dans un courriel daté du 14 juin qui portait sur différentes questions, le plaignant a informé M. Archambault qu’en ce qui a trait à la question des paramètres, il ne refusait pas de travailler, mais tentait plutôt de comprendre [traduction] « […] ce qu’on lui demandait de faire ». Il a ensuite demandé [traduction] « [p]ourquoi le fait de poser des questions sur la tâche demandée équivaut-il à de l’insubordination? » Il s’agissait nettement d’une grave méprise, de la part du plaignant, de la situation dans laquelle il s’est retrouvé.

E. Horaire flexible

37 Vers cette période à la mi-juin, il est survenu un autre incident entre le plaignant et son superviseur, le capitaine Quillan. Il semble que des questions aient été posées au sujet des allées et venues du plaignant au cours de ses heures de travail et que la question a été soulevée au cours d’une réunion avec le commandant. Pour régulariser les heures de présence et les heures de travail du plaignant, le capitaine Quillan lui a fait parvenir un courriel en date du 14 mai 2007 dans lequel il lui demande, en conformité avec la réglementation sur l’« horaire flexible », de choisir un quart régulier de huit heures débutant à l’heure ou à la demi-heure entre 7 h et 17 h, ces heures correspondant aux heures de bureau à son lieu de travail. D’après un courriel de confirmation envoyé par le capitaine Quillan le 7 juin, le plaignant aurait choisi de travailler de 8 h à 16 h avec une demi-heure de pause-repas. Le capitaine Quillan a demandé d’être informé dans l’éventualité où le plaignant n’est pas en mesure d’être présent au cours de ces heures et fait mention de la lettre d’un conseiller qui a découlé de l’incident sur la présence du plaignant en date du 19 décembre 2006 décrit précédemment dans la présente décision. Le plaignant, dans un courriel de réponse, a pris ombrage du fait que des gens s’informaient de ses allées et venues et a exigé de savoir qui posait les questions. Il se demandait également si une absence entre 8 h et 16 h était considérée comme une violation des règles de présence, et s’est opposé à toute mention des événements du 19 décembre 2006 et sur leur suite, car ils faisaient l’objet du grief de harcèlement. Le 8 juin 2007, le capitaine Quillan a répondu par courriel qu’il exigeait de connaître les allées et venues du plaignant pendant ses heures de travail et il a renvoyé le plaignant au site Internet qui expose la réglementation. Toutefois, il n’a pas précisé au plaignant qui s’informait de ses allées et venues. Le 11 juin, le plaignant a envoyé un courriel dans lequel il exigeait de savoir qui posait des questions à son sujet afin qu’il puisse [traduction] « contacter ces personnes ». À ce stade, le capitaine Quillan lui a répondu laconiquement : [traduction] « Vous avez vos heures de travail et des manières de faire face aux problèmes. » Le plaignant a dit qu’il a déposé un grief sur cette question le 19 juin 2007.

38 Le plaignant a communiqué à l’Association des copies des échanges de courriel sur les horaires flexibles qui précèdent, qui chevauchent dans le temps le différend du plaignant avec le ministère sur les paramètres. Son courriel d’accompagnement envoyé à M. Archambault le 21 juin 2007 est ainsi rédigé :

[Traduction]

Comme vous et l’Association pouvez le constater facilement, ce superviseur affiche le plus grand manque de respect à mon égard et méprise le processus de règlement des griefs. Notez comment, malgré ma mise en garde, il me met au défi de déposer un grief comme s’il n’en avait cure. Peut-être que lui et le reste de l’unité et du ministère connaissent des choses que j’ignore. Peut-être que leur niveau de confiance découle d’une connaissance antérieure ou interne des réactions possibles de l’Association. La question à laquelle il me semble impossible d’obtenir une réponse est la suivante : s’ils ont une connaissance préalable de la réaction éventuelle de l’Association, d’où pourraient-ils obtenir cette connaissance? En outre, même si mes courriels envoyés de ce bureau sont interceptés et lus par des responsables du ministère, cela n’explique toujours pas le degré évident d’aise qu’il faut avoir pour répondre comme ils l’ont fait, non?

Ayant choisi d’ignorer le ton douteux concernant la collusion entre l’Association et le ministère, pour ne rien dire du complot en milieu de travail, M. Archambault a rédigé la réponse qui suit, qui s’en tenait aux questions de fond :

[Traduction]

Le courriel actuel ainsi que les précédents auxquels j’ai répondu récemment ne constituent pas une violation de la convention collective, de lois ou de règlements, et j’estime que le fond des questions et des préoccupations que vous soulevez s’inscrivent dans les droits de la direction. Je crains que la direction que vous empruntez en soit une de confrontation, qui mène à une position insoutenable, dans laquelle il sera très difficile pour l’Association de vous aider efficacement.

Vous avez le choix de travailler avec la direction pour apaiser vos préoccupations et régler vos problèmes dans un contexte non conflictuel, ou de continuer à défier formellement l’employeur, ce qui nous a montré clairement, d’après notre expérience, que la relation avec l’employeur ne serait pas alors résolue ou améliorée.

L’ACEP vous incite à adopter l’approche non conflictuelle. À cette fin, si vous acceptez que l’Association aborde l’employeur pour tenter d’obtenir une intervention informelle d’un tiers, de préférence avec les services de médiation offerts par la Commission des relations de travail dans la fonction publique, veuillez fournir une réponse d’ici le 26 juin 2007. Pour que la médiation soit réussie, les parties ne doivent pas lui imposer de conditions préalables.

Sachez que si vous continuez à préconiser l’approche conflictuelle, l’Association n’est pas prête à déposer un nombre illimité de griefs, car ce ne serait ni dans votre intérêt ni dans celui de l’Association. De plus, l’Association dispose de ressources limitées pour répondre à toutes vos demandes de renseignements et questions.

Je vous remercie de l’attention que vous porterez à cette question.

Ce courriel n’a rien fait pour apaiser les craintes de collusion du plaignant. Le 22 juin 2007, il a envoyé deux courriels à M. Archambault. Le premier constituait essentiellement une défense de fond de sa conduite et de son dossier professionnel dans le contexte d’un milieu de travail qui adoptait un [traduction] « cadre d’amélioration continue », qui selon ses dires n’était pas compris par l’Association, qu’il accusait de [traduction] « […] fonctionner dans le passé sur la base de présomptions historiques sur les rôles entre l’employé et l’employeur ». Le second courriel réaffirmait la croyance du plaignant selon laquelle contrairement au point de vue de M. Archambault, le ministère avait violé la convention collective de l’Association. Il a conclu en ces termes :

[Traduction]

[…]

J’appuie sans réserve la résolution de problème au palier le plus bas. Toutefois, la notion selon laquelle je dois déposer des griefs seulement à la pleine lune, lorsque les planètes sont alignées sur Neptune et que le coq chante deux fois n’est pas celle à laquelle j’adhérerai ni celle à laquelle je suis tenu d’adhérer bientôt.

Une fois encore, dans le cas du différend sur l’horaire flexible comme dans le cas d’autres différends récents, l’Association n’est pas parvenue à convaincre le plaignant de sa position, et il a décidé « d’agir seul ».

F. Formule de demande de congé

39 La prochaine question qui a occasionné des frictions entre le plaignant et l’Association a apparemment débuté par un simple malentendu entre le plaignant et le ministère. Il semble qu’au début de juillet 2007, le plaignant a demandé un congé payé. Il savait qu’il était rémunéré sur la base de 7,5 heures par quart de travail et il aurait rempli une formule dans laquelle il décrivait quels jours et quelles heures il souhaitait prendre en congé, les quarts allant de 8 h 30 à 16 h (la formule comme telle n’a jamais été mise en preuve). Relativement à ces questions, la convention du ministère prévoyait que les employés demandent comme congé leur quart régulier de 8 heures, étant entendu qu’une pause-repas d’une demi-heure est toujours prévue, et qu’ils seraient rémunérés pour seulement 7,5 heures par quart pris en congé. Le superviseur du plaignant a révisé ou « corrigé » la demande de congé payé du plaignant afin qu’elle soit conforme à la convention administrative du ministère en indiquant que chaque quart de travail ayant fait l’objet d’une demande de congé payé débuterait à 8 h plutôt qu’à 8 h 30 tel qu’il était indiqué par le plaignant.

40 Assez étrangement, ce geste du capitaine Quillan a été interprété par le plaignant comme [traduction] « du harcèlement et de la dépréciation », pour reprendre les mots de son courriel envoyé au capitaine Quillan le 5 juillet 2007. Le plaignant a ensuite donné au capitaine Quillan les instructions suivantes sur la façon de traiter ses demandes de congé :

[Traduction]

Si vous désirez contester une formule de congé que j’ai présenté, je vous demande respectueusement d’indiquer votre opposition et de me renvoyer les formules de congé non signées afin que je les modifie. Si je suis d’accord avec vos objections, j’apporterai les corrections et présenterai de nouveau les formules, ou je vous présenterai ma position. Je vous remercie de votre collaboration.

Dans son courriel en réponse envoyé le même jour, le capitaine Quillan s’est excusé à lui dans les termes suivants tout en acceptant de se conformer à ses désirs :

[Traduction]

Je m’excuse que mes gestes […] aient été interprétés de manière si négative. Je peux vous assurer qu’il n’y avait aucune malveillance de ma part. En général, les petits oublis et les corrections administratives de cette nature sont fréquents et sont effectués en conséquence. Mon seul but était d’accélérer le traitement de votre demande de congé. Les formules de demande de congé vous seront renvoyées à des fins de correction dans l’avenir.

Le plaignant, dans sa réponse au capitaine Quillan en date du 6 juillet 2007, avait initialement prétendu accepter les excuses de ce dernier, mais l’a alors critiqué sous prétexte qu’il n’a pas utilisé le préfixe « M. » devant son nom de famille ni ne l’a appelé « Monsieur » dans son  courriel de salutation. Le plaignant a qualifié cette prétendue omission de [traduction] « manquement insultant et négligent » dont ses supérieurs seraient tenus responsables. Le capitaine Quillan a ensuite expliqué dans un courriel de retour qu’il souhaitait que [traduction] « […] la logique et le professionnalisme prévaudraient et que le destinataire accorderait à l’expéditeur le bénéfice du doute et reconnaîtrait l’absence d’intention malveillante ». Le capitaine Quillan a également demandé que le plaignant examine leur correspondance par courriel antérieure, qui selon ses dires [traduction] « […] a toujours été rédigée avec le plus grand soin et dans le plus grand respect ». Il a terminé en exprimant ce qui s’est révélé être de l’optimisme injustifié : [traduction] « J’espère que nous pourrons mettre ce problème derrière nous. »

41 Cette réponse tout à fait teintée de civilité du capitaine Quillan a provoqué le plaignant. Dans un courriel envoyé au lieutenant-colonel Simard et à M. Archambault, de l’Association, le 9 juillet 2007, le plaignant a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

C’est du harcèlement. C’est intentionnel. C’est malveillant. C’est raciste et rabaissant. L’objectif consiste à me rabaisser, à me flatter, à m’humilier et à m’embarrasser et il est complètement et entièrement anormal. Mission accomplie.

Quel est son problème, à ce type? Il espère que « la logique » et « le professionnalisme » prévaudront et que le destinataire accordera à l’expéditeur le bénéfice du doute. Voyons si je comprends bien. Si lui, à titre d’expéditeur, est dans l’erreur et n’obtient pas le bénéfice du doute, cela fait de moi, le destinataire prévu, une personne qui manque de logique et de professionnalisme? De quel type de bouillie pour les chats s’agit-il?

La logique et le professionnalisme sont ce que j’ai respectueusement demandé de sa part. La meilleure réponse qu’il puisse produire en guise de défense/d’attaque consiste à se porter davantage à l’offensive et à tourner l’argument à l’absurde. Vérifions ce qu’il en est. S’il ne fait pas les choses correctement (c’est-à-dire s’il ne fait preuve ni de logique ni de professionnalisme) et si je le reprends sur ce point, je manque de logique et de professionnalisme? Je suis ignorant parce que je lui demande des comptes sur son ignorance. À quel niveau se trouve-t-il? Quelle stupidité! Si le capitaine Quillan avait environ 8 ans, je m’attendrais à ce genre d’enfantillage. Ce n’est pas un enfant, ce qui fait que ses gestes ne correspondent pas à une incapacité enfantine de raisonner, mais sont plutôt des abus commis à dessein par un adulte.

Je ne devrais même pas avoir à préciser que je désire porter des accusations.

Le lieutenant-colonel Simard, dans une réponse modérée produite en date du 11 juillet 2007, a fait les deux choses suivantes : 1) il a demandé au plaignant de transformer ses allégations formulées dans des courriels en une plainte inscrite dans une formule (qu’il a jointe) qui s’inscrivait dans les lignes directrices du ministère sur la prévention et la résolution du harcèlement; 2) il a déclaré qu’il estimait qu’une partie du contenu des courriels du plaignant étaient [traduction] « tout à fait inappropriés » et il a mentionné qu’il [traduction] « […] déposerait un avis d’allégation d’inconduite ».

42 Dans une réplique datée du 11 juillet 2007 faite au lieutenant-colonel Simard, avec copies envoyées à MM. Archambault et Ouellette et à d’autres responsables de l’Association, le plaignant a tenté de déplacer la scène de ce différend entre lui et le ministère. Le plaignant prétendait agir en qualité de « délégué syndical » pour l’Association et soutenait par conséquent que sa [traduction] « […] communication n’est pas assujettie aux mêmes contraintes qu’entre un employeur et un employé, ce qui fait que le processus disciplinaire ne s’applique pas ». M. Archambault a témoigné que bien que le plaignant avait suivi le cours qui lui conférait les qualifications pour être un délégué syndical, il n’avait jamais obtenu une telle nomination de la part de l’Association. M. Archambault a mentionné qu’il existait une procédure formelle de nomination des membres à de tels postes et que personne ne pouvait raisonnablement conclure qu’une personne est devenue un délégué syndical simplement en suivant la formation. À l’audience, le plaignant a néanmoins fait valoir qu’il croyait qu’il était un délégué syndical simplement parce qu’il avait pris part à l’atelier de juin. Je conclus que le témoignage du plaignant sur ce point est très peu plausible et n’est pas digne de foi. Toutefois, même si l’on croyait que l’Association lui avait conféré d’une quelconque façon le pouvoir manifeste d’agir comme délégué syndical, sa communication avec le capitaine Quillan, le lieutenant-colonel Simard et M. Archambault sur la question de la formule de demande de congé était nettement celle d’un employé courroucé. Ses courriels ne pourraient aucunement être interprétés comme l’action d’un délégué syndical responsable et dans les faits, ils ne l’ont pas été. Ce fait n’a aucunement été modifié par le courriel du plaignant daté du 12 juillet 2007, dans lequel il a établi clairement comment il signerait ses courriels subséquents lorsqu’il agit comme un employé d’une part ou comme « représentant syndical » d’autre part. Également le 12 juillet 2007, le plaignant a fait valoir, par courriel, que contrairement à toute évaluation raisonnable des faits, en modifiant les formules de demande de congé ou en exigeant qu’elles soient remplies conformément à son interprétation de ses propres règlements, la direction du ministère exigeait qu’il se livre à une fraude criminelle. Les membres de l’Association doivent avoir compris que cette affirmation est sans fondement, mais M. Archambault a pris bien soin de ne pas décrire l’allégation de manière à provoquer le plaignant.

43 Le 13 juillet 2007, M. Archambault a fait parvenir un courriel au plaignant pour l’informer que [traduction] « […] l’ACEP n’interviendra ni ne participera » à la question de la formule de demande de congé. En outre, il a exposé la vision de l’Association selon laquelle [traduction] « […] cette question représente une autre indication que vous ne souhaitez pas adopter une approche non conflictuelle avec l’employeur ». Il a aussi demandé instamment au plaignant de se reporter à son courriel du 22 juin (voir le paragraphe 15 de la présente décision) et a mentionné que s’il ne le faisait pas, cela [traduction] « […] pourrait mettre en péril notre capacité de vous représenter ». Dans un courriel daté du 16 juillet 2007, le plaignant a indiqué que le terme « non conflictuel » dans ce contexte signifiait que l’Association lui disait [traduction] « […] ferme-la parce que nous en avons assez de faire affaire avec toi ». Le 24 juillet 2007, M. Archambault a envoyé le courriel qui suit :

[Traduction]

Pour faire suite aux courriels que je vous ai fait parvenir en date du 22 juin et du 16 juillet 2007, le fait que vous adoptiez sans cesse une approche conflictuelle avec la direction tel qu’il est exposé ci-après n’est pas productif et va à l’encontre des valeurs de l’ACEP qui ont établi clairement que l’approche conflictuelle ne réglera ni n’améliorera votre relation avec l’employeur.

En outre, l’ACEP a examiné avec soin les faits et les témoignages qui entourent l’allégation de harcèlement et de discrimination que vous avez formulé dans vos courriels ci-après datés du 9 juillet et du 11, du 12 et du 23 juillet 2007 (autre courriel) et l’ACEP est d’avis qu’il ne serait pas fondé de vous appuyer et de vous représenter dans ces affaires.

À cette fin, l’ACEP vous incite encore une fois à préconiser une approche différente comme je le mentionne dans le courriel que je vous ai envoyé le 22 juin 2007. Si vous ne suivez pas les recommandations de l’ACEP, votre choix pourrait mettre en péril la capacité de l’Association de vous représenter.

Ce même jour, le plaignant a écrit à M. Archambault pour lui dire que sa position [traduction] « […] représente un autre exemple du défaut de l’Association de le représenter […] » et qu’il contacterait le directeur exécutif de l’Association, José Aggrey. Les 24 et 25 juillet 2007, il y a eu un autre déferlement de courriels dans lesquels le plaignant a tenté de justifier sa position en long et en large, tandis que l’Association a réitéré son point de vue selon lequel ses prétentions concernant la formule de demande de congé n’étaient pas fondées.

44 En ce qui a trait au ministère, le plaignant avait écrit au lieutenant-colonel Simard le 23 juillet 2007 pour lui indiquer qu’il ne se servirait pas de la formule de grief de harcèlement du ministère parce qu’il s’agissait d’une « tactique de ralentissement » et d’une [traduction] « […] preuve redondante et complémentaire de discrimination et de harcèlement ». Il a en outre exigé que le lieutenant-colonel Simard fasse enquête rapidement sur sa prétention de harcèlement, sinon [traduction] […] la Cour fédérale statuerait sur la question très rapidement ». Il a ajouté qu’il avait [traduction] « […] des droits prévus par la Charte qui prévalent sur toute disposition législative ou réglementaire de droit du travail que ce ministère pourrait faire valoir ». Il appert que le lieutenant-colonel Simard aurait répondu, tout au moins en partie, en fixant une rencontre le 1er août 2007 pour régler la question de la formule de demande de congé. Cette réponse ou autre chose a entraîné, dans une certaine mesure, un changement au niveau de l’attitude et de l’approche du plaignant. Le 27 juillet 2007, il a fait parvenir au lieutenant-colonel Simard et à M. Archambault une prétendue rétractation de certains des propos agressifs dont il avait fait usage dans son courriel du 9 juillet 2007 à l’endroit du capitaine Quillan. Dans un autre courriel envoyé également le 27 juillet 2007 au lieutenant-colonel Simard et à M. Archambault, le plaignant a mentionné que [traduction] « […] toute correspondance ou toute interaction personnelle que j’ai avec différentes personnes qui, à mon avis, exercent du harcèlement ou de la discrimination à mon endroit peut être teintée d’irritabilité ». La signification de cette dernière phrase pouvait sembler manquer de clarté, compte tenu de ce qui sera exposé ci-après au paragraphe 46 et dans les suivants. À la même date, le plaignant semble également avoir déposé une plainte formelle de harcèlement contre le lieutenant-colonel Simard à un capitaine St. Jean. Toutefois, le 31 juillet 2007, le plaignant a envoyé un courriel au lieutenant-colonel Simard dans lequel il mentionne [traduction] « […] un rendez-vous prévu demain, ce qui fait qu’il me sera impossible d’être présent […] »à la réunion sur la demande de congé. Il a ensuite mentionné qu’il ne serait pas disponible pour prendre part à une telle réunion avant la semaine du 13 août 2007. Dans un courriel en date du 1er août 2007, le lieutenant-colonel Simard a remis la réunion d’enquête sur la plainte relative à la formule de demande de congé au 16 août 2007, non sans mentionner que le court préavis d’annulation n’était pas professionnel. Le 2 août 2007, le plaignant a répondu que ce bref préavis se justifiait par des raisons médicales et qu’un tel congé ne pouvait être raisonnablement refusé aux termes de la convention collective. Dans une copie d’un courriel à un prétendu supérieur, le capitaine St. Jean, il a ajouté la critique formulée par le lieutenant-colonel Simard à la liste de motifs de harcèlement contre ce dernier (il convient ici de noter que d’après M. Archambault, l’Association ne s’est jamais fait formellement demander de représenter le plaignant dans le grief contre le lieutenant-colonel Simard). Malgré les protestations continues du plaignant, la réunion disciplinaire sur la question de la formule de demande de congé s’est tenue le 16 août 2007. M. Black a pris part à la réunion au nom de l’Association à titre de président de la section locale de l’ACEP afin, au dire de M. Archambault, [traduction] « […] de donner du soutien et des conseils et de veiller au respect de la procédure appropriée ».

45 Par lettre datée du 23 août 2007, le lieutenant-colonel Simard a émis une suspension disciplinaire au plaignant pour son courriel du 9 juillet 2007. Voici le texte formel de cette lettre :

[Traduction]

Par suite de mon enquête sur votre allégation d’inconduite, j’ai établi que, d’après la preuve, vous vous êtes vous-même rendu coupable d’inconduite en ce sens que vous avez commis de l’insubordination, en affichant un comportement irrespectueux à l’égard de votre superviseur, le capitaine Quillan, dans le courriel intitulé « Objet : Harcèlement relatif à une demande de congé » que vous m’avez envoyé le 9 juillet 2007 à 12 h 45.

Le vocabulaire et le ton utilisés dans ce courriel pour faire référence aux gestes de votre superviseur sont tout à fait inappropriés et représentent une réaction inacceptable et injustifiée à l’échange de courriels précédent avec votre superviseur.

Vous n’agissiez pas comme un représentant syndical tel qu’il a été indiqué ultérieurement, mais plutôt comme un employé. Par conséquent, toute latitude qui peut être accordée à un représentant syndical pour comportement irrespectueux ne s’applique pas. Je reconnais que vous vous êtes rétracté/que vous avez corrigé certains termes utilisés par courriel daté du 27 juillet 2007, soit près de trois semaines plus tard, courriel dans lequel vous avez également mentionné que vous souffrez d’une affection entraînant une incapacité qui vous rend susceptible d’irritabilité. Toutefois, cette rétractation n’excuse nullement votre comportement inadéquat.

À notre réunion du 16 août 2007 tenue dans le but de discuter de la question, vous avez fait valoir que ce courriel m’a été envoyé dans le cadre d’une étude que vous meniez pour valider la question de savoir si la direction de GCF favorise l’expression d’une opinion par les employés de GCF. Cette explication n’est pas considérée plausible et ne justifie pas vos gestes.

Je suis très inquiet du fait que cet incident est survenu malgré des mesures disciplinaires récentes pour une inconduite similaire. Tel qu’il a été mentionné précédemment, ce type de comportement ne sera pas toléré et l’on s’attend à ce que cela ne se produise plus.

En ce qui concerne la mesure disciplinaire, j’ai considéré que vous avez déjà reçu une réprimande écrite pour inconduite. À titre de facteur atténuant, j’ai également considéré que votre rétractation démontre, dans une certaine mesure, que vous reconnaissez le caractère inadéquat de votre comportement. Par conséquent, j’ai décidé d’imposer comme mesure disciplinaire une suspension d’une journée. La suspension doit avoir lieu de 10 h à 18 h le 28 août 2007. J’espère sincèrement que cette mesure aura l’effet souhaité, c’est-à-dire assurer que ce comportement ne se reproduira pas. Conformément au concept des mesures disciplinaires progressives, sachez que toute autre inconduite pourra entraîner des mesures disciplinaires plus sévères, qui pourraient mener éventuellement au licenciement.

Sachez également que vous avez accès au Programme d’aide aux employés (PAE) si vous éprouvez des problèmes de nature personnelle. Si vous souffrez d’un trouble médical qui contribue à ce comportement, je suis prêt à réaliser de concert avec Santé Canada, à votre demande, l’Évaluation de l’aptitude au travail afin de déterminer toute restriction à l’emploi.

Une copie de la présente lettre sera déposée dans votre dossier personnel. Elle sera détruite après deux ans si aucune autre mesure disciplinaire n’a été prise pendant cette période. Vous avez le droit de contester la présente décision conformément à l’article 40 de la convention collective du groupe Économique et services de sciences sociales.

Le 27 août 2007, le plaignant est allé voir M. Black après avoir longuement discuté avec lui au téléphone. Quand le plaignant a présenté à M. Black une formule de grief pour qu’il la signe et qu’il autorise le plaignant à contester la suspension imposée par le lieutenant-colonel Simard, M. Black a reculé. Il a renvoyé l’affaire à M. Aggrey parce qu’il n’était pas certain qu’il possédait le pouvoir d’autoriser le grief dans les circonstances et qu’il voulait que le plaignant traite avec le bureau principal de l’Association, parce que les questions soumises par le plaignant [traduction] « […] vont au-delà de ce dont peut s’occuper une petite section locale nouvellement constituée ». M. Archambault a témoigné qu’il n’a jamais vu la formule de grief que le plaignant a rempli. Il a également indiqué que comme il y était apparemment allégué une violation de la convention collective, l’autorisation de l’Association aurait été nécessaire pour que la procédure aille de l’avant. M. Archambault a déclaré qu’on ne lui a jamais demandé de signer la formule (contrairement à M. Black). En contre-interrogatoire, le plaignant a déclaré qu’il n’a jamais déposé la formule de grief et qu’il s’en est servi seulement dans le cadre de sa plainte interne dans la procédure d’appel de l’Association relativement à ses allégations selon lesquelles l’Association avait injustement fait défaut de le représenter concernant plusieurs questions en litige dans cette affaire.

G. Mesures d’adaptation

46 Bien que la mention de l’« irritabilité » ait été faite tardivement dans les discussions procédurales formelles sur la question de la formule de demande de congé, elle est liée à une question de mesures d’adaptation susceptible de sous-tendre toutes les questions décrites précédemment comme base de l’insatisfaction du plaignant à l’égard de l’Association et, de fait, à l’égard du ministère. Il semble qu’avant de travailler au ministère comme gestionnaire des relations avec la clientèle, le plaignant était à l’emploi de Service correctionnel du Canada (le « Service »). Il semble en outre que le plaignant est passé du Service au ministère à la suite de mesures d’adaptation ayant découlé d’une instance devant la CCDP, dont les détails n’ont jamais été mis en preuve dans le présent cas et ne sont pas à proprement parler pertinents dans le cadre des questions de représentation en litige en l’espèce. Le plaignant a fait valoir dans son témoignage et par courriel que lorsqu’il est entré en fonctions au ministère, ses commandants savaient, parce qu’ils avaient discuté avec lui, qu’il avait [traduction] « des troubles de santé/une incapacité » qui le rendaient irritable lorsqu’il était surveillé de près et lorsque [traduction] « […] ses heures étaient examinées scrupuleusement ». Il était d’avis que l’ancien gestionnaire, le major Wheeler, avait composé avec ses besoins à cet égard et l’avait protégé des superviseurs qui [traduction] « […] me réprimandaient lorsque je n’appelais pas pour dire que j’étais malade ». Il en a découlé qu’au début, le plaignant était autorisé à établir ses propres heures et à mener sa barque à son gré comme gestionnaire des relations avec la clientèle. Le plaignant fait valoir que cette situation a changé quand le capitaine Porteous a pris la relève du major Wheeler en 2006.

47 Il semble également que dans des courriels datés du 28 novembre 2006, le plaignant a mentionné à ses gestionnaires [traduction] « […] un trouble de santé entraînant des restrictions à l’emploi ». Rappelons que ces dates coïncident avec les premiers développements procéduraux concernant le grief relatif au commissionnaire, qui ont débuté par des événements survenus en septembre 2006. Il semble en outre que l’Association a appris ces arrangements par l’intermédiaire de M. Archambault seulement lorsque des allusions ont été faites à ceux-ci par Mme Kilby au cours de la réunion au premier palier sur le grief relatif au commissionnaire tenue à Halifax le 13 décembre 2006. M. Archambault a rédigé un courriel sur la question le 9 janvier 2007 et dispose de notes datées du 10 janvier 2007 sur une conversation téléphonique avec le plaignant concernant sa demande de mesures d’adaptation présentée au ministère. Les notes suivaient un long courriel du plaignant en date du 9 janvier 2007, dans lequel il affirme son hésitation à fournir des renseignements de nature médicale parce qu’il craint que ses supérieurs en fassent une mauvaise utilisation dans le contexte de ses allégations de harcèlement et de discrimination. Le plaignant a fait suivre la conversation du 10 janvier 2007 avec M. Archambault d’un courriel qui confirmait des questions sur les mesures d’adaptation qui ont fait l’objet de discussions et qui mentionnaient d’autres questions en cours.

48 Le 11 janvier 2007, M. Archambault a fait un suivi utile des communications sur les mesures d’adaptation en envoyant des renseignements généraux provenant d’une page Web de questions et réponses de la CCDP traitant de l’obligation de prendre des mesures d’adaptation. Le 19 janvier 2007, le plaignant a fait parvenir à M. Archambault un projet de note destinée au ministère visant à justifier la demande de mesures d’adaptation qu’il a présenté en novembre. M. Archambault a reçu le document le même jour et a commenté le document initial, qu’il a joint à son courriel de retour. Cecourriel d’accompagnement se lit comme suit :

[Traduction]

J’ai joint directement mes commentaires/recommandations à votre document comme pièce jointe. Mes commentaires ont pour but de vous fournir les éléments qui satisfont aux critères de l’adaptation en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne et d’autres lois. Les restrictions que votre état de santé peut entraîner devraient être concentrées sur les limitations fonctionnelles ou autres qui requièrent des mesures d’adaptation. Par exemple, votre état de santé exige que vous ayez un horaire flexible, ce que vous avez bien expliqué dans votre document. De plus, votre état de santé exige que la direction vous fournisse un horaire de travail bien planifié comportant des échéances raisonnables afin que votre niveau de stress soit réduit. Les problèmes de harcèlement peuvent avoir un lien de causalité avec votre état de santé, mais ces questions sont visées par une autre disposition de la Loi sur les droits de la personne qui porte sur la politique en matière de harcèlement. Si vous désirez discuter de mes commentaires, veuillez communiquer avec moi. Cordialement.

Tel qu’il sera établi ultérieurement dans la présente décision, le plaignant et l’Association ont commencé à diverger d’opinion sur l’approche à adopter relativement à la question des mesures d’adaptation, mais cette situation n’a pas occasionné immédiatement une rupture complète de leur relation de travail.

49 Le 2 février 2007, M. Archambault a envoyé au plaignant une analyse des aspects procéduraux et de fond d’une demande de mesure d’adaptation dans la mesure où elle s’appliquerait à sa situation. Le contenu de ce courriel est le suivant :

[Traduction]

Comme suite à mes discussions survenues au cours de ma visite à Halifax cette semaine, tel qu’il a été mentionné ci-après dans les outils et les ressources produits par la Commission canadienne des droits de la personne et dans la politique sur les mesures d’adaptation du Conseil du Trésor, l’employeur peut demander un rapport au médecin de l’employé. Dans le cas qui nous occupe, l’avis demandé au spécialiste de l’extérieur devrait être demandé à Santé Canada. Dans mon courriel précédent sur cette question, un employé qui fait valoir qu’il doit bénéficier de mesures d’adaptation a la responsabilité de communiquer à l’employeur ses restrictions et limitations fonctionnelles qui sont reliées à son état de santé ou à son incapacité. Par ailleurs, tel qu’il est expliqué dans la section mise en relief ci-après, l’employeur peut demander un rapport au médecin de l’employé qui demande des mesures d’adaptation. Il s’agit d’une pratique usuelle dans la fonction publique fédérale et d’après mon expérience auprès d’autres membres de notre Association qui ont besoin de mesures d’adaptation, cette pratique s’applique également à eux.

En ce qui concerne la notion de préjudice injustifié que vous avez fait valoir, elle s’appliquerait lorsque l’employeur adopte une position voulant qu’une demande de mesures d’adaptation aurait pour effet de lui occasionner des difficultés économiques. À ce stade, le MDN n’a pas fait valoir le préjudice injustifié et ne peut le faire tant que les limitations et les restrictions ne sont pas nettement énoncées et justifiées par un médecin si une demande est présentée en ce sens. La notion de l’exigence professionnelle justifiée telle qu’elle est définie par la Cour s’applique lorsqu’un employeur établit qu’une certaine exigence professionnelle est justifiée. Par exemple, le service des incendies a établi que les examens physiques constituent une exigence professionnelle justifiée à laquelle la personne doit satisfaire dans le cadre de l’emploi. Dans votre cas, je ne crois pas que l’exigence professionnelle justifiée pose problème. À cette fin, en ce qui touche les procédures d’adaptation, l’ACEP recommande que vous respectiez le processus qui suit.

Comme je vous l’ai expliqué dans mon courriel précédent, il peut se poser certains problèmes comme le harcèlement et les buts et les objectifs professionnels que vous avez soulevés comme questions d’accommodement et qui ne se rangent pas dans ce qui précède. Le recours qui s’applique à ces questions devrait être réglé par les moyens appropriés. Une plainte de harcèlement déposée aux termes de la politique du Conseil du Trésor, les objectifs professionnels et les produits livrables sont des questions de rendement au travail qui peuvent faire l’objet de contestations.

C’est à ce stade qu’il est apparu probable que l’Association et le plaignant adopteraient des positions différentes sur la question du mode de règlement de la demande d’accommodement.

50 Le 5 février 2007, le plaignant a reconnu qu’il avait compris le processus courant que l’Association souhaitait qu’il respecte, mais il a fait valoir que l’Association a présumé que le ministère agissait de bonne foi, alors qu’il voulait savoir comment procéder s’il était en mesure d’établir qu’il agissait de mauvaise foi. Plus tard le même jour, après avoir réfléchi davantage, le plaignant a envoyé un long courriel, basé sur l’hypothèse de la « mauvaise foi », qui comprenait le paragraphe suivant qui résume sa position :

[Traduction]

Non, Claude. Nous ne fournirons pas au MDN des renseignements de nature médicale parce que nous ne voulons pas qu’ils procèdent à des aménagements spéciaux en milieu de travail pour moi; nous souhaitons plutôt qu’ils [traduction] « continuent à tenir compte de mes besoins ». Je témoigne que cela a été fait. Je témoigne en outre que les commandants en second et l’Officier du génie construction savaient d’où je venais et connaissaient les circonstances de mon emploi et les résultats. J’estime que Santé Canada a prévu qu’un lieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement était nécessaire, et non seulement des processus permettant de régler ces questions, car ces processus existaient au sein de SCC. J’estime que Justice Canada sait qu’il pourrait communiquer avec le MDN pour permettre à celui-ci de se corriger et que Justice Canada pourrait le faire sans se montrer irrespectueux à l’égard de mes droits à la confidentialité ou à la protection de mes renseignements personnels. Dans les faits, c’est la demande du MDN qui provient d’un mauvais endroit qui leur interdit de parler à des représentants de Santé Canada et de Justice Canada. Le MDN ne pourrait même pas commencer à façonner sa demande parce qu’il s’intéresse davantage à mes limites pour pouvoir les exploiter qu’aux mesures d’adaptation.

M. Archambault n’était pas prêt à abandonner et il a répondu de manière à révéler sa réticence tacite à adopter l’hypothèse de « mauvaise foi » du plaignant. Voici un passage pertinent de sa réponse du 6 février 2007 (qui portait également sur d’autres questions) :

[Traduction]

Ian, je vous remercie de votre réponse. Bien que le ministère ait tenu compte de vos besoins depuis votre arrivée, tel qu’il a été confirmé pendant notre réunion de règlement de grief à Halifax, la direction prétend qu’elle ne possède pas de dossier pouvant justifier les mesures d’adaptation en question. Tel qu’indiqué dans votre courriel ci-après, nous aurions besoin de preuves documentées selon lesquelles il y a eu des mesures d’adaptation par le passé. Comme je vous l’ai déjà mentionné, dans de nombreux cas, nos membres ont présenté des demandes de mesures d’adaptation justifiées par un médecin qui n’avaient pas été utilisées de façon dommageable par l’employeur. Je crains seulement qu’en définitive, l’employeur ne vous contraindra pas à respecter les règles, c’est-à-dire à lui communiquer vos besoins en matière d’adaptation. Toutefois, il pourrait les exonérer de leurs responsabilités comme l’explique le document de questions et réponses sur les droits de la personne que je vous ai fourni (voir ci-après)

[…]

Le plaignant a répondu dans deux courriels le 7 février 2007. Dans le premier courriel, il a indiqué qu’il s’était assuré le concours d’un collègue, Patrick Ryan, qui possédait de l’expérience dans de telles questions, pour l’aider dans ses discussions avec le ministère sur la question des mesures d’adaptation. Le deuxième courriel laissait croire que M. Archambault n’était pas raisonnable lorsqu’il laissait entendre que [traduction] « […] la seule façon dont je dispose pour amener mon employeur à me fournir un lieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination est de lui présenter un certificat médical […] ».

51 Le même jour, M. Archambault a répondu ce qui suit :

[Traduction]

Vous avez mentionné que vous ne satisferez pas à la demande de l’employeur selon laquelle vous devez fournir un certificat médical concernant les mesures d’adaptation dont vous avez besoin. L’ACEP estime que l’employeur a droit à un tel certificat médical et que sa demande n’est pas déraisonnable. D’après notre analyse, une telle demande ne constitue ni du harcèlement ni de la discrimination. Nous croyons savoir que vous n’êtes pas d’accord avec notre analyse et notre position. Par conséquent, la présente vise à vous informer que l’ACEP ne vous représentera plus sur la question de vos besoins en matière de mesures d’adaptation.

Des courriels ont été échangés relativement à une affirmation du plaignant selon laquelle l’Association le punissait parce qu’il aurait [traduction] « […] prêté l’oreille à M. Patrick Ryan sur cette question […] », à la suite d’une demande en ce sens, plutôt que l’inverse. Toutefois, M. Archambault et le plaignant semblent clarifié la question au cours d’une conversation téléphonique en date du 8 février 2007. Le plaignant a fait parvenir un courriel à M. Archambault, courriel qui se lit en partie comme suit :

[Traduction]

[…]

J’ai apprécié notre conversation aujourd’hui. Tout est clair au sujet des mesures d’adaptation en milieu de travail et je comprends tout à fait la position de l’ACEP de se retirer de cet enjeu. »

[…]

Ce qui, bien sûr, ne marque pas la fin de l’histoire.

52 Bien que le dossier de correspondance et de preuve sur les communications entre le plaignant et le ministère relatives à la question des mesures d’adaptation ne soit pas tout à fait complet, le lieutenant-colonel Simard a envoyé au plaignant, le 22 février 2007, une réponse à sa demande de mesures d’adaptation en milieu de travail. Cette réponse, qui était négative quant au fond de la demande, mais qui ouvrait la porte à la présentation de preuves médicales complémentaires, se lit comme suit :

[Traduction]

La présente vise à reconfirmer les exigences mentionnées dans ma correspondance par courriel en date du 24 janvier 2007 relativement à votre demande de mesures d’adaptation en milieu de travail.

Dans vos courriels datés du 28 novembre 2006, vous avez mentionné que vous avez des problèmes de santé qui entraînent des restrictions applicables à votre emploi comme gestionnaire des relations avec la clientèle. En outre, à notre réunion du 10 janvier 2007 et dans votre note datée du 19 janvier 2007, vous avez demandé un certain nombre de mesures d’adaptation en milieu de travail.

Je m’engage à respecter l’obligation de l’employeur telle qu’elle est formulée dans la DOAD 5015-0, intitulée « Mesures d’adaptation en milieu de travail ». Toutefois, afin que je sois en mesure de bien évaluer votre demande de mesures d’adaptation, vous devez fournir de la documentation justificative d’un professionnel du domaine des soins de santé afin de clarifier les limitations professionnelles précises et la nature des mesures d’adaptation nécessaires. Il s’agit d’une exigence qui s’inscrit dans votre responsabilité à titre d’employé dans le processus des mesures d’adaptation en milieu de travail visant à fournir assez de renseignements pour justifier votre demande de mesures d’adaptation.

La documentation médicale existante, soit une lettre de Santé Canada datée du 13 janvier 1998, c’est-à-dire 18 mois avant votre nomination au GCF, confirme que vous êtes apte à occuper un poste autre que votre ancien poste. Cette lettre n’indique aucune limitation à l’emploi. Compte tenu du fait que vous avez mentionné récemment que vous avez un problème de santé qui entraîne des limitations à l’emploi et des mesures d’adaptation importantes que vous avez demandé, des renseignements médicaux mis à jour sont nécessaires.

Vous avez établi un lien entre votre demande de mesures d’adaptation et la responsabilité de l’employeur de fournir un milieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement. Je peux vous certifier que je m’engage à faire en sorte que tous les employés du GCF bénéficient d’un milieu de travail exempt de discrimination et de harcèlement. Les préoccupations de discrimination et de harcèlement que vous avez soulevé séparément font l’objet des recours qui s’offrent à vous.

Je ne peux continuer à examiner votre demande de mesures d’adaptation en milieu de travail tant que les renseignements demandés n’auront pas été fournis. Tel qu’il a été mentionné précédemment, à votre demande, des dispositions peuvent être prises pour obtenir les renseignements au moyen d’une évaluation de la santé au travail qui serait effectuée par un médecin de Santé Canada. Je vous demande de faire part de vos intentions d’ici le 7 mars 2007.

Le lieutenant-colonel Simard a envoyé une copie de la lettre à M. Archambault, même si l’Association, à la connaissance et avec l’assentiment du plaignant, avait choisi de ne pas représenter le plaignant dans cette affaire. La question de savoir si le plaignant aurait pu obtenir un meilleur résultat s’il avait accepté les conseils de l’Association est sans objet — il a décidé de procéder à sa façon, seul.

53 Le lieutenant-colonel Simard, n’ayant pas reçu de déclaration d’intention du plaignant en date du 7 mars 2007, lui a fait parvenir par courriel le 9 mars 2007 une confirmation que sa demande de mesures d’adaptation ne serait plus examinée, ce qui a suscité une réponse de la part du plaignant. Le 11 juin, pendant le différend sur les heures flexibles, le plaignant a répondu par courriel à la missive du lieutenant-colonel Simard. Il « s’est excusé » que [traduction] « […] celle-ci soit tombée dans l’oubli […] », puis a fustigé le lieutenant-colonel Simard pour avoir fait preuve d’arbitraire en fixant un [traduction] « […] délai pour fournir des renseignements de nature médicale […] ». Ce n’est que le 25 juillet 2007 que le plaignant a écrit à Mme Kilby pour lui mentionner qu’il était [traduction] « […] en possession de preuves médicales justifiant ma demande antérieure de mesures d’adaptation au milieu de travail […] », quoiqu’il a également indiqué qu’il avait [traduction] « communiqué avec Santé Canada », mais que son contact à ce moment ignorait alors à qui le référer. Le plaignant, en plus d’envoyer une copie de ce courriel au lieutenant-colonel Simard et au capitaine Quillan, a fait parvenir des copies à M. Archambault et à M. Black. Il allait faire valoir ultérieurement que cette notification informelle à l’Association aurait dû suffire à réactiver le devoir de représentation de l’Association, quoiqu’il n’ait pas fourni à l’Association la preuve médicale demandée. Le 26 juillet 2007, Mme Kilby a fait parvenir au plaignant par courriel d’autres renseignements sur la nature exacte des données médicales requises pour justifier des mesures d’adaptation, et le plaignant a répondu qu’il obtiendrait ces données de son médecin si Santé Canada n’était d’aucune utilité. Le lieutenant-colonel Simard et les membres du personnel de l’Association ont reçu des copies de cette correspondance qui constituait la réponse du plaignant. La question n’était pas encore réglée au moment de la présente audience et d’après M. Archambault, le plaignant n’a jamais fourni à l’Association les renseignements de nature médicale dont elle avait besoin pour évaluer sa demande initiale de représentation.

H. Conversion aux EC

54 Le plaignant, en qualité de gestionnaire des relations avec la clientèle, faisait partie d’une catégorie d’emplois ou d’un groupe d’occupations formé de deux catégories d’emploi fédérales : Économique, sociologie et statistique (ES), et Soutien des sciences sociales (SI). Le plaignant a soutenu qu’il était le seul employé ES/SI dans la région. En novembre 2006, l’Agence de la fonction publique du Canada (l’« Agence ») a parachevé une nouvelle classification, désignée sous le nom de EC, qui devait remplacer les classifications ES et SI désuètes. Un mécanisme a été mis en place pour gérer la transition de l’ancienne à la nouvelle catégorie d’emploi. Ce mécanisme s’appelle la conversion aux EC. Il semble que le calendrier de mise en œuvre du nouveau système constituait en quelque sorte une cible mobile. L’Association, pour situer l’affaire dans son contexte, a déposé en preuve un calendrier comportant des jalons applicable au processus qui a été actualisé en date du 28 février 2008. Il indiquait que la nouvelle classification a été achevée en novembre 2006. Des versions finales ont été transmises aux ministères fédéraux en mars 2007. L’Agence a dispensé de la formation au personnel ministériel de mars à novembre 2007, la nouvelle classification ayant été approuvée officiellement par le Conseil du Trésor en juin de cette année-là. Le processus comportait vraisemblablement l’envoi de « Notifications personnelles préalables » aux employés afin qu’ils puissent faire part de leurs préoccupations au sujet de l’application de la nouvelle classification à leur situation particulière, tandis que la « Notification personnelle officielle » finale, qui fait état des niveaux et des taux de rémunération applicables, devait être communiquée seulement une fois que la classification avait été formellement réglée dans le cadre de la négociation collective. Le processus suscitait sans aucun doute beaucoup de préoccupations chez les fonctionnaires fédéraux et a eu des répercussions sur la négociation.

55 Le plaignant a fait part de ses préoccupations relativement au processus de conversion aux EC aux employés régionaux des ressources humaines dans un courriel envoyé à M. Topilnyckyj le 24 août 2007, courriel dont il a envoyé une copie à M. Black et à M. Archambault. À la suite de la reclassification de son poste le 4 janvier 2006, il craignait de ne pas avoir reçu tout le crédit auquel il avait droit pour ses fonctions de supervision et que cette facette de son travail ne se refléterait pas dans la conversion aux EC. Il croyait en outre que son poste civilarisé avait remplacé deux postes militaires et que sa classification de poste actuelle ne reflétait pas adéquatement la nature de l’emploi. Il a affirmé qu’il n’avait pas déposé de grief sur la question de la reclassification parce que par le passé, il a eu de la difficulté à obtenir une description de travail réécrite et autorisée et qu’il ne voulait pas y aller trop fort parce qu’il avait déjà contesté l’ancienne classification. Le 2 octobre 2007, le plaignant a envoyé à M. Topilnyckyj un autre courriel dans lequel il demandait des renseignements sur sa situation en regard du processus de conversion aux EC. Encore une fois, des copies ont été envoyées aux représentants de l’Association.

56 Le 3 octobre 2007, M. Topilnyckyj, dans sa réponse, a informé le plaignant que son dossier avait été [traduction] « […] envoyé à Ottawa afin qu’ils examinent les documents et les remplissent […] » et pour lui répéter que sa Notification personnelle préalable ne tarderait pas. Le même jour, le plaignant a fait parvenir à MM. Black et Archambault un courriel [traduction] « [à] des fins d’information et de suivi […] », intitulé [traduction] « Conversion aux EC ». Le plaignant désirait savoir si d’autres membres de l’Association avaient reçu leurs notifications personnelles préalables, si l’envoi de son dossier à Ottawa revêtait un caractère bizarre et s’il allait obtenir une rétroaction adéquate dans les circonstances, et enfin quelles étaient ses options. Le même jour, M. Archambault a fourni au plaignant les renseignements suivants par courriel-réponse :

[Traduction]

La notification personnelle préalable (NPP) a été repoussée au 6 novembre 2007. Tous les employés du groupe EC recevront leur notification personnelle préalable le 6 novembre 200 [sic], ce qui confirmera à l’employé son niveau EC dans le groupe. D’ici cette date, une version des descriptions de travail devrait être achevée, de sorte que la description de travail puisse être évaluée en fonction de la nouvelle norme EC afin de déterminer le niveau approprié. Ian, je vous recommande d’obtenir une copie de votre description de travail EC avant la date de la NPP, afin que vous puissiez l’examiner pour vous assurer qu’elle est complète. Une fois que vous avez reçu votre description de travail, il importe que vous obteniez confirmation qu’il s’agit encore d’une ébauche. Si celle-ci comporte une date d’effet (ce scénario est peu probable), le calendrier de contestation du contenu de votre description de travail commencera à s’appliquer. Selon le scénario le plus probable, votre description de travail prendra la forme d’une ébauche, ce qui vous permettra de négocier des changements au besoin avant la notification personnelle officielle (NPO) qui sera communiquée seulement vers la fin de 2008 ou au début de 2009. Les employés auront alors l’occasion de contester le niveau de leur groupe EC, de même que le contenu de leur description de travail.

Ce même jour, le plaignant a répondu à M. Archambault qu’il a eu une discussion avec la direction de l’unité Génie construction (formation) et qu’il a signé une « formule de mesure de classification » à leur intention, à laquelle était jointe sa description de travail actuelle reclassifiée. Il a envoyé une copie du document à M. Archambault comme pièce jointe. Le plaignant s’est également dit d’avis que [traduction] « […] la structure se prête à la conversion aux EC parce que toutes les composantes qui se trouvent dans la nouvelle norme de classification EC se trouvent dans cette description de travail ». Pour compléter l’échange de courriels d’aujourd’hui, M. Archambault a répondu que l’information fournie [traduction] « […] vous accorde du temps pour discuter de votre description de travail avec la direction, car il est nettement mentionné sur votre description de travail qu’il s’agit d’une ébauche ». M. Archambault a témoigné qu’il n’a jamais eu de nouvelles du plaignant sur cette question et que ce dernier semblait « heureux » de l’issue.

I. Collusion ou mauvaise foi

57 Il convient de noter que le plaignant a parfois fait valoir, en ce qui concerne bon nombre des préoccupations de fond qui précèdent, que l’Association agissait de mauvaise foi ou était de connivence avec le ministère pour miner sa position. En certaines occasions en particulier, le plaignant avait des doutes lorsqu’un gestionnaire du ministère, comme le lieutenant-colonel Simard ou Mme Kilby, envoyait des courriels ou des copies de courriel à M. Archambault sans envoyer de copie au plaignant. Il convient de noter que dans ces situations, M. Archambault envoyait invariablement une copie au plaignant lorsqu’il répondait au représentant de la direction, ce qui assurait la transparence des communications. M. Archambault a témoigné que conformément aux pratiques générales sur l’application de la convention collective, les gestionnaires ou le personnel des ressources humaines communiquent directement avec des responsables de l’Association pour régler les problèmes. Il peut s’agir d’un aspect sain et naturel de l’application efficace des conventions collectives, dans la mesure où ces communications sont offertes aux personnes visées dans les circonstances pertinentes. Toutefois, pour l’essentiel, la preuve révèle que le plaignant craignait un complot et de la collusion entre le ministère et l’Association lorsque les représentants de l’Association étaient en désaccord avec ses perceptions sur différentes questions ou soutenaient que le plaignant adopte une approche coopérative ou « non conflictuelle » dans ses rapports avec le ministère.

58 La preuve révèle que le plaignant semble avoir obtenu confirmation de ses doutes au sujet de la collusion, de la conspiration et de la mauvaise foi, à tout le moins à sa propre satisfaction, lorsque son appel déposé par l’intermédiaire du mécanisme interne de l’Association a essuyé un refus de la part des principaux responsables de l’Association. Ce mécanisme interne d’appel fera l’objet d’une brève description. La frustration qu’éprouve le plaignant semble avoir atteint son paroxysme à la fin de juillet 2007. Le 23 juillet 2007, le plaignant a informé M. Aggrey que [traduction] « […] en réponse à un certain nombre de manquements de la part des représentants de l’ACEP et en réaction à des problèmes de comportement arbitraire et de mauvaise foi […] », il avait [traduction] « contacté les autorités juridiques » et [traduction] « […] déposait des accusations formelles contre l’ACEP ». Il a ajouté qu’il jugeait cela « regrettable », mais qu’il croyait que [traduction] « […] l’ACEP et moi traverserons cette tempête et en ressortirons plus forts ».

59 Le 3 août 2007, après une conversation téléphonique avec M. Archambault la veille, le plaignant a envoyé un courriel à M. Danik, dont voici la teneur intégrale :

[Traduction]

Bonjour. Je m’appelle Ian Tench et je suis membre de la section locale 201 de la Nouvelle-Écosse de l’ACEP. Je vous écris aujourd’hui pour porter en appel les décisions prises par M. Claude Archambault et M. Jean Ouellette relativement à la représentation de l’ACEP en mon nom dans deux incidents distincts.

Incident no 1 – Renvoi conditionnel à l’arbitrage

Le 22 juin 2007, l’ACEP a présenté une demande en mon nom auprès de la CRTFP. Avant cette présentation, j’avais demandé de prendre part à la préparation de la procédure. Ma demande a été rejetée. La demande a été présentée sans ma participation et des erreurs de nature qualitative et quantitative ont été faites. Plus précisément, le grief porte sur un certain nombre de gestes de discrimination qui vont à l’encontre de la clause 16.01. Dans la demande, SEULE la race a été mentionnée, ce qui constitue une erreur. Lorsque j’ai porté ces plaintes à l’attention de M. Archambault et M. Ouellette, ils ont refusé de rectifier les erreurs. En outre, ils m’ont informé que la demande était conditionnelle à l’acceptation de la médiation par l’employeur et moi-même. Cependant, ils m’ont dit et m’ont confirmé par écrit que si l’une des parties s’opposait à la médiation, ils retireraient instantanément la demande, et c’est là où le bât blesse vraiment. Le libellé de mon grief permettait d’ajouter de nouvelles prétentions et de modifier des prétentions, ce qui fait que malgré leurs arguments, ils ne peuvent légalement ajouter des éléments autres que la race à la demande, non pas parce que ce serait préjudiciable à l’autre partie, mais plutôt parce que leurs lacunes seraient soulignées. L’une des raisons pour lesquelles je me suis fait dire que l’affaire ne serait pas portée en arbitrage, c’est le manque de preuves. Je réponds que le SCC dans l’affaire Shakes et dans des affaires ultérieures, ainsi que mes cours de droit, ont établi que le critère de discrimination raciale est délibérément élevé au Canada pour un motif. Le principe juridique qui est généralement suivi est que lorsque la norme est élevée, la quantité de preuve requise n’a pas à être aussi considérable que si la norme était moins élevée. J’accepte ce raisonnement juridique et je soutiens que ma plainte de discrimination repose non seulement sur des motifs raciaux, mais également sur des motifs de nature sexuelle, conjugale et personnelle. De plus, il y a très peu de cas de discrimination raciale dans les livres de droit de ce pays, en particulier en ce qui concerne la « discrimination préjudiciable », et ce serait très profitable à la société et au paradigme de la jurisprudence, car un domaine relativement nouveau de discrimination serait mieux défini. Je dispose également du témoignage de témoins oculaires qui appuie ma plainte. L’ACEP ne surmontera pas un défaut de me représenter dans le contexte de cet incident si personne de l’ACEP n’intercède. Je cherche à obtenir une confirmation de l’ACEP qu’elle ne retirera pas cette demande si le ministère choisit de ne pas prendre part à la médiation ou ne participe pas de bonne foi ou ne m’obtient pas ce à quoi j’aurais droit au moyen de l’arbitrage de grief. Je cherche à obtenir que l’ACEP avise la CRTFP et la CCDP que la demande est entachée d’une erreur et à ajouter les modalités interdites additionnelles de manière à élargir la demande pour qu’elle soit accueillie.

Question no 2 – Discrimination par le superviseur/gestionnaire

Après le dépôt, auprès de mon superviseur/gestionnaire, de mon grief et de mes plaintes sur le traitement que j’ai subi, j’ai fait l’objet d’une attention soutenue de la part de mon gestionnaire, le lieutenant-colonel Simard. Il a tenu des propos racistes et a incité des agents subalternes à m’attaquer. Il a abusé de son pouvoir, enfreignant ainsi la politique du ministère de la Défense. Il m’a réprimandé de manière arbitraire, tout cela avec l’autorisation tacite, implicite et hégémonique de l’Association. J’ai déposé des plaintes de harcèlement contre ses sous-fifres, mais c’est lui qui mène les enquêtes et qui statue, s’il fait effectivement enquête sur la plainte, qu’il n’y a pas eu de harcèlement, généralement sous prétexte d’un manque de preuve et sur la base de mensonges purs et simples de ses sous-fifres. J’ai changé d’approche et j’ai tenté d’utiliser la clause sur la discrimination dans la CC, ce qui a eu pour seul effet que l’Association a refusé d’appuyer ma demande. J’ai déposé une plainte contre lui auprès de la CCDP et elle est étudiée à des fins d’enquête. C’est devenu possible seulement une fois que j’ai pu obtenir de M. Archambault, au nom du syndicat, qu’il consigne par écrit qu’ils n’appuyaient pas mes plaintes de discrimination. Le problème en ce qui concerne l’Association, c’est que comme ce sont des racistes, ils se disent que le mieux est parfois l’ennemi du bien. Sa haine à mon égard en raison de la couleur de ma peau signifie qu’il ne cherchera pas à améliorer ma situation. L’Association a tenté sans conviction de faire valoir que je cherche l’affrontement. Je suis atteint d’une affection entraînant une incapacité qui fait que je dors mal, lorsque je parviens à dormir, et que j’ai tendance à être irritable lorsque je fais l’objet de harcèlement et de discrimination. On m’a diagnostiqué une dépression et des troubles de l’anxiété, et ce depuis le début de mon emploi au MDN. J’ai été nommé au MDN, après avoir travaillé à SCC, d’après une liste de priorité qui faisait suite à une plainte de racisme présentée à la CCDP contre mon ancien employeur, le SCC. Mon gestionnaire refuse de reconnaître mon incapacité tant qu’il n’en reçoit pas une preuve. Santé Canada, et non mon gestionnaire, est en droit d’exiger cette preuve. Ils refusent également d’organiser une évaluation que ferait SC pour moi. Cette mentalité qui consiste à jouer à l’autruche de même que cet esprit de clocher poussé à l’extrême se manifestent sous l’oeil attentif des représentants de l’ACEP. L’Association ne résistera pas au défaut de la CRTFP de représenter la demande sur ces questions. J’aimerais que l’ACEP me permette de déposer les griefs de discrimination et au besoin, avant l’arbitrage de grief, de prendre charge de ces griefs afin que je puisse m’en occuper individuellement si c’est nécessaire. Il serait injuste de me bloquer l’accès à la procédure de règlement des griefs. M. Archambault et M. Ouellette ne sont pas des juges et ne sont pas dans mes souliers.

L’information ayant trait à l’une ou l’autre de ces questions peut être fournie, mais vous devriez déjà y avoir accès, car l’Association dispose de ces renseignements dans ses dossiers. Le temps presse, car la discrimination exercée contre moi est quotidienne. De combien de temps aurez-vous besoin?

Le courriel a été reproduit intégralement pour établir que, d’après l’examen qui précède des faits pertinents, les allégations graves et dommageables du plaignant reposent sur des perceptions erronées et ne peuvent être justifiées au moyen d’une évaluation raisonnable de la preuve disponible. M. Danik, dans un bref courriel-réponse, a mentionné qu’il savait que le plaignant avait été informé par M. Ouellette du mécanisme interne d’appel de l’Association sur les questions de représentation et que selon son examen personnel des allégations, du dossier et des discussions avec M. Archambault et M. Ouellette, [traduction] « [je] ne peux conclure que l’Association a adopté un comportement arbitraire, discriminatoire ou a agi de mauvaise foi ».

60 Dans un courriel daté du 8 août 2007, le plaignant a fait part de ses frustrations à l’égard de M. Archambault en particulier et de l’Association en général. Du 13 au 15 août 2007, le plaignant a échangé des courriels avec Mme Kilby sur le fait que l’Association n’appuyait pas certains de ses griefs et a demandé au ministère de les suspendre pendant qu’il donnait suite à des mécanismes internes d’appel avec l’Association et pendant le traitement d’une plainte éventuelle sur le devoir de représentation équitable à la Commission. Le 27 août 2007, le plaignant a communiqué avec M. Aggrey au sujet du rôle négatif qu’aurait joué M. Black dans ses relations avec l’Association et de la « décision » de M. Aggrey de ne pas nommer le plaignant comme délégué syndical afin qu’il soit possible d’améliorer les activités de l’Association dans la région.

61 Le 30 août 2007, M. Ouellette a fait parvenir au plaignant une lettre soigneusement rédigée qui était imprimée sur du papier à en-tête de l’Association. Cette lettre confirmait que le plaignant devrait traiter avec l’Association uniquement par l’intermédiaire de son conseiller juridique relativement aux questions de représentation dont il interjetait appel, que le « Protocole 1 – La représentation dans les recours et l’ACEP » régissait les questions de représentation, que M. Archambault, en qualité d’agent des relations du travail, était la personne avec laquelle il devrait traiter concernant toutes les questions qui ne sont pas portées en appel, et que c’est M. Archambault, et non le dirigeant de la section locale, qui devrait s’occuper de ses questions de représentation. M. Ouellette a conclu que le défaut de traiter avec M. Archambault de manière professionnelle et coopérative pourrait avoir des répercussions sur les services que l’Association pourrait fournir. Malgré la lettre, le plaignant a lancé un dialogue par courriel dialogue avec M. Aggrey, qui s’est échelonné du 31 août au 12 septembre 2007, dans lequel M. Aggrey a expliqué les gestes de MM. Black, Archambault et Ouellette et de l’Association en général, tandis que le plaignant a répété ses motifs d’insatisfaction. Dans son dernier courriel envoyé à M. Aggrey, daté du 12 septembre 2007, le plaignant a confirmé qu’il déposerait une plainte à la Commission, et il a déposé la plainte un.

62 Le 16 octobre 2007, M. Aggrey a répondu au plaignant relativement à ses divers courriels de plainte. Il les a traités comme s’ils avaient été soumis aux termes du protocole sur la représentation dans les recours de l’Association alors que dans les faits, le plaignant n’avait pas observé les formalités usuelles. Cette lettre formelle de M. Aggrey imprimée sur du papier à en-tête de l’Association est ainsi rédigée :

[Traduction]

Je vous écris en ce qui concerne votre appel tel qu’il est prévu dans le Protocole 2 de l’ACEP intitulé Protocole 2 –Protocole de représentation des membres. Je n’ai pas reçu de demande ou de document d’appel officiel de votre part et je ne suis pas convaincu que vous avez présenté votre appel suivant la procédure décrite dans le protocole. Néanmoins, j’ai statué sur la question au dernier palier du mécanisme de recours de l’ACEP.

Comme vous savez, le Protocole 2 de l’ACEP – Protocole de représentation des membres, prévoit qu’un membre peut alléguer qu’il a été statué sur son dossier de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi par l’ACEP.

Sur cette base, j’ai examiné tous vos courriels ainsi que les notes de notre conversation téléphonique du 29 août et j’ai établi que vous alléguez notamment avoir été traité par l’ACEP de façon arbitraire ou avec mauvaise foi. Je n’ai pas lu dans vos courriels ni entendu dans notre conversation téléphonique que vous soutenez que votre dossier a été traité de manière discriminatoire par l’ACEP. J’ai donc examiné votre appel pour les motifs que vous alléguez que votre dossier a été traité par l’ACEP de manière arbitraire ou avec mauvaise foi.

En me penchant sur votre appel, j’ai examiné avec soin tous les courriels que vous m’avez fait parvenir.

J’ai également étudié certains des documents contenus dans vos dossiers et discuté de la représentation de vous par l’ACEP avec le personnel du bureau national qui s’est occupé de votre cas. Relativement à la totalité des questions de relations du travail au sujet desquelles vous avez contacté l’ACEP, j’ai examiné la représentation fournie, la représentation qui vous a été offerte mais que vous avez refusée et les décisions de ne pas assurer de représentation. En ce faisant, j’ai tenu compte des pratiques, des politiques établies et des protocoles de l’ACEP, et plus particulièrement des clauses du Protocole 1 de l’ACEP – La représentation dans les recours et l’ACEP.

Je suis convaincu, à la suite de l’examen minutieux auquel j’ai procédé, que la question que vous avez soumise n’a pas été traitée par l’ACEP de manière arbitraire ou avec mauvaise foi. Je suis d’avis que l’ACEP vous a fourni et/ou vous a offert des services de représentation professionnelle et des conseils constructifs et pertinents. L’ACEP a bien tenu compte de vos intérêts et de vos préoccupations dans ses décisions concernant la prestation de services de représentation.

Je constate que depuis que vous avez lancé ce mécanisme d’appel, vous avez également déposé récemment une plainte auprès de la CRTFP dans laquelle vous alléguez que l’ACEP a manqué à son devoir de vous représenter comme membre de l’unité de négociation. Par conséquent, les problèmes et les questions qui peuvent découler de la réponse que je vous ai donnée doivent maintenant être réglés dans une instance devant la Commission dans le contexte de votre plainte.

En terminant, et comme vous en avez été informé précédemment dans la correspondance provenant de l’ACEP, j’aimerais vous rappeler que si vous avez des demandes à formuler au sujet de la représentation sur des questions de relations du travail autres que celles qui sont soulevées dans votre courriel du 3 août 2007, vous devriez communiquer avec M. Claude Archambault, agent des relations du travail de l’ACEP affecté à votre région. Vous obtiendrez les services de représentation nécessaires de M. Archambault, suivant les pratiques, les politiques établies et les protocoles de l’ACEP.

Cette lettre a mené à la plainte deux.

IV. Argumentation des parties

63 Le plaignant a présenté son argumentation, qui n’a pas été interrompue (à l’exception d’une pause demandée par celui-ci) parce que l’on visait à l’entendre finalement au complet. Le plaignant a également obtenu du temps pour les observations de réfutation. D’une manière ou d’une autre, bon nombre des arguments mentionnés dans la documentation envoyée par courriel ont été présentés. Le plaignant a fait valoir qu’en cas de divergence, son témoignage devrait avoir préséance sur celui des témoins de l’Association. Le plaignant a soutenu à juste titre que les principes de Gagnon et al. jouent un rôle fondamental dans les questions devant être tranchées pour déterminer s’il a été bien représenté par l’Association. Toutefois, sa présentation était axée sur le fond de ses griefs déposés contre le ministère, et ne faisait qu’affirmer sans cesse que les représentants de l’Association ont fait preuve de négligence en négligeant à tort de considérer et d’adopter son point de vue.

64 Le plaignant a également mentionné d’autres décisions de jurisprudence en relations du travail, telles que les suivantes : Canada (Procureur général) c. Brooks, 2006 CF 1244; Fraser v. Communications, Energy and Paperworkers Union of Canada, Local 191, 2004 CanLII 22122 (C.R.T. Ont.); Global Television c. Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, 2004 CAF 78; Guzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1999 CanLII 9376 (C.F. 1re inst.). Le plaignant n’a pas établi de lien raisonnable entre ces décisions et sa preuve contre l’Association.

65 En général, le plaignant, dans la présentation de sa preuve, a confondu régulièrement ses croyances de bonne foi sur la mesure dans laquelle il a subi de la discrimination ou a fait l’objet d’un traitement procédural inapproprié avec la preuve de ces éléments. Ces preuves étaient très rares et aucune n’était digne de foi, car elles se fondaient pratiquement toutes sur des affirmations non justifiées par le plaignant. En conclusion, le plaignant a fait valoir la nécessité d’une décision qui [traduction] « […] mettrait fin à cette folie qui porte préjudice à la santé et entraîne des pertes financières et personnelles ».

66 Les avocates de l’Association ont fait de leur mieux pour mettre de l’ordre dans les nombreuses affirmations factuelles et juridiques auxquelles elles ont dû faire face tout en respectant la période de deux heures qui leur était allouée. Elles ont présenté quelques décisions de jurisprudence sur le devoir de représentation équitable. Toutefois, tel qu’il a été mentionné précédemment, l’affaire peut être tranchée sur le fond par référence à l’article 187 de la Loi et à l’aide des principes énoncés dans Gagnon et al.

V. Motifs

67 L’essentiel, comme l’interprétation des faits l’aura sans doute indiqué, c’est que la preuve n’a démontré ni arbitraire, ni discrimination ni mauvaise foi de la part de l’Association. De fait, la preuve établit le contraire. M. Archambault et M. Ouellette ont traité le plaignant avec respect, se sont montrés à l’écoute et patients à l’égard de plusieurs questions de représentation qu’il leur a soumis dans leurs rôles respectifs de responsables de son agent négociateur accrédité. MM. Black, Danik et Aggrey, dans les rôles qui leur sont attribués de manière adéquate aux termes des protocoles et des procédures de l’Association, ont également agi avec diligence et attention, pour autant que les griefs du plaignant contre l’Association et le ministère étaient concernés. Les gestes des représentants de l’Association étaient l’antithèse de l’arbitraire.

68 Il n’existe pas de preuve que des dirigeants de l’Association se sont rendus coupables de discrimination à l’encontre du plaignant pour des motifs liés à la race, à la situation conjugale ou personnelle. M. Archambault et M. Ouellette, qui sont tous deux des spécialistes des relations du travail très expérimentés, ont traité le plaignant non seulement avec beaucoup de professionnalisme, mais également avec énormément de compassion, malgré le fait qu’au fur et à mesure que le temps s’est écoulé, le plaignant les a traité avec de moins en moins de respect. Même en août 2007, et, de fait, à l’audience tenue en 2008, au cours de laquelle moins de personnes ont pu réagir avec colère, frustration ou hostilité à l’égard des attaques personnelles et des insultes du plaignant, ils ont conservé une attitude impartiale, calme et empreinte de patience.

69 À la lumière de l’ensemble des événements décrits précédemment, rien n’indique que les dirigeants de l’Association ont agi avec mauvaise foi. Les représentants de l’Association, en particulier MM. Archambault et Ouellette, ont agi avec honnêteté et intégrité. Ils étaient prêts à défendre les intérêts légitimes du plaignant et à tenir le ministère responsable lorsque c’était justifié, tout en donnant des conseils éclairés au plaignant sur le moment d’opter pour la médiation, de fournir davantage de renseignements ou d’agir de manière moins conflictuelle quand, à leur avis, l’attitude à adopter aurait été dans son intérêt. Bien que le plaignant ait pu être en désaccord avec le jugement des représentants de l’Association lorsqu’ils n’ont pas trouvé de preuve à l’appui de ses allégations ou qu’ils ne pouvaient souscrire à son approche, leurs évaluations de la situation étaient immanquablement raisonnables et ne se caractérisaient aucunement par de la négligence.

70 Il convient de tirer à partir de la preuve des conclusions explicites relativement à chaque incident comme fondement des allégations faites par le plaignant dans la plainte un et dans la plainte deux. La plainte un, dans son paragraphe « 4.2 », et la plainte deux, dans ses premiers renseignements contenus dans le paragraphe 4, traitent du grief relatif au commissionnaire. Le plaignant est tout à fait convaincu que les circonstances constituent des preuves évidentes de discrimination du fait de la race, de la situation personnelle et de l’état matrimonial. Si l’on met de côté les problèmes de procédure révélés plus tôt dans la présente décision dans l’exposé de cette affaire, la décision de l’Association (après avoir représenté le plaignant aux trois paliers du processus de règlement de grief) selon laquelle le plaignant ne disposait pas de bons arguments à la lumière des faits et serait mieux servi par une solution obtenue par médiation était tout à fait raisonnable dans les circonstances. L’Association a la charge du grief en vertu de la loi (voir Gagnon et al.) et avait tout à fait le droit de prendre cette décision. Elle a communiqué la décision au plaignant, malgré ses affirmations à l’effet contraire à la lumière d’arguments convaincants, et n’a aucunement posé des gestes « […] malicieux, arbitraires, de mauvaise foi, [ou] discriminatoires […] » comme l’a soutenu le plaignant.

71 Le paragraphe « 4.3 » de la plainte un allègue maladroitement que :

[Traduction]

[…] depuis septembre 2006, mon employeur m’a agressé physiquement et verbalement, a commis de la discrimination à mon endroit pour des motifs illicites, a abusé de son pouvoir à mon égard, a miné ma réputation professionnelle, et a omis de prendre les mesures prescrites pour prendre en compte mon incapacité.

Ce peut être réparti en un certain nombre d’incidents allégués et décrits antérieurement dans la présente décision, dont aucun n’a été prouvé par le plaignant, et à l’égard desquels l’Association ne pouvait pas procéder dans la plupart des cas en raison du défaut du plaignant de collaborer avec l’Association dans sa fonction de représentation.

72 Le 4 avril 2007, le plaignant a déposé un grief au sujet des gestes posés par le capitaine Porteous le 19 décembre 2006. L’Association fait valoir, probablement à juste titre, que le grief est hors délai parce qu’en vertu de l’article 68 du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, un grief doit être déposé au plus tard 35 jours après que le plaignant a eu connaissance ou, selon l’arbitre de grief, aurait dû avoir connaissance du geste ou des circonstances qui ont donné lieu au grief. Toutefois, si l’on présume qu’il existe un argument plausible selon lequel le plaignant disposait de 35 jours à compter de la réception de la décision du lieutenant-colonel Simard du 1er mars 2007 de ne pas faire enquête sur les allégations à l’encontre du capitaine Porteous, le plaignant est-il fondé à déposer une plainte de représentation inéquitable contre l’Association? L’on doit nettement répondre à cette question par la négative. M. Archambault a examiné les renseignements qui lui ont été communiqués et estimait raisonnablement qu’avant que l’Association puisse soutenir le plaignant, il lui faudrait davantage de renseignements. Le plaignant s’est vu offrir la possibilité de fournir d’autres renseignements, mais il ne l’a pas fait. Ce n’est pas une preuve d’arbitraire, de discrimination, de mauvaise foi ou de négligence de la part de l’Association dans sa représentation du plaignant.

73 La prochaine question a trait aux faits énoncés dans la présente décision qui se rapportent à la mesure disciplinaire imposée au plaignant pour son courriel intempestif du 30 mars 2007. À juste titre, M. Archambault s’est dit préoccupé par le ton du courriel du plaignant dont il avait reçu copie, mais il était prêt à assister à une réunion disciplinaire si le plaignant fournissait une copie de la lettre disciplinaire. Le plaignant ne l’a pas fait. Le plaignant a explicitement refusé la représentation, quoique l’Association n’ait pas fermé la porte à la possibilité de le représenter si elle recevait des renseignements complets à des fins d’examen. Cela ne s’est jamais produit. Ce ne sont pas des circonstances dans lesquelles on peut conclure que l’Association a manqué à son devoir de représentation équitable.

74 La question de la représentation assurée par l’Association relativement au mandat pourrait également se ranger dans l’allégation générale contenue dans la plainte un. M. Archambault a accepté d’examiner la question à condition de recevoir d’autres renseignements. Toutefois, le grief ne pouvait pas aller de l’avant sur la base d’un manquement à la convention collective sans l’autorisation de l’Association. Le plaignant n’a pas fourni assez de renseignements et l’Association n’a pas poussé les questions plus loin. Comme le souligne l’Association, il se pose maintenant un problème quant aux délais de présentation de cette allégation, mais l’élément principal, c’est que l’Association s’est acquittée de ses obligations à l’égard du plaignant sans avoir adopté de comportement arbitraire ou discriminatoire ni sans faire preuve de mauvaise foi.

75 Le différend sur l’horaire flexible tombe également sous le coup de l’allégation formulée dans la plainte un. L’Association a conclu, plutôt raisonnablement, que les gestes du capitaine Quillan dans les circonstances n’équivalaient pas à un manquement à la convention collective et a bien informé le plaignant de sa décision selon laquelle elle n’appuierait pas son grief. Le plaignant a de nouveau tenté de faire valoir le soi-disant manquement du ministère à la convention collective sans avoir obtenu l’autorisation de l’Association, en violation du mécanisme légalement établi dont il connaissait parfaitement l’existence. De plus, en l’espèce, les gestes de l’Association et de ses représentants ne comportaient pas de manquement au devoir de représentation équitable, devoir dont le plaignant devait bénéficier en vertu des articles 187 et 190 de la Loi.

76 Le différend concernant la formule de demande de congé se range également dans la rubrique générale de l’allégation formulée en termes généraux dans la plainte un. L’Association en est encore une fois venue à la conclusion raisonnable qu’il n’y avait pas de fondement dans les prétentions du plaignant selon lesquelles il a fait l’objet de discrimination de la part du capitaine Quillan dans sa méthode administrative de régler la question de la formule de demande de congé et ses suites. L’Association a informé correctement le plaignant de son raisonnement et l’a prudemment mis en garde d’adoucir son approche conflictuelle avec le ministère. Il n’y a pas de preuve que l’Association agissait de manière arbitraire ou discriminatoire ou avec mauvaise foi. C’est plutôt le contraire.

77 À titre de question subsidiaire liée au différend sur la formule de demande de congé, le plaignant a allégué dans des courriels datés du 12 et du 17 juillet 2007 que les pratiques administratives du ministère exigeraient que lui-même (et le ministère) commettent une fraude. Cette position littérale de sa part était plutôt déraisonnable, mais il était fermé aux arguments du ministère et de l’Association qui tentaient de lui faire assouplir ses positions extrêmes. Le courriel de M. Archambault daté du 24 juillet 2007 considérait assez naturellement dans leurs allégations la poursuite d’une approche conflictuelle vaine avec le ministère de la part du plaignant. Le refus de l’Association d’appuyer le plaignant à cet égard se fondait sur une évaluation tout à fait raisonnable de l’absence de fondement de l’argumentation du plaignant et ne constitue certes pas un manquement au devoir de représentation équitable.

78 Un autre aspect de la plainte un réside dans le soi-disant refus par l’Association de donner au plaignant accès à la procédure de règlement du grief en ce qui concerne la mesure disciplinaire prise par le lieutenant-colonel Simard à l’égard du plaignant pour les remarques formulées par ce dernier dans le courriel daté du 9 juillet 2007, qui ont découlé de la question de la formule de la demande de congé. Cette question est également mentionnée dans la plainte deux. Dans ce cas, le plaignant a concentré son attention sur le refus de M. Black d’autoriser un grief dans le cadre d’une visite que le plaignant lui a faite le 27 août 2007 et sur les suites de ce refus. À partir de ce moment-là, le plaignant a été informé à de nombreuses reprises que M. Archambault avait le dernier mot sur ces questions. Le plaignant s’entêtait (c’est le moins que l’on puisse dire) dans son refus d’accepter la structure décisionnelle tout à fait légitime de l’Association à cet égard, position que le plaignant a réaffirmé plusieurs fois à l’audience. Toutefois, dans ce cas, le plaignant n’a jamais formellement demandé que M. Archambault autorise le grief, parce qu’il savait déjà (de façon certaine) ce que serait sa réponse, compte tenu de leur échange de correspondance sur la question. Quoi qu’il en soit, les dirigeants de l’Association ont abordé cette question conformément aux procédures établies et raisonnables de l’Association, comme M. Aggrey l’a longuement expliqué au plaignant à la fin d’août et au début de septembre 2007. Il n’y a pas de preuve de comportement arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi qui ressort de ces circonstances.

79 La dernière question à trancher dans la plainte un est l’allégation selon laquelle l’Association a représenté le plaignant de manière inadéquate à l’égard du défaut du ministère [traduction] « […]de prendre les mesures prescrites pour prendre en compte mon incapacité ». Le dossier tel qu’il est décrit précédemment est clair sur cette question. L’Association, par l’intermédiaire de M. Archambault, a dispensé des conseils généraux très détaillés et utiles au plaignant sur la façon de procéder pour présenter une demande de mesures d’adaptations efficace. L’élément clé d’une telle demande — et ce à juste titre — selon l’Association, était la nécessité pour le plaignant de fournir au ministère des renseignements de nature médicale adéquats. M. Archambault a dit clairement au plaignant que l’Association ne pouvait pas le représenter sur la question des mesures d’adaptation dans les circonstances. Le plaignant a reconnu la position de l’Association, mais a décidé d’agir seul. Il n’a jamais fourni les renseignements médicaux nécessaires. Ses arguments selon lesquels le ministère — et l’Association — devraient simplement accepter sa prétention non fondée voulant qu’il avait une incapacité sur la base de renseignements de Santé Canada qui n’étaient apparemment pas disponibles ne constituent pas une réponse adéquate. Pour l’essentiel, l’Association a raison d’affirmer que le plaignant, après son accord initial avec l’incapacité de l’Association de le représenter, n’a jamais demandé formellement d’autre aide et que les copies de courriels échangés entre le ministère et le plaignant ne suffisent pas à engager le devoir de représentation de l’Association. Toutefois, même si la dernière proposition était jugée incorrecte, l’Association a fait tout ce qu’elle pouvait raisonnablement faire pour le plaignant, compte tenu de l’insoumission ininterrompue du plaignant face à la nécessité de fournir des renseignements médicaux à jour sur la nature de son incapacité.

80 L’une des questions soulevées dans la plainte deux est l’allégation du plaignant selon laquelle l’Association ne l’a pas représenté adéquatement concernant la question de la conversion aux EC. Relativement à cette question, le plaignant fait tout simplement fausse route quant à ses attentes sur ce que l’Association aurait pu faire dans les circonstances. Tel qu’il a été décrit précédemment dans la présente décision, l’Association jouait un rôle restreint dans le processus de conversion aux EC. Cette question relève essentiellement des droits conférés à la direction du ministère. Le plaignant était frustré du retard avec lequel le ministère a émis sa Notification personnelle préalable. Cependant, ce n’est pas une question sur laquelle l’Association exerçait un contrôle. Le plaignant a allégué qu’il n’y a pas eu de manquement à la convention collective de la part du ministère qui engagerait la responsabilité de l’Association et n’a pas demandé de se faire représenter par l’Association. M. Archambault a donné au plaignant des conseils utiles sur la façon dont il pourrait aborder le ministère sur la conversion aux EC compte tenu des faits de l’espèce. Même si l’on estimait que le devoir de représentation équitable de l’Association s’appliquait dans ce processus, ses gestes à l’égard du plaignant étaient tout à fait adéquats.

81 La dernière phrase du paragraphe 4 de la plainte deux, l’« Énoncé concis des […] questions ayant fait l’objet d’une plainte […] », se lit comme suit : [traduction] « L’inconduite de la défenderesse est délibérée et calculée et se fait en collaboration avec l’employeur pour occasionner mon triste sort. » Tel qu’il est indiqué précédemment, cette allégation générale n’est absolument pas fondée du point de vue des faits. M. Archambault et M. Ouellette sont des spécialistes chevronnés des relations du travail. Ils ont fait un témoignage franc, cohérent et complet. Lorsque leur témoignage différait de celui du plaignant, il était invariablement plus crédible et fiable. L’ensemble de la preuve volumineuse dans cette affaire n’établit aucunement que l’Association a manqué à son devoir de donner des conseils justes et éclairés au plaignant ou qu’elle a agi de manière arbitraire, discriminatoire ou avec mauvaise foi. Bien que le plaignant ait pu croire qu’il y a eu collusion entre l’Association et le ministère quand l’Association a refusé d’accepter ou de soutenir ses allégations contre le ministère, il n’existe absolument aucune preuve de collusion entre l’Association et le ministère ou de complot ayant occasionné le triste sort du plaignant.

82 Les circonstances de cette affaire sont assez tragiques. Le plaignant est un professionnel intelligent et compétent, qui a semblé par le passé avoir rendu des services utiles au ministère en qualité de gestionnaire des relations avec la clientèle. Le plaignant possède une compréhension aigue de la discrimination raciale flagrante (ou intentionnelle) et systémique au Canada, de son évolution historique et de son impact dévastateur sur les Afro-Canadiens. Toutefois, dans sa volonté de prendre fait et cause pour la lutte contre la discrimination raciale et les autres formes de discrimination dans son lieu de travail, il semble avoir perdu tout sens de la perspective. Cette affaire ne porte pas directement sur le fond de ses allégations concernant les gestionnaires et les autres fonctionnaires du ministère. Toutefois, la nature de ces allégations, les circonstances dans lesquelles elles ont pris naissance et les réactions de l’Association à celles-ci nécessitent une compréhension du contexte des questions de fond. Chaque fois qu’il en avait l’occasion ou presque, le plaignant semblait mal interpréter les gestes de l’Association et des autres qui l’entouraient et opposer une résistance aux conseils sensés qu’il recevait de l’Association à cet égard. Le plaignant est tellement persuadé du bien-fondé de ses perceptions et de la justesse de sa cause qu’il a été incapable de comprendre les évaluations minutieuses et judicieuses de sa situation faites par M. Archambault et M. Ouellette. En outre, le sentiment du plaignant qui l’amène à croire que tout lui est dû l’a incité, dans les circonstances, à faire fi des normes appropriées de procédure et des critères de politesse applicables aux responsables de l’Association et aux autres personnes, même s’il a été bouleversé du fait que ses perceptions n’auraient pas obtenu ce traitement d’autrui. Enfin, la poursuite constante mais mal guidée d’une « victoire en arbitrage fondée sur des principes » par le plaignant dans plusieurs instances juridiques l’a amené à rejeter les approches réparatrices et fondées sur la médiation qui auraient pu permettre à l’Association de lui fournir des solutions à long terme favorables à ses problèmes avec le ministère. Cette situation s’est révélée très coûteuse du point de vue personnel pour le plaignant, sans parler des personnes qu’il a impliqué dans cette saga. Toutefois, les faits n’établissent pas ses prétentions selon la prépondérance des probabilités, loin de là, et ses plaintes déposées devant la Commission contre son agent négociateur, l’Association, doivent être rejetées.

83 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

84 Les plaintes sont rejetées.

Le 19 novembre 2009.

Traduction de la CRTFP

Bruce P. Archibald,
commissaire

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