Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La décision concerne plusieurs objections soulevées par l’employeur relativement aux conditions d’emploi que l’agent négociateur souhaitait renvoyer à l’arbitrage - le vice-président saisi de l’affaire a rejeté les objections qui, selon lui, concernaient les taux de rémunération et les augmentations d’échelons; la communication de renseignements au cours de la procédure de règlement des griefs; les normes disciplinaires; les mesures d’adaptation; l’assurance-vie, l’assurance-maladie et l’assurance-dentaire; les augmentations de salaire au mérite et les congés pour s’occuper d’affaires syndicales - les conditions d’emploi touchant ces questions pouvaient être renvoyées à l’arbitrage et elles ont donc été incluses dans le mandat - les objections de l’employeur ont été accueillies en ce qui concerne les conditions d’emploi touchant les pensions, les promotions, les processus d’évaluation du rendement et la dotation. Objections accueillies en partie.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-02-12
  • Dossier:  585-02-25
  • Référence:  2009 CRTFP 20

Devant le président de la
Commission des relations de travail
dans la fonction publique


DANS L’AFFAIRE DE
LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE
et d’un différend entre
l’Association des juristes du ministère de la Justice, l’agent négociateur,
et le Conseil du Trésor, l’employeur,
relativement à tous les employés de l’employeur de l’unité de négociation
du groupe Droit

Répertorié
Association des juristes du ministère de la Justice c. Conseil du Trésor

MANDAT DU CONSEIL D’ARBITRAGE

Destinataires:
Michael Bendel, président du conseil d'arbitrage; Chris Paliare et Jean-François Munn, membres du conseil d'arbitrage

Pour l’agent négociateur :
Stephen Barrett, avocat, et Caroline Baumann, co-avocate

Pour l'employeur:
Caroline Engmann, avocate, et Marc Thibodeau

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
datés du 25 septembre, du 6, du 15 et du 27 octobre, du 21 novembre et du 5 décembre 2008,
et d’une audience tenue à Ottawa, en Ontario, les 15 et 16 décembre 2008.
(Traduction de la CRTFP)

Demandes devant le président

1 Le 25 septembre 2008, le Conseil du Trésor (l’« employeur ») a demandé un arbitrage visant l’unité de négociation du groupe LA. Le groupe LA est constitué de tous les employés dudit groupe tel qu’il est défini dans la partie I de la Gazette du Canada datée du 27 mars 1999, dont le Conseil du Trésor est l’employeur et qui ne sont pas exclus de la négociation collective par la loi ou par une décision de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») (Association des juristes du ministère de la Justice et al. c. Conseil du Trésor et al, 2006 CRTFP 45, modifiée par Conseil du Trésor c. Association des juristes du ministère de la Justice, 2007 CRTFP 84).

2 L’employeur a produit une liste des conditions d’emploi qu’il souhaitait renvoyer à l’arbitrage. Ces conditions d’emploi sont jointes à la présente, à l’annexe 1.

3 Le 6 octobre 2008, l’Association des juristes du ministère de la Justice (l’AJMJ ou l’« agent négociateur ») a fourni une liste de conditions d’emploi additionnelles qu’elle désirait renvoyer à l’arbitrage. Ces conditions d’emploi sont jointes à la présente, à l’annexe 2.

4 Dans une lettre adressée à la Commission en date du 15 octobre 2008, l’employeur s’est opposé à certaines des conditions proposées par l’agent négociateur. L’employeur a soulevé un certain nombre d’exceptions déclinatoires de compétence, a relevé plusieurs articles maintenant considérés par l’employeur comme « non convenus » à la lumière des propositions de l’agent négociateur et a indiqué d’autres articles qui ne devraient pas être inclus dans le mandat parce que l’agent négociateur n’avait pas fourni ses propositions quant à la décision arbitrale qui doit être rendue, contrairement au paragraphe 48(1) du Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Cette lettre est également jointe à la présente, à l’annexe 3.

5 La Commission a demandé à l’agent négociateur ses arguments au sujet de ces exceptions déclinatoires et l’agent négociateur a répondu le 27 octobre 2008. Il a répliqué aux arguments de l’employeur et a demandé des détails sur les exceptions. Il a en outre modifié certaines de ses propositions. Cette lettre est également jointe à la présente, à l’annexe 4.

6 La Commission a demandé que l’employeur fournisse des détails sur ses exceptions déclinatoires de compétence. L’employeur a répliqué le 21 novembre 2008 et cette lettre est jointe à la présente, à l’annexe 5. L’agent négociateur a fourni sa réponse à la lettre de l’employeur le 5 décembre 2008 et y a joint des propositions modifiées. La lettre est jointe à la présente, à l’annexe 6.

7 Le président a décidé qu’une audience se tiendrait relativement aux exceptions déclinatoires de compétence soulevées par l’employeur. En vertu de l’article 45 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la LRTFP ou la « Loi »), le président de la Commission m’a autorisé, en ma qualité de vice-président, à donner le présent mandat au conseil d’arbitrage.

8 Au début de l’audience, l’employeur a admis que ses exceptions déclinatoires concernant la durée et le caractère rétroactif de la décision arbitrale étaient des questions qui relevaient du conseil d’arbitrage. Par conséquent, c’est le conseil d’arbitrage qui statuera sur ces exceptions.

9 Avant l’audience, la question de savoir si la clause d’« absence de discrimination » et si la clause 15.04 avaient fait l’objet d’une entente était en litige. À l’audience, l’employeur a reconnu que ces clauses avaient fait l’objet d’une entente et qu’en conséquence, elles ne s’inscrivent pas dans le mandat. Dans sa lettre datée du 27 octobre 2008, l’agent négociateur a déclaré qu’il n’entendait pas donner suite à sa proposition aux termes de la clause 16.03 (Responsabilités professionnelles).

10 L’employeur s’est opposé à l’inclusion du mot « juste » dans la clause 25.01 proposée par l’agent négociateur, car une modification de la Loi sur la gestion des finances publiques serait alors nécessaire, en contravention de l’alinéa 150(1)a) de la LRTFP. L’agent négociateur, dans sa lettre datée du 27 octobre 2008 (annexe 4), a accepté de modifier sa proposition en supprimant le mot « juste ». Par conséquent, telle que la proposition serait modifiée, elle ferait partie du mandat.

11 L’employeur a soutenu que l’agent négociateur a inclus deux nouvelles propositions dans la lettre qu’il a adressée à la Commission en date du 27 octobre 2008 (annexe 4). La première était une proposition modifiée qui portait sur les bureaux, et la deuxième avait trait à l’administration de la paie (article 22). À l’audience, l’employeur a fait valoir que les propositions n’ont pas été déposées de la bonne façon par l’agent négociateur et qu’elles ne pouvaient donc pas être comprises dans le mandat. L’employeur a également soutenu que ces questions n’avaient pas fait l’objet de négociations et qu’elles allaient donc à l’encontre du paragraphe 150(2) de la LRTFP. L’agent négociateur a fait valoir que l’employeur ne pouvait soulever d’exceptions pour la première fois à cette audience.

12 J’ai conclu que je peux me prononcer sur les exceptions déclinatoires soulevées par l’employeur, qui sont de nature juridictionnelle. Il ne peut exister de renonciation implicite aux exceptions déclinatoires de compétence, car je ne peux renvoyer à l’arbitrage que les conditions qui satisfont aux exigences de la LRTFP. L’agent négociateur n’a pas subi de préjudice du fait de ces exceptions soulevées à l’audience. Si le fait de soulever tardivement une exception déclinatoire de compétence entraîne un préjudice pour une partie, il pourrait convenir d’accorder un ajournement. Aucune demande d’ajournement n’a été présentée et l’agent négociateur était en mesure de répondre aux exceptions.

13 En ce qui a trait à l’exception formulée par l’employeur selon laquelle les propositions n’ont pas été présentées adéquatement, je conviens que la présentation de propositions d’un mandat dans le corps d’une lettre ne constitue pas une pratique usuelle et qu’elle ne devrait pas être favorisée. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé au début de l’audience que l’agent négociateur présente une liste révisée d’articles proposés aux fins du mandat, en la forme prévue, afin d’aider le conseil d’arbitrage une fois qu’il aura été établi. Toutefois, l’agent négociateur a soumis la proposition avant l’établissement du mandat, conformément à la LRTFP. De plus, l’article 241 de la LRTFP énonce clairement qu’aucune procédure n’est invalide en raison seulement d’un vice de forme ou d’une irrégularité technique. Je traiterai ci-après de l’allégation selon laquelle ces deux articles n’ont pas fait l’objet de négociations.

Exceptions déclinatoires de compétence

14 L’employeur s’est opposé à un certain nombre de propositions parce que les propositions contestées ne pouvaient être renvoyées à un conseil d’arbitrage en vertu de l’article 150 de la LRTFP, qui est ainsi rédigé :

          150. (1) (1) La décision arbitrale ne peut avoir pour effet direct ou indirect de modifier, supprimer ou établir une condition d’emploi

a) soit de manière à nécessiter ou entraîner l’adoption ou la modification d’une loi fédérale, exception faite des lois affectant les crédits nécessaires à son application;

b) une condition d’emploi qui a été ou pourrait être établie sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, la Loi sur la pension de la fonction publique ou la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État;

c) soit qui porte sur des normes, procédures ou méthodes régissant la nomination, l’évaluation, l’avancement, la mutation, le renvoi en cours de stage ou la mise en disponibilité des fonctionnaires;

d) soit, dans le cas d’un organisme distinct, qui porte sur le licenciement, sauf le licenciement imposé pour manquement à la discipline ou inconduite

e) soit de manière que cela aurait une incidence sur l’organisation de la fonction publique, l’attribution de fonctions aux postes et aux personnes employées au sein de celle-ci et leur classification.

Questions exclues

          (2) Sont exclues du champ de la décision arbitrale les conditions d’emploi n’ayant pas fait l’objet de négociations entre les parties avant que ne soit demandé l’arbitrage.

15 Les parties ont formulé des arguments sur les principes d’interprétation législative qui devraient être pris en compte pour interpréter les dispositions de la LRTFP.

16 L’employeur a déclaré que la jurisprudence établit que je devrais procéder à une analyse en deux volets. Je devrais d’abord déterminer si la proposition est visée par les dispositions de fond des articles 113 et 150 de la Loi. Ensuite, je devrais établir si la proposition laisserait intactes ou non les autres prérogatives de l’employeur qui sont énoncées dans la loi, en particulier à l’article 7  de la Loi.

17 L’employeur a fait valoir que le principe moderne d’interprétation législative s’appliquait (Sullivan and Dreidger on the Construction of Statutes, 4e édition, page 1) :

[Traduction]

[…]

Aujourd’hui, il n’y a qu’un seul principe ou solution : il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

[…]

18 Dans sa lettre du 5 décembre 2008, l’agent négociateur a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

[…] bien qu’en l’instance, l’AJMJ ne conteste pas directement la validité constitutionnelle des restrictions imposées par la LRTFP à la négociation collective, l’AJMJ estime en l’instance que conformément aux principes bien établis d’interprétation législative, toute restriction à la liberté de prendre part à des négociations collectives sur l’ensemble des conditions d’emploi reconnue constitutionnellement par l’al. 2d) [de la Charte canadienne des droits et libertés (la « Charte »)] devrait être interprétée de manière aussi restrictive que possible de façon à être compatible avec les valeurs véhiculées par la Charte et avec les droits et libertés qui y sont garantis. De plus, l’absence de contestation directe de la validité constitutionnelle des restrictions législatives par l’AJMJ ne porte pas préjudice à sa position selon laquelle les restrictions constituent une violation injustifiée de l’al. 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés.

19 L’agent négociateur a élargi sa position à l’audience. Il a fait valoir que les propositions en litige devraient faire l’objet d’une interprétation restrictive et essentiellement conforme aux valeurs de la Charte. L’agent négociateur a également invoqué la présomption en faveur de l’observation des normes constitutionnelles énoncée dans Sullivan and Dreidger on the Construction of Statutes, à la page 367. L’agent négociateur m’a renvoyé à Health Services and Support – Facilities Subsector Bargaining Assn. c. Colombie-Britannique, 2007 CSC 27 (également appelée « Services de santé de la C.-B. ») et a fait valoir que cette décision a établi un  droit à la négociation collective protégé par la Charte. Ont également été invoquées Hills c. Canada (Procureur général), [1988] 1 R.C.S. 513; R. c. Sharpe, 2001 CSC 2; Slaight Communications Inc. c. Davidson, [1989] 1 R.C.S. 1038; Bande et nation indienne d’Ermineskin c. Canada,2006 CAF 415 (CanLII); Province of Manitoba and Manitoba Government and General Employees’ Union, 27 octobre 2008; Canada (Procureur général) c. Abrahams, [1983] 1 R.C.S. 2; Fraser v. Ontario (Attorney General), [2008] ONCA 760 (CanLII); et Renvoi relatif à la Public Service Employee Relations Act (Alb.), [1987] 1 R.C.S. 313 (dissidence du juge Dickson, J.C.). Dans Durham Regional Police Association v. Regional Municipality of Durham Police Services Board, 2007 CanLII 27333, l’arbitre de grief a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…]

75.  Cette décision préliminaire n’est ni le moment ni l’endroit de déterminer l’effet de cette décision récente de la Cour suprême sur la négociation collective en général. Sa pertinence pour la présente affaire se limite aux directives d’interprétation qu’elle renferme. Pour l’essentiel, la Cour suprême affirme que la protection constitutionnelle de la liberté d’association comprend des protections restreintes de la négociation collective. Par conséquent, il s’ensuit que la loi doit être interprétée et appliquée de manière à donner effet à cette protection. En conséquence, une loi ne devrait pas être interprétée ou appliquée d’une manière qui entraverait de façon substantielle ou qui compromettrait la capacité d’une association ou d’un syndicat de s’engager dans un processus de négociation des conditions de travail. Cela applique une présomption à l’interprétation d’une loi, selon laquelle en l’absence d’une directive claire à l’effet contraire, il faudrait donner à la loi une interprétation permettant le maintien de la capacité des employés de négocier des conditions de travail ou des conditions au lieu de travail. La Public Service Act (PSA) le prévoit expressément. Un libellé très explicite serait nécessaire pour qu’on en arrive à la conclusion que la réglementation et certaines dispositions de la PSA éliminent le processus de négociation des conditions de travail […]

[…]

77.  Par conséquent, dans le cadre de l’interprétation et de l’application de la PSA, il faut donner effet aux décisions de la Cour suprême sur la protection du processus de négociation collective. En l’absence d’une directive claire selon laquelle la dotation et la mutation ne relèvent pas du champ d’application de la négociation, il faut donner à la PSA une interprétation favorisant le maintien du processus de négociation des conditions de travail par les parties. […]

[…]

20 L’agent négociateur a fait valoir que nombre de ses propositions ne modifient ni n’éliminent aucune condition d’emploi, mais qu’elles visent plutôt à conserver simplement des droits existants. C’est particulièrement le cas lorsqu’il est indiqué que la proposition est « assujettie à » la loi.

21 L’agent négociateur a également soutenu qu’il conviendrait de donner une interprétation téléologique aux lois sur l’emploi; voir Re Rizzo and Rizzo Shoes Ltd., [1998] 1 R.C.S. 27, au paragraphe 24. On me cite également le préambule de la LRTFP à l’appui de la position de l’agent négociateur, selon laquelle les restrictions législatives qui s’appliquent à la compétence d’un conseil d’arbitrage devraient faire l’objet d’une interprétation étroite permettant de soumettre le plus grand nombre possible de questions à un conseil d’arbitrage. L’agent négociateur a fait valoir que je devrais me pencher sur l’essence des propositions pour établir si elles pourraient être renvoyées à l’arbitrage.

22 L’agent négociateur a prétendu que l’alinéa 150(1)a) de la Loi (qui prévoit qu’une décision arbitrale ne peut inclure une proposition qui nécessiterait la modification de la loi) devrait être interprété de manière à nécessiter davantage que la simple possibilité d’une modification. L’agent négociateur a fait valoir que je dois être convaincu que l’inclusion de la proposition « nécessiterait » la modification de la loi.

23 L’agent négociateur a fait valoir que l’alinéa 150(1)b) de la Loi (selon lequel une décision arbitrale ne peut renfermer une condition qui a été ou pourrait être établie sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP) ou de la Loi sur la pension de la fonction publique (LPFP)) devrait être interprété de manière à exiger une incohérence véritable ou fondamentale entre la proposition et la loi en question pour que la proposition soit exclue du mandat.

24 L’agent négociateur a fait valoir que l’alinéa 150(1)c) de la Loi (selon lequel une décision arbitrale ne peut inclure une condition qui « porte sur » des normes, procédures ou méthodes régissant toute une gamme de questions de dotation) devrait être interprété comme une disposition « reliée de façon significative ou substantielle » à des questions de dotation plutôt que comme une disposition qui « touche [simplement] à de telles questions ».

25 L’agent négociateur a prétendu que l’alinéa 150(1)e) de la Loi (qui interdit l’inclusion d’une condition qui « a une incidence » sur l’organisation de la fonction publique, l’attribution de fonctions et la classification) était également ambigu et devrait faire l’objet d’une interprétation étroite.

26 L’employeur a prétendu que le principe d’interprétation des lois conformément aux valeurs de la Charte s’appliquait seulement en cas d’ambiguïté des dispositions législatives (Bell Express Vu Limited Partnership c. Rex, 2002 CSC 42, au paragraphe 29, et R. c. Rodgers, 2006 CSC 15, au paragraphe 19). En l’espèce, les dispositions législatives n’étaient pas ambiguës, et je n’étais pas tenu d’appliquer une analyse basée sur la Charte. L’employeur a également mentionné que le libellé de la loi dans Durham Regional Police Association et Province of Manitoba diffère de celui de la LRTFP.

27 Je conviens que la Charte peut être utilisée comme outil d’interprétation législative. Toutefois, la Cour suprême du Canada a établi clairement qu’un tel principe ne se substitue pas à une contestation constitutionnelle directe (Canada (Procureur général) c. Mossop [1993] 1 R.C.S. 554, cité dans Sullivan and Driedger on the Construction of Statute, à la page 369) :

[…]

Si sa constitutionnalité n’est pas contestée en vertu de la Charte, lorsque l’intention du législateur est évidente, les cours de justice et les tribunaux administratifs n’ont d’autres pouvoirs que d’appliquer la loi. Si la signification ou la portée du texte de loi est ambiguë, les cours de justice devraient alors, au moyen des règles d’interprétation habituelles, tenter de cerner l’objet de la loi et, s’il existe plus d’une interprétation qui soit compatible avec cet objet, il faut opter pour celle qui est le plus conforme à la Charte.

Je tiens toutefois à répéter que, s’il n’y a pas de contestation fondée sur la Charte, celle-ci ne peut être utilisée pour interpréter une loi de façon à contrarier son objet ou à lui donner un effet que le législateur ne souhaitait pas de toute évidence.

[…]

28 Si le libellé de la loi établit clairement l’intention du législateur, je ne peux faire fi de cette intention. En l’espèce, les dispositions législatives ne sont pas ambiguës. Le paragraphe 150(1) de la Loi établit clairement ce qu’une décision arbitrale peut englober. Tout d’abord, une décision arbitrale ne peut « avoir pour effet direct ou indirect » de modifier, supprimer ou établir une condition d’emploi dans certaines circonstances. Ce libellé est très général et si le législateur avait voulu limiter la portée des exclusions, il n’aurait pas utilisé le terme « indirect ». L’alinéa 150(1)a) n’est pas ambigu. Je suis d’accord avec l’agent négociateur, selon lequel l’alinéa en question signifie que l’employeur doit établir la naissance d’un besoin qui nécessiterait l’adoption ou la modification d’une loi, et ce parce que l’expression « de manière à nécessiter ou entraîner » est d’application obligatoire. L’alinéa 150(1)b) n’est pas non plus ambigu. La décision arbitrale ne peut avoir pour effet direct ou indirect d’établir une nouvelle condition d’emploi si cette condition « a été ou pourrait être établie » sous le régime de la LEFP ou de la LPFP (la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État n’est pas pertinente en l’espèce). L’agent négociateur prétend qu’une incohérence véritable ou fondamentale entre la condition et la loi pertinente était nécessaire. L’interprétation ordinaire de la disposition établit qu’il suffit de démontrer que la condition a été ou pourrait être établie sous le régime de l’une des lois mentionnées. L’agent négociateur a prétendu que je devrais me pencher sur l’« essence » des propositions pour décider si elles sont « surtout liées » aux éléments énumérés à l’alinéa 150(1)c). Cette position limite considérablement la portée de la disposition législative. Elle prévoit qu’une décision arbitrale ne peut « avoir pour effet direct ou indirect » de modifier, supprimer ou établir une condition d’emploi si celle-ci « porte sur » des normes, procédures ou méthodes régissant la nomination, l’évaluation, l’avancement, la mutation, et ainsi de suite. Si un élément « porte directement ou indirectement sur […] » quelque chose, il est clair que même si le lien n’est qu’accessoire par rapport à la question, cet élément est visé par la disposition législative. L’alinéa 150(1)e) est similaire : la décision arbitrale ne peut avoir pour effet direct ou indirect [de modifier, supprimer ou établir] une condition d’emploi […] de manière que cela ait une incidence sur l’organisation de la fonction publique, l’attribution de fonctions aux postes et aux personnes et la classification de celles-ci. Il n’y a pas d’ambiguïté et l’utilisation des termes « avoir pour effet indirect […] de manière que cela ait une incidence » révèle que le législateur souhaitait que la disposition fasse l’objet d’une interprétation large.

29 Dans le cadre de l’audience, l’agent négociateur a fait valoir que la plupart des jugements cités par l’employeur ont été rendus sous le régime des anciennes dispositions législatives, dont le libellé était considérablement différent. Par conséquent, il a soutenu que la jurisprudence était inapplicable. L’employeur a répliqué que le libellé de la loi ne différait pas beaucoup et que la jurisprudence demeurait pertinente. Tout en admettant que le libellé de la loi diffère dans certains cas, je ne suis pas d’accord pour affirmer que le cadre législatif de détermination du mandat d’un conseil d’arbitrage a beaucoup évolué sous le régime de la LRTFP. Quoique la jurisprudence rendue sous le régime des anciennes dispositions législatives ne lie pas les parties, elle demeure pertinente aux fins de mon examen des exceptions déclinatoires soulevées par l’employeur.

Propositions visées par les exceptions déclinatoires

30 J’ai exposé chaque proposition d’article (ou un résumé de celui-ci) qui fait l’objet d’une exception déclinatoire et résumé les arguments des parties, et j’ai exposé ma décision relativement à chaque article. Sauf indication contraire, j’ai utilisé la numérotation des propositions de l’agent négociateur.

31 Dans les cas où j’ai conclu que des parties de certaines propositions ne relèvent pas d’un conseil d’arbitrage, j’ai séparé ces parties des propositions tandis que le reste de la proposition continue de relever de la compétence du conseil d’arbitrage; voir Alliance de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 185-02-297 (19860204).

Clause 10.17 – Congé à temps plein ou à temps partiel pour le président/les dirigeants de l’AJMJ et clause 10.18 -Aucun préjudice pour les avocats en congé en vertu de l’article 10    

32 Les articles proposés sont les suivants :

Congé à temps plein ou partiel pour le président ou les agents de l’AJJ

10.17 L’employeur accorde un congé sans solde au président de l’AJJ et à un maximum de deux agents supplémentaires de l’AJJ, à temps plein ou partiel, selon ce qu’aura déterminé l’AJJ. Ce congé ne constitue pas une interruption de service ou de l’emploi continu et il sera comptabilisé pour l’accumulation de périodes service pour toutes les fins en vertu de la présente convention collective, y compris :

(a)  le calcul des crédits de vacances,

(b)  le calcul des crédits de congé de maladie,

(c)  le calcul du droit à une indemnité de cessation d’emploi,

(d)  les prestations et droit à une retraite, sous réserve de ce que dispose la loi applicable,

(e)  le droit à la santé et à l’aide sociale, à des prestations dentaires et à une assurance-vie.

En outre, pour les fins de la détermination de leur salaire à leur retour au travail après le congé, les juristes en congé à temps plein ou partiel aux termes de la présente disposition seront, dans le cas des agents LA-2 et de niveau supérieur, réputés avoir reçu une rémunération au rendement au niveau « satisfait aux attentes » et, dans le cas des agents LA-1, réputés avoir franchi les étapes des augmentations d’échelon  et de promotion de niveau LA-1 à LA-2 pendant la période du congé. 

Aucun préjudice à l’endroit des juristes en congé en vertu de l’article 10

10.18 Le temps passé en congé en vertu de cet article sera pris en compte dans le calcul du droit à des vacances, à des congés de maladie, ne constituera pas une interruption de service ou de l’emploi continu, et sera comptabilisé en vue de l’accumulation de périodes de service, à toutes les fins en vertu de la présente convention collective, y compris :

(a)  le calcul des crédits de vacances,

(b)  le calcul des crédits de congé de maladie,

(c)  le calcul du droit à une indemnité de cessation d’emploi,

(d)  les prestations et droit à une retraite, sous réserve de ce que dispose la loi applicable.

(e)  le droit à la santé et à l’aide sociale, à des prestations dentaires et à une assurance-vie.

33 L’employeur s’est opposé aux parties des articles qui faisaient mention des congés comptés aux fins de la pension. Il a fait valoir que ce volet de la proposition allait à l’encontre de l’alinéa 150(1)b) de la LRTFP, car la proposition portait sur des questions assujetties à la LPFP. L’employeur s’est également opposé à la disposition selon laquelle les employés étaient réputés avoir reçu une rémunération au rendement au stade où ils répondent aux attentes parce que cette disposition portait à la fois sur l’évaluation du rendement et sur la nomination. L’employeur s’est en outre opposé à la proposition que les personnes de niveau LA-01 soient nommées au niveau LA-02, en faisant valoir qu’une telle nomination allait à l’encontre des alinéas 150(1)b) et c) de la LRTFP.

34 Dans sa lettre datée du 5 décembre 2008, l’agent négociateur faisait valoir qu’il n’y avait pas de violation de la LPFP, car il est expressément énoncé que les dispositions devant être assujetties à des modalités sont ou peuvent être établies sous le régime de cette loi. De plus, l’agent négociateur ne vise pas à modifier ou à éliminer une condition d’emploi existante ou à établir une nouvelle condition d’emploi. On a fait valoir qu’aucun élément de la proposition n’est incompatible avec la LPFP. En outre, la proposition ne modifie ni n’élimine aucune condition d’emploi, ni n’établit de nouvelle condition. Elle ne fait que maintenir la situation actuelle. Subsidiairement, l’agent négociateur a fait valoir que l’essence de la proposition porte sur la protection de la rémunération globale des personnes en congé, ce qui a un effet accessoire sur les pensions. L’agent négociateur a déclaré que la proposition devrait être interprétée en tenant compte de l’objet visé et qu’en l’absence de violation de la LPFP, il devrait être statué qu’elle relève de la compétence d’un conseil d’arbitrage.

35 À l’audience, l’agent négociateur a soutenu que la disposition portant présomption sur les congés non rémunérés a seulement trait à la rémunération et qu’elle ne touche aucunement l’évaluation des employés. L’agent négociateur a prétendu, à titre subsidiaire, que la proposition pourrait être modifiée de manière à prévoir des augmentations additionnelles présumées une fois que la personne est réputée avoir atteint l’échelon supérieur du niveau LA-01.

36 Je conclus que les parties de la proposition qui se rapportent à la période de service ouvrant droit à pension ou aux prestations de retraite ne peuvent faire partie du mandat. L’alinéa 150(1)b) de la LRTFP énonce clairement que si la condition a été ou pourrait être établie en vertu de la LPFP, elle ne peut être comprise dans le mandat. L’ajout de l’expression « sous réserve d’une loi applicable » ne modifie pas le fait que la proposition est une condition qui est ou qui pourrait être établie sous le régime de la LPFP. L’argument de l’agent négociateur selon lequel il ne tente pas de modifier, d’éliminer ou d’établir une condition d’emploi ne peut être justifié. Manifestement, la nouvelle convention collective établira des conditions d’emploi. Et même si la première convention collective intègre des conditions d’emploi pour les personnes qui font partie du groupe LA, il demeure que la nouvelle convention collective établira de nouvelles conditions d’emploi.

37 L’employeur s’est également opposé à la disposition sur le salaire au retour d’un congé contenue dans la clause 10.17. Le libellé proposé prévoit que les employés du groupe et du niveau LA-02 et des groupe et niveau supérieurs seront « réputés avoir reçu une rémunération au rendement au stade où ils répondent aux attentes ». Les employés du groupe et du niveau LA-01 qui reviennent d’un congé seront réputés avoir franchi les échelons des LA-1 et avoir été promus de LA-1 à LA-2 pendant la période de congé. L’opposition de l’employeur reposait sur le fait que la proposition portait sur l’évaluation du rendement et la nomination. L’agent négociateur faisait valoir que la proposition portait uniquement sur la rémunération.

38 En vertu du premier volet de la disposition proposée, les employés en congé sont « réputés » avoir reçu une rémunération au rendement lorsqu’ils ont comblé les attentes. Je conclus qu’il s’agit d’une proposition sur la rémunération et qu’elle ne porte pas sur l’évaluation ou l’appréciation des employés. Rien ne laisse croire que les employés en congé seront effectivement évalués relativement à la période en cause lorsqu’ils sont en congé. Cette partie de la proposition porte tout simplement sur la façon dont la rémunération sera calculée au retour du congé. En ce qui concerne les employés de groupe et de niveau LA-01, le premier volet du libellé proposé traite de la progression dans les échelons et, à ce titre, est une proposition relative à la rémunération. Le deuxième volet du libellé proposé ne peut être inclus dans le mandat, car il nécessite l’avancement d’un employé de LA-01 à LA-02. La proposition modifiée qui est mise de l’avant par l’agent négociateur comporterait une disposition déterminant des augmentations de rémunération additionnelles une fois que l’employé a atteint l’échelon maximum des LA-01. Je conclus que la proposition, telle qu’elle a été modifiée, est une proposition relative à la rémunération et qu’elle peut être comprise dans le mandat.

39 Par conséquent, les alinéas d) des deux clauses proposées (10.17 et 10.18) sont supprimés des propositions et les clauses, telles qu’elles ont été modifiées, sont incluses dans le mandat. Cela comprend la modification du calcul de la rémunération pour les LA-01 en congé, comme l’énonce l’agent négociateur. À l’annexe 6, le libellé proposé par l’agent négociateur pour l’Appendice S1.2 qui portait sur des situations dans lesquelles un employé de niveau LA-01 avait atteint le sommet de l’échelle salariale des LA-01 (« pour toutes les périodes de 6 mois additionnelles que passe un avocat au niveau LA-1, l’employé reçoit une autre augmentation d’échelon de rémunération au pro rata »), et la proposition applicable aux clauses 10.17 et 10.18 sera modifiée conformément à cette formule.

Article 11 – Procédure de règlement des griefs

40 La clause proposée est la suivante :

11.03 L’employeur accepte, sur demande, de mettre toute la documentation relative au grief à la disposition de la ou des personnes prenant la décision qui fait l’objet du grief.

41 L’employeur a fait valoir que cette proposition peut nécessiter la modification de la Loi sur l’accès à l’information, car l’information accessible à la personne qui prend la décision peut être interdite de divulgation en vertu de la Loi sur l’accès à l’information ou de la Loi sur la protection des renseignements personnels. C’est expressément interdit en vertu de l’alinéa 150(1)a) de la LRTFP. L’employeur a aussi fait valoir que les conditions de divulgation prévues par la LRTFP apaisent les préoccupations de l’agent négociateur.

42 L’agent négociateur a fait valoir que l’employeur n’a pas établi qu’une modification de la Loi sur l’accès à l’information ou de la Loi sur la protection des renseignements personnels serait nécessaire. L’agent négociateur soutenait que le fait de fournir à un agent négociateur des documents pertinents relativement à l’application de la convention collective dans le cadre de sa procédure de règlement de grief et d’arbitrage ne contrevient pas à la Loi. Dans sa lettre du 5 décembre 2008 (annexe 6), l’agent négociateur a déclaré qu’il n’avait [traduction] « pas de difficulté à assujettir l’exigence de fournir de la documentation à l’effet de primauté, s’il y a lieu, de la Loi sur l’accès à l’information ». À l’audience, l’agent négociateur a fait valoir que la proposition ne visait pas à avoir préséance sur la Loi sur l’accès à l’information ou sur la Loi sur la protection des renseignements personnels. On m’a cité les décisions suivantes à l’appui de la position de l’agent négociateur selon laquelle la proposition n’allait pas à l’encontre de la loi : Monarch Transport Inc. et Dempsey Freight Systems Ltd., [2003] CCRI no 249; Canada Post Corp. v. Canadian Union of Postal Workers, [1993] C.L.A.D. no 277 (QL); et Alliance de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor et Commission de la fonction publique, dossiers de la CRTFP 161-02-791 et 169-02-584 (19960426). À l’audience, l’agent négociateur a de nouveau déclaré qu’il lui convenait d’ajouter à la proposition qu’elle était assujettie à la Loi sur l’accès à l’information et à la Loi sur la protection des renseignements personnels, afin d’éliminer tout débat.

43 La jurisprudence citée par l’agent négociateur portait sur l’accès aux renseignements personnels des employés, comme les adresses et numéros de téléphone. Aucune des décisions citées ne faisait référence à l’accès à l’information dans le contexte des griefs, qui peuvent générer de nombreux renseignements personnels au sujet des tiers. Compte tenu de la modification proposée par l’agent négociateur à la proposition contenue à l’annexe 6, et de sa répétition de la modification à l’audience, je n’ai pas à tirer une conclusion sur cette question. Par conséquent, je conclus que la proposition modifiée de l’agent négociateur peut être comprise dans le mandat, car il est clair qu’aucune modification de la Loi sur l’accès à l’information ou de la Loi sur la protection des renseignements personnels ne serait nécessaire. Par conséquent, la proposition est modifiée par l’ajout de ce qui suit : « sous réserve des dispositions de la Loi sur l’accès à l’information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels ».

Article 16 – Responsabilités professionnelles

44 L’employeur s’est opposé à l’inclusion d’une partie de la clause 16.01 parce qu’elle portait sur l’évaluation des employés, en contravention de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP. La clause se lit comme suit (la partie contestée est mise en relief) :

16.01 Les obligations et les normes professionnelles revêtent autant d’importance pour les employés et pour leurs gestionnaires, qui ont tous deux la responsabilité d’en assurer le respect. À cette fin, si, pour quelque motif que ce soit, les employés s’inquiètent de leur capacité d’agir dans le respect de leurs responsabilités professionnelles, ils porteront ces préoccupations à l’attention de leur gestionnaire, qui fera à son tour enquête et prendra toutes les mesures correctrices nécessaires. En tout état de cause, les employés ne feront pas l’objet de sanctions disciplinaires ni ne seront évalués négativement pour avoir soulevé des préoccupations au sujet de leurs obligations professionnelles ou avoir refusé d’agir d’une manière contraire à leurs obligations professionnelles. En tout état de cause, il est convenu qu’on n’attendra d’aucun juriste qu’il accomplisse un travail en-deçà de la norme de qualité et de compétence professionnelle énoncée dans les règles de déontologie du barreau applicable. 

[Je souligne]

45 L’agent négociateur a fait valoir dans sa lettre du 5 décembre 2008 que [traduction] « l’intention et l’effet véritables, ou l’essence » de la proposition ne portaient pas sur l’évaluation, mais plutôt sur la protection des obligations professionnelles des avocats. À l’audience, l’agent négociateur a soutenu qu’une approche fondée sur l’objet permet de conclure que la proposition concerne les obligations professionnelles, et non l’évaluation. Il faut se demander si la proposition « est reliée de façon significative ou substantielle » aux évaluations. La proposition, pour être visée par l’exclusion de l’alinéa 150(1)c) de la Loi, doit porter, essentiellement, de manière substantielle, sur les évaluations. L’agent négociateur m’a demandé d’exercer mon pouvoir discrétionnaire afin de permettre que la proposition soit comprise dans le mandat. Subsidiairement, l’agent négociateur a fait valoir que l’expression « évaluation négative » pourrait être retirée de la proposition.

46 Je conclus que la partie de la proposition qui traite de l’évaluation porte directement sur l’appréciation des employés et que, par conséquent, elle ne doit pas être comprise dans le mandat. Le reste de la proposition peut être inclus dans le mandat.

Article 16.02 - Bureaux

47 Dans sa lettre du 27 octobre 2008, l’agent négociateur a proposé de modifier sa proposition en raison des questions qui lui ont été soumises après le dépôt des propositions. La proposition modifiée est ainsi rédigée (le texte modifié est en caractères gras) :

Tous les juristes auront droit à un bureau fermé afin de les habiliter à s’acquitter de leurs responsabilités professionnelles, y compris l’obligation professionnelle de préserver la confidentialité et de protéger le secret professionnel. Par souci de précision, les bureaux fermés seront des bureaux avec des fenêtres extérieures.

[Je souligne]

48 L’employeur a soutenu que cette proposition ne pourrait être comprise dans le mandat parce qu’elle allait à l’encontre du paragraphe 150(2) de la LRTFP. L’avocat de l’employeur m’a cité la décision Conseil du Trésor c. Association des économistes, sociologues et statisticiens (AESS), dossier de la CRTFP 185-02-281 (19841221), dans laquelle l’agent négociateur a modifié sa proposition à mi-parcours. Dans cette affaire, le conseil d’arbitrage a jugé que la proposition modifiée ne relevait pas de sa compétence parce qu’elle ne faisait pas l’objet de négociations. L’agent négociateur a prétendu que la question des bureaux d’avocat faisait l’objet de négociations.

49 Dans Conseil du Trésor c. AESS, le conseil d’arbitrage a interprété une disposition identique au paragraphe 150(2) de la LRTFP, selon laquelle la condition d’emploi en question doit avoir fait l’objet de négociations, et non la proposition elle-même. L’objet de cette disposition a été énoncé par le conseil d’arbitrage de la façon suivante :

[…]

Le paragraphe 70(3), qui empêche qu’une décision arbitrale porte sur une question qui n’a pas été soulevée au cours des négociations, cadre avec le principe directeur de la Loi, selon lequel les parties doivent négocier jusqu’à ce qu’elles aboutissent à une impasse, avant de pouvoir demander l’arbitrage […] Ce serait aller à l’encontre de ce principe directeur que de permettre  à une partie de demander l’arbitrage à l’égard d’une question que l’autre partie n’a pas eu l’occasion d’examiner raisonnablement et à laquelle elle n’a pas pu répondre dans le cadre des négociations. Il est difficile de définir avec certitude le point où une proposition modifiée ne porte plus sur la même condition que la proposition originale. Cette question fait appel au jugement de la Commission, qui la tranchera dans chaque affaire d’après sa compréhension du processus de négociation et d’arbitrage […]

[…]

50 Dans le dossier cité précédemment par l’employeur, le conseil d’arbitrage a conclu que la différence entre la proposition initiale et la proposition modifiée est « de toute évidence importante même si les deux partent d’une préoccupation semblable ». La question des bureaux des avocats faisait l’objet de négociations et la proposition modifiée ne diffère pas considérablement de la proposition originale. Par conséquent, la proposition peut faire partie du mandat.

Article 19.03 – Congé de maternité non rémunéré (numérotation de l’employeur)

51 Dans l’annexe 2, l’agent négociateur a mentionné par mégarde que le libellé proposé était celui de l’employeur. Cette erreur a été rectifiée dans sa lettre datée du 27 octobre 2008. Par conséquent, la clause qui suit fera partie du mandat comme question litigieuse :

19.03 Congé de maternité sans solde

(d) L’employeur peut exiger de l’employée un certificat de grossesse délivré par un médecin, aux frais de l’employeur.

Article 19 – Poste à pourvoir

52 La proposition est la suivante :

19.01 Chaque employé faisant partie de l’unité de négociation aura le droit de recevoir un avis raisonnable de toute vacance de poste et de participer à tout concours concernant un poste d’employé dans l’unité de négociation.

19.02 L’employeur consulte l’AJJ au sujet des règles applicables aux postes à pourvoir.

53 L’employeur a fait valoir que la proposition porte sur la dotation. Ces questions sont régies par la LEFP. Par conséquent, cette proposition va à l’encontre des alinéas 150(1)b) et c) de la LRTFP. L’employeur a prétendu que la clause 19.01 proposée confère expressément le droit de recevoir un avis de vacance de poste, ce que régit déjà la LEFP. La proposition de consultation que renferme la clause 19.02 traite aussi directement de la dotation et ne peut être comprise dans une décision arbitrale. L’employeur m’a cité Finkelman and Goldenberg, Collective Bargaining in the Public Service: the Federal Experience in Canada et Syndicat national des travailleurs et travailleuses en communications c. Chambre des communes, dossier de la CRTFP 485-H-1 (19880315).

54 L’agent négociateur a fait valoir dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 que la clause 19.01 proposée n’usurpe en rien le droit de l’employeur de combler des vacances sur la base de son évaluation du mérite d’un candidat en particulier sous le régime de la LEFP. Il a également fait valoir que la clause 19.02 proposée n’entraînerait qu’une obligation de consultation et qu’elle n’aurait aucune répercussion sur les droits de l’employeur en matière de dotation. À l’audience, l’agent négociateur a mentionné que l’employeur n’avait relevé aucune disposition de la LEFP qui était en conflit avec cette proposition. L’agent négociateur estimait qu’il n’y avait rien d’incompatible entre la proposition et la LEFP. La décision citée par l’employeur (Syndicat national des travailleurs et travailleuses en communications c. Chambre des communes) ne portait pas sur le libellé de cette proposition. On m’a également cité Association professionnelle des agents du service extérieur c. Conseil du Trésor,2004 CRTFP 144, et Institut professionnel de la fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor,2008 CRTFP 72. Subsidiairement, l’agent négociateur a fait valoir que la proposition pourrait être modifiée de manière à être « assujettie aux dispositions de la LEFP ».

55 La clause 19.01 proposée porte clairement sur des questions régies par la LEFP. Elle est censée imposer des exigences à l’employeur avant la tenue d’un concours (avis raisonnable) et conférer aux employés un droit de présenter leur candidature à n’importe quel concours sur un poste qui fait partie d’une unité de négociation. Ces exigences portent manifestement sur les mécanismes et les procédures qui régissent la dotation (nomination, avancement et mutation d’employés) et, à ce titre, elles ne peuvent être comprises dans le mandat sous le régime de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP. Je n’ai pas à décider si la clause proposée enfreindrait également l’alinéa 150(1)b).

56 La clause 19.02 proposée est une disposition sur la consultation. Dans le mandat concernant Institut professionnel de la fonction publique du Canada et Conseil du Trésor (Groupe de la recherche), un vice-président de la Commission a statué sur une proposition de consultation qui, au dire de l’employeur, allait à l’encontre des alinéas 150(1)b) et c) de la LRTFP. Dans cette affaire, il s’agissait d’une proposition de consultation sur une étude relative à un régime de rémunération. Le vice-président a fait observer que l’employeur n’avait pas contredit l’argument de l’agent négociateur selon lequel l’étude sur le régime de rémunération constituait une politique de l’employeur qui ne mentionnait pas les dispositions de la LEFP. En ce qui concerne l’alinéa 150(1)c), le vice-président a conclu que la proposition sur la consultation n’entravait pas le pouvoir de l’employeur de mener des processus de nomination ou d’avancement. Dans la présente affaire, la proposition sur la consultation renvoie expressément à des questions régies par la LEFP. Je dois alors déterminer si la proposition concerne une condition « qui a été ou pourrait être établie » sous le régime de la LEFP. La LEFP renferme la disposition qui suit :

Consultation par la Commission

          14. Sur demande ou lorsqu’elle le juge utile, la Commission consulte l’employeur ou toute organisation syndicale accréditée comme agent négociateur au titre de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique sur les lignes directrices relatives à la façon de faire et de révoquer les nominations et sur les principes régissant les priorités de nomination ou les mises en disponibilité.

57 Je conclus que la condition proposée créerait une nouvelle condition d’emploi qui a été établie sous le régime de la LEFP. Par conséquent, elle ne peut être déférée à un conseil d’arbitrage. Je constate que la disposition législative de la LEFP établit un droit de consultation sur la dotation à la demande de l’agent négociateur ou de l’employeur.

Article 22 – Administration de la paie

58 Dans sa lettre du 27 octobre 2008 (annexe 4), l’agent négociateur a déclaré qu’il était d’accord avec le libellé proposé par l’employeur au sujet de son article sur l’administration de la paie (article 15), à l’exception des clauses 15.05 et 15.06. De plus, l’agent négociateur a proposé l’article supplémentaire qui suit :

Si, au cours de la durée de la présente convention, il est établi à l’égard d’un groupe une nouvelle norme de classification qui est mise en œuvre par l’Employeur, celui-ci doit, avant d’appliquer les taux de rémunération aux nouveaux niveaux résultant de l’application de la norme, négocier avec l’Alliance [sic] les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération des employé-e-s au moment de la transposition aux nouveaux niveaux.

59 L’employeur s’est opposé à l’inclusion de cette proposition parce qu’elle ne faisait pas l’objet de négociations, contrairement à ce que prévoit le paragraphe 150(2) de la LRTFP, et parce qu’elle a trait à des questions de classification, en contravention de l’alinéa 150(1)e). L’employeur m’a cité la décision Conseil du Trésor c. AESS.

60 L’agent négociateur a fait valoir que cette proposition est un article type des conventions collectives et qu’elle se rapporte clairement aux taux de rémunération. La négociation des taux de rémunération n’est pas une question de classification.

61 Cette proposition peut être renvoyée à un conseil d’arbitrage. Elle porte sur la négociation de nouveaux taux de rémunération et elle ne concerne pas la classification. Il s’agit d’un article type dans de nombreuses conventions collectives. Il est également clair que les questions liées à la rémunération ont fait l’objet de négociations. Il n’est pas nécessaire que chaque proposition ait fait l’objet de négociations, dans la mesure où la condition a fait l’objet de négociations. La proposition est donc comprise dans le mandat.

Article 48 – Comptabilisation du temps

62 La proposition de l’agent négociateur est la présente :

48. Tout système de comptabilisation du temps sera administré de manière cohérente (y compris la méthodologie et les objectifs). Les données relatives à la comptabilisation du temps ne seront pas utilisées dans le but d’évaluer négativement un employé, ni de façon arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi. L’employeur consulte l’AJJ au sujet des tâches et des activités devant faire l’objet de la comptabilisation du temps et à propos de l’atteinte des objectifs, y compris le temps consacré à des activités de l’AJJ. Aussi bien les gestionnaires que les juristes recevront une formation sur la bonne utilisation et la bonne mise en œuvre de la comptabilisation du temps.

63 L’employeur a fait valoir que la proposition porte sur les appréciations et va donc à l’encontre de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP. L’employeur m’a cité Finkelman and Goldenberg; Association des employés du Conseil de recherches c. Conseil national de recherches du Canada, dossier de la CRTFP 185-09-332 (19880919); et Syndicat national des travailleurs et travailleuses en communications c. Chambre des communes.

64 L’agent négociateur a fait valoir dans sa lettre du 5 décembre 2008 que [traduction] « l’intention et l’effet véritables, ou l’essence » de la proposition consiste à réglementer l’utilisation des données de présence, ce qui n’a rien à voir avec les appréciations des employés. Subsidiairement, l’agent négociateur a déclaré qu’il serait prêt à remplacer « évaluation négative » par « sanction ». À l’audience, l’agent négociateur a noté que les décisions citées par l’employeur ont été prises aux termes de l’ancienne loi et qu’elles n’étaient d’aucune utilité.

65 La partie de la proposition qui restreint l’utilisation des données de présence pour l’évaluation des employés est clairement liée à l’appréciation d’un employé. Par conséquent, cette partie de la proposition n’est pas incluse dans le mandat. L’autre libellé que propose l’agent négociateur (supprimer « évaluation négative » et remplacer par « sanction ») est acceptable. La proposition, telle qu’elle est modifiée, est donc comprise dans le mandat.

Article 52 – Ententes du Conseil national mixte

66 À l’annexe 2, l’agent négociateur a déclaré qu’il acceptait le libellé de l’employeur [traduction] « sauf la position de l’AJMJ sur la directive sur le réaménagement des effectifs, et sous réserve d’éclaircissements sur l’assurance contre les frais dentaires, l’assurance-invalidité et l’assurance-vie, et hormis les renvois à la directive sur les uniformes ». Dans sa lettre datée du 27 octobre 2008 (annexe 4), l’agent négociateur a déclaré qu’il acceptait d’inclure la Directive sur le réaménagement des effectifs dans l’article. Il a également confirmé qu’il ne voulait pas inclure la Directive sur les uniformes. Il a en outre indiqué qu’il continuait de proposer le maintien de l’assurance contre les frais dentaires, l’assurance-invalidité et l’assurance-vie existantes.

67 L’employeur s’est opposé à l’inclusion de cette proposition dans le mandat. Dans une lettre adressée au Conseil national mixte en date du 11 novembre 2008 (pièce E-2), l’agent négociateur déclarait qu’il acceptait de négocier sous le régime des règlements administratifs du Conseil national mixte (CNM) relativement à toutes les directives, sauf la Directive sur les uniformes. Pour ce motif, l’employeur a fait valoir que la proposition de l’agent négociateur sur l’assurance contre les frais dentaires, l’assurance-invalidité et l’assurance-vie ne devrait pas faire partie du mandat. De plus, aucune proposition particulière n’a été formulée sur l’assurance contre les frais dentaires, l’assurance-invalidité et l’assurance-vie.

68 L’agent négociateur a fait valoir qu’il proposait tout simplement de maintenir les avantages supérieurs de ses membres.

69 La proposition de l’agent négociateur consiste à conserver les modalités actuelles de l’assurance contre les frais dentaires, de l’assurance-invalidité et de l’assurance-vie pour certains de ses membres. Je ne vois aucun motif d’inclure cette proposition dans le mandat. C’est manifestement une question en litige. Le conseil d’arbitrage peut se prononcer sur l’impact, s’il y a lieu, de la lettre adressée au CNM.

Article 54 – Employés à temps partiel, Article 55 –Stagiaires en droit et Appendice A S4.0 – Salaire des stagiaires en droit  

70 L’AJMJ indique à l’annexe 2 que [traduction] « il n’y a pas eu de pourparlers dans les négociations sur cette question, et l’AJMJ se réserve le droit de modifier cette proposition avant ou pendant l’arbitrage ». L’employeur a fait valoir que cette proposition n’avait pas fait l’objet de négociations et qu’elle allait donc à l’encontre du paragraphe 150(2) de la LRTFP. L’employeur a également soutenu qu’il n’était pas loisible à l’agent négociateur de modifier sa proposition à une date future.

71 L’agent négociateur a fait valoir qu’il n’y a pas vraiment eu de discussion sur l’application des dispositions de la convention collective aux avocats stagiaires et aux employés à temps partiel. Toutefois, les participants aux discussions ont reconnu que la convention collective s’appliquerait à ces deux groupes d’employés, et qu’il restait à établir quelles dispositions s’appliqueraient. L’agent négociateur a aussi soutenu que la note concernant le droit qu’il se réservait de modifier sa proposition ne s’inscrivait pas dans la proposition.

72 Les propositions de l’employeur comprennent les dispositions sur les employés à temps partiel. J’en conclus qu’elles faisaient l’objet de négociations. Par conséquent, il n’existe pas de motif d’exclure la proposition de l’agent négociateur du mandat. La mention d’une [traduction] « absence de discussion » dans l’annexe renvoie manifestement à une absence de discussion sur la proposition comme telle, ce que n’exige pas la LRTFP. L’indication selon laquelle l’AJMJ se réserve le droit de modifier ses propositions n’est pas comprise dans le mandat. L’AJMJ est libre de présenter des arguments sur ses propositions en arbitrage, et le conseil d’arbitrage peut tenir compte de ces arguments dans sa décision.

73 De même, rien ne justifie d’inclure la proposition sur les avocats stagiaires. La convention collective s’applique à tous les employés classifiés LA, et ce groupe était tout au moins implicitement visé dans la négociation collective.

Appendice A S1.2 – Salaire et rémunération au rendement

74 La proposition est la suivante :

S1.2 La catégorie des agents LA-1 fera l’objet de 8 augmentations d’échelon égales (une augmentation tous les six mois pendant qu’ils occupant un emploi de LA-1), en commençant parle minimum de l’échelle (73 683$), chaque augmentation d’échelon étant payable tous les six mois, À compter du 1er avril 2006, les agents LA-01 actuels seront placés dans l’échelon d’augmentation approprié conformément au temps écoulé depuis l’année de leur admission au barreau, ou l’année de leur entrée en fonction pour le compte de l’employeur en qualité d’agent LA-, la première date étant à retenir. Les juristes en poste depuis plus de 4 ans seront promus au minimum de la nouvelle échelle salariale LA-2A. Les nouvelles recrues admises au barreau depuis moins de 4 ans seront placés sur l’échelle salarial LA-01 de la même manière.

75 L’employeur a fait valoir que cette proposition porte sur des questions liées à des promotions et sur des questions qui sont ou peuvent être établies sous le régime de la LEFP, et qu’elle va à l’encontre des alinéas 150(1)b) et c) de la LRTFP.

76 L’agent négociateur a prétendu dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 (annexe 6) que la proposition vise à s’assurer que les avocats progressent dans l’échelle salariale des LA et, en particulier, qu’ils passent du niveau d’entrée à un niveau supérieur dans une période raisonnable. La proposition porte sur le niveau de salaire et non sur la classification. Subsidiairement, l’agent négociateur a donné à penser qu’il était prêt à demander une disposition prévoyant que [traduction] « pour chaque période de 6 mois de plus qu’un avocat passe au niveau LA1, l’employé obtient une augmentation de traitement supplémentaire au pro rata ».

77 À l’audience, l’agent négociateur a fait valoir que cette proposition porte surtout sur la rémunération, et non sur l’avancement. Les niveaux de classification LA sont tout simplement des niveaux de salaire. De plus, l’employeur n’a mentionné aucune disposition de la LEFP sur laquelle la proposition aurait eu des répercussions.

78 La mention dans la proposition de l’avancement des avocats possédant plus de quatre ans d’expérience au niveau LA-02A concerne manifestement la nomination des employés. La proposition modifiée de l’agent négociateur (qui n’inclut pas l’avancement au niveau LA-02) ne touche pas la nomination des employés et, en conséquence, cette proposition modifiée est comprise dans le mandat.

Appendice A S1.6 – Salaire et rémunération au rendement

79 La proposition est la suivante :

51.6 Un minimum de 30% des juristes faisant partie de l’unité de négociation de l’AJJ seront classes comme agents LA-2B ou au-dessus.

80 L’employeur a soutenu que cette proposition traite clairement de questions de classification et va à l’encontre des articles 6 et 7 et de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP. La proposition vise à limiter le pouvoir de l’employeur d’attribuer des tâches et de classifier des postes. Elle concerne également la nomination d’employés.

81 L’agent négociateur a fait valoir dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 que l’esprit et l’effet de la proposition ont trait au salaire et au niveau de salaire et non à la classification ou à la dotation. La proposition avait pour objet de [traduction] « s’assurer qu’un pourcentage minimal d’avocats maintenant rémunérés au niveau LA2A progressent au niveau salarial en étant dorénavant rémunérés au niveau LA2B, qui est plus élevé ». À l’audience, l’agent négociateur a soutenu qu’il tentait tout simplement de maintenir une règle actuelle de l’employeur.

82 Cette proposition porte sur des questions de classification de postes et a trait à la nomination d’employés. Par conséquent, cette proposition n’est pas incluse dans le mandat.

Appendice A S1.9 – Avocats de l’IPFPC

83 Cette proposition prévoit que la date d’effet aux fins de la rémunération applicable aux anciens avocats de l’IPFPC sera le 28 février 2006.

84 L’employeur a fait valoir que cette proposition porte sur des questions de classification de postes et qu’elle ne peut être renvoyée à l’arbitrage, car elle va à l’encontre des articles 6 et 7 et de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP.

85 Cette proposition a trait à la date d’effet à des fins de rémunération et renvoie tout simplement à un groupe d’employés pour lesquels une date d’effet différente est proposée. Elle n’a pas de répercussions sur leur classification. Par conséquent, cette proposition sera comprise dans le mandat.

Appendice A S3.1- Augmentations au rendement fondées sur l’ERAE

86 La proposition est la suivante :

S3.1 À compter de l’augmentation de la rémunération au rendement d’après l’AREE payable le 1er avril 2006, l’augmentation de la rémunération au rendement pour les agents LA-2 sera de 5% pour ceux qui «satisfont aux attentes » et de 8% pour ceux qui « dépassent les attentes ». La catégorie « dépasse les attentes » ne sera pas inférieure à 20% de l’effectif des juristes LA-2 faisant partie de l’unité de négociation (ou d’autres groupes convenus par l’AJJ et l’employeur), et pas plus de 2% des juristes faisant parie de l’unité de négociation (ou d’autres groupes convenus par l’AJJ et l’employeur) ne pourront avoir droit à une augmentation de la rémunération au rendement inférieure à 5%. Pour les agents LA-3, les niveaux d’évaluation du rendement et les pourcentages applicables dans l’actuel PGR resteront en vigueur.

87 L’employeur a fait valoir que cette proposition porte sur les appréciations et va à l’encontre de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP.

88 L’agent négociateur a prétendu dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 que la proposition a pour but de veiller à ce que certaines parties de l’unité de négociation obtiennent les montants proposés de la rémunération au rendement [traduction] « au montant de la hausse salariale que reçoivent annuellement les avocats ». L’agent négociateur a fait valoir que la rémunération au rendement fait [traduction] « partie intégrante » de la rémunération des avocats et que l’« essence » de la proposition est de s’assurer que les avocats obtiennent certaines hausses de rémunération au rendement. À l’audience, l’agent négociateur a fait valoir que dans le cas du niveau LA-03, la proposition n’avait pas pour but de modifier ou d’éliminer une condition d’emploi actuelle. Pour ce qui est du niveau LA-02, la proposition portait surtout sur le salaire, et non sur les appréciations. L’employeur est libre de procéder à des appréciations; ce ne sont que les proportions d’avocats à chaque niveau de rendement qui sont énoncées dans la proposition. Subsidiairement, l’agent négociateur a proposé une « enveloppe » minimale de paiement de la rémunération au rendement qui, selon lui, n’aurait pas de répercussions sur les appréciations.

89 Bien que la rémunération au rendement soit certes une question liée à la rémunération, elle touche aussi indirectement l’appréciation ou l’évaluation des employés. La partie de la proposition qui précise la proportion d’avocats qui recevront des cotes d’évaluation précisées concerne l’évaluation des employés. Cette partie de la proposition est donc exclue du mandat. Compte tenu du fait que la rémunération au rendement est liée à l’évaluation des employés, la disposition ayant pour but de limiter le pourcentage des employés qui reçoivent une augmentation de moins de cinq pour cent est également liée à l’évaluation des employés. Cette partie de la proposition est en conséquence exclue elle aussi du mandat. Dans la mesure où le PGR existant précise les pourcentages d’employés de niveau LA-03 qui seront cotés à certains niveaux, cette partie de la proposition sera également exclue. La partie de la proposition qui indique le taux d’augmentation de salaire pour avoir atteint un certain niveau de rendement est une proposition liée à la rémunération et peut être comprise dans le mandat. Par souci de commodité, la proposition qui est comprise dans le mandat se lira maintenant comme suit :

 S3.1 À compter de l’augmentation de la rémunération au rendement d’après l’AREE payable le 1er avril 2006, l’augmentation de la rémunération au rendement pour les agents LA-2 sera de 5% pour ceux qui «satisfont aux attentes » et de 8% pour ceux qui « dépassent les attentes ». La catégorie « dépasse les attentes » ne sera pas inférieure à 20% de l’effectif des juristes LA-2 faisant partie de l’unité de négociation (ou d’autres groupes convenus par l’AJJ et l’employeur), et pas plus de 2% des juristes faisant parie de l’unité de négociation (ou d’autres groupes convenus par l’AJJ et l’employeur) ne pourront avoir droit à une augmentation de la rémunération au rendement inférieure à 5%. Pour les agents LA-3, les niveaux d’évaluation du rendement et les pourcentages applicables dans l’actuel PGR resteront en vigueur.

Appendice A - S3.2

90 L’employeur a soutenu que des parties de la proposition traitent des pensions, ce qui va à l’encontre de l’alinéa 150(1)b) de la LRTFP. L’article proposé est ainsi rédigé :

S3.2 La rémunération au rendement versée aux juristes LA-2 et LA-3 deviendra partie intégrante du salaire de base. Les juristes dont l’augmentation de la rémunération au rendement les ferait passer au-dessus du maximum de l’échelle salariale recevront un paiement forfaitaire du surplus, lequel paiement ouvrira droit à pension.

91 L’agent négociateur a fait valoir dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 que cette proposition [traduction] « vise simplement à maintenir le statu quo ». Aucun élément de la proposition ne vise à modifier une condition d’emploi existante ni à établir une nouvelle condition. L’agent négociateur m’a cité le bulletin no 523 (juillet 2008) et la Politique sur l’administration des traitements du Groupe du droit (les deux sont joints à sa lettre du 5 décembre 2008). L’agent négociateur a également déclaré qu’il n’aurait pas de difficulté à assujettir expressément la proposition à toute loi sur les pensions qui s’applique.

92 Tel qu’il est mentionné précédemment, la nouvelle convention collective établira des conditions d’emploi, et ce même si une disposition de la convention collective se rapporte à des conditions d’emploi qui sont déjà en place pour les employés. La LPFP régit la détermination de ce qui constitue le service ouvrant droit à pension. Par conséquent, la partie de la proposition qui renvoie au montant forfaitaire donnant droit à une pension n’est pas comprise dans le mandat.

Appendice A S3.4 - Augmentations au rendement fondées sur l’ERAE

93 La proposition est la suivante :

S3.4 L’actuelle «Politique sur l’appréciation du rendement et l’évaluation de l’employé » s’appliquera aux juristes visés par la présente convention collective et est par la présente incorporée dans la présente convention collective.

94 L’employeur a fait valoir que la proposition traite d’appréciations et va à l’encontre de l’alinéa 150(1)c) de la LRTFP.

95 L’agent négociateur a soutenu dans sa lettre datée du 5 décembre 2008 qu’il avait essentiellement comme préoccupation, en présentant cette proposition, le droit d’être considéré pour l’ERAE et le PGR et la rémunération au rendement correspondante en ce qui touche les employés qui prennent différentes formes de congés, qui ont obtenu des nominations par intérim et qui sont visés par un réaménagement des horaires de travail. De plus, la proposition ne vise pas à modifier une condition d’emploi existante ou à établir une nouvelle condition. L’agent négociateur a déclaré qu’il proposait simplement que l’employeur respecte sa propre politique (la politique applicable était jointe à la lettre de l’agent négociateur datée du 5 décembre 2008).

96 La politique de l’employeur relativement à l’examen du rendement et à l’appréciation de l’employé concerne directement le processus d’appréciation. Par conséquent, elle ne peut être comprise dans la convention collective, et la proposition ne peut être incluse dans le mandat.

Conclusion

97 Par conséquent, en vertu de l’article 144 de la Loi, les questions en litige au sujet desquelles le conseil d’arbitrage doit rendre une décision arbitrale dans ce conflit sont, sous réserve des décisions rendues concernant les exceptions déclinatoires de compétence en l’espèce, celles qui sont énoncées comme étant en suspens dans l’annexe 1, l’annexe 2, l’annexe 3, l’annexe 4, l’annexe 5 et l’annexe 6 inclusivement, ci-jointes, et les propositions modifiées qui précèdent.

98 Toute autre question de compétence soulevée à l’audience quant à l’inclusion d’une question dans le présent mandat doit être soumise au président de la CRTFP puisque, en vertu des dispositions du paragraphe 144(1) de la LRTFP, il est le seul à être habilité à rendre une décision à cet égard.

Le 12 février 2009.

Traduction de la CRTFP

Ian R. Mackenzie,
vice-président,
Commission des relations de travail dans la fonction publique

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