Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le demandeur a demandé à la Commission de réexaminer une décision qu’elle a rendue au sujet d’une plainte de pratique déloyale de travail - le demandeur avait été renvoyé en cours de stage et avait présenté à la Commission un grief à l’égard de cette mesure - il avait aussi déposé une plainte de pratique déloyale de travail en vertu de l’article 23 de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, dans laquelle il alléguait avoir été menacé de licenciement s’il déposait un grief - le grief et la plainte ont été entendus en même temps et rejetés en juillet 2005 - le demandeur a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire à l’égard de la décision rendue au sujet du grief, mais n’a pas déposé une telle demande devant la Cour d’appel fédérale au sujet de la décision concernant la plainte - la demande de contrôle judiciaire a été rejetée en avril 2007, de même que l’appel interjeté devant la Cour d’appel fédérale et la demande d’autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada en 2008 - la demande de réexamen, qui a été déposée en janvier 2009, vise seulement la plainte, puisque le pouvoir de réexamen des décisions de la Commission ne s’applique qu’aux plaintes - bien qu’il n’existe pas de délai pour le dépôt d’une demande de réexamen, de telles demandes doivent être déposées le plus tôt possible - le demandeur a pris connaissance de la question en janvier2007 - les demandes de contrôle judiciaire du demandeur portaient sur le grief, et non sur la plainte, et rien ne l’empêchait de présenter en même temps une demande de réexamen et des demandes de contrôle judiciaire - la demande de réexamen est hors délai et devrait être rejetée parce que tardive - la question de la délégation de pouvoir n’est pas liée à sa plainte - même si tel était le cas, elle ne constituerait pas un nouvel élément de preuve que, selon des attentes raisonnables, le demandeur n’était pas en mesure de présenter lors de la première audience - il n’existe aucune raison impérieuse de réexaminer la décision de la Commission. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-03-25
  • Dossier:  525-02-18
  • Référence:  2009 CRTFP 39

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

MOHAMMAD ASLAM CHAUDHRY

demandeur

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Chaudhry c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant une demande d'exercice par la Commission de l'un ou l'autre des pouvoirs prévus à l'article 43 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Ian R. Mackenzie, commissaire

Pour le demandeur:
Lui-même

Pour le défendeur:
Karl Chemsi, avocat

Décision rendue sur la base d'arguments écrits
déposés le 9 janvier et les 5 et 25 février 2009.
(Traduction de la CRTFP)

I. Demande devant la Commission

1 Mohammad Aslam Chaudhry (le « demandeur ») a demandé que la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP ou la « Commission ») réexamine la décision qu'elle a rendue le 13 juillet 2005 au sujet d'une plainte de pratique déloyale de travail (Chaudhry c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2005 CRTFP 72). La demande est présentée en vertu de l'article 43 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). Le Conseil du Trésor (le « défendeur ») soutient que la demande devrait être rejetée parce qu'elle est hors délai et que le demandeur n'a pas montré qu'elle était fondée sur des motifs valables.

2 La demande de réexamen a été tranchée sur le fondement d'arguments écrits. Ces arguments sont déposés au dossier de la Commission. Outre la demande de réexamen et la réponse aux arguments du défendeur reçus le 9 janvier et le 25 février 2009 respectivement, le demandeur a fait parvenir à la CRTFP d'autres éléments de correspondance qu'il souhaitait voir être pris en compte dans le cadre de ses arguments. Il a fait référence plus particulièrement à la correspondance envoyée à la CRTFP le 18 mars 2008. J'ai tenu compte de ces trois arguments, qui ont aussi été déposés au dossier de la Commission.

II. Contexte de la demande de réexamen

3 Le demandeur a été renvoyé en cours de stage par l'employeur en 2004, et il a soumis à la CRTFP un grief contestant cette mesure (dossier de la CRTFP 166-02-33836). Il a également déposé une plainte en vertu de l'article 23 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), dans laquelle il alléguait qu'on avait menacé de le licencier s'il présentait un grief (dossier de la CRTFP 561-02-25). La présente demande de réexamen renvoie uniquement à la plainte déposée en vertu de la LRTFP.

4 J'ai examiné le grief et la plainte ensemble, tout en assumant les fonctions d'arbitre de grief et de commissaire dans le cadre de la LRTFP. Le demandeur était représenté par son agent négociateur (l'Alliance de la Fonction publique du Canada). Dans ma décision, rendue le 13 juillet 2004, j'ai rejeté à la fois la plainte et le grief.

5 Dans sa plainte, le demandeur a allégué que sa superviseure l'avait menacé de licenciement s'il déposait un grief. Sa superviseure a nié l'avoir menacé de la sorte. Me fondant sur une évaluation de la crédibilité de la preuve soumise par le demandeur et la superviseure, j'ai conclu, selon la « prépondérance des probabilités », que la preuve présentée par la superviseure l'emportait et que le demandeur ne s'était pas acquitté du fardeau de la preuve.

6 Le demandeur a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue au sujet du grief. Il n'a pas soumis une telle demande au sujet de la décision concernant la plainte qui, s'il l'avait fait, aurait dû être présentée à la Cour d'appel fédérale.

7 La Cour fédérale a rejeté la demande de contrôle judiciaire le 13 avril 2007 (Chaudhry v. Canada (Attorney General), 2007 FC 389). Le demandeur a interjeté appel de la décision auprès de la Cour d'appel fédérale, qui a rejeté l'appel le 15 février 2008 (2008 CAF 61). Le demandeur a présenté une demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême du Canada, qui a rejeté la demande le 13 novembre 2008 (2008 CanLII 59057).

8 Dans sa demande de contrôle judiciaire, le demandeur a soutenu qu'il avait droit à une audition avant d'être renvoyé en cours de stage. La Cour d'appel fédérale en est arrivée à la conclusion contraire. La Cour a notamment mentionné ce qui suit :

[…]

[7]         Dans le même ordre d'idées, l'appelant soutient que le fait qu'il ait été privé d'une audience avant son renvoi en cours de stage constitue une atteinte à son droit à une audition impartiale prévu à l'alinéa 2e) de la Déclaration canadienne des droits […] L'alinéa 2e) de la Déclaration des droits prévoit seulement le droit à une audition impartiale pour la définition des droits et obligations d'une personne. Ces droits et obligations faisaient parties des conditions de l'embauche probatoire de l'appelant. Je ne crois pas que son droit à une audience ait précédé son renvoi en cours de stage. Quoi qu'il en soit, l'appelant a été entendu par l'arbitre et à mon avis, cette audition a été impartiale selon les principes de justice fondamentale.

[8]         L'appelant expose deux arguments supplémentaires, à savoir que sa superviseure n'avait pas le pouvoir de le muter à un nouveau poste en octobre 2003, et que le directeur n'avait pas le pouvoir de le renvoyer en cours de stage. Ces arguments n'ont été mentionnés ni dans l'avis de demande, ni dans le mémoire des faits et du droit de l'appelant présenté au juge des requêtes. Par conséquent, nous croyons qu'il serait inapproprié d'aborder l'un ou l'autre de ces arguments. À moins qu'un motif impérieux ne justifie le contraire, une partie ne peut obtenir gain de cause en appel en présentant des arguments que les parties et le juge des requêtes n'ont pas eu l'occasion d'aborder. L'avocat de l'intimé a déclaré qu'il aurait produit des preuves à l'égard de ces questions s'il avait été informé qu'elles seraient soulevées.

[…]

[Le passage souligné l'est dans l'original]

9 Dans la correspondance qu'il a envoyée à la CRTFP le 18 mars 2008, le demandeur a exprimé des inquiétudes au sujet de l'affaire le concernant, mais il n'a pas officiellement demandé un réexamen de la décision en vertu de l'article 43 de la LRTFP. Sa demande officielle de réexamen a été présentée le 9 janvier 2009.

III. Résumé de l'argumentation

A. Pour le demandeur

10 Le demandeur a précisé qu'il avait retardé la présentation de sa demande de réexamen de la décision de la CRTFP parce qu'il avait entrepris des recours auprès de la Cour fédérale et de la Cour suprême du Canada. Il a indiqué dans sa demande de réexamen qu'il n'avait pas présenté une telle demande plus tôt pour les raisons suivantes :

[Traduction]

  1. J'étais convaincu que les tribunaux fédéraux seraient en mesure (au bout du compte) de rendre JUSTICE.
  2. J'attendais le résultat final de la lutte que je menais par l'entremise des tribunaux fédéraux, de la Cour suprême et du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
  3. J'avais l'intention d'intenter une action pour RESPONSABILITÉ DÉLICTUELLE contre votre bureau (la CRTFP).
  4. 4. Je suis d'avis que votre bureau (la CRTFP) NE PEUT PAS examiner DE FAÇON IMPARTIALE une décision qu'elle a rendue.

[Les passages en évidence le sont dans l'original]

11 Dans sa correspondance du 9 janvier 2009, le demandeur a fait savoir qu'il souhaitait maintenant se prévaloir du processus de réexamen.

12 Le demandeur a soutenu que le directeur ayant autorisé son renvoi en cours de stage ne disposait pas du pouvoir délégué lui permettant de prendre une telle mesure. Il a également fait valoir que ses droits constitutionnels avaient été violés parce qu'on ne lui avait pas permis de connaître les infractions présumées qu'on lui reprochait avant son renvoi en cours de stage. Il a réitéré son droit à une audition avant son renvoi en cours d'emploi et son droit d'être présumé innocent. Le demandeur a allégué que le directeur ne connaissait pas les détails de son renvoi en cours de stage, et il a remis en question sa crédibilité. Il a également soutenu que j'en étais arrivé à une conclusion erronée au sujet de la crédibilité de sa superviseure.

B. Pour le défendeur

13 L'avocat du défendeur a fait valoir que le grief du demandeur ne pouvait être examiné aux termes de l'article 43 de la LRTFP, car l'autorisation de réexamen s'applique à la plainte uniquement.

14 L'avocat du défendeur a indiqué que le demandeur n'avait fourni aucun motif valable expliquant le délai déraisonnable dans le dépôt de sa demande ni aucun motif impérieux justifiant le réexamen de la décision. Il a soutenu que le demandeur essayait de faire valoir à nouveau sa thèse, après que les tribunaux l'avaient rejetée.

15 Selon l'avocat du défendeur, il apparaissait clairement que la demande de réexamen n'était pas conforme à l'esprit et à l'intention de l'article 43 de la LRTFP.Il a mentionné que la CRTFP avait fait preuve de prudence dans son interprétation de cette disposition. Un réexamen ne peut constituer une solution de rechange pour interjeter appel, et il ne permet pas à la CRTFP de tirer une conclusion différente à partir de la preuve (voir Quigley c. Le Conseil du Trésor (Citoyenneté et Immigration Canada), dossier de la CRTFP 125-02-77 (19880604)). Le réexamen a pour but de permettre à la partie requérante de présenter une nouvelle preuve ou de nouveaux arguments qu'elle ne pouvait « […] raisonnablement avancer lors de l'audience initiale, ou encore lorsqu'il existe d'autres motifs de révision impérieux […] » (voir Czmola c. Conseil du Trésor (Solliciteur général – Service correctionnel du Canada), 2003 CRTFP 93). En outre, on prend soin de préciser dans la décision Czmola que le pouvoir de réexamen doit être exercé de manière « […] judicieuse, avec beaucoup de soin et peu fréquemment ».

16 L'avocat du défendeur m'a également renvoyé à l'affaire Alliance de la Fonction publique du Canada c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 125-02-41 (19851218), dans laquelle on mentionne que la partie requérante doit montrer que les nouveaux éléments de preuve n'auraient pu être obtenus en faisant preuve de « diligence raisonnable » et présentés lors de l'audience initiale. En outre, la nouvelle preuve doit avoir des « […] conséquences importantes et déterminantes […] » sur la décision. L'avocat a soutenu que tous les arguments avancés par le demandeur auraient pu être soulevés au moment de la première audience. Il n'y avait aucun changement dans les circonstances ni aucune nouvelle preuve pouvant avoir une incidence déterminante sur la décision. La question du pouvoir délégué n'a jamais été abordée à l'audience initiale, et elle aurait pu être alors facilement contestée. Le demandeur a eu la possibilité d'exposer sa cause de façon appropriée. Quoi qu'il en soit, il apparait clairement que le directeur disposait du pouvoir délégué. Le demandeur a tenté de revenir sur le fond de l'affaire, ce qui est manifestement incompatible avec le processus de réexamen.

17 L'avocat du défendeur a également fait valoir que tous les arguments avancés par le demandeur renvoyaient à son grief et non à sa plainte. La demande de contrôle judiciaire portait sur la décision concernant le grief, et non sur celle relative à la plainte. Il n'a pas demandé un contrôle judiciaire de la décision rendue au sujet de la plainte, et il devrait en assumer les conséquences.

C. Réplique du demandeur

18 Le demandeur a soutenu que le défendeur n'avait fourni aucune nouvelle preuve ni aucun nouveau document montrant que le directeur avait le pouvoir délégué de renvoyer un employé en cours de stage. La [traduction] « question fondamentale et vitale du pouvoir a été mal jugée et mal comprise » par l'arbitre de grief/le commissaire.

19 Le demandeur a fait valoir qu'aucun délai n'était prescrit pour la présentation d'une demande de réexamen en vertu de la LRTFP. Il a mentionné qu'il avait déjà soumis des motifs légitimes justifiant le délai.

20 Le demandeur a indiqué que [traduction] « […] l'article 43 [de la LRTFP] n'avait rien de complexe ou d'ambigu » et que [traduction] « la Commission avait le pouvoir de réexaminer N'IMPORTE LAQUELLE de ses décisions [Le passage en évidence l’est dans l’original] ».

21 Le demandeur a mentionné que ce n'est qu'en janvier 2007 qu'il a commencé à avoir des doutes quant au pouvoir du directeur de le renvoyer en cours de stage. Il n'était pas au fait de cette question au moment de l'audience initiale. Il aurait été [traduction] « déraisonnable au suprême degré » de s'attendre à ce qu'il ait une connaissance experte des règles et des règlements discutés lors de l'audience. Le demandeur a indiqué qu'il n'aurait pu débattre de cette question à ce moment.

22 Le demandeur a soutenu qu'il y avait corrélation entre la plainte et le grief. Les arguments qu'il a soulevés au sujet de la crédibilité de sa superviseure et du directeur sont directement liés à la plainte. La question du pouvoir délégué était [traduction] « vitale » dans le cadre de la plainte. Il s'agissait d'une question fondamentale en ce qui concerne l'audience dans son ensemble.

IV. Motifs

23 La LRTFP prévoit que la Commission peut « réexaminer, annuler ou modifier ses décisions ou ordonnances » (paragraphe 43(1)). Cette disposition s'applique uniquement aux décisions de la Commission. Elle ne s'applique pas aux décisions d'un arbitre nommé en vertu de la LRTFP. Le seul mécanisme permettant de réexaminer une décision arbitrale consiste à présenter une demande de contrôle judiciaire auprès d'un tribunal. La décision arbitrale relative au grief que le demandeur a déposé en vue de contester son licenciement a fait l'objet d'un tel contrôle. La présente demande concerne donc strictement la décision ayant trait à la plainte pour pratique déloyale de travail, qui a été rendue en même temps que la décision relativement à son grief.

24 Il y a deux questions devant être tranchées : 1) La demande doit-elle être rejetée au motif de présentation tardive? 2) Y a-t-il des raisons suffisantes justifiant le réexamen de la décision?

25 Aucune échéance n'est prescrite pour la présentation d'une demande de réexamen en vertu de l'article 43 de la LRTFP. Cependant, pour assurer le caractère définitif du règlement des conflits de travail, les demandes de réexamen devraient être présentées le plus tôt possible, c'est-à-dire à l'intérieur d'un délai raisonnable à compter du moment où le demandeur obtient l'information ou la preuve sur laquelle il entend fonder sa demande. Dans le cas qui nous occupe, à titre de nouvelle preuve à l'appui de sa demande, le demandeur se fonde sur l'allégation selon laquelle il a découvert que le directeur ne disposait pas du pouvoir délégué de le renvoyer en cours de stage (je traite plus loin du bien-fondé de cette allégation). Le demandeur soutient qu'il a pris connaissance de la question du pouvoir délégué en janvier 2007. La décision de la Cour fédérale sur cette question a été rendue en février 2007. Il a déposé sa demande de réexamen environ 24 mois plus tard, et il s'agit là d'un délai considérable.

26 En outre, le demandeur justifie le délai en invoquant les demandes de contrôle judiciaire dont il avait saisi les tribunaux. Or, les demandes concernaient le grief, et non la plainte. Qui plus est, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, les tribunaux n'examinent pas de « nouveaux » éléments de preuve ou arguments. En fait, la Cour d'appel fédérale a précisé qu'elle ne tiendrait pas compte des nouveaux arguments soulevés par le demandeur à l'audience de contrôle judiciaire, y compris la question du pouvoir délégué. Il n'y a donc rien qui empêchait le demandeur de déposer une demande de réexamen relative à sa plainte en même temps que sa demande de contrôle judiciaire et les appels concernant son grief. Il a également mentionné qu'il avait envisagé la possibilité d'intenter une action en justice contre la CRTFP. Cependant, comme il ne l'a pas fait, il ne peut s'agir d'une explication valable pour justifier le délai. Il a aussi fait valoir que, selon lui, la CRTFP ne pouvait réexaminer ses propres décisions sans faire preuve de partialité. Le demandeur n'a pas expliqué comment il en est venu à cette conclusion. Toute préoccupation concernant la partialité ou l'indépendance d'un tribunal doit être soumise à celui-ci directement et dans les plus brefs délais, ce qui n'a pas été fait par le demandeur. Cela ne peut donc constituer un motif valable justifiant le délai de présentation de la demande.

27 Par conséquent, j'ai conclu que la demande est hors délai et qu'elle doit être rejetée pour ce motif. Je reconnais toutefois que le litige relatif au grief et à la plainte du demandeur s'est échelonné sur une longue période. Afin d'aider le demandeur et le défendeur à tourner la page pour de bon, j'aborderai la question du bien-fondé de la demande de réexamen.

28 Les demandes de réexamen des décisions de la CRTFP sont rares. La Commission dispose toutefois d'une jurisprudence dans ce domaine, qui aide à fixer les conditions de l'exercice approprié du pouvoir de réexamen. La jurisprudence établie en vertu de la LRTFP s'avère utile pour ce qui est de rendre une décision aux termes de l'article 43 de cette même loi (voir Danyluk et al. c. Union des travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, section locale 832, 2005 CRTFP 179).

29 Il ressort de l'analyse de la jurisprudence que les lignes directrices ou critères ci-après doivent être pris en compte lorsqu'il s'agit de réexaminer une décision de la CRTFP (voir les décisions Quigley, Danyluk, Czmola et Alliance de la Fonction publique du Canada) :

  • le réexamen ne doit pas remettre en litige le fond de l'affaire;
  • il doit être fondé sur un changement important des circonstances;
  • il doit tenir compte uniquement des nouveaux éléments de preuve ou arguments qui ne pouvaient être raisonnablement présentés lors de l'audience initiale;
  • on doit s'assurer que les nouveaux éléments de preuve ou arguments ont des conséquences importantes et déterminantes sur l'issue de la plainte;
  • on doit veiller à ce que le réexamen soit fondé sur un motif impérieux;
  • le pouvoir de réexamen doit être exercé de manière « […] judicieuse, avec beaucoup de soin et peu fréquemment ». (Czmola).

30 La question de la délégation du pouvoir de renvoyer un employé en cours de stage n'était pas reliée à la plainte. La plainte était fondée sur l'allégation selon laquelle le demandeur avait été menacé de licenciement. Même s'il existait un lien entre la délégation de pouvoir et la plainte, cette question ne constituerait pas un nouvel élément de preuve que, selon des attentes raisonnables, le demandeur n'était pas en mesure de présenter à l'audience initiale.

31 La question de la crédibilité des témoins aurait pu être soulevée lors de l'audience initiale. L'allégation du demandeur selon laquelle on lui a refusé le droit à une audition avant son renvoi en cours de stage a trait au grief, et non à la plainte. Il s'agit également d'un sujet qui aurait pu être abordé dans le cadre de la première audience. En outre, la Cour d'appel fédérale a traité de cette allégation dans sa décision sur la demande de contrôle judiciaire.

32 Il n'y a aucun motif impérieux de réexaminer la décision de la Commission. Par conséquent, la demande de réexamen est rejetée.

33 Pour ces motifs, la Commission rend l'ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

34 La demande de réexamen de la décision est rejetée.

Le 25 mars 2009.

Traduction de la CRTFP

Ian R. Mackenzie,
commissaire

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