Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Plainte déposée en vertu des alinéas 190 (1)b) et d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), contre l’employeur et l’agent négociateur - objection présentée par l’employeur selon laquelle, à la face même du dossier, les dispositions invoquées ne peuvent servir de fondement à la plainte telle que formulée - la commissaire déclare oralement que les objections de l’employeur sont retenues comme étant bien fondées parce qu’à sa face même la plainte ne traite pas de l’obligation de négocier de bonne foi ou de respecter les conditions d’emploi suite à une demande d’accréditation qui font l’objet de l’article 190 de la LRTFP - de plus, la plainte fut déposée hors délai - pour ce qui est de la plainte contre l’agent négociateur alléguant manquement à son devoir de représentation équitable, la commissaire accorde au plaignant, qui jusque-là se représentait lui-même, sa demande d’ajournement pour être représenté par procureur, à la suite de la présentation d’une lettre de comparution de celui-ci. Plainte rejetée en partie. Demande de remise accordée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-01-27
  • Dossier:  561-02-159
  • Référence:  2009 CRTFP 9

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

MARTIN OUELLET

plaignant

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA
ET
CONSEIL DU TRÉSOR
(Service correctionnel du Canada)

défendeurs

Répertorié
Ouellet c. Alliance de la Fonction publique du Canada et Conseil du Trésor (Service Correctionnel du Canada)

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION (Intérimaire)

Devant:
Michele A. Pineau, Vice-présidente

Pour le plaignant:
lui-même

Pour l'Alliance de la fonction publique du Canada:
Guylaine Bourbeau

Pour le Conseil du Trésor:
Caroline Proulx, stagiaire en droit

Affaire entendue à Drummondville, Québec
le 15 janvier 2009.

1 Le plaignant, Martin Ouellet était, jusqu’en octobre 2008, à l’emploi du Service correctionnel du Canada.

2 Le 19 avril 2007, le plaignant dépose une plainte auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») contre sa représentante syndicale, Luce Saint-Georges et contre le Service correctionnel du Canada en vertu des alinéas 190(1)b) et d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP).

3 L’agent négociateur, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC), en son nom et au nom de Mme Saint-Georges, répond que la plainte doit être rejetée car elle s’appuie sur des dispositions législatives qui relèvent exclusivement des obligations entre l’employeur et l’agent négociateur. Le Conseil du Trésor, au nom du Service correctionnel du Canada (ci-après « l’employeur »), répond que le plaignant essaie de faire revivre un litige qui a déjà été rejeté par un arbitre, et que la plainte est hors délai. Le plaignant se dit en désaccord avec la position prise par son agent négociateur mais ne réplique pas à l’objection de l’employeur.

4 Le 9 janvier 2008, le président de la Commission demande aux parties de présenter des observations écrites concernant la compétence de la Commission à traiter de cette affaire.

5 Le 23 janvier 2008, l’AFPC répond que les paragraphes invoqués par le plaignant au soutien de sa plainte sont inapplicables en l’espèce et soulève que la plainte est hors les délais prévus à la LRTFP. L’AFPC fait aussi valoir que le plaignant, insatisfait de la décision rendue le 27 février 2007 par l’arbitre Tessier dans Ouellet c. Conseil du trésor (Service correctionnel du Canada), 2007 CRTFP 23, tente de se servir de la présente plainte pour plaider sa cause à nouveau. L’AFPC réitère son argument à l’effet que la Commission n’aurait pas compétence pour entendre et disposer de cette plainte.

6 Le 30 janvier 2008, l’employeur répond que les allégations du plaignant ne correspondent pas aux obligations de négociation de bonne foi prévus à l’article 190 de la LRTFP ou à la référence à l’article 56 de la LRTFP concernant l’obligation de maintenir les conditions d’emploi suite à une demande d’accréditation. L’employeur mentionne également la finalité de la décision du 27 février 2007 de l’arbitre Tessier.

7 Le plaignant ne réplique à ni l’une ou l’autre de ces objections.

8 À la suite des représentations écrites, le dossier est fixé pour audience.

9 Au début de l’audience, le plaignant explique que sa plainte concerne la faiblesse de la défense de l’agent négociateur par rapport à des mesures disciplinaires qui lui ont été imposées par l’employeur et l’arbitrage d’un grief qui s’en est suivi. Le plaignant soumet que sa preuve démontrera que les agissements de l’agent négociateur et de l’employeur sont intimement reliés. Toutefois, il admet que l’objection de l’employeur pourrait être fondée et me demande de statuer sur cette objection en premier. Le plaignant maintient que l’objection de l’agent négociateur quant à la compétence de la Commission n’est pas fondée. Il plaide qu’il a invoqué les articles de la LRTFP sans être en pleine connaissance de cause car il agissait seul au moment où il a déposé sa plainte.

10 L’agent négociateur soumet alors qu’il a renouvelé son objection le 12 janvier 2009 quant à la compétence de la Commission pour entendre la présente plainte mais qu’il désire maintenant la retirer étant donné que le libellé de la plainte est conforme dans ses grandes lignes aux dispositions de l’article 187 de la LRTFP.  L’agent négociateur retire son objection antérieure à l’effet que la plainte serait hors délai.

11 L’employeur soumet que l’amende imposée au plaignant qui a fait l’objet d’un grief et de la présente plainte a été réglée par l’entremise d’un protocole d’entente, et par conséquent, la Commission n’a pas compétence pour traiter de cette affaire. L’employeur soumet que la question de la rétrogradation du plaignant a fait l’objet d’une décision de la Commission et que celle-ci n’a pas compétence pour traiter de l’affaire à nouveau. Enfin, l’employeur réitère son objection que la plainte est hors délai, compte tenu de la décision de la Commission dans l’affaire Dumont et al. c. Ministère du Développement social, 2008 CRTFP 15, qui a statué que le délai de 90 jours pour présenter une plainte prévu au paragraphe 190(2) est de rigueur.

12 À la suite de ces représentations, je déclare oralement que les objections de l’employeur sont retenues comme bien fondées parce qu’à sa face même, la plainte ne traite pas de l’obligation de négociation de bonne foi ou du maintien des conditions d’emploi suite à une demande d’accréditation qui font l’objet de l’article 190 de la LRTFP. De plus, la plainte est clairement hors délai, compte tenu des dispositions du paragraphe 190(2) de la LRTFP qui précise qu’une plainte visée au paragraphe 190(1) doit être présentée dans un délai de 90 jours. Par conséquent la plainte contre l’employeur est rejetée.

13 Le plaignant s’objecte ensuite à la présence de l’employeur pour la continuation des audiences, compte tenu de ma décision d’accueillir l’objection. Le plaignant allègue que certains faits pourraient surgir en cours d’audience qui ne concernent pas l’employeur. J’explique au plaignant que les audiences sont publiques et, de plus, que l’employeur peut avoir un intérêt quant à l’issue de l’enquête et aux effets réparateurs d’une décision éventuelle.

14 Le plaignant communique alors qu’il a fait une demande d’accès à l’information deux jours avant l’audience pour obtenir le contenu de son dossier personnel et qu’il n’a pas encore reçu l’information demandée. Il dit maintenant avoir besoin d’un avocat pour présenter une certaine partie de son dossier. Il m’informe qu’il a rencontré un avocat le jour avant l’audience et que celui-ci n’était pas disponible pour l’audience d’aujourd’hui. Le plaignant demande la remise de l’audience.

15 Questionné sur la raison pour laquelle il n’a pas fait de demande de remise avant l’audience afin d’éviter le déplacement de toutes les personnes présentes, le plaignant répond qu’il a minimisé les déplacements en évitant de convoquer certains témoins pour lesquels il avait obtenu des assignations; par ailleurs, il n’a décidé que cette semaine d’avoir recours à un avocat, compte tenu du renouvellement de l’objection de l’agent négociateur le 12 janvier 2009 (soit trois jours avant la présente audience) et du stress d’avoir à interroger des témoins, entre autres Mme Saint-Georges. Le plaignant communique qu’il désire présenter certains faits, mais partager le fardeau de l’audience quant aux interrogatoires avec un procureur.

16 J’explique au plaignant qu’il doit décider s’il veut se faire représenter par procureur ou procéder seul et que si je suis pour lui accorder une remise pour se faire représenter par un procureur, il doit obtenir une déclaration de comparution par ce dit procureur.

17 J’accorde au plaignant une suspension de l’audience jusqu’à 15h afin de lui permettre d’obtenir la déclaration de comparution de son procureur qu’il représente effectivement le plaignant.

18 Au moment de la reprise de l’audience à 15h, le plaignant me présente une lettre de son procureur, Me Jean-François Houle, qui se lit comme suit :

Madame la vice-présidente,

La présente a pour but de vous confirmer que je suis disposé à assister monsieur Martin Ouellet lors de l’audition de sa plainte à une prochaine date qu’il vous plaira de fixer. 

Bien que ce type de mandat soit inhabituel, il s limitera à mener les contre-interrogatoires des témoins de l’employeur ou du syndicat.

Bien humblement, nous vous soumettons que si monsieur Ouellet a la possibilité de se représenter seul, il a respectueusement la possibilité d’engager un procureur pour mener une partie de l’audition.

Je vous prie d’excuser mon absence cet après-midi, mon agenda ne me permettant pas d’être devant vous à si peu d’avis.

Veuillez recevoir, madame la vice-présidence, l’assurance de ma plus haute considération.

Jean-François Houle

Avocat

19 Le plaignant m’explique que le seul mandat qu’il a donné à son procureur, est de l’assister à l’audience avec le contre-interrogatoire des témoins. Il se dit prêt à procéder avec certaines declarations concernant sa plainte.

20 En réponse au plaignant sur son intention de procéder par déclarations plutôt que par témoignage, l’AFPC souligne qu’une présentation du dossier où le plaignant se représente tantôt lui-même et est tantôt représenté par un procureur est une situation intenable car il est impossible de prévoir à qui s’adresser, de qui relève la direction de la preuve et des procédures relativement à la plainte.

21 Le plaignant insiste sur le fait qu’il veut limiter l’assistance de son procureur à certaines questions et le contre-interrogatoire des témoins et qu’il tient à faire des déclarations au soutien de sa plainte qui font état de son point de vue.

22 Après avoir considéré de part et d’autre les représentations du plaignant et ceux de l’AFPC, et compte tenu que la preuve devant moi doit se dérouler de façon ordonnée tout en respectant les droits des parties, je décide qu’il y a lieu de suspendre l’audience. Je juge que la demande du plaignant d’avoir la présence d’un procureur est justifiée afin qu’il ait l’occasion de bien comprendre les enjeux de sa plainte et la conduite d’une audience devant un tribunal administratif. Pour éviter toute équivoque, j’indique oralement aux parties que je vais rendre une décision étayant de façon précise les directives qui serviront à circonscrire le débat dans cette affaire.

23 Par conséquent, les directives suivantes s’appliquent au plaignant, à son procureur et à l’AFPC par rapport à la reprise des audiences.

24 La lettre de Me Jean-François Houle est acceptée comme étant la déclaration de comparution d’un procureur comme représentant du plaignant dans le dossier.

25 La remise des audiences dans le présent dossier est accordée au motif que le plaignant a demandé de se faire représenter par procureur. Il s’agit d’une question de justice naturelle afin de permettre au plaignant de pleinement présenter son dossier, d’interroger et contre-interroger les témoins et de faire valoir les arguments au soutien de sa plainte.

26 La correspondance de la Commission par rapport à ce dossier sera dorénavant adressée à Me Houle au nom du plaignant qu’il représente.

27 La Commission communiquera avec Me Houle et l’AFPC pour fixer les prochaines dates d’audience. Une fois fixées, les dates d’audience seront considérées finales.

28 À la reprise des audiences, la preuve du plaignant devra se limiter aux dispositions de l’article 187 de la LRTFP, soit le devoir de représentation équitable de l’agent négociateur relativement au grief ayant mené à la décision de la Commission dans Ouellet, tel qu’allégué par le plaignant dans le cours de l’audience du 15 janvier 2009. Le fardeau de la preuve concernant la plainte contre l’agent négociateur repose sur le plaignant.

29 En raison de la comparution de Me Houle, celui-ci sera considéré le porte-parole du plaignant pour toute les procédures concernant l’audience à être à fixée et son procureur à toutes fins du traitement de ce dossier.

Le 27 janvier 2009.

Michele A. Pineau,
Vice-présidente

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