Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante alléguait que l’agent négociateur avait agi de manière discriminatoire à son endroit du fait des mesures qu’il avait prises contre elle et du fait qu’il avait mis un terme à son emploi d’aide-comptable auprès de l’un de ses éléments - l’agent négociateur a fait valoir que la plaignante n’avait pas présenté d’allégations pour étayer une violation de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la << Loi>>) - la Commission a convenu avec le défendeur que la plaignante n’avait pas établi qu’il y avait eu violation de la Loi. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-06-04
  • Dossier:  561-02-379
  • Référence:  2009 CRTFP 68

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

IRENE T. PSYLLIAS

plaignante

et

JEANNETTE MEUNIER-MCKAY ET JACQUELINE WHEYWAY-BACON
ET
SYNDICAT DE L’EMPLOI ET DE L’IMMIGRATION

défendeurs

Répertorié
Psyllias c. Meunier-McKay et al.

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michel Paquette, commissaire

Pour la plaignante:
elle-même

Pour les défendeurs:
Jacquie de Aguayo, Alliance de la Fonction publique du Canada

Décision rendue sans audience
(Traduction de la CRTFP)

Plainte devant la Commission

1 Le 15 décembre 2008, Irene T. Psyllias (la « plaignante ») a déposé, en vertu du paragraphe 190(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »), une plainte devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») contre Jeanette Meunier-McKay et Jacqueline Wheyway-Bacon (les « défendeurs ») en application des alinéas 190(1)a), c), f) et g).

2 Dans sa plainte, elle alléguait que les défendeurs avaient pris à son endroit des mesures disciplinaires discriminatoires sous la forme d’une poursuite intentée devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario, que la façon dont l’avocat-conseil des défendeurs s’était comporté durant la médiation effectuée par le truchement de cette cour de justice constituait du harcèlement et que les défendeurs l’avaient privée de son emploi en la congédiant du poste d’aide-comptable qu’elle occupait au Syndicat de l’emploi et de l’immigration du Canada (SEIC), Région de l’Ontario.

3 Le 2 février 2009, la représentante des défendeurs a demandé à ce que la présente plainte soit regroupée avec le dossier de la Commission 561-02-356, étant donné qu’elle reprend les allégations déjà soulevées dans ce dossier.

4 La représentante des défendeurs a également fait valoir que la plainte avait été déposée hors délai et ne démontrait pas à première vue qu’il y avait eu violation de la Loi, si bien qu’elle en demandait le rejet.

Faits non contestés

5 La plaignante est une membre actuelle de la section locale 543 du SEIC, une composante de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’AFPC), et occupe actuellement le poste de présidente de la section locale.

6 À l’automne 2006, différents ministères fédéraux ont fait l’objet d’une restructuration, ce qui eu une incidence sur certaines composantes de l’AFPC. Ainsi, tous les membres de la section locale 543 devaient être réinstallés dans d’autres lieux de travail. La section locale 543 a décidé de ne pas se démanteler et de traiter des questions concernant sa composition et sa réorganisation.

7 L’une de ces questions était de savoir si la section locale 543 était habilitée à répartir l’argent d’un fonds de grève entre ses membres. Quelques années auparavant, ses membres avaient accepté de verser 15 $ par chèque de paie, en sus des cotisations syndicales ordinaires, et avaient convenu de conserver cet argent dans ce que la section locale a décidé d’appeler un fonds de grève. Ce fonds était séparé de l’argent reçu régulièrement de l’AFPC et n’est jamais apparu sur les feuillets T4 des membres comme étant une retenue aux fins des cotisations syndicales.

8 Au cours d’une réunion de la section locale 543, en novembre 2006, les membres ont voté en faveur de l’attribution de 680 $ en cartes cadeaux à tous les membres. Des cartes cadeaux ont été achetées puis distribuées à tous les membres de la section locale.

9 En mars 2008, Mme Meunier-Mackay, pour le compte du SEIC, a intenté une action devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario contre la plaignante et d’autres personnes pour obtenir le remboursement de cotisations syndicales ayant été réparties de manière irrégulière par des représentants syndicaux à d’autres membres de la section locale.

10 La plaignante a été embauchée comme aide-comptable à la division ontarienne du SEIC en août 2008, puis congédiée en décembre de la même année.

11 Le 7 novembre 2008, une tentative de médiation eu égard à l’action intentée devant la Cour supérieure de l’Ontario s’est soldée par un échec.

Résumé de l’argumentation

12 La représentante des défendeurs a mentionné que le litige entourant le détournement des fonds avait pris naissance en mars 2008. Elle soutient donc que la plaignante a soulevé la question de la poursuite intentée par les défendeurs relativement au détournement de fonds bien après l’expiration du délai prévu au paragraphe 190(2) de la Loi. Ce délai, la Commission ne peut le proroger (voir Walters c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2008 CRTFP 106, au para. 10).

13 La représentante des défendeurs a fait remarquer que la plaignante avait allégué des infractions au paragraphe 190(1) de la Loi sur le formulaire concernant Mme Meunier-McKay et aux alinéas 190(1)a), c), f) et g) sur le formulaire visant Mme Wheyway-Bacon. Elle a déclaré que les alinéas 190(1)a) à f) ne s’appliquaient pas à l’espèce en ce qu’ils traitent des obligations de l’employeur et de l’agent négociateur découlant des processus de négociation collective et d’organisation. Elle a donc présenté les observations des défendeurs étant entendu que les plaintes ont été déposées relativement à l’application de l’alinéa 190(1)g) de la Loi. En outre, les défendeurs estiment que les passages de l’article 185 de la Loi sur lesquels s’appuie la plaignante ne sauraient étayer sa plainte. Les défendeurs présumeront donc, aux fins de la présente réplique, que la plainte repose sur des allégations faites aux termes de l’article 188 de la Loi, qui traite de pratiques déloyales de la part d’organisations syndicales.

14 La représentante des défendeurs a argué que les allégations incluses dans la plainte se rapportaient exclusivement à des affaires syndicales internes, en application de l’alinéa 188c) de la Loi. Aux termes de ces dispositions, la Commission a compétence pour instruire une affaire traitant de questions syndicales internes dans un nombre très limité de situations qui requièrent tout à la fois une décision du syndicat à titre de mesure disciplinaire prise à l’endroit d’un membre et une conduite, de par la prise de cette décision, constituant un acte discriminatoire au sens de la Loi canadienne sur les droit de la personne (voir Shutiak et al. c. Syndicat des employé(e)s de l’impôt – Bannon, 2008 CRTFP 103, aux para. 13 à 16).

15 La plaignante ne fait valoir aucun des motifs de distinction illicite que l’on trouve dans la Loi canadienne sur les droit de la personne, soit ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la déficience ou l’état de personne graciée.

16 Au surplus, la plaignante continue d’exercer ses fonctions de présidente de la section locale 543 du SEIC. À aucun moment, elle n’a été soumise à des mesures disciplinaires internes du syndicat, de sorte que l’existence de conditions préalables à une action disciplinaire n’a pas été démontrée.

17 La conduite des parties pendant la médiation menée dans le cadre de procédures de la Cour supérieure de justice de l’Ontario est régie par les Règles des procédures civiles et n’est pas abordée dans les interdictions prévues par l’article 188 de la Loi, compte tenu des exigences législatives s’appliquant aux mesures disciplinaires qu’une organisation syndicale peut prendre à l’endroit d’un membre ainsi que de la relation de représentation qu’envisage la Loi.

18 La plaignante avait pris un poste à durée déterminée au SEIC, Région de l’Ontario, poste dont les fonctions avaient trait aux activités du SEIC dans ladite région. Le non-renouvellement de ce contrat de travail entre le SEIC, à titre d’employeur, et la plaignante, en qualité d’employée, ne s’inscrit pas dans les paramètres de la Loi. L’article 188 de la Loi traite de la conduite d’un agent négociateur eu égard aux mesures disciplinaires prises à l’endroit de ses membres.

19 La représentante des défendeurs a déclaré que, en vertu de l’article 41 de la Loi, la plainte devrait être rejetée sans qu’audience soit tenue.

20 La plaignante argue que les défendeurs ont pris à son endroit des mesures disciplinaires discriminatoires sous la forme d’une action en justice. En réponse aux objections des défendeurs, elle croit que, même si les allégations portées contre elles ont été soumises à la Cour supérieure, le syndicat doit être tenu responsable de ses actes.

Motifs

21 Dans les dossiers 561-02-356 et 561-02-379 de la Commission est soulevée la même allégation selon laquelle les défendeurs ont pris une mesure disciplinaire contre la plaignante sous la forme de procédures judiciaires. J’ai déjà statué que cette plainte était hors délai (voir Psyllias c. Meunier-McKay et Syndicat de l’emploi et de l’immigration du Canada, 2009 CRTFP 67), et je n’y reviendrai donc pas ici.

22 La présente plainte a été déposée aux termes du paragraphe 190(1) de la Loi, et le formulaire ne faisait pas mention de manquement à la Loi ni d’autres points contestés. Il a fallu présumer de la teneur des allégations à la lecture des diverses pièces jointes.

     190.(1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

a) l’employeur a contrevenu à l’article 56 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

b) l’employeur ou l’agent négociateur a contrevenu à l’article 106 (obligation de négocier de bonne foi);

c) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 107 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

d) l’employeur, l’agent négociateur ou l’administrateur général a contrevenu au paragraphe 110(3) (obligation de négocier de bonne foi);

e) l’employeur ou l’organisation syndicale a contrevenu aux articles 117 (obligation de mettre en application une convention) ou 157 (obligation de mettre en oeuvre la décision arbitrale);

f) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 132 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

Délai de présentation

      (2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

Restriction relative aux plaintes contre une organisation syndicale

      (3) Sous réserve du paragraphe (4), la plainte reprochant à l’organisation syndicale ou à toute personne agissant pour son compte d’avoir contrevenu aux alinéas 188b) ou c) ne peut être présentée que si les conditions suivantes ont été remplies : 

a) le plaignant a suivi la procédure en matière de présentation de grief ou d’appel établie par l’organisation syndicale et à laquelle il a pu facilement recourir;

b) l’organisation syndicale a :

(i) soit statué sur le grief ou l’appel, selon le cas, d’une manière que le plaignant estime inacceptable,

(ii) soit omis de statuer sur le grief ou l’appel, selon le cas, dans les six mois qui suivent la date de première présentation de celui-ci;

c) la plainte est adressée à la Commission dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date à partir de laquelle le plaignant était habilité à le faire aux termes des alinéas a) et b).

23 Les alinéas 190(1)a) à f) de la Loi ont trait aux droits relatifs à la négociation (alinéa a)), à la négociation collective et aux conventions collectives (alinéas b), c), d), et e)), à l’arbitrage (alinéa e)) et aux services essentiels (alinéa f)). Seul l’alinéa 190(1)g) traite des pratiques déloyales. D’après les allégations soumises par la plaignante, j’en conclus que l’affaire en instance est visée par l’alinéa 190(1)g).

24 L’article 185 de la Loi porte ce qui suit :

   185. Dans la présente section, «pratiques déloyales » s’entend de tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188 et le paragraphe 189(1).

25 L’article 186 de la Loi a trait aux interdictions s’appliquant à certaines actions de l’employeur. L’article 187 de la Loi porte sur les obligations d’une organisation syndicale eu égard à sa représentation d’un fonctionnaire face à l’employeur. Le paragraphe 189(1) aborde les interdictions se rattachant à l’adhésion à une organisation syndicale ou à l’exercice de droits prévus par la Loi. Seul l’alinéa 188c) pourrait être relié aux allégations faites par la plaignante.

26 L’article 188 de la Loi se lit ainsi :

   188. Il est interdit à l’organisation syndicale, à ses dirigeants ou représentants ainsi qu’aux autres personnes agissant pour son compte : 

a) sans consentement de l’employeur, de tenter, sur le lieu de travail d’un fonctionnaire et pendant les heures de travail de celui-ci, de l’amener à adhérer ou continuer d’adhérer, ou à s’abstenir ou cesser d’adhérer à une organisation syndicale;

b) d’expulser un fonctionnaire de l’organisation syndicale ou de le suspendre, ou de lui refuser l’adhésion, en appliquant d’une manière discriminatoire les règles de l’organisation syndicale relatives à l’adhésion;

c) de prendre des mesures disciplinaires contre un fonctionnaire ou de lui imposer une sanction quelconque en appliquant d’une manière discriminatoire les normes de discipline de l’organisation syndicale;

d) d’expulser un fonctionnaire de l’organisation syndicale, de le suspendre, de prendre contre lui des mesures disciplinaires ou de lui imposer une sanction quelconque parce qu’il a exercé un droit prévu par la présente partie ou la partie 2 ou qu’il a refusé d’accomplir un acte contraire à la présente partie;

e) de faire des distinctions illicites à l’égard d’une personne en matière d’adhésion à une organisation syndicale, d’user de menaces ou de coercition à son égard ou de lui imposer une sanction, pécuniaire ou autre, pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

(i) elle a participé, à titre de témoin ou autrement, à une procédure prévue par la présente partie ou la partie 2, ou pourrait le faire,

(ii) elle a soit présenté une demande ou déposé une plainte sous le régime de la présente partie, soit déposé un grief sous le régime de la partie 2,

(iii) elle a exercé un droit prévu par la présente partie ou la partie 2.

27 Pour ce qui est de l’allégation sur le comportement des parties pendant la médiation menée dans le cadre de procédures de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, je souscris à l’observation des défendeurs. Ce comportement n’est pas visé par les interdictions que stipule l’alinéa 188c) de la Loi.

28 Quant à l’allégation portant sur le congédiement, là encore je me range à la position de la représentante des défendeurs selon laquelle cette mesure n’est pas visée par les interdictions de l’alinéa 188c) de la Loi.

29 J’ajouterais que la plaignante ne s’est pas non plus conformée aux dispositions du paragraphe 190(3) de la Loi, au motif qu’elle n’a présenté ni grief ni plainte en conformité avec les procédures internes de l’AFPC.

30 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit.

Ordonnance

31 La plainte est rejetée.

Le 4 juin 2009.

Traduction de la CRTFP

Michel Paquette,
commissaire

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