Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé travaillait un horaire de postes variables - l’employeur l’a avisé troisjours à l’avance que son poste de 11,5 heures, qui devait commencer le 2 janvier2005, serait plutôt un congé payé de 7,5 heures - ce poste était le jour férié payé reporté du fonctionnaire pour le jour de l’An - l’employeur l’a aussi informé qu’il devait soit travailler les quatre heures restantes un autre jour, soit demander congé pour ces heures - le fonctionnaire a travaillé ces quatre heures ultérieurement - l’arbitre de grief a conclu que, parce que le poste initialement prévu du fonctionnaire était son jour férié payé reporté pour le jour de l’An, il pouvait demander qu’il s’agisse plutôt d’un congé payé de 11,5 heures - l’employeur n’ayant pas avisé le fonctionnaire au moins septjours à l’avance, contrairement à ce que prescrit la convention collective, que son poste prévu à l’horaire était modifié, l’arbitre de grief a conclu que le fonctionnaire avait également droit à une prime tenant lieu de préavis d’un changement de poste pour les quatre heures qu’il a effectuées ultérieurement. Les griefs sont accueillis.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique,
L.R.C. (1985), ch. P-35

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2009-07-15
  • Dossier:  166-02-37599 et 37600
  • Référence:  2009 CRTFP 87

Devant un arbitre de grief


ENTRE

MICHAEL G. CLARKSON

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(Agence des services frontaliers du Canada)

employeur

Répertorié
Clarkson c. Conseil du Trésor (Agence des services frontaliers du Canada)

Affaire concernant des griefs renvoyés à l’arbitrage en vertu de l’article 92 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Georges Nadeau, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Andrew Raven, avocat

Pour l'employeur:
Shelley C. Quinn et Susan Keenan, avocates

Affaire entendue à Toronto (Ontario),
les 4 et 5 février 2009.
(Traduction de la CRTFP)

I. Griefs renvoyés à l’arbitrage

1 Michael G. Clarkson, le fonctionnaire s’estimant lésé (le « fonctionnaire »), occupe à l’Agence des services frontaliers du Canada un poste à horaire variable. En 2005, il a déposé deux griefs. Le premier portait sur la décision de l’employeur de modifier, à court préavis, l’un de ses postes de travail prévu un jour férié désigné payé en un congé payé. Il a demandé d’être rémunéré comme s’il avait occupé son poste prévu à l’horaire, la cessation par l’employeur de cette pratique de mettre les employés en congé payé lorsqu’il y a des jours fériés désignés payés et d’être indemnisé intégralement. Le deuxième grief portait sur le paiement de la prime en situation de modification d’horaire pour un poste de travail. Il a demandé de se faire verser la prime pour changement de poste à court préavis tout de suite après le jour férié désigné payé pour lequel son poste prévu à l’horaire avait été changé en congé payé le 3 janvier 2005.

2 La convention collective applicable aux griefs a été conclue entre l’Agence des douanes et du revenu du Canada et l’Alliance de la Fonction publique du Canada le 22 mars 2002 relativement à l’unité de négociation du groupe Exécution des programmes et des services administratifs (la « convention collective »). Le 12 décembre 2003, des secteurs de l’Agence des douanes et du revenu du Canada ont été transférés à l’Agence des services frontaliers du Canada. Les clauses pertinentes de la convention collective sont les suivantes :

[…]

ARTICLE 2
INTERPRÉTATION ET DÉFINITIONS

2.01   Aux fins de l'application de la présente convention:

[…]

« jour férié » (holiday) désigne :

(i) la période de vingt-quatre (24) heures qui commence à 0 h 01 un jour désigné comme jour férié payé dans la présente convention,

(ii) cependant, aux fins de l'administration d'un poste qui ne commence ni ne finit le même jour, un tel poste est considéré avoir été intégralement effectué :

(A) le jour où il a commencé, lorsque la moitié (1/2) ou plus des heures effectuées tombent ce jour-là,

ou

(B) le jour où il finit, lorsque plus de la moitié (1/2) des heures effectuées tombent ce jour-là,

[…]

ARTICLE 25
DURÉE DU TRAVAIL

Généralités

25.01 Aux fins de l'application du présent article :

[…]

b) le jour est une période de vingt-quatre (24) heures qui commence à 0 h.

[…]

Travail par poste

[…]

25.20

a) L'employé-e qui ne reçoit pas un préavis d'au moins sept (7) jours portant modification de son poste à l'horaire est rémunéré au tarif et demi (1 1/2) pour les sept premières virgule cinq (7,5) heures et à tarif double (2) par la suite pour le travail exécuté au cours du premier (1er) poste de l'horaire modifié. Les postes subséquents exécutés d'après le nouvel horaire sont rémunérés au tarif normal, sous réserve de l'article 28, Heures supplémentaires.

[…]

Conditions régissant l’administration des horaires de travail variables

25.24 Les conditions régissant l'administration des horaires de travail variables mis en œuvre conformément aux paragraphes 25.09, 25.10 et 25.23 sont stipulées aux paragraphes 25.24 à 25.27, inclusivement. La présente convention est modifiée par les présentes dispositions dans la mesure indiquée par celles-ci.

[…]

25.27 Champ d’application particulier de la présente convention

Pour plus de certitude, les dispositions suivantes de la présente convention sont appliquées comme suit :

[…]

e) Jours fériés payés (paragraphe 30.08)

(i) Un jour férié désigné payé correspond à sept virgule cinq (7,5) heures.

(ii) L'employé-e qui travaille un jour férié payé est rémunéré, en plus de la rémunération versée pour les heures précisées au sous-alinéa (i), au tarif et demi (1 1/2) jusqu'à concurrence des heures normales de travail prévues à son horaire et au tarif double (2) pour toutes les heures additionnelles qu'il ou elle effectue.

[…]

ARTICLE 30
JOURS FÉRIÉS PAYÉS

[…]

30.02 Sous réserve du paragraphe 30.03, les jours suivants sont désignés jours fériés désignés payés pour les employé-e-s :

a) le jour de l'An;

[…]

30.04 Jour férié coïncidant avec un jour de congé payé

Lorsqu'un jour désigné jour férié coïncide avec un jour de congé payé de l'employé-e, ce jour est compté comme un jour férié et non comme un jour de congé.

30.05 Jour férié coïncidant avec un jour de repos

a) Lorsqu'un jour désigné jour férié en vertu du paragraphe 30.02 coïncide avec un jour de repos de l'employé-e, il est reporté au premier (1er) jour de travail à l'horaire de l'employé-e qui suit son jour de repos. Si l'employé-e est en congé payé, le jour auquel est reporté le jour férié, ce jour est compté comme un jour férié et non comme un jour de congé.

[…]

Travail accompli un jour férié

[…]

30.08

a) L'employé-e qui travaille un jour férié est rémunéré au tarif et demi (1 1/2) pour toutes les heures effectuées jusqu'à concurrence de sept virgule cinq (7,5) heures et au tarif double (2) par la suite, en plus de la rémunération qu'il ou elle aurait reçue s'il ou elle n'avait pas travaillé ce jour-là;

ou

b) sur demande, et avec l'approbation de l'Employeur, l'employé-e peut bénéficier :

(i) d'un jour de congé payé (au tarif des heures normales), à une date ultérieure, en remplacement du jour férié;

et

(ii) d'une rémunération calculée à raison d'une fois et demie (1 1/2) le tarif horaire normal pour toutes les heures qu'il ou elle effectue jusqu'à concurrence de sept virgule cinq (7,5) heures;

et

(iii) d'une rémunération calculée à raison de deux (2) fois le tarif normal pour toutes les heures qu'il ou elle effectue le jour férié en sus de sept virgule cinq (7,5) heures.

[…]

3 Le 1er avril 2005, la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, a été proclamée en vigueur. En vertu de l’article 61 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, ces renvois à l’arbitrage doivent être décidés conformément à l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35.

4 L’audience prévue initialement a été reportée à la demande du fonctionnaire. Les parties n’étaient pas disponibles pour assister à une audience avant février 2009.

II. Résumé de la preuve

5 Les parties conviennent de l’énoncé des faits qui suit (pièce CU-4) :

[Traduction]

[…]

  1. Pendant la période pertinente, le fonctionnaire, Michael Clarkson, était employé comme agent des douanes (PM-03) à Blue Water Bridge (Opérations commerciales) à Sarnia, en Ontario.
  2. La convention collective pertinente est la convention collective des Services des programmes et de l’administration conclue entre l’Agence des douanes et du revenu du Canada et l’Alliance de la Fonction publique du Canada, signée le 22 mars 2002 et prenant fin le 31 octobre 2003.
  3. Le fonctionnaire était régi par une Entente sur les postes à horaires variables (« EPHV ») ayant été approuvée par le syndicat et la direction. Aux termes de l’EPHV, le fonctionnaire a un horaire de travail de 56 jours comportant 300 heures de travail. Les postes types du fonctionnaire sont d’une durée de 11,5 heures.
  4. Le fonctionnaire devait avoir un jour de repos le 1er janvier 2005, date qui coïncidait avec un jour férié payé (« JFP »). Le premier poste à l’horaire du fonctionnaire après ce jour de repos était de 20 h le 2 janvier à 8 h le 3 janvier 2005, ce qui est devenu son JFP en vertu de la clause 30.05.
  5. Le 30 décembre 2004, la direction a informé le fonctionnaire par téléphone qu’en raison du faible volume prévu au cours des postes des 2 et 3 janvier 2005, il ne devait pas se présenter à son poste à l’horaire (c’est-à-dire qu’il était « mis en congé »).
  6. Le terme « mise en congé » est le terme utilisé pour décrire les situations dans lesquelles la direction informe des employés que leurs services ne sont pas requis au cours d’un JFP. Par conséquent, il est donné instruction à ces employés de ne pas se présenter au travail à leur poste à l’horaire et ils sont rémunérés pour 7,5 heures.
  7. Le fonctionnaire a été rémunéré pour 7,5 heures pour le JFP pour lequel il a été « mis en congé », et il a dû rendre compte des 4 autres heures de son poste en utilisant un autre type de congé ou en travaillant ces heures à son retour en milieu de travail. Le fonctionnaire a travaillé ces 4 heures le 23 janvier 2005.
  8. Le fonctionnaire a déposé deux griefs.

    a) Le premier grief, en date du 7 janvier 2007 (05-3942-72682), est ainsi rédigé :

    Je conteste le fait que j’ai été « mis en congé » à mon jour férié (le jour de l’An), pour mon poste du 3 janvier 2005, et ce à court préavis.

Et je demande la réparation suivante :

Être rémunéré financièrement comme si j’avais travaillé mon poste et que la « mise en congé » involontaire lors de jours fériés cesse de se produire et que je sois indemnisé intégralement.

b) Le deuxième grief, en date du 18 janvier 2005 (05-3942-72740), est ainsi rédigé :

Je présente un grief concernant le fait que je me suis fait refuser à court préavis un changement de poste pour les quatre heures suivant immédiatement mon congé férié pour lequel j’ai été « mis en congé » le 3 janvier 2005.

Et je demande la réparation suivante :

Être rémunéré pour le changement de poste à court préavis que je me suis fait refuser et être indemnisé intégralement.

6 Le fonctionnaire a témoigné en son propre nom. Les avocates de l’employeur ont convoqué Gerald C. MacKinnon comme témoin.

7 Le fonctionnaire est un inspecteur des douanes à Blue Water Bridge à Sarnia, en Ontario, où il travaille aux Opérations commerciales. Il a un horaire variable constitué de postes de 12 heures qui incluent une pause-repas de 30 minutes. Il travaille cinq jours une semaine, puis deux jours la semaine suivante. Les heures des postes de travail sont de 8 h à 20 h et de 20 h à 8 h.

8 Le fonctionnaire a déclaré que le 30 décembre 2004, soit son jour de repos, Robert B. Crozier, un surintendant de l’Agence des services frontaliers du Canada, l’a appelé pour l’informer que son poste de travail qui devait débuter à 20 h le 2 janvier 2005 devenait un congé payé de 7,5 heures et qu’il devait à l’employeur les 4 heures de travail restantes. Il ne se souvient pas qu’un de ses postes à l’horaire ait été changé en congé payé auparavant. On ne lui a pas dit pourquoi c’est son poste qui a été changé en un congé payé. Il a demandé de se présenter au travail le 3 janvier 2005 entre 4 h et 8 h pour travailler les 4 heures restantes. M. Crozier a refusé. Le fonctionnaire a fini par travailler les quatre heures le 23 janvier 2005.

9 M. MacKinnon est le chef des Opérations commerciales du district St. Clair de l’Agence des services frontaliers du Canada. Il a expliqué que les Opérations commerciales s’occupent de l’importation de biens commerciaux au Canada. Le Sarnia Blue Water Bridge est la deuxième traverse la plus occupée en importance au Canada. Le trafic commercial fluctue d’une journée à l’autre; les jours de semaine sont plus achalandés que les fins de semaine et les nuits de la semaine. Il a également mentionné que le trafic commercial diminue les jours fériés, en raison d’événements particuliers comme l’épidémie de SRAS ou le 11 septembre 2001, ou encore en raison de la valeur du dollar canadien ou d’autres enjeux économiques. Il a indiqué que le trafic commercial ralentit pendant les deux dernières semaines de décembre et les deux premières semaines de janvier de chaque année.

10 M. MacKinnon a indiqué qu’il avait comme pratique de changer des postes à l’horaire en congés payés peu importe que les employés touchés soient des surintendants ou des agents. On lui a demandé de commenter le témoignage du fonctionnaire selon lequel ses postes à l’horaire n’avaient jamais été transformés en congé payé. M. MacKinnon a mentionné que l’on décide quel poste à l’horaire devient un congé payé en se basant sur les conseils du surintendant et en utilisant les horaires de l’année actuelle et des années antérieures pour faire preuve d’équité.

11 M. MacKinnon a témoigné qu’un courriel avait été envoyé à la mi-novembre 2004 pour demander à tous les agents d’indiquer s’ils voulaient que leurs postes à l’horaire soient changés en congé payé en décembre 2004 ou en janvier 2005 (pièce CE-1). Les agents ont été informés que s’il manquait de volontaires, l’employeur transformerait les postes à l’horaire en congés payés selon ce qu’il juge opportun. Les agents devaient répondre d’ici une certaine date. Le surintendant administratif devrait alors compter le nombre de volontaires ou de personnes en congé de longue durée, tenir compte des formations prévues et étudier les rapports sur les postes des années antérieures.

12 M. MacKinnon a indiqué que, pendant les fêtes de fin d’année de 2004-2005, il était nécessaire de changer des postes à l’horaire en congés payés parce qu’un trop grand nombre d’employés devaient travailler. Il en a informé le surintendant administratif. Il a été établi que les Opérations commerciales pourraient fonctionner avec trois employés.

13 M. MacKinnon a confirmé que le fonctionnaire avait demandé une prime pour changement de poste à court préavis, qui lui a été refusée parce que son cas n’était pas considéré comme un changement de poste. Le poste à l’horaire du fonctionnaire a été changé en un congé payé et il s’est fait payer 7,5 heures pour ce jour-là. Le fait d’informer le fonctionnaire qu’il n’avait pas à se présenter au travail ne constituait pas un changement de poste.

14 M. MacKinnon a soumis le document intitulé Commercial Shift Report du 3 janvier 2005 (pièce CE-2) et le document intitulé Commercial Schedule Agreement Incorporating a Hybrid VSSA & Non-VSSA Commercial Customs Officer Schedule pour le Blue Water Bridge (pièce CE-3) (l’« entente commerciale sur les horaires »).

15 En contre-interrogatoire, M. MacKinnon a indiqué que l’entente commerciale sur les horaires ne constituait pas à proprement parler une entente sur les postes à horaires variables, mais plutôt un document signé par l’agent négociateur et la direction. Il a indiqué que certaines lignes directrices avaient été élaborées au fil des ans relativement à la pratique qui consiste à remplacer les postes à l’horaire des employés par un congé payé et que ces lignes directrices se reflétaient dans les courriels décrivant cette pratique. Toutefois, il n’existait pas de politique comme telle.

16 M. MacKinnon a mentionné que le volume du trafic commercial revient à la normale après les fêtes de fin d’année. Il n’avait pas de dossiers indiquant combien de postes à l’horaire ont été changés en congés payés. Il a délégué au surintendant administratif la responsabilité de changer les postes à l’horaire en congé payé. La décision de changer le poste à l’horaire du fonctionnaire en congé payé a été prise deux à trois jours avant le jour férié désigné payé en question. M. MacKinnon a en outre mentionné que très peu d’étudiants travaillent pendant les fêtes de fin d’année. Il estimait que le nombre d’employés dont les postes à l’horaire ont été changés en congé payé le 3 janvier était peut-être de deux ou trois, mais il n’en était pas certain. La décision de changer le poste à l’horaire du fonctionnaire en congé payé aurait été prise sur la base des heures supplémentaires qu’il avait travaillées et du nombre de fois que ses postes à l’horaire avaient été précédemment changés en congé payé.

17 M. MacKinnon s’est fait demander de produire les courriels sur la pratique qui consiste à changer les postes à l’horaire en congé payé dont il avait fait mention précédemment en contre-interrogatoire. Il en a fourni trois (les pièces CU-5, 6 et 7).

18 M. MacKinnon a confirmé qu’en raison de la décision de changer le poste à l’horaire du fonctionnaire en congé payé, le fonctionnaire a dû suppléer les quatre heures restantes un autre jour. Il a travaillé ces quatre heures le 23 janvier 2005, après avoir obtenu une autorisation à cet effet.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire

19 L’avocat du fonctionnaire a soutenu que cette affaire comporte deux questions en litige. La première consiste à déterminer si l’employeur a donné un préavis approprié d’un changement de poste conformément à la clause 25.20 de la convention collective. La deuxième consiste à établir s’il était approprié, pour l’employeur, d’exiger que le fonctionnaire travaille quatre heures de plus ou demande du temps en congé pour cette période en raison de sa décision de changer le poste à l’horaire du fonctionnaire en congé payé lors d’un jour férié désigné payé.

20 L’avocat du fonctionnaire a fait observer que les postes du fonctionnaire sont de 12 heures et que son horaire de 2005 donnait le 1er janvier comme jour de repos. En vertu de la clause 30.05 de la convention collective, ce jour férié désigné payé a été déplacé au poste à l’horaire suivant, qui était le 3 janvier 2005, et il devait travailler de 20 h le 2 janvier 2005 à 8 h le 3 janvier 2005.

21 Le 30 décembre 2004, le fonctionnaire a été informé que son poste à l’horaire serait changé en un congé payé. On lui a dit de ne pas se présenter au travail et on lui a indiqué qu’il se ferait payer 7,5 heures. Il lui a en outre été mentionné qu’il devrait suppléer aux quatre heures restantes. Il a travaillé ces quatre heures le23 janvier 2005.

22 Outre l’avis, les griefs ont soulevé la question de savoir s’il était approprié pour l’employeur d’insister pour que le fonctionnaire travaille les 4 heures restantes ou de savoir s’il avait le droit d’être rémunéré pour la totalité du poste de 11,5 heures comme jour férié désigné payé.

23 En ce qui concerne la question de l’avis, l’avocat du fonctionnaire a indiqué que les cas de changement de poste sont réglés différemment si la convention collective renferme des dispositions qui portent sur un changement à l’horaire des postes ou sur un changement à un poste à l’horaire. Dans le présent cas, la convention collective couvre un changement à un poste à l’horaire.

24 La clause 25.20 de la convention collective prévoit que l’employé qui ne reçoit pas un préavis d’au moins sept (7) jours portant modification de son poste à l’horaire est rémunéré d’après le taux de la prime indiqué.  

25 Dans la présente affaire, le fonctionnaire a reçu un préavis de moins de trois jours lui indiquant de ne pas se présenter à son poste à l’horaire le 2 janvier 2005. Il est vrai que le poste à l’horaire du fonctionnaire, qui était un jour de travail, n’a pas été changé en jour de repos. Néanmoins, l’employeur l’a changé en un congé payé. Le fonctionnaire a dû suppléer les quatre heures restantes de son poste à l’horaire, mais il n’a pas été autorisé à travailler ce jour-là.

26 Après certaines discussions avec la direction, il a été finalement convenu que le fonctionnaire pourrait travailler les quatre heures restantes le 23 janvier 2005, ce qui équivalait à un changement à son poste à l’horaire qui a été effectué avec un préavis de moins de sept jours. Par conséquent, le fonctionnaire a le droit d’être rémunéré, pour les quatre heures travaillées le 23 janvier 2005, à tarif et demi, conformément à la clause 25.20(a) de la convention collective.

27 L’avocat du fonctionnaire a souligné que [traduction] « dès novembre », l’employeur savait que de trop nombreux employés avaient un poste à l’horaire le jour de l’An 2005. Ce n’était pas unesurprise.

28 L’avocat du fonctionnaire a fait observer que Canada (Treasury Board) v. C.A.T.C.A. (1986),70 N.R. 151 (C.A.F.) devrait être distinguée parce qu’elle porte sur un changement de cycle de poste et non sur un changement de poste à l’horaire.

29 L’avocat du fonctionnaire a mentionné que dans Cloutier et al. c. Agence du revenu du Canada, 2009 CRTFP 3, un arbitre de grief a reconnu que le fait d’être renvoyé à la maison est un changement de poste.

30 L’avocat du fonctionnaire a également fait observer que dans Crawford c. Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 168-02-37 (19731120), la Commission des relations de travail dans la fonction publique a statué que les changements aux horaires de poste comprenaient à la fois les changements aux tendances en matière de postes et les changements individuels dans le contexte d’un poste. C’est ce qui est arrivé au fonctionnaire dans le présent cas. Il n’a pas reçu l’avis de changement qu’il aurait dû recevoir. Encore une fois, il ne s’agissait pas d’un événement imprévu. Non seulement le fonctionnaire n’a pas reçu d’avis, mais il a également dû travailler quatre heures le 23 janvier 2005.

31 En ce qui concerne la deuxième question, l’avocat du fonctionnaire a fait valoir que comme l’employeur avait décidé de changer le poste à l’horaire du fonctionnaire en un congé payé un jour férié désigné payé, l’employeur aurait dû lui accorder tout le poste comme congé payé, et non seulement une partie de celui-ci. La convention collective n’attribue pas de valeur temporelle à un jour férié désigné payé dans le cas où il est prévu qu’un employé travaille et que l’employeur lui donne ensuite instruction de ne pas se présenter au travail.

32 Bien que la clause 25.27(e) de la convention collective précise que les employés qui travaillent un jour férié désigné payé ont le droit de se faire payer 7,5 heures, elle n’établit pas la valeur temporelle d’un jour férié désigné payé pour l’application des autres clauses de la convention collective.

33 L’avocat du fonctionnaire fait valoir que sauf disposition expresse de la convention collective à l’effet contraire, le mot « jour » désigne une période de 24 heures. Pour étayer son argumentation, l’avocat du fonctionnaire a cité les décisions King et Holzer c. Agence des douanes et du revenu du Canada, 2001 CRTFP 117, et Canada (Procureur général) c. King, 2003 CFPI 593. L’avocat du fonctionnaire a mentionné que conformément à ces décisions, la clause 25.01(b) de la convention collective définit un « jour » comme une période de 24 heures pour l’application de l’article 25, ce qui touche les heures de travail. Elle définit également un « congé » comme une période de 24 heures qui débute à minuit un jour désigné comme congé payé.

34 Contrairement aux autres conventions collectives qui précisent qu’un jour est de 7,5 heures en toutes circonstances, la convention collective dans la présente affaire énonce différentes significations du mot « jour » pour différentes clauses de la convention collective.

35 L’avocat du fonctionnaire a également mentionné que la clause 30.05(a) de la convention collective prévoit que toutes les heures travaillées un jour férié désigné payé qui a été reporté sont réputées travaillées un jour férié. De même, la clause 30.04 prévoit que lorsqu’un jour férié désigné payé coïncide avec un jour de congé payé, ce jour est compté comme un jour férié.

36 La clause 25.27(e) de la convention collective est une disposition de clarification qui s’applique uniquement à la clause 30.08, qui porte sur la rémunération versée lorsqu’un employé travaille un jour férié désigné payé. La clause 30.08 prévoit simplement que les employés qui travaillent un jour férié doivent être rémunérés à tarif et demi les 7,5 premières heures et à tarif double par la suite, en sus de la rémunération qui leur aurait été versée s’ils n’avaient pas travaillé en ce jour férié. Comme la clause 30.08 ne prévoit pas les situations dans lesquelles il est prévu que les employés travaillent des postes plus longs, la clause 25.27(e) comporte une formule différente : 7,5 heures à tarif régulier, à laquelle s’ajoute la rémunération versée au tarif et demi jusqu’à concurrence des heures normales de travail prévues à son horaire et au tarif double pour les heures qui excèdent les heures normales de travail prévues à son horaire. Il a été établi clairement que cet éclaircissement était nécessaire dans King c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accise), dossiers de la CRTFP 166-02-28332 et 28333 (19990819). Dans Arsenault et al. c. Agence Parcs Canada, 2008 CRTFP 17, il a aussi été établi clairement que la clause 25.27(e) s’applique seulement aux questions de rémunération des heures travaillées.

37 L’avocat du fonctionnaire a soutenu que lorsque les postes à l’horaire des employés sont changés en jours de repos un jour férié désigné payé, ne se posent ni la question de la rémunération du travail un jour férié désigné payé ni la question de l’application des dispositions sur le congé de la convention collective. Dans la présente affaire, le poste à l’horaire du fonctionnaire a été changé en congé payé un jour férié désigné payé, et un congé est défini à l’article 2 comme une période de 24 heures.

38 L’avocat du fonctionnaire a fait valoir que lorsque l’employeur change un poste à l’horaire de l’employé en congé payé un jour férié désigné payé, l’employeur doit donner à l’employé un congé payé pour toutes les heures que l’employé devait initialement travailler en ce jour férié.

39 Pour étayer ses arguments, l’avocat du fonctionnaire a de nouveau mentionné King c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accise), affaire dans laquelle un arbitre de grief a statué que les heures de travail prévues doivent signifier les heures de travail effectivement prévues. La clause 25.27(e) a été ajoutée à la convention collective pendant la négociation collective qui a suivi cette décision.

40 L’avocat du fonctionnaire a également mentionné King et Holzer et Phillips c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossier de la CRTFP 166-02-20099 (19910425), qui souligne que selon l’interprétation habituelle, un « jour » est une période de 24 heures. Il mentionne en outre que la Cour fédérale a maintenu cette dernière décision, qui porte sur le congé de mariage. Dans Breau et al. c. Conseil du Trésor (Justice Canada), 2003 CRTFP 65, Mackie c. Conseil du Trésor (Défense nationale), 2003 CRTFP 103, Stockdale et al. c. Conseil du Trésor (Pêches et Océans Canada), 2004 CRTFP 4, et Breitenmoser et al. c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada – Service correctionnel, Citoyenneté et Immigration Canada, Développement des ressources humaines Canada, Défense nationale), 2004 CRTFP 103, les arbitres de grief ont adopté une approche similaire de la notion de « jour ». L’avocat du fonctionnaire a ajouté qu’il est mentionné dans Breitenmoser et al. que la conversion d’un jour férié désigné payé à 7,5 ou 8 heures (tel qu’il est discuté dans cette décision) devrait être annulée parce que cette question n’a pas été débattue à l’arbitrage de grief.

41 L’avocat du fonctionnaire a établi une distinction entre la présente affaire et Diotte c. Conseil du Trésor (Solliciteur général – Service correctionnel Canada), 2003 CRTFP 74, Wallis c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2004 CRTFP 180, et White c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada – Service correctionnel), 2003 CRTFP 40, qui traitaient toutes du libellé spécifique d’autres conventions collectives.

42 L’avocat du fonctionnaire a fait valoir que la clause 25.27(e) de la convention collective ne s’applique pas à un employé dont le poste à l’horaire est changé en un congé payé. En vertu de la clause 30.04, si le fonctionnaire avait décidé de prendre un congé annuel, et si ce jour avait coïncidé avec un jour férié désigné payé, son solde de congés aurait été crédité de 11,5 heures, car le jour férié désigné payé compte pour un jour complet.

43 L’avocat du fonctionnaire a soutenu que la situation du fonctionnaire devrait être distinguée d’une situation dans laquelle un employé demande un congé annuel. Si un employé souhaite prendre un jour de congé annuel, l’employeur débitera le solde de congés de l’employé du nombre d’heures non travaillées.

B. Pour l’employeur

44 Les avocates de l’employeur ont prétendu que toutes les cas soumis par l’avocat du fonctionnaire reposent sur des conventions collectives différentes et peuvent être distinguées parce qu’elles ne traitent pas d’une clause qui précise qu’un jour férié désigné payé compte 7,5 heures.

45 Les avocates de l’employeur ont souligné le paragraphe 3 de l’énoncé conjoint des faits (pièce CU-4), qui mentionne que le fonctionnaire et ses collègues doivent travailler 300 heures réparties sur un horaire variable de postes d’une durée de 56 jours et que la longueur d’un poste est de 11,5 heures. Ainsi, le fonctionnaire doit travailler l’équivalent de 26 postes complets sur 56 jours. Les avocates de l’employeur ont ajouté que l’entente commerciale sur les horaires (CE-3, page 3) prévoit un « équilibre zéro », ce qui signifie qu’un employé qui est dans le cas du fonctionnaire doit travailler ou comptabiliser 300 heures sur 56 jours.

46 Si le fonctionnaire avait travaillé le 3 janvier 2005, les 11,5 heures de ce poste à l’horaire auraient été comptabilisées dans les 300 heures travaillées par le fonctionnaire au cours de cette période. La convention collective prévoit que si un employé prend congé un jour férié désigné payé, le jour férié compte pour 7,5 heures conformément à la clause 25.27(e). L’employeur ajoute ces 7,5 heures au total des heures travaillées pendant l’horaire de 56 jours. Comme le fonctionnaire est un travailleur à horaire variable, il doit comptabiliser les quatre heures restantes de son poste à l’horaire modifié en raison de l’exigence d’« équilibre zéro » de l’entente commerciale sur les horaires.

47 Les avocates de l’employeur ont soutenu que l’avocat du fonctionnaire me demandait de considérer l’article 25 de la convention collective comme incluant des mots qui ne s’y trouvent pas et ont fait valoir que la clause 25.27(e) s’applique seulement si un employé travaille effectivement. Par conséquent, l’avocat du fonctionnaire demande qu’une clause rédigée exclusivement pour les jours fériés désignés payés soit ignorée.

48 Les avocates de l’employeur ont fait valoir que contrairement à la thèse mise de l’avant par l’avocat du fonctionnaire, les deux dispositions qui forment la clause 25.27(e) de la convention collective sont distinctes. Si les parties à la convention collective avaient voulu que la première disposition s’applique seulement lorsqu’un employé travaille, elles auraient regroupé les deux dispositions; le fait est qu’elles sont différentes.

49 La définition de « jour férié » de la clause 2.01 de la convention collective vise à s’assurer que tous les employés profitent d’un jour férié désigné payé dans tous les cas. La deuxième partie de la définition s’applique aux travailleurs par poste, dont le jour commence un jour civil et se termine un autre jour civil. C’est pourquoi le terme « jour férié » est défini dans la convention collective.

50 Les avocates de l’employeur ont indiqué qu’une argumentation complexe et alambiquée selon laquelle une définition générale de la notion de « jour férié » qui expose les règles sur les congés fériés (leur début et leur fin) ne devrait convaincre personne qu’il est possible de modifier ce qui constitue une disposition très spécifique et claire de la convention collective. Un jour férié désigné payé est d’une durée de 7,5 heures.

51 Les avocates de l’employeur ont soumis Murray et Shaver c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossiers de la CRTFP 166-02-26588 à 26592 (19960301), où il a été statué que tous les employés qui occupent des postes de jour et qui ont des horaires variables devraient être traités de la même façon. Les avocates de l’employeur ont répété que la convention collective énonce clairement que le jour férié désigné payé d’un employé à poste variable ne devrait pas représenter plus de temps que celui d’un employé de jour.

52 Relativement à la question du changement de poste, les avocates de l’employeur ont fait valoir que le fait de placer un employé en congé payé ne représente pas un changement à un poste à l’horaire. Un changement à un poste à l’horaire serait survenu si l’employeur avait dit au fonctionnaire de se présenter à 16 h alors qu’il devait initialement commencer à 8 h. L’examen attentif de la clause 25.20 de la convention collective permet de constater que l’heure de début constitue le critère. Pour que le fonctionnaire puisse se faire dire de se présenter à 16 h, il aurait fallu que l’employeur lui donne un préavis de sept jours, soit un préavis d’au moins sept jours avant l’heure de début prévue de 16 h. Les avocates de l’employeur ont fait valoir que lorsque quelqu’un est placé en congé payé, il n’y a pas d’heure de début; il n’existe pas d’obligation de donner un préavis de sept jours parce que la clause 25.20 ne s’applique pas.

53 Les avocates de l’employeur ont fait observer que dans Spears c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossier de la CRTFP 166-02-14759 (19850130), l’employé avait accepté de travailler un jour férié désigné payé. Il s’est fait payer pour 7,5 heures en plus de la prime à tarif et demi pour toutes les heures travaillées un jour férié désigné payé. Malgré sa paie régulière et la prime, un employé voulait davantage parce qu’il avait été informé du changement d’horaire seulement un jour à l’avance. Il réclamait la prime de changement de poste en plus de la rémunération qu’il avait reçue. Un arbitre de grief a statué que la situation ne répondait pas aux conditions d’un changement de poste. Un changement de poste à l’horaire comporte la substitution d’un poste déjà inscrit à l’horaire. Ce cas ne comporte pas de changement de poste.

54 Les avocates de l’employeur ont renvoyé à Vaillancourt c. Agence canadienne d’inspection des aliments, 2004 CRTFP 44. Mme Vaillancourt s’était fait demander de se présenter à un lieu de travail différent à une heure légèrement différente de son heure habituelle d’arrivée au travail. Il s’agissait d’un changement temporaire à son horaire de travail. L’employée croyait qu’elle aurait dû recevoir un préavis plus long. Toutefois, un arbitre de grief a statué qu’il n’y avait pas de changement du poste à l’horaire de l’employée, car un poste à l’horaire n’a pas été remplacé par un autre. Dans le cas du fonctionnaire, il ne s’est pas fait demander de se présenter au travail; il s’est fait demander de demeurer à la maison.

55 Tant Spears que Vaillancourt appuient la thèse de l’employeur. Les faits dans le présent cas sont encore plus probants, car la vie du fonctionnaire n’a pas été perturbée. Il s’est fait dire de demeurer à la maison. Il n’y a pas eu de changement à son poste à l’horaire.

56 Les avocates de l’employeur m’ont également renvoyé à Saunders c. Conseil du Trésor (Défense nationale), dossier de la CRTFP 166-02-14581 (19850115), Bernardt et al. c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Douanes et Accise), dossiers de la CRTFP 166-02-18971 à 18976 (19891107), Toomey et Bygott c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossiers de la CRTFP 166-02-21925 et 21926 (19920424), et Guérin et al. c. Chambre des communes, dossier de la CRTFP 466-H-224 (19940518).

C. Réfutation du fonctionnaire

57 En guise de réfutation, l’avocat du fonctionnaire a fait valoir que la clause 30.04 de la convention collective prévoit clairement que si un jour désigné jour férié coïncide avec un jour de congé payé, le jour férié remplace le jour de congé. L’avocat du fonctionnaire a posé la question suivante : « Comment cela peut-il se produire si l’employeur a raison? » Cette clause n’est pas cohérente avec les arguments mis de l’avant par les avocates de l’employeur.

58 L’avocat du fonctionnaire a fait valoir qu’il convient d’étudier la convention collective. Tandis que le fonctionnaire doit comptabiliser 300 heures dans un horaire variable établi sur 56 jours, ces 300 heures peuvent être remplacées par des congés. Il a été statué dans King et Holzer que lorsqu’un employeur transforme un poste à l’horaire en congé payé, le congé représente le poste à l’horaire complet.

59 L’avocat du fonctionnaire a fait valoir que les avocates de l’employeur n’ont pas traité de l’argument portant sur l’objet des changements effectués par la clause 25.27(e) de la convention collective. La clause 25.24 établit assez clairement que les modalités qui régissent l’administration des heures de travail variables sont précisées dans les clauses 25.24 à 25.27 inclusivement et que la convention collective est modifiée par ces dispositions dans la mesure qui y est indiquée. La clause 25.27(e) indique qu’elle modifie la clause 30.08. La clause 30.08 prévoit seulement les situations dans lesquelles un employé travaille un jour férié désigné payé; elle ne mentionne rien au sujet de la valeur du jour férié en heures. La clause 30.08 n’est pas censée définir un « jour férié ». La clause qui le fait est la clause 2.01, qui définit un « jour férié » comme une période de 24 heures. De nombreux cas accordent de l’importance à la définition d’un « jour », et les avocates de l’employeur en ont fait fi. Si les parties à la convention collective avaient voulu changer la définition de « jour », elles auraient modifié la définition. Se reportant à Wallis et White, l’avocat du fonctionnaire a fait valoir que si l’employeur voulait qu’un jour férié soit d’une durée de 7,5 heures, il aurait insisté pour qu’une définition de jour férié désigné payé soit inscrite dans la convention collective applicable à ces cas.

60 L’avocat du fonctionnaire a fait observer que les deux parties avaient renvoyé à Murray et Shaver. Ce cas diffère complètement du présent cas. Il est clair que cette décision portait sur un appendice d’une convention collective qui précisait les taux de rémunération quotidiens. Dans le présent cas, la clause 25.27(e) de la convention collective couvre seulement les situations dans lesquelles un employé travaille effectivement.

61 En ce qui concerne le préavis, l’avocat du fonctionnaire a fait observer que certains cadres supérieurs ont reconnu que la clause 25.20 de la convention collective s’applique lorsque le poste à l’horaire d’un employé est changé en congé payé (pièce CU-5).

62 L’avocat du fonctionnaire a demandé en quoi la situation du fonctionnaire ne constituait pas un changement de poste, étant donné que le fonctionnaire s’était fait demander de travailler les quatre heures restantes le 23 janvier 2005.

63 L’avocat du fonctionnaire a fait valoir que Spears ne contredit pas Crawford parce que le libellé de la convention collective qui s’applique à chacun de ces cas différait. Dans Vaillancourt, la convention collective renvoyait à un changement à l’horaire des postes et non à un changement à un poste à l’horaire.

IV. Motifs

64 Relativement à la question du préavis, la condition de la clause 25.20 de la convention collective est qu’un employé « […] qui ne reçoit pas un préavis d’au moins sept (7) jours portant modification de son poste à l’horaire est rémunéré au tarif et demi pour les sept première virgule cinq (7,5) heures et à tarif double (2) par la suite ». Il est généralement accepté que ces clauses sur le préavis ont pour objet d’apporter une certaine stabilité aux employés affectés à des postes.

65 Dans le présent cas, la preuve établit clairement que le fonctionnaire s’est fait demander de changer son poste à l’horaire. En outre, il est clair que le préavis du changement a été donné le 30 décembre 2004, soit moins de sept jours avant le moment du début de son poste à l’horaire. Il n’est pas pertinent que les changements comportent un changement à l’heure du début ou l’élimination pure et simple du poste. Le poste, qui était à l’horaire de 20 h le 2 janvier 2005 à 8 h le 3 janvier 2005, a été changé et est devenu un congé payé de 7,5 heures, accompagné d’une obligation soit de demander un congé annuel de 4 heures soit de travailler 4 heures à une date ultérieure. Le partage par l’employeur du poste en deux — 7,5 heures qui étaient considérées comme un congé payé et 4 autres heures qui devaient être travaillées à un autre moment ou qui devaient être couvertes par un congé annuel — affaiblit la position de l’employeur selon laquelle le fait de placer le fonctionnaire en congé payé après l’avoir inscrit sur l’horaire de travail ne constitue pas un changement à un poste à l’horaire. Spears a conclu qu’un changement à un horaire pour un poste de travail comporte la substitution d’un poste à un autre déjà prévu à l’horaire. C’est exactement ce qui s’est produit dans le cas qui nous occupe; le fonctionnaire a dû exécuter un poste révisé de quatre heures le 23 janvier 2005. Par conséquent, le fonctionnaire devrait être rémunéré pour la différence entre le tarif régulier et le tarif de prime pour changement de poste qui correspond au tarif et demi pour ce poste de quatre heures.

66 En ce qui concerne la question de savoir si l’employeur avait le droit d’insister pour que le fonctionnaire travaille ou demande congé pour les quatre heures restantes du poste prévu initialement, j’estime qu’un examen plus attentif de la convention collective règle la question. La clause 2.01 définit un « jour férié » comme « […] la période de vingt-quatre (24) heures qui commence à 0 h 01 un jour désigné comme jour férié payé dans la présente convention […] »Elle ajoute « […] aux fins de l’administration d’un poste qui ne commence ni ne finit le même jour, un tel poste est considéré avoir été intégralement effectué […] » le jour où il a commencé ou le jour où il finit, selon le jour au cours duquel davantage d’heures sont travaillées.

67 En outre, l’article 30 de la convention collective porte sur les jours fériés désignés payés. Son sous-titre,« Travail accompli un jour férié », englobe trois clauses (30.06, 30.07 et 30.08). La clause 30.08 prévoit expressément et seulement le paiement de la rémunération aux employés qui travaillent un « jour férié ».

68 Les avocates de l’employeur ont invoqué la clause 25.27(e)(i) de la convention collective à l’appui de la thèse selon laquelle un congé payé qui tombe un jour férié désigné payé compte pour seulement 7,5 heures. Bien qu’à première vue, cette proposition semble attrayante, elle ne résiste pas à une analyse minutieuse du libellé complet des clauses 25.27(e)(i) et 30.08.

69 La clause 25.27(e)(i) de la convention collective n’est pas présumée modifier l’application de la convention complète; elle a pour seul but de clarifier l’application de la clause 30.08 :

[…]

25.27 Champ d’application particulier de la présente convention

Pour plus de certitude, les dispositions suivantes de la présente convention sont appliquées comme suit :

[…]

e) Jours fériés payés (paragraphe 30.08)

(i) Un jour férié désigné payé correspond à sept virgule cinq (7,5) heures.

[…]

70 Comme je l’ai indiqué précédemment, la clause 30.08 de la convention collective traite seulement de la rémunération des employés qui travaillent un jour férié désigné payé. Cette clause n’établit pas la durée d’un congé payé lorsqu’un employé ne travaille pas au cours d’un poste initialement prévu un jour férié désigné payé.

71 Dans le présent cas, le fonctionnaire devait au départ travailler un poste d’une durée de 11,5 heures le jour pendant lequel il a fini par être mis en congé payé. La définition de « jour férié » qui se trouve dans la clause 2.01 de la convention collective stipule qu’un jour férié est une période de 24 heures. Comme la clause 30.02 désigne le 1er janvier comme jour férié désigné payé (le jour férié a été déplacé au 3 janvier 2005 dans les circonstances), il s’ensuit que l’instruction donnée par l’employeur au fonctionnaire de demeurer à la maison en ce jour férié désigné payé devrait faire en sorte que le fonctionnaire soit payé pour tout le poste prévu au départ ce jour-là.

72 Les cas qui ont traité de la notion de congé, dans des cas où la convention collective ne précisait pas la durée du congé, ont conclu que la période est celle qui est normalement prévue; voir King et Holzer, Stockdale et al. et Phillips.

73 Je constate également que les avocates de l’employeur n’ont produit aucune preuve qui m’auraient incitées à conclure que le fait de placer le fonctionnaire en congé payé pour la durée de son poste initial aurait entraîné des frais additionnels en heures supplémentaires ou des paiements additionnels en contravention de la convention collective. Ses services n’étaient pas requis ce jour-là, aucun de ses collègues n’a été appelé à le remplacer et il n’aurait reçu aucun versement additionnel en conséquence de la situation.

74 Murray et Shaver n’est pas très utile à l’employeur parce que dans ce cas, un arbitre de grief a conclu que les employés avaient droit au tarif quotidien de rémunération pour le jour férié désigné payé. Dans le présent cas, la clause 25.27(a) de la convention collective précise que le « tarif quotidien de rémunération » ne s’applique pas aux employés ayant des heures de travail variables, comme c’est le cas du fonctionnaire.

75 Les avocates de l’employeur ont fait valoir que la définition d’un « jour férié » a pour but de s’assurer que tous les employés profitent d’un jour férié désigné payé peu importe leurs postes. C’est exactement ce qu’une application correcte de la convention collective permettra de réaliser. Peu importe la durée de leurs postes, les employés ont droit à un jour de congé.

76 Je constate également que si le fonctionnaire avait demandé congé pour les quatre heures restantes de son poste initial, le congé aurait coïncidé avec un jour férié désigné payé. Toutefois, la clause 30.04 de la convention collective prévoit que lorsqu’un jour de congé payé coïncide avec un jour férié désigné payé, le jour doit compter comme jour férié désigné et non comme jour de congé.

77 Je constate en outre que les avocates de l’employeur ont cité White, Diotte et Wallis. Ces décisions peuvent toutes être distinguées de la présente affaire parce que les conventions collectives dans ces affaires prévoyaient qu’un jour férié désigné payé représenterait les heures régulières précisées par la convention. Ce libellé mène à une conclusion qui diffère de celle qui est tirée de la convention collective qui s’applique au fonctionnaire.

78 En ce qui a trait aux autres décisions citées par les avocates de l’employeur, je ne les trouvais pas utiles pour statuer sur l’une ou l’autre des questions en litige en l’espèce, car elles portaient sur des situations qui différaient considérablement. Saunders portait sur la question de savoir si les heures supplémentaires constituent une modification d’un horaire des postes. C.A.T.C.A. portait sur le droit de travailler lors d’un jour férié. Bernhardt et al. abordait ce qui représente un préavis de changement et des questions de crédibilité. Toomey et Bygott et Guérin et al. portaient sur le droit de travailler un jour férié désigné payé. Vaillancourt portait sur la question de savoir si un léger changement des heures de travail constitue un changement à un horaire de poste.

79 Par conséquent, je conclus, relativement à la deuxième question, que l’employeur aurait dû placer le fonctionnaire en congé payé pour tout son poste qui devait initialement être à l’horaire de 20 h le 2 janvier 2005 à 8 h le 3 janvier 2005. En conséquence, il est ordonné à l’employeur de payer au fonctionnaire quatre heures au tarif régulier qui s’applique aux jours fériés désignés payés.

80 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

81 Les griefs sont accueillis.

82 Il est ordonné à l’employeur de payer au fonctionnaire quatre heures au tarif régulier pour la rémunération manquante applicable au jour férié désigné payé déplacé le 3 janvier 2005.

83 Il est ordonné à l’employeur de verser au fonctionnaire la différence entre le tarif de rémunération régulier et le tarif de la prime pour changement de poste à tarif et demi pour les quatre heures travaillées le 23 janvier 2005.

Le 15 juillet 2009.

Traduction de la CRTFP

Georges Nadeau,
arbitre de grief

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