Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a affirmé que l'intimé a abusé de son pouvoir de deux façons : premièrement, en ne faisant pas figurer dans les exigences relatives aux études la possession d'un diplôme d'une université reconnue et deuxièmement, en ne considérant pas l'expérience dans le domaine des systèmes d'information géographique (SIG) comme une qualification essentielle pour le poste. L'intimé a rétorqué qu'il n'existe aucune règle stricte dans la LEFP par rapport à l'établissement des qualifications et que les administrateurs généraux jouissent d'un vaste pouvoir discrétionnaire en ce domaine. Décision : L'exigence relative aux études était conforme à la norme de qualification applicable. Le Tribunal a estimé que le plaignant n'avait pas fourni suffisamment d'éléments de preuve à l'appui de son allégation selon laquelle les qualifications établies n'étaient pas appropriées pour le travail à accomplir. Plainte rejetée.

Contenu de la décision

Coat of Arms - Armoiries
Dossier:
2007-0456
Rendue à:
Ottawa, le 17 février 2009

BLAINE FRASER
Plaignant
ET
LE SOUS-MINISTRE DE LA DÉFENSE NATIONALE
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Plainte d'abus de pouvoir en vertu de l'alinéa 77(1)a) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique
Décision:
La plainte est rejetée
Décision rendue par:
Helen Barkley, membre
Langue de la décision:
Anglais
Répertoriée:
Fraser c. Sous-ministre de la Défense nationale et al.
Référence neutre:
2009 TDFP 0005

Motifs de la décision

Introduction

1Blaine Fraser soutient qu’il n’a pas été nommé au poste d’officier de gestion durable des champs de tir et des zones d’entraînement (EG‑06), à la Base des Forces canadiennes (BFC) Shilo (Manitoba), en raison d’un abus de pouvoir de la part de l’intimé, le sous‑ministre du ministère de la Défense nationale (MDN).

2Le plaignant affirme que l’intimé a abusé de son pouvoir de deux façons différentes : d’une part, en ne faisant pas figurer dans les exigences relatives aux études la possession d’un diplôme d’une université reconnue; et, d’autre part, en ne considérant pas comme une qualification essentielle pour le poste l’expérience dans le domaine des systèmes d’information géographique (SIG).

3L’intimé soutient que la direction jouit d’un pouvoir discrétionnaire lorsqu’il s’agit d’établir les qualifications essentielles pour le poste à doter. En l’espèce, aucun diplôme universitaire n’était requis pour le poste, et l’expérience dans le domaine des SIG a été incluse à la rubrique des qualifications constituant un atout.

Contexte

4À la suite de la publication du rapport du vérificateur général en 2005, l’intimé a décidé d’établir des petites unités qui seraient chargées de gérer les questions relatives à la durabilité et à l’environnement dans les champs de tir et les zones d’entraînement de chaque BFC de l’Ouest du pays. Des unités devaient donc être établies, entre autres, à la BFC Shilo, à la BFC Chilliwack et à la BFC Wainwright. 

5En novembre 2006, la BFC Shilo a été avisée qu’elle devait constituer une équipe de gestion des champs de tir et des zones d’entraînement composée de deux employés civils, soit d’un gestionnaire des champs de tir et zones d’entraînement et d’un technicien en SIG. À la BFC Shilo, le titre du premier poste a été changé pour « officier de gestion durable des champs de tir et des zones d’entraînement (OGDCTZE) » [Traduction] avant sa classification. Dans les présents motifs, ce poste sera désigné sous le nom de poste d’OGDCTZE.

6Le 20 septembre 2007, le plaignant a présenté une plainte au Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) en vertu de l’alinéa 77(1)a) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13(la LEFP). À l’audience, le Tribunal a précisé que le plaignant n’avait en aucun temps affirmé que l’intimé avait manifesté un favoritisme personnel ou un parti pris favorable à l’égard de la personne nommée. La plainte se limite à une allégation selon laquelle l’intimé aurait abusé de son pouvoir lorsqu’il a établi les critères de mérite en vertu du paragraphe 30(2) de la LEFP.

Question en litige

7Le Tribunal doit déterminer si l’intimé a abusé de son pouvoir dans l’établissement des critères de mérite relatifs au poste.

Résumé des éléments de preuve pertinents 

8Le major Charles Larocque a indiqué qu’il était chef d’état-major à la BFC Shilo et qu’il avait sous sa responsabilité tous les chefs de service. Il savait qu’en 2005 un poste d’OGDCTZE devait être créé à la BFC Shilo. Le titulaire de ce poste devait relever de l’officier des opérations de la base, qui faisait partie des chefs de service. Le 15 novembre 2006, le major Larocque a reçu une note de service du colonel A.C. Patch l’informant que des unités semblables seraient établies à la BFC Wainwright et à la BFC Chilliwack. Ces unités devaient être formées de deux employés civils, soit d’un OGDCTZE et d’un technicien en SIG, et comprendre toutes les ressources de TI nécessaires à l’appui de ces postes. La note de service du colonel Patch précisait également ce qui suit :

Il faudrait d’abord doter le poste [d’OGDCTZE] en y nommant une personne en mesure de produire et de gérer un plan de développement pour la gestion des champs de tir et des zones d’entraînement, ce qui comprend des plans connexes à long terme ainsi que la coordination du programme de gestion durable des champs de tir et des zones d’entraînement. Au quartier général, en collaboration avec les destinataires d’exécution, nous nous chargerons de rédiger un modèle d’attributions pour ces postes, dont les USS et les BFC pourront se servir pour élaborer leurs propres exigences […]

[Traduction]

9Le major Larocque a indiqué quel était le modèle d’attributions élaboré par le quartier général pour le poste d’OGDCTZE. Étant donné que chaque BFC a évolué différemment au fil des ans, toutes les bases disposaient d’une certaine marge de manoeuvre pour élaborer la description de travail relative au poste d’OGDCTZE, en fonction de leurs propres exigences.

10Après le 15 novembre 2006, Chuck Roeder a informé le major Larocque qu’il souhaitait présenter sa candidature pour le poste d’OGDCTZE. Étant donné que ce poste relevait de M. Roeder qui était alors officier des opérations de la base, le major Larocque lui a demandé de se retirer des activités liées à la création du poste en question. Compte tenu des circonstances, le major Larocque a décidé que l’unité des Services d’ingénierie serait chargée d’élaborer la description de travail, de faire classifier le poste et de mener le processus de nomination. Il a attribué ces responsabilités au major Pelletier, officier du génie de la base, qui les a ensuite déléguées à Rob Riesz, officier des Services d’ingénierie.

11Le major Larocque a indiqué que Randy Walker, délégué syndical, l’avait informé, avant la tenue du processus de nomination, que M. Roeder avait déclaré qu’il était convaincu d’obtenir le poste d’OGDCTZE. Lorsqu’il a entendu cette rumeur, le major Larocque a demandé à M. Roeder de s’abstenir de formuler ce type de commentaires. Le major Larocque n’a pas eu d’autre discussion à ce sujet avec M. Walker.

12En contre-interrogatoire, le major Larocque a indiqué qu’il ne mettait aucunement en doute l’intégrité du processus de nomination.

13Shannon Barnes-Girouard, conseillère en ressources humaines, a indiqué qu’elle avait reçu une demande de dotation au début du mois de juillet 2007 concernant le poste d’OGDCTZE. L’énoncé des critères de mérite (ECM) avait été rédigé par M. Reisz, ingénieur intérimaire de la base et chef de service, en collaboration avec Garnet Shearer, officier de l’environnement, Services d’ingénierie. Il y avait eu de nombreuses ébauches, mais la version finale de l’ECM avait été terminée avant que le processus de nomination soit annoncé le 27 juillet 2007.

14Mme Barnes-Girouard ne se rappelait pas à quel moment la description de travail avait été élaborée, mais elle a indiqué que c’était quelque part entre la fin de l’automne 2006 et le tout début du mois de juillet 2007. M. Riesz attendait d’obtenir l’approbation de financement pour doter le poste d’OGDCTZE.

15Mme Barnes-Girouard avait expliqué les diverses mesures de dotation possibles à M. Riesz, puis au major Sean Fortin, lorsque ce dernier a commencé à assumer les fonctions d’officier des opérations de la base en juillet 2007. Étant donné que le poste d’OGDCTZE exigeait certaines compétences techniques, il était impossible de savoir combien de candidats posséderaient les qualifications nécessaires pour postuler. Mme Barnes-Girouard a donc conseillé aux gestionnaires d’élargir le bassin de candidats potentiels.

16Les gestionnaires croyaient que, à la lumière de la description de travail, le poste serait classifié aux groupe et niveau GT‑06, mais il a plutôt été classifié aux groupe et niveau EG‑06. La décision finale à cet égard a été prise le 10 juillet 2007.

17La personne nommée, Chuck Roeder, a été citée à comparaître comme témoin. Il a expliqué qu’il avait fait partie des Forces canadiennes (FC); en fait, il a occupé le poste d’officier des opérations de la base jusqu’en septembre 2007, date à laquelle il a quitté les FC. Il a immédiatement commencé à assumer les fonctions du poste d’OGDCTZE, soit un type de poste qui l’intéressait depuis environ six ans. À titre d’officier contrôleur des champs de tir, puis d’officier des opérations de la base, M. Roeder avait été responsable du champ de tir et de la zone d’entraînement. Il avait entendu parler de la possibilité que soient créés des postes d’OGDCTZE dans les bases des FC en 2005, en lisant les documents de planification à long terme des FC.

18M. Roeder a témoigné qu’à la mi-novembre 2006, il avait appris que les plans visant la dotation du poste d’OGDCTZE se concrétiseraient. Peu de temps après, il est allé voir le major Larocque pour l’informer qu’il envisageait de présenter sa candidature pour le poste. Le major Larocque lui a alors demandé de « se retirer du processus ». C’est donc à l’unité des Services d’ingénierie qu’on a confié la responsabilité de mener le processus.

19M. Roeder a affirmé qu’il n’avait jamais annoncé en public qu’il serait nommé au poste. Il a toutefois indiqué que des gens de la petite ville de Shilo étaient venus le voir pour discuter du poste et lui avaient demandé s’il participait au processus.

20Le 20 juin 2007, M. Roeder a envoyé par courrier électronique le message suivant au major Pelletier, ingénieur de la base, ainsi qu’à MM. Riesz et Shearer :

J’ai reçu un appel du major Quaghebeur à 13 h 40 le 20 juin 2007 indiquant que les fonds sont octroyés et que les postes peuvent être dotés immédiatement. Le financement reçu par la Région n’est pas encore réparti, mais on y travaille actuellement. Quoi qu’il en soit, il faudrait procéder à l’embauche de l’OGDCTZE, puis du technicien en SIG.

[Traduction]

21M. Roeder a affirmé que, lorsqu’il a envoyé ce courriel, son intention était d’avertir les destinataires d’aller de l’avant avec le processus de nomination. Il a procédé ainsi en sa qualité d’officier des opérations de la base. Une fois le poste d’OGDCTZE doté, son titulaire devait relever de l’officier des opérations de la base.

22M. Roeder a déclaré que sa décision de se retirer des FC n’était pas motivée par le souhait d’obtenir le poste d’OGDCTZE. En 2005, lorsqu’il est revenu d’Afghanistan, les membres de sa famille lui ont demandé de ne plus accepter de périodes de service. En juillet 2007, il comptait 30 années de service dans les FC.

23Le plaignant a indiqué qu’il occupait le poste d’officier de planification à la direction des Services d’ingénierie. Il a présenté sa candidature pour le poste d’OGDCTZE le 13 août 2007. Il a ensuite été informé par les Ressources humaines que son entrevue et son examen auraient lieu le lendemain. Il a demandé au conseiller en ressources humaines de lui accorder du temps pour se préparer, mais le processus devait absolument se dérouler le plus vite possible. Son évaluation a donc eu lieu le 14 août 2007, et il a été jugé qualifié en vue d’une nomination.

24Le plaignant a affirmé que, après avoir reçu la notification indiquant la nomination de M. Roeder, il avait effectué quelques recherches sur les postes EG‑06. Il a constaté que sur les 33 postes EG‑06 annoncés, seuls deux postes exigeaient un diplôme d’études secondaires. Pour tous les autres, il fallait posséder un diplôme d’études postsecondaires. Pour être nommé au poste d’OGDCTZE à la BFC Wainwright, il fallait être titulaire d’un baccalauréat.

25M. Riesz, officier des Services d’ingénierie, a témoigné en faveur de l’intimé. Il a affirmé que le major Pelletier, ingénieur de la base, lui avait confié la création du poste d’OGDCTZE en 2006. M. Riesz avait demandé conseil à M. Shearer, officier de l’environnement, de même qu’à plusieurs autres officiers du quartier général. Il avait également discuté avec des responsables d’autres BFC. Étant donné que M. Roeder avait dès le début manifesté son intérêt pour le poste d’OGDCTZE, M. Riesz ne l’a pas consulté. Deux postes avaient été pressentis : le poste d’OGDCTZE et le poste de technicien en SIG. M. Riesz s’est grandement inspiré de la description de travail provenant de la BFC Wainwright pour le poste d’OGDCTZE à la BFC Shilo. La description de travail a été terminée en janvier 2007, et les décisions concernant le financement et la classification ont été communiquées en juillet 2007. Après avoir rédigé l’ECM, M. Riesz a confié le reste du processus au nouvel officier des opérations de la base, le major Sean Fortin.

26En contre-interrogatoire, M. Riesz a affirmé qu’il ne se rappelait pas qui avait demandé de changer le titre du poste. En effet, il s’agissait d’abord d’un poste d’« officier de gestion des champs de tir et des zones d’entraînement » [Traduction], mais le titre avait ensuite été changé pour « officier de gestion durable des champs de tir et des zones d’entraînement » [Traduction] avant le mois d’avril 2007.

27M. Riesz a expliqué qu’il y avait eu six ou sept versions différentes de l’ECM. L’une de ces versions comportait à la rubrique des qualifications essentielles la mention « expérience de l’utilisation de systèmes d’information géographique et de systèmes mondiaux de positionnement » [Traduction]. M. Riesz a indiqué qu’il avait discuté avec M. Shearer et avec le major Fortin pour déterminer si l’expérience de l’utilisation des SIG devait être considérée comme une qualification essentielle ou une qualification constituant un atout. Étant donné qu’il devait y avoir un technicien en SIG sur place ainsi qu’un analyste en SIG au quartier général, M. Riesz ne croyait pas que l’expérience dans le domaine des SIG était essentielle pour le poste d’OGDCTZE, avis que partageaient les autres personnes consultées. L’expérience dans le domaine des SIG ne figurait pas parmi les qualifications demandées pour le poste d’OGDCTZE à la BFC Wainwright.

28De la même façon, M. Riesz avait établi qu’il n’était pas nécessaire de posséder un diplôme universitaire pour être nommé au poste. Il avait décidé d’établir un minimum de qualifications essentielles et de faire figurer les autres critères à la rubrique des qualifications constituant un atout.

29M. Riesz a reconnu qu’un diplôme universitaire était demandé pour le poste offert à la BFC Wainwright, même si aucune spécialisation particulière n’était requise. Il a également affirmé que les deux qualifications suivantes étaient jugées essentielles pour le poste annoncé à la BFC Wainwright :

Expérience en tant qu’officier de sécurité du tir et expérience de l’aménagement de champs de tir pour les exercices de tir réels jusqu’au niveau des compagnies/des escadrons.

Connaissance de la guerre de manoeuvre interarmées air‑terre au niveau tactique, notamment du groupe‑brigade mécanisé, et de ses répercussions sur la zone d’entraînement, y compris les exercices de tir réel. [Traduction]

30M. Riesz a reconnu que l’inclusion de ces qualifications aurait pour conséquence de restreindre l’admissibilité aux membres des FC. De fait, il n’y avait eu qu’un postulant à la BFC Wainwright. M. Riesz a affirmé que ces qualifications étaient trop restrictives pour le poste à la BFC Shilo et qu’il ne voulait pas limiter inutilement le bassin de postulants potentiels. Ses collègues et lui-même avaient établi les qualifications qu’ils estimaient essentielles pour le poste à la BFC Shilo.

31Le major Sean Fortin a indiqué qu’il avait occupé le poste d’officier des opérations de la base à la BFC Shilo de juillet 2007 à août 2008. À son arrivée, le major Fortin avait été informé du fait que les Services d’ingénierie avaient déjà entrepris le processus d’embauche visant la dotation du poste d’OGDCTZE. Le major Fortin devait donc mettre la dernière main au processus. Il a consulté Mme Barnes‑Girouard pour savoir comment il devait procéder, et cette dernière lui a donné des conseils spécialisés quant à la rédaction de l’ECM, à la préparation de l’annonce et à la façon de s’assurer que les outils d’évaluation permettaient d’évaluer les qualifications.

32Le major Fortin assumait la présidence du comité d’évaluation, et il était appuyé par M. Riesz et Mme Barnes‑Girouard pour l’évaluation des candidats. Pour ce qui est de l’exigence relative aux études, le major Fortin avait établi que la norme de qualification minimale requise pour la catégorie EG était la suivante :

Norme de qualification du groupe Soutien technologique et scientifique (EG)

Études
La norme minimale est :
un diplôme d’études secondaires ou une équivalence approuvée par l’employeur (voir Section 2, Partie 1, Études);

Équivalence approuvée par l’employeur pour le diplôme d’études secondaires

1. une note satisfaisante au test de la CFP approuvé comme équivalence du diplôme d’études secondaires;

2. un agencement acceptable d’études, de formation et/ou d’expérience.

[Traduction]

33Le major Fortin a établi que le critère approprié pour le poste d’OGDCTZE en ce qui a trait aux études était un diplôme d’études secondaires ou un agencement acceptable d’études, de formation et/ou d’expérience.

34Le major Fortin a indiqué que MM. Fraser et Roeder étaient tous deux qualifiés en vue d’une nomination. Le comité a décidé de nommer M. Roeder au poste parce que celui‑ci possédait une meilleure connaissance des armes du MDN, des règlements en matière d’environnement, du contrôle des champs de tir et des opérations de la base. 

Argumentation des parties

A) Argumentation du plaignant

35Le plaignant soutient que l’intimé a abusé de son pouvoir dans l’établissement des critères de mérite pour le poste susmentionné. Il est notamment d’avis que le poste nécessitait une expérience dans le domaine des SIG, exigence qui figurait d’ailleurs parmi les qualifications essentielles dans l’une des versions de l’ECM, mais qui a été retirée avant l’évaluation des candidats.

36Le plaignant soutient également que l’intimé a abusé de son pouvoir lorsqu’il a modifié l’exigence relative aux études. Les postes EG‑06 sont presque toujours assortis de l’exigence de posséder un diplôme universitaire ou un diplôme d’études postsecondaires. Pour obtenir un poste semblable à la BFC Wainwright, il fallait détenir un baccalauréat.

B) Argumentation de l’intimé

37L’intimé affirme qu’il n’existe aucune règle stricte dans la LEFP quant à l’établissement des qualifications. Aux termes du paragraphe 30(2) de la LEFP, l’administrateur général détient un vaste pouvoir discrétionnaire pour établir les qualifications relatives au travail à accomplir.

38L’intimé a déterminé que l’expérience dans le domaine des SIG ne constituait pas une qualification essentielle pour le poste, mais il a placé cette exigence à la rubrique des qualifications constituant un atout. Il n’était pas prévu que le titulaire du poste d’OGDCTZE accomplisse de tâches liées aux SIG, étant donné qu’il devait y avoir un technicien en SIG sur place, épaulé au besoin par l’analyste en SIG du quartier général.

39L’intimé s’appuie sur la décision Rinn c. Sous-ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités et al., [2007] TDFP 0044, où le Tribunal a établi, au paragraphe 40, que les articles 30 et 31 de la LEFP énonçaient les critères qui devaient guider l’administrateur général. En effet, l’article 30 confère à l’administrateur général le pouvoir d’établir les qualifications, tandis que l’article 31 précise que ces qualifications doivent respecter ou dépasser les normes de qualification fixées par l’employeur. En l’espèce, le comité d’évaluation a confirmé que le diplôme d’études postsecondaires ne constituait pas une exigence, conformément à la norme de qualification établie pour le groupe EG.

40En ce qui a trait aux annonces que le plaignant a présentées pour faire état des exigences relatives aux études pour les autres postes EG‑06, l’intimé a fait référence à la décision Feeney c. Sous‑ministre de la Défense nationale et al., [2008] TDFP 0017, qui énonce le principe selon lequel les autres annonces n’établissent pas de précédent pour l’avenir. En vertu de la LEFP, l’administrateur général jouit d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour établir les qualifications essentielles, lesquelles peuvent varier d’un poste à l’autre, selon les circonstances et l’endroit.

C) Argumentation de la Commission de la fonction publique

41La Commission de la fonction publique (CFP) n’a pas comparu à l’audience. Comme elle l’a fait dans des affaires antérieures, la CFP a présenté des observations écrites générales portant sur la notion d’abus de pouvoir et sur la façon dont le Tribunal devrait aborder cette question.

Analyse

42Les articles 30 et 31 de la LEFP, libellés comme suit, sont pertinents en l’espèce :

30. (1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique faites par la Commission sont fondées sur le mérite et sont indépendantes de toute influence politique.

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :
a) selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles — notamment la compétence dans les langues officielles — établies par l’administrateur général pour le travail à accomplir;
b) la Commission prend en compte :
(i) toute qualification supplémentaire que l’administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l’administration, pour le présent ou l’avenir,
(ii) toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l’administration précisée par l’administrateur général,
(iii) tout besoin actuel ou futur de l’administration précisé par l’administrateur général.

31. 1) L’employeur peut fixer des normes de qualification, notamment en matière d’instruction, de connaissances, d’expérience, d’attestation professionnelle ou de langue, nécessaires ou souhaitables à son avis du fait de la nature du travail à accomplir et des besoins actuels et futurs de la fonction publique. (2) Les qualifications mentionnées à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) doivent respecter ou dépasser les normes de qualification applicables établies par l’employeur en vertu du paragraphe (1).

43Ces dispositions contiennent un certain nombre de principes clés. Il incombe à l’administrateur général d’établir les qualifications essentielles pour le travail à accomplir. Comme l’a expliqué le Tribunal dans la décision Neil c. Sous‑ministre d’Environnement Canada et al., [2008] TDFP 0004, au paragraphe 46 : « Les gestionnaires sont simplement tenus d’établir les qualifications pour le travail à accomplir . » L’administrateur général peut également établir les qualifications qui sont considérées comme un atout pour le poste ou l’organisation, de même que les exigences opérationnelles et les besoins organisationnels.

44Dans la décision Visca c. Sous-ministre de la Justice et al., [2007] TDFP 0024, le Tribunal a confirmé le pouvoir discrétionnaire conféré aux administrateurs généraux pour l’établissement des qualifications essentielles :

[42] Aux termes du paragraphe 30(2) de la LEFP, les gestionnaires disposent d’un pouvoir discrétionnaire considérable pour établir les qualifications liées au poste qu’ils souhaitent doter et pour choisir la personne qui non seulement satisfait aux qualifications essentielles mais représente la bonne personne pour occuper le poste visé. Un pouvoir discrétionnaire semblable est prévu à l’article 36 de la LEFP à l’intention des personnes qui détiennent les pouvoirs de dotation pour choisir et utiliser les méthodes d’évaluation qui permettront de déterminer si la personne satisfait aux qualifications essentielles. […]

45Par conséquent, la direction détient un vaste pouvoir discrétionnaire pour établir les qualifications relatives aux postes et pour déterminer si celles‑ci doivent être considérées comme des qualifications essentielles ou comme des qualifications constituant un atout. En l’espèce, des nouveaux postes d’OGDCTZE devaient être créés dans plusieurs BFC de l’Ouest du Canada. Le quartier général de la région de l’Ouest a fourni un modèle relatif à la description de travail, qui comportait une liste de 17 responsabilités. Chaque BFC devait utiliser ce modèle et l’adapter en fonction de ses exigences particulières. À la lumière de la description de travail, le poste offert à la BFC Shilo a été classifié le 10 juillet 2007 aux groupe et niveau EG‑06.

46L’article 31 de la LEFP prévoit que les qualifications établies par l’administrateur général doivent respecter ou dépasser les normes de qualification établies par l’employeur. Au paragraphe 41 de la décision Rinn, le Tribunal fournit l’explication suivante :

[41] Le paragraphe 31(2) fait référence à l’alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) et, par conséquent, il s’applique aux critères pour que la nomination soit fondée sur le mérite. Ainsi, le Tribunal a compétence pour entendre une plainte voulant que l’administrateur général ait abusé de son pouvoir en établissant des qualifications essentielles ou supplémentaires qui ne répondent pas ou ne dépassent pas les normes de qualification applicables établies par l’AFPC pour l’employeur.

47La norme de qualification pour le groupe Soutien technologique et scientifique (EG) prévoit un diplôme d’études secondaires ou une équivalence approuvée par l’employeur comme exigence minimale pour ce qui est des études. Les équivalences approuvées par l’employeur peuvent se présenter sous la forme d’une note satisfaisante au test de la CFP approuvé comme équivalence du diplôme d’études secondaires, ou d’un agencement acceptable d’études, de formation et/ou d’expérience.

48Le Tribunal estime que l’intimé n’a pas contrevenu au paragraphe 31(2) de la LEFP lorsqu’il a établi comme critère la possession d’un diplôme d’études secondaires ou un agencement acceptable d’études, de formation et/ou d’expérience pour le poste d’OGDCTZE.

49Le plaignant a fait référence à plusieurs annonces de postes EG‑06 dans la fonction publique, dont la plupart étaient assortis de l’exigence de posséder un diplôme d’études postsecondaires. Il a également présenté l’ECM relatif au poste d’OGDCTZE offert à la BFC Wainwright, qui faisait état de l’exigence suivante à la rubrique des études : « baccalauréat ou agencement d’études, de formation et/ou d’expérience » [Traduction]. Toutefois, aucune preuve démontrant que les gestionnaires sont tenus d’utiliser des qualifications semblables ou identiques pour des postes du même niveau n’a été présentée. Le rôle des gestionnaires consiste plutôt à établir les qualifications pour le travail à accomplir.

50Dans la décision Neil, le Tribunal indique ce qui suit au paragraphe 46 :

[46] Le plaignant a affirmé que des qualifications semblables devraient être exigées pour des postes ES-05 du même type, ce qui, à son avis, serait conforme à la tendance visant l’uniformisation des postes. Toutefois, aucun élément de preuve n’a été fourni pour démontrer que les gestionnaires étaient tenus d’utiliser des qualifications semblables pour les postes du même niveau ni qu’il existait une tendance visant l’uniformisation des postes. Les gestionnaires sont simplement tenus d’établir les qualifications pour le travail à accomplir. En l’espèce, le Tribunal ne voit aucune raison de s’immiscer dans la décision des gestionnaires à cet égard.

51M. Riesz et le major Fortin ont tous deux affirmé qu’il n’était pas nécessaire d’être titulaire d’un diplôme universitaire pour exercer les fonctions du poste d’OGDCTZE. Comme ils souhaitaient élargir le bassin de candidats potentiels, ils ont utilisé la norme de qualification minimale relative aux études pour le groupe EG. Le Tribunal ne voit aucune raison de s’immiscer dans la décision des gestionnaires en l’espèce. Le plaignant n’a fourni aucune preuve permettant de conclure que l’intimé était tenu d’établir une qualification supérieure pour ce qui est des études. À la lumière de la preuve présentée, le Tribunal estime que l’exigence relative aux études établie pour le poste d’OGDCTZE à la BFC Shilo respecte la norme de qualification applicable.

52Le plaignant affirme également que l’« expérience de l’utilisation de SIG » [Traduction] aurait dû se trouver à la rubrique des qualifications essentielles pour le poste. Cette exigence figurait d’ailleurs sous cette rubrique dans l’une des versions antérieures de l’ECM. Selon la preuve présentée, le Tribunal constate que la direction avait décidé qu’à la BFC Shilo, le titulaire du poste d’OGDCTZE n’exercerait aucune tâche liée aux SIG, étant donné qu’il y aurait un technicien en SIG sur place, qui serait épaulé par l’analyste en SIG du quartier général pour les questions techniques. Le plaignant n’a pas réussi à prouver que l’intimé a abusé de son pouvoir lorsqu’il a décidé de considérer l’expérience de l’utilisation de SIG comme une qualification constituant un atout plutôt que comme une qualification essentielle.

53Le Tribunal juge que le plaignant n’a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve à l’appui de son allégation selon laquelle les qualifications établies pour le poste d’OGDCTZE à la BFC Shilo n’étaient pas appropriées compte tenu du travail à accomplir. Par conséquent, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu de conclure que les gestionnaires ont abusé de leur pouvoir dans l’établissement des critères de mérite pour le poste visé.

54Bien que le plaignant n’ait pas affirmé qu’il y a eu favoritisme personnel à l’égard du candidat retenu ni influence abusive de la part de ce dernier, il convient, avant de conclure, d’aborder une question qui aurait pu soulever des préoccupations. Les circonstances en l’espèce sont inhabituelles en ce sens que l’un des candidats ayant participé au processus de nomination occupait, immédiatement avant la tenue du processus, le poste d’officier des opérations de la base, soit le poste dont relève l’OGDCTZE. Ce même candidat a ensuite été nommé au poste d’OGDCTZE.

55M. Roeder a manifesté son intérêt pour le poste d’OGDCTZE dès qu’il a appris que ce type de poste serait créé. Les responsabilités relatives à la création du poste et à la tenue du processus de nomination lui ont donc été retirées pour être confiées à un autre service, et M. Roeder n’a pas été consulté au sujet des fonctions ni des critères de mérite. M. Roeder a certes reçu des messages provenant du quartier général régional au sujet du financement, mais il a communiqué ces renseignements au chef du service responsable. À la lumière de la preuve présentée à l’audience, le Tribunal juge que les actes de M. Roeder n’ont pas influé sur l’issue du processus de nomination.

Décision

56Pour tous ces motifs, la plainte est rejetée.

Helen Barkley

Membre

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2007-0456
Intitulé de la cause:
Blaine Fraser et le Sous-ministre de la Défense nationale et al.
Audience:
Les 3 et 4 septembre 2008
Winnipeg, MB
Date des motifs:
Le 17 février 2009

Comparutions:

Pour le plaignant:
Louis Bisson
Pour l'intimé:
Lesa Brown et Amita Chandra
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