Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les plaignants ont allégué un abus de pouvoir de la part de l'intimé dans le choix d'un processus de nomination interne non annoncé ainsi que dans l'application du mérite. Le 16 avril 2009, les plaignants ont déposé leurs allégations auprès du Tribunal et la réponse de l'intimé devait être déposée le 1er mai 2009. Le 4 mai 2009, l'intimé a indiqué au Tribunal qu'il ne présenterait pas une réponse aux allégations des plaignants étant donné les contraintes actuelles en ressources humaines. Une des raisons qui motivaient son approche était l'absence de la coordonnatrice des plaintes, en congé prolongé jusqu'à la mi-juin. L'intimé a aussi précisé qu'il ne demandait pas de prorogation de délai pour présenter sa réponse ultérieurement. Le Tribunal devait se pencher sur la question de savoir si l'intimé était tenu de répondre aux allégations des plaignants. Décision : Le Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique stipule que le plaignant doit présenter des allégations écrites détaillées et que l'intimé doit y répondre par écrit, de façon complète, dans les 15 jours suivant la réception des allégations. De plus, toute autre partie qui souhaite participer à l'audience fournit sa réponse après avoir reçu celle de l'intimé. La règle audi alteram partem (entendre l'autre partie) garantit l'équité procédurale pour les parties et s'applique aux procédures devant le Tribunal. Il n'appartenait donc pas à l'intimé de décider s'il fallait fournir ou non une réponse aux allégations. L'intimé devait fournir cette réponse. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international n'a pas établi à la satisfaction du Tribunal qu'il ne disposait pas suffisamment de ressources pour assigner ce dossier à une autre personne. Le Tribunal a ordonné à l'intimé de fournir sa réponse aux allégations au plus tard le 18 juin 2009. Á propos de ce site Avis Transparence et protection de la vie privée

Contenu de la décision

Coat of Arms - Armoiries
Dossiers:
2009-0132 à 0137 et 0152 à 0154
Rendue à:
Ottawa, le 11 juin 2009

CHRISTIAN LAROCHE ET AL.
Plaignants
ET
LE SOUS-MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
Intimé
ET
AUTRES PARTIES

Affaire:
Refus de présenter une réponse aux allégations
Décision:
Ordonnance de fournir une réponse
Décision rendue par:
Guy Giguère, Président
Langue de la décision:
Français
Répertoriée:
Laroche et al. c. Sous-Ministre des Affaires étrangères et al.
Référence neutre:
2009 TDFP 0017

Motifs de décision

Introduction

1Les plaignants, Christian Laroche, Jacques Deschênes et Julie Boulanger, ont présenté des plaintes auprès du Tribunal de la dotation de la fonction publique (le Tribunal) alléguant que l’intimé, le sous-ministre des Affaires étrangères, a abusé de son pouvoir dans le choix d’un processus de nomination interne non annoncé et dans l’application du mérite.

2Ces plaintes ont été déposées en vertu des alinéas 77(1) a) et b) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, art. 12 et 13 (la LEFP) à la suite des nominations ou proposition de nomination à des postes de jurilinguiste de groupe et niveau SI-06. Les processus en question portent les numéros 08-EXT-INA-MSH-412737, 08-EXT-INA-MSH-412744, et 08-EXT-INA-MSH-412746.

3Le 16 avril 2009, les plaignants ont déposé leurs allégations auprès du Tribunal avec copies aux autres parties. La réponse de l’intimé devait être déposée le 1er mai 2009.

4Le 4 mai 2009, l’intimé a indiqué au Tribunal qu’il ne présenterait pas une réponse aux allégations des plaignants étant donné les contraintes actuelles en ressources humaines. Une des raisons qui motive son approche est l’absence de la coordonnatrice des plaintes qui est en congé prolongé jusqu’à la mi-juin.

5L’intimé a aussi indiqué qu’il ne demandait pas de prorogation de délai pour présenter sa réponse ultérieurement. Il a expliqué qu’il y a eu communication des renseignements telle que le prévoit la procédure du Tribunal et que les parties ont accepté de recourir à la médiation. L’intimé indique qu’il sera cependant disposé à participer à une conférence préparatoire si les questions soulevées par les plaignants ne sont pas réglées à l’issue de la médiation.

Question en litige

6Le Tribunal doit statuer sur la question suivante :

  1. Est-ce que l’intimé a l’obligation de fournir une réponse aux allégations des plaignants?

Législation

7L’article 79 de la LEFP précise qui a le droit de se faire entendre par le Tribunal dans le cadre d’une plainte déposée en vertu de l’article 77 :

79. (1) Le plaignant visé à l’article 77, la personne qui a fait l’objet de la proposition de nomination ou qui a été nommée, la Commission et l’administrateur général, ou leurs représentants, ont le droit de se faire entendre par le Tribunal.

(2) Dans les cas où elle est avisée dans le cadre de l’article 78, la Commission canadienne des droits de la personne peut présenter ses observations au Tribunal relativement à la question soulevée.

8Les articles 22 et 24 du Règlement du Tribunal de la dotation de la fonction publique, DORS/2006-6 (Règlement du TDFP) indiquent que le plaignant doit présenter des allégations écrites et que l’intimé doit y répondre par une réponse écrite. De plus, l’article 25 du Règlement du TDFP spécifie que toute autre partie qui souhaite participer à l’audience fournit sa réponse après avoir reçu la réponse de l’intimé.

22. (1) Le plaignant présente ses allégations aux autres parties, au directeur exécutif et, le cas échéant, aux intervenants et à la Commission canadienne des droits de la personne, si celle-ci a le statut de participant, au plus tard dix jours après l’expiration de la période prévue pour la communication des renseignements.

(2) Les allégations sont présentées par écrit et comportent les éléments suivants :

  1. les nom, adresse, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique du plaignant;
  2. le cas échéant, les nom, adresse, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique du représentant du plaignant;
  3. le numéro de dossier que le Tribunal a attribué à la plainte faisant l’objet de la demande;
  4. une description détaillée des allégations sur lesquelles le plaignant entend se fonder et un exposé complet des faits pertinents;
  5. la signature du plaignant ou de son représentant;
  6. la date du document.

(3) Si le plaignant ne présente aucune allégation, le Tribunal peut juger que la plainte est retirée.

24. (1) L’administrateur général ou la Commission, en tant qu’intimé, fournit une copie de sa réponse aux autres parties, au directeur exécutif et, le cas échéant, aux intervenants et à la Commission canadiennes des droits de la personne, si celle-ci a le statut de participant, au plus tard quinze jours après avoir reçu les allégations du plaignant ou les allégations modifiées.

(2) La réponse est faite par écrit et comporte les éléments suivants :

  1. les nom, adresses, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique de l’intimé;
  2. le cas échéant, les nom, adresses, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique du représentant de l’intimé;
  3. le numéro de dossier que le Tribunal a attribué à la plainte faisant l’objet de la demande;
  4. la réponse complète aux allégations et aux questions soulevées dans la plainte et un exposé complet des faits pertinents supplémentaires sur lesquels l’intimé entend se fonder;
  5. la signature de l’intimé ou de son représentant;
  6. la date de la réponse.

(Nos italiques)

25. (1) Toute autre partie qui souhaite participer à l'audience fournit sa réponse au plaignant, à l'administrateur général ou à la Commission, au directeur exécutif et le cas échéant, aux intervenants et à la Commission canadienne des droits de la personne, si celle-ci a le statut de participant, au plus tard dix jours après avoir reçu la réponse de l'administrateur général ou de la Commission.

(2) La réponse est faite par écrit et comporte les éléments suivants :

  1. les nom, adresse, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique de la partie;
  2. le cas échéant, les nom, adresse, numéros de téléphone et de télécopieur et adresse électronique du représentant de la partie visée;
  3. le numéro de dossier que le Tribunal a attribué à la plainte faisant l'objet de la demande;
  4. la réponse complète aux allégations et aux questions soulevées dans la plainte et un exposé complet des faits pertinents supplémentaires sur lesquels la partie visée entend se fonder;
  5. la signature de la partie ou de son représentant;
  6. la date de la réponse.

9Le Règlement du TDFP prévoit également la définition du terme « partie » au paragraphe 1(1) :

1.  (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement.

« partie » Quiconque qui a le droit de se faire entendre par le Tribunal en vertu du paragraphe 65(3), de l'article 75, du paragraphe 79(1) ou de l'article 85 de la Loi.

Analyse

10Une des règles fondamentales de justice naturelle requiert que les parties à une plainte reçoivent un avis suffisant qu’une décision sera prise et qu’elles aient l’occasion de se faire entendre avant que la décision ne soit rendue. C’est la règle audi alteram partem quise traduit par « entendre l’autre partie ». Cette règle garantit l’équité procédurale pour les parties et s’applique aux procédures devant le Tribunal (voir Neufeld c. Administrateur général de Service Canada et al., [2007] TDFP 0022; Anwar c. Sous-ministre de Pêches et Océans Canada et al., [2007] TDFP 0021 et Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.S. no 39 (Q.L.); [1999] 2 R.C.S. 819).

11L’équité procédurale exige qu’une partie devant répondre à une plainte dispose de suffisamment d’information à son sujet pour ce faire. La Cour suprême du Canada, dans l’affaire Thomson c. Canada (Sous-ministre de l'Agriculture), [1992] 1 R.C.S. 385, p. 402; [1992] A.C.S. No 13 (Q.L.), au paragraphe 31, a conclu ce qui suit : « (…) D'une manière générale, l’équité exige qu’une partie ait une possibilité suffisante de connaître la preuve contre laquelle elle doit se défendre, de la réfuter et de présenter sa propre preuve. »

12Les parties sont définies au paragraphe 1(1) du Règlement du TDFP comme étant quiconque ayant le droit de se faire entendre par le Tribunal en vertu de la LEFP. L’article 79 de la LEFP indique qui a ce droit dans une plainte relative à une nomination interne en vertu de l’article 77. Ces parties sont le plaignant, l’administrateur général en tant qu’intimé, la Commission de la fonction publique et la personne nommée ou la personne dont la nomination est proposée.

13L’article 22 du Règlement du TDFP requiert que les plaignants présentent « une description détaillée des allégations sur lesquelles le plaignant entend se fonder et un exposé complet des faits pertinents. » La description détaillée des allégations s’avère importante afin de permettre à l’intimé de connaître la nature de la plainte et de la preuve contre laquelle il devra se défendre. Les allégations servent également à informer les autres parties, qui ont le droit de se faire entendre par le Tribunal, de la nature de la plainte et de la preuve.

14De la même façon, l’équité procédurale exige que l’intimé réponde de façon complète aux allégations. Les plaignants sont ainsi en mesure de connaître la réponse de l’intimé à leurs allégations et la nature de la preuve qu’il entend présenter pour les réfuter. Quant aux autres parties, puisqu’elles disposent ainsi des allégations et de la réponse de l’intimé, elles peuvent alors déterminer si elles désirent participer à l’audience de cette plainte.

15L’article 24 du Règlement du TDFP requiertque l’intimé donne la réponse complète aux allégations et aux questions soulevées dans la plainte et un exposé complet des faits pertinents supplémentaires sur lesquels l’intimé entend se fonder au plus tard 15 jours après avoir reçu les allégations.

16De plus, l’article 25 du Règlement du TDFP prévoit que toute autre partie qui souhaite participer à l’audience fournisse sa réponse au plus tard dans les dix jours après avoir reçu la réponse de l’intimé. Les autres parties ayant le droit de se faire entendre par le Tribunal ne peuvent fournir une réponse que si l’intimé a lui-même répondu aux allégations.

17Par conséquent, il n’appartient pas à l’intimé de décider s’il va fournir ou non une réponse aux allégations. L’intimé doit fournir cette réponse.

18Le Tribunal est d’avis que l’intimé démontre une attitude désinvolte dans son non-respect des procédures prévues au Règlement du TDFP. Le fait qu’il y ait des contraintes en ressources humaines et qu’une seule personne soit en congé prolongé ne fait pas en sorte que toutes les plaintes au sein de ce ministère cessent d’être adressées. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international n’a pas établi à la satisfaction du Tribunal qu’il ne dispose pas suffisamment de ressources pour qu’une autre personne soit assignée à ce dossier. L’intimé a l’obligation de respecter les délais prescrits par le Règlement du TDFP et de se conformer au principe d’équité procédurale en fournissant sa réponse aux allégations.

19Le Règlement du TDFP prévoit pour faciliter la résolution de la plainte, qu’il y ait communication de renseignements dans les 25 jours suivant le dépôt de la plainte. De même, une médiation est mise à l’horaire à moins qu’une des parties indique qu’elle n’y consent pas. Le Règlement du TDFP ne prévoit pas que les délais sont suspendus parce que les parties ont consenti à la médiation. L’intimé ainsi que les plaignants en ont été expressément avisés par le Tribunal le 15 avril 2009, lorsque l’agent de greffe a communiqué avec ces derniers pour leur demander d’indiquer au Tribunal s’ils désiraient participer à la médiation. Le 16 avril 2009, les plaignants ont déposé leurs allégations auprès du Tribunal avec copies aux autres parties. L’intimé devait y répondre dans les délais prévus. 

20De nombreuses plaintes sont réglées lors de la période de communication de renseignements, au moment où les parties se rencontrent et se communiquent tous les renseignements pertinents à la plainte (voir Visca c. le Sous-ministre de la Justice et al., [2006] TDFP 0016 et Akhtar c. Sous-ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités et al., [2007] TDFP 0026). De la même façon, plusieurs plaintes sont réglées à la suite du dépôt des allégations du plaignant et de la réponse de l’intimé. Les parties sont davantage en mesure de régler une plainte en connaissant toutes les allégations du plaignant, de même que les réponses et explications de l’intimé. Les plaignants ont présenté sept pages d’allégations détaillées alors que leurs plaintes comportaient quelques paragraphes seulement. Une réponse détaillée permettrait à l’intimé de faire connaître aux plaignants sa position et fournirait des explications s’il y a lieu.

21Le Règlement du TDFP établi un processus clair et précis que les parties doivent entreprendre afin de procéder de façon juste et expéditive à la résolution de la plainte.

Décision

22Le Tribunal juge que l’intimé a l’obligation de fournir une réponse complète aux allégations des plaignants tel que requis par l’équité procédurale et par le Règlement du TDFP. Ceci n’a pas été fait dans le délai prescrit. Le Tribunal accorde d’office à l’intimé un délai additionnel pour ce faire. L’intimé devra fournir sa réponse aux allégations au plus tard le 18 juin 2009. Par conséquent, les autres parties qui désirent participer à l’audience devront fournir leur réponse dix jours après avoir reçu la réponse de l’intimé.

Ordonnance

23Le Tribunal ordonne à l’intimé de fournir sa réponse aux allégations au plus tard le 18 juin 2009.

Guy Giguère

Président

Parties au dossier

Dossier du Tribunal:
2009-0132 à 0137 et 0152 à 0154
Intitulé de la cause:
Christian Laroche et al. c. le Sous-Ministre des Affaires étrangères et al.
Date des motifs:
Le 11 juin 2009
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.