Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les parties avaient prévu dans la convention collective que dans l’éventualité où une nouvelle classification était établie pendant la durée de la convention collective, les parties devraient négocier la nouvelle grille salariale - l’agent négociateur a déposé un grief à l’effet que l’employeur n’avait pas respecté cette disposition, puisqu’une nouvelle classification était entrée en vigueur mais que l’employeur n’avait pas négocié de nouveaux taux de rémunération - une nouvelle classification avait effectivement été mise en œuvre, mais l’arbitre de grief a jugé que la disposition sur la négociation d’une nouvelle grille salariale ne s’appliquait pas, puisque les parties avaient déjà prévu dans la convention collective les taux de rémunération applicables lors de l’entrée en vigueur de la nouvelle classification - celle-ci n’avait pas été établie au cours de la durée de la convention collective. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-09-27
  • Dossier:  569-02-50
  • Référence:  2010 CRTFP 102

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ASSOCIATION CANADIENNE DES EMPLOYÉS PROFESSIONNELS

agent négociateur

et

CONSEIL DU TRÉSOR

employeur

Répertorié
Association canadienne des employés professionnels c. Conseil du Trésor

Affaire concernant un grief de principe renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, arbitre de grief

Pour l'agent négociateur:
Jean Ouellette, Association canadienne des employés professionnels

Pour l'employeur:
Stéphan Bertrand, avocat

Affaire entendue à Ottawa, Ontario,
le 9 septembre 2010.

I. Grief de principe renvoyé à l'arbitrage

1  Le 14 juillet 2009, l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP ou l’« agent négociateur »), a présenté un grief de principe au Conseil du Trésor (CT ou l’« employeur ») portant sur l’interprétation ou l’application de la clause 27.07 de la convention collective entre le CT et l’ACEP relativement au groupe Économique et services de sciences sociales, dont la date d’expiration est le 21 juin 2011.

2 Le grief se lit comme suit :

[…]

Aux termes du paragraphe 27.07 de la Convention collective EC, l’Association, en son nom et au nom de ses membres, présente un grief concernant le refus répété de l’Employeur, comme le confirme la récente lettre du 29 juin 2009, de négocier avec l’Association les taux de salaire de la nouvelle norme de classification EC qui est entrée en vigueur le 22 juin 2009 et les règles régissant la rémunération des employés lors de leur passage aux nouveaux niveaux EC.

3 Comme mesure corrective, l’ACEP réclame ce qui suit :

[…]

Une déclaration portant que l’Employeur est tenu de négocier de bonne foi les taux de salaire et les règles touchant la conversion EC.

[Une deuxième mesure corrective a été retirée par l’ACEP au moment de l’audience du grief; je n’y fais donc pas allusion.]

4 Le grief a été rejeté par le CT le 19 octobre 2009, de là le présent renvoi à l’arbitrage.

II. Les faits non contestés

5 Les parties au présent litige ont négocié une convention collective dont l’entrée en vigueur est le 11 mars 2009 et la date d’expiration est le 21 juin 2011. La signature de la convention collective a été précédée par un avis de négociation donné au printemps 2007, suivi d’un premier échange de propositions, de deux échanges ultérieurs et de quelques rencontres. En juillet 2008, toutes les questions non monétaires avaient été réglées. Toutefois, la question de la conversion des classifications ES et SI à une nouvelle norme de classification unique d’EC n’était pas réglée.

6 En juin 2008, l’employeur a envoyé aux employés affectés par la nouvelle norme de classification un préavis que celle-ci entrerait en vigueur le 22 juin 2009. À cet égard, l’ACEP a présenté une proposition en mai 2008 qui référait à certains éléments de la norme de classification, mais qui ne comprenait pas de proposition salariale. En mai et en juillet 2008, l’ACEP a présenté à l’employeur une comparaison économique de la situation du groupe avec l’ensemble de la fonction publique fédérale, puis une comparaison économique de la situation du groupe par rapport au marché extérieur à la fonction publique fédérale. En réponse à ces présentations, l’employeur a répondu au début de juillet 2008 qu’il ne pourrait présenter une proposition salariale avant le mois de septembre 2008.

7 Le 18 novembre 2008, le CT a présenté sa proposition salariale, dite non négociable. L’ACEP a été avertie au même moment que le gouvernement entendait déposer dans les prochains jours un projet de loi visant à contrôler les dépenses du gouvernement du Canada à l’égard de l’emploi, mais que les dispositions précises n’étaient pas connues pour le moment (voir la Loi sur le contrôle des dépenses, édictée par l’article 393 du chapitre 2 des Lois du Canada (2009), entrée en vigueur au moment de la sanction royale le 12 mars 2009, ci-après la« Loi »). À la suite de cette offre, l’ACEP a signé une entente de principe, qui a été ratifiée par les membres de l’unité de négociation.

8 Le 17 juin 2009, Claude Danik a écrit comme suit à Carl Trottier, directeur, principal, Gestion de la rémunération au CT, lui indiquant que le CT avait l’obligation de négocier avec l’ACEP les taux de rémunération des nouveaux niveaux résultants de l’application de la norme EC si elle était appliquée pendant la convention collective en cours :

[Traduction]

[…]

M. Trottier,

Aux termes de la clause 27.07 de la convention collective du groupe EC, le Secrétariat du Conseil du Trésor est tenu de négocier avec l’Association « les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération des employés au moment de la transposition aux nouveaux niveaux » si, au cours de la durée de la présente convention, une nouvelle norme de classification est mise en œuvre.

Bien qu’on nous ait avisé que la date de mise en œuvre de la conversion est le 22 juin 2009, le Secrétariat du Conseil du Trésor n’a pas encore communiqué avec nous pour négocier les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération conformément à la clause 27.07 de la convention collective du groupe EC.

Compte tenu de l’exigence imposée par la disposition de la convention collective, nous aimerions vous rencontrer le plus rapidement possible afin de négocier les nouveaux taux de rémunération et les règles de conversion de la classification EC. Nous comprenons que les négociations peuvent durer un certain temps.  Par conséquent, les taux et les règles négociés d’un commun accord devront nécessairement être rétroactifs au 22 juin 2009.

Veuillez nous faire part de votre disponibilité. Nous sommes disposés à vous rencontrer au moment qui vous conviendra le mieux.

9 Le 22 juin 2009, la nouvelle norme de classification EC est entrée en vigueur.

10 Le 29 juin 2009, M. Trottier a décliné l’offre de rencontrer l’ACEP, puisque, disait-il, la négociation concernant les taux de rémunération s’appliquant à la nouvelle norme de classification EC avait déjà eu lieu lors de la dernière ronde de négociations :

[Traduction]

[…]

M. Danik,

La présente fait suite à votre lettre du 17 juin 2009 concernant l’application de la clause 27.07 de la convention collective qui traite de l’obligation de négocier les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération des fonctionnaires lorsqu’une nouvelle norme de classification est mise en œuvre.

L’employeur défend la position que ces négociations ont déjà eu lieu. Le 18 novembre 2008, l’employeur a présenté son « offre finale » à l’agent négociateur.  L’offre contenait les taux de conversion de la rémunération de base et fixait au 22 juin 2009 la date de conversion et de renouvellement de l’ensemble des dispositions actuelles de la convention collective relatives à l’administration de la paie, y compris celles ayant trait à la protection salariale. Ces éléments ont été acceptés conformément à la convention collective signée le 11 mars 2009 et ont été mis en œuvre.

Compte tenu de ce qui précède, l’employeur est d’avis que les exigences de la clause 27.07 ont été remplies […]

III. Témoignage de Claude Danik

11 M. Danik, le porte-parole de l’ACEP à la table de négociation, a témoigné qu’il y a eu une consultation avec les agents négociateurs entre 1998 et 2002 concernant une norme générale de classification. M. Danik faisait partie d’un des comités. Puis l’employeur a changé son approche et a décidé d’une norme pour chacun des groupes professionnels. Il y a eu sept versions de la norme de classification EC en consultation avec l’ACEP.

12 Selon M. Danik, la clause 27.07 de la convention collective implique que lorsqu’il y a une conversion d’une classification à une autre pendant la durée de la convention collective, les parties doivent se rencontrer pour s’assurer que les salaires après la conversion sont appropriés et qu’ils correspondent au marché du travail. Dans le cas de la conversion EC, il n’y a pas eu d’étude du marché du travail correspondant. M. Danik a témoigné que l’ACEP est responsable de l’intégrité de la convention collective et de son application et, par conséquent, elle ne partage pas l’opinion de l’employeur qu’il y a eu une négociation de l’échelle salariale pour la classification EC au moment de la dernière ronde de négociations. M. Danik s’est dit d’avis que la Loi, bien qu’elle restreigne toute nouvelle forme de rémunération, permet tout de même la négociation pendant la période de restriction. Comme la convention collective est en vigueur du 11 mars 2009 au 21 juin 2010, les salaires négociés pendant le cours de la convention collective s’appliqueraient après la levée de la restriction, soit à compter du 1er avril 2011. Ainsi, en invoquant la clause 27.07, l’ACEP peut négocier une entente concernant l’échelle salariale de la classification EC, mais cette entente ne s’appliquera pas avant le 1er avril 2011.

13 En contre-interrogatoire, M. Danik a admis que les employés affectés ont été avisés de la conversion à la nouvelle norme de classification un an à l’avance et que la convention collective prévoyait qu’il allait y avoir une conversion. Les membres de l’unité de négociation attendaient une reclassification depuis fort longtemps. Le comité négociateur de l’ACEP était au courant de la date de mise en vigueur au moment de la signature du protocole d’entente et au moment de la ratification du protocole d’entente par les membres de l’unité de négociation. Dans le document de ratification soumis aux membres de l’unité de négociation, l’ACEP n’a pas mentionné son intention de renégocier l’échelle salariale de la classification EC, une fois l’entente signée. M. Danik a aussi admis que l’ACEP n’aurait pas accepté une date de conversion à la classification EC qui précédait la signature de la convention collective parce que l’ACEP n’aurait pas pu exercer son recours en vertu de la clause 27.07.

14  Selon M. Danik, l’échelle salariale ne pouvait être renégociée qu’après l’entrée en vigueur de la convention collective. M. Danik a admis ne pas avoir mentionné à l’employeur pendant la négociation collective que l’ACEP entendait demander la renégociation de l’échelle salariale de la classification EC une fois la convention collective en vigueur. Toujours selon M. Danik, la norme de classification, tout comme la date d’entrée en vigueur, ne sont pas des sujets négociables; par conséquent, la seule possibilité pour l’agent négociateur était de renégocier l’échelle salariale au moment de la mise en vigueur d’une nouvelle norme de classification.

15 M. Danik a soutenu que l’ACEP n’avait pas « signé un chèque en blanc » et que l’employeur avait l’obligation de revenir à la table de négociation une fois la mise en vigueur de la classification EC; la convention collective actuellement en vigueur est uniquement celle des classifications ES et SI.

IV. Témoignage de Guy Lauzé

16 Guy Lauzé, le porte-parole de l’employeur à la table de négociations, a témoigné qu’en réponse à la proposition de l’ACEP du mois de juin, l’employeur devait faire sa propre proposition sur les clauses monétaires en septembre 2008. Toutefois, en septembre 2008, il ne disposait toujours pas d’un mandat pour ce faire. Par contre, il a dit à M. Danik que l’ACEP pouvait s’attendre à recevoir la même proposition salariale que les autres tables de négociation et que l’échelle salariale de la classification EC aurait le même nombre d’échelons que les classifications actuelles ES et SI. Le 18 novembre 2008, l’employeur a déposé sa proposition monétaire, qui contenait, entre autres, une échelle salariale précise pour la conversion des classifications ES et SI à la nouvelle classification EC.

17 Les augmentations d’échelon, tant des classifications ES et SI que de la classification EC ont été négociées pour s’appliquer le 22 juin de chaque année de la convention collective pour coïncider avec la date déjà prévue de la conversion à la nouvelle classification EC et simplifier les ajustements salariaux.

18 Selon M. Lauzé, l’acceptation par l’ACEP de la proposition salariale de l’employeur qui tenait compte de la nouvelle norme de classification EC constituait l’entente négociée de la nouvelle échelle salariale en vue de la conversion qui devait se faire le 22 juin 2009.

V. Résumé de l’argumentation

A. Pour l’ACEP

19 L’ACEP soutient que la clause 27.07 de la convention collective parle d’elle-même et que, comme arbitre de grief, j’ai le devoir de l’appliquer telle que négociée. L’ACEP s’oppose à ce que je tienne compte d’une preuve extrinsèque pour interpréter une clause qui est sans ambiguïté.

20 De plus, en raison de la clause 53.02 de la convention collective, les obligations de la convention collective n’ont d’effet qu’à partir de sa signature. Par conséquent, l’employeur ne pouvait remplir ses obligations de négocier une nouvelle échelle salariale pour la classification EC qu’après le 11 mars 2009. La clause 27.07 ne s’applique pas rétroactivement. L’offre finale du 11 novembre 2008 était non négociable et a été déposée pendant la convention précédente. La négociation devait se faire de bonne foi au moment de la mise en œuvre de la nouvelle norme de classification.

21 Par ailleurs, l’adoption de la Loi n’empêchait pas la négociation d’une nouvelle échelle salariale pour la classification EC, même si elle ne pouvait pas s’appliquer avant le 1er avril 2011.

22 Au soutien de sa position, l’ACEP cite les décisions suivantes : Berry et le Conseil du Trésor (Postes Canada), dossier de la CRTFP 166-02-11263 (19820303); Melançon et al. c. Conseil du Trésor (ministère de l’Industrie, ministère de la Santé et Agence canadienne de développement international), 2010 CRTFP 20; Hall et al. et Association canadienne des agents financiers c. Conseil du Trésor, 2010 CRTFP 19; Royal Oak Mines Inc. c. Canada (Conseil des relations du travail), [1996] 1 R.C.S. 369; Pelzner v. Coseco Insurance Co. [2000] O.F.S.C.I.D. 81; Sheridan, 1993 LNONOSC 21; Lefebvre c. Conseil du Trésor (Solliciteur général Canada), dossier de la CRTFP 166-02-16101 et 16490 (19871023).

23 L’ACEP me demande d’accueillir le grief.

B. Pour l’employeur

24 L’employeur soutient que la clause 27.07 de la convention collective serait pertinente si l’employeur avait procédé à faire une reclassification non prévue pendant la durée de la convention collective. Aussi brève qu’a pu être la négociation, l’échelle salariale pour la classification EC a fait l’objet d’une entente, non seulement sur le taux, mais sur la date d’application.

25 L’employeur soumet avoir été de bonne foi quand il a proposé une échelle salariale et une date d’application de la conversion de la nouvelle norme de classification EC. Par contre, l’ACEP n’a pas révélé à l’employeur, ni à ses membres, l’astuce dont elle entendait se prévaloir après la signature de la convention collective. L’employeur soumet que même si M. Lauzé n’avait pas de mandat en septembre 2008, il a tout de même donné la position salariale anticipée de l’employeur et dit que la conversion d’une classification à une autre comprendrait huit niveaux, tout comme les deux classifications existantes. Cette position s’est confirmée dans l’offre finale qui a suivi. Rien n’a changé entre la date du préavis de conversion de la classification en juin 2008 et l’offre finale en novembre 2008.

26 L’offre de l’employeur, qui comprenait l’échelle salariale de la nouvelle classification EC à compter du 22 juin 2009, a été acceptée et ratifiée. La conversion à la nouvelle classification n’était pas un fait nouveau, mais le résultat de plusieurs années de consultation. L’employeur souligne que si l’ACEP n’était pas satisfait de l’offre finale de l’employeur, elle était en mesure de ne pas l’accepter et de se prévaloir d’un conseil d’arbitrage pour en décider.

27 De plus, l’ « Appendice A » de la convention collective comprend des notes détaillées sur la rémunération, l’administration des augmentations d’échelon et la méthode de transposition des augmentations en regard de la nouvelle classification. La clause 27.07 de la convention collective n’a aucune application en l’instance.

28 L’employeur me demande de rejeter le grief.

VI. Motifs

29 La clause de la convention collective qui fait l’objet du présent litige est libellée comme suit :

27.07 Si, au cours de la durée de la présente convention, il est établi à l’égard de ce groupe une nouvelle norme de classification qui est mise en œuvre par l’Employeur, celui-ci doit, avant d’appliquer les taux de rémunération aux nouveaux niveaux résultant de l’application de la norme, négocier avec l’Association les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération des fonctionnaires au moment de la transposition aux nouveaux niveaux.

30 La question en litige est de savoir si l’employeur a manqué à son obligation de négocier de bonne foi les taux de rémunération des fonctionnaires qui ont été transposés à la nouvelle classification EC, tel que le prescrit la clause 27.07 de la convention collective.

31  Lorsqu’on interprète une clause d’une convention collective, on doit tenir compte non seulement des mots utilisés, mais de l’ensemble de la convention collective et de l’intention des parties au moment de la signature. Comme arbitre de grief, je dois aussi être guidée par l’objet de la clause en litige et la cohérence de mon interprétation.

32 Les faits qui ont mené au dépôt du grief ne sont pas contestés. Les parties ont négocié une convention collective qui comprend une échelle salariale pour la nouvelle classification EC. Cette échelle salariale a été proposée par l’employeur comme partie de son offre finale et elle a été acceptée par l’ACEP. Ce qui est en litige est l’intention de chacune des parties au moment où elles ont conclu leur entente. L’ACEP prétend que l’échelle salariale pour la classification EC n’était pas finale au moment de la signature de la convention collective parce que l’employeur ne pouvait remplir son obligation de négocier cette échelle avant la signature de la convention collective. L’employeur prétend que la signature d’une convention collective qui comprenait l’échelle salariale de la classification EC constituait une acceptation du taux de rémunération pour la classification EC et mettait fin aux négociations.

33 Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la clause 27.07 de la convention collective ne s’applique pas à la situation dont se plaint l’ACEP.

34 Les notes détaillées comprises à l’ « Appendice A » de la convention collective, ne laissent aucun doute quant à la rémunération applicable qui doit s’appliquer au moment de l’entrée en vigueur de la classification EC :

[…]

5.  Transposition EC

a)       À compter du 22 juin 2009, avant toute révision effectuée à cette date, un employé est rémunéré selon la ligne « X » qui correspond à la classification de son poste titulaire suite à l’application de la norme EC au taux de rémunération qui se rapproche le plus de celui qu’il touchait le 21 juin 2009, sans y être inférieur.

b)       En l’absence d’un tel taux, la rémunération de l’employé demeure au taux de rémunération qu’il touchait le 21 juin 2009.  Ce taux sera majoré de un virgule cinq pour cent (1,5 %) à compter du 22 juin 2009 et de un virgule cinq pour cent (1,5 %) à compter du 22 juin 2010.

6.  À l’exception de ce qui est stipulé dans le paragraphe 27.03, une employée payée aux niveaux EC-1 à EC-8 de l’échelle des taux de rémunération doit, aux dates d’entrée en vigueur des rajustements des taux de rémunération, être rémunérée selon les échelles de taux (C) et (D), au taux indiqué juste au-dessous de son ancien taux de rémunération.

[…]

[Je souligne]

35 L’utilisation du mot « doit » dans la clause n’est pas ambigüe. L’employé qui fait l’objet d’une conversion à la nouvelle norme de classification EC doit être payé selon le taux de rémunération des nouvelles échelles de taux C et D et ce, à compter du 22 juin 2009. Ces échelles de taux C et D se retrouvent dans l’« Appendice A » de la convention collective. Je ne comprends pas l’argument de l’ACEP voulant que cette nouvelle échelle doit être assujettie à une nouvelle négociation.

36 Le communiqué de l’ACEP à ses membres sur son site Web lors du vote de ratification était très clair voulant qu’il s’agissait d’un vote pour une convention collective comprenant la classification EC. La grille salariale de l’ « Appendice A » pour le groupe EC faisait partie de la trousse de ratification. 

37 Le choix de mots pour le communiqué et la trousse de ratification ainsi que la lettre à M. Trottier contredisent la position mise de l’avant par l’ACEP qu’il y ait eu absence de négociation ou qu’elle ignorait les conséquences de la finalité de l’offre de l’employeur.

38 L’interprétation de la clause 27.07 de la convention collective avancée par l’ACEP dénature son libellé. La clause stipule que l’employeur doit négocier les taux de rémunération si une nouvelle norme de classification est mise en œuvre pendant la durée de la convention collective. Or, je dois tenir compte non seulement des mots utilisés, mais de l’ensemble de la convention collective et de l’intention des parties au moment de la signature. Une comparaison entre la version française et la version anglaise de la clause 27.02 de la convention collective donne une nouvelle perspective de l’intention des parties.

39 La version française de la convention collective stipule que l’employeur doit négocier les taux de rémunération et les règles concernant la rémunération des fonctionnaires si, « […] au cours de la présente convention, il est établi à l’égard de ce groupe une nouvelle norme de classification qui est mise en œuvre par l’Employeur […]». La version anglaise stipule que « […] if, during the term of this Agreement, a new classification standard for a group is established and implemented by the Employer […] ».

40 L’emploi du mot « établi » en français et « established » en anglais suggère qu’une nouvelle classification devait être créée pendant le cours de la présente collective en plus d’être mise en œuvre. La preuve démontre que l’employeur a donné un préavis aux fonctionnaires concernés et à l’agent négociateur avant la signature de la convention collective. Par conséquent, la nouvelle norme de classification n’a pas été établie pendant le cours de la convention collective comme en fait foi la nouvelle échelle salariale et les notes administrative de l’ « Appendice A » de la convention collective.

41 Dans le cas où l’employeur a clairement indiqué à l’agent négociateur au moment de la négociation collective son intention d’appliquer une nouvelle norme de classification et a pris la peine de proposer une échelle salariale qui a été acceptée par l’agent négociateur, il ne peut s’agir d’une « nouvelle norme de classification » établie en cours de convention collective au sens de la clause 27.07.

42 La clause 27.07 de la convention collective soutiendrait la position de l’ACEP seulement si l’employeur avait procédé à créer une reclassification pendant la durée de la négociation collective. Même s’il y a eu peu d’échanges de positions sur les clauses salariales, les termes explicites de la convention sont à savoir que les parties ont prévu expressément une échelle salariale pour la classification EC qui devait s’appliquer à compter du 22 juin 2009.

43 L’ACEP ne m’a pas convaincue que l’employeur ne pouvait remplir son obligation de négocier une nouvelle échelle salariale pour la classification EC qu’après la signature de la convention le 11 mars 2009. Le fait que l’employeur ait présenté son offre du 11 novembre 2008 comme étant non négociable n’enlevait pas l’option qu’avait l’ACEP à ce moment-là de refuser de signer le protocole d’entente ou de procéder à l’arbitrage. Si la stratégie de l’ACEP était d’accepter l’offre finale de l’employeur, avec l’intention de rouvrir la convention collective après la mise en œuvre de la nouvelle classification, elle devait communiquer cette stratégie clairement à l’employeur, qui à ce moment-là aurait eu l’occasion de rajuster son tir.

44 En conclusion, la clause 27.07 de la convention collective ne s’applique pas au grief déposé par l’ACEP. La convention collective est sans équivoque quant à l’intention des parties d’établir la rémunération de la classification EC à compter du 22 juin 2009, et les termes utilisés dans les notes de l’« Appendice A » de la convention collective sont incontournables.

45 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

VII. Ordonnance

46 Le grief est rejeté.

Le 27 septembre 2010.

Michele A. Pineau,
arbitre de grief

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