Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le grief de licenciement du fonctionnaire s’estimant lésé a été renvoyé à l’arbitrage - le fonctionnaire s’estimant lésé a fait valoir, dans le cadre d’une motion préliminaire, que l’employeur ne pouvait pas le licencier, compte tenu des modalités d’une entente de règlement antérieure - l’arbitre de grief a statué que les modalités du règlement se rapportaient à un grief antérieur et que cela n’empêchait pas l’employeur de licencier ultérieurement le fonctionnaire s’estimant lésé - le grief sera tranché au fond à une date ultérieure. Motion rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-11-02
  • Dossier:  566-02-3308
  • Référence:  2010 CRTFP 115

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ANDREW AMOS

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

défendeur

Répertorié
Amos c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Ian R. Mackenzie, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Barry Hebert, Institut professionnel de la fonction publique du Canada

Pour le défendeur:
Richard Fader, avocat

Affaire entendue à Halifax (Nouvelle-Écosse),
du 6 au 8 octobre 2010.
(Traduction de la CRTFP)

I. Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1 Le fonctionnaire s’estimant lésé, Andrew Amos (le « fonctionnaire »), a renvoyé à l’arbitrage un grief contestant son licenciement. Il soutient que, suivant le principe de préclusion, il est interdit à l’employeur d’invoquer les motifs de son licenciement en raison des modalités d’une entente de règlement intervenue plus tôt. Il a présenté une motion en vue de faire déclarer la mesure disciplinaire nulle sur le fondement de cette entente de règlement. Les parties ont conjointement recommandé que l’audience prévue au calendrier soit consacrée entièrement à l’examen de la motion du fonctionnaire. Après avoir entendu les arguments des parties dans le cadre d’une conférence préparatoire, j’ai fait droit à cette recommandation. La présente décision vise uniquement la motion.

2 Le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le « défendeur ») s’est opposé à la production de toute preuve portant sur les discussions intervenues dans le cadre de la médiation au motif, d’une part, qu’il s’agit d’une preuve extrinsèque inutile et, d’autre part, qu’il en découlerait un manquement au privilège dont les discussions intervenues dans le contexte de la médiation sont assorties. J’ai pris ma décision en délibéré sur cette objection. Ainsi qu’il est indiqué dans l’ouvrage intitulé Collective Agreement Arbitration in Canada, 4e éd. (LexisNexis Canada, 2009), par souci d’efficience et à des fins pratiques, les arbitres de griefs accepteront généralement la preuve extrinsèque jusqu’à ce qu’une décision soit rendue sur l’admissibilité de cette preuve (paragraphe 2.49).  

3 Le protocole d’entente conclu par les parties prévoyait notamment que le contenu du règlement était confidentiel. J’ai donc ordonné que la pièce en cause soit mise sous scellé et j’ai renvoyé, dans la présente décision, aux seules parties du règlement qui sont nécessaires pour clore la question préliminaire (la motion). L’ordonnance de mise sous scellé a inclus d’autres documents se rapportant à la médiation et à l’entente de règlement : la pièce E-2, onglets 1 à 4.

4 J’ai prononcé l’ordonnance d’exclusion des témoins qui m’a été demandée. Le fonctionnaire a fait témoigner une personne, en plus de témoigner lui-même, et le défendeur a fait témoigner quatre personnes.

5 Pour les motifs qui sont énoncés plus loin dans la présente décision, j’en suis arrivé à la conclusion que je n’ai pas besoin d’une preuve extrinsèque (dont une preuve portant sur les discussions qui ont eu lieu dans le contexte de la médiation) pour trancher la motion du fonctionnaire visant à faire déclarer nulle la mesure disciplinaire qui lui a été imposée. Par conséquent, je n’ai ni résumé ni pris en considération cette preuve.

6  Une partie de la preuve produite à l’audience se rapportait au déroulement de l’enquête qui a précédé le licenciement de M. Amos. Cette preuve est sans pertinence dans le contexte de la question préliminaire dont je suis saisi, aussi n’en ai-je pas tenu compte.

7 Le fonctionnaire a formulé des arguments en plus de produire une preuve sur ses gestes et ceux de l’administrateur général à la suite de la signature du protocole d’entente, alléguant qu’il avait été amené à croire que son emploi n’était pas en danger. Cette preuve n’est pas pertinente relativement à la question préliminaire. Elle pourrait en revanche être pertinente pour l’audition du grief sur le fond.

8 Une partie de la preuve a été obtenue grâce aux témoignages d’un certain nombre de personnes sur la mise en application de l’entente de règlement. Le défendeur a déjà admis avoir manqué à l’obligation énoncée dans l’entente d’amorcer des discussions avec le fonctionnaire (Amos c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2009 CRTFP 61 (« Amos no 2 »), paragr. 1). Un autre arbitre de grief a été saisi de la question de la mesure de réparation à l’égard de ce manquement, mais cette instance a été suspendue jusqu’à ce qu’une demande de contrôle judiciaire soit tranchée.

II. Résumé de la preuve

9 M. Amos a été licencié le 2 février 2009 en raison d’un conflit d’intérêts.

10 En 2005, M. Amos a été frappé d’une suspension disciplinaire dans un dossier qui n’est relié ni aux allégations de conflit d’intérêts, ni à son licenciement. Il a contesté cette sanction, et son grief a été renvoyé à l’arbitrage. Une audience a été tenue vers la fin de l’année 2006, et un règlement est intervenu le 2 mai 2007.

11 Le protocole d’entente (pièce G-4 et pièce E-2, onglet 4) contient le paragraphe suivant, lequel, d’après M. Amos, a résolu toutes les questions, dont celles qui se rapportent au conflit d’intérêts et qui, en bout de ligne, ont mené à son licenciement :

[Traduction]

Les parties conviennent par les présentes :

1. de participer à une réunion ou à des réunions raisonnablement nécessaires afin de discuter et de régler des questions d’intérêt mutuel qui ont trait à la relation de travail du fonctionnaire s’estimant lésé avec TPSGC. Ce processus doit avoir lieu dans les plus brefs délais possibles. Les deux parties entendent établir une relation de travail positive dans leur intérêt mutuel futur.

12 Sont reproduits ci-après d’autres passages pertinents du protocole d’entente :

[Traduction]

Les parties conviennent de régler le renvoi à l’arbitrage du dossier de la CRTFP 566-02-10 et d’accepter les modalités suivantes en règlement complet et définitif de toutes les demandes contre l’employeur se rapportant de quelque manière que ce soit à l’objet du grief en l’instance […]

[…]

Le fonctionnaire s’estimant lésé convient par les présentes :

1. de retirer de la procédure d’arbitrage le grief dans le dossier de la CRTFP 566-02-10, et de retirer tout autre grief ou toute autre instance se rapportant au présent renvoi à l’arbitrage […]

[…]

Les parties déclarent par les présentes :

[…]

2. que la présente entente constitue le règlement complet et définitif des questions et des conditions associées ou de quelque manière que ce soit liées au présent renvoi à l’arbitrage […]

[…]

13 L’entente a été signée par M. Amos et son avocat, David Bright. Jean Quevillon, un gestionnaire des relations de travail du défendeur, et Harvey Newman, avocat, ont signé pour le compte de l’administrateur général.

14 L’enquête sur les allégations de conflit d’intérêts à l’encontre de M. Amos a été entreprise au cours de l’année 2006. M. Amos a été interrogé sur ces allégations en février 2007.

15 Le représentant du fonctionnaire a pour la première fois invoqué la prétention de ce dernier — le protocole d’entente visait l’inconduite alléguée sur laquelle l’administrateur général s’est fondé pour licencier le fonctionnaire — dans un grief déposé le 9 juillet 2009 (pièce G-8). Le fonctionnaire a fait valoir qu’à la date à laquelle les parties ont signé le protocole d’entente, l’administrateur général connaissait parfaitement tous les faits importants relatifs à l’inconduite alléguée. 

III. Résumé de l’argumentation

16 Les deux parties ont déposé des arguments écrits à l’audience. J’en ai résumé les passages pertinents. Ces arguments renvoyant à la preuve dont j’ai ordonné la mise sous scellé, j’ai conclu qu’eux aussi devaient être mis sous scellé.

A. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé

17 Le défendeur connaissait tous les détails des allégations de conflit d’intérêts avant la signature du protocole d’entente. Celui-ci a amené M. Amos à croire que toutes les questions touchant le conflit d’intérêts pourraient être réglées et, pendant des mois, l’administrateur général a laissé M. Amos croire à cette possibilité. Le passage « dans leur intérêt mutuel » est revêtu d’un sens très général. Si l’administrateur général avait souhaité exclure de la portée du protocole d’entente l’enquête sur les allégations de conflit d’intérêts et les résultats possibles, il aurait pu l’indiquer clairement. S’il avait connu les intentions de l’administrateur général, le fonctionnaire aurait-il signé l’entente? Et comment le fait de connaître ces intentions aurait-il changé son attitude vis-à-vis de l’enquête après la signature du protocole d’entente? L’administrateur général avait promis à M. Amos la prise d’une mesure sérieuse, et ce dernier a agi, à son détriment, en fonction de cette promesse. En bout de ligne, l’administrateur général a déclaré par la voie du protocole d’entente que l’option du licenciement ne lui était pas ouverte (puisque le licenciement ne peut être défini comme étant dans leur intérêt mutuel). Il ne peut donc aujourd’hui revenir sur cette déclaration suivant le principe de la préclusion.

18 L’administrateur général a opté pour un scénario « où tout le monde serait heureux » lorsqu’il a déclaré que les deux parties profiteraient ensemble d’un avenir qui leur serait mutuellement avantageux. Le libellé choisi revêtait un sens intentionnellement vaste et général, de manière qu’il couvre toutes les questions non réglées et permette en même temps d’obtenir des engagements fermes en vue du règlement final des questions alors en jeu et d’un avenir mutuellement avantageux pour les parties. Le libellé du protocole d’entente est on ne peut plus clair — les questions devaient être discutées et réglées, et le futur devait être mutuellement avantageux pour les parties. Si l’administrateur général avait souhaité exclure des questions d’intérêt mutuel la tenue d’une enquête sur les allégations de conflit d’intérêts, il aurait pu le faire simplement au moyen d’un texte explicite.  

19 On m’a renvoyé à Munroe c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2010 CRTFP 56, sur la question des principes de préclusion. Dans le cas de M. Amos, l’administrateur général a fait une déclaration en espérant que M. Amos agirait en fonction de celle-ci, ce que ce dernier a fait. Dans le présent cas, M. Amos s’est fondé sur cette déclaration à son détriment. En outre, il est inadmissible que l’on permette à l’administrateur général de se désister de l’accord qu’il a donné. M. Amos aurait agi de manière complètement différente s’il avait connu les intentions véritables de l’administrateur général.

20 On m’a renvoyé également à Molbak c. Conseil du Trésor (Revenu Canada, Impôt), dossier de la CRTFP 166-02-26472 (19950928), et à Webb c. Conseil du Trésor (Affaires étrangères et Commerce international), dossier de la CRTFP 166-02-28379 (19981221).

21 M. Amos a subi un certain nombre de préjudices par suite des actions prises par l’administrateur général, dont des pertes financières et des dommages à sa réputation, en plus d’éprouver des problèmes de santé et de voir sa qualité de vie diminuée par suite du licenciement injustifié. Une audience distincte devra être tenue pour évaluer ces dommages. 

B. Pour l’administrateur général

22 Le défendeur a fait valoir que l’allégation du fonctionnaire selon laquelle on a fait table rase sur les allégations de conflit d’intérêts était une allégation grave qui touche l’essence même du régime des relations du travail. Il incombe au fonctionnaire d’établir la véracité de cette allégation, et il doit à cette fin produire une preuve claire et convaincante.

23 Règle générale, on ne peut recourir à une preuve extrinsèque pour interpréter une entente, à moins que celle-ci ne soit ambiguë (Collective Agreement Arbitration in Canada, paragr. 2.48).

24 Le protocole d’entente dans son ensemble doit être examiné pour saisir l’intention des parties. Il est inconcevable de penser qu’un avocat chevronné rédigerait le protocole d’entente tel qu’il a été rédigé si l’intention était de permettre au fonctionnaire de faire table rase. L’enquête sur les allégations de conflit d’intérêts était un processus distinct, dont l’issue n’était pas prédéterminée.

25 Le fonctionnaire a soulevé cet argument pour la première fois après le renvoi du grief à l’arbitrage. Il est difficile de concevoir qu’il n’en aurait fait aucune mention au cours du processus disciplinaire.

26 La thèse du fonctionnaire est sans fondement, et le fait qu’il a formulé une telle allégation devrait avoir un effet préjudiciable sur sa crédibilité.

C. Réfutation du fonctionnaire s’estimant lésé

27 L’administrateur général a manqué à son engagement de faire table rase après le licenciement seulement. Il n’aurait donc pas convenu de soulever la question plus tôt.

28 En plus de manquer de clarté, le protocole d’entente est ambigu. Le règlement portait sur des questions autres que la sanction disciplinaire initiale de 20 jours, et il devait permettre de régler d’autres questions.

IV. Motifs

29 Le recours à une preuve extrinsèque pour interpréter les ententes de règlement de griefs devrait dans tous les cas être réservé à des circonstances exceptionnelles — notamment dans les cas où l’entente est ambiguë. Ce principe tire sa source du droit contractuel ainsi que du principe des bonnes relations de travail qui consiste à encourager les parties à régler elles-mêmes leurs différends (Canadian General-Tower Ltd. v. United Rubber Workers, Local 292 (1990), 12 L.A.C. (4e) 153, p. 155).

30 Pour qu’on puisse prendre une preuve extrinsèque en considération, l’ambiguïté doit soit être évidente à la lecture même de l’entente, soit être latente (l’ambiguïté qui n’est pas apparente lorsqu’on s’en tient au sens ordinaire du texte du document). Dans Christian Labour Association of Canada v. Crown Electric, [1978] OLRB Rep. April 344, paragraphe 13, la Commission des relations de travail de l’Ontario a signalé qu’il y a lieu d’établir une distinction entre l’ambiguïté latente et la simple divergence au niveau de l’interprétation d’un texte qui, par ailleurs, n’est pas ambigu. L’organisme a déclaré que le fait qu’un passage puisse donner lieu à deux interprétations dont on peut dire qu’elles sont différentes n’établit pas l’existence d’une ambiguïté latente :

[Traduction]

[…] En raison de la plus grande valeur probante des documents écrits et de la nécessité, en général, de mettre un terme à un conflit, et les tribunaux et les conseils d’arbitrage ont refusé d’admettre une preuve extrinsèque dont l’effet se limiterait à établir la possibilité de deux interprétations contraires et intéressées.

31 Dans International Nickel Co. of Canada Ltd. v. United Steelworkers (1974), 5 L.A.C. (2e) 331, p. 333, l’arbitre a signalé que, si l’ambiguïté latente était suffisamment générale pour inclure tous les cas où le « sens est douteux », on ouvrirait la porte à l’admission d’une preuve extrinsèque dans tous les cas où il y aurait désaccord sur l’interprétation d’un document. De plus, on minerait ainsi sensiblement la force des ententes de règlement et on dénuerait essentiellement de leur sens les règles qui régissent l’admission d’une preuve extrinsèque. Les parties devraient toujours ressentir une certaine pression sachant que le texte dont elles conviennent dans une entente de règlement est destiné à régler définitivement le différend qui les oppose. Si on leur accorde trop facilement l’accès à l’arbitrage sur l’interprétation de ce texte, les parties perdront cette motivation. Ainsi qu’on l’a indiqué dans Crown Electric :

[Traduction]

[…]

17. Les parties qui concluent des ententes de règlement écrites doivent nécessairement s’assurer de bien connaître toutes les implications des documents sur lesquels elles apposent leurs signatures. En l’absence de toute allégation de fraude, la Commission doit tenir pour acquis que les parties se sont entendues sur tout règlement rédigé clairement dans un document écrit, faute de quoi aucun règlement ne serait à l’abri d’une contestation subséquente.

[…]

32 La disposition du protocole d’entente qui est en cause doit être examinée dans le contexte du document dans son ensemble. Il ressort clairement d’une lecture de tout le document que l’objet de celui-ci était de régler la question de la suspension disciplinaire. À divers endroits, les parties réitèrent que le protocole d’entente vise à régler uniquement le grief qui a été renvoyé à l’arbitrage. À la date à laquelle elles ont signé l’entente, la suspension était l’unique sanction disciplinaire figurant au dossier du fonctionnaire. S’ils sont peut-être vagues, les termes de la disposition en cause ne sont pas ambigus :

[Traduction]

Les parties conviennent par les présentes :

2. de participer à une réunion ou à des réunions raisonnablement nécessaires afin de discuter et de régler des questions d’intérêt mutuel qui ont trait à la relation de travail du fonctionnaire s’estimant lésé avec TPSGC. Ce processus doit avoir lieu dans les plus brefs délais possibles. Les deux parties entendent établir une relation de travail positive dans leur intérêt mutuel futur.

33 Aux termes de la première phrase, les parties doivent tenir une ou des réunions « afin de » discuter et de régler des « […] questions d’intérêt mutuel qui ont trait à la relation de travail du fonctionnaire s’estimant lésé […] » avec le défendeur. Essentiellement, les parties s’entendent pour avoir des discussions. L’objectif de régler des questions non déterminées est clairement énoncé, ce qui ne signifie pas cependant que ces questions seront réglées. La deuxième phrase se rapporte elle aussi au processus dans la mesure où elle renvoie au moment où ces discussions doivent avoir lieu. La dernière phrase pourrait soit se rapporter à l’objet des discussions, soit énoncer plus généralement l’intention des parties. Elle ne peut cependant être interprétée comme constituant une garantie générale qu’il y aura une « […] relation de travail positive dans leur intérêt mutuel […] » pour une période indéterminée à l’avenir. Bien qu’elle soit mal rédigée, elle indique simplement que les parties travailleront à leur relation de bonne foi. Elle vise non pas l’issue des discussions, quelle qu’elle soit, mais les seules intentions des parties. La disposition n’est pas ambiguë à sa lecture même.

34 La preuve extrinsèque n’aidera pas le fonctionnaire à révéler quelque ambiguïté latente que ce soit dans le protocole d’entente. Celui-ci ne contient aucun terme qui puisse devenir ambigu après examen de la preuve extrinsèque. L’intention des parties est exprimée dans le protocole d’entente, alors la preuve de ce que le fonctionnaire ou son avocat pensaient avant de le signer ne pourrait révéler l’existence d’aucune ambiguïté latente. Les événements qui ont succédé à la signature du protocole d’entente ne peuvent créer rétroactivement une ambiguïté. Les événements qui surviennent après la signature d’une entente peuvent uniquement révéler des interprétations différentes de cette entente. La preuve extrinsèque a pour seul objet de faciliter la compréhension de l’intention des parties lorsqu’elles ont signé une entente. La preuve postérieure à la conclusion d’une entente n’est d’aucune utilité dans un tel contexte.   

35 Il semble que l’argument véritable du fonctionnaire soit que, si l’administrateur général s’était conformé à l’entente (il a admis son omission à cet égard), les allégations de conflit d’intérêts auraient été réglées, et il n’aurait pas été licencié, ce qui revient donc avancer un argument fondé sur des hypothèses. Cela est tout autre chose que de prétendre que le protocole d’entente a permis au fonctionnaire de faire table rase.

36 Le fonctionnaire a fait valoir également qu’il s’en était remis à ses dépens aux déclarations faites par l’administrateur général dans le protocole d’entente. J’ai déjà discuté de la manière dont il convient d’interpréter la disposition en question. Si, certes, M. Amos a pu interpréter celle-ci différemment, l’intention qui sous-tend le protocole d’entente demeure la même. Une vision rétrospective est une vision parfaite. Manifestement, M. Amos aurait vraisemblablement agi différemment s’il avait su qu’il serait licencié. Or, on ne peut créer une préclusion en jetant un regard vers l’arrière à partir d’un résultat (licenciement) que les parties n’envisageaient pas à l’époque pertinente.

37 Je ne peux me servir de la motion préliminaire du fonctionnaire pour attaquer sa crédibilité, comme l’a suggéré l’administrateur général. Seule la preuve produite doit servir à miner la crédibilité d’un témoin. Les parties (et le fonctionnaire et le défendeur) présentent souvent des motions, dont certaines sont jugées sans fondement par les arbitres de grief. Il ne serait pas du tout juste de se servir du fait qu’une partie a soulevé une question préliminaire pour miner sa crédibilité.

38 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

39 La motion préliminaire du fonctionnaire est rejetée.

40 L’audience sur le bien-fondé du grief se déroulera aux dates à déterminer par la Commission des relations de travail dans la fonction publique.

Le 2 novembre 2010.

Traduction de la CRTFP

Ian R. Mackenzie,
arbitre de grief

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