Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a déposé une plainte de pratique déloyale de travail contre son ancien employeur, le Service correctionnel du Canada (SCC) - en 1986, elle a été désignée excédentaire et a contesté la mesure prise par l’employeur en déposant une plainte aux termes de la politique sur le réaménagement des effectifs avec l’appui de son agent négociateur, plainte qu’elle n’a jamais retirée - afin d’éviter le licenciement, elle a accepté une rétrogradation volontaire à un autre poste qui s’est soldée par une baisse de sa rémunération et une augmentation de ses heures de travail - elle a par la suite été victime d’un accident de travail et elle a remis sa démission en 1989, étant atteinte d’une invalidité permanente - en août 2008, elle a communiqué avec l’agent négociateur et lui a demandé de tenter d’obtenir justice pour elle - l’agent négociateur lui a nommé un représentant et une rencontre a eu lieu avec le commissaire du SCC, sans résultat - l’agent négociateur l’a ensuite informée qu’il ne la représenterait plus, et elle a déposé la présente plainte - la plainte était hors délai, puisqu’elle a été présentée après la période obligatoire de 90 jours - la plaignante a soutenu que l’issue de la rencontre constituait de la discrimination à son égard parce qu’elle a contesté son évaluation de rendement en 1986, mais elle n’a pas établi de lien raisonnable entre ces deux faits. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-01-28
  • Dossier:  561-02-410
  • Référence:  2010 CRTFP 16

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

GWEN ANNE WARREN

plaignante

et

SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA

défendeur

Répertorié
Warren c. Service correctionnel du Canada

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, commissaire

Pour la plaignante:
Elle-même

Pour le défendeur:
Maureen Harris, Secrétariat du Conseil du Trésor

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés les 13, 24 et 27 novembre 2009 et le 6 janvier 2010.
(Traduction de la CRTFP)

Plainte devant la Commission

1 Le 9 octobre 2009, Gwen Anne Warren (la « plaignante ») a déposé une plainte devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») contre le Service correctionnel du Canada (SCC) (le « défendeur ») en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22 (la « Loi »). La plaignante alléguait que le défendeur s’était livré à une pratique déloyale de travail au sens de l’article 185 de la Loi.

Résumé de l’argumentation de la plaignante

2 En 1986, la plaignante travaillait à l’établissement Millhaven de SCC, où elle occupait le poste de superviseure de services de bureau, classifié dans le groupe et au niveau CR-04. Le 4 novembre 1986, le SCC l’a informée que son poste avait été déclaré excédentaire à compter du 13 novembre 1986. La plaignante a contesté la décision du SCC en alléguant qu’elle n’était pas basée sur l’ordre inverse du mérite. Elle a également contesté la décision de SCC de ne pas lui offrir une nomination intérimaire à un poste classifié dans le groupe et au niveau CR-05, en février 1987, ainsi que sa décision ultérieure de ne pas la nommer à ce poste pour une durée indéterminée.

3 Afin de ne pas être licenciée, la fonctionnaire a accepté, le 15 décembre 1986, une rétrogradation volontaire à un poste classifié dans le groupe et au niveau GS-STS-04. Cette rétrogradation s’est soldée par une augmentation de ses heures de travail mais une baisse de sa rémunération après l’expiration de la période de protection salariale. La plaignante affirme qu’elle a été abandonnée à son sort dans un milieu de travail malsain, sans aucun moyen de recours. Elle s’est mise à avoir de graves problèmes de santé, mais elle était confiante que les représentants de son agent négociateur et le SCC allaient corriger la situation. Ce ne fut pas le cas. En mai 1989, la plaignante a été victime d’un accident du travail et elle a remis sa démission en juin 1989, étant atteinte d’une invalidité permanente.

4 La plaignante a défendu la position que le SCC l’avait traitée de la manière décrite ci-dessus parce qu’elle avait réfuté les observations et les évaluations que son gestionnaire avait consignées dans son évaluation de rendement d’octobre 1986.

5 En août 2008, la plaignante a consulté Ken Veley, un représentant de l’agent négociateur à la retraite, afin d’entreprendre des démarches pour obtenir justice. M. Veley l’a aidée à préparer une demande d’accès à l’information afin de recevoir tout ce que contenaient ses dossiers à SCC et à la Commission de la fonction publique, où elle avait déposé une plainte. C’est en prenant connaissance des documents que la plaignante a compris le tort qu’on lui avait causé.

6 Le 25 février 2009, la plaignante et M. Veley ont écrit à Don Head, commissaire du SCC, dans le but de lui expliquer ses problèmes et de solliciter une rencontre pour discuter de son cas. M. Head a accepté de rencontrer la plaignante et M. Veley, le 5 mai 2009, mais la réunion est demeurée sans suite. Voyant cela, la plaignante a écrit de nouveau à M. Head, le 19 juin 2009, pour lui demander de réexaminer son cas et de respecter les valeurs fondamentales du SCC.

7 La plaignante a indiqué qu’elle avait déposé une plainte aux termes de la politique sur le réaménagement des effectifs dans les années 1980 et que cette plainte n’avait jamais été retirée. En 1989, elle a été victime d’un accident du travail, à la suite duquel elle a touché des indemnités pour accident du travail, puis elle a démissionné en juin 1989. En 2009, sa santé s’étant améliorée, elle a décidé de poursuivre l’affaire afin de résoudre les questions en litige.

8 La plaignante a produit des documents indiquant que les représentants du Syndicat des employé-e-s du Solliciteur général (SESG) ne l’appuyaient plus. Cela étant, elle a déposé une plainte devant la Commission (dossier de la CRTFP 561-02-403). La plaignante a fait valoir que, vu qu’elle n’était plus représentée, l’argument voulant que sa plainte fût hors délai ne s’appliquait plus. À vrai dire, ce n’est que le 13 juillet 2009 que la plaignante a appris officiellement que le SESG avait décidé de ne plus la représenter.

Résumé de l’argumentation du défendeur

9 Le défendeur s’est dit d’avis que la plainte est hors délai. En vertu du paragraphe 190(2) de la Loi, une plainte doit être déposée dans les 90 jours qui suivent la violation alléguée de la Loi. La jurisprudence a établi que ce délai revêt un caractère obligatoire. Le défendeur m’a renvoyé à Castonguay c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2007 CRTFP 78, et à Panula c. Agence du revenu du Canada et Bannon, 2008 CRTFP 4. 

10 Le défendeur a observé que la plaignante avait cité de nombreux incidents qui se seraient produits entre 1986 et 1989, alors qu’elle était une employée de SCC. Or, la plaignante a admis qu’elle avait démissionné et qu’elle avait cessé d’être une employée le 24 juin 1989.

Motifs

11 Au paragraphe 2(1), la Loi définit un fonctionnaire comme une personne qui est employée dans la fonction publique. La plainte porte également sur les dispositions suivantes de la Loi :

[…]

190. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

(2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

[…]

185. Dans la présente section, « pratiques déloyales » s’entend de tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188 et le paragraphe 189(1).

[…]

186. (2) Il est interdit à l’employeur, à la personne qui agit pour le compte de celui-ci et au titulaire d’un poste de direction ou de confiance, que ce dernier agisse ou non pour le compte de l’employeur :

a) de refuser d’employer ou de continuer à employer une personne donnée, ou encore de la suspendre, de la mettre en disponibilité, ou de faire à son égard des distinctions illicites en matière d’emploi, de salaire ou d’autres conditions d’emploi, de l’intimider, de la menacer ou de prendre d’autres mesures disciplinaires à son égard pour l’un ou l’autre des motifs suivants :

[…]

(iv) elle a exercé tout droit prévu par la présente partie ou la partie 2;

[…]

12 La plainte renvoie à des incidents qui seraient survenus il y a plus de 20 ans. Les mesures que le défendeur a prises ou n’a pas prises à ce moment-là ne peuvent pas être utilisées pour étayer une plainte déposée en 2009. Il est évident que la plainte a été déposée après l’expiration du délai obligatoire de 90 jours prescrit par le paragraphe 190(2) de la Loi.

13 La plaignante a décidé, en 2009, de relancer le SCC au sujet des problèmes qu’elle avait eus entre 1986 et 1989. M. Head a accepté de la rencontrer, mais la plaignante n’a pas été satisfaite du résultat de cette rencontre. Elle prétend que l’issue insatisfaisante de la rencontre constitue de la discrimination à son égard parce qu’elle a contesté le contenu de son évaluation de rendement en 1986. Or, rien dans la preuve dont je dispose n’indique qu’il existe un lien raisonnable entre ces deux faits.

14 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

15 La plainte est rejetée.

Le 28 janvier 2010.

Traduction de la CRTFP

Renaud Paquet,
commissaire

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.