Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Les fonctionnaires s’estimant lésés ont demandé à commencer leur journée de travail à 7h - l’employeur a refusé, pour des raisons de santé et de sécurité surtout, de même que pour des considérations liées à la supervision - l’agent négociateur a soutenu que les fonctionnaires avaient le droit de commencer leur journée de travail tôt le matin, sous réserve seulement des exigences opérationnelles - l’employeur a défendu la position que les exigences opérationnelles pouvaient être interprétées de façon plus libérale, de manière à inclure des préoccupations liées à la santé et à la sécurité de même que les besoins en matière de supervision, et l’arbitre de grief lui a donné raison. Griefs rejetés.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-02-18
  • Dossier:  566-34-1628 et 2814 à 2821
  • Référence:  2010 CRTFP 27

Devant un arbitre de grief


ENTRE

JIM JENKS, VALERIE ASELTINE, LORRAINE CIVITARESSE,
MARK DUNFORD, GERALD HOOFT, PAM HOWICK, DIANE LAPOINTE,
KRISTINE PINKNEY ET CHRYSTAL WILLIE

fonctionnaires s'estimant lésés

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

employeur

Répertorié
Jenks et al. c. Agence du revenu du Canada.

Affaire concernant des griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Roger Beaulieu, arbitre de grief

Pour les fonctionnaires s'estimant lésés:
Douglas Hill, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur:
Debra L. Prupas, avocate

Affaire entendue à Windsor (Ontario),
les 30 et 31 juillet 2009.
(Traduction de la CRTFP)

I. Griefs individuels renvoyés à l’arbitrage

1 La présente affaire concerne huit griefs d’interprétation mettant en cause la clause 25.08 de la convention collective qui a été conclue pour le groupe Exécution des programmes et des services administratifs par l’Agence des douanes et du revenu du Canada (aujourd’hui l’Agence du revenu du Canada (ARC ou l’« employeur »)) et l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC ou l’« agent  négociateur »), et qui a expiré le 31 octobre 2007 (la « convention collective »). La clause 25.08 est libellée dans les termes suivants dans les deux langues :

Sous réserve des nécessités du service, l'employé-e qui travaille de jour a le droit de demander de travailler selon un horaire mobile allant de 7 h à 18 h, aux heures que l'employé-e choisit, et cette demande ne peut être refusée sans motif valable.

[…]

Subject to operational requirements, an employee on day work shall have the right to select and request flexible hours between 7 a.m. and 6 p.m. and such request shall not be unreasonably denied.

2 Le premier jour de l’audience, le représentant de l’agent négociateur a indiqué que le grief portant le numéro de dossier de la CRTFP 566-34-2815 (Lorraine Civitaresse) avait été retiré.

3 Tous les fonctionnaires s’estimant lésés (les « fonctionnaires ») ont demandé par écrit à leurs superviseurs respectifs l’autorisation de commencer à travailler à 7 h plutôt qu’à 7 h 30. Ils travaillent tous aux bureaux des services fiscaux (BSF) de Hamilton et de Windsor (Ontario).

4 Toutes les demandes ont été refusées, en raison des nécessités du service. Les heures de travail devaient aller de 7 h 30 à 17 h.

II. Résumé de la preuve

A. Pour l’agent négociateur

5 Dans ses remarques préliminaires, le représentant de l’agent négociateur a indiqué que le libellé de la clause 25.08 de la convention collective créait deux obligations : 1) « […] l'employé-e qui travaille de jour a le droit de demander de travailler selon un horaire mobile allant de 7 h à 18 h, aux heures que l'employé-e choisit […] », et 2) « […] cette demande ne peut être refusée sans motif valable ».

6 Le représentant de l’agent négociateur a ajouté que le libellé de la clause 25.08 de la convention collective est clair et que l’employeur a refusé sans motif valable les demandes des fonctionnaires de commencer à travailler à 7 h.

7 L’agent négociateur a appelé à témoigner dans un premier temps Pam Howick, une employée du BSF de Windsor qui travaille au sein de la Division de l’exécution, et qui a déclaré qu’elle avait travaillé suivant un horaire comprimé pendant plusieurs années. Suivant cet horaire, elle commençait à travailler à 7 h et terminait à 16 h 30 les lundis et les mercredis. Les mardis, jeudis et vendredis, elle travaillait de 8 h 30 à 17 h.

8 Mme Howick a déclaré qu’elle commence à travailler à 7 h 30 depuis que les nouvelles heures de travail des employés de jour du bureau de Windsor ont été confirmées en février 2007.

9 Mme Howick occupe un poste d’enquêteur (classé SP-07) au sein de la Division de l’exécution du BSF, et elle fait partie du Programme des enquêtes criminelles, dans le cadre duquel elle est appelée à aider les procureurs de la Couronne dans les poursuites intentées à l’égard de stratagèmes de fraudes fiscales. Ses responsabilités consistent notamment à faciliter la préparation des avocats en fournissant à ces derniers les renseignements, les documents et le matériel pertinents et à témoigner pour la poursuite.

10 Dans le cadre de son travail, particulièrement de ses enquêtes, Mme Howick doit traiter avec le public, soit directement par la voie de rencontres, soit par la voie d’appels téléphoniques liés à son travail.

11 À la page 9, sous la rubrique intitulée « Environnement de travail », la description des tâches de Mme Howick témoigne des préoccupations des employés au chapitre de la santé et de la sécurité :

[Traduction]

[…]

Le titulaire doit composer avec des particuliers et (ou) leurs représentants irrités, hostiles, menaçants et grossiers dans le déroulement de la vérification ou l’exécution de mandats de perquisition et le dans le cadre de l’enquête.

[…]

12 Lorsque des rencontres sont tenues dans les locaux du BSF, la surveillance de la sécurité est rehaussée dans le secteur et autour de celui-ci afin de réduire au minimum les risques potentiels pour la santé et la sécurité des employés du BSF.

13 Dans le cadre du témoignage de Mme Howick, l’agent négociateur a produit en preuve la pièce U-6, un document provenant du bureau du directeur du BSF de Windsor intitulé [traduction] « Directive sur les heures de travail à l’intention de tous les employés du BSF », qui confirme que les employés commencent à travailler à 7 h 30 30 :

[Traduction]

Du bureau de Michael A. Spencer

Note de service à l’intention de tous les employés du BSF   Date : 23 février 2007

Objet : Heures de travail

Les heures de travail prévues pour le BSF de Windsor couvrent la période de 7 h 30 à 17 h. Cet horaire est en place depuis un certain nombre d’années, mais de récentes situations m’ont convaincu de la nécessité d’apporter des précisions supplémentaires. Ces heures sont en place depuis un certain nombre d’années, toutefois, les récentes situations m’ont convaincu que de plus amples éclaircissements pourraient être nécessaires.

Aux fins d’établir l’horaire de travail, il faut prendre en considération un certain nombre de facteurs, dont notamment ceux qui suivent :

1. Le Code canadien du travail (c.-à-d. la présence de préposés aux premiers soins).

2. La présence d’une supervision sur les lieux.

3. La sécurité du personnel et des biens de l’Agence.

4. Les nécessités du service – l’exécution de programmes à l’intention de la population canadienne.

Par conséquent, à compter du 5 mars 2007, vos cartes d’accès individuelles vous donneront accès à notre immeuble entre 7 h 15 et 17 h 15 seulement, du lundi au vendredi. N’oubliez pas que vos cartes d’accès doivent être protégées en tout temps.

Si vous avez besoin d’aide de la direction avant l’arrivée de votre propre superviseur immédiat, vous pouvez communiquer avec l’un des chefs d’équipe dont le nom figure ci-dessous, et qui doit être au bureau à 7 h 15 :

  • Gary Elligson, 3e étage – poste 6508
  • John Mills, 2e étage – poste 6354
  • Bruna Martire, 4e étage – poste 6449
  • Denise D’Angela, 6e étage – poste 6677

Conformément au Code canadien du travail, si des heures supplémentaires sont prévues, un superviseur et des préposés aux premiers soins doivent être sur les lieux.

Si vous avez des questions, veuillez communiquer avec votre superviseur immédiat.

14 Mme Howick a produit en preuve également la pièce U-7, un document intitulé [traduction] « Travailler seul pendant les heures d’inoccupation », signé conjointement par Lysanne M. Gauvin, coprésidente pour la direction du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité, et Betty Bannon, coprésidente pour l’agent négociateur du même comité, daté du 21 novembre 2005. La pièce U-7 est une communication nationale qui a été diffusée par l’ARC à l’intention des commissaires adjoints, directeurs généraux, directeurs, directeurs de BSF, centres fiscaux, directeurs régionaux des ressources humaines et conseillers régionaux en matière de santé et de sécurité au travail.

15 Les « heures d’inoccupation » renvoient aux situations où les employés travaillent en dehors des heures de travail normales, soit durant la semaine de travail normale, soit les fins de semaine.

16 Au sein de la division de Mme Howick (la Division de l’exécution), une carte magnétique donne accès à l’immeuble de Windsor. Le détenteur de la carte doit glisser celle-ci dans le lecteur une deuxième fois pour accéder aux ascenseurs. Le troisième étage, où se trouvent les bureaux de la Division de l’exécution, est doté d’un système d’alarme à l’intérieur des portes de la section de Mme Howick.

17 En contre-interrogatoire, Mme Howick a précisé que sa division dispose d’un dispositif de sécurité distinct des autres divisions du BSF de Windsor.

18 Toujours en contre-interrogatoire, Mme Howick a indiqué que les chefs d’équipe de sa section font preuve de souplesse aux fins de modifier les horaires à la demande des employés.

19 Dans le même contexte, Mme Howick a confirmé que, de 2003 au mois de février 2007, elle a toujours travaillé suivant une semaine de travail comprimée, ainsi que le démontrent les formulaires d’approbation de la pièce U-3.

20 Avant de mettre fin à son témoignage, elle a indiqué qu’elle était qualifiée en premiers soins (« préposée aux premiers soins »), mais qu’elle n’était plus disponible à ce titre.

21 Enfin, Mme Howick a déclaré qu’elle pouvait faire son travail à partir de 7 h.

22 Kristine Pinkney, qui figure parmi les 153 employés répartis au sein des 11 équipes que compte au total la Division du recouvrement du BSF de Windsor, a ensuite été appelée à témoigner par l’agent négociateur.

23 Mme Pinkney a indiqué qu’elle travaille auprès du grand public dans une proportion inférieure à 50 p. 100 de son temps. Elle interagit aussi avec ses collègues d’autres secteurs du BSF de Windsor pour répondre aux demandes de renseignements. Elle reçoit l’aide et les conseils des superviseurs.

24 De l’avis de Mme Pinkney, elle peut facilement effectuer son travail à partir de 7 h parce qu’en début de journée, elle règle de nombreux détails administratifs en plus d’effectuer ses appels.

25 En contre-interrogatoire, Mme Pinkney a clarifié sa déclaration antérieure selon laquelle elle passe moins de 50 p. 100 de sa journée de travail à traiter avec le grand public, en confirmant que, certains jours, elle travaille avec le public pendant 85 p. 100 de son temps tandis que, d’autres jours, son travail auprès du public peut ne représenter que 10 p. 100 de sa journée de travail.

26 Au cours des 10 dernières années, elle a joué un rôle actif au sein du syndicat, elle a été informée de la plupart des enjeux intéressant le BSF de Windsor, et elle a été membre active du Comité de santé et de sécurité au travail.

27 Mme Pinkney a confirmé qu’elle travaillait selon un horaire de travail comprimé avant le mois de février 2007. Elle a déclaré également que les employés qui travaillent suivant un horaire de travail comprimé souhaitent commencer à 7 h.

28 En contre-interrogatoire, Mme Pinkney a révélé qu’elle avait eu en 2006 des discussions avec ses superviseurs concernant les préoccupations des employés relativement à la possibilité de commencer à travailler avant 7 h 30. L’une de ces préoccupations tenait à la disponibilité des préposés aux premiers soins. La supervision en matière de sécurité figurait aussi au nombre des préoccupations.

29 Mme Pinkney a confirmé qu’elle connaissait l’existence des dispositions du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2(le « Code »), relatives à la santé et à la sécurité, ainsi que les responsabilités et obligations respectives des parties. Elle a confirmé également qu’elle connaissait l’existence du Code criminel, L.R.C. (1985) ch. C-46, qui s’applique aux questions de santé et de sécurité au travail.

30 Mme Pinkney a confirmé qu’elle n’avait pas été étonnée de recevoir la directive sur les heures de travail parce que le contenu de celle-ci avait auparavant fait l’objet de discussions informelles avec des représentants syndicaux.

31 Dans le contexte de son explication et de ses commentaires portant sur le document relatif aux heures d’inoccupation, Mme Pinkney a reconnu que la direction a le droit d’établir et de modifier les heures de travail, sous réserve de la convention collective.

32 La teneur de ces documents et d’autres documents se rapportant aux heures de travail a fait l’objet de discussions régulières par le Comité mixte syndical-patronal, dont Mme Pinkney était une membre active. Lors de réunions consultatives conjointes, l’agent négociateur et la direction ont élaboré puis se sont échangés des renseignements précieux sur les questions intéressant les parties, comme les heures du BSF et la santé et la sécurité. Toutes les questions ont été élaborées et discutées conjointement et ouvertement.

33 Enfin, en contre-interrogatoire, Mme Pinkney a reconnu que la question des heures de travail revenait régulièrement à l’ordre du jour. Le procès-verbal d’une réunion tenue le 10 novembre 2004 (pièce E-8), indique, à la page 3, au premier paragraphe, que la question a fait l’objet d’une discussion. [Traduction] « Les heures de travail couvrent la période de 7 h 30 à 17 h; en conséquence, les heures de travail des employés doivent se situer dans cette période […] ».

34 En troisième lieu, l’agent négociateur a appelé à témoigner Jim Jenks, qui travaille depuis 19 ans au BSF de Hamilton. Depuis le mois de juin 2006, M. Jenks occupe le poste de vérificateur principal au bureau, dans le cadre duquel ses activités consistent principalement à effectuer la vérification des petites entreprises et des dépenses des particuliers.

35 M. Jenks commence à travailler à 7 h 30 depuis 2005.

36 Il s’est reporté à la Politique sur les heures de travail, datée du mois de juillet 2003, qui établit la période fixe pour tous les employés de l’ARC de Hamilton, qui doivent commencer à travailler à 7 h 30.

37 Il a produit en preuve également la pièce U-12, qui consiste en la description de travail des vérificateurs principaux au bureau. Celle-ci décrit les activités principales dont ses différentes fonctions sont assorties, ainsi que les responsabilités et les compétences requises pour atteindre un rendement efficace.

38 À la page deux, l’on peut lire que le vérificateur [traduction] « […] effectue la vérification et l’examen des déclarations de revenus des contribuables, des livres, des registres, des rapports concernant les contribuables et des documents fournis à l’appui, afin de contrôler, de confirmer et d’assurer la conformité aux lois qu’applique l’ARC ».

39 La description précise également que le vérificateur [traduction] « […] prépare les documents de travail, les lettres et les rapports à l’appui du travail achevé et discute des cotisations ou nouvelles cotisations proposées, des pénalités et des intérêts/documentations, questions de procédure et litigieuses avec les contribuables et/ou leurs représentants ».

40 Elle prévoit à la page quatre que le vérificateur :

[Traduction]

[…] obtient et fournit de l’information, des conseils, des options et des recommandations, des explications, des instructions et des directives concernant la loi fiscale, les problèmes, rajustements et conclusions se rapportant à une vérification/un examen à l’intention ou provenant des contribuables et de leurs représentants, des employés de l’ARC et d’autres personnes, comme les avocats du ministère de la Justice. Certaines questions fiscales peuvent nécessiter la négociation d’un règlement. Le degré de difficulté s’accroît lorsqu’il faut composer avec des contribuables dont les connaissances du domaine sont parfois insuffisantes et/ou qui cherchent l’affrontement ou connaissent mal les transactions en cause.

41 Elle prévoit également que le vérificateur doit :

[Traduction]

[…] communiquer une information fiscale parfois complexe pendant des entrevues avec des contribuables et convaincre ces derniers ou leurs représentants que les rajustements sont corrects. Les contribuables ont souvent un point de vue différent, et les vérificateurs/examinateurs doivent défendre le point de vue de l’ARC en utilisant un langage adapté aux connaissances du contribuable/représentant. Il fournit des interprétations et des clarifications aux contribuables et aux représentants, de manière à s’entendre sur les résultats de la vérification. Il offre aux contribuables des conseils sur la tenue des livres et des registres, les renseignements qu’ils doivent conserver et la période pendant laquelle ils doivent les conserver dans les déclarations de revenus futures, accroît la conformité et facilite les vérifications subséquentes.

42 En contre-interrogatoire, M. Jenks a indiqué qu’aucun contribuable ou représentant d’un contribuable ne lui avait demandé de le rencontrer avant 7 h 30.

B. Pour l’employeur

43 Dans ses remarques préliminaires, l’avocate de l’employeur a indiqué que les faits et les facteurs créant l’environnement nécessaire aux fins des nécessités du service peuvent bien différer et, dans de nombreux cas, diffèrent effectivement entre les divers BSF.

44 L’avocate de l’employeur a indiqué que le droit que garantissent les dispositions de la clause 25.08 de la convention collective n’est pas celui de travailler pendant les heures en question, mais celui de demander et d’obtenir l’autorisation de travailler pendant ces heures. En outre, ce droit est assujetti aux nécessités du service. En revanche, la demande ne peut être refusée sans motif valable.

45 L’avocate de l’employeur a souligné qu’en dépit de l’application de la convention collective à l’échelle nationale, les directeurs de deux BSF distincts ont dans cette affaire énoncé dans leurs grandes lignes les considérations et les facteurs à prendre en considération pour déterminer les heures d’ouverture de leur BSF respectif.

46 Sur ce point, l’avocate de l’employeur a indiqué qu’elle démontrerait qu’en dépit des structures différentes des BSF de Windsor et de Hamilton, nombre des facteurs relèvent à juste titre de la portée de ce que chaque directeur de BSF a déterminé et qu’ils relèvent de la portée des nécessités du service de chaque endroit.

47 L’avocate de l’employeur a reconnu également l’existence d’une pratique qui avait auparavant été approuvée pour deux employées de Windsor, à savoir Mmes Howick et Pinkney, qui commençaient à travailler avant 7 h 30.

48 Cependant, l’avocate de l’employeur a souligné qu’aucun autre employé du BSF de Windsor n’a établi en preuve l’existence d’une telle pratique antérieure. En ce qui concerne le BSF de Hamilton, il n’y a aucune preuve de l’existence d’une pratique antérieure suivant laquelle un employé commençait à travailler avant 7 h 30.

49 Le premier témoin appelé par l’employeur a été Jim Durling. Ce dernier a commencé à travailler pour l’ARC en 1974 et il a travaillé pendant plus de 35 ans au sein de différents BSF en Ontario, en tant que membre de la direction; il a occupé le poste de directeur par intérim du BSF de Windsor jusqu’à son départ à la retraite, le 19 juin 2009.

50 De 1988 à 1991, M. Durling occupait le poste de directeur adjoint du BSF de Belleville, où les heures de travail couvraient la période de 7 h 30 à 17 h.

51 Il a témoigné que, pour London, Thunder Bay et toutes les régions du sud de l’Ontario, les heures de travail couvraient la période de 7 h 30 à 17 h pour un éventail de raisons et de facteurs touchant, de manière générale, aux nécessités du service et aux questions d’efficacité.

52 M. Durling a déclaré dans son témoignage que le BSF de Windsor est ouvert au public de 8 h 15 à 16 h 30. En plus des heures d’ouverture au public, d’autres employés de l’administration centrale et les contribuables peuvent prendre rendez-vous au BSF de Windsor à compter de 7 h 30. Les contribuables qui se présentent au BSF sont accueillis par les commissionnaires, qui demandent aux employés concernés du BSF de se rendre au rez-de-chaussée pour y rencontrer leurs invités.

53 M. Durling a versé en preuve la pièce E-8, datée du 9 novembre 2004, la pièce E-9, datée du 16 juillet 2003, et il s’est reporté à la pièce U-6, datée du 23 février 2007, toutes rédigées par le directeur du BSF de Windsor, Michael Spencer. Les trois pièces indiquent clairement que les employés du BSF de Windsor commencent à travailler à 7 h 30 depuis longtemps. La politique sur les heures de travail pour Hamilton (pièce E-9), datée du 16 juillet 2003, est reproduite ci-après :

[Traduction]

ADRC HAMILTON - […]
POLITIQUE SUR LES HEURES DE TRAVAIL

En tant qu’employés de l’ADRC de Hamilton, nous sommes tous responsables aux fins d’exécuter le mandat de l’Agence, qui consiste à fournir à nos clients (internes et externes) les services équitables et de qualité auxquels ils ont droit, dans un délai opportun. L’un des meilleurs moyens d’atteindre cet objectif consiste à faire en sorte qu’un nombre suffisant d’employés soient disponibles pour fournir ces services au moment où ils sont requis, pendant les heures d’ouverture, soit de 8 h 15 à 17 h.

Période fixe

Pour répondre aux besoins personnels de la majorité de nos employés et pour maintenir notre engagement de fournir des services de qualité à nos clients, la période des heures fixes pour le personnel de l’ADRC de Hamilton, au 55, rue Bay, et au 120, rue King Ouest, est la suivante : 7 h h 30 à 17 h. Les heures de travail de tous les employés doivent être prévues dans les limites de cette période, et chaque division doit veiller à ce qu’un nombre suffisant d’employés soient disponibles pour les clients internes et externes pendant les heures d’ouverture du bureau, de 8 h 15 à 17 h.

Nécessités du service

Les nécessités du service, telles qu’elles sont établies par l’équipe de gestion de la division, serviront à déterminer l’heure d’arrivée au travail et l’heure de départ (les heures de travail) des employés qui travaillent au sein de cette division. Les « nécessités du service » sont définies comme étant – le travail qui doit être accompli compte tenu des ressources disponibles dans les délais requis. Elles reposent sur des facteurs comme – le nombre d’employés, la nature du travail, le degré de planification de la charge de travail et de l’horaire de celle-ci, le type de clients et leurs heures de disponibilité.

Il existe des différences au niveau des nécessités du service entre les diverses divisions de l’ADRC de Hamilton. En conséquence, les employés d’une division peuvent devoir être présents à certaines heures en plus grand nombre que les employés d’une autre division.

Présence de la direction

Pour assurer le maintien en tout temps d’un environnement de travail sain et sécuritaire pour les employés, il faut absolument qu’un nombre suffisant de superviseurs soient disponibles à chaque étage pour tous les employés au cours de la période fixe. Le directeur adjoint veille à ce que la direction soit présente pendant les heures d’ouverture au cours desquelles leurs employés ont été autorisés à travailler et à l’extérieur de celles-ci. Chaque division déterminera l’exigence minimale au niveau de la présence d’une supervision.

Souplesse

Pour répondre aux changements en évolution de nos activités et/ou de nos clients, nous devons reconnaître combien il est important de faire preuve de souplesse. Dans certaines circonstances, il sera nécessaire pour les employés de modifier leurs heures de travail ou les congés auxquels ils ont droit en vertu de leur horaire de travail comprimé pour permettre une formation et la tenue de rencontres et de rendez-vous avec les clients. Dans la mesure du possible, le gestionnaire superviseur donnera un avis préalable aux employés qui travaillent suivant un horaire de travail comprimé ou un horaire variable pour assurer leur disponibilité.

S’il existe des circonstances atténuantes où un employé et le client doivent se rencontrer en dehors des heures d’ouverture du bureau et pendant les heures de travail de l’employé, le gestionnaire superviseur doit donner son autorisation à cet égard.

Si les employés ont besoin d’un accès après les heures d’ouverture, le chef d’équipe/gestionnaire doit en informer ATS par courriel ou remplir le formulaire d’accès en dehors des heures d’ouverture accordant à l’employé un accès prolongé.

54 Le contenu de ces pièces a été publié, il a fait l’objet de discussions avec tous les employés, y compris les fonctionnaires, et il a été officiellement mis en place par la direction à la suite de longues consultations entre les représentants des parties.

55 Le 12 janvier 2007, à la demande de M. Spencer, Doug Fleming a mené un sondage sur les heures d’ouverture. Les résultats sont reproduits dans la pièce E-12. Ils établissent qu’à quelques exceptions près, la journée de travail au sein de l’ARC en Ontario commence à 7 h 30. L’une des exceptions, attribuable aux nécessités du service, est le Centre d’appel de l’Ontario, qui est ouvert de 7 h à 23 h. D’après Bert Strawberry, du Centre d’appel :

[Traduction]

[…] [n]ous avons une charge de travail nationale qui couvre tous les fuseaux horaires. Les agents doivent travailler suivant un cycle de huit semaines, compte tenu des nécessités du service. Nous tenons bien compte des quarts de travail préférés et les attribuons aussi équitablement que possible. Nous ne travaillons pas selon un horaire de travail variable ou comprimé. Les superviseurs travaillent pendant les mêmes heures de travail.

56 M. Durling a déclaré dans son témoignage que les heures normales et la période fixe pour les employés sont identiques, à savoir de 7 h 30 à 17 h, du lundi au vendredi.

57 En novembre 2005, l’ARC a diffusé une note de service sur les heures d’inoccupation (les heures travaillées en dehors des heures normales), qui a été signée par le syndicat et par la direction. L’ARC a soulevé d’importantes réserves touchant la sécurité et la santé des employés travaillant seuls de nouveau le 20 février 2006, dans un avis que M. Durling a produit dans la pièce E-1.

58 Cet avis témoigne des réserves de l’ARC :

[Traduction]

Avis

La sécurité et le bien-être de l'employé qui est tenu de travailler seul est une source de préoccupation, si, en cas d'urgence ou de blessure grave, il ne peut être secouru rapidement.

Cet avis veut rappeler aux ministères et organismes la nécessité d'établir des mesures de prévention et de protection afin d'assurer la sécurité de l'employé qui travaille seul, et la nécessité de prévoir le secours éventuel de cet employé en temps et lieu utiles.

Les comités mixtes locaux de sécurité et d'hygiène professionnelles devraient revoir méthodiquement les diverses circonstances où un employé est tenu de travailler seul afin de recommander les moyens les plus sûrs et les plus pratiques de le secourir si son travail comporte des risques importants.

À cet égard, ils devraient :

a.  examiner les règles et les méthodes de travail dans les situations où l'on travaille seul;

b.vérifier si le matériel et la marche à suivre sont appropriés aux cas particuliers;

c.  s'assurer que les systèmes d'urgence et les mécanismes de surveillance sont adéquats;

d.  veiller à ce que la formation et l'information données à l'employé soient pertinentes quant à l'utilisation de matériel de survie, d'équipement et de vêtements protecteurs, et de systèmes de communication ou de surveillance.

De nombreuses normes relatives à l'hygiène et à la sécurité professionnelles de la fonction publique traitent déjà de la sécurité et de la santé des personnes qui travaillent seules, notamment les directives suivantes du Conseil du Trésor: 2-3 (Directive sur l'électricité), 2-7 (Directive sur les espaces clos dangereux), 2-10 (Directive sur la manutention des matériaux) et 2-11 (Directive sur l'utilisation des véhicules à moteur). Le Conseil national mixte révise périodiquement les directives d'hygiène et de sécurité professionnelles. À mesure que chaque directive sera examinée, on veillera à y ajouter, le cas échéant, les mentions nécessaires pour assurer la sécurité et le bien-être de l'employé qui doit travailler seul.

[Je souligne]

59 Finalement, le 2 octobre 2006, l’ARC a diffusé la [traduction] « Politique sur les premiers soins et la santé et la sécurité » suivante (pièce E-11), en réponse notamment aux préoccupations des employés travaillant seuls ou travaillant pendant les heures d’inoccupation :

[Traduction]

Rôles et responsabilités

Gestionnaire :

Avant d’affecter des employés à un lieu de travail, le gestionnaire doit :

a) s’assurer que le lieu de travail a à sa disposition un service de transport par ambulance ou autre moyen de transport acceptable des employés blessés ou malades vers un service de soins de santé ou un établissement de traitement médical;

b) prévoir un moyen d’appeler rapidement le service d’ambulance ou un autre moyen de transport acceptable au lieu de travail.

N.B. Cela inclut les dispositions prises pour assurer le transport vers un établissement médical au besoin, et les coûts de celui-ci.

c) veiller à ce que chaque poste de premiers soins soit inspecté régulièrement, au moins une fois par mois, et à ce que le contenu en soit propre, sec et en bon état.

d) veiller à ce qu’un nombre suffisant de préposés aux premiers soins soient disponibles pour prodiguer des premiers soins pendant les heures d’ouverture :

  1. au moins un préposé sera disponible en tout temps à un endroit pendant chaque quart ou période de travail;
  2. la sélection, le nombre, le lieu et la formation des préposés aux premiers soins seront déterminés en consultation avec le comité de santé et de sécurité au travail ou un représentant de celui-ci.

e)  veiller à ce que tous les préposés aux premiers soins soient informés de la teneur de la Politique sur l’indemnisation des fonctionnaires de l’État et sur la prestation de services juridiques à ces derniers.

60 M. Durling a déclaré dans son témoignage qu’à cette époque, le groupe de l’ARC de Windsor comptait environ 23 préposés aux premiers soins.

61 M. Durling a indiqué aussi que, si un employé travaillait en dehors de la période fixe de 7 h 30 à 17 h, il fallait qu’un préposé aux premiers soins soit présent.

62 Pour reprendre les propos de M. Durling, les nécessités du service sont des activités et des facteurs qui permettent à l’établissement de fonctionner avec efficience et efficacité.

63 En conclusion, M. Durling a indiqué que l’employeur est responsable de la santé et de la sécurité de tous les employés, qu’il doit rendre des comptes à cet égard, et qu’environ 360 employés travaillent au BSF de Windsor. Il a souligné également qu’il était membre du Comité mixte patronal-syndical au BSF de Windsor et qu’il prenait une part active à ses activités.

64 En contre-interrogatoire, M. Durling a déclaré qu’ainsi qu’il est prévu au paragraphe 2 de la pièce U-6, les facteurs suivants relèvent tous de la définition de nécessités du service :

[Traduction]

1. Le Code canadien du travail (c.-à-d. la présence de préposés aux premiers soins).

2. La présence d’une supervision sur les lieux.

3. La sécurité du personnel et des biens de l’Agence.

4. Les nécessités du service – l’exécution de programmes à l’intention de la population canadienne.

65 Trudy Kraker a témoigné en deuxième lieu pour le compte de l’employeur. Au cours des sept dernières années, elle a occupé un poste de gestionnaire de la vérification à Hamilton.

66 Elle a entrepris sa carrière au sein de l’ARC en 1982. Elle a travaillé dans les secteurs et de l’exécution et de la vérification dans de nombreux endroits en Ontario, à plusieurs titres et au sein de plusieurs divisions.

67 Mme Kraker a déclaré dans son témoignage qu’à toutes les époques pertinentes relativement à la présente affaire, Brookfield était le propriétaire de l’immeuble de la rue Bay à Hamilton, dont l’ARC était une locataire, et qu’il fallait utiliser une carte magnétique pour accéder aux ascenseurs de chaque étage, sauf le neuvième.

68 Mme Kraker était la gestionnaire de l’équipe du bureau de M. Jenk. Pour la période pertinente aux fins des présents griefs, la période fixe pour tous les employés du BSF de Hamilton allait de 7 h 30 à 17 h, et les heures de service au grand public allaient de 8 h 15 à 17 h. Les heures d’inoccupation répondaient à des situations anormales en dehors de ces heures.

69 Mme Kraker a indiqué dans son témoignage qu’[traduction] « […] un environnement de travail sain et sécuritaire […] » signifie que l’employeur doit s’assurer de la présence d’une sécurité dans l’immeuble. Il signifie également que, pour la sécurité des bureaux, notamment les salles d’entrevue, il doit y avoir un représentant officiel de l’immeuble, que chaque étage doit compter un nombre suffisant de préposés aux premiers soins, et que la présence constante d’un superviseur est requise.

70 En contre-interrogatoire, Mme Kraker a déclaré que les coûts associés à ces facteurs, dont la présence des commissionnaires, les questions touchant les besoins suffisants et conformes en matière de santé pour tous les employés et les questions touchant les besoins en matière de sécurité, avaient nécessité l’ajout d’un chef d’équipe, qui était affecté au BSF de Hamilton au contrôle et à l’établissement de l’incidence de ces coûts, en tant que membre de l’équipe de vérification.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour l’agent négociateur

71 Le représentant de l’agent négociateur, Douglas Hill, a fait valoir que la décision dans la présente affaire dépendra de l’interprétation donnée aux nécessités du service, expression qui doit être interprétée de manière restrictive.

72 M. Hill a réitéré que le libellé de la clause 25.08 de la convention collective est obligatoire, que les employés ont le droit à des heures variables, commençant à 7 h, et que les demandes des employés ne peuvent être rejetées sans motif valable.

73 M. Hill a souligné le fait que l’employeur doit faire preuve de bon sens en ce qui a trait aux nécessités du service.

74 Le représentant de l’agent négociateur a indiqué que les témoins, Mmes Howick et Pinkney, qui travaillent à Windsor, avaient toutes deux fait la preuve, non contestée, de l’existence d’une pratique selon laquelle, au cours de la période de 2003 à 2006, elles commençaient à travailler à 7 h.

75 En outre, M. Hill a fait valoir que l’employeur n’a produit aucune preuve fondée sur les nécessités du service.

76 Le représentant de l’agent négociateur a conclu que la pièce U-6 (voir le paragr. 13 de la présente décision) et la réponse au troisième palier, applicable au BSF de Windsor, offrent toutes deux une liste des raisons pour lesquelles l’employeur a fixé l’heure d’arrivée au travail à 7 h 30. L’agent négociateur soutient que les nécessités du service ne peuvent être déterminées sur le fondement de facteurs comme 1) le Code (c.-à-d., la présence de préposés aux premiers soins); 2) la présence d’une supervision sur les lieux; ou 3) la sécurité du personnel et des biens de l’ARC.

77 En outre, le représentant de l’agent négociateur a déclaré que la Politique sur les heures de travail, qui s’applique au BSF de Hamilton, exclut des nécessités du service les considérations et les conditions liées à la supervision et à la santé et la sécurité des employés sur les différents étages de l’immeuble. Le document définit les nécessités du service dans les termes suivants :

[Traduction]

[…]

[…] Les « nécessités du service » sont définies comme étant – le travail qui doit être accompli compte tenu des ressources disponibles dans les délais requis. Elles reposent sur des facteurs comme – le nombre d’employés, la nature du travail, le degré de planification de la charge de travail et de l’horaire de celle-ci, le type de clients et leurs heures de disponibilité.

[…]

[Je souligne]

78 En conclusion, le représentant de l’agent négociateur a déclaré que les seules nécessités du service qui devraient être prises en considération dans la présente affaire sont celles qui sont énoncées précédemment.

79 À l’appui de sa prétention, le représentant de l’agent négociateur a invoqué les trois cas suivants :

1) Cloutier c. Conseil du Trésor (ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CRTFP 46;

2) Beaulieu c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration Canada), dossiers de la CRTFP 166-02-16083 à 16085 (19870804);

3) Canada (procureur général) c. Degaris, [1994] 1 C.F. 374.

80 Le représentant de l’agent négociateur a fait valoir avec égard que les motifs énoncés dans l’argument de l’employeur touchant la supervision, la santé et la sécurité, et les dispositions du Code, ne relèvent pas des nécessités du service, que les huit griefs devraient être accueillis, et que la mesure de redressement demandée – une heure d’arrivée à 7 h – ne devrait pas être refusée sans motif valable.

B. Pour l’employeur

81 En réponse à la thèse de l’agent négociateur selon laquelle l’employeur n’a produit aucune preuve des nécessités du service, l’avocate de l’employeur, Debra Prupas, soutient que celle-ci repose sur une fausse prémisse, suivant laquelle les nécessités du service renvoient à un seul facteur – l’exécution de programmes et la prestation de services à l’intention de la population canadienne.

82 L’avocate de l’employeur a qualifié l’approche de l’agent négociateur d’étroite et de très restrictive, et a fait valoir qu’elle donnait une définition inacceptable des nécessités du service.

83 D’après l’avocate de l’employeur, il ne fait aucun doute que [traduction] « […] l’exécution de programmes à l’intention de la population […] » constitue l’un des nombreux facteurs relevant des nécessités du service et en faisant partie. De nombreux facteurs entrent en jeu et ont un lien direct dans la fourniture d’un produit ou la prestation d’un service de qualité en temps opportun à la population canadienne, ainsi qu’il est établi dans la preuve documentaire et testimoniale.

84 L’avocate de l’employeur a souligné que, lorsque les situations factuelles au travail dans la présente affaire ont été examinées, la preuve non contredite a permis de constater que les heures de travail des différents BSF sont différentes, selon le témoignage de Mme Pinkney en contre-interrogatoire.

85 D’après les témoins de l’employeur, Mmes Durling et Kraker, la période fixe signifie que le bureau est ouvert aux BSF de Windsor et de Hamilton de 7 h 30 à 17 h, et cette période fixe est en vigueur depuis plusieurs années.

86 Cette période fixe non contredite (de 7 h à 17 h) pour les employés est différente des heures d’accès au grand public qui, aux BSF de Windsor et de Hamilton, commencent à 8 h 15. Encore une fois, ces heures d’accès au grand public sont en place depuis de nombreuses années, contrairement aux affirmations des témoins appelés par l’agent négociateur.

87 La preuve de l’employeur déposée par la voie de la pièce E-12 (sondage sur les heures de travail des BSF de l’Ontario) confirme la preuve des heures de travail des employés (période fixe) et des heures d’accès au grand public aux BSF de Windsor et de Hamilton.

88 La pièce E-12 établit en outre de manière non contredite que certains BSF ont des heures d’ouverture différentes en raison des nécessités du service. Cela est expliqué à la page 5 de la pièce E-12 pour le BSF de Barrie et à la page 6 de la même pièce pour le Centre d’appel de l’Ontario.

89 Mme Kraker a déclaré dans son témoignage que la période entre 7 h et 7 h 30 serait considérée comme couvrant des « heures d’inoccupation ». Le représentant de l’agent négociateur a déclaré que, si M. Jenks devait travailler de 7 h à 7 h 30, ces 30 minutes seraient des « heures d’inoccupation ».

90 La politique sur les « heures d’inoccupation » n’est pas applicable à l’égard des heures normales de travail d’un employé, et cette preuve n’est pas contredite. Les deux témoins de l’employeur ont déclaré que la politique sur les « heures d’inoccupation » était une anomalie.

91 La pièce U-7 est une politique conjointe syndicale-patronale qui concerne les employés qui travaillent seuls pendant les « heures d’inoccupation ». Elle a été signée le 21 novembre 2005 par les coprésidents pour la direction et pour l’agent négociateur du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité.

92 En 2006, l’ARC a diffusé un avis à tous les ministères et organismes concernant les employés qui travaillent seuls (pièce E-1).

93 L’avis témoignait des préoccupations touchant la sécurité et le bien-être des employés qui sont tenus de travailler seuls dans des situations où, en cas de blessure grave ou autres urgences, il pourrait être impossible de les secourir rapidement.

94 La préoccupation de l’ARC touchant la santé, la sécurité et le bien-être des employés qui travaillent seuls a mené à l’adoption de la « Politique sur les premiers soins, la santé et la sécurité ».

95 La politique de l’employeur à l’égard des employés qui travaillent seuls prévoit qu’ils doivent être autorisés à travailler pendant ces périodes, ce qui n’est pas toujours le cas, d’après le témoignage de Mme Howick, qui a déclaré qu’elle travaillait seule les fins de semaine, sans autorisation et sans avoir été tenue par l’employeur de le faire. Lorsqu’elle a travaillé seule à son bureau les fins de semaine, elle n’effectuait pas des tâches normales et elle ne se conformait pas à la directive du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité, telle qu’elle est énoncée dans la pièce U-7.

96 L’avocate de l’employeur a examiné la jurisprudence présentée par le représentant de l’agent négociateur avant de formuler les observations suivantes.

97 Dans Cloutier, les faits étaient complètement différents et ils ne se comparaient aucunement à ceux du présent cas. Mme Prupas a invoqué Gauthier c. Conseil du Trésor (Revenu Canada-Impôt), dossiers de la CRTFP 166-02-14061 et 14062 (19841010). Dans Gauthier, directement pertinent relativement au présent cas, on peut lire ceci aux pages 6 et 7 sur la question de la supervision :

[…]

La clause 18.03 c) de la convention collective pertinente est libellée dans les termes suivants :

Sous réserve des nécessités du service, déterminées de temps à autre par l’Employeur, l’employé a le droit de choisir et de demander de travailler suivant un horaire variable, entre 7 h et 18 h, et cette demande ne peut être refusée sans motif valable.

Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, avoir entendu tous les témoignages et les arguments des représentants des deux parties, avoir examiné le contenu des pièces produites, avoir lu la jurisprudence citée, et avoir pris ma décision en délibéré, je conclus pour les motifs qui suivent que, lorsque l’employeur a refusé les demandes des employés de travailler de 7 h à 7 h 30 parce qu’aucun superviseur n’était alors disponible à l’étage, il avait un motif valide de le faire.

Le directeur – Impôt du district de la région de Québec, H. Doyon, a décidé qu’il fallait au moins un superviseur par étage en tout temps pendant les heures de travail aux bureaux d’impôt de Revenu Canada à Québec. Lorsqu’il a pris cette décision, qui est conforme aux diverses politiques […] le directeur a exercé à mon avis le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par la clause 18.03c). De toute évidence, la supervision des employés pendant leurs heures de travail et à leur lieu de travail est l’une des nécessités du service que le ministère offre au public.

[…]

[Je souligne]

98 L’avocate de l’employeur a fait valoir, sur le fondement de Gauthier et de la Politique sur les heures de travail de l’employeur (plus particulièrement, la présence de la direction), que la supervision au travail fait partie des nécessités du service.

99 Enfin, avant d’aborder la question suivante, l’avocate de l’employeur a souligné qu’un examen approfondi de Gauthier était important dans le présent cas non seulement en ce qui concerne le volet des nécessités du service qui se rapporte à la supervision, mais également en ce qui concerne les autres faits et facteurs énoncés dans Gauthier qui correspondent aux faits du présent cas touchant les heures variables, les semaines de travail comprimées (approximativement le même nombre d’employés dans les deux cas), la santé et la sécurité des employés, et la sécurité des biens pendant les heures de travail de tous les employés. Enfin, dans Gauthier comme dans le cas en l’instance, la jurisprudence des parties renvoie à Richer c. Conseil du Trésor (Revenu Canada – Impôt), dossiers de la CRTFP 166-02-10880 à 10883 (19830808), qui porte spécifiquement sur la question des nécessités du service suivant un régime d’heures variables.

100 La seconde décision produite au cours de l’argumentation de l’agent négociateur est Beaulieu,dans laquelle l’arbitre de grief a tranché en faveur du fonctionnaire s’estimant lésé au motif que l’employeur avait omis de produire une preuve des nécessités du service.

101 Dans le présent cas, l’avocate de l’employeur soutient que Beaulieu ne s’applique pas, puisque l’employeur en l’instance a produit une preuve des nécessités du service. L’avocate de l’employeur affirme que même si l’on adoptait une interprétation restrictive des nécessités du service, il faudrait y inclure une supervision adéquate au travail pendant les heures de travail normales.

102 Le représentant de l’agent négociateur a cité en troisième lieu Degaris, où la Cour fédérale a déterminé qu’un employeur ne peut invoquer les « nécessités du service » comme excuse pour refuser l’autorisation [traduction] « dans les cas où il a omis de prévoir un personnel suffisant pour satisfaire à ses obligations contractuelles, plus particulièrement sur une longue période, et cette omission constitue une atteinte à la convention collective ».

103 L’avocate de l’employeur a écarté cette décision au motif qu’elle ne s’applique pas et qu’elle n’est pas pertinente, car les circonstances factuelles sont complètement différentes, et il n’y a absolument aucune preuve de l’existence de difficultés touchant la dotation dans le présent cas.

104 L’avocate de l’employeur a fait valoir que je devrais adopter un point de vue plus large des nécessités du service.

105 Sur le plan de la responsabilité et de l’obligation, l’employeur est responsable de la santé et de la sécurité au travail. Les deux témoins appelés par l’employeur ont traité de la nécessité d’assurer la sécurité des employés et des biens commerciaux dans leur BSF respectif. Les deux témoins ont déclaré être préoccupés et intéressés par la santé et la sécurité de leurs employés. Les préoccupations dont ils ont fait état étaient d’intérêt mutuel pour les deux parties, ainsi que le démontre fort bien la pièce U-7, qui a été signée conjointement par les coprésidentes pour la direction et pour l’agent négociateur du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité.

106 La question de la sécurité se pose non seulement pour les employés des BSF, mais aussi pour le grand public et à l’égard des locaux lorsque le BSF n’est pas l’unique occupant de l’immeuble. À Hamilton, l’immeuble du BSF sur la rue Bay est loué, et les employés du BSF n’en sont pas les seuls occupants.

107 Les coûts associés à la sécurité, notamment en ce qui a trait à la nécessité de disposer de procédures d’évacuation d’urgence et de pouvoir compter sur la présence de préposés aux premiers soins, d’un représentant officiel de l’immeuble et d’un personnel de supervision, ont été abordés dans le témoignage de Mme Kraker. Ces coûts doivent eux aussi être considérés comme relevant des nécessités du service.

108 De toute évidence, d’après l’avocate de l’employeur, les nécessités du service aux termes de la disposition sur les heures variables de la clause 25.08 de la convention collective et la preuve produite indiquent que les facteurs qui ont une incidence sur ces nécessités du service peuvent varier d’un BSF à un autre. La preuve établit que les facteurs varient bel et bien. Par exemple, l’immeuble est-il loué par l’ARC? Dans l’affirmative, y a-t-il des employés autres que les employés de l’ARC dans cet immeuble loué qui fournissent des services de sécurité ou sont chargés d’assurer la sécurité pour l’immeuble? De l’avis de l’avocate de l’employeur, les nécessités du service incluent clairement des considérations budgétaires concernant la manière dont les services sont attribués au sein d’un BSF donné.

109 L’avocate de l’employeur a fait valoir que, compte tenu des droits qui lui sont conférés et des responsabilités auxquelles elle est tenue, la direction peut aborder n’importe quelle question, et rien ne l’empêche de prendre des décisions sur la manière de mener ses activités et de modifier ces décisions. L’employeur se doit d’aborder toutes les questions.

110 Les nécessités du service sont tous les facteurs et les activités qui permettent à l’entreprise de fonctionner de manière efficiente et efficace. Ces facteurs et ces nécessités du service ne sont pas établis de façon définitive ou immuable, et lorsqu’ils changent, l’employeur doit s’adapter. Il a l’obligation et le droit d’apporter des changements pour demeurer efficace et efficient.

111 Finalement, au terme de son argumentation, l’avocate de l’employeur a déclaré que, si je retenais l’argument de l’agent négociateur sur les nécessités du service, je devrais exclure les faits et les facteurs que l’employeur a cernés en preuve.

IV. Motifs

112 L’une des questions fondamentales à trancher dans le présent cas se rapporte au sens et à la portée des nécessités du service (operational requirements) dans la clause 25.08 de la convention collective. Suivant la preuve, les politiques sur les heures de travail des deux BSF sont en place depuis des années, et elles n’ont été modifiées que de manière négligeable. La réponse, que ce soit une interprétation restrictive des nécessités du service, comme le fait valoir l’agent négociateur, ou une interprétation plus généreuse, comme le propose l’employeur, doit reposer sur l’ensemble de la preuve (documentaire et testimoniale). Cette preuve doit être examinée dans l’intérêt de relations de travail harmonieuses et mutuellement avantageuses entre les parties, ainsi que le prévoit l’article 1 (Objet et portée) de la convention collective.

113 J’ai adopté dans le présent cas une perspective élargie des nécessités du service pour les motifs suivants.

114 La preuve est sans équivoque. La question centrale est couverte par la Politique sur les heures de travail de l’employeur.

115 Aux BSF de Windsor et de Hamilton, la période de travail fixe couvre la période de 7 h 30 à 17 h. Les deux BSF sont ouverts au grand public de 8 h 15 à 17 h.

116 La « Politique sur les heures de travail » qui s’applique à l’égard des deux BSF établit clairement l’existence des préoccupations légitimes de l’employeur, comme la nécessité que des préposés aux premiers soient présents comme le requiert le Code et la nécessité d’assurer la sécurité du personnel et des biens de l’ARC, ainsi que la santé et la sécurité de tous les employés des BSF de Windsor et de Hamilton. En outre, dans la « Politique sur les heures de travail », l’employeur réaffirme qu’il a pour responsabilité d’assurer une supervision appropriée en tout temps.

117 L’employeur n’est pas seulement responsable de la santé et de la sécurité de tous ses employés, il doit également rendre des comptes à cet égard. Le paragraphe 1 de la page 1 de l’avis de l’employeur daté du 20 février 2006 est libellé dans les termes suivants :

[Traduction]

La sécurité et le bien-être de l'employé qui est tenu de travailler seul est une source de préoccupation, si, en cas d'urgence ou de blessure grave, il ne peut être secouru rapidement.

Cet avis veut rappeler aux ministères et organismes la nécessité d'établir des mesures de prévention et de protection afin d'assurer la sécurité de l'employé qui travaille seul, et la nécessité de prévoir le secours éventuel de cet employé en temps et lieu utiles.

Les comités mixtes locaux de sécurité et d'hygiène professionnelles devraient revoir méthodiquement les diverses circonstances où un employé est tenu de travailler seul afin de recommander les moyens les plus sûrs et les plus pratiques de le secourir si son travail comporte des risques importants.

118 Dans le même ordre d’idée que la question de la santé et de la sécurité, l’agent négociateur a produit la pièce U-7, une note de service datée du mois de novembre 2005, adressée aux employés et signée conjointement par les coprésidentes pour la direction et pour l’agent négociateur du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité, sur la question des employés qui travaillent seuls pendant les « heures d’inoccupation ».

119 Les « heures d’inoccupation » renvoient aux situations où les employés travaillent en dehors des heures de travail normales soit pendant la semaine de travail normale, soit pendant les fins de semaine.

120 La pièce U-7 est née des préoccupations du Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité relativement à la possibilité d’une évacuation d’urgence d’un immeuble pendant les « heures d’inoccupation » dans les cas où l’agent de sécurité de l’immeuble ignorerait le nombre d’employés sur les lieux. Le Comité d’orientation national en matière de santé et de sécurité a déterminé que les comités locaux de santé et de sécurité au travail devraient prendre part à l’évaluation des situations où les employés travaillent seuls pendant les « heures d’inoccupation » aux lieux de travail individuels, et à la formulation de propositions à l’intention de la direction locale sur une procédure adaptée aux conditions et aux facteurs locaux.

121 Finalement, en ce qui concerne la santé et la sécurité, l’employeur a produit la pièce E-11, un document intitulé [traduction] « Politique sur les premiers soins, la santé et la sécurité », datée du mois d’octobre 2006, conformément à la partie II du Code.Aux termes de cette politique, qui compte parmi les nombreuses responsabilités de l’employeur, ce dernier doit, avant d’affecter des employés à un lieu de travail, « […] veiller à ce qu’un nombre suffisant de préposés aux premiers soins soient disponibles pour prodiguer des premiers soins pendant les heures d’ouverture : i) au moins un préposé sera disponible en tout temps à un endroit pendant chaque quart ou période de travail; ii) la sélection, le nombre, le lieu et la formation des préposés aux premiers soins seront déterminés en consultation avec le comité de santé et de sécurité au travail ou un représentant de celui-ci ».

122 Il faut prendre en considération également, en ce qui concerne les politiques sur les heures de travail en vigueur aux deux BSF, le fait que l’employeur a le droit de considérer que la supervision du personnel et du lieu de travail relève des nécessités du service.

123 De toute évidence, l’objectif ultime des nécessités du service d’un BSF est la prestation d’un service à la population canadienne. La supervision ou la présence de la direction est l’un de nombreux facteurs, et elle est essentielle pour l’activité en milieu de travail non seulement pour des motifs liés à la supervision, mais, plus important encore, pour permettre que les charges de travail soient planifiées et prévues de manière à répondre aux questions des employés, au besoin, et à assurer la qualité des interactions avec les autres ministères.

124 Les heures variables et les semaines de travail comprimées donnent à penser que les superviseurs et les subalternes arrivent peut-être au travail et en partent peut-être à des heures différentes. En gardant à l’esprit que ce cas concerne plusieurs centaines d’employés aux BSF de Windsor et de Hamilton, le personnel de supervision doit maintenir un contrôle de toutes les activités à exécuter pour éviter de compromettre l’efficience du BSF. Clairement, la supervision est l’une des nécessités du service que les BSF offrent à la population canadienne.

125 Je le répète, après avoir analysé minutieusement la Politique sur les heures de travail, j’en arrive à la conclusion que celle-ci doit être lue dans son intégralité. L’on ne peut pas retenir les seuls éléments qui sont favorables à l’argumentation d’une partie. Après l’avoir lue dans son intégralité, donc, je conclus que la supervision est une partie essentielle des nécessités du service.

126 Le coût est aussi un facteur faisant partie des nécessités du service. Le témoignage non contredit de Mme Kraker sur cette question était clair. En raison de tous les coûts associés aux activités d’une large entreprise, notamment au titre d’éléments comme le chauffage, l’éclairage, la surveillance de la sécurité, les coûts liés à la santé et la sécurité, et autres coûts de fonctionnement, l’employeur a dû ajouter une équipe supplémentaire, chargée de surveiller et de contrôler les coûts aux BSF.

127 Il importe de mentionner et de souligner qu’avant de mettre la dernière main à l’avis du 23 février 2007 et d’en faire l’annonce (pièce U-6), le directeur du BSF de Windsor, Michael Spencer, a fait faire un sondage auprès de tous les BSF de l’Ontario sur la question des heures d’ouverture. Les résultats ont été produits en preuve en tant que pièce E-12 et ils n’ont pas été contredits.

128 Ces résultats montrent que, règle générale, la majorité des BSF de l’Ontario ont établi que la période fixe de leurs employés commence à 7 h 30.

129 En raison des nécessités de leur service, certains BSF ont une période fixe qui varie légèrement de celle des deux BSF en cause dans le présent cas.

130 En revanche, les heures d’ouverture du Centre d’appel de l’Ontario sont fort différentes, puisque les nécessités de ce service diffèrent sensiblement de celles des autres BSF en Ontario. Le Centre d’appel est ouvert de 7 h à 23 h parce qu’il doit répondre à une charge de travail nationale qui couvre tous les fuseaux horaires au Canada. De même, ses agents doivent travailler suivant un cycle de 8 semaines, contrairement aux BSF dans le présent cas, qui fonctionnent selon un cycle de 12 semaines, compte tenu des nécessités du service. Il est important de noter que le Centre d’appel de l’Ontario n’offre pas le régime des heures variables ou de la semaine de travail comprimée, comme le font les deux BSF dans le présent cas. Il faut mentionner également que les superviseurs du Centre d’appel de l’Ontario ont les mêmes heures de travail.

131 Lorsqu’ils fournissent des services à la population canadienne, les BSF doivent également satisfaire à la nécessité impérieuse de se conformer aux lois en vigueur. Dans le présent cas, la direction doit se conformer au Code dans la mesure où ses dispositions sur la santé et la sécurité s’appliquent, tout en se conformant aux dispositions de l’article 22 de la convention collective, qui est libellé dans les termes suivants :

**ARTICLE 22

SANTÉ ET SÉCURITÉ

22.01 Les parties reconnaissent le Code canadien du travail (CCT), Partie II, ainsi que toutes les dispositions et règlements qui en découlent, comme l’autorité gouvernant la santé et la sécurité au travail à l’Agence des douanes et du revenu du Canada.

132 Il ne fait aucun doute qu’une exigence législative aussi impérieuse à laquelle les parties sont tenues doit être considérée comme étant un facteur directement lié aux nécessités du service.

133 La preuve établit l’existence d’une pratique passée suivant laquelle deux employées, Mmes Howick et Ponkney, qui ont toutes deux témoigné, commençaient à travailler à 7 h. L’employeur a reconnu que cette pratique a été maintenue pendant quatre ans à l’égard de Mme Howick et pendant environ un an pour Mme Pinkney, et qu’il y a été mis fin en février 2007. Depuis, ces deux employées commencent à travailler à 7 h 30.

134 La preuve montre que, parmi les employés du BSF de Windsor, seules ces deux employées commençaient à travailler avant 7 h 30. En outre, il n’y a aucune preuve devant moi que des employés du BSF de Hamilton commençaient à travailler avant 7 h 30.

135 Il y a lieu de noter que les deux BSF comptent au total plusieurs centaines d’employés.

136 Cependant, selon une preuve non contredite, les employés qui travaillent selon un horaire variable au sein des deux BSF commencent à travailler à 7 h 30 depuis de nombreuses années.

137 Enfin, rien ne m’a été prouvé en ce qui concerne l’existence d’une promesse qui aurait été faite à Mme Howick ou à Mme Pinkney de maintenir la pratique passée.

138 Par conséquent, je ne retiendrai aucune question de préclusion.

139 Il est loisible à la direction d’établir, de prévoir et de modifier les heures de travail de ses employés conformément aux dispositions de la convention collective, tout en considérant tous les facteurs nécessaires pour mener une entreprise efficiente et efficace. Il ressort clairement des pièces U-6 et E-9 respectivement ce qui suit : « […] un certain nombre de facteurs doivent être pris en considération », et « […] les nécessités du service, […] telles qu’elles sont établies par l’équipe de gestion de la division, serviront à déterminer l’heure d’arrivée au travail et l’heure de départ (les heures de travail) des employés qui travaillent au sein de cette division [je souligne] ».

140 Des services de qualité doivent être fournis en temps opportun à la population canadienne, compte tenu de tous les facteurs mentionnés précédemment dans la présente décision, notamment du droit de la direction de déterminer le nombre suffisant d’employés de supervision sur les lieux en vue de planifier, de prévoir et de superviser tous les besoins et toutes les activités au quotidien — dont les urgences — qui mettent en cause des employés et des membres de la population ainsi que des clients au lieu de travail, et d’y répondre le cas échéant.

141 Ces droits de la direction sont assortis de l’obligation de se conformer pleinement aux dispositions du Code qui s’appliquent à l’égard de la santé et de la sécurité de ses employés au travail, de même qu’à l’égard de la sécurité du public qu’il sert quotidiennement.

142 Compte tenu de la prépondérance de la preuve, l’on ne peut raisonnablement conclure que les nécessités du service consistent en un seul facteur – fournir des services au public. Au contraire, j’en arrive à la conclusion que la preuve appuie une définition plus générale des nécessités du service, qui laisse place aux préoccupations en matière de santé et de sécurité.

143 Comme je suis d’avis que les nécessités du service, définies en des termes généraux, justifient la décision de l’employeur de refuser les demandes des fonctionnaires, il s’ensuit que celles-ci n’ont pas été « refusées sans motif valable ».

144 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

145 Les huit griefs sont rejetés.

Le 18 février 2010.

Traduction de la CRTFP  

Roger Beaulieu,
arbitre de grief

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