Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé a été renvoyé en cours de stage - son agent négociateur a renvoyé son grief à l’arbitrage, invoquant un licenciement disciplinaire déguisé et un renvoi en cours de stage fait de mauvaise foi - l’agent négociateur n’a pas représenté le fonctionnaire s’estimant lésé à l’arbitrage - l’administrateur général a contesté la compétence d’un arbitre de grief pour instruire le grief - le fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas répondu à l’objection de l’administrateur général - l’arbitre de grief a décidé de trancher l’affaire sans tenir d’audience - elle a conclu qu’un renvoi en cours de stage est un licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique - de plus, l’arbitre de grief a conclu que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ne l’habilite pas à entendre un grief individuel portant sur un licenciement aux termes de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique - enfin, elle a conclu qu’en raison de l’omission du fonctionnaire s’estimant lésé de répondre à l’objection de l’administrateur général, elle n’avait devant elle aucune allégation de fait qui, si elle était établie, lui attribuerait la compétence d’entendre le grief sous le régime de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. Objection accueillie. Dossier clos.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-04-20
  • Dossier:  566-02-3243
  • Référence:  2010 CRTFP 54

Devant un arbitre de grief


ENTRE

AMRIT RAI

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Agence des services frontaliers du Canada)

défendeur

Répertorié
Rai c. Administrateur général (Agence des services frontaliers du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Lui-même

Pour le défendeur :
Hélène Mombourquette, Agence de services frontaliers du Canada

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
en date du 2 décembre 2009.
(Traduction de la CRTFP)

Grief individuel renvoyé à l’arbitrage

1      Le fonctionnaire s’estimant lésé, Amrit Rai (le « fonctionnaire »), a été embauché le 5 novembre 2007, au poste d’agent des services frontaliers pour l’Agence des services frontaliers du Canada (l’« employeur »). Comme le fonctionnaire a été embauché de l’extérieur de la fonction publique pour une période indéterminée, il était assujetti à une période de stage de 12 mois aux termes des dispositions de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP), édictée par les articles 12 et 13 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, et du Règlement sur l’emploi dans la fonction publique, DORS/2005-334. Le fonctionnaire a été rejeté en cours de stage le 20 octobre 2008.

2      Le 28 octobre 2008, le fonctionnaire a déposé un grief énonçant ce qui suit :

[Traduction]

Je conteste par ce grief mon renvoi injuste en cours de stage au poste d’ASF, le 20 octobre 2008.

3      À titre de mesure corrective, le fonctionnaire a demandé ce qui suit :

[Traduction]

Que ma lettre de rejet en cours d’emploi, datée du 20 octobre 2008, soit annulée et que je sois rétabli au poste d’ASF avec effet rétroactif au 20 octobre 2008, ainsi que toute autre mesure corrective pouvant s’appliquer dans les circonstances.

4      La décision non datée rendue au dernier palier de la procédure de règlement des griefs se lit comme suit :

[Traduction]

[…]

Décision du représentant de la direction

La présente fait suite à votre grief dans lequel vous contestez le fait d’avoir été injustement renvoyé en cours de stage au poste d’agent des services frontaliers (ASF), le 20 octobre 2008. Comme mesure corrective, vous demandez d’être rétabli au poste d’ASF avec effet rétroactif, ainsi que toute autre mesure corrective appropriée.

J’ai examiné attentivement l’information entourant votre grief, ainsi que la représentation faite en votre nom par votre représentant du SID.

Je crois comprendre que, pendant que vous occupiez votre poste à l’aéroport de Hamilton, vous auriez été en cause dans deux incidents : dans le premier, vous auriez envoyé des courriels inappropriés et, dans le deuxième, vous auriez accepté d’un client des billets pour un combat de boxe extrême. Ces deux incidents ont été signalés à la Division des affaires internes (DAI). Dans le cadre de son enquête, la DAI a conclu que, même si vous aviez envoyé ces courriels, ceux-ci n’ont pas été jugés comme étant inappropriés en application de la Politique sur l’utilisation des ressources électroniques de l’ASFC. L’enquête a également conclu que vous avez accepté des billets pour le combat de boxe, même s’il a été impossible de démontrer que les billets ont été acceptés à titre de pot-de-vin.

Cependant, la manière dont vous vous êtes comporté lors des réunions pour établir les faits et, par la suite, lors de l’enquête de la DAI, a été une source de préoccupation pour la direction. Vous avez constamment nié avoir commis tout acte fautif et vous avez donné des versions contradictoires des événements tout au long de l’enquête. Beaucoup plus tard, vous avez admis avoir envoyé les courriels et avoir menti parce que vous ne vouliez pas que votre épouse en apprenne le contenu.

Les valeurs de l’ASFC sont fondées sur la fiabilité, l’honnêteté, l’intégrité, le respect et le professionnalisme. À cet égard, le Code de conduite de l’ASFC informe les employés des normes de conduite basées sur des valeurs claires et une éthique qu’ils doivent respecter. Ces normes sont, sans s’y limiter, la responsabilisation, l’intégrité, la coopération aux enquêtes gouvernementales et le refus de cadeaux et autres avantages.

Il ressort clairement que votre conduite n’a pas été conforme à ces valeurs ou à la culture de l’ASFC qui vise à gagner et à conserver la confiance du public par la voie de l’intégrité et du professionnalisme.

Je suis donc convaincu que la direction a agi de bonne foi et qu’elle a exercé dûment le pouvoir lui étant délégué de vous renvoyer en cours de stage parce que vous n’avez pas démontré les qualités personnelles voulues pour exercer les fonctions du poste d’agent des services frontaliers.

Par conséquent, votre grief est rejeté et la demande de mesure corrective ne sera pas accordée.

[…]

5      L’agent négociateur du fonctionnaire a renvoyé le grief à l’arbitrage, le 3 novembre 2009, en invoquant un licenciement disciplinaire déguisé et un renvoi en cours de stage fait de mauvaise foi. Le fonctionnaire n’est pas représenté par son agent négociateur à l’arbitrage.

Objection relative à la compétence

6      Dans une lettre, datée du 2 décembre 2009, l’employeur a contesté la compétence d’un arbitre de grief à instruire le renvoi à l’arbitrage d’un licenciement en application du paragraphe 62(1) de la LEFP. Ce paragraphe autorise l’employeur à renvoyer un employé en cours de stage.

7      Le 9 décembre 2009, le greffe de la Commission des relations de travail dans la fonction publique (le « greffe ») a écrit au fonctionnaire pour lui demander de répondre à l’objection soulevée par l’employeur, au plus tard le 24 décembre 2009. La lettre a été envoyée par courrier recommandé. La date numérisée de la livraison par Postes Canada et de la signature accusant réception de la lettre est le 10 décembre 2009. Le fonctionnaire n’a pas donné suite à la lettre du greffe.

8      Le 5 janvier 2010, le greffe a informé les parties par écrit qu’une audience était inscrite au rôle du 5 au 7 mai 2010, à Hamilton (Ontario).

9      J’ai par la suite été chargée de rendre une décision dans cette affaire.

Motifs

10           Compte tenu de l’objection de l’employeur et des motifs invoqués dans la décision au dernier palier de la procédure de règlement des griefs, et compte tenu que le fonctionnaire a omis de répondre à l’objection de l’employeur, j’ai décidé d’exercer le pouvoir que me confère l’article 227 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), édictée par l’article 2 de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, pour trancher la présente affaire sans tenir d’audience.

11 L’alinéa 211a) de la LRTFP prévoit de la façon suivante qu’un licenciement aux termes de la LEFP n’est pas une question arbitrable :

211. L’article 209 n’a pas pour effet de permettre le renvoi à l’arbitrage d’un grief individuel portant sur

a) soit tout licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique[…]

Le renvoi en cours de stage est un licenciement aux termes de la LEFP.

12  Dans son grief, le fonctionnaire admet avoir été renvoyé en cours de stage. Bien que, lorsqu’il a renvoyé le grief à l’arbitrage, l’agent négociateur ait allégué que le renvoi en cours de stage a été fait de mauvaise foi et constituait une mesure disciplinaire déguisée, le formulaire de présentation du grief ne fait nullement mention de ces préoccupations.

13 La décision de l’employeur au dernier palier de la procédure de règlement des griefs expose en détail les motifs du renvoi en cours de stage. En l’absence d’une explication de la part du fonctionnaire permettant de savoir pourquoi il estime que la décision de l’employeur est empreinte de mauvaise foi ou qu’elle équivaut à une mesure disciplinaire déguisée, je ne dispose d’aucune allégation de fait qui, si elle était prouvée, justifierait que je m’attribue la compétence, en vertu de l’alinéa 209(1)b) de la LRTFP, pour instruire le présent grief comme se rapportant à une mesure disciplinaire entraînant le licenciement.

14 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

15 Je déclare que je n’ai pas compétence pour entendre le présent grief et j’ordonne la fermeture du dossier.

Le 20 avril 2010.

Traduction de la CRTFP

Michele A. Pineau,
arbitre de grief

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