Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a allégué que son agent négociateur ne l'avait pas représenté de manière équitable parce qu'il avait refusé de renvoyer ses griefs à l'arbitrage - l'arbitre de grief a statué que l'agent négociateur n'avait pas agi de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en décidant de ne pas renvoyer les griefs à l'arbitrage. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-05-18
  • Dossier:  561-02-436 à 439
  • Référence:  2010 CRTFP 64

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

MARK HALFACREE

plaignant

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

et

CONSEIL DU TRÉSOR

intervenant

Répertorié
Halfacree c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant des plaintes visées à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, commissaire

Pour le plaignant:
Lui-même


Pour la défenderesse:
Chantal Homier-Nehmé, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'intervenant:
Mark Sullivan, Secrétariat du Conseil du Trésor

Décision rendue sur la base d'arguments écrits
déposés le 19 février, le 29 mars et le 12 mai 2010.
(Traduction de la CRTFP)

Plaintes devant la Commission

1 Le 23 novembre 2009, Mark Halfacree (le « plaignant ») a déposé quatre plaintes contre son agent négociateur, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (la « défenderesse »), alléguant qu’il a contrevenu aux alinéas 190(1)e) et g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »). Les plaintes renvoient aux dispositions suivantes de la Loi :

[…]

190. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

[…]

e) l’employeur ou l’organisation syndicale a contrevenu aux articles 117 (obligation de mettre en application une convention) ou 157 (obligation de mettre en œuvre la décision arbitrale);

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

[…]

185. Dans la présente section, « pratiques déloyales » s’entend de tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188 et le paragraphe 189(1).

[…]

187. Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

[…]

117. Sous réserve de l’affectation par le Parlement, ou sous son autorité, des crédits dont l’employeur peut avoir besoin à cette fin, les parties à une convention collective commencent à appliquer celle-ci :

a) au cours du délai éventuellement prévu à cette fin dans la convention;

b) en l’absence de délai de mise en application, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date de la signature de la convention ou dans le délai plus long dont peuvent convenir les parties ou que fixe la Commission sur demande de l’une ou l’autre des parties.

[…]

157. Sous réserve de l’affectation, par le Parlement ou sous son autorité, des crédits dont l’employeur peut avoir besoin à cette fin, les parties commencent à appliquer les conditions d’emploi sur lesquelles statue la décision arbitrale dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date à compter de laquelle la décision arbitrale lie les parties ou dans le délai plus long dont celles-ci peuvent convenir ou que la Commission peut, sur demande de l’une d’elles, accorder.

[…]

Arguments du plaignant

2 La plainte 561-02-436 se rapporte à un grief déposé par le plaignant, en février 2007, contre l’employeur parce qu’il a refusé de l’autoriser à travailler à la maison ou dans un lieu situé à proximité de son domicile durant une tempête de neige. Le plaignant a demandé à la défenderesse d’assister à l’audition du grief à tous les paliers de la procédure de règlement des griefs, mais elle ne l’a pas fait. La défenderesse a également refusé de renvoyer son grief à l’arbitrage.

3 La plainte 561-02-437 se rapporte à un grief déposé par le plaignant, en mai 2007, contre l’employeur, alléguant notamment qu’il a abusé de ses pouvoirs et négligé de prendre des mesures d’adaptation pour tenir compte de son problème médical. Le plaignant a allégué que la défenderesse n’a pas défendu ses droits ni répondu à ses préoccupations et qu’elle a refusé de renvoyer son grief à l’arbitrage.

4 La plainte 561-02-438 se rapporte à un grief déposé par le plaignant, en mars 2007, contre l’employeur, alléguant qu’il a contrevenu aux clauses de la convention collective portant sur les congés de maladie payés et l’interdiction de prendre des mesures discriminatoires. La défenderesse a refusé de renvoyer le grief à l’arbitrage.

5 Sans donner de dates précises, le plaignant allègue, dans la plainte 561-02-439, que l’employeur ne l’a pas indemnisé conformément à la Directive sur les voyages du Conseil national mixte. Il prétend qu’une réponse a été envoyée à la défenderesse, en juillet 2009, mais qu’elle n’en a pas tenu compte. Il a déposé un grief contre l’employeur, mais la défenderesse a refusé de le renvoyer à l’arbitrage.

6 Le plaignant a soumis qu’il a déposé ses plaintes dans le délai prescrit, puisqu’il a appris le 26 août 2009 que la défenderesse avait décidé de ne pas renvoyer ses griefs à l’arbitrage. Il a également soumis que la Commission a compétence pour trancher ses plaintes, puisqu’elles se rapportent à des sujets ayant trait à la convention collective pertinente et que la défenderesse et l’employeur n’ont pas respecté la convention collective.

7 Dans ses arguments du 12 mai 2010, le plaignant a soutenu que la défenderesse n’a pas fourni une représentation juste et raisonnable à ses membres; qu’elle n’avait pas agi de bonne foi, de manière objective et honnête; qu’elle n’avait pas tenu compte des conséquences que les griefs avaient sur lui; qu’elle n’avait pas effectué une enquête en profondeur sur ses griefs et qu’elle avait pris des décisions discriminatoires ou non justifiées. Le plaignant n’a pas présenté ni mentionné de faits particuliers pour étayer ses très graves allégations.

Arguments de la défenderesse

8 Dans ses arguments du 19 février 2010, la défenderesse a fait valoir qu’aucun détail n’était fourni sur les actes ou les omissions qui ont donné lieu aux plaintes. Le plaignant n’a produit aucun élément de preuve pour établir une violation prima facie de la Loi. Les plaintes sont par ailleurs hors délai, puisque les questions sur lesquelles elles sont fondées datent de 2002, 2005 ou 2007.

9 La défenderesse admet que, tel qu’il est indiqué dans la plainte 561-02-436, elle a refusé de renvoyer le grief en question à l’arbitrage. La défenderesse a demandé maintes fois au plaignant de fournir des pièces justificatives, mais sans succès. Après avoir analysé en profondeur le grief, les faits et la jurisprudence, elle a informé le plaignant, en août 2009, qu’elle ne pouvait pas appuyer le renvoi du grief à l’arbitrage. La défenderesse a offert au plaignant la possibilité de fournir des renseignements supplémentaires jusqu’au 11 septembre 2009. Le plaignant n’a pas communiqué avec la défenderesse et n’a pas fourni les renseignements supplémentaires demandés. La défenderesse a offert d’assister à toutes les auditions du grief, mais aux frais du plaignant.

10 La défenderesse admet que, tel qu’il est indiqué dans la plainte 561-02-437, elle a refusé de renvoyer le grief en question à l’arbitrage. Après avoir analysé le grief en profondeur, elle a expliqué au plaignant, dans une lettre détaillée, qu’il n’y avait aucune raison de poursuivre le grief. La défenderesse avait demandé au plaignant de fournir des renseignements supplémentaires sur les allégations qu’il formulait contre l’employeur, mais il ne l’a pas fait.

11 La défenderesse admet que, tel qu’il est indiqué dans la plainte 561-02-438, elle a refusé de renvoyer le grief en question à l’arbitrage. Après avoir analysé en profondeur le grief, les faits et la jurisprudence, elle a informé le plaignant, en août 2009, qu’elle ne pouvait pas appuyer le renvoi du grief à l’arbitrage. La défenderesse a offert au plaignant la possibilité de fournir des renseignements supplémentaires jusqu’au 11 septembre 2009. Le plaignant n’a pas communiqué avec la défenderesse et n’a pas fourni les renseignements supplémentaires demandés.

12 La défenderesse admet que, tel qu’il est indiqué dans la plainte 561-02-439, elle a refusé de renvoyer le grief en question à l’arbitrage. Pendant de nombreux mois, la défenderesse a tenté à maintes reprises d’obtenir des documents pour étayer le grief, mais sans succès. Elle a fourni une analyse détaillée au plaignant dans laquelle elle expliquait les raisons pour lesquelles elle ne pouvait pas renvoyer le grief à l’arbitrage. La défenderesse a offert au plaignant la possibilité de fournir des renseignements supplémentaires jusqu’au 11 septembre 2009. Le plaignant n’a pas communiqué avec la défenderesse et n’a pas fourni les renseignements supplémentaires demandés.

13 La défenderesse a attiré mon attention sur les décisions suivantes : Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon et al., [1984] 1 R.C.S. 509; Kowallsky c. Alliance de la Fonction publique du Canada et al., 2007 CRTFP 30; Panula c. Agence du revenu du Canada et Bannon, 2008 CRTFP 4.

Motifs

14 Le plaignant allègue dans ses quatre plaintes que la défenderesse a contrevenu aux articles 157 et 117 de la Loi (alinéa 190(1)e)) et qu’elle s’est livrée à des pratiques déloyales de travail (alinéa 190(1)g)).

15 Les articles 157 et 117 de la Loi ne s’appliquent pas, puisqu’ils traitent de la mise en application de conventions collectives ou de décisions arbitrales. Comme je l’ai écrit au paragraphe 19 de Halfacree c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2009 CRTFP 28, « [c’]est l’employeur du plaignant qui est responsable de la mise en application de conventions collectives ou de décisions arbitrales, et non l’agent négociateur ». Le plaignant ne semble pas comprendre qu’il ne peut pas imputer à son agent négociateur les problèmes qu’il a eus avec son employeur.

16 Les quatre griefs du plaignant et ses arguments écrits à la Commission ne contiennent aucun fait qui pourrait m’inciter à conclure que la défenderesse s’est livrée à une pratique déloyale de travail. Il ne suffit au plaignant de déclarer que la défenderesse n’a pas renvoyé ses griefs à l’arbitrage. Le plaignant aurait dû fournir au moins quelques faits pour étayer son allégation que les décisions de la défenderesse de ne pas renvoyer les griefs à l’arbitrage étaient arbitraires, discriminatoires ou entachées de mauvaise foi.

17 Le plaignant n’a pas fourni de tels faits. Par conséquent, conformément à la conclusion à laquelle je suis arrivé dans la décision 2009 CRTFP 28 portant sur des plaintes semblables du même plaignant, le plaignant n’a pas fait la preuve prima facie d’une violation de l’article 187 de Loi.

18 Dans Guilde de la marine marchande du Canada, la Cour suprême du Canada a établi qu’il suffit à l’agent négociateur de démontrer qu’il a tenu compte des circonstances du grief, qu’il en a examiné le bien-fondé et qu’il a pris une décision réfléchie quant à la suite à donner au grief. Le plaignant n’a rien soumis qui pourrait me convaincre que l’agent négociateur s’est dérobé à cette obligation légale en refusant de renvoyer les griefs à l’arbitrage.

19 Le 9 mars 2010, Mark Sullivan du Secrétariat du Conseil du Trésor Canada a demandé que le statut d’intervenant soit accordé à l’employeur du fonctionnaire s’estimant lésé parce que le plaignant demandait une mesure corrective qui concernait directement l’employeur. Le plaignant et la défenderesse ne se sont pas opposés à la demande et le président de la Commission des relations de travail dans la fonction publique a accordé le statut d’intervenant à l’employeur du fonctionnaire s’estimant lésé. L’employeur n’a pas été invité à présenter des arguments parce que la présente décision n’a pas d’incidence sur lui.

20 Ayant conclu que les plaintes devraient être rejetées, je ne vois pas la nécessité d’examiner les arguments de la défenderesse sur la question du respect du délai de présentation.

21 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

22 Les plaintes sont rejetées.

Le 18 mai 2010.

Traduction de la CRTFP

Renaud Paquet,
commissaire

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