Décisions de la CRTESPF
Informations sur la décision
Le fonctionnaire s’estimant lésé a contesté la fin prématurée de son emploi d’une durée déterminée de trois ans - l’administrateur général s’est opposé à la compétence d’un arbitre de grief, alléguant qu’il s’agissait d’un licenciement prévu sous le régime de la LEFP - l’arbitre de grief a conclu qu’il avait compétence parce que l’administrateur général avait invoqué de façon factice la LEFP et qu’il s’agissait d’un subterfuge ou d’un camouflage - il a donc conclu que le licenciement était illicite - l’arbitre de grief a octroyé des dommages pour compenser la perte de salaire, la perte de prime au rendement, la perte de bénéfices marginaux, l’atteinte à la réputation du fonctionnaire s’estimant lésé et le préjudice psychologique qu’il a subi, avec intérêts - il a aussi octroyé des dommages pour entrave à la procédure et a conservé compétence si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur leur valeur. Grief accueilli en partie. Compétence conservée.
Contenu de la décision
Loi sur les relations de travail
dans la fonction publique
- Date: 2010-07-16
- Dossier: 566-02-837
- Référence: 2010 CRTFP 83
Devant un arbitre de grief
ENTRE
DOUGLAS TIPPLE
fonctionnaire s'estimant lésé
et
ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(ministère des
Travaux publics et des Services gouvernementaux)
défendeur
Répertorié
Tipple c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux)
Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l’arbitrage
MOTIFS DE DÉCISION
du 24 au 28 septembre 2007, les 28 et 29 janvier, du 12 au 16 mai et du 9 au 12
décembre 2008, et du 22 au 26 juin, les 29 et 30 juin, le 6 juillet et le 6 octobre 2009.
(Traduction de la CRTFP)
I. Grief individuel renvoyé à l’arbitrage
1 Le 11 octobre 2005, Douglas Tipple a accepté une lettre d’offre prévoyant une nomination pour une période déterminée, soit du 11 octobre 2005 au 6 octobre 2008, à titre de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC). Dix mois plus tard, dans une lettre datée du 31 août 2006, le sous-ministre de TPSGC a informé M. Tipple que ses services ne seraient plus requis à la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006.
2 Le 5 septembre 2006, M. Tipple a déposé un grief dans lequel il conteste la décision du SM de mettre fin à son emploi.
3 M. Tipple demande les mesures correctives suivantes :
- une ordonnance le réintégrant dans son poste de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (au niveau EX-05), avec remboursement du salaire et des autres avantages qu’il aurait reçu avant la date de la réintégration;
- subsidiairement, plutôt qu’une ordonnance le réintégrant dans son ancien poste :
- [sic] des dommages pour perte de salaire passé et futur d’un montant de 726 923,08 $;
- des dommages pour perte de bonis passés et futurs, d’un montant de 109 038,46 $ (soit environ 15 % de son salaire);
- des dommages pour perte d’avantages sociaux (y compris l’assurance-maladie, l’assurance dentaire, l’assurance-vie, etc.), d’un montant de 109 038,46 $ (soit environ 15 % de son salaire);
- le paiement de frais de réinstallation et de déménagement d’un montant de 10 000,00 $;
- des dommages parce que TPSGC a enfreint son obligation d’agir de bonne foi à l’égard de M. Tipple et son obligation de protéger la réputation de M. Tipple et de ne pas lui porter préjudice, d’un montant de 250 000,00 $;
- des dommages punitifs découlant du comportement injuste, fallacieux, insouciant, capricieux, arbitraire et tyrannique de TPSGC, qui a occasionné du stress et de l’anxiété chez M. Tipple, a nui à sa réputation, et a perturbé sa vie personnelle, d’un montant de 250 000,00 $;
- l’intérêt sur les montants qui précèdent;
- le paiement complet de ses frais juridiques engagés dans la poursuite de son grief et de la présente demande d’arbitrage de grief.
4 Le 14 février 2007, comme aucune décision n’avait été rendue au dernier palier de la procédure de règlement des griefs dans le délai réglementaire, M. Tipple a renvoyé son grief à l’arbitrage.
5 Les parties n’étaient pas disponibles en vue d’une audience avant le 24 septembre 2007.
II. Questions de procédure
A. Objection à la compétence
6 Le 22 juin 2007, le défendeur a soulevé une objection à la compétence d’un arbitre de grief d’instruire le grief de M. Tipple.
7 Les deux parties ont formulé de brèves observations préliminaires à l’audience. L’avocat du défendeur s’est opposé en faisant valoir que M. Tipple avait été mis en disponibilité en vertu du paragraphe 64(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP) et que l’alinéa 211a) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) interdit un renvoi à l’arbitrage d’un grief portant sur un licenciement prévu sous le régime de la LEFP. Par conséquent, d’après le défendeur, je devrais rejeter le grief pour défaut de compétence.
8 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que la décision du SM de mettre fin à la période de nomination déterminée de M. Tipple ne constituait pas une véritable mise en disponibilité. La mise en disponibilité a été faite de mauvaise foi, et le sous-alinéa 209(1)c)(i) de la LRTFP habilite l’arbitre de grief à statuer.
9 J’ai décidé d’entendre le grief au fond et de remettre à plus tard ma décision sur la compétence d’un arbitre de grief d’instruire le grief.
B. Ordonnances de divulgation
10 Le 16 mai 2007, l’avocat de M. Tipple, dans une lettre à l’avocat du défendeur, a demandé la production de tous les documents de TPSGC s’appliquant de manière pertinente au dossier de M. Tipple avant l’audience prévue le 24 septembre 2007. La lettre précisait les 19 catégories de documents qu’il demandait pour se préparer à l’audience. La lettre informait également l’avocat du défendeur que si ce dernier faisait défaut de produire les documents demandés en temps opportun, l’avocat de M. Tipple demanderait une conférence préparatoire à l’audience avec l’arbitre de grief.
11 Le 5 juin 2007, l’avocat de M. Tipple a demandé une conférence préparatoire à l’audience pour régler la question du défaut du défendeur de soumettre les documents pertinents et a demandé une liste des témoins du défendeur, y compris un résumé du témoignage qu’ils entendent faire sous forme de déclaration de témoignage prévu.
12 Le 21 juin 2007, l’arbitre de grief Mackenzie a convoqué une conférence préparatoire à l’audience et a traité de la question des arguments des parties sur la production des documents du défendeur, de la liste des témoins du défendeur et d’un résumé du témoignage qu’ils entendent faire sous forme de déclaration de témoignage prévu.
13 Le 25 juin 2007, l’arbitre de grief Mackenzie a rendu la première ordonnance de divulgation qui suit :
[Traduction]
[…]
La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) confère à un arbitre de grief le pouvoir de forcer la divulgation de documents. Le pouvoir d’ordonner la divulgation n’est pas assujetti à la Loi sur l’accès à l’information ou à la Loi sur la protection des renseignements personnels. L’arbitre de grief a statué qu’il possède le pouvoir d’ordonner la divulgation des documents.
L’employeur a jusqu’au 3 juillet 2007 pour soulever des objections à la divulgation des documents énumérés dans la lettre datée du 16 mai 2007 en se fondant sur le privilège.
Les documents demandés au point 12 de la lettre du 16 mai 2007 ne sont pas visés par l’ordonnance de divulgation car ils sont accessibles au public.
En ce qui concerne la deuxième question, la présente confirme que la demande présentée en vue d’obtenir une ordonnance exigeant que les deux parties fournissent une liste de témoins et des déclarations de témoignage prévu a été rejetée à la conférence préparatoire à l’audience. On incite néanmoins les parties à discuter du grief et de la conduite de leur dossier.
[…]
14 Le 4 juillet 2007, le défendeur s’est opposé à ce qu’un arbitre de grief puisse exercer son pouvoir d’ordonner la divulgation de documents seulement pour les questions sur lesquelles il a compétence. Par conséquent, le défendeur a proposé la tenue d’une audience pour que soient entendus les arguments sur la question de savoir si un arbitre de grief a ou non compétence pour instruire le grief de M. Tipple. Le défendeur a également demandé, compte tenu du volume de documents requis par l’avocat de M. Tipple dans la lettre du 16 mai 2007, au moins huit semaines pour recueillir et étudier les documents.
15 Le 5 juillet 2007, l’avocat de M. Tipple s’est opposé au délai de huit semaines demandé par le défendeur et a demandé ce qui suit :
[Traduction]
[…]
En outre, je constate que l’employeur, ce qui vient appuyer le caractère illégitime et inapproprié de sa demande d’une audience sur la compétence, fait valoir [traduction] « […] qu’il est tenu de se conformer aux dispositions des deux lois qui régissent la façon dont les ministères utilisent et divulguent l’information sur laquelle ils exercent un contrôle ». Il s’agit selon nous d’un argument malhonnête et fallacieux. Le fait est que l’employeur enfreint en ce moment même les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels parce qu’il a omis de divulguer de l’information et des documents à notre client, malgré le droit de notre client à cette information et à ces documents. À cet égard, je joins une copie de la lettre du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada au soussigné, datée du 29 juin 2007, dont voici un passage :
[Traduction]
« Cette lettre fera rapport des résultats de notre enquête de la plainte que vous avez déposé en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels au nom de M. Douglas Tipple à l’encontre de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC). Vous avez mentionné dans une lettre que nous avons reçue au Commissariat le 1er mai 2007 que TPSGC n’a pas répondu à la demande dans le délai établi dans la Loi sur la protection des renseignements personnels. »
***
« Comme TPSGC n’a pas répondu à la demande dans le délai de 60 jours, le ministère est réputé avoir refusé de vous donner accès au dossier personnel de votre client, tel qu’il est prévu dans les dispositions du paragraphe 16(3) de la Loi. Votre plainte est donc fondée. »
***
« Comme TPSGC est réputé avoir refusé de vous donner accès à vos renseignements personnels et que vous avez maintenant reçu ce rapport, vous avez le droit de présenter à la Cour fédérale, en vertu de l’article 41, une demande de révision de la décision de TPSGC. »
Les extraits qui précèdent et la lettre du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada établissent très clairement que l’employeur n’entend pas se conformer aux dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels, au même titre que l’employeur ne s’était pas conformé aux ordonnances de la Commission des relations de travail dans la fonction publique en l’espèce.
Aussi en ce qui concerne la question de la divulgation, l’employeur fait valoir dans la lettre du Conseil du Trésor, que [traduction] « nous devons souligner que l’employeur n’a pas encore eu l’occasion d’obtenir et d’étudier tous les documents qui pourraient être pertinents en regard de la liste de M. Cutler du 16 mai 2007 ».
À l’opposé, l’employeur a amplement eu l’occasion de divulguer et de produire ces documents, compte tenu du fait qu’il s’est fait demander les documents directement le 16 mai 2007, soit il y a près de deux mois. En outre, la majorité, pour ne pas dire la totalité de ces documents avaient déjà été demandés à TPSGC sous forme de demande de notre client en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, reçue par TPSGC le 13 février 2007. Tout simplement, TPSGC sait depuis plus de quatre mois et demi que notre client cherchait à obtenir les documents demandés dans ma lettre datée du 16 mai 2007 et n’a rien fait pour les divulguer ni les produire.
Par conséquent, nous soutenons avec égards que conformément à son ordonnance du 25 juin 2007, la Commission des relations de travail dans la fonction publique devrait ordonner à l’employeur de divulguer et produire à notre client tous les documents mentionnés dans ma lettre à l’employeur datée du 16 mai 2007, sauf les documents demandés au point 12 de cette lettre, et de les divulguer et de les produire avant 17 h le jeudi 12 juillet 2007.
[…]
16 Le 13 juillet 2007, l’avocat de M. Tipple a soulevé les questions suivantes :
[Traduction]
[…]
Comme vous le savez, cette audience débutera le 24 septembre 2007. M. Tipple demande depuis plusieurs mois à l’employeur la production de documents. Conformément à l’ordonnance de l’arbitre de grief datée du 25 juin 2007, cette demande de production a été accueillie, sous la seule réserve que l’employeur a jusqu’au 3 juillet 2007 pour soulever des objections à la divulgation des documents demandés en se fondant sur le privilège de non-divulgation. L’employeur n’a soulevé aucune objection particulière qui soit fondée sur le privilège.
En violation de l’ordonnance rendue par l’arbitre de grief en date du 25 juin 2007, l’employeur n’a produit aucun document. La date de l’audience du 24 septembre 2007 approche à grands pas.
[…]
Par conséquent, nous demandons respectueusement que la Commission des relations de travail dans la fonction publique impose à l’employeur une échéance pour se conformer à l’ordonnance du 25 juin 2007 et que l’employeur soit tenu de produire tous les documents demandés dans ma lettre à l’employeur, en date du 16 mai 2007, sauf les documents mentionnés au point 12 de cette lettre, et que cette production soit faite au plus tard le vendredi 20 juillet 2007.
[…]
17 Le 2 août 2007, l’arbitre de grief Mackenzie a rendu une deuxième ordonnance de divulgation enjoignant le défendeur de divulguer les documents conformément à l’ordonnance de divulgation du 25 juin 2007, et ce au plus tard le 17 août 2007. De plus, le défendeur s’est fait ordonner de fournir à l’avocat de M. Tipple une liste de documents qui, selon ses dires, faisaient l’objet du secret professionnel de l’avocat et/ou du secret du cabinet. Toute autre question concernant le privilège devait être réglée par l’arbitre de grief au début de l’audience.
18 Le 15 août 2007, le défendeur a demandé une prorogation jusqu’au 24 août 2007 pour fournir à l’avocat de M. Tipple les documents visés par l’ordonnance de divulgation du 2 août 2007. L’arbitre de grief Mackenzie a accueilli la demande et a ordonné au défendeur de fournir à l’avocat de M. Tipple les documents qui avaient déjà été recueillis à la date initiale du 17 août 2007.
19 Le 17 août 2007, le défendeur a remis à l’avocat de M. Tipple une boîte de documents qui n’avaient pas été censurés et l’a informé que d’autres documents seraient livrés d’ici le 24 août 2007. Le défendeur a également fourni une liste de documents qu’il ne divulguerait pas parce qu’il les considère protégés par le litige, le secret professionnel de l’avocat ou le secret du cabinet.
20 Le 23 août 2007, l’arbitre de grief Mackenzie a tenu une autre conférence préparatoire à l’audience et a rendu l’ordonnance suivante :
[Traduction]
[…]
La divulgation avant une audience a pour objet d’assurer le caractère équitable de l’audience sur le grief devant un arbitre de grief. Le pouvoir d’un arbitre de grief d’ordonner la divulgation est le seul objet de l’audience sur le grief.
M. Mackenzie a conclu que comme l’ordonnance de divulgation a pour seul but l’audience sur le grief devant un arbitre de grief, il est implicite que l’information contenue dans les documents divulgués qui touchent des tiers ne sera pas divulguée à d’autres personnes non impliquées dans le processus de préparation de l’audience. En d’autres termes, bien que les documents puissent être partagés entre le fonctionnaire s’estimant lésé et les témoins, l’information ne doit pas être divulguée à d’autres parties ou personnes.
Toutes les questions sur le secret ou la confidentialité des documents qui sont présentés comme pièces à l’audience doivent être tranchées par l’arbitre de grief à l’audience. De même, c’est l’arbitre de grief à l’audience qui statue sur les arguments de l’employeur sur le traitement subséquent des documents divulgués qui ne sont pas reçus en preuve.
[…]
21 Le 28 janvier 2008, après avoir entendu les arguments des parties à l’audience, j’ai rendu une troisième ordonnance de divulgation enjoignant au défendeur de divulguer à l’avocat de M. Tipple tous les documents sur les communications entre Isaac David Marshall, le sous-ministre de l’époque, Yvette D. Aloïsi, sous-ministre adjointe par intérim, ainsi qu’un certain nombre de personnes.
22 Le 31 mars 2008, le défendeur a fait savoir qu’il avait effectué la recherche conformément à l’ordonnance de divulgation datée du 28 janvier 2008. Le défendeur a soutenu que la quantité de documents résultant de la recherche n’était pas trop considérable, et que les documents ont été fournis à l’avocat de M. Tipple.
23 Le 10 avril 2008, l’avocat de M. Tipple a indiqué que les documents fournis par le défendeur étaient incomplets et a identifié de nombreuses questions de divulgation demeurées en suspens.
24 Le 25 avril 2008, le défendeur a informé l’avocat de M. Tipple qu’il avait omis par mégarde d’envoyer les documents extraits du compte de courrier électronique de M. Marshall et les a envoyés depuis.
25 Le 25 avril 2008, l’avocat de M. Tipple m’ont informé que le défendeur n’avait pas tout à fait respecté l’ordonnance de divulgation du 28 janvier 2008 et que pour que soit reprise l’audience prévue pour le 12 mai 2008, il fallait que tous les documents pertinents en la possession du défendeur soient complètement divulgués.
26 Le 25 avril 2008, l’avocat de M. Tipple m’a fourni toutes les lettres qu’il avait en sa possession concernant les problèmes de divulgation avec le défendeur. L’avocat de M. Tipple m’a demandé d’intervenir pour faire appliquer l’ordonnance du 28 janvier 2008.
27 Le 7 mai 2008, j’ai tenu une conférence de gestion des cas pour déterminer et délimiter les questions qui touchent spécifiquement la divulgation de documents par le défendeur et j’ai demandé aux parties d’être prêtes à présenter leurs arguments à la reprise de l’audience le 12 mai 2008.
28 Le 12 mai 2008, à la reprise de l’audience, les deux parties ont présenté des arguments sur la question de la divulgation de documents par le défendeur.
29 Le 13 mai 2008, j’ai rendu une quatrième ordonnance de divulgation enjoignant au défendeur d’effectuer une recherche électronique dans les dossiers du gouvernement relativement à un certain nombre d’employés impliqués dans le dossier de M. Tipple. Le défendeur a mentionné qu’il terminerait la recherche d’ici le 31 août 2008.
30 Le 5 août 2008, le défendeur m’a informé, ainsi que l’avocat de M. Tipple, qu’en raison de retards dans l’acquisition du matériel d’informatique judiciaire requis et du logiciel d’administration de la preuve électronique, il ne pourrait pas respecter l’échéance du 31 août 2008.
31 Le 29 août 2008, le défendeur a demandé une conférence de gestion des cas pour modifier et limiter l’ordonnance de divulgation du 13 mai 2008.
32 Le 8 septembre 2008, une conférence de gestion des cas a été convoquée, et j’ai rendu une cinquième ordonnance de divulgation restreignant légèrement la portée de la recherche électronique ordonnée le 13 mai 2008 et ordonnant la divulgation de documents supplémentaires. Le défendeur devait fournir à l’avocat de M. Tipple tous les documents pertinents dès qu’ils étaient disponibles, et de manière continue. L’ordonnance de divulgation du 13 mai 2008 demeurait en vigueur et les ordonnances de divulgation du 13 mai et du 8 septembre 2008 devaient être complétées d’ici le 21 novembre 2008.
33 Le 6 novembre 2008, le défendeur a demandé une ordonnance de divulgation contraignant M. Tipple de divulguer tous les frais qu’il a engagés en raison de son licenciement jusqu’à cette date, les détails des démarches faites pour trouver un emploi et des copies de ses déclarations de revenus de 2006 et 2007. Le défendeur a demandé que M. Tipple divulgue les documents d’ici le 17 novembre 2008, soit une semaine avant la reprise de l’audience prévue le 24 novembre 2008.
34 Le 7 novembre 2008, après sa demande d’une ordonnance de divulgation faite le 6 novembre 2008, le défendeur a demandé ce qui suit, d’ici le 17 novembre 2008 :
[Traduction]
[…]
Si le fonctionnaire s’estimant lésé devient ou redevient propriétaire unique n’importe quand après le 31 août 2006, tous les dossiers financiers de cette propriété unique, y compris les déclarations de revenus, des années d’imposition 2006 et 2007.
[…]
35 Le 11 novembre 2008, l’avocat de M. Tipple a accepté les demandes présentées par le défendeur les 6 et 7 novembre 2008. Je n’avais donc pas besoin de rendre une ordonnance de divulgation pour les documents demandés.
36 Le 14 novembre 2008, une conférence de gestion des cas a été tenue avec les parties pour régler la question de l’incapacité de l’avocat du défendeur de poursuivre l’audience devant reprendre le 24 novembre 2008. Il a été convenu que l’audience reprendrait le 9 décembre 2008, et qu’un nouvel avocat serait chargé du dossier du défendeur.
37 À la reprise de l’audience le 9 décembre 2008, l’avocat de M. Tipple m’a informé qu’il n’avait pas reçu de documents avant novembre 2008 même si l’ordonnance de divulgation du 8 septembre 2008 enjoignait au défendeur de fournir des documents de manière continue. De plus, à la reprise de l’audience, le défendeur a produit d’autres documents, et l’avocat de M. Tipple a demandé la production de copies non expurgées des documents soumis par le défendeur. Cette démarche a de nouveau occasionné un retard considérable à l’instance, car l’avocat de M. Tipple avait besoin de temps pour examiner les documents. À ce stade de l’audience, j’ai informé l’avocat de M. Tipple qu’il lui faudrait peut-être déposer les ordonnances de divulgation en Cour fédérale afin que celle-ci les rende exécutoires. L’avocat de M. Tipple a déclaré que l’audience avait été retardée à de nombreuses reprises pendant qu’il attendait les documents et que dans l’intérêt de M. Tipple, une demande d’une ordonnance d’exécution à la Cour fédérale ne ferait que retarder l’instance et causer d’autres frais qui s’ajouteraient aux frais supplémentaires déjà causés par le défendeur qui ne fournit pas les documents pertinents. L’avocat de M. Tipple m’a alors demandé de tirer une conclusion défavorable du défaut continu de la part du défendeur de se conformer aux ordonnances de divulgation rendues en l’espèce.
38 En mars 2009, l’avocat de M. Tipple a reçu d’autres documents de TPSGC, non pas grâce aux ordonnances de divulgation rendues dans la présente affaire, mais plutôt grâce à sa demande d’accès à l’information initiale.
III. Résumé de la preuve
39 L’avocat du défendeur a déposé 26 pièces et a déclaré qu’il convoquerait les trois témoins suivants : M. Marshall, Mme Aloïsi et Diane Lorenzato, sous-ministre adjointe par intérim, Direction générale des ressources humaines (RH), TPSGC. Toutefois, Mme Aloïsi n’a pas témoigné.
40 M. Tipple a témoigné et son avocat a déposé 26 pièces.
41 Pendant les témoignages et dans certaines pièces, il était fait mention de David Rotor et des conseillers spéciaux (MM. Tipple et Rotor), parce que ce dernier était conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des approvisionnements, jusqu’au 31 août 2006. M. Rotor a également renvoyé à l’arbitrage un grief dont je ne suis pas saisi.
A. Pour le défendeur
42 Le 13 août 2007, M. Marshall a été nommé Haut-commissaire du Canada aux Barbades et aux Caraïbes orientales. De juin 2003 à juin 2007, M. Marshall était le sous-ministre.
43 M. Marshall a témoigné qu’il avait pour mandat d’assurer du leadership chez TPSGC après la publicité défavorable qui a suivi le « scandale des commandites ». Il devait stabiliser TPSGC, l’aider à redevenir crédible, remonter le moral des employés, et veiller au professionnalisme des cadres de direction et des employés. Quand M. Marshall est arrivé chez TPSGC, quelque 14 000 employés travaillaient dans une direction générale. Il a créé trois directions générales distinctes — la Direction générale de l’approvisionnement, la Direction générale des biens immobiliers et la Direction générale de la technologie de l’information — et a nommé un sous-ministre adjoint dans chacune d’elles.
44 De juin à décembre 2003, M. Marshall a procédé à un examen ou, selon ses propres termes, à [traduction] « une analyse verticale ou un diagnostic » des services offerts par TPSGC dans des domaines comme la charge de travail, les meilleures pratiques et les attentes, qui a été à l’origine d’un rapport de 10 pages intitulé « La transformation de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada », qui a suscité la curiosité du Premier ministre et du Cabinet.
45 Le 24 mars 2004, le gouvernement du Canada a constitué le Comité d’examen des dépenses (CED) afin qu’il étudie les dépenses gouvernementales et qu’il trouve des façons de réaliser des économies. Le CED était présidé par le président du Conseil du Trésor et comptait sept ministres du Cabinet comme vice-présidents. M. Marshall a entrepris un examen des trois directions générales de TPSGC nouvellement constituées et a élaboré un certain nombre d’initiatives stratégiques afin de réaliser des économies. Cette initiative stratégique s’appelait « Les prochaines étapes » ou la « Transformation ».
46 Le 23 février 2005, le ministre des Finances a prononcé le Discours du budget de 2005, qui prévoyait des économies de 11 milliards de dollars au cours des 5 années suivantes. Un document élaboré par le ministère des Finances, intitulé « Examen des dépenses pour une saine gestion financière », qui donne un aperçu du Budget de 2005 (pièce E-2), expliquait l’engagement et le plan d’action de TPSGC pour épargner 925 millions de dollars sur une période de 5 ans, soit de 2005 à 2010. Voici un extrait du document :
[…]
Le gouvernement du Canada est le plus grand utilisateur de locaux à bureaux au Canada. Quelque 284 000 fonctionnaires travaillent dans un espace couvrant 5,7 millions de mètres carrés, dont la moitié se trouve dans la région de la capitale nationale.
Il ressort des analyses menées par TPSGC et la vérificatrice générale qu’une utilisation plus efficace des locaux et une gestion plus efficace permettraient de réduire le coût de gestion des biens immobiliers fédéraux. Par ailleurs, les économies éventuelles sont considérables, surtout compte tenu du fait que TPSGC gère en permanence plus de 420 immeubles et 2 000 baux, et affecte 1 200 employés à la prestation de services d’architecture, d’ingénierie et de gestion des biens immobiliers à d’autres ministères.
Plan d’action
Le plan d’action en vue de réaliser des économies en gestion des biens immobiliers découlant de l’examen des dépenses prévoit notamment ce qui suit :
- Normes en matière de locaux. Le gouvernement réduira son utilisation actuelle moyenne des locaux, qui passera de plus de 21 mètres carrés par employé à 18 mètres carrés par employé, ce qui est davantage conforme aux points de référence du secteur privé. Les normes d’aménagement pour la construction, le câblage, etc., seront également ramenées d’un coût moyen de 400 $ le mètre carré à une norme de TPSGC de 313 $ le mètre carré.
- Gestion de l’inventaire. Le gouvernement améliorera ses stratégies de location pour assurer une utilisation plus stratégique des locaux à moindre coût en dehors des « centres » municipaux (le centre-ville) et négociera ses baux en temps opportun pour s’assurer d’obtenir les meilleurs taux possibles des propriétaires. Ces efforts porteront également sur l’amélioration de la gestion des marchés de réparation et d’entretien.
- Impartition. Le gouvernement engagera des experts du secteur privé lorsque cela permet de réduire considérablement les frais relatifs aux projets et à la gestion.
Les économies découlant de l’amélioration de la gestion des biens immobiliers, après des investissements de 100 millions de dollars, totaliseront 925 millions sur cinq ans (tableau 4). Des investissements s’imposeront pour mettre au point de nouveaux systèmes de gestion de l’information afin d’optimiser l’utilisation des locaux et de minimiser les coûts, d’assurer le perfectionnement des compétences et de fournir la formation nécessaire à l’exécution des nouvelles fonctions.
Tableau 4
Économies au chapitre de la gestion des biens immobiliers
2005-2006
2006-2007
2007-2008
2008-2009
2009-2010
Total
(M$)
Application des normes en matière de locaux
50
85
95
120
150
500
Amélioration de la gestion de l’inventaire
40
50
60
70
80
300
Impartition et réduction des coûts généraux
10
15
15
65
70
175
Report des immobilisations non essentielles
50
50
Économies totales
150
150
170
255
300
1,025
Investissements à TPSGC
(20)
(20)
(20)
(20)
(20)
(100)
Économies nettes
130
130
150
235
280
925
[…]
47 M. Marshall a témoigné que Tim McGrath était sous-ministre adjoint par intérim de la Direction générale des biens immobiliers à ce moment-là. Il a mentionné que M. McGrath était [traduction] « un esprit alerte et l’un des rares directeurs généraux de TPSGC à avoir de bonnes idées ». Il avait décidé de le nommer au poste de sous-ministre adjoint par intérim pour le « tester ». M. Marshall croyait que même s’il avait nommé M. McGrath à ce poste, ce dernier aurait pu tirer profit de la présence de quelqu’un pour le former, le guider ou le parrainer pendant environ trois ans afin que M. McGrath puisse finalement diriger l’initiative Les prochaines étapes. M. Marshall a présenté une proposition au Secrétariat du Conseil du Trésor pour justifier le recrutement de deux cadres de direction provenant du secteur privé (l’un de la Direction générale des biens immobiliers et l’autre de la Direction générale des approvisionnements) afin qu’ils apportent leur contribution à l’initiative Les prochaines étapes. Ces cadres de direction mettraient en commun leurs connaissances et leurs compétences et orienteraient TPSGC dans ce qui était considéré comme un changement sans précédent dans la prestation de services gouvernementaux. M. Marshall a fait observer que l’une des règles fondamentales de gestion est que la personne qui donne le conseil a également la responsabilité de l’appliquer.
48 En janvier 2005, une « Description de poste du Groupe de la direction » (pièce G-1, onglet 3) a été élaborée. En mars 2005, une recherche nationale de candidats possibles a été entreprise, et M. Tipple a été retenu comme meilleur candidat au poste de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers. Comme M. Tipple n’était pas bilingue, le 5 mai 2006, M. Marshall a écrit au secrétaire du Conseil du Trésor pour demander que M. Tipple soit dispensé de l’application de la politique sur les langues officielles du Conseil du Trésor. Il a expliqué que M. Tipple ne prendrait pas part à la prestation continue de services à des clients du gouvernement à l’interne ou au public et qu’il n’avait pas à superviser de membres du personnel (à l’exception de ceux de son bureau). De plus, advenant la tenue d’événements ou d’activités comportant une interaction dans les deux langues officielles, un sous-ministre adjoint ou un autre cadre de direction accompagnerait M. Tipple. Le secrétaire du Conseil du Trésor a approuvé la demande de M. Marshall.
49 Le 11 octobre 2005, M. Tipple a accepté la lettre d’offre d’une nomination pour une période déterminée à un poste de groupe et de niveau EX-05, à un salaire annuel de 360 000,00 $ (pièce G-1, onglet 6). La lettre d’offre mentionnait que M. Tipple avait droit à ce qui suit :
- un boni de rendement pouvant atteindre 15 % de son salaire annuel pour son rendement au cours d’un exercice;
- des congés annuels accumulés au rythme de un jour et deux tiers (1 2/3) par mois;
- des congés de maladie cumulatifs;
- un régime de retraite;
- une assurance-invalidité, une assurance pour les frais médicaux et une assurance pour les frais dentaires;
- des frais de réinstallation conformes à la Directive sur la réinstallation intégrée;
- le paiement de ses frais annuels de cotisation à un Club national de Toronto;
- le paiement de chaque module d’étude du programme de formation des administrateurs de la Rotman School of Business à Toronto;
- la formation en langue française.
La lettre d’offre indiquait également ce qui suit :
[Traduction]
[…]
Autres
Vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et le maintien des fonctions à accomplir. La présente lettre ne devrait aucunement être interprétée comme une offre de nomination pour une durée indéterminée, et vous ne devez aucunement planifier ou prévoir obtenir un emploi dans la fonction publique à la suite de cette offre.
Vous serez assujetti à une période de stage de 12 mois, à l’exclusion des périodes de congé non rémunéré et des périodes de congé rémunéré de plus de 30 jours consécutifs.
50 M. Marshall a déclaré que du 11 octobre 2005 au 31 mars 2006, M. Tipple accomplissait des tâches de diagnostic sur la location, la réparation et l’entretien d’immeubles gouvernementaux; l’élaboration de méthodes en milieu de travail; la définition des objectifs de TPSGC; l’analyse des coûts en comparaison avec le secteur privé; la prestation de conseils stratégiques. M. Marshall a déclaré que même si M. Tipple faisait du bon travail, il craignait que la mise en œuvre de son travail ne soit pas suffisamment intégrée.
51 En avril et en mai 2006, M. Tipple défendait les intérêts d’une société d’État, dont la responsabilisation et les salaires du personnel étaient les principaux points d’intérêt, avec l’impartition d’emplois pour faire diminuer les frais généraux. M. Marshall a noté que pendant les discussions avec le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux (le « ministre »), il a été informé que le gouvernement du Canada n’envisageait pas une société d’État ou une externalisation majeure des emplois. En outre, les employés de TPSGC s’inquiétaient beaucoup du nombre de changements mis en place, et leurs agents négociateurs préparaient une campagne pour remettre en question toute externalisation majeure.
52 D’avril à juin 2006, M. Marshall a eu plusieurs discussions avec Mme Aloïsi. Il a affirmé qu’elle convenait qu’il serait problématique pour TPSGC d’absorber davantage de changements et qu’elle estimait que le rôle de M. Tipple comme conseiller spécial ne « fonctionnait pas ».
53 Le 27 juin 2006, M. Marshall a rempli l’« accord sur le rendement du groupe de la direction » de M. Tipple (l’« accord sur le rendement ») pour la période du 11 octobre 2005 au 31 mars 2006, et lui a donné la cote « a excédé les attentes » pour la réalisation de ses principaux engagements (pièce G-1, onglet 15). Il a affirmé que M. Tipple était un employé apprécié qui faisait de l’excellent travail. Les réalisations rattachées à l’accord sur le rendement se lisent comme suit :
[Traduction]
[…]
- A établi et fourni une orientation stratégique au programme de transformation des activités pour la Direction générale des biens immobiliers.
- A instauré une norme industrielle rigoureuse applicable à la méthodologie de transformation des activités pour orienter le renouvellement des biens immobiliers.
- A créé le bureau du projet de transformation des activités.
- A défini la stratégie de transformation des activités et les projets connexes (l’impartition, le renouveau des systèmes, les projets de reconnaissance, le profil des biens).
- A engagé des experts de l’industrie dans des projets clés.
- A assuré du leadership et a offert des compétences en biens immobiliers dans des projets et initiatives de renouveau clés:
- Analyse comparative de la Direction générale des biens immobiliers et d’autres organismes de biens immobiliers (p. ex. GSA, SIO)
- Proposition d’un modèle d’organisation axée sur la gestion des biens immobiliers
- Intégration de la Direction générale de l’intégration des services dans la Direction générale des biens immobiliers
- Méthodologie permettant de réaliser des économies du CED
- Étude de la possibilité de constituer une société d’État
- Établissement de profils de biens pour le portefeuille de la DGBI
- A donné des conseils stratégiques au sous-ministre, aux organismes centraux et au ministre en ce qui concerne le renouvellement des biens immobiliers notamment en ce qui concerne :
- une étude sur les biens immobiliers
- le modèle organisationnel de gestion des biens immobiliers
- les engagements du CED
- l’intégration des systèmes de BI
- l’impartition
- les grands projets de l’État.
- A amélioré les relations de travail avec les principaux intervenants et partenaires.
- SCT
- Agents de négociation collective
- Autres directions générales de TPSGC
- GSA
[…]
Dans le volet « évaluation descriptive » de l’accord sur le rendement, M. Marshall a écrit ce qui suit :
[Traduction]
[…]
Douglas Tipple a été nommé au poste de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, avec effet le 11 octobre 2005.
Il avait la responsabilité de diriger une transformation sans précédent du secteur d’activité des biens immobiliers du Ministère et de donner au ministre et au sous-ministre des conseils et des recommandations faisant autorité afin d’adopter une approche de rentabilité maximale permettant de combler les besoins en matière de gestion des biens immobiliers de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, du gouvernement du Canada et de la population canadienne, et de réaliser des économies de un milliard de dollars réparties sur cinq ans.
Les réalisations ci-jointes établissent clairement de quelle façon Douglas Tipple a assuré la direction et l’orientation stratégiques nécessaires pour faire progresser le programme de transformation des biens immobiliers.
Doug s’est révélé être un membre précieux de l’équipe de la haute direction. Pendant la courte période durant laquelle il a été avec nous, il a largement démontré que son leadership, son expérience et son apport sont profitables à TPSGC et au gouvernement.
Je tiens à exprimer à quel point j’apprécie les efforts que vous avez déployé dans le cadre de votre contribution à cette transformation.
[…]
54 Comme il a excédé les attentes à son égard relativement à la réalisation de ses principaux engagements, M. Tipple a été informé qu’il recevrait un montant forfaitaire de 25 655,00 $, soit l’équivalent de 15 % de son salaire au prorata.
55 M. Marshall a témoigné que bien qu’il était ravi du travail de M. Tipple et qu’il le considérait comme [traduction] « l’un de ses hommes », il se demandait en mai 2006 s’il conserverait les services de M. Tipple en raison des progrès réalisés par M. McGrath dans certaines des stratégies liées à l’initiative Les prochaines étapes.
56 Le 4 mai 2006, M. Tipple a demandé à M. Marshall l’autorisation de se rendre au Royaume-Uni (R.-U.) du 25 au 30 juin 2006 pour rencontrer des responsables du R.-U. afin de discuter des meilleures pratiques étant donné qu’ils ont vécu une transformation similaire. M. Marshall a affirmé qu’il a autorisé la demande de M. Tipple, mais a fait observer qu’il n’a pris part à aucun des arrangements de voyage ou de réunion. Le Haut-commissariat du Canada au R.-U. (le « Haut-commissariat ») et des responsables de TPSGC ont coordonné la mise à l’horaire des réunions.
57 Le 5 juillet 2006, M. Marshall a reçu un courriel de Alain Trépanier, sous-ministre adjoint par intérim, Direction générale des services ministériels, des politiques et des communications, l’informant que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) avait formulé certaines réserves parce que le Haut-commissariat était embarrassé par l’absence des conseillers spéciaux à un certain nombre de réunions prévues (pièce G-1, onglet 20). M. Marshall a affirmé qu’il a rencontré M. Tipple le 12 juillet 2006 et que ce dernier lui a dit n’avoir manqué aucune réunion. Il a cependant indiqué qu’il y a eu un certain nombre de problèmes de communication entre TPSGC et le Haut-commissariat relativement à l’organisation et à la tenue des réunions. Il a donné instruction à M. Tipple de rédiger un rapport de voyage expliquant les avantages du voyage, les réunions auxquelles il a pris part et son emploi du temps. M. Marshall a affirmé ce qui suit : [traduction] « Je n’ai conclu à aucun acte répréhensible, sauf une certaine confusion administrative. Le rapport de voyage avait pour objet de constituer un dossier dans l’éventualité où les contribuables canadiens demandent si le voyage a porté ses fruits ou a ajouté une certaine valeur. »
58 Le 12 juillet 2006, M. Marshall a reçu une note de service de M. Trépanier indiquant que les réunions manquées par les conseillers spéciaux étaient des réunions avec le Ministry of Defence (MOD) du Royaume-Uni, le National Audit Office (NAO) du Royaume-Uni et la National Health Services Purchasing and Supply Agency (NHS-PASA) du Royaume-Uni (pièce G-1, onglet 21). M. Trépanier a mentionné que dans le cas de l’une des réunions, le Haut-commissariat n’a pas fourni le soutien nécessaire aux conseillers spéciaux. M. Trépanier a ajouté que Guy Saint-Jacques, Haut-commissaire par intérim du Canada au Royaume-Uni, avait fait parvenir des lettres d’excuses à chacun des organismes concernés. M. Trépanier avait rédigé les lettres d’excuses pour le compte de M. Marshall, lettres qu’il avait jointes à sa note de service, et il a recommandé que M. Marshall les envoie. Les lettres étaient adressées à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni concernés. M. Marshall était d’accord avec la recommandation de M. Trépanier et il a approuvé les lettres.
59 Le 17 juillet 2006, Mme Aloïsi a signé et envoyé les lettres d’excuses (pièce G-1, onglets 22 à 25) pour le compte de M. Marshall. La lettre adressée à M. Saint-Jacques reconnaissait que M. Marshall avait été informé que les conseillers spéciaux avaient manqué certaines réunions prévues et qu’il prenait des mesures pour déterminer ce qui avait cloché. M. Saint-Jacques avait également été informé que M. Marshall avait envoyé des lettres d’excuses aux organismes du Royaume-Uni concernés et qu’il leur avait certifié que les problèmes de communication survenus seraient corrigés avant qu’une autre mission ne soit envisagée (pièce G-1, onglet 22). M. Marshall a déclaré ce qui suit : [traduction] « Je n’ai pas dit que nous avons fait quelque chose de mal. Je prenais acte de ses préoccupations. » Les lettres envoyées aux organismes du Royaume-Uni mentionnaient que les réunions manquées étaient le résultat de problèmes de communication déplorables (pièce G-1, onglets 23 à 25).
60 M. Marshall a témoigné que pendant ses vacances, du 21 juillet au 21 août 2006, Mme Aloïsi a communiqué avec lui à un certain nombre d’occasions. Le 15 août 2006, elle l’a informé que le journal The Globe and Mail avait publié un article sur le voyage des conseillers spéciaux au Royaume-Uni (pièce G-1, onglet 42) qui n’était [traduction] « pas gentil ». Il a affirmé que bien qu’il n’a pas pris l’article à la légère, il n’a pris aucune mesure car Mme Aloïsi et le Secrétariat du Conseil du Trésor réglaient la question. M. Marshall a mentionné que le journal avait obtenu une copie du rapport de voyage de M. Tipple avant qu’il l’ait vu.
61 À son retour au bureau le 22 août 2006, M. Marshall a demandé à Shahid Minto, agent principal de gestion des risques à TPSGC, de faire enquête sur les détails du voyage des conseillers spéciaux au Royaume-Uni. Le 25 août 2006, M. Marshall a rencontré M. Minto pour examiner ses conclusions. Le rapport final de M. Minto (le « rapport Minto ») a été achevé le 31 août 2006. Voici le résumédu rapport Minto (pièce G-2, onglet 74) :
[Traduction]
[…]
Vous trouverez ci-joint mon rapport sur le voyage de D. Rotor et D. Tipple au Royaume-Uni (R.-U.). Selon moi, l’approbation des objectifs et la constitution de l’équipe chargée de visiter le R.-U. ont fait l’objet d’une diligence raisonnable et d’une surveillance adéquate. Des problèmes de planification et de communication sont survenus, et ils ont fait en sorte que D. Rotor a été incapable d’assister à au moins trois réunions tel qu’il était initialement prévu. Ces réunions ont été remplacées par d’autres rencontres. D. Tipple a organisé des réunions avec des sociétés privées sans en informer le sous-ministre, mais ces réunions avaient trait aux objectifs du voyage. Malgré ce qui précède, les deux conseillers semblent avoir eu un emploi du temps responsable et productif. Des erreurs administratives se sont produites. Les deux conseillers ont combiné des vacances personnelles à leur voyage professionnel sans avoir obtenu au préalable l’approbation écrite du sous-ministre. Les deux ont pris leurs propres dispositions de vol et de voyage avec leurs cartes de crédit personnelles et aucun des deux n’a rempli de réclamation de voyage à ce jour. Je suis persuadé que toutes les dépenses réclamées et autorisées seront raisonnables et approuvées conformément aux règles réglementaires.
[…]
62 M. Marshall a déclaré qu’au cours de la matinée du 25 août 2006, il a rencontré le ministre et le secrétaire du Conseil du Trésor pour discuter de questions concernant l’initiative Les prochaines étapes, ainsi que du rapport Minto.
63 M. Marshall a affirmé qu’au cours de l’après-midi du 25 août 2006, il a rencontré le ministre en privé. Ils ont discuté de la couverture médiatique du voyage des conseillers spéciaux au Royaume-Uni. M. Marshall a informé le ministre et le secrétaire du Conseil du Trésor que [traduction] « même si les conseillers spéciaux ont commis des erreurs de jugement ayant suscité des questions délicates, ils n’ont pas commis d’infractions pouvant donner lieu à un congédiement ». Le ministre a demandé à M. Marshall si une « expérience » si coûteuse — l’embauche de cadres de direction du secteur privé — était justifiable et adéquate, mais il n’a jamais exercé de pressions sur M. Marshall pour qu’il mette fin à leurs nominations pour une période déterminée. M. Marshall a informé le ministre qu’il réfléchirait au cours des jours suivants sur le maintien du caractère justifiable de l’expérience.
64 Le 28 août 2006, soit le jour ouvrable suivant, M. Marshall a avisé le ministre de sa décision de mettre fin à l’expérience. Il a dit qu’il a pris cette décision, parce que M. Tipple avait réalisé ses principaux engagements, que l’initiative Les prochaines étapes était en avance sur son calendrier, que TPSGC ne pouvait absorber d’autres changements et qu’il n’y avait pas d’autres initiatives d’importance pour M. Tipple. En outre, tant M. Marshall que le ministre avaient confiance que M. McGrath pouvait assumer le reste des travaux à exécuter dans le cadre de l’initiative Les prochaines étapes et que Diane Orange, directrice générale, Direction générale de la transformation des biens immobiliers, TPSGC, serait disponible pour aider M. McGrath à s’acquitter des tâches supplémentaires. M. Marshall a dit qu’il ne pouvait justifier le paiement du salaire de M. Tipple par les contribuables pendant deux autres années.
65 M. Marshall a déclaré qu’il a donné instruction à Mmes Aloïsi et Lorenzato de se faire conseiller par des cadres supérieurs de la Commission de la fonction publique (CFP), de l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada (AGRHFPC) et du Secrétariat du Conseil du Trésor sur la façon de mettre fin à l’emploi pour une période déterminée de M. Tipple.
66 Le 31 août 2006, M. Marshall a rencontré M. Tipple et lui a remis une lettre l’informant que ses services ne seraient plus requis à la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006. Voici un extrait de la lettre (pièce G-2, onglet 82) :
[Traduction]
[…]
Comme la transformation passe à sa prochaine étape, j’ai décidé qu’il serait plus approprié que les fonctions que vous exécutez soient intégrées au rôle du sous-ministre adjoint, Biens immobiliers.
Comme vous savez, votre lettre d’offre datée du 7 octobre 2005 renfermait une clause mentionnant que vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et la poursuite des fonctions devant être accomplies. J’ai le regret de vous informer que votre nomination pour une période déterminée au poste de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, au niveau EX-05, prendra fin plus tôt qu’il a été indiqué précédemment dans votre lettre d’offre. Conformément à la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor, vous avez droit à un mois de préavis. Vos services ne seront plus requis à la fermeture des bureaux le 29 septembre.
[…]
67 M. Marshall a mentionné que sa décision ne constituait pas une mesure disciplinaire et a fait observer ce qui suit :
[Traduction]
L’initiative Transformation était mon bébé. J’ai pris des risques et au fil des événements, il s’est avéré que ma décision de mettre fin au mandat de M. Tipple ne laissait place à aucune discussion ni à aucun débat. Il s’agissait d’une bonne décision.
68 Le 1er septembre 2006, Mme Lorenzato a rédigé une « Note au sous-ministre » afin de réaligner les fonctions de transformation des affaires au sein de TPSGC. Elle recommandait que M. Marshall mette fin à l’emploi pour une période déterminée des conseillers spéciaux et que leurs responsabilités soient transférées aux sous-ministres adjoints respectifs. M. Marshall a déclaré qu’il a accepté ses recommandations, qui sont ainsi rédigées (pièce G-2, onglet 92) :
[Traduction]
[…]
Recommandations
Les deux conseillers spéciaux étaient recrutés pour une période de 3 ans et leur entente comportait une clause indiquant que leurs services pourraient être requis pour une période plus courte. Cette clause prévoit notamment « Vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et la poursuite des fonctions devant être accomplies. » Compte tenu de l’étape à laquelle nous sommes rendus, tous s’entendent pour dire qu’il ne vaut plus la peine, pour les contribuables, d’appuyer le maintien du mandat de ces conseillers. Je recommande que nous mettions fin à l’emploi pour une période déterminée des deux conseillers spéciaux et que nous transférions leurs responsabilités aux sous-ministres adjoints concernés.
M. Marshall a dit qu’il a alors recommandé au Secrétariat du Conseil du Trésor d’abolir les deux postes de conseiller spécial.
69 M. Marshall a alors été référé à la partie suivante des débats de la Chambre des communes du 9 novembre 2006 (pièce G-2, onglet 100) :
[…]
Mme Peggy Nash (Parkdale—High Park, NDP) :
Monsieur le Président, en août, le Globe and Mail faisait état du voyage au Royaume-Uni, aux frais de la princesse, de deux conseillers du ministre qui ont fini par annuler leurs réunions avec les fonctionnaires britanniques. Encore là, nous apprenons aujourd’hui qu’aucun rapport n’a été produit.Au moment où on réduit d’un milliard de dollars les budgets de programmes destinés à aider les citoyens les plus vulnérables, comment est-il possible que le gouvernement conservateur, comme le gouvernement libéral avant lui, gaspille autant de notre argent durement gagné pour des rapports qui n’existent même pas?
[Table des matières]
M. James Moore (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de la porte d’entrée du Pacifique et des Olympiques de Vancouver-Whistler, PCC) :
Monsieur le Président, les deux personnes auxquelles la députée fait allusion, et dont le ministre a parlé aujourd’hui en comité, ont dû rendre des comptes. Elles ne travaillent plus pour le gouvernement fédéral.
M. Marshall a dit qu’il n’a pas donné d’instructions au secrétaire parlementaire du ministre sur les propos à tenir. Il a fait observer que les hommes et les femmes politiques n’ont pas de comptes à rendre sur les propos qu’ils tiennent à la Chambre des communes. Il a déclaré que TPSGC rédige des notes documentaires et des projets de réponse pour examen par le ministre en prévision des questions qui pourraient être posées. Le projet de réponse remis au cabinet du ministre le 18 septembre 2006 se lit comme suit (pièce E-18) :
[Traduction]
[…]
RÉPONSE PROPOSÉE
- Il se produit une importante transformation dans les domaines de l’approvisionnement et des biens immobiliers. Cette transformation permettra de réaliser d’importantes économies pour les contribuables canadiens.
- Le travail des deux conseillers spéciaux a été achevé.
- Nous en sommes maintenant à l’étape à laquelle les travaux dirigés par ces deux conseillers spéciaux doivent être intégrés complètement aux directions générales de l’approvisionnement et des biens immobiliers.
[…]
70 En contre-interrogatoire, M. Marshall a convenu que la « Description de poste du Groupe de la direction » (pièce G-1, onglet 3) reflétait avec exactitude les fonctions et les responsabilités de M. Tipple. Il a également convenu que M. Tipple était chargé d’élaborer et de surveiller toutes les facettes des stratégies de mise en œuvre de l’initiative Les prochaines étapes et que M. Tipple le rencontrait presque quotidiennement pour faire le point sur l’initiative Les prochaines étapes.
71 M. Marshall a dit, lorsqu’il a été interrogé au sujet de la lettre d’offre, que même si elle mentionnait que la nomination pour une période déterminée était d’une durée de trois ans, cette période [traduction] « n’était pas coulée dans le béton » et était sujette à la disponibilité du travail et à la poursuite des fonctions à accomplir. Il a affirmé qu’il n’a jamais promis à M. Tipple que sa nomination pour une période déterminée couvrirait les trois ans. Lorsque M. Marshall s’est fait demander s’il avait discuter de cette question avec M. Tipple, il a répondu [traduction] « Pas expressément. Cependant, je ne lui ai jamais garanti trois ans de travail. »
72 M. Marshall a reconnu que le 27 juin 2006, il a donné à M. Tipple une cote « a excédé les attentes » dans son accord sur le rendement (pièce G-1, onglet 15), même si en mai 2006 il se demandait s’il allait conserver les services de M. Tipple. Il a convenu avec l’avocat de M. Tipple qu’à ce moment-là, les volets suivants de l’initiative Les prochaines étapes étaient encore en cours : l’étude sur les biens immobiliers, le modèle organisationnel de gestion des biens immobiliers, les engagements du CED, l’intégration des systèmes de biens immobiliers, l’impartition d’emplois, et un projet de société d’État.
73 M. Marshall s’est fait demander s’il avait approuvé le paiement des frais d’adhésion de M. Tipple d’un montant de 2 407,50 $ à The National Club à Toronto en juin 2006, qui a été fait vers la fin de juillet 2006. Il a répondu positivement.
74 M. Marshall a confirmé que M. Tipple présidait un comité formé de cadres supérieurs chargés d’évaluer et de déterminer des façons économiques et efficaces de répondre aux besoins des ministères fédéraux, tout en réalisant des économies. Le comité a choisi la Banque de Montréal (BMO) pour diriger l’étude sur les biens immobiliers. La BMO devait agir comme consultante pour recommander un conseiller financier chargé d’aider TPSGC à vendre un certain nombre d’immeubles gouvernementaux et à adopter une approche de cession-bail avec le secteur privé. Quand M. Marshall s’est fait demander pourquoi la Banque Royale du Canada (RBC) a pris part aux activités si le comité avait choisi la BMO, il a expliqué que le ministre est intervenu et souhaitait la participation de la RBC. M. Marshall a confirmé que l’intervention du ministre a donné lieu à un conflit avec M. Tipple, parce qu’il n’était pas d’accord avec la décision du ministre, étant donné que la RBC facturait des honoraires considérablement plus élevés que ceux de la BMO.
75 M. Marshall a convenu que M. Tipple a entrepris la cession-bail des immeubles du gouvernement fédéral annoncée par le ministre le 20 août 2007 (pièce G-2, onglet 119). Cependant, il a fait observer que ce sont M. McGrath et lui-même qui ont conclu l’entente. Il a également convenu que M. Tipple a collaboré avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour relocaliser un certain nombre de ses employés à l’immeuble de JDS Uniphase, en banlieue d’Ottawa, et que les travaux se sont poursuivis après le 31 août 2006.
76 Une « Note de service au sous-ministre » datée du 4 mai 2006 a été mentionnée à M. Marshall. Dans cette note, M. Tipple demandait à M. Marshall d’autoriser le voyage des conseillers spéciaux au R.-U. pour rencontrer des fonctionnaires britanniques et leurs fournisseurs de services immobiliers (pièce G-1, onglet 9). M. Marshall a déclaré qu’il a approuvé la demande de M. Tipple le 12 mai 2006, mais il a ajouté que M. Rotor devrait présenter une justification de voyage distincte. M. Marshall a répondu affirmativement lorsqu’il s’est fait demander s’il convenait que MM. Tipple et Rotor auraient eu des horaires de réunions différents parce que leurs portefeuilles différaient.
77 M. Marshall a reconnu que la phrase du résumé du rapport Minto (pièce G-2, onglet 74) qui mentionne que M. Tipple a combiné vacances personnelles et voyage d’affaires sans avoir obtenu d’autorisation écrite au préalable était inexacte.
78 M. Marshall a confirmé qu’il était au courant des problèmes d’horaire touchant le voyage en terres britanniques, mais il a déclaré qu’il ignorait l’existence du courriel daté du 22 juin 2006 (pièce G-1, onglet 13) que Gregory Evanik, directeur, Planification ministérielle et Coopération interdépartementale, TPSGC, a fait parvenir à Catherine M. Dickson, conseillère, Commerce, investissement, sciences et technologie, Division commerciale et économique, Haut-commissariat, dans lequel il mentionnait ce qui suit : [traduction] « Je crois comprendre que vous accompagnerez David Rotor et Doug Tipple à la plupart des réunions. Serait-il possible, notamment dans le cas du OGC et du ministère de la Défense, que vous rédigiez un résumé des réunions? » M. Marshall ignorait aussi l’existence de la réponse de Mme Dickson (pièce G-1, onglet 13) :
[Traduction]
[…] J’aimerais vous aider en ce qui concerne les rapports, mais je crains de ne pouvoir être en mesure de le faire. Je rencontrerai le groupe avec le Haut-commissaire par intérim et j’espère assister aux rencontres avec le ministère de la Défense et le OGC […] Il y a beaucoup à faire et je ne puis m’engager à participer à tout […] Je n’ai pas encore les renseignements sur le ministère de la Défense […] Je tenterai de les obtenir avant le départ du groupe […]
[…]
79 M. Marshall a déclaré qu’il ignorait que M. Evanik avait dressé le « rapport d’état interne » daté du 6 juillet 2006 (pièce G-1, onglet 14). Voici un extrait du rapport :
[Traduction]
[…]
2 – Absences aux réunions – Bien que les absences soient au cœur du problème, il convient de noter que le HC ne s’est acquitté que partiellement de son engagement à notre égard (en particulier en ce qui a trait à la coordination et au soutien des réunions du ministère de la Défense) […] ce qui a occasionné des problèmes importants. De plus, TPSGC n’a pas insisté avec autant de diligence qu’il aurait dû le faire pour que le HC nous fournisse les renseignements qui nous auraient fait gagner du temps du point de vue des documents et des horaires! Ceci dit, l’absence de la délégation aux réunions de l’après-midi du 28 juin avec le ministère de la Défense, du 29 juin avec le NAO et du 30 juin avec la PASA constituent les problèmes clés auxquels le HC fait face. Nous ignorons pourquoi ils sont survenus.
MESURE À PRENDRE : Le HC a déjà envoyé des lettres d’excuses aux trois organisations du R.-U. et nous avons demandé de les obtenir. Si le sous-ministre envoie également des lettres, les efforts déployés seront suffisants […] du moins pour cette fois.
[…]
80 Quand M. Marshall s’est fait demander s’il savait que M. Tipple s’était absenté de certaines des réunions prévues du 28 au 30 juin 2006 parce qu’elles portaient sur des questions d’approvisionnement, il a répondu négativement. Il a en outre déclaré qu’il ignorait que les conseillers spéciaux avaient eu des ordres du jour différents (quoique dans son témoignage précédent, il a convenu que les conseillers spéciaux ont eu des programmes de réunions différents).
81 En ce qui concerne les lettres d’excuses, quand l’avocat de M. Tipple a dit à M. Marshall qu’il n’aurait pas dû s’abstenir de mentionner que M. Tipple n’a manqué aucune des réunions prévues qui avaient trait à son portefeuille, M. Marshall a répondu [traduction] « C’est votre avis. »
82 M. Marshall a confirmé qu’il a eu plusieurs séances de débreffage avec M. Tipple du 12 au 17 juillet 2006. En réponse à la question de savoir pourquoi il n’a jamais dit à M. Tipple pendant ces réunions qu’il enverrait des lettres d’excuses, M. Marshall a mentionné [traduction] « Je savais qu’il y avait un problème et qu’il était opportun de s’excuser. » Il a ensuite reconnu qu’il aurait été opportun de discuter des lettres avec M. Tipple.
83 L’avocat de M. Tipple a ensuite mentionné à M. Marshall un rapport hebdomadaire au sous-ministre, également appelé « rapport express », daté du 28 juillet 2006 (pièce G-1, onglet 28). Le rapport express faisait le point sur les progrès réalisés dans les initiatives de transformation des affaires auxquelles M. Tipple travaillait. Autrement dit, il s’agissait d’un rapport d’étape des principales réalisations de M. Tipple dans son plan de travail. M. Marshall a déclaré que 90 % des travaux suivants, auxquels M. Tipple se consacrait, n’ont pas été poursuivis par TPSGC :
- demande de propositions sur la transformation des affaires;
- demande de propositions sur les services de conseils financiers;
- stratégie et analyse de rentabilisation en cours;
- réunion sur les changements;
- réunion sur les risques;
- engagement budgétaire/du CED, Chef du bureau de projet;
- engagement budgétaire du CED, groupes chargés de la réalisation d’économies liées à la gestion des locaux et à la gestion du répertoire des biens;
- modèle d’organisation axée sur la gestion des biens immobiliers.
84 À ce stade de l’audience, à des fins de clarification, j’ai demandé à M. Marshall s’il avait témoigné que les initiatives de transformation des affaires auxquelles M. Tipple travaillait avant le 31 août 2006 avaient été interrompues et non poursuivies par TPSGC. M. Marshall a répondu affirmativement. L’avocat de M. Tipple a ensuite mentionné à M. Marshall plusieurs sections du « Rapport sur le rendement 2006-2007 de TPSGC » publié par le Secrétariat du Conseil du Trésor (pièce G-6). Après un interrogatoire exhaustif, M. Marshall a convenu que les initiatives suivantes se sont poursuivies après le 31 août 2006 : le modèle organisationnel de gestion des biens immobiliers, le Projet de transformation des activités et des systèmes, le logiciel commercial pour le Projet de transformation des activités et des systèmes de biens immobiliers, et la vente de neuf immeubles à bureaux fédéraux à une entreprise privée canadienne.
85 M. Marshall s’est fait interroger au sujet d’un courriel envoyé par M. Evanik à M. Trépanier le 31 juillet 2006 (pièce G-1, onglet 30), dans lequel il mentionnait : [traduction] « Nous avons obtenu par des moyens détournés une copie du rapport de voyage au Royaume-Uni […] aucune mesure prise en ce moment […] différent??? » M. Marshall a répondu qu’il n’avait pas vu le courriel et qu’il ignorait comment M. Evanik avait obtenu le rapport de voyage.
86 En ce qui concerne un courriel que Mario Baril, gestionnaire des relations avec les médias de TPSGC, a envoyé le 9 août 2006 au chef du bureau politique de M. Marshall et au chef du bureau politique du ministre, Frédéric Loiselle (pièce G-1, onglet 31), M. Marshall a répondu qu’il n’a pas vu le courriel ce jour-là parce qu’il était en vacances. Dans son courriel, M. Baril mentionne qu’il a reçu un courriel de Daniel Leblanc, journaliste à The Globe and Mail, et que M. Leblanc avait une copie du rapport de voyage de M. Tipple. M. Leblanc formulait certaines allégations et demandait des réponses. Voici un extrait du courriel de M. Leblanc :
[Traduction]
[…]
– À qui le document était-il destiné au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux? M. Marshall?
– Il est possible de trouver une grande partie du rapport sur Internet dans les sites suivants : www. amaresearch.co.UK/PF106 (cliquer sur la section : summary of contents) et www.adamsmith.org/ 80ideas/idea/5.htm. Pourquoi les auteurs n’ont-ils pas citer ces deux rapports en référence?
– Pourquoi les auteurs ont-il modifié le texte de manière à occulter des expressions comme [traduction] « À ce titre […] » et [traduction] « Qui plus est […] »?
– Pourquoi les auteurs ont-ils modifié certaines figures dans le texte (voir l’exemple ci-après)?
– M. Marshall savait-il que certaines parties du rapport avaient été obtenues de sources externes?
– Quels sont les salaires annuels des deux conseillers?
– Les conseillers ont-ils amené leur épouse en voyage et de combien de jours ont-ils prolongé leur voyage en Europe pour des motifs personnels? Le gouvernement a-t-il également défrayé cette partie du voyage?
– Quel est le coût approximatif du voyage pour le gouvernement?
– À qui M. Marshall devait-il envoyer des lettres d’excuses en Angleterre relativement aux réunions manquées par ses deux conseillers?
[…]
87 M. Marshall a ensuite été invité à se reporter à un rapport d’enquête intitulé [traduction] « Fuite de renseignements au journal The Globe and Mail » dressé par Daniel Desmarais, gestionnaire des enquêtes, Direction des enquêtes spéciales, TPSGC (pièce G-2, onglet 117). À la suite d’une demande de M. Trépanier, M. Desmarais a mené une enquête du 10 août 2006 au 1er août 2007. M. Marshall a mentionné que le rapport a été achevé après qu’il ait quitté TPSGC et qu’il était en vacances quand M. Leblanc a obtenu une copie du rapport de voyage de M. Tipple. Comme M. Marshall avait de la difficulté à se souvenir des noms et des dates, il a été prié de se reporter à certains paragraphes du rapport d’enquête. Il a alors répondu [traduction] « Après mon retour de vacances, on m’a peut-être mentionné que cette fuite faisait l’objet d’une enquête. » Il a convenu que la fuite de renseignements a peut-être nui à la réputation de M. Tipple. En réponse à d’autres questions sur le rapport d’enquête, il a répété que l’enquête a été achevée après son départ de TPSGC. Voici un passage du résumé du rapport d’enquête :
[Traduction]
[…]
4. L’enquête de la DES devait assurer un suivi du cycle de vie du rapport de voyage afin d’établir où, comment et quand il a pu être remis au journaliste. L’enquête complète a notamment consisté à interviewer de nombreux employés et à obtenir des déclarations de fait écrites de leur part, à obtenir de l’aide de la sécurité des TI pour examiner et résumer des milliers de communications par courriel et par téléphone, à étudier la preuve documentaire et à demander le soutien d’autres ministères.
5. La preuve recueillie confirme que le 2 août 2006, soit sept jours avant que le journaliste contacte le ministère, Mme Janet Thorsteinson, directrice générale, Approvisionnements militaires, Direction générale des approvisionnements de TPSGC, a échangé un courriel avec Mme Catherine Dickson, conseillère commerciale au Haut-commissariat du Canada au Royaume-Uni. L’enquête a révélé que Mme Dickson, qui avait agi comme contact au Royaume-Uni pour les deux conseillers de TPSGC, était, comme elle le mentionne dans ses communications par courriel, perturbée par le contenu du rapport de voyage, dont elle a reçu copie de Mme Thorsteinson le 2 août 2006 sous forme de pièce jointe à un courriel.
[…]
10. En résumé, Mme Thorsteinson est la seule fonctionnaire de TPSGC identifiée pendant l’enquête comme ayant fourni une copie du rapport de voyage à Catherine Dickson, qui ne travaille pas au ministère. Catherine Dickson […] [a] reconnu avoir été en communication avec le journaliste Daniel Leblanc. La preuve n’a pas établi de lien direct entre Mme Thorsteinson et la remise du rapport de voyage au journaliste; cependant, elle a fourni une copie du document à Mme Dickson […]
[…]
88 M. Marshall a affirmé qu’il ignorait que, le 31 juillet 2006, M. Evanik avait envoyé par courriel une copie du rapport de voyage de M. Tipple à son supérieur hiérarchique immédiat, Jonathan Higdon, directeur général par intérim, Politique et planification ministérielles, et à John Read, directeur principal, Approvisionnements militaires, TPSGC. Il ignorait également que M. Read avait acheminé le rapport de voyage à sa supérieure hiérarchique immédiate, Janet Thorsteinson, directrice générale, Approvisionnements militaires, TPSGC, et qu’elle a dit à M. Read de veiller à sa distribution à grande échelle. Quand M. Marshall s’est fait demander si Mme Thorsteinson était en congé spécial depuis le 6 août 2006, il a répondu qu’il ne se souvenait pas. De plus, il ne pouvait se rappeler s’il avait été avisé que le 23 mars 2007, Mme Dickson a reçu une lettre de réprimande à cause de sa participation.
89 Quand l’avocat de M. Tipple a dit à M. Marshall que ce dernier savait que M. Tipple n’avait pas annulé des réunions prévues, il a répondu [traduction] « Je ne le savais pas avec certitude. M. Tipple n’avait peut-être pas annulé de réunions. Il a élaboré un autre calendrier de réunion, mais il n’est pas allé où il était censé aller. » M. Marshall a convenu que M. Tipple l’a informé le 12 juillet 2006 qu’il n’avait annulé aucune des réunions auxquelles il était censé participer.
90 Quand l’avocat de M. Tipple a rappelé à M. Marshall que le rapport Minto ne mentionne pas que M. Tipple a annulé des réunions prévues, M. Marshall a dit [traduction] « Il y a eu un mélange. Certaines personnes les attendaient à des réunions et ils n’y étaient pas. J’ai envoyé des lettres d’excuses fondées sur ce que je savais. »
91 M. Marshall a confirmé que pendant qu’il était en vacances, Mme Aloïsi lui a téléphoné à un certain nombre de reprises et qu’il a reçu des courriels sur son Blackberry. Il a convenu que Mme Aloïsi l’avait informé que M. Loiselle avait communiqué avec elle le 15 août 2006, après un article paru dans The Globe and Mail au sujet du voyage au Royaume-Uni des conseillers spéciaux et que le ministre voulait savoir ce qui se passait. M. Marshall a dit que Mme Aloïsi l’a avisé qu’elle s’occupait de la situation et qu’elle préparait des infocapsules en réponse à l’article, mais il n’a jamais vu les infocapsules.
92 M. Marshall a également confirmé que Mme Aloïsi l’avait informé que M. Tipple l’avait avisée de la publication d’autres articles dans The Globe and Mail, que sa réputation était ternie et qu’il voulait que TPSGC soit « prêt au combat ». Quand l’avocat de M. Tipple a demandé à M. Marshall s’il convenait du caractère sacré de la réputation d’une personne et que celle-ci souhaite qu’elle soit protégée, M. Marshall a répondu positivement. Toutefois, il a dit que [traduction] « TPSGC s’abstient d’avoir ce genre de réaction, qui va à l’encontre du but recherché, et doit se pencher sur la meilleure voie à suivre. Dire la vérité au meilleur de nos connaissances constitue la meilleure façon de procéder. M. Tipple estimait que nous n’en faisions pas assez, mais c’est une question de jugement. »
93 Quand M. Marshall s’est fait demander s’il se souvenait d’avoir reçu un courriel de M. Baril le 9 août 2006 l’informant qu’à la demande du ministre, M. Baril devait rencontrer M. Leblanc ce jour-là (pièce G-1, onglet 36), M. Marshall a répondu qu’il ne se rappelait pas. Toutefois, il convenait que le cabinet du ministre avait un rôle à jouer à l’époque.
94 M. Marshall a affirmé qu’il ignorait que M. Baril avait envoyé un courriel à M. Tipple le 9 août 2006, soit le même jour, pour lui demander ses commentaires sur un certain nombre de messages clés préparés en vue de son entrevue avec M. Leblanc (pièce G-1, onglet 32). M. Marshall s’est ensuite fait mentionner le paragraphe intitulé « Lettres d’excuse », dont voici une partie du texte :
[Traduction]
[…]
[…] Dans le cadre de telles visites, il se produit parfois des conflits d’horaire. Dans le cas de ce voyage, trois conflits du genre sont survenus; des réunions prévues avec des fonctionnaires ont alors été remplacées par d’autres réunions. Lorsque de telles annulations surviennent, le ministère envoie des lettres d’excuses formelles. C’est une question de protocole et de courtoisie […]
[…]
M. Marshall a répondu que Mme Aloïsi ne l’a pas informé que le problème des réunions annulées était inclus dans les messages clés. Il a affirmé qu’il ignorait l’allégation de M. Leblanc selon laquelle M. Tipple avait plagié son rapport de voyage en s’abstenant d’inclure des attributions de certains documents qu’il a cité. M. Marshall a déclaré que lorsqu’il est revenu de vacances, il a appris que les attributions n’étaient pas incluses dans la version provisoire du rapport de voyage, mais qu’elles l’étaient dans le rapport final.
95 M. Marshall s’est ensuite fait mentionner un courriel que lui a envoyé M. Baril le 10 août 2006 (pièce G-1, onglet 37) pour l’informer que M. Leblanc désirait des copies des lettres d’excuses. Lorsqu’il s’est fait demander s’il avait répondu à la demande, il a dit qu’il ne l’a pas fait parce qu’il était en vacances et que Mme Aloïsi s’occupait de l’affaire. Il a mentionné que s’il n’avait pas été en vacances, il aurait fourni les lettres parce qu’il n’y avait rien à cacher.
96 M. Marshall ne pouvait se souvenir du courriel du 10 août 2006 que M. Tipple lui a fait parvenir ainsi qu’à Mme Aloïsi et à MM. Loiselle et Baril (pièce G-1, onglet 39). Dans son courriel, M. Tipple affirme qu’il vient d’apprendre que des lettres d’excuses ont été envoyées, qu’il ne les a jamais vues et qu’il ne pourrait donc pas commenter, et il répète qu’il a assisté à toutes les réunions prévues qui portaient sur des questions de biens immobiliers. En ce qui concerne la réponse de Mme Aloïsi à M. Tipple, selon laquelle il était normal de s’excuser, M. Marshall a répondu qu’il n’a pas conseillé Mme Aloïsi sur ce qu’il convenait de dire. Quand l’avocat de M. Tipple a mentionné que si TPSGC avait informé M. Leblanc le 10 août 2006 que M. Tipple avait assisté à toutes les réunions sur les biens immobiliers qui étaient prévues, il aurait été plus facile de protéger sa réputation, M. Marshall a reconnu que c’était bien possible.
97 L’avocat de M. Tipple a alors interrogé M. Marshall au sujet d’un courriel envoyé le 10 août 2006 par Bill Merklinger, directeur général, Transformation des services, Direction générale des biens immobiliers, TPSGC, à Marc-André Anderson, directeur par intérim, Communications stratégiques et d’affaires, TPSGC (pièce G-1, onglet 41). Dans son courriel, M. Merklinger mentionne que l’adjoint de direction de M. Tipple avait exclu par mégarde les références d’accréditation du rapport de voyage. Il fait observer que le rapport de voyage a fait l’objet d’une fuite et confirme que M. Tipple n’avait aucunement l’intention de plagier. M. Marshall a répliqué qu’il s’est rendu compte de la confusion seulement lorsqu’il a rencontré M. Minto le 22 août 2006.
98 M. Marshall a confirmé que même s’il n’avait pas vu l’article daté du 15 août 2006 de The Globe and Mail intitulé [traduction] « Six lettres d’excuses envoyées à des fonctionnaires britanniques » (pièce G-1, onglet 42), Mme Aloïsi l’a informé de son contenu. Il a mentionné que lorsque des journalistes tentent de contacter des employés ou de leur demander des entrevues, comme ce fut le cas de M. Tipple, les employés doivent informer les journalistes de communiquer avec la Direction générale des relations avec les médias de TPSGC. Autrement dit, M. Tipple aurait dû compter sur la Direction générale des relations avec les médias pour sortir l’information.
99 M. Marshall s’est fait demander si, en d’autres occasions, il avait déjà envoyé des lettres d’excuses à des gouvernements étrangers pendant sa carrière au sein de la fonction publique. Il a répondu que tel n’a pas été le cas.
100 L’avocat de M. Tipple a ensuite mentionné à M. Marshall l’article de The Globe and Mail intitulé [traduction] « Des députés doivent interroger des assistants sur un voyage en Grande-Bretagne » (pièce G-1, onglet 50) paru le 16 août 2006. M. Marshall a fait observer qu’un député a le droit de questionner un employé, mais qu’habituellement, c’est le sous-ministre, et non l’employé, qui rencontre le député.
101 En ce qui concerne le courriel daté du 16 août 2006 envoyé par M. Tipple pour informer M. Marshall qu’il avait reçu une demande d’accès à l’information sur son voyage au Royaume-Uni, qu’il n’avait pas reçu le plan médias et que sa réputation était ternie (pièce G-1, onglet 52), M. Marshall a répliqué qu’à sa connaissance, le plan médias avait été communiqué à M. Tipple.
102 Quand M. Marshall a été questionné sur la demande faite le 16 août 2006 par le ministre à M. Tipple de dresser une note de breffage sur son voyage au Royaume-Uni (pièce G-1, onglet 57), il a dit qu’il ne se souvenait pas s’il avait vu la note de breffage finale ou si le ministre l’avait reçue. À la mention de la note de breffage dressée par M. Tipple pour le ministre (pièce G-1, onglet 69), M. Marshall a convenu qu’il a pris connaissance d’une version le 22 août 2006 qui faisait notamment état du programme des réunions auxquelles M. Tipple avait assisté.
103 M. Marshall a confirmé qu’il était au courant du courriel envoyé par M. Tipple le 17 août 2006 à MM. Trépanier et Loiselle et à Mme Aloïsi (pièce G-1, onglet 61). M. Tipple avait demandé une réunion avec des représentants de la Direction générale des communications, mais sa demande a été refusée. Il s’est fait dire de s’adresser à Mme Aloïsi à ce sujet. M. Tipple a de nouveau demandé une rencontre avec des représentants de la Direction générale des communications pour faire part de ses préoccupations et de sa déception à l’égard du plan médiatique, parce qu’il ne faisait pas état des problèmes qu’il a soulevé à M. Trépanier il y a plusieurs jours. M. Tipple cherchait à mettre les choses au point en demandant une approche plus proactive, par opposition à une approche réactive, dans le but de préserver sa réputation. Dans le courriel, il proposait un certain nombre de messages qui auraient pu être envoyés à M. Leblanc pour mettre les choses au point. Les messages mentionnaient qu’il n’avait manqué aucune des réunions liées aux biens immobiliers; qu’il avait été invité par M. Rotor à assister aux rencontres sur l’approvisionnement, mais que les réunions sur les biens immobiliers occupaient tout son horaire; qu’il n’avait pas été avisé que TPSGC avait envoyé des lettres d’excuses; et que les notes de voyage qui étaient en la possession de M. Leblanc comportaient l’annotation « ébauche » et avaient été communiquées clandestinement par un membre du personnel de TPSGC. M. Marshall a déclaré que même s’il pouvait convenir que M. Tipple a pu avoir l’impression que sa réputation était ternie, il était en vacances lorsque M. Tipple a fait sa demande. Il a également affirmé que certaines preuves établissaient qu’à un moment donné, M. Tipple était d’accord avec les info-capsules originales et que l’approche adoptée par TPSGC de ne pas s’engager dans une guerre de mots avec la presse était adéquate. M. Marshall convenait que le ministre est responsable de TPSGC et que par conséquent, le cabinet du ministre a le contrôle exclusif de la stratégie médiatique qui implique TPSGC. M. Marshall a répondu négativement lorsqu’il s’est fait demander s’il connaissait l’existence d’une stratégie à l’égard des médias écrits élaborée par le cabinet du ministre.
104 M. Marshall a été prié de se reporter à un courriel que lui a envoyé Mme Aloïsi en date du 21 août 2006 (pièce G-5, onglet 7). Lorsque M. Marsall s’est fait demander par l’avocat de M. Tipple d’expliquer le contexte de la note de breffage mentionnée dans le courriel, il a répondu qu’il ne s’en souvenait pas. Quand il s’est fait demander s’il avait une copie de la note de breffage, M. Marshall a répondu qu’il en avait une. M. Marshall s’est ensuite fait demander de produire la note de breffage, ce qu’il a accepté de faire. J’ai également demandé qu’une copie de la note de breffage soit remise à l’avocat de M. Tipple. Ce qui n’a jamais été fait.
105 M. Marshall s’est fait demander s’il avait rencontré M. Minto le 25 août 2006, avant sa réunion avec le secrétaire du Conseil du Trésor et le ministre, pour discuter de son rapport. Il a répondu positivement.
106 M. Marshall a confirmé qu’il a eu une rencontre privée avec le ministre le 25 août 2006 pour parler des événements du voyage au Royaume-Uni. Il a déclaré que bien qu’il a informé le ministre que les événements ayant entouré le voyage au Royaume-Uni ne constituaient pas une infraction pouvant donner lieu à un congédiement, ils ont cristallisé sa réflexion de mai 2006. Il a ensuite affirmé qu’il savait que des travaux étaient en cours et que d’autres devaient être réalisés et que c’est lui qui a décidé de ralentir la cadence des travaux consacrés à l’initiative Les prochaines étapes, de poursuivre au gré de l’évolution des travaux et d’harmoniser les rôles des conseillers spéciaux au rôle de leurs sous-ministres adjoints respectifs en contexte de gestion hiérarchique. Il a formulé le commentaire suivant : [traduction] « Je savais que des travaux devaient se poursuivre, mais des membres du personnel pouvaient s’en occuper et Mme Orange serait affectée à M. McGrath pour l’aider. »
107 M. Marshall s’est fait demander s’il avait communiqué avec Mme Aloïsi après sa rencontre privée avec le ministre le 25 août 2006. M. Marshall a confirmé qu’il l’a fait et a ajouté [traduction] « Elle devait m’indiquer comment procéder à la cessation de l’emploi de M. Tipple. »
108 M. Marshall s’est fait demander s’il prenait habituellement des notes de ses réunions avec le ministre. Il a répondu affirmativement. Quand il s’est fait demander si il a pris des notes le 25 août 2006, lors de sa rencontre privée avec le ministre, il a répondu [traduction] « je ne me souviens pas et si je l’ai fait, elles ne sont plus en ma possession ».
109 M. Marshall a convenu que bien qu’il avait pensé à harmoniser les fonctions de M. Tipple à celles de M. McGrath, aucune intégration ni analyse de la structure organisationnelle n’a été réalisée. M. Marshall a ensuite été prié de se reporter à la « Note au sous-ministre » établie par Mme Lorenzato le 1er septembre 2006 (pièce G-2, onglet 92) et notamment au passage suivant : [traduction] « Dans le cadre de la révision de la structure organisationnelle du ministère […] » Quand il s’est fait demander s’il avait décidé de modifier la structure organisationnelle en une journée, il a répondu affirmativement, comme il avait le pouvoir de le faire.
110 M. Marshall a dit que le poste de M. Tipple, une fois aboli, n’a été créé de nouveau sous aucune forme.
111 M. Marshall a convenu qu’après qu’il a transféré les fonctions de transformation des affaires à M. McGrath, le 3 octobre 2006, Terry Homma a été nommé directeur de projet au Bureau du projet d’étude sur les biens immobiliers, TPSGC, et a formé une équipe de l’étude sur les biens immobiliers afin qu’elle réalise l’étude (pièce G-2, onglet 99).
112 En réplique, M. Marshall a confirmé qu’il possédait le pouvoir délégué de mettre fin à l’emploi d’un fonctionnaire, mais que le ministre ne l’avait pas. Quand il s’est fait demander si TPSGC s’était montré injuste, fourbe ou arbitraire dans sa façon de traiter M. Tipple, il a répondu [traduction] « Non, aucunement. La vie publique est injuste et il faut tenir sa langue. Ça fait partie de l’environnement. »
113 Quand l’avocat du défendeur a demandé à M. Marshall d’expliquer pourquoi l’expression « mise en disponibilité » n’a pas été mentionnée au cours des conversations avec Mmes Aloïsi et Lorenzato ou dans la lettre informant M. Tipple que ses services ne seraient plus nécessaires, M. Marshall a répondu qu’il avait demandé des façons de mettre fin à l’emploi pour une durée déterminée de M. Tipple, car il n’était plus nécessaire de disposer d’un conseiller spécial. Il a ajouté qu’il voulait obtenir le point de vue d’un conseiller en ressources humaines sur les options disponibles. Il a mentionné : [traduction] « Je n’ai pas utilisé l’expression mise en disponibilité parce que je ne le considérait pas comme un travailleur de l’automobile. »
114 Depuis le 2 mai 2006, Diane Lorenzato occupe le poste de sous-ministre adjointe par intérim, Ressources humaines. Son poste d’attache est celui de directrice générale, Communications, TPSGC. À titre de sous-ministre adjointe par intérim, elle est chargée du cadre stratégique de gestion, de la planification des ressources humaines, de la rémunération, de la classification et de l’abolition de postes, ainsi que de l’application de la Politique sur les conflits d’intérêts. Elle conseille en outre le sous-ministre sur les questions liées aux ressources humaines. À titre de directrice générale des communications, elle est chargée des communications internes et externes et des relations avec les médias.
115 Mme Lorenzato a confirmé qu’après le départ de M. Tipple, M. Marshall a aboli son poste.
116 Mme Lorenzato a témoigné que le 24 août 2006, à la suite d’une demande de M. Marshall, Mme Aloïsi l’a invitée à une réunion afin de discuter des options permettant de mettre fin aux emplois pour une période déterminée des conseillers spéciaux. Elle a été chargée d’envisager plusieurs scénarios, comme la suppression de l’emploi, le renvoi en cours de stage ou un échange avec un autre ministère ou organisme central. Mme Lorenzato a confirmé que l’onglet 70 de la pièce G-1 renferme des notes qu’elle a pris au cours de plusieurs réunions avec Mme Aloïsi, M. Marshall et d’autres fonctionnaires d’organismes centraux afin de discuter de la fin des emplois pour une période déterminée des conseillers spéciaux.
117 Le 25 août 2006, Mme Lorenzato a reçu un appel téléphonique de Mme Aloïsi. Elles ont discuté des façons de mettre fin à l’emploi pour une période déterminée de M. Tipple. Mme Lorenzato a témoigné qu’elle savait que M. Marshall voulait mettre fin à l’emploi pour une période déterminée des conseillers spéciaux, mais qu’elle ignorait pourquoi il voulait le faire. Il a d’abord été question du renvoi en cours de stage, puis de la suppression de l’emploi.
118 Le 28 août 2006, Mme Lorenzato a rencontré M. Marshall et Mme Aloïsi. Elle a affirmé que M. Marshall l’a avisée qu’il n’avait plus besoin des services de M. Tipple parce que l’initiative Les prochaines étapes était très en avance sur l’échéancier établi. Elle a fait observer que la discussion visant à mettre fin au poste pour une période déterminée de M. Tipple n’était pas liée aux événements survenus au Royaume-Uni.
119 Le 30 août 2006, à la suite de discussions avec Lynne Lemire-Lauzon, directrice générale, Direction des politiques de gestion des cadres supérieurs de l’AGRHFPC, Mme Lorenzato a informé M. Marshall qu’il pouvait abolir le poste de M. Tipple et fusionner ses fonctions à celles de M. McGrath. Plus tard, le même jour, Mme Lorenzato a rédigé la « Note au sous-ministre » et l’a fait parvenir à Mme Aloïsi afin qu’elle l’approuve. Mme Aloïsi a apporté quelques modifications mineures, puis M. Marshall a approuvé les recommandations de Mme Lorenzato (pièce G-2, onglet 92).
120 Le 31 août 2006, M. Marshall a rencontré M. Tipple et lui a remis la lettre l’informant que ses services ne seraient plus requis dès la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006 (pièce G-2, onglet 82). Mme Lorenzato a fait observer que conformément à la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor, M. Tipple avait droit à un préavis de un mois. Toutefois, M. Tipple a reçu un mois de salaire plutôt que de travailler jusqu’à la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006. Elle a dit que lorsque les services d’un employé ne sont plus requis, le compte de messagerie électronique de l’employé est désactivé sur-le-champ et l’employé est escorté jusqu’à la sortie. Elle a confirmé que ce protocole a été suivi dans le cas de M. Tipple.
121 En contre-interrogatoire, Mme Lorenzato a confirmé qu’elle a approuvé la réponse proposée et l’information fournie au cabinet du ministre à la suite des articles parus dans The Globe and Mail (pièce E-18). Elle a également convenu que le 21 août 2006, elle a rédigé une infocapsule qui mentionnait notamment ce qui suit : [traduction] « […] le Conseil du Trésor a approuvé la demande de créer deux nouveaux postes de niveau EX-05 pour une période déterminée de trois ans dont les titulaires seraient chargés de gérer la transformation des affaires, avec possibilité de prolongement de deux ans supplémentaires […] » (pièce G-1, onglet 63).
122 Quand Mme Lorenzato s’est fait demander quelles étaient les options discutées le 25 août 2006, elle a répondu : [traduction] « renvoi en cours de stage, suppression du poste, mutation au ministère de la Défense nationale ou au Conseil du Trésor ». Quand elle s’est fait demander si Mme Aloïsi lui avait demandé d’indiquer à M. Marshall des façons de mettre fin à l’emploi de M. Tipple, elle a confirmé qu’ils avaient discuté de la cessation de son emploi et non d’une mise en disponibilité.
123 Mme Lorenzato a été invitée à se reporter à une copie de ses notes manuscrites de plusieurs réunions auxquelles elle a assisté pour discuter des options permettant de mettre fin à l’emploi pour une période déterminée de M. Tipple (pièce E-25). Il a été mentionné à Mme Lorenzato que les notes dactylographiées (pièce G-1, onglet 70) différaient de ses notes manuscrites, et elle a dû expliquer ensuite l’observation suivante dans ses notes manuscrites : [traduction] « […] ne pas parler d’abolition de poste, les gens auront l’impression qu’ils seront […] » Elle a expliqué que Mme Lemire-Lauzon ne recommandait pas l’abolition du poste et le transfert des fonctions de M. Tipple à un autre poste de haut fonctionnaire à TPSGC sans avoir effectué au préalable une analyse parce que cela équivaudrait à créer de nouveau le poste et pourrait constituer un motif de réclamation pour congédiement déguisé. Quand elle s’est fait demander si elle appuyait le transfert des fonctions de M. Tipple au sous-ministre adjoint concerné, elle a répondu [traduction] « [j]e n’appuyais pas cette option parce que je ne connaissais pas le scénario du sous-ministre ».
124 Mme Lorenzato a convenu qu’aucune analyse ni discussion n’a eu lieu pour établir le travail qu’il restait à accomplir et qui assumerait la responsabilité du travail après le 31 août 2006.
125 En réplique, Mme Lorenzato a déclaré que M. Tipple n’a pas fait l’objet d’un congédiement déguisé et que son poste n’a pas été créé de nouveau.
B. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé
126 L’avocat de M. Tipple a d’abord passé en revue le curriculum vitae de M. Tipple (pièce G-1, onglet 1), qui donne le détail d’une longue carrière de cadre de direction dans nombre de sociétés, dont Bell Canada, BCE et CN Rail.
127 M. Tipple a témoigné qu’au début de 2005, un recruteur de cadres de direction d’une société de Toronto l’a abordé après que TPSGC ait fait paraître une annonce dans The Globe and Mail pour trouver des candidats aux postes de conseillers spéciaux des portefeuilles du sous-ministre, Approvisionnements et du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers.
128 M. Tipple a déclaré qu’avant d’accepter l’offre d’emploi, il a rencontré M. Marshall à un certain nombre d’occasions. Au cours de leurs discussions, il a été informé que son rôle consisterait à élaborer et à mettre en œuvre les initiatives suivantes :
- réaliser des économies de 1 G$ sur 5 ans par la transformation des affaires dans le domaine des biens immobiliers;
- assurer une direction et donner des conseils stratégiques pour instaurer et mettre en œuvre un changement sans précédent à la façon dont TPSGC gérait son programme des biens immobiliers;
- élaborer des stratégies à court, à moyen et à long terme pour appuyer la transformation et la mise en œuvre du secteur des biens immobiliers.
129 M. Tipple a témoigné que M. Marshall lui a dit que pour que l’initiative Les prochaines étapes soit couronnée de succès, la personne qui a élaboré les initiatives devait également les mettre en œuvre. M. Marshall l’a avisé que bien que la période de nomination mentionnée dans la lettre d’offre était de trois ans, l’initiative Les prochaines étapes pourrait nécessiter de trois à cinq ans.
130 Quand l’avocat de M. Tipple a fait mention de la « Description de poste du Groupe de la direction » (pièce G-1, onglet 3), M. Tipple a expliqué qu’il devait non seulement analyser et élaborer des stratégies, mais également les mettre en œuvre et surveiller le processus de mise en œuvre afin de veiller à la réalisation des objectifs du gouvernement du Canada et de TPSGC. Il a fait référence à la section suivante, intitulée « Nature et portée » :
[Traduction]
[…]
Le conseiller spécial dirigera l’analyse des conclusions des examens pluridimensionnels menés sur les pratiques, les programmes, les processus et les systèmes actuels qui avaient pour but de déterminer les manques d’efficacité, de cerner les secteurs qui doivent faire l’objet d’améliorations et d’innovations, et des nouvelles façons de faire des affaires. Le conseiller spécial sera chargé de diriger les analyses des risques, d’élaborer des analyses de la rentabilisation, de décider des approches les plus appropriées pour obtenir les résultats souhaités, de formuler des recommandations, d’élaborer des documents afin d’obtenir les approbations de changements, d’élaborer les stratégies, les plans, et le cheminement critique de mise en œuvre et de surveiller le processus de mise en œuvre pour réaliser les objectifs et les priorités du gouvernement et du ministère. Le titulaire, tout en étant chargé de diriger la transformation du secteur d’activités de la gestion des biens immobiliers de manière à ce qu’il soit plus efficace et efficient, s’emploie à réaliser l’objectif principal qui consiste à veiller à ce que le Ministère aide le gouvernement à effectuer efficacement des réductions de coûts de milliards de dollars réparties sur cinq ans afin que les économies soient réaffectées aux priorités sociales et aux soins de santé au sein du gouvernement.
[…]
131 M. Tipple a mentionné que le voyage au Royaume-Uni avait pour objet d’effectuer une analyse comparative des organisations du gouvernement et du secteur privé, d’évaluer les cadres de gestion, et d’étudier les meilleures pratiques. À la demande de M. Marshall, il a établi une justification de voyage, que M. Marshall a approuvé le 12 mai 2006 (pièce G-1, onglet 9). Le coût du voyage était évalué à 4 900,00 $.
132 M. Tipple a déclaré que sa femme l’a accompagné au Royaume-Uni, parce qu’il devait être en vacances du 4 au 7 juillet 2006. Il ne connaissait aucune politique gouvernementale qui empêchait sa femme de l’accompagner dans la mesure où les dépenses de celle-ci n’étaient pas réclamées. Il a confirmé qu’aucune des dépenses de sa femme n’a été soumise à TPSGC. Il a également confirmé que M. Marshall avait autorisé sa demande de congé annuel (pièce G-1, onglet 11).
133 M. Tipple a déclaré que bien que M. Evanik l’a informé le 22 juin 2006 que Mme Dickson serait présente et prendrait des notes aux réunions du ministère de la Défense et du Office of Government Commerce du Royaume-Uni, prévues les 27 et 28 juin 2006 (pièce G-1, onglet 12), elle n’y a pas assisté.
134 M. Tipple a déclaré qu’il a assisté à toutes les réunions qu’il avait inscrites à son horaire avec les divers fonctionnaires et organismes britanniques qui s’occupaient des questions de biens immobiliers. Il a mentionné qu’il avait également prévu des réunions avec des entreprises privées qui s’intéressent aux questions de biens immobiliers.
135 M. Tipple a affirmé que le 12 juin 2006, son adjointe de direction a informé M. Evanik (qui était le contact avec Mme Dickson) qu’il n’assisterait pas à la réunion avec le NAO et qu’elle fournirait à M. Evanik la liste des réunions auxquelles M. Tipple était censé assister (pièce G-8, onglet 4). M. Tipple a déclaré qu’il avait organisé un certain nombre de réunions avec des sociétés privées britanniques qui s’occupaient de questions de biens immobiliers. Son adjointe de direction avait accès à son calendrier personnel, et elle devait s’assurer que M. Evanik reçoive une copie de son agenda(pièce G-8, onglet 6).
136 M. Tipple a mentionné que le jour de son départ vers le Royaume-Uni, Mme Dickson avait informé M. Evanik et Richard Westler, du Secteur de la politique et de la planification ministérielles de TPSGC, qu’elle ne pouvait fournir de détails au sujet des réunions prévues pour M. Tipple, mais qu’elle le ferait à l’arrivée de celui-ci à Londres le 26 juin 2006 (pièce G-2, onglet 117). Quand M. Tipple est arrivé à Londres, il a informé Mme Dickson et M. Saint-Jacques qu’il n’assisterait pas à la réunion du ministère de la Défense traitant de questions d’approvisionnement parce que celles-ci ne relevaient pas de sa responsabilité, mais qu’il serait présent aux réunions du ministère de la Défense sur les questions de biens immobiliers.
137 M. Tipple a alors été prié de se reporter à la note de breffage qu’il avait rédigée pour le ministre. Cette note s’intitulait [traduction] « Voyage d’observation au Royaume-Uni, du 26 au 30 juin 2006 ». Il a déclaré qu’il a envoyé plusieurs versions à M. Marshall et que la version finale a été soumise à M. Marshall et au ministre le 31 août 2006 (pièce G-2, onglet 85). Dans la note de breffage se trouve le tableau suivant qui donne en détails les heures, les endroits, les sujets devant être discutés et les hôtes des réunions auxquelles il a assisté :
LE 26 JUIN 2006
HEURE
RÉUNION
1600 —1700
Présent au bureau du Haut-commissariat plutôt qu’à la Maison du Canada tel qu’il était prévu initialement.
Haut-commissariat du Canada
Lieu : Bureau du Haut-commissariat – déplacé de la Maison du Canada, Trafalgar Square, Pall Mall East, Londres
Sujet : Séance d’information générale donnée au Haut-commissaire adjoint du Canada sur l’objet de la visite, l’ordre du jour et les résultats souhaités.
Hôte : Guy Saint-Jacques, Haut-commissaire adjoint du Canada
1700-2130
Présent
AT Kearney
Lieu : Lansdowne House, Berkeley Square, Londres, W1J 6ER
Sujet : Discussion sur des initiatives privées en finances, expérience d’impartition britannique et répercussions pour TPSGC
Hôte : Charles Hughes, vice-président
27 JUIN 2006
HEURE
RÉUNION
0945-1700
Présent
Office of Government Commerce
Lieu : Office of Government Commerce – Trevelyan House, 26-30 Great Peter Street
Sujet : Examiner les pratiques innovatrices dans les domaines de l’approvisionnement et des biens immobiliers :
· Solutions d’acquisition
· Initiatives de partenariat public-privé
· Meilleure pratique privée en matière d’impartition
Hôte : Ian Glenday, directeur général, Better Projects, OGC
27 ou 28 juin
À confirmerRéunion sur les approvisionnements – absent
Sustainable Procurement Task Force
Sujet de discussion :
· L’impartition
· La recapitalisation
· La British Private Finance Initiative
Hôte : Sir Neville Sims, président du Sustainable Procurement Task Force.
28 JUIN 2006
HEURE
RÉUNION
1130 -1330
Présent
RBC Capital Markets
Lieu : RBC, Thames Court, One Queen – Upper Thames Street, Londres – EC4V 4DE
Sujet : La PFI/le PPP en Europe et d’autres modes d’approvisionnement qui s’appliquent au secteur des biens immobiliers du gouvernement, dont le transfert des risques, la valeur résiduelle et et le revenu excédentaire versé à l’actif; la transparence; et la négociation avec le secteur privé. Établissement de la source de l’actif et du passif.
Hôte : Adrian Bell, président, RBC Europe
1400 - 1600
Présent
Ministère de la Défense
Lieu : H.M. Ministère de la Défense, Main Building, Whitehall, Londres SW1
Sujet : Problèmes de biens immobiliers auxquels fait face le ministère de la Défense, et en particulier le projet MODEL (immobilier).
Hôte : Ross Campbell, Private Finance Unit & Project manager, MODEL.
1615 - 1800
Présent
H.M. Treasury
Lieu : Private Finance Unit, Treasury – H.M. Treasury, One Horse Guards, Londres – SW1
Sujet : Questions stratégiques concernant l’impartition de la gestion des biens immobiliers par le gouvernement, dont l’optimisation des ressources, la transparence et l’évitement de pertes fiscales.
Hôte : Danny Daniels, conseiller financier en PFI
1900 - 2130
Absent
Souper au Saint James Club avec Ray Celli – connaissance de David Rotor – St-James Club (Londres)
Réunion sur les approvisionnements –
absentMinistère de la Défense – Defence Procurement Agency (DPA) et Defence Estates
Sujet : Discuter de nouvelles pratiques d’approvisionnement et de la méthodologie générale de l’approvisionnement efficace.
29 JUIN 2006
HEURE
RÉUNION
0830 - 0930
Présent
Partnership UK
Lieu : Partnership UK, Great George Street, Londres
Sujet : Le rôle de Partnerships UK dans l’établissement d’un partenariat public-privé; divers modèles d’approvisionnement liés aux biens immobiliers nécessaires et excédentaires; et l’exploitation des possibilités de développement pour le secteur public.
Hôte : Alan Couzens, directeur de projet
1300-1400
Présent
Mapeley
Lieu : 20e étage, Euston Tower , 286 Euston Road
Sujet : La Private Finance Initiative « STEPS »
Hôte : Jameson Hopkins, chef de direction
1400 – 1530
Présent
Carillon
Lieu : BT Centre, St-Paul’s, Londres EC4
Sujet : Le rôle du secteur privé dans les PPP en gestion de biens immobiliers. Autres modèles d’impartition; transfert des risques; partage des bénéfices.
Hôte : Peter Jones; directeur des opérations
1400-1545
Réunion sur les approvisionnements –
absent
National Audit Office (NAO)
Sujet : Le rôle du Procurement Office, Toolkit, UK Efficiency Review Programme, projets de partenariat dans le cadre de la Private Finance Initiative.
Hôte : Phil Airey, gestionnaire de la vérification, NAO (Toolkit), autres participants du NAO.
30 JUIN 2006
HEURE
RÉUNION
0830-1200
Présent
AT Kearney
Lieu : Lansdowne House
Sujet : Projet d’impartition par TPSGC
Hôte : Charles Hughes, vice-président
0930-1400
Réunion sur les approvisionnements –
absent
National Health Services Purchasing & Supply Agency (PSSA)
Sujet : Politiques, processus et systèmes (travaux d’amélioration majeure); politique de développement durable; politique sur les acquisitions et les approvisionnements.
1400-1500
Présent
Land Securities
Lieu : Land Securities, 140 Londres Wall, Londres, EC27 5DW
Sujet : Opération Trillium et Private Finance Initiatives avec Land Securities
Hôte : Mike Schraer; directeur général, Stratégie commerciale
Conclusion du voyage d’affaires
138 M. Tipple a noté que les réunions sur les questions de biens immobiliers étaient coordonnées par son personnel et que M. Evanik communiquait son agenda à Mme Dickson. Il a répété qu’il a assisté à toutes les réunions auxquelles il était censé prendre part et qu’il n’a ni manqué ni annulé de réunions.
139 M. Tipple a déclaré qu’il ignorait que le 5 juillet 2006, M. Trépanier a envoyé un courriel à M. Marshall pour l’informer que le MAÉCI s’inquiétait du fait que les conseillers spéciaux ne se sont pas présentés à plusieurs réunions prévues (pièce G-1, onglet 20). Il ignorait également que M. Trépanier a envoyé une note à M. Marshall le 12 juillet 2006 dans laquelle il mentionnait que M. Saint-Jacques ferait parvenir des lettres d’excuses aux organismes du Royaume-Uni concernés (pièce G-1, onglet 21).
140 Quand M. Tipple a été prié de se reporter aux passages suivants des lettres d’excuses que M. Saint-Jacques a fait parvenir aux organismes du Royaume-Uni concernés, dont il a envoyé copie à M. Marshall (pièce G1, onglets 16 à 18), M. Tipple a répondu qu’il n’a jamais été consulté ni informé des allégations de mauvais comportement de sa part :
- La lettre adressée au ministère de la Défense mentionnait ce qui suit : [traduction] « […] je tiens à m’excuser très sincèrement de l’absence de deux représentants de TPSGC à une journée de réunions […] » (pièce G-1, onglet 16).
- La lettre adressée au NAO mentionnait ce qui suit : « […] je tiens à m’excuser très sincèrement du comportement de MM. David Rotor et Douglas Tipple […] » (pièce G-1, onglet 18).
141 En ce qui a trait au « rapport d’état interne » de M. Evanik du 6 juillet 2006 (pièce G-1, onglet 14), M. Tipple a déclaré que tant TPSGC que le Haut-commissariat étaient responsables de la cause fondamentale des conflits d’horaire. Voici un passage du rapport d’état interne :
[Traduction]
[…]
2- Absences aux réunions – Bien que les absences soient au cœur du problème, il convient de noter que le HC ne s’est acquitté que partiellement de son engagement à notre égard (en particulier en ce qui a trait à la coordination et au soutien des réunions du ministère de la Défense) […] ce qui a occasionné des problèmes importants. De plus, TPSGC n’a pas insisté avec autant de diligence qu’il aurait dû le faire pour que le HC nous fournisse les renseignements qui nous auraient fait gagner du temps du point de vue des documents et des horaires! […]
[…]
142 M. Tipple a affirmé que le 12 juillet 2006, il a rencontré M. Marshall pour discuter du courriel de M. Trépanier (pièce G-1, onglet 20). Il a informé M. Marshall qu’il n’a manqué aucune des réunions prévues qui portaient sur des questions de biens immobiliers et que les conflits d’horaire découlaient d’un manque de coordination entre TPSGC et le Haut-commissariat. Il a également dit à M. Marshall que M. Rotor avait manqué plusieurs réunions à cause d’un manque de soutien du Haut-commissariat. M. Marshall lui a dit de ne pas s’inquiéter à ce sujet et lui a demandé de rédiger un rapport de voyage. Au cours de leur réunion, M. Marshall ne l’a pas informé de ses lettres d’excuses ou de celles de M. Saint-Jacques ou des allégations de mauvais comportement. M. Tipple a précisé que son horaire ne prévoyait pas qu’il assiste aux réunions sur l’approvisionnement parce que cette question ne relève pas de sa responsabilité et que Mme Dickson en avait été informée.
143 M. Tipple a témoigné qu’il a appris le 9 août 2006 que M. Leblanc avait obtenu une copie de son rapport de voyage. Le même jour, il a également appris que des lettres d’excuses avaient été envoyées le 17 juillet 2006 à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni concernés. M. Tipple a tout de suite informé M. Baril qu’il n’a manqué aucune des réunions inscrites à son horaire et lui a demandé d’expliquer comment M. Leblanc s’est procuré une copie de son rapport de voyage. M. Baril a répondu qu’il s’informerait, mais il n’a pas renseigné M. Tipple.
144 M. Tipple a raconté que quelques mois plus tôt, des documents de nature délicate qu’il avait préparé pour le ministre et le Bureau du Conseil privé (BCP) ont été retirés de son bureau et que les détails de ces documents avaient été publiés sur la page frontispice de The Ottawa Citizen. M. Marshall a lancé une enquête interne ainsi qu’une enquête de la GRC. Des ordinateurs personnels de TPSGC et de certains employés ont fait l’objet d’une vérification judiciaire pour déterminer qui était à l’origine de la fuite de renseignements. M. Tipple a fait observer ce qui suit : [traduction] « J’apprends maintenant que mon rapport de voyage a été communiqué clandestinement à The Globe and Mail. Je me demandais sérieusement si d’autres documents gouvernementaux de nature délicate avaient également fait l’objet d’une fuite et à qui. »
145 L’avocat de M. Tipple l’a ensuite prié de se reporter au courriel que M. Baril lui a fait parvenir le 9 août 2006 pour lui demander ses commentaires sur les messages clés élaborés en vue de l’entrevue de M. Baril avec M. Leblanc (pièce G-1, onglet 32). M. Tipple a déclaré qu’il a fait part de ses observations. Plus tard le même jour, M. Anderson a répondu ce qui suit (pièce G-1, onglet 32) :
[Traduction]
[…]
En ce qui concerne votre message précédent, nous vous communiquerons une copie de nos échanges de courriels avec le journaliste. Nous dressons également des rapports sur les médias, qui constituent un synopsis des conversations, lorsque nous parlons à un journaliste. Nous vous les communiquerons également. Toutefois, veuillez prendre note que nous ne possédons pas l’équipement nécessaire pour fournir les transcriptions.
[…]
M. Tipple a affirmé qu’il n’a jamais reçu de copie des courriels échangés entre M. Leblanc et TPSGC ou du synopsis de ces conversations.
146 M. Tipple a mentionné que lorsqu’il a demandé à M. Baril s’il pouvait être présent à l’entrevue avec M. Leblanc, M. Baril a acheminé sa demande à M. Loiselle, qui a répondu que selon lui, ce ne serait une bonne idée (pièce G-1, onglet 34). Plus tard ce jour-là, M. Leblanc a interviewé M. Baril.
147 M. Tipple a déclaré que le 10 août 2006, il a envoyé le courriel suivant à MM. Marshall, Baril, Loiselle et Trépanier et à Mme Aloïsi (pièce G-1, onglet 39) :
[Traduction]
[…]
J’ignorais jusque tard hier que le sous-ministre a envoyé des lettres d’excuses […] Je n’ai pas été consulté du tout sur cette question. Je n’ai reçu aucune copie de ces lettres; je ne peux donc pas les commenter. Je tiens à préciser que j’ai assisté à toutes les réunions sur la gestion des biens immobiliers qui étaient prévues.
[…]
M. Tipple était outré lorsqu’il a reçu la réponse de Mme Aloïsi indiquant que la présentation d’excuses constituait une pratique usuelle, et il l’a informée qu’il était insatisfait de sa réponse. Il a ensuite envoyé un autre courriel à Mme Aloïsi et à M. Loiselle pour demander que TPSGC mène une enquête dans le but d’établir qui avait eu accès à son ordinateur et qui a communiqué clandestinement l’information à M. Leblanc (pièce G-1, onglet 38). Mme Aloïsi a accepté sa demande et a donné instruction à Richard Marleau, des Services ministériels de TPSGC, de faire enquête sur la question. Toutefois, les résultats de l’enquête de M. Marleau n’ont jamais été communiqués à M. Tipple. Il a affirmé être estomaqué de devoir être la personne qui devait demander l’enquête.
148 M. Tipple a déclaré que le 10 août 2006, M. Merklinger a envoyé le courriel suivant à M. Anderson concernant les allégations de M. Leblanc selon lesquelles M. Tipple avait plagié son rapport de voyage (pièce G-1, onglet 41) :
[Traduction]
[…]
- Avant le voyage de Doug au Royaume-Uni, il a chargé à juste titre l’un de nos analystes de la DGBI, Andrew James, de faire de la recherche avancée sur des sujets pertinents. Avant le voyage au Royaume-Uni, Andrew a acheminé le fruit de la recherche à Doug (copie électronique originale ci-jointe, en mentionnant les crédits appropriés (p. ex., le Adam Smith Institute).
- Doug a jugé qu’une partie de la recherche était pertinente et a demandé que des parties soient incluses dans la première version de son rapport de voyage. Il a chargé son adjoint administratif, Rod McKie, de préparer une première version à partir de plusieurs documents originaux, dont des passages des recherches d’Andrew, les notes de voyage manuscrites de Doug, et ainsi de suite. En préparant la première version du rapport de voyage, Rod a exclu par mégarde les crédits appropriés (p.ex., Adam Smith Institute) qui étaient inclus initialement dans le document ci-joint. Cet oubli aurait été relevé dans l’AQ finale si ce texte était demeuré dans la version finale du rapport de voyage.
- Peu importe l’« apparence » pour le journaliste, sur la base de documents communiqués clandestinement de manière inappropriée (Doug a demandé que le sous-ministre délégué lance une enquête), il n’y avait pas de plagiat, volontaire ou accidentel. L’AQ finale des documents de travail provisoires auraient relevé cet oubli, et la recherche initiale ci-jointe établit clairement que les crédits universitaires appropriés avaient été accordés.
[…]
149 En ce qui concerne l’article du 15 août 2006 paru en une de The Globe and Mail (pièce G-1, onglet 42), M. Tipple a confirmé que sa photographie se trouvait sous le titre suivant : [traduction] « Le voyage de conseillers fédéraux en Grande-Bretagne soulève la colère. Des fonctionnaires auraient annulé des réunions. » Il a déclaré que l’article nuisait considérablement à sa réputation et l’a rendu « malade ». L’article rapportait que TPSGC avait envoyé des lettres d’excuses pour des réunions manquées et formulait des allégations de plagiat et de comportement contraire à l’éthique, ce qui donnait l’impression qu’il était coupable d’avoir commis des infractions.
150 M. Tipple a confirmé que le ministre et M. Loiselle étaient bien au courant de l’article de The Globe and Mail daté du 15 août 2006 parce qu’ils avaient échangé les courriels suivants (pièce G-8, onglet 13) :
- Le courriel du ministre à M. Loiselle : [traduction] « La une de The Globe and Mail n’est pas jolie […] voir l’article de Daniel Leblanc. »
- La réponse de M. Loiselle : [traduction] « Je crois que c’est le genre d’article qui mettra le feu au derrière « du centre » […] et du patron. »
- La réplique du ministre : [traduction] « Nous devons communiquer avec Marshall (vous) et nous informer de la raison de ce voyage. L’article est peut-être exagéré. Je veux savoir à quoi m’en tenir dès que possible. »
151 Le 15 août 2006, M. Tipple a informé M. Baril que M. Leblanc avait communiqué avec son bureau, et M. Tipple a demandé de rencontrer M. Leblanc. Il a déclaré que M. Leblanc voulait connaître le plan d’action et que M. Baril l’a informé que les appels des journalistes devraient être acheminés à la Direction générale des relations avec les médias de TPSGC. M. Tipple a mentionné que son adjointe de direction avait informé M. Baril que M. Tipple attendait toujours un plan médias, ce qui fait que M. Anderson a envoyé un courriel à M. Trépanier et à Mme Aloïsi pour leur demander comment ils voulaient procéder dans le cas de la demande de M. Tipple. Ce dernier a fait observer que M. Trépanier a donné instruction à M. Anderson de ne pas répondre à son courriel (pièce G-8, onglet 18).
152 M. Tipple a témoigné que plus tard le 15 août 2006, il a appelé M. Baril pour lui demander d’approuver une rencontre avec M. Leblanc pour réfuter les déclarations incorrectes publiées dans l’article. Il a également demandé s’il pouvait rencontrer le ministre pour donner sa version de l’histoire. Il a déclaré que M. Baril l’a informé qu’il ne pouvait rencontrer aucun des deux et qu’il avait dressé un plan médias. M. Tipple a mentionné qu’il n’a pas reçu de copie du plan médias.
153 L’avocat de M. Tipple l’a ensuite prié de se reporter à l’article publié le 16 août 2006 dans The Globe and Mail, intitulé [traduction] « Des députés veulent interroger des assistants sur un voyage en Grande-Bretagne » (pièce G-1, onglet 50). M. Tipple a déclaré que Peggy Nash, vice-présidente du Comité de la Chambre des communes sur les opérations gouvernementales, ainsi que les députés du Parti libéral et du Bloc Québécois qui représentaient la majorité des membres du Comité, désiraient obtenir un rapport plus complet du voyage au Royaume-Uni. M. Tipple a mentionné la phrase suivante de l’article : [traduction] « […] le porte-parole de Travaux publics, M. Mario Baril, a défendu le voyage cette semaine et a affirmé que les réunions avaient été annulées en raison de problèmes logistiques […] » Il a déclaré qu’il était plutôt fâché que TPSGC ait fourni des renseignements trompeurs et ne le défendait pas. Il se sentait démuni de ne pas avoir été autorisé de se défendre contre les allégations fausses et il a donc envoyé le courriel suivant à M. Baril, avec copie à M. Loiselle et Mme Aloïsi (pièce G-1, onglet 52) :
[Traduction]
[…]
J’ai maintenant reçu une demande d’AIPRP au sujet du voyage, des demandes internes au sujet de mon agenda, un résumé de mes réalisations et je constate que des questions pourraient être soulevées à la Chambre. Je répète ma question antérieure à laquelle je n’ai pas obtenu de réponse, sauf pour me donner instruction de ne pas parler aux médias. Avons-nous un plan médias et dans l’affirmative, auriez-vous l’obligeance de me le communiquer étant donné que ma réputation est ternie?
[…]
154 M. Tipple a déclaré qu’il a été avisé de rédiger une note de breffage pour le ministre dans laquelle il résumerait son voyage au Royaume-Uni (pièce G-1, onglet 58). Le 17 août 2006, il a envoyé un courriel à M. Loiselle pour lui demander si la note de breffage avait pour objet de préparer une déclaration pour le secrétaire parlementaire du ministre (pièce G-1, onglet 27). Cependant, M. Loiselle n’a jamais répondu.
155 Le 17 août 2006, The Globe and Mail a publié un article faisant état de ce qui suit (pièce G-1, onglet 55) :
[Traduction]
[…]
Les députés du Parti libéral, du Nouveau Parti démocratique et du Bloc Québécois ont dit qu’ils voulaient obtenir un rapport complet du voyage et demanderont à M. Rotor et à M. Tipple de comparaître devant un comité parlementaire après le retour de la Chambre des communes le mois prochain.
[…]
M. Tipple a déclaré qu’il était enthousiaste de pouvoir finalement rencontrer les membres du Comité de la Chambre des communes pour rétablir les faits. De plus, il s’inquiétait des messages communiqués aux médias par TPSGC parce que The Globe and Mail avait également mentionné ce qui suit : [traduction] « il se pose de graves problèmes d’ouverture et de responsabilisation. Malgré les enseignements du scandale des commandites, les fonctionnaires de Travaux publics demeurent sur la défensive et très secrets. »
156 Plus tard le 17 août 2006, M. Tipple a envoyé le courriel suivant sur le plan médias à M. Trépanier, avec copies à M. Loiselle et à Mme Aloïsi (pièce G-1, onglet 61) :
[Traduction]
[…]
[…] Je me dois de faire part de mes réserves et de ma déception au sujet du plan médias que vous décrivez. Ce plan n’est que réactif et ne tente aucunement de « rétablir les faits » dans mon cas personnel. À la suite de notre dernière réunion, au cours de laquelle j’ai fait part des réserves en question, j’espérais que le plan médias en tiendrait compte.
De plus, Lucie Scott a tenté d’organiser une réunion avec les Communications en mon nom hier après-midi, mais la demande a été refusée. Elle s’est fait dire que je devrais m’adresser au sous-ministre délégué.
En cherchant à obtenir une rencontre avec les Communications, j’avais pour but de demander une approche proactive visant à préserver ma réputation. Comme j’ai été informé de l’article pour la première fois la semaine dernière, j’aurais voulu que les messages suivants soient transmis à M. Leblanc, du journal The Globe and Mail :
1) M. Tipple n’a manqué aucune réunion liée à la gestion des biens immobiliers qui avait été organisée par l’une ou l’autre des parties. La réunion en question portait sur l’approvisionnement et M. Rotor a invité M. Tipple à assister aux réunions sur l’approvisionnement si son horaire le lui permettait. L’horaire de M. Tipple était chargé et en conséquence, il n’a pas assisté à ces réunions.
2) Les lettres d’excuses n’ont pas été envoyées par le Ministère pour le compte de M. Tipple ou par suite de gestes qu’il a posés. Comme les réunions annulées ne concernaient pas M. Tipple, il n’a pas été consulté dans le cadre de la préparation et de la production des lettres.
[…]
M. Trépanier a répondu ce qui suit (pièce G-1, onglet 61) :
[Traduction]
[…]
Comme vous savez (parce que vous avez approuvé le texte des infocapsules), le ministère a communiqué clairement sa réponse tel qu’il est énoncé dans le texte au journaliste lorsqu’il s’est informé au sujet du rapport pour la première fois et avant la publication d’articles de journaux.
Ceci dit, il importe de mentionner que l’article de journal a soulevé des questions pertinentes pour le gouvernement et pour le ministère. Dans le régime parlementaire canadien, les ministres doivent rendre compte des gestes de leurs ministères. Par conséquent, les ministres ont la responsabilité ultime des communications.
La stratégie de communications suivie par le ministère depuis la parution de l’article mardi a été retenue comme meilleure option pour communiquer la position du gouvernement. Nous avons mis cette stratégie en œuvre.
Au fur et à mesure que la situation évoluera, nous réévaluerons constamment l’approche du ministère et nous vous tiendrons au courant des développements.
[…]
M. Tipple a expliqué qu’il était d’accord avec le « bulletin d’information aux médias » original car c’est tout ce que TPSGC était prêt à faire. Les articles dans The Globe and Mail devenaient plus personnels et comportaient des allégations plus graves, et TPSGC ne révisait pas sa stratégie de communications ni ne lui fournissait un plan médias. Il a demandé une copie de la stratégie de communications et du plan médias, mais ne les a pas reçus.
157 Le 18 août 2006, The Globe and Mail a publié un article intitulé[traduction] « Le ministre exige des réponses. Fortier souhaite obtenir des détails sur le voyage d’observation à Londres. » M. Tipple a témoigné que l’article renfermait des passages d’un courriel qu’il avait fait parvenir à ses collègues la veille (pièce G-1, onglet 61). Il a de nouveau fait remarquer que [traduction] « [q]uelqu’un au ministère fournissait clandestinement des communications internes à The Globe and Mail ». L’article donnait le détail de trois réunions manquées et mentionnait les lettres d’excuses et les questions d’approvisionnement. Il a noté que personne ne défendait sa réputation même s’il avait demandé à plusieurs reprises à TPSGC et au cabinet du ministre une copie du plan médias (pièce G-5, onglet 1).
158 Plus tard, le 18 août 2006, M. Read a envoyé un courriel à Mme Thorsteinson (pièce G-8, onglet 26) dans lequel il mentionnait un article de Kathryn May paru en une de The Ottawa Citizen ce matin-là. L’article laissait entendre qu’un rapport secret a provoqué l’ire de fournisseurs fédéraux et que le ministre avait demandé à M. Marshall un rapport complet sur le voyage au Royaume-Uni. Mme Thorsteinson a répondu ce qui suit à M. Read : [traduction] « Je l’ai et je vérifie The Globe and Mail. » (pièce G-8, onglet 26). M. Read a alors répondu : [traduction]« C’est fini Miss Molly […] Marshall n’est-il pas censé tomber sur son épée, ou tenter de se faire hara-kiri, ou quelque chose du genre? » (pièce G-8, onglet 26). Mme Thorsteinson a répondu : [traduction] « Il offrira plus vraisemblablement un bouc émissaire. » (pièce G-8, onglet 26). M. Tipple a déclaré que M. Marshall a fait de lui un bouc émissaire pour calmer le ministre, les partis d’opposition, la population et la presse.
159 M. Tipple a résumé son entrevue du 22 août 2006 avec M. Minto et le rapport Minto (pièce G-1, onglet 65). M. Tipple a fait remarquer que le rapport Minto mentionnait qu’il lui faudrait comprendre les règles d’autorité s’il devait être appelé à comparaître devant un Comité de la Chambre des communes. De plus, M. Minto a informé M. Marshall que M. Tipple était fâché du fait que TPSGC ne le défendait pas contre les reportages faux et que M. Tipple croyait qu’un membre du personnel de TPSGC communiquait clandestinement et de son plein gré ses documents parce que cette personne n’aimait pas les changements et les économies réalisés par M. Tipple.
160 M. Tipple a déclaré que le 23 août 2006, à la suite d’une demande de M. Marshall, M. Minto a revu la note de breffage envoyée par M. Tipple au ministre (pièce G-1, onglet 69), qui comportait l’énoncé suivant :
[Traduction]
M. Tipple était le bienvenu aux réunions sur l’approvisionnement; cependant, son horaire chargé de réunions sur la gestion de biens immobiliers l’empêchait d’y assister. M. Tipple a assisté à toutes les réunions sur les biens immobiliers. Rien de ce qu’il a fait ou n’a pas fait n’a fait l’objet d’une lettre d’excuses ni ne justifiait une telle lettre. M. Tipple ignorait l’existence des lettres d’excuses, car il n’a pas été consulté relativement à la préparation ou à l’envoi de ces lettres.
M. Minto a informé M. Tipple qu’il n’était pas à l’aise avec la mention des lettres d’excuses, et il a recommandé que M. Tipple la retire. M. Tipple a affirmé qu’il a répondu que les lettres d’excuses étaient au cœur de la controverse, que le fait de les passer sous silence ne passerait pas inaperçu et qu’il était d’avis qu’il fallait régler directement la question. Après d’autres discussions avec M. Minto, il a convenu de modifier sa déclaration comme suit : [traduction] « Des réunions avec des organisations du secteur public et du secteur privé ont alors été organisées et confirmées et des arrangements de voyage ont été pris » (pièce G-2, onglet 85).
161 M. Tipple a témoigné que le 29 août 2006, Pierre Berthiaume, gestionnaire, Affaires parlementaires, Direction des communications, Services ministériels, Direction générale des politiques et des communications, TPSGC, l’a informé que bien que ce soit habituellement le sous-ministre qui comparaît devant un Comité de la Chambre des communes, il semblait probable que M. Tipple soit appelé à comparaître vers la fin de septembre ou vers le début d’octobre 2006 (pièce G-2, onglet 75). M. Tipple devrait donc assister à un cours de formation d’une durée de deux jours intitulé « La comparution devant un comité parlementaire ».
162 M. Tipple a déclaré que M. Marshall n’a jamais discuté avec lui du fait que son rendement au travail était insatisfaisant, que l’initiative Les prochaines étapes avait atteint un point de saturation ou d’une possibilité qu’il soit mis en disponibilité. Il a fait remarquer avant la cessation de son emploi, « tout se déroulait normalement ».
163 Le 31 août 2006, M. Marshall a convoqué M. Tipple à son bureau et lui a présenté la lettre de licenciement. M. Tipple a déclaré qu’on ne lui a donné aucune raison pour la cessation de son emploi autre que la fusion de ses fonctions avec celles de M. McGrath. Il a dit qu’il a mentionné à M. Marshall que M. McGrath en avait déjà plein les bras avec ses propres fonctions et qu’il avait de la difficulté à accomplir tout son travail en cours. Quand M. Tipple a demandé à M. Marshall si sa décision était définitive, M. Marshall a répondu que la discussion était close et qu’il serait préférable qu’il quitte les lieux sur-le-champ. M. Tipple a dit qu’il était en état de choc. Il a fait remarquer que M. Marshall n’avait jamais discuté de l’intégration de ses fonctions à celles de M. McGrath. M. Tipple a mentionné également qu’il avait de la difficulté à effectuer tout le travail qui était en cours et que la possibilité d’une mise en disponibilité ne lui a jamais été mentionnée avant le 31 août 2006.
164 M. Tipple a déclaré que sa cessation d’emploi était très inhabituelle parce qu’il n’y avait pas de plan de transition entre lui et M. McGrath, aucune analyse du plan de travail et aucune séance d’information à son personnel, et parce qu’on lui a demandé de quitter les lieux immédiatement. Il a déclaré que l’on ne procède pas habituellement de cette façon dans un cas de mise en disponibilité d’un employé. C’était comme un licenciement pour inconduite ou acte répréhensible, car il se sentait traité comme « un criminel ». Le 1er septembre 2006, il a rencontré Mme Lorenzato, a remis à TPSGC les biens de TPSGC et a retiré ses effets personnels de son bureau.
165 L’avocat de M. Tipple a ensuite prié M. Tipple de se reporter à la « Note au sous-ministre » préparée par Mme Lorenzato (pièce G-2, onglet 92). M. Tipple a déclaré que l’énoncé [traduction] « […] dans le cadre de la révision de la structure organisationnelle du ministère […] » était faux.De plus, en ce qui concerne l’énoncé selon lequel [traduction] « […] [l’]étape de la conception et de la planification, pour laquelle les conseillers spéciaux avaient été spécialement recrutés, est maintenant terminée […] », il a répondu que non seulement cette étape se poursuit, mais également que l’étape de la mise en œuvre pour laquelle il avait été également embauché n’a pas commencé dans la majorité des projets. Il a fait observer que M. Marshall l’a recruté en sachant tout à fait que ce n’est pas l’étape de la conception et de la planification qui prendrait des années, mais plutôt l’étape de la mise en œuvre qui nécessiterait de trois à cinq ans. M. Tipple a affirmé que la « Note au sous-ministre » de Mme Lorenzato n’était qu’une opération pour dissimuler son licenciement.
166 En ce qui a trait à la manchette du 1er septembre 2006 de The Globe and Mail, intitulée [traduction] « On envoie promener des conseillers de Travaux publics » (pièce G-2, onglet 90), qui était également accompagnée de sa photographie, M. Tipple a témoigné que la manchette lui a occasionné de la gêne et du stress, car elle laissait entendre que son emploi a pris fin en raison d’un acte répréhensible découlant de son voyage au Royaume-Uni, et a causé beaucoup de dommage à sa réputation.
167 Quand M. Tipple a été prié de se reporter aux débats de la Chambre des communes du 9 novembre 2006 (pièce G-2, onglet 100), et au commentaire de Mme Nash selon lequel il n’y avait eu aucun rapport, M. Tipple a déclaré que des rapports avaient effectivement été rédigés. Il a fourni une note de breffage au ministre, comme on le lui avait demandé, de même que son horaire du voyage au Royaume-Uni (pièce G-2, onglet 85). En outre, le rapport Minto (pièce G-2, onglet 74) l’a exonéré, et le rapport de M. Desmarais (le « rapport Desmarais ») (pièce G-2, onglet 117) a établi que Mmes Thorsteinson et Dickson étaient les personnes responsables de la communication clandestine de son rapport de voyage au journal The Globe and Mail. TPSGC et le ministre auraient pu produire ces rapports, mais ils ont décidé de ne pas le faire parce qu’ils n’avaient pas l’intention de révéler la vérité au Parlement ou au public. M. Tipple a déclaré que les commentaires du secrétaire parlementaire au ministre s’apparentaient à une opération de dissimulation. TPSGC n’a pas produit de documents,ce qui donnait effectivement l’impression que ce n’était pas une mise en disponibilité, mais plutôt un licenciement pour inconduite. M. Tipple a déclaré que le ministre et TPSGC avaient comme stratégie d’alléger la pression exercée par les médias et le Parlement et de ne pas revivre le scandale des commandites.
168 M. Tipple a témoigné que le 5 septembre 2006, il a donné instruction à son avocat d’informer M. Marshall qu’à la suite de son licenciement, il intenterait des procédures judiciaires contre TPSGC (pièce G-2, onglet 94). Le 4 octobre 2006, il a déposé une Déclaration en Cour supérieure de justice de l’Ontario (pièce G-2, onglet 97).
169 Le 11 décembre 2006, M. Tipple a demandé que M. Marshall convoque l’audition du grief au dernier palier. Le 25 janvier 2007, M. Marshall a instruit le grief au dernier palier de la procédure de règlement des griefs et le 1er mars 2007, il a répondu ce qui suit après que le grief a été renvoyé à l’arbitrage (pièce G-2, onglet 105) :
[Traduction]
[…]
Lorsque la transformation de la fonction de gestion des biens immobiliers est passée de l’étape de la conception et de la planification (pour laquelle vous avez été recruté) à son étape de mise en œuvre, il est devenu nécessaire d’harmoniser différentes fonctions à l’appui de cette démarche. Par conséquent, vous avez été informé le 31 août 2006 que les fonctions que vous accomplissiez seraient intégrées au rôle du sous-ministre adjoint, Direction générale des biens immobiliers.
Je ne peux souscrire à la réparation que vous demandez et votre grief est rejeté.
[…]
170 M. Tipple a témoigné qu’il a été recruté non seulement pour l’étape de la conception, mais également pour celle de la mise en œuvre. Il s’est reporté aux rapports express de la semaine du 25 août 2006 (pièce G-2, onglet 73), qui avaient un rapport avec les « initiatives d’impartition de la Direction générale des biens immobiliers de TPSGC » en date du 1er juin 2006 (pièce G-8, onglet 1). Il a affirmé qu’en résumé, les 8 projets qu’il dirigeait et qu’il devait mettre en œuvre étaient achevés dans des proportions variant entre 0 % (dans un cas) et 50 %. Il a déclaré qu’un certain nombre d’autres projets d’importance n’avaient pas encore été achevés ou mis en œuvre, comme le déménagement de l’immeuble JDS Uniphase et la demande de propositions sur le modèle de gestion des biens immobiliers.
171 M. Tipple a été prié de se reporter au communiqué de presse de TPSGC daté du 20 août 2007, qui annonçait que le gouvernement du Canada procédait à la vente de neuf immeubles gouvernementaux fédéraux (pièce G-2, onglet 119). Il a déclaré qu’il s’agissait d’un autre exemple de l’un de ses projets qui se poursuivait après sa cessation d’emploi. Il a ajouté que l’initiative d’acquisition de produits commerciaux constituait une autre initiative majeure qu’il a proposé et a commencé à élaborer avant sa cessation d’emploi. Cette initiative a fait l’objet d’une demande de propositions le 26 octobre 2007 (pièce G-7).
172 M. Tipple a été prié de se reporter à la pièce G-14, à laquelle il a eu accès en présentant une demande d’accès à l’information. Il a expliqué que le 23 avril 2007, soit moins de huit mois après sa cessation d’emploi, TPSGC a créé une description de poste du groupe de la direction pour un sous-ministre adjoint délégué, Direction générale des biens immobiliers. Le titulaire du poste d’une durée de trois ans relèverait du sous-ministre et apporterait un soutien stratégique et ministériel au sous-ministre adjoint, Direction générale des biens immobiliers, conformément à la stratégie de l’initiative Les prochaines étapes. M. Tipple a déclaré que même si le titre du poste différait, les fonctions qui y étaient rattachées correspondaient aux siennes lorsqu’il était conseiller spécial du sous-ministre. Le 18 juillet 2007, le Secrétariat du Conseil du Trésor a approuvé ce poste (pièce G-15). D’après M. Tipple, le site Web de TPSGC désigne John McBain comme titulaire du poste, qui n’existait pas avant la cessation d’emploi de M. Tipple.
173 M. Tipple a commenté « Les prochaines étapes : renouvellement et transformation des biens immobiliers », document présenté au sous-ministre le 4 juin 2007 (pièce G-16). Il a déclaré que le document recensait les projets en cours dont il était chargé jusqu’à sa cessation d’emploi.
174 M. Tipple a fait remarquer que le défendeur ne lui a pas communiqué en temps opportun les documents qu’il avait demandé pour se préparer à cette audience. Son avocat a également présenté de nombreuses demandes au défendeur et à l’arbitre de grief afin qu’ils produisent tous les documents pertinents, mais le défendeur a refusé de les produire ou a retardé le processus. Bien que la première demande de divulgation a été faite en mai 2007, il n’a pas été satisfait complètement aux demandes avant mars 2009, ce qui a prolongé considérablement l’audience. Par conséquent, M. Tipple a engagé des frais juridiques supplémentaires.
175 M. Tipple a déclaré que du 31 août 2006 au 8 octobre 2009, il n’a pu obtenir d’emploi permanent. Toutefois, il a dit qu’il a obtenu quatre petits contrats. Il a désigné la pièce G-9 comme une liste de 15 recruteurs de cadres et 37 sociétés d’experts-conseils avec lesquels il a communiqué par courriel, par téléphone ou en personne pour obtenir du travail valorisant. M. Tipple a dit avoir expliqué, au cours de conversations avec les recruteurs de cadres et les sociétés d’experts-conseils, s’être fait dire qu’ils étaient au courant de la publicité défavorable rapportée par les journaux et que tant qu’il n’aurait pas obtenu réparation, il était « pour ainsi dire persona non grata ». Un certain nombre de recruteurs de cadres ont mentionné que lorsqu’ils cherchaient son nom sur Internet, ils obtenaient comme résultats des articles de journaux comportant des remarques désobligeantes et dommageables qui remettaient en question son intégrité (pièce G-25).
176 Pour étayer son témoignage selon lequel il était incapable d’obtenir un emploi valorisant, M. Tipple a passé en revue ses déclarations de revenus de 2006 et de 2007 (pièces G-10 et G-11) et ses états financiers de 2008 pour la société Solus Financial Corporation (une société qu’il avait lancée) (pièce G-24). M. Tipple a témoigné qu’en 2006 et 2007, il n’a aucun revenu et qu’en 2008, il a gagné 38 172,00 $ par l’intermédiaire de la société Solus Financial Corporation. Ces pièces ont été scellées : Tipple c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2009 CRTFP 110.
177 M. Tipple a déclaré qu’avant son licenciement, il a eu une carrière de 25 ans sans tache à titre de cadre de direction, mais que celle-ci a été détruite en quelques semaines. Son incapacité à trouver un emploi valorisant a considérablement affecté sa qualité de vie. Avant son licenciement, il siégeait dans de nombreux conseils de gestion. L’épreuve s’est révélée très stressante et elle a eu des répercussions sur sa santé physique et mentale et sur celle de sa famille. M. Tipple a déclaré qu’à cause de son licenciement, il a subi des épisodes de manque d’estime de soi, de perte de confiance, de tension, d’angoisse, des sentiments de trahison, d’humiliation et de préjudice moral. M. Tipple a déclaré [traduction] « cette épreuve s’est révélée très émotive et traumatisante et ma santé mentale et physique en a été affectée ».
178 En contre-interrogatoire, quand M. Tipple s’est fait demander si, en conséquence des articles de The Globe and Mail parus les 15, 16 et 17 août 2006, il intenterait des recours judiciaires pour diffamation, il a répondu affirmativement. Il a également fait observer qu’il n’y avait pas de réclamation pour perte de revenus dans la déclaration déposée à la Cour supérieure de justice de l’Ontario et concernant lui-même et Bell Globe Media Publishing Inc., The Globe and Mail, Phillip Crawley, Edward Greenspon, Daniel Leblanc et Brian Laghi (pièce G-26).
179 M. Tipple s’est fait demander si M. Marshall lui avait indiqué, avant qu’il accepte l’offre d’une nomination pour une période déterminée, qu’il cherchait surtout une personne qui penserait à des stratégies, c’est-à-dire une « personne d’idée », et que si ces stratégies étaient bien mises en œuvre, elles feraient épargner 1 G$ au gouvernement du Canada. M. Tipple a répondu que la vision de M. Marshall (l’initiative « Les prochaines étapes ») se déclinait en plusieurs étapes : établissement d’une vision, conception et création, planification, et mise en œuvre. Il a affirmé que pendant ses réunions avec M. Marshall avant qu’il ait accepté l’offre de nomination pour une période déterminée, M. Marshall lui avait explicitement mentionné qu’il faudrait au moins trois à cinq ans pour achever l’initiative Les prochaines étapes. Il a fait remarquer que s’il avait su qu’il était recruté seulement comme « personne d’idée », il n’aurait pas déménagé sa famille de Toronto à Ottawa.
180 Lorsqu’il s’est fait questionner au sujet de sa réunion avec M. Marshall le 12 juillet 2006, M. Tipple a dit qu’il avait mentionné à M. Marshall qu’il n’avait manqué aucune des réunions prévues qui portaient sur la gestion des biens immobiliers pendant le voyage au Royaume-Uni et que M. Rotor lui avait dit qu’il avait manqué plusieurs réunions à cause de mauvaises communications et d’un manque de soutien de TPSGC et du Haut-commissariat.
181 Quand M. Tipple s’est fait demander si M. Baril lui avait été utile en le défendant et en répondant aux questions des médias, il a répondu que M. Baril avait mal géré la situation et qu’il ne lui a jamais fourni le plan médias, [traduction] « si tant est qu’il y en ait déjà eu un ». M. Tipple a ensuite été prié de se reporter au passage suivant de l’article du 16 août 2006 de The Globe and Mail (pièce G-1, onglet 58) : [traduction] « […] le porte-parole de Travaux publics, Mario Baril, a défendu le voyage cette semaine et a affirmé que les réunions avaient été annulées en raison de problèmes logistiques […] » M. Tipple a dit que M. Baril n’a pas rapporté qu’il n’avait manqué aucune réunion. M. Tipple a déclaré qu’il a dit à MM. Marshall, Baril etTrépanier et à Mme Aloïsi en de nombreuses occasions qu’il n’avait ni manqué ni annulé de réunions, mais ils n’ont pas fait cette distinction auprès de M. Saint-Jacques, des organismes du Royaume-Uni concernés, des médias et du personnel. Il a noté que les lettres d’excuses avaient déjà été envoyées et qu’ils ne corrigeraient pas leur erreur, [traduction] « essentiellement pour ne pas se mettre dans l’embarras ».
182 Quand M. Tipple s’est fait demander s’il connaissait Dave Zevy, il a répondu que M. Zevy est un recruteur de cadres. L’avocat du défendeur a alors demandé à M. Tipple si M. Zevy l’avait approché afin de déterminer s’il serait intéressé au poste de président de Great Gulf Homes, à un salaire annuel d’environ 300 000 $, y compris les bonis. M. Tipple a confirmé que M. Zevy l’avait approché et que même s’il ne croyait pas que ce serait un bon geste pour sa carrière, il a donné son nom à M. Zevy comme candidat possible. Finalement, il ne s’est pas fait offrir le poste.
183 M. Tipple a ensuite été prié de se reporter à une série de lettres échangées entre son avocat et M. Marshall et John McCarthy, avocat principal, Unité des services juridiques-TPSGC, ministère de la Justice. Dans une lettre datée du 16 avril 2007, l’avocat de M. Tipple a informé MM. Marshall et McCarthy d’une possibilité (dans une entreprise privée) pour M. Tipple d’acquérir des biens immobiliers qui pourraient être mis en vente par le gouvernement du Canada et a demandé l’autorisation pour M. Tipple de profiter de cette occasion (pièce G-2, onglet 103). Le 19 avril 2007, M. McCarthy a répondu que le chapitre 3, intitulé Mesures d’observation concernant l’après-mandat, du Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique du gouvernement fédéral entrerait en vigueur. Pour autoriser M. Tipple à poursuivre cette possibilité, M. McCarthy avait besoin de connaître le nom de l’entreprise privée (pièce G-2, onglet 111). Le 20 avril 2007, l’avocat de M. Tipple a répondu à MM. Marshall et McCarthy. Il les a alors informés que les fonctions de M. Tipple consisteraient notamment à offrir des services de consultation professionnels, qui mèneraient à un examen de la diligence raisonnable applicable aux biens immobiliers que l’entreprise privée pourrait acquérir. L’entreprise privée a répété que son identité devait demeurer confidentielle en raison de la nature délicate de ses activités. Le 24 avril 2007, M. McCarthy a répondu à l’avocat de M. Tipple que sans l’identité de l’entreprise privée, TPSGC n’était en mesure ni de renoncer au délai de 12 mois énoncé dans le chapitre 3 intitulé Mesures d’observation concernant l’après-mandat du Code de valeurs et d’éthique de la fonction publique ni d’écourter ce délai. Quand M. Tipple s’est fait demander en contre-interrogatoire s’il convenait qu’en taisant l’identité de l’entreprise privée, il perdait une occasion d’emploi, il a déclaré que c’était exact, mais qu’il ne pouvait donner le nom de l’entreprise en question parce qu’elle lui avait donné instruction de ne pas le faire. De plus, à la suite de la communication clandestine par des personnes employées de TPSGC de la version provisoire de son rapport de voyage et d’autres documents de nature délicate auxquels il avait travaillé pour le ministre et le BCP, il ne croyait pas que l’information demeurerait confidentielle.
184 Quand M. Tipple s’est fait demander pourquoi il n’a pas communiqué avec le journal The Globe and Mail après le 31 août 2006 pour rétablir les faits, il a répondu qu’il a suivi les conseils de son avocat, c’est-à-dire s’abstenir de contacter le journal.
185 M. Tipple a convenu qu’il a épargné au gouvernement du Canada environ 150 millions de dollars pendant qu’il était employé de TPSGC.
186 Quand il s’est fait demander si, selon lui, M. Marshall était un homme intègre, M. Tipple a déclaré que c’est ce qu’il croyait lorsqu’il l’a rencontré pour la première fois. Toutefois, il a changé d’avis en raison du témoignage de M. Marshall à l’audience, parce que M. Marshall a rejeté son grief d’emblée et parce que M. Marshall ne l’a pas informé de sa décision d’envoyer des lettres d’excuses. En guise de conclusion, M. Tipple a déclaré [traduction] « je lui faisais confiance et je comptais sur son appui. Cependant, à l’heure actuelle, non, je ne le considère pas comme un homme intègre. »
IV. Résumé de l’argumentation
A. Pour le défendeur
187 Pour le compte du défendeur, l’avocat de ce dernier a fait valoir que M. Tipple a été mis en disponibilité en vertu du paragraphe 64(1) de la LEFP et que je n’ai donc pas compétence. Toutefois, si je décide que j’ai effectivement compétence, il a fait valoir que M. Tipple ne doit pas recevoir de dommages, car il n’a pas atténué ses pertes de façon raisonnable. Il n’existe aucun fondement pour déclarer l’existence de la mauvaise foi ou encore pour adjuger des dommages punitifs ou des dépens.
188 L’avocat du défendeur a déclaré que, pour statuer sur cette affaire, je n’ai qu’à prendre en compte les six documents suivants :
- la lettre d’offre datée du 7 octobre 2005 (pièce G-1, onglet 6);
- la lettre de licenciement datée du 31 août 2006 (pièce G-2, onglet 82);
- la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor (pièce E-5), qui est mentionnée dans la lettre de licenciement;
- le curriculum vitae de M. Tipple (pièce G-1, onglet 1);
- le rapport Minto, daté du 31 août 2006 (pièce G-2, onglet 74);
- les lettres échangées entre l’avocat de M. Tipple, M. Victor, et l’avocat de TPSGC, M. McCarthy, datées du 16, du 19, du 20 et du 24 avril 2007, au sujet de la demande faite par M. Tipple d’occuper un emploi dans une entreprise privée après sa mise en disponibilité (pièce G-2, onglets 103, 111, 112 et 113).
189 L’avocat du défendeur a déclaré que je devrais également tenir compte des décisions suivantes : Burchill c. Canada (Procureur général), [1981] 1 C.F. 109 (C.A.); Schofield c. Canada (Procureur général), 2004 CF 622; Shneidman c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 192; Canada (Conseil du Trésor) c. Rinaldi, (1997), 127 F.T.R. 60 (C.F. 1re inst.); Canada (Procureur général) c. Leonarduzzi, 2001 CFPI 529.
190 L’avocat du défendeur a fait remarquer que même si la lettre de licenciement ne mentionnait pas l’expression « mise en disponibilité », la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor, dont il est fait mention dans la lettre, le fait. La lettre d’offre indiquait clairement que M. Tipple a été recruté comme employé pour une période déterminée. Le renvoi à la CFP a confirmé qu’il était un fonctionnaire nommé pour une période déterminée. L’avocat du défendeur a également mentionné la phrase suivante : « […] vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et le maintien des fonctions à accomplir […] » Il a soutenu que la cessation d’une fonction ne signifie pas nécessairement qu’il manque de travail et que par conséquent, un employé peut être mis en disponibilité.
191 En ce qui concerne le mémoire du droit de M. Tipple, qui mentionne à plusieurs reprises que le défendeur n’a pas convoqué Mme Aloïsi comme témoin et que je devrais tenir compte de cette lacune en sa défaveur, l’avocat du défendeur a fait valoir que si M. Tipple estimait que le témoignage de Mme Aloïsi était crucial pour sa preuve, il aurait dû lui envoyer une assignation à comparaître comme témoin.
192 En ce qui concerne l’allégation selon laquelle il restait du travail à accomplir dans le cadre de l’initiative Les prochaines étapes, l’avocat du défendeur a prétendu que, sans égard au fait qu’il restait du travail à exécuter, si un employeur croit qu’une fonction est abolie et décide de confier ce travail à un autre employé, l’employeur a le droit de le faire. Si l’employeur ne conserve pas ce droit, la fonction publique ne pourra jamais se restructurer.
193 L’avocat du défendeur a déclaré que M. Marshall a affirmé que M. Tipple avait fait de l’excellent travail et qu’il était un employé estimé. En outre, le curriculum vitae de M. Tipple indique que ses réalisations principales dépassaient le budget prévu de 150 millions de dollars pour l’exercice de 2005-2006. Si les économies de 150 millions de dollars s’étaient poursuivies pour les 4 années suivantes de l’initiative Les prochaines étapes, les économies en dollars projetées auraient pu atteindre 750 millions de dollars du budget prévu. Autrement dit, M. Tipple avait accompli beaucoup, et TPSGC ne pouvait absorber d’autres changements.
194 L’avocat du défendeur a reconnu que le rapport Minto exonérait M. Tipple de tout acte répréhensible pendant qu’il était au Royaume-Uni et a confirmé qu’il n’a manqué aucune des réunions prévues. Par conséquent, ce qui s’est passé au Royaume-Uni ne pose pas problème et n’est pas lié à la mise en disponibilité. Même si le défendeur l’avait voulu, il n’aurait pas pu mettre fin à l’emploi de M. Tipple en raison des conclusions du rapport Minto.
195 L’avocat du défendeur a déclaré être perplexe du fait que M. Tipple croit que sa mise en disponibilité constituait un obscur complot pour mettre fin à son emploi en raison du soi-disant embarras causé par le voyage au Royaume-Uni, car M. Marshall avait commandé le rapport Minto et convenu qu’il exonérait M. Tipple de tout acte répréhensible.
196 L’avocat du défendeur a soutenu que la lettre de licenciement de M. Tipple prévoit que [traduction] « [c]onformément à la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor, vous avez droit à un mois de préavis […] » et que la politique prévoit le licenciement anticipé d’un employé recruté pour une période déterminée « [l]orsqu’une personne employée pour une durée déterminée sera/ne sera pas réembauchée ou sera mise en disponibilité avant la fin de la période spécifiée, les ministères et organismes seront tenus de remettre à cette personne un préavis d’un mois ». Il a fait observer que le défendeur a remis à M. Tipple un mois de rémunération plutôt que de lui donner un préavis.
197 L’avocat du défendeur m’a renvoyé à la décision Rinaldi, dans laquelle la Section de première instance de la Cour fédérale a statué que « […] l’arbitre a eu raison d’assumer juridiction sujet à ce que l’intimé ait l’occasion de prouver ce qu’il a annoncé ». L’avocat du défendeur a fait valoir que la note 15 dans Rinaldi se révèle utile pour trancher la présente affaire parce que pour que M. Tipple connaisse du succès, il doit satisfaire à ce critère. La note 15 se lit comme suit :
15 J’insiste ici sur le fait que dans la mesure où un licenciement a lieu en vertu de l’article 29, une simple démonstration de mauvaise foi ou d’intention malveillante de la part de l’employeur (tel par exemple la preuve d’un désir manifeste de se débarrasser de l’employé à la première occasion) n’aurait pas pour effet d’attribuer juridiction à l’arbitre puisque, mauvaise foi ou non, il s’agirait là toujours d’un grief portant sur un licenciement prenant place sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique lequel est exclu de la juridiction de l’arbitre par l’article 92(3) de la Loi sur les conditions [sic] de travail dans la fonction publique. La seule façon de démontrer que le licenciement n’a pas eu lieu en vertu de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique face à son invocation par l’employeur serait de démontrer que de fait les conditions requises pour sa mise en œuvre n’existaient pas au moment pertinent et que donc le licenciement ne peut avoir lieu sous le régime prévu par cette Loi.
198 L’avocat du défendeur a fait remarquer que M. Marshall a déclaré que l’initiative Les prochaines étapes avait de l’avance pour ce qui est des économies réalisées par TPSGC, qu’il se demandait si le poste de M. Tipple ajoutait quelque valeur que ce soit et que Mme Aloïsi partageait son point de vue. De plus, M. Marshall estimait que M. McGrath réalisait des progrès intéressants et qu’il serait en mesure d’assumer les responsabilités de M. Tipple. En outre, il considérait que le gouvernement du Canada n’envisageait pas une société d’État ou une impartition majeure d’emplois, que la capacité de TPSGC d’absorber d’autres changements suscitait des préoccupations et que les agents négociateurs élaboraient une campagne dans le but de remettre en question toute impartition majeure touchant leurs membres.
199 En conclusion, pour étayer ses arguments, l’avocat du défendeur a fait référence aux décisions suivantes : Leonarduzzi; Coulombe c. Canada, [1984] A.C.F. no 304 (1re inst.) (QL); Flieger c. Nouveau-Brunswick, [1993] 2 R.C.S. 651; Mudarth c. Canada (Ministre des Travaux publics) (1988), [1989] 3 C.F. 371 (1re inst.); Mudarth c. Canada (ministère des Travaux publics) (1990), 113 N.R. 159 (C.A.F.); Corp. de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent c. Bourgeois, 2003 CF 1117; Doman Forest Products Ltd. c. Arctic Hooper (Navire), 2003 CFPI 712; Spartan Developments Ltd. c. Capital City Savings and Credit Union Limited, 2004 ABCA 12; Canada (Procureur général) c. Bédirian, 2007 CAF 221; Honda Canada Inc. c. Keays, 2008 CSC 39; Red Deer College c. Michaels, [1976] 2 R.C.S. 324; Pepper c. Administrateur général (ministère de la Défense nationale), 2008 CRTFP 71; Vaughan c. Canada, 2005 CSC 11; Vorvis c. Insurance Corporation of British Columbia, [1989] 1 R.C.S. 1085; Wallace c. United Grain Growers Limited, [1997] 3 R.C.S. 701.
B. Pour le fonctionnaire s’estimant lésé
200 L’avocat de M. Tipple a fait remarquer que, bien que le rapport Minto a conclu que M. Tipple, pendant son séjour au Royaume-Uni, faisait usage de son temps de façon responsable et productive et a exonéré M. Tipple de tout acte répréhensible, ces conclusions n’ont jamais été rendues publiques. Elles n’ont été communiquées aux médias ni par TPSGC ni par le ministre, elles n’ont pas été mentionnées par le secrétaire parlementaire au ministre pendant la période de question au Parlement et il n’y était pas fait mention dans aucune note interne de TPSGC au personnel. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que le document était « enterré » par M. Marshall et le ministre et qu’il n’a pas vu la lumière du jour. Si le rapport Minto avait été rendu public, il aurait rétabli la réputation de M. Tipple. Ni le ministre ni TPSGC n’ont produit ou publié le rapport Minto lorsqu’ils auraient pu le faire, même s’ils ont eu toutes les occasions de le faire.
201 En ce qui concerne le débat du 9 novembre 2006 à la Chambre des communes, l’avocat de M. Tipple a fait valoir que le secrétaire parlementaire du ministre a eu une occasion d’informer le Parlement et les contribuables que M. Tipple avait été exonéré. Toutefois, il a déclaré [traduction] « M. le président, les deux personnes en question qui avaient été mentionnées par le député et dont le ministre a parlé aujourd’hui en comité ont été tenues responsables. Elles ne travaillent plus au gouvernement fédéral. » Les notes sur le voyage au Royaume-Uni, les note de breffage de M. Tipple au ministre et le rapport Minto n’ont pas été mentionnés. Il était clair que l’emploi de M. Tipple avait pris fin en raison de son voyage au Royaume-Uni.
202 L’avocat de M. Tipple s’est reporté à la réponse proposée pour le ministre pendant la période de questions au Parlement qui a été préparée par Mme Lorenzato le 18 septembre 2006 (pièce G-5, onglet 15). Les notes d’information révèlent que le Haut-commissariat avait informé TPSGC que trois réunions avaient été manquées, que des lettres d’excuses avaient été envoyées et que les médias avaient fait une couverture défavorable. L’avocat de M. Tipple a fait remarquer qu’elles ne mentionnaient pas, toutefois, que le rapport Minto exonérait M. Tipple.
203 L’avocat de M. Tipple a mentionné le témoignage de M. Marshall selon lequel, en mai 2006, il pensait à regrouper les fonctions de M. Tipple et celles de M. McGrath, ce dont il aurait fait part à Mme Aloïsi. Bien que l’avocat du défendeur a déclaré que Mme Aloïsi serait appelée à témoigner, elle ne l’a pas été.Il n’existe donc pas de preuveindépendante étayant le témoignage de M. Marshall selon lequel il envisageait un changement.
204 L’avocat de M. Tipple a noté qu’il a fallu huit mois pour recruter M. Tipple et pour exécuter toutes les procédures d’embauche et d’établissement de la structure de l’initiative Les prochaines étapes, mais que l’ensemble du changement a été réalisé en moins de 10 jours, à compter du retour de vacances de M. Marshall le 22 août 2006 et de sa réunion avec le ministre le 25 août 2006. Au cours de cette brève période, toute l’initiative Les prochaines étapes, qui disposait d’un budget de 1 milliard de dollars, a été réorganisée. Il y avait de nombreux documents sur la manière dont le travail devait être effectué et sur le travail qui devait se poursuivre, mais aucun des documents n’a été produit dans le but de montrer qu’il y aurait une restructuration ou une intégration des responsabilités de M. Tipple à celles de M. McGrath. L’avocat de M. Tipple a fait observer que bien que M. Marshall pensait à tous ces changements, il a néanmoins donné à M. Tipple une cote « a excédé les attentes » dans son accord sur le rendement deux mois avant la cessation d’emploi de ce dernier. De plus, comme M. Tipple avait dépassé toutes les principales attentes à son égard, il a obtenu une prime de rendement de 15 % établie au prorata de son salaire 5 semaines avant la cessation de son emploi. En outre, en juin 2006, M. Marshall a approuvé le paiement de ses frais de cotisation au National Club de Toronto.L’avocat de M. Tipple s’est demandé pourquoi M. Marshall agirait ainsi s’il pensait mettre fin à l’emploi de M. Tipple.
205 L’avocat de M. Tipple a déclaré que M. Marshall a témoigné que le 25 août 2006, le ministre lui a demandé si le travail effectué par M. Tipple avait une certaine valeur. L’avocat de M. Tipple a fait valoir qu’à ce stade, la pensée de M. Marshall commençait à se crystalliser. Il a fait observer que c’était un argument fallacieux, étant donné que des économies de 150 millions de dollars réparties sur une période de un an avaient pu être réalisées. M. Tipple a dépassé ses principaux objectifs de rendement et a reçu un boni. Les changements s’intensifiaient. Il accomplissait de l’excellent travail, mais son emploi a pris fin. Il n’était pas sincère de mettre fin à l’emploi de M. Tipple, parce que ce dernier faisait du bon travail. L’avocat de M. Tipple se demandait également pourquoi M. Marshall a approuvé le voyage au Royaume-Uni s’il pensait se débarrasser de M. Tipple.
206 L’avocat de M. Tipple a fait observer que le 25 août 2006, M. Marshall a informé Mme Lorenzato qu’il pensait à mettre fin à l’emploi pour une période déterminée de M. Tipple, mais il ne l’a jamais dit à M. Tipple. Fait plus important, aucune étude ni analyse de faisabilité n’avait été menée sur l’identité de la personne qui exercerait les fonctions de M. Tipple et sur le travail qui devait être terminé ou poursuivi dans le cadre de l’initiative Les prochaines étapes qui dispose de 1 milliard de dollars. Aucune étude de faisabilité n’a été réalisée sur le travail de M. Tipple, et plus spécifiquement sur ses activités quotidiennes et sur l’intégration de ces activités. Il existe un seul document : la « Note au sous-ministre » provisoire rédigée par Mme Lorenzato le 30 août 2006, soit la veille de la date de cessation d’emploi de M. Tipple. L’avocat de M. Tipple a fait remarquer que Mme Lorenzato et M. Marshall ont tous deux témoigné qu’aucune analyse écrite ni étude de faisabilité n’a été faite avant la cessation d’emploi de M. Tipple.
207 L’avocat de M. Tipple a formulé l’observation suivante : [traduction] « Quelle coïncidence qu’après toutes les réflexions de M. Marshall, l’emploi des deux conseillers spéciaux ait pris fin en même temps. »
208 L’avocat de M. Tipple a déclaré qu’un autre événement a crystallisé la réflexion de M. Marshall, à savoir l’inconduite de Mme Thorsteinson, qui a remis à Mme Dickson une copie du rapport de voyage provisoire de M. Tipple, et celle de Mme Dickson, qui a alors communiqué avec M. Leblanc. Les articles de The Globe and Mail ont embarrassé TPSGC. Ils ont donné lieu à un scandale. Ces articles ont soulevé des questions, et le Comité de la Chambre des communes, qui souhaitait la comparution de M. Tipple devant lui, a demandé des réponses. Non seulement M. Marshall était-il impliqué, mais le cabinet du ministre l’était également, et la question était du domaine public. De la mauvaise publicité a été faite et elle était liée au scandale des commandites. Par conséquent, TPSGC devait faire quelque chose, et il a décidé de faire de M. Tipple le bouc émissaire et de mettre fin à son emploi. Cette décision a été prise le 28 août 2006, soit trois jours avant qu’il reçoive la lettre de licenciement et un jour ouvrable après la réunion entre M. Marshall et le ministre. L’avocat de M. Tipple a soutenu que tel est le véritable motif de la cessation d’emploi de M. Tipple. Il a prétendu ce qui suit : [traduction] « Le rite des Juifs anciens au Yom Kippur voulait qu’ils chargent les péchés des gens sur un bouc, puis qu’ils l’envoient en milieu sauvage, où il disparaîtrait; telle est la définition d’un bouc émissaire. »
209 L’avocat de M. Tipple a également fait valoir que le défendeur a déguisé la cessation d’emploi en mise en disponibilité. Il a déclaré que ce comportement dénote non seulement de la mauvaise foi, mais également une insensibilité, et qu’il remplit tous les critères d’attribution de dommages punitifs. M. Tipple a fait l’objet d’une cessation d’emploi à tort, et le défendeur l’a maquillée en mise en disponibilité. Il s’agissait d’une mise en disponibilité artificielle, d’une supercherie. En fait, ce n’était pas une véritable mise en disponibilité. Le contrat d’emploi comportait une clause sur la disponibilité du travail et sur la poursuite de l’existence des fonctions devant être accomplies. L’emploi de M. Tipple n’a pas pris fin parce qu’il n’y avait pas de travail à accomplir ou parce que ses fonctions ont cessé d’exister. Il n’existait ni fondement justifiant l’application de cette clause ni fondement d’une mise en disponibilité.
210 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que j’ai compétence comme l’établissent le sous-alinéa 209(1)c)(i) de la LRTFP et l’alinéa 12(1)e) de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP), parce que cette affaire porte sur une cessation d’emploi pour un motif n’ayant pas trait à un manquement à la discipline ou à une inconduite. M. Tipple était un fonctionnaire de l’administration publique centrale, et sa cessation d’emploi a pris effet en vertu de l’alinéa 12(1)e) de la LGFP, ce qui donne compétence à un arbitre de grief. M. Tipple n’était pas mis en disponibilité en vertu du paragraphe 64(1) de la LEFP. Il n’y a pas eu suppression de ses fonctions.
211 L’avocat de M. Tipple a soutenu que le défendeur n’a pas agi de bonne foi et m’a renvoyé à Flieger, dont voici un passage :
[…]
Par conséquent, il y a «suppression d’une fonction» lorsque cet ensemble d’activités qui constitue un poste n’est plus exécuté par suite de la décision arrêtée de bonne foi par l’employeur. Par exemple, si un ensemble donné d'activités est tout simplement confié intégralement à une autre personne, ou si l'activité ou la tâche reçoit simplement un titre nouveau et différent de façon à pouvoir figurer dans une autre description de poste, alors on ne pourrait parler de la «suppression d'une fonction». En revanche, si les activités qui font partie de l'ensemble ou du groupe d'activités sont réparties entre d'autres personnes, comme ce fut le cas dans Mudarth, précité, il y aurait «suppression d'une fonction». Il y aurait également «suppression d'une fonction» si les responsabilités sont décentralisées, comme ce fut le cas dans Coulombe, précité.
[…]
Dans la présente affaire, les fonctions de M. Tipple ont été déléguées à M. McGrath.
212 L’avocat de M. Tipple s’est reporté au premier paragraphe de la lettre de licenciement de M. Tipple, qui énonce ce qui suit : « Comme la transformation passe à sa prochaine étape, j’ai décidé qu’il serait plus approprié que les fonctions que vous exécutez soient intégrées au rôle du sous-ministre adjoint, Biens immobiliers […] »
213 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que d’après la majorité des juges de la Cour suprême du Canada dans Flieger, l’intégration des fonctions exécutées par M. Tipple à celles de M. McGrath ne constitue pas une suppression de fonction. M. Tipple a été recruté pour une période déterminée, et en procédant à la cessation de son emploi, le défendeur a enfreint ce contrat. À la page 3, la lettre d’offre énonce ce qui suit : [traduction] « Vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et la poursuite des fonctions devant être accomplies. » La lettre de licenciement énonce ce qui suit : [traduction]« […] votre lettre […] renfermait une clause mentionnant que vos services pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et la poursuite des fonctions devant être accomplies ». L’avocat de M. Tipple a fait valoir que la preuve établit clairement qu’il restait du travail à faire parce que le travail a continué d’être accompli après le 31 août 2006. Les fonctions de M. Tipple ont continué d’exister. Si les fonctions étaient intégrées, elles devaient encore être exécutées, et la cessation d’emploi ne se justifie pas. En procédant à la cessation d’emploi de M. Tipple pour ces motifs, qui sont camouflés, inexacts et faux, le défendeur a enfreint un accord, ce qui fait qu’il s’agissait d’une cessation d’emploi illégale et non d’une mise en disponibilité. L’expression « mise en disponibilité » n’est pas mentionnée dans la lettre de licenciement ni dans aucun autre document. L’avocat de M. Tipple a également prétendu que l’autre énoncé erroné dans la lettre de licenciement est le suivant : « Comme la transformation passe à sa prochaine étape […] » La preuve établit clairement que TPSGC en était encore à l’étape de la planification et de la conception. Cette étape n’était pas terminée. TPSGC n’était pas encore passé à l’étape de la mise en œuvre. La mise en œuvre avait été réalisée seulement en partie. Quoi qu’il en soit, la description de poste du Groupe de la direction de M. Tipple indiquait clairement qu’il était chargé de surveiller et de diriger l’étape de la mise en œuvre. Il a été recruté pour procéder à une transformation sans précédent du secteur des biens immobiliers de TPSGC et pour assurer la direction stratégique lui permettant d’élaborer, d’instaurer et de surveiller les stratégies de mise en œuvre.
214 L’avocat de M. Tipple a soutenu qu’il importe de noter que M. Tipple a déménagé de Toronto à Ottawa en mars 2006 parce que pendant ses réunions avec M. Marshall, ce dernier lui a donné l’impression qu’il serait employé pendant trois ans, voire peut-être davantage.
215 L’un des aspects de la mauvaise foi du défendeur est que malgré les demandes faites par M. Tipple à TPSGC pour qu’il défende sa réputation, TPSGC ne l’a pas fait quand le premier article a paru dans The Globe and Mail,et n’a pas par la suite rétabli son image et sa réputation. TPSGC n’a rien fait pour atténuer les dommages causés à M. Tipple. TPSGC a plutôt exacerbé la situation et lui a causé d’autres dommages en mettant fin à son emploi dans une atmosphère de scandale.
216 Les notes de Mme Lorenzato ne mentionnent nulle part l’expression « mise en disponibilité ». Divers scénarios étaient envisagés (renvoi en cours de stage, abolition du poste, échange, cession du travail, suppression du travail, congédiement déguisé, etc.). Ils cherchaient une manière de se débarrasser de M. Tipple. Autrement dit, il est impossible de constater dans les notes qu’ils envisageaient une mise en disponibilité parce que l’expression « mise en disponibilité » n’y figure pas, et ils n’ont pas discuté de la suppression des fonctions de M. Tipple ou de l’intégration de celles-ci à celles de M. McGrath. Ces notes sont révélatrices, parce qu’elles montrent que l’intégration et la mise en disponibilité n’étaient même pas envisagées.
217 M. Tipple a reçu sa lettre de licenciement le 31 août 2006, au cours d’une rencontre avec M. Marshall. La preuve établit clairement qu’il n’a eu aucun préavis. D’autres indices révèlent qu’il ne s’agissait pas d’une mise en disponibilité : il n’y avait pas de plan de transition et il n’y a pas eu de discussions avec M. McGrath ou avec M. Tipple en ce qui concerne la restructuration. Sa cessation d’emploi s’est déroulée abruptement, sans préavis. Il s’est fait dire de quitter les lieux le 31 août 2006, ce qui se produit habituellement dans un cas de congédiement ou de congédiement injustifié, et non de mise en disponibilité. M. Tipple a mentionné à quel point sa cessation d’emploi l’a laissé sous le choc. De plus, un article paru le 1er septembre 2006 dans The Globe and Mail mentionnait ce qui suit : [traduction] « On envoie promener des conseillers de Travaux publics. » Le public avait nettement l’impression que M. Tipple était congédié par suite de son voyage au Royaume-Uni, et c’est l’impression que le gouvernement du Canada et TPSGC voulaient créer.
218 L’avocat de M. Tipple a prétendu qu’en procédant à la cessation d’emploi de M. Tipple pour des motifs autres que ceux qui sont énoncés par le défendeur et en faisant valoir un motif de cessation d’emploi inventé et faux, le défendeur a enfreint son obligation de bonne foi et d’équité à l’égard de M. Tipple. En omettant de réagir adéquatement aux déclarations fausses et diffamatoires et en contribuant aux dommages causés à la réputation de M. Tipple, le défendeur a enfreint son obligation de bonne foi, et ce sont ces motifs qui justifient les dommages réclamés. Le défendeur a eu un comportement injuste, fallacieux, arbitraire et tyrannique.
219 M. Tipple a témoigné au sujet de la tension, de l’angoisse, des dommages à sa réputation et des perturbations de sa vie personnelle. L’avocat de M. Tipple a soutenu que ce comportement doit être sanctionné et condamné par l’arbitre de grief.
220 En ce qui concerne les redressements demandés, l’avocat de M. Tipple a déclaré que la réintégration n’est plus une option viable, car la période d’embauche à durée déterminée de M. Tipple a pris fin. M. Tipple demande que des dommages lui soient adjugés pour la perte de salaire passé et futur, au montant de 726 923,08 $ du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008, ainsi qu’une prime de rendement de 15 % qui lui aurait été versée, soit 109 038,46 $. Il demande également des dommages pour la perte d’avantages sociaux, évalués à 15 %, le paiement de ses frais de réinstallation, au montant de 10 000,00 $, qu’il n’a pas encore reçu, et des dommages punitifs et dépens, y compris les intérêts.
221 Le curriculum vitae de M. Tipple montre qu’il est un cadre supérieur qui a mis en œuvre avec succès des transformations stratégiques chez Bell Canada, BCE et CN Rail,qui mettaient en jeu des centaines de millions de dollars. L’avocat de M. Tipple a déclaré que M. Tipple n’aurait pas dû être traité comme il l’a été. Sa réputation en a souffert. M. Tipple n’a jamais estimé qu’il était au-dessus des lois. Il a envoyé un courriel à MM. Marshall et Baril et à Mme Aloïsi pour demander le rétablissement de sa réputation, mais ils n’ont pas réagi. Il a demandé une explication au sujet des lettres d’excuses. Toutefois, TPSGC n’a jamais rectifié les déclarations trompeuses et incorrectes qui étaient faites dans les lettres d’excuses. M. Tipple a également demandé que les médias soient informés que son nom n’aurait pas dû être mentionné dans les lettres d’excuses, mais rien n’a été fait, encore une fois. Bien que M. Tipple ait demandé une copie du plan médias exhaustif, aucune copie n’a été préparée. Les articles du journal The Globe and Mail étaient diffamatoires, et quand M. Tipple a demandé s’il pouvait informer la presse de l’inexactitude des allégations, il s’est fait dire qu’il ne le pouvait pas. L’information imprimée dans The Globe and Mail était fausse et incorrecte, mais TPSGC n’a rien fait à cet égard. La preuve établit clairement que TPSGC n’appuyait pas M. Tipple. TPSGC n’a pas fourni au journal The Globe and Mail les faits corrects ou une copie du rapport Minto qui exonérait M. Tipple. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que c’est de cette façon que TPSGC n’a pas agi de bonne foi. TPSGC n’a pas contribué à rétablir la réputation de M. Tipple.
222 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que l’une des raisons pour lesquelles il était urgent de mettre fin à l’emploi de M. Tipple était que le ministre s’inquiétait beaucoup de la possibilité d’une audience du Comité de la Chambre des communes.
223 En ce qui concerne l’atténuation des dommages, l’avocat de M. Tipple a prétendu que les efforts d’atténuation de M. Tipple étaient exhaustifs et exemplaires. Il a correspondu avec 15 recruteurs de cadres et les a rencontrés pour les informer qu’il cherchait un emploi permanent. Il s’est également adressé à quelque 40 sociétés d’experts-conseils, mais n’a obtenu que 4 petits contrats. En ce qui concerne la possibilité chez Great Gulf Homes, la preuve établit clairement que, bien que M. Tipple ne la considérait pas comme une occasion professionnelle intéressante, il a soumis son nom.
224 Le 16 avril 2007, l’avocat de M. Tipple a envoyé une lettre à MM. Marshall et McCarthy, lettre dans laquelle il mentionnait notamment ce qui suit :
[Traduction]
[…]
Une entité du secteur privé s’est montrée intéressée à ce que notre client agisse en son nom relativement à l’acquisition de biens immobiliers du gouvernement du Canada. Nous estimons qu’il n’y aura pas de conflit d’intérêts […] Au vu de cette occasion, notre client est conscient de son obligation d’atténuer les dommages qu’il a subis en conséquence de la cessation de son emploi.
[…]
225 Le 19 avril 2007, M. McCarthy a répondu ce qui suit et a soulevé la possibilité d’un conflit d’intérêts :
[Traduction]
[…]
L’autorisation demandée ne peut être envisagée tant que des renseignements supplémentaires ne sont pas mis à notre disposition. Plus particulièrement […] nous aurions besoin de connaître le nom de l’entreprise privée […] l’objet de son engagement par cette société et un résumé de ses fonctions […] en ce qui concerne l’atténuation […] votre client est tenu d’atténuer les pertes ou les dommages qu’il prévoit réclamer du gouvernement en arbitrage. […]
[…]
226 Le 20 avril 2007, l’avocat de M. Tipple a répondu ce qui suit :
[Traduction]
[…]
Toutefois, nous ne pouvons pas fournir toute l’information que vous avez « besoin de connaître » car l’identité de l’entité du secteur privé est très sensible et confidentielle; nous ne donnerons donc pas son identité. Notre client donnera des services de consultation professionnelle à l’entité du secteur privé. À cet égard, il aura pour fonctions de diriger un examen de la diligence raisonnable des biens immobiliers. Encore une fois, notre client demande la possibilité de profiter de cette occasion.
[…]
227 Le 24 avril 2006, M. McCarthy a répondu qu’il y aurait un conflit d’intérêts. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que la seule information qui n’avait pas été communiquée était le nom de l’entreprise privée. M. Tipple n’agissait pas comme s’il était au-dessus des lois. Il demandait le droit d’atténuer les dommages qui lui ont été causés, qui aurait eu un effet considérable, mais cette demande a été rejetée. M. Tipple n’a pas manqué à son obligation de tenter d’atténuer les dommages. Il a en effet tenté de le faire en déployant plus d’efforts qu’il aurait été raisonnable de le faire. La preuve révèle que si l’on tape le nom de M. Tipple dans Google, c’est son licenciement qui apparaît. En conséquence, il n’a pu atténuer les dommages que pour une valeur de 38 172,00 $.
228 L’avocat de M. Tipple a déclaré que le 28 juillet 2006 et le 25 août 2006,des rapports express établissaient de manière exhaustive que le travail accompli par M. Tipple s’est poursuivi après le 31 août 2006, et que ces rapports sont importants parce qu’ils contredisent le témoignage de M. Marshall au sujet d’un élément crucial. Quand M. Marshall a été questionné en contre-interrogatoire concernant les rapports express, il a mentionné que la demande de propositions sur la transformation des affaires et le modèle organisationnel de gestion des biens immobiliers ainsi que d’autres initiatives de M. Tipple ne se sont pas poursuivies. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que lorsque j’ai demandé directement à M. Marshall si les initiatives de transformation des affaires cessaient et n’étaient pas poursuivies, M. Marshall a déclaré que c’était exact. Des documents qui contredisaient son témoignage ont ensuite été soumis à M. Marshall. Le premier était le « Rapport ministériel sur le rendement de TPSGC pour 2006-2007 » pour la période se terminant le 31 mars 2007, qui indiquait clairement que l’initiative Les prochaines étapes se poursuivait. L’autre était la participation de M. Tipple à la vente de biens immobiliers fédéraux alors qu’il présidait le comité de sélection à mettre en place, comité chargé d’obtenir la participation de la BMO et de la RBC comme consultants. Ce travail s’est poursuivi après sa cessation d’emploi, car un communiqué de presse sur la vente de neuf immeubles fédéraux a été publié.
229 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que la difficulté en ce qui concerne l’observation par le défendeur des ordonnances de divulgation rendues dans cette affaire est considérable, parce que M. Marshall a fait référence à ses souvenirs pendant son témoignage. L’une des façons de dissiper toute ambiguïté consite à se reporter à des documents. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que, non seulement a-t-on omis de divulguer tous les documents pertinents qui se rapportent à la cessation d’emploi et à d’autres questions pertinentes, mais des ordonnances de divulgation ont en outre été rendues à différentes occasions parce que TPSGC a omis de produire les documents et les a fournis seulement à contrecoeur, une fois les ordonnances rendues. L’avocat de M. Tipple a soutenu que le défendeur tentait de dissimuler les documents, ce qui constitue un facteur d’importance compte tenu des frais juridiques engendrés; en effet, M. Tipple a dû assumer des frais beaucoup plus élevés pour cette raison. Si les documents avaient été divulgués au moment opportun, l’audience se serait déroulée plus efficacement et plus rondement. Le comportement aggravant du défendeur devrait constituer un facteur dans l’adjudication des dépens.
230 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que dans Greaves v. Economy Carriers Limited, [1995] C.L.A.D. No. 21 (QL), il est statué que bien que la preuve orale puisse être utile, elle ne suffit pas pour permettre au défendeur de s’acquitter du fardeau de la preuve, car des preuves documentaires sont nécessaires :
[Traduction]
[…]
Le témoignage de vive voix ne suffit pas à lui seul pour s’acquitter du fardeau de preuve de la société. […]
[…] pour établir si un employeur s’est acquitté ou non du fardeau de la preuve, les arbitres de grief doivent, lorsque c’est possible, s’en remettre à des indicateurs objectifs. Ils devraient prendre leur temps avant d’accepter toutes les affirmations des employeurs selon lesquelles il y a pénurie de travail. Sinon, l’alinéa 61.5(3)a) pourrait devenir facilement un peu plus qu’une excuse utile pour les employeurs qui congédient des employés pour d’autres motifs. Par conséquent, sauf si un employeur peut établir au moyen de preuves objectives qu’il existe une pénurie de travail, les arbitres de grief devraient, en règle générale, rejeter cette explication et statuer sur la plainte au fond.
[…]
L’avocat de M. Tipple a fait valoir que, dans la présente affaire, la preuve documentaire étayant la justification donnée par le défendeur de la cessation d’emploi de M. Tipple est tout à fait inexistante.
231 En ce qui concerne la question de l’absence de contact avec The Globe and Mail après sa cessation d’emploi, M. Tipple a agi comme agit habituellement un employé ayant subi un préjudice et une injustice. Il a demandé réparation dans une déclaration soumise à la Cour supérieure de justice de l’Ontario, au moyen de la procédure de règlement de grief et du présent arbitrage de grief.
232 En ce qui a trait aux mesures de redressement, l’article 226 de la LRTFP confère à un arbitre de grief la compétence d’adjuger des intérêts. L’avocat de M. Tipple a précisé que les intérêts revendiqués dans la présente affaire couvrent seulement la période du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008. De plus, l’article 228 confère un pouvoir plus général qui permet à un arbitre de grief de rendre l’ordonnance qu’il juge indiquée dans les circonstances.
233 L’avocat de M. Tipple s’est appuyé sur Vaughan pour prétendre qu’un arbitre de grief peut adjuger les réparations adéquates, y compris des dommages fondés sur des pertes et sur un manquement à la bonne foi, des dommages punitifs, et, ce qui importe davantage, des dépens.
234 Pour ce qui est des dommages pour mauvaise foi, l’avocat de M. Tipple a fait valoir que Keays indique qu’il y a maintenant des dommages pour mauvaise foi et pour manquement à l’obligation de bonne foi et d’équité à l’égard de M. Tipple. L’arrêt Keays permet d’adjuger de tels dommages. En ce qui concerne les principes énoncés dans Keays, l’avocat de M. Tipple a soutenu que le défendeur a manqué à son obligation de bonne foi et d’équité en ne réagissant pas aux affirmations et aux imputations fausses, diffamatoires et désobligeantes faites dans The Globe and Mail, en omettant de publier et de rendre public le rapport Minto qui exonérait M. Tipple, et en faisant des déclarations inexactes et trompeuses sur les motifs de la cessation de son emploi. En ce qui a trait à la question des frais juridiques, un arbitre de grief a compétence. L’avocat de M. Tipple a fait valoir que l’article 228 de la LRTFP permet à un arbitre de grief de rendre une ordonnance qu’il juge indiquée dans les circonstances. En l’espèce, il serait tout à fait injuste pour M. Tipple de ne pas lui adjuger de dépens si sa demande est accueillie. Le fait de ne pas adjuger de dépens rendrait cette décision vide de sens en raison de la grande quantité de temps qu’il a fallu pour présenter le dossier de M. Tipple.
235 L’avocat de M. Tipple a fait observer que les dépens sont toujours à la discrétion de l’arbitre de grief. Si un employé comparaît devant un arbitre de grief et échoue, l’arbitre de grief peut décider d’adjuger ou non des dépens. Si des dommages sont accordés dans la présente affaire, les employeurs seraient tenus responsables lorsqu’ils mettent fin à l’emploi d’employés en faisant preuve de mauvaise foi. Le défendeur devrait être tenu responsable des dépens, comme c’est généralement le cas en matière civile. Les dépens devraient être adjugés en fonction de la conduite du défendeur et à titre de réparation supplémentaire. Sinon, les employeurs agiront de façon arbitraire et feront montre d’une inconduite incroyable et ne seront pas responsables des frais juridiques engagés par les employés qui, comme M. Tipple, se donnent la peine de faire entendre leur cause et de contraindre le défendeur à divulguer des documents qui lui permettaient de prouver sa cause.
236 En conclusion, l’avocat de M. Tipple m’a renvoyé aux cas suivants : Ontario (Ministry of Community, Family and Children Services) v. Crown Employees Grievance Settlement Board (2006), 81 O.R. (3d) 419 (C.A.); Clements v. Bearskin Lake Air Service Ltd., [1995] C.L.A.D. No. 942 (QL); Greaves; Corbett v. Falcon Environmental Services Inc., [2008] C.L.A.D. No. 47 (QL); Hamel v. Laidlaw Carriers Tank GP Inc., [2006] C.L.A.D. No. 495 (QL); Sprint Canada v. Lancaster, [2003] C.L.A.D. No. 567 (QL); MacCormac v. Esquimalt Nation, [1997] C.L.A.D. No. 521 (QL); Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9; Wells c. Terre-Neuve, [1999] 3 R.C.S. 199; Spark v. Generex Pharmaceuticals Inc. (1999), 107 O.T.C. 56 (C. Sup. J.); Laird c. Conseil du Trésor (Emploi et Immigration), dossier de la CRTFP 166-02-19981 (19901207); Beardy v. Lake St. Martin First Nation, [2008] C.L.A.D. No. 359 (QL); Limo Jet Gold Express Ltd. v. Public Service Alliance of Canada, Local 05/21081 (2008), 171 L.A.C. (4th) 28; Canada (Procureur général) c. Morgan, [1992] 2 C.F. 401 (C.A.); Bell Canada c. Halle (1989), 99 N.R. 149 (C.A.F.); Banca Nazionale Del Lavoro of Canada Limited c. Lee-Shanok (1988), 87 N.R. 178 (C.A.F.).
C. Réplique du défendeur
237 L’avocat du défendeur a fait valoir que la preuve documentaire qui établit que M. Tipple a été mis en disponibilité est son curriculum vitae. Il confirme le témoignage de M. Marshall selon lequel M. Tipple faisait de l’excellent travail et a fait économiser des millions de dollars à TPSGC et au gouvernement du Canada. Toutefois, TPSGC n’a pu absorber d’autres changements. Autrement dit, les choses évoluaient trop rapidement. C’est la raison pour laquelle M. Tipple a été mis en disponibilité.
238 L’avocat du défendeur a fait valoir qu’il n’existe pas de preuve que l’emploi de M. Tipple a pris fin parce que le défendeur avait besoin d’un bouc émissaire et que je ne peux tirer une telle conclusion simplement sur la base de la théorie.
239 Enfin, l’avocat du défendeur a déclaré que M. Marshall a témoigné que certaines des fonctions de M. Tipple seraient attribuées à Mme Orange. Le défendeur a reconnu la véracité de cette déclaration, même si la lettre de licenciement de M. Tipple mentionne que les fonctions seraient intégrées au rôle du sous-ministre adjoint (celui de M. McGrath).
V. Motifs
A. Compétence
240 Le 11 octobre 2005, M. Tipple a été recruté comme conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, TPSGC, dans le cadre d’une nomination pour une période déterminée, soit du 11 octobre 2005 au 6 octobre 2008. La lettre d’offre renfermait une clause selon laquelle les services de M. Tipple pourraient être requis pour une période plus courte selon la disponibilité du travail et la poursuite des fonctions à exécuter.
241 La description de poste et les rapports express me convainquent que M. Tipple était chargé d’élaborer, de planifier, de surveiller, de diriger et d’appliquer les stratégies de mise en œuvre et les initiatives Les prochaines étapes. M. Tipple a déclaré qu’il a rencontré M. Marshall à plusieurs reprises avant d’accepter l’offre d’emploi. Il a ajouté qu’il a été recruté non seulement pour élaborer des stratégies et des initiatives, mais également pour les mettre en œuvre. Il a déclaré que M. Marshall l’avait informé que l’initiative Les prochaines étapes pourrait s’étaler sur cinq à sept ans, même si la lettre d’offre mentionnait que la période de nomination était de trois ans. Je conclus que c’est cohérent avec le témoignage de M. Marshall selon lequel la personne qui donne les conseils est chargée de leur mise en œuvre. Il n’est que logique que M. Tipple ait accepté l’offre d’emploi non seulement d’élaborer et de concevoir les initiatives, mais également de les mettre en œuvre et de les surveiller. Sinon, pourquoi aurait-il déménagé sa famille de Toronto à Ottawa? J’accepte que M. Tipple a signé la lettre d’offre de bonne foi sur la base de la description de poste et des fonctions qu’il devait accomplir pendant une période minimale de trois ans.
242 Le 31 août 2006, M. Tipple a reçu une lettre de M. Marshall l’informant que sa période de nomination pour une durée déterminée se terminait plus tôt que ce qui avait été indiqué précédemment dans la lettre d’offre et que ses services ne seraient plus requis à compter de la fermeture de bureaux le 29 septembre 2006. M. Tipple s’est fait interdire les lieux de travail le 31 août 2006.
243 L’avocat du défendeur a fait valoir que M. Tipple a été mis en disponibilité aux termes du paragraphe 64(1) de la LEFP, qui se lit comme suit :
64. (1) L’administrateur général peut, conformément aux règlements de la Commission, mettre en disponibilité le fonctionnaire dont les services ne sont plus nécessaires faute de travail, par suite de la suppression d’une fonction ou à cause de la cession du travail ou de la fonction à l’extérieur des secteurs de l’administration publique fédérale figurant aux annexes I, IV ou V de la Loi sur la gestion des finances publiques; le cas échéant, il en informe le fonctionnaire.
(2) Dans les cas où il décide dans le cadre du paragraphe (1) que seulement certains des fonctionnaires d’une partie de l’administration seront mis en disponibilité, la façon de choisir les fonctionnaires qui seront mis en disponibilité est déterminée par les règlements de la Commission.
(3) Le paragraphe (1) ne s’applique pas dans les cas où le fonctionnaire est licencié dans les circonstances prévues à l’alinéa 12(1)f) de la Loi sur la gestion des finances publiques.
Il a fait remarquer que l’alinéa 211a) de la LRTFP ne permet pas un renvoi à l’arbitrage si le grief porte sur un licenciement en vertu de la LEFP. Cet alinéa prévoit ce qui suit :
211. L’article 209 n’a pas pour effet de permettre le renvoi à l’arbitrage d’un grief individuel portant sur :
a) soit tout licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique […]
244 L’avocat du défendeur a en outre fait valoir que le poste de M. Tipple a été aboli et n’a pas été créé de nouveau et que ses fonctions ont été regroupées avec celles de M. McGrath, qui pourrait bénéficier de l’aide de Mme Orange. L’avocat du défendeur a soutenu qu’il n’y avait aucune mauvaise foi, car M. Tipple a été mis en disponibilité en raison de la suppression de ses fonctions.
245 L’avocat du défendeur a renvoyé à Rinaldi. Dans ce cas, la Section de première instance de la Cour fédérale d’alors a statué que le paragraphe 92(3) de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique ne supprimait pas la compétence d’un arbitre de grief uniquement parce qu’un employeur avait invoqué la LEFP à l’appui d’un licenciement. Elle a statué qu’un arbitre de grief a compétence pour entendre une allégation selon laquelle un employeur a camouflé l’abolition d’un poste en cessation d’emploi en invoquant de façon factice la LEFP. L’avocat du défendeur a prétendu devant moi que pour que la demande de M. Tipple soit accueillie, il doit prouver que les conditions requises pour le mettre en disponibilité n’étaient pas présentes au moment pertinent et que par conséquent, l’emploi n’a pas fait l’objet d’une cessation d’emploi en vertu de la LEFP.
246 L’avocat du défendeur a fait remarquer que dans Flieger, la majorité des juges de la Cour suprême du Canada ont interprété l’expression « suppression d’une fonction ». Voici ce qu’énonce cette décision :
[…]
Par conséquent, il y a «suppression d’une fonction» lorsque cet ensemble d’activités qui constitue un poste n’est plus exécuté par suite de la décision arrêtée de bonne foi par l’employeur. Par exemple, si un ensemble donné d'activités est tout simplement confié intégralement à une autre personne, ou si l'activité ou la tâche reçoit simplement un titre nouveau et différent de façon à pouvoir figurer dans une autre description de poste, alors on ne pourrait parler de la «suppression d'une fonction». En revanche, si les activités qui font partie de l'ensemble ou du groupe d'activités sont réparties entre d'autres personnes, comme ce fut le cas dans Mudarth, précité, il y aurait «suppression d'une fonction». Il y aurait également «suppression d'une fonction» si les responsabilités sont décentralisées, comme ce fut le cas dans Coulombe, précité. »
[…]
247 L’avocat du défendeur a également fait observer que la Cour suprême du Canada a cité deux décisions dans son analyse d’une « suppression d’une fonction » dans Flieger. Dans la première décision (Mudarth (P.I.)), en déterminant la signification d’une « fonction », la Section de première instance de la Cour fédérale d’alors a statué que :
[…]
Donner effet à l’argument formulé par la demanderesse au sujet du sens à accorder au mot « fonction » empêcherait le gouvernement d’abolir quelque poste que ce soit et de renvoyer l’employé, à moins qu’une partie des tâches ou du travail effectués par cet employé soit complètement supprimée et qu’elle ne soit plus exécutée par une autre personne ou un autre groupe de la Fonction publique. Cela nuirait évidemment beaucoup à la réorganisation des ministères et des directions générales de la Fonction publique par la redistribution de tâches et paralyserait dans une large mesure toute mise à jour des procédures administratives. Une interprétation aussi radicale du paragraphe 29(1) de la Loi sur l’emploi dans la Fonction publique n’est pas du tout requise pour donner pleinement effet à l’économie et l’esprit de la loi. La Loi empiète évidemment sur les pouvoirs généraux de gestion qui sont accordés au gouvernement du Canada et à ses divers ministères et restreint les pouvoirs en question, mais l’empiètement devrait se limiter à ce qui est nécessaire pour donner effet aux objets et aux dispositions de la Loi.
[…]
L’avocat du défendeur a fait valoir que cette approche établit un lien entre le mot « fonction » et le « poste » occupé par Mme Mudarth. Le poste de Mme Mudarth comportait un ensemble de tâches et de responsabilités qui n’étaient plus exécutées, et qui n’existaient donc plus et par conséquent, il y avait « suppression d’une fonction ».
248 L’autre cas que mentionnait la majorité de la Cour suprême du Canada dans Flieger est Coulombe. Dans ce cas, les activités ayant été exercées par M. Coulombe avaient été réparties entre un certain nombre de personnes au sein de l’organisation. La Section de première instance de la Cour fédérale d’alors a statué qu’il s’agissait d’une « suppression de fonction » en ces termes :
[…]
Une fonction correspond à une action. On entend par fonction le genre d’action qui incombe au titulaire d’un poste. Par conséquent, la fonction équivaut à l’exécution des tâches inhérentes à ce poste. Du titulaire d’un poste qui exécute les tâches inhérentes à un poste, on dit qu’il remplit sa fonction. Les fonctions correspondent donc aux pouvoirs et aux tâches inhérentes à un poste.
Par conséquent, je suis d’avis que lorsque les fonctions inhérentes à un poste sont transférées par suite d’une réorganisation et que le poste est aboli sans, pour cela, que les fonctions soient supprimées, il en résulte la suppression de la fonction du titulaire du poste. De ce fait, les services fournis par un employé qui occupait ce poste ne seront plus requis en raison de la suppression de la fonction qu’il remplissait auparavant […]
[…]
249 L’avocat de M. Tipple a fait valoir que ma compétence m’est conférée par le sous-alinéa 209(1)c)(i) de la LRTFP, qui prévoit qu’un grief peut être renvoyé à l’arbitrage, dans le cas d’un fonctionnaire de l’administration publique centrale, si le grief porte sur un licenciement aux termes de l’alinéa 12(1)e) de la LGFP pour des motifs autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite. Le sous-alinéa 209(1)c)(i) de la LRTFP se lit comme suit :
209. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur
[…]
c) soit, s’il est un fonctionnaire de l’administration publique centrale,
(i) la rétrogradation ou le licenciement imposé sous le régime soit de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques pour rendement insuffisant, soit de l’alinéa 12(1)e) de cette loi pour toute raison autre que l’insuffisance du rendement, un manquement à la discipline ou une inconduite
L’alinéa 12(1)e) de la LGFP prévoit quant à lui ce qui suit :
12. (1) […] chaque administrateur général peut, à l’égard du secteur de l’administration publique centrale dont il est responsable,
[…]
e) prévoir, pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, le licenciement ou la rétrogradation à un poste situé dans une échelle de traitement comportant un plafond inférieur d’une personne employée dans la fonction publique […]
L’avocat de M. Tipple a également fait valoir que la mise en disponibilité alléguée était un licenciement qui tombe sous le coup de l’alinéa 12(1)e) de la LGFP. Selon lui, le licenciement de M. Tipple n’était pas une véritable mise en disponibilité faute de travail ou découlant de la suppression d’une fonction, mais a plutôt été effectué de mauvaise foi.
250 Dans un cas dans lequel une mise en disponibilité est alléguée, il incombe à l’administrateur général de prouver que les services du fonctionnaire ne sont plus nécessaires faute de travail, par suite de la suppression d’une fonction, ou à cause de la cession du travail ou de la fonction à l’extérieur de la fonction publique. En l’espèce, le défendeur a allégué que les fonctions de M. Tipple avaient été supprimées. Si l’administrateur général s’acquitte de ce fardeau de preuve, celui-ci se déplace vers le fonctionnaire, qui doit désormais établir que les gestes du défendeur équivalaient à invoquer de façon factice l’article 64 de la LEFP, ou à commettre un subterfuge ou du camouflage.
251 Je crois que les parties reconnaissent que d’octobre 2005 à mars 2006, la relation professionnelle entre TPSGC et M. Tipple reposait sur des bases solides. M. Tipple dirigeait un certain nombre d’initiatives en cours. M. Marshall a témoigné que les initiatives élaborées par M. Tipple d’octobre 2005 à mars 2006 ont placé TPSGC à l’avant-plan en économisant au gouvernement du Canada environ 150 millions de dollars par année. M. Marshall a déclaré qu’il a attribué à M. Tipple une cote de rendement « a excédé les attentes » et un boni de 15 % en raison du travail accompli par M. Tipple pendant cette période.
252 J’étudierai maintenant la période débutant en mars ainsi que l’ensemble de la preuve pour déterminer si le défendeur avait décidé de licencier M. Tipple parce que ses services n’étaient plus nécessaires en raison de la suppression d’une fonction ou parce qu’il a invoqué de façon factice la LEFP ou a commis un subterfuge ou du camouflage.
253 Le reste de la preuve qui m’a été présenté à l’audience porte sur des visions contradictoires des mêmes événements. Pour évaluer la crédibilité de cette preuve, je dois établir si elle est cohérente avec l’ensemble de la preuve.
254 Pour déterminer la crédibilité des témoins, je cite l’arrêt bien connu de Faryna v. Chorny (1951), [1952] 2 D.L.R. (C.A. de la C.-B.), qui a établi les critères suivants d’évaluation de la crédibilité d’un témoin :
[Traduction]
[…]
[…] Si la conclusion du juge de première instance à propos de la crédibilité doit tenir uniquement à la question de savoir qui, à son avis, donne l’impression d’être le plus sincère à la barre des témoins, sa conclusion sera purement arbitraire et l’administration de la justice se fera en fonction des déclarations des personnes qui se sont révélées les meilleurs acteurs à la barre des témoins. Réflexion faite, il devient presque évident que l’apparence de sincérité n’est qu’un des éléments qui entre en ligne de compte lorsqu’il s’agit d’apprécier la crédibilité d’un témoin. Les possibilités qu’avait le témoin d’être au courant des faits, sa capacité d’observation, son jugement, sa mémoire, son aptitude à décrire avec précision ce qu’il a vu et entendu contribuent, de concert avec d’autres facteurs, à créer ce qu’on appelle la crédibilité.
[…]
La crédibilité de témoins intéressés, particulièrement dans des affaires où il y a conflit de preuves, ne peut être jugée uniquement d’après la question de savoir si le comportement personnel du témoin particulier peut garantir la véracité de son témoignage. Il faut examiner objectivement son témoignage pour déterminer s’il concorde avec les probabilités qui sous-tendent les conditions courantes réelles. Bref, ce qui permet de vérifier réellement si le témoin dit la vérité en pareil cas, c’est que son témoignage doit être compatible avec la prépondérance des probabilités qu’une personne pratique et bien renseignée reconnaîtrait aisément comme raisonnable dans ce lieu et dans ces conditions. Ce n’est qu’ainsi qu’un tribunal peut évaluer de manière satisfaisante les dépositions de témoins expérimentés, confiants et vifs d’esprit, de même que celles qui se complaisent dans le demi-mensonge et qui ont le don de combiner des exagérations habiles avec des dissimulations partielles de la vérité. […]
[…]
Le juge de première instance doit aller plus loin et affirmer que les preuves présentées par le témoin qu’il juge digne de foi sont conformes à la prépondérance des probabilités et, s’il veut que l’on ait confiance en lui, il doit indiquer pourquoi il en est arrivé à cette conclusion. Un juge n’a pas le pouvoir de lire dans les pensées des gens. De plus, la Cour d’appel doit être convaincue que le juge de première instance a fondé ses constatations concernant la crédibilité non pas sur un seul élément à l’exclusion des autres, mais sur tous les éléments qui servent de critères dans l’affaire à trancher. […]
[…]
La Cour suprême du Canada a récemment confirmé cette approche dans F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53. Au paragraphe 58, la Cour a conclu :
[58] […] lorsque la norme applicable est la prépondérance des probabilités, il n’y a pas non plus de règle quant aux circonstances dans lesquelles les contradictions relevées dans le témoignage du demandeur amèneront le juge du procès à conclure que le témoignage n’est pas crédible ou digne de foi. En première instance, le juge ne doit pas considérer le témoignage du demandeur en vase clos. Il doit plutôt examiner l’ensemble de la preuve pour déterminer l’incidence des contradictions sur les questions de crédibilité touchant au cœur du litige.
255 M. Marshall a témoigné qu’en mai 2006, il se demandait s’il allait conserver les services de M. Tipple en raison des progrès réalisés par M. McGrath dans le cadre de certaines des stratégies de l’initiative Les prochaines étapes. D’avril à juin 2006, il a eu plusieurs discussions avec Mme Aloïsi, qui estimait que le rôle de M. Tipple comme conseiller spécial ne fonctionnait pas. Dans ce contexte, il y a lieu de se demander pourquoi, si le rôle de M. Tipple ne fonctionnait pas, aucune analyse ni étude stratégique de l’organisation n’a été faite au cours de cette période pour redéfinir le rôle en question, le réorganiser au sein ou à l’extérieur de TPSGC ou l’abolir. Aucune preuve n’a été produite que M. Marshall ou Mme Aloïsi a mené une analyse ou une étude ou a eu des discussions avec M. Tipple à cet égard.
256 M. Marshall a également témoigné que la mise en œuvre des initiatives dirigées par M. Tipple créait de la tension pour TPSGC et nuisait à sa capacité d’absorber d’autres changements, les fonctionnaires étant très préoccupés du nombre de changements. En outre, les agents négociateurs élaboraient une campagne dans le but de contester toute impartition majeure de leurs membres. De plus, M. Marshall a déclaré qu’une société d’État n’était pas au programme du gouvernement du Canada. La société d’État représentait seulement l’une des idées de M. Tipple, et bien que TPSGC ne souhaitait pas la mettre en œuvre, les autres initiatives de Les prochaines étapes se sont poursuivies, et de nouvelles idées pour faire épargner de l’argent au gouvernement du Canada ont été soumises à des fins d’examen. Le fait pour M. Marshall de mentionner la proposition de société d’État comme motif de licenciement de M. Tipple ne constitue qu’un ballon d’essai et mine sa crédibilité.
257 De plus, pourquoi M. Marshall a-t-il approuvé, en date du 12 mai 2006, la demande de M. Tipple de se rendre au Royaume-Uni du 25 au 30 juin 2006 si, à ce moment-là, il envisageait de le licencier? Au début de mai 2006, M. Tipple a demandé à M. Marshall d’autoriser son voyage ainsi que celui de M. Rotor au Royaume-Uni à la fin de juin 2006 pour discuter des meilleures pratiques avec des fonctionnaires du Royaume-Uni et leurs fournisseurs de services immobiliers. M. Marshall a approuvé la demande de M. Tipple, mais a précisé que M. Rotor devrait fournir une justification de voyage distincte. La Direction générale de la politique et de la planification ministérielles de TPSGC et le Haut-commissariat ont organisé le voyage et ont prévu un certain nombre de réunions. Le jour du départ de M. Tipple à destination du Royaume-Uni, il n’avait pas encore reçu les détails des réunions. Lorsqu’il est arrivé à Londres, M. Tipple a informé Mme Dickson et M. Saint-Jacques qu’il n’assisterait pas aux réunions sur les questions d’approvisionnement, mais qu’il serait présent aux réunions sur les biens immobiliers, parce que ces dernières relèvent de sa responsabilité. M. Tipple a remplacé les rencontres sur les questions d’approvisionnement par des réunions avec des représentants d’entreprises privées qui portaient sur des questions de biens immobiliers. Il a assisté aux neuf réunions prévues, du 26 au 30 juin 2006, qui touchaient son portefeuille, ce dont faisait état le rapport Minto, qui a confirmé que M. Tipple a utilisé son temps de façon responsable et productive.
258 Fait également dérangeant, bien que M. Marshall envisageait de licencier M. Tipple et en avait prétendument discuté avec Mme Aloïsi, il avait néanmoins approuvé, à la fin de juin 2006, le paiement de la cotisation annuelle de 2 407,50 $ de M. Tipple au National Club de Toronto. La cotisation a été payée à la fin de juillet.
259 Le 6 juillet 2006, Mme Dickson a informé MM. Evanik et Westler que M. Tipple avait manqué des réunions au NAO, au ministère de la Défense et à NHS-PASA et que M. Saint-Jacques avait envoyé des lettres d’excuses aux organismes du Royaume-Uni en question. Toutefois, la preuve établit clairement que M. Tipple avait effectivement assisté à la réunion avec le ministère de la Défense l’après-midi du 28 juin 2006, réunion qui portait sur des questions de biens immobiliers. La réunion avec le ministère de la Défense tenue au cours de la matinée avait trait à des questions d’approvisionnement, tout comme les réunions avec le NAO et le NHS-PASA. M. Tipple n’a donc pas assisté à ces réunions.
260 Toujours le 6 juillet 2006, M. Evanik a informé M.Trépanier que les conseillers spéciaux ont manqué les réunions parce que le Haut-commissariat n’a rempli que partiellement son engagement de coordonner les réunions et de soutenir les conseillers spéciaux et que TPSGC n’a pas fait montre de la diligence nécessaire en insistant pour que le Haut-commissariat fournisse des renseignements détaillés.
261 Au cours de leur réunion du 12 juillet 2006, M. Marshall a demandé à M. Tipple s’il avait manqué des réunions pendant qu’il était au Royaume-Uni. M. Tipple lui a dit qu’il a assisté à toutes les réunions prévues qui portaient sur des questions de biens immobiliers. Je constate également que M. Marshall avait informé M. Tipple que M. Rotor devait produire sa propre justification de voyage. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que M. Marshall ignorait que M. Tipple s’était absenté de certaines réunions parce qu’elles portaient sur des questions d’approvisionnement. M. Tipple a également mentionné à M. Marshall que lorsqu’il est arrivé au Royaume-Uni, il a informé M. Saint-Jacques et Mme Dickson qu’il n’assisterait pas aux réunions sur les questions d’approvisionnement. Il a également informé M. Marshall d’une lacune au niveau de la coordination entre TPSGC et le Haut-commissariat, que M. Rotor a manqué plusieurs réunions en raison de conflits d’horaire et que Mme Dickson n’a fourni aucun soutien logistique, notamment au niveau de la prise de notes, contrairement à ce qui avait été promis. M. Marshall lui a demandé de dresser un rapport de voyage expliquant les avantages du voyage, les réunions auxquelles il a assisté et son emploi du temps.
262 Le 17 juillet 2006, pour le compte de M. Marshall, Mme Aloïsi a envoyé des lettres d’excuses à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni concernés. L’envoi des lettres d’excuses et les ramifications qui en découlent se trouvent au cœur des prétentions de M. Tipple. Il estime en effet que c’est ce qui a mené à son licenciement Un examen attentif des circonstances qui entourent les lettres d’excuses m’amène à tirer les conclusions suivantes. M. Tipple a informé M. Marshall le 12 juillet 2006 qu’il n’a manqué aucune des réunions prévues qui portaient sur les questions liées aux biens immobiliers, que les conflits d’horaire étaient causés par le manque de coordination entre TPSGC et le Haut-commissariat, et que M. Rotor a manqué plusieurs réunions en raison du soutien insuffisant du Haut-commissariat. MM. Marshall et Tipple ont affirmé, sans que ce soit contredit, qu’ils se sont rencontrés presque quotidiennement du 12 au 17 juillet 2006. Dans ce cas, pourquoi M. Marshall n’a-t-il jamais mentionné à M. Tipple au cours de cette période qu’il enverrait des lettres d’excuses? Bien que M. Marshall ait déclaré qu’il a envoyé les lettres parce que c’est ce que veut le protocole, la preuve révèle que M. Marshall s’est non seulement excusé pour l’absence des conseillers spéciaux à des réunions inscrites à l’horaire, mais également qu’il n’a jamais informé M. Tipple que M. Saint-Jacques s’était déjà excusé du comportement de M. Tipple. Ce dernier a découvert par hasard le 9 août 2006 que des lettres d’excuses avaient été envoyées. M. Marshall ne l’a jamais avisé que des allégations d’inconduite avaient été formulées contre lui. Des allégations de mauvaise conduite désignent généralement une certaine forme d’acte répréhensible ou de mauvaise conduite. M. Marshall a convenu au cours de la présente audience qu’il aurait dû informer M. Tipple qu’il avait envoyé des lettres d’excuses. Il n’en demeure pas moins qu’il ne l’a pas fait. J’estime que M. Marshall avait l’occasion et l’obligation d’aviser M. Tipple des allégations formulées contre lui et qu’il devait lui donner une occasion de répondre à ces allégations avant d’envoyer les lettres d’excuses. Si M. Marshall avait des doutes sur l’explication de M. Tipple indiquant qu’il avait assisté à toutes les réunions concernant les questions de biens immobiliers et que c’est M. Rotor qui a manqué des réunions prévues, il aurait dû mener une enquête sur la question avant d’envoyer les lettres d’excuses.
263 Après sa réunion du 12 juillet 2006 avec M. Marshall, M. Tipple a commencé à préparer son rapport de voyage. Le 31 juillet 2006, à l’insu de M. Tipple, M. Evanik a reçu une copie de son rapport provisoire « de façon déguisée ». M. Evanik l’a alors acheminé à M. Trépanier. Le rapport a ensuite été communiqué clandestinement par un haut-fonctionnaire de TPSGC à un responsable du Haut-commissariat avant que M. Leblanc en obtienne une copie.
264 Le 9 août 2006, M. Leblanc a envoyé un courriel à M. Baril pour lui demander des réponses aux questions suivantes au sujet du voyage au Royaume-Uni : à qui M. Marshall a-t-il envoyé des lettres d’excuses; le coût du voyage; M. Tipple avait-il prolongé le voyage pour des raisons personnelles; sa femme l’accompagnait-elle; est-ce que TPSGC payait ses dépenses; à qui le rapport de voyage était-il destiné, et ainsi de suite. M. Baril a envoyé son courriel au chef de cabinet de M. Marshall et à celui du ministre. À ce stade, le cabinet du ministre a commencé à s’impliquer. Ce n’est qu’à ce moment-là que M. Tipple a appris que M. Leblanc avait une copie de son rapport et que M. Marshall avait envoyé des lettres d’excuses à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni concernés.
265 Le 15 août 2006, The Globe and Mail a publié un article à la une portant le titre [traduction] « Le voyage de conseillers fédéraux en Grande-Bretagne soulève la colère. Des fonctionnaires auraient annulé des réunions. » Le ministre a vu l’article et a fait parvenir un courriel à M. Loiselle. M. Loiselle a répondu [traduction] « Je crois que c’est le genre d’article qui mettra le feu au derrière « du centre » […] et du patron. » On peut présumer sans grand risque de se tromper que la mention par M. Loiselle du « patron » faisait référence au Premier ministre. Qu’il suffise d’affirmer que l’article de The Globe and Mail a attiré l’attention non seulement du ministre, mais également celle du gouvernement du Canada.
266 Plus tard, le 15 août 2006, M. Tipple a envoyé un courriel à M. Baril pour le questionner au sujet du plan d’action et pour lui demander quel plan médias était en place. Sa demande a été acheminée à Mme Aloïsi et à M. Trépanier. Ce dernier a donné instruction à M. Anderson de ne pas répondre à la demande de M. Tipple. M. Tipple a envoyé un autre courriel à M. Baril pour obtenir son approbation de rencontrer le ministre et M. Leblanc pour rétablir les faits. M. Baril l’a avisé qu’il ne pouvait rencontrer aucune de ces deux personnes. Il a informé M. Tipple qu’il avait établi un plan médias, mais M. Tipple n’en a pas reçu de copie. À l’examen de la preuve, je constate qu’il n’y avait pas de plan médias; il y avait cependant des infocapsules auxquelles M. Tipple avait initialement donné son accord. Toutefois, il s’agissait seulement de brefs énoncés comportant peu de substance qui ne traitaient pas du fait que M. Tipple n’a manqué aucune des réunions prévues pendant son voyage au Royaume-Uni. Quand d’autres articles sur M. Tipple ont été publiés les 16, 17 et 18 août 2006 dans The Globe and Mail, TPSGC n’avait encore aucun plan médias. M. Marshall a déclaré que le cabinet du ministre exerçait un contrôle sur les infocapsules. Encore une fois, je ne dispose d’aucune preuve de l’existence d’un plan de communication ou d’un plan médias.
267 M. Marshall a convenu que si TPSGC avait informé M. Leblanc le 10 août 2006 que M. Tipple avait assisté à toutes les réunions prévues qui portaient sur les biens immobiliers, cette information aurait pu protéger sa réputation. On pourrait conclure que TPSGC et le cabinet du ministre ont refusé de répondre à la demande de M. Tipple parce qu’ils n’avaient pas de plan médias. En fait, au dire de M. Marshall, c’est le cabinet qui contrôlait le plan médias, mais il ne l’a jamais vu.
268 Le 17 août 2006, The Globe and Mail a publié un autre article qui mentionnait que les députés de l’opposition demanderaient aux conseillers spéciaux de comparaître devant le Comité de la Chambre des communes en septembre 2006 pour faire un rapport complet sur leur voyage au Royaume-Uni. M. Tipple a déclaré qu’il avait hâte de comparaître pour donner sa version des faits.
269 M. Marshall a dit qu’il ignorait comment MM. Evanik et Trépanier avaient obtenu la version provisoire du rapport de voyage de M. Tipple; toutefois, M. Tipple devait demander une enquête sur sa communication clandestine. La preuve révèle que ni M. Evanik ni M. Trépanier n’ont déclaré qu’ils ont reçu le rapport. Nous savons également qu’au même moment, Mme Thorsteinson a transmis clandestinement le rapport à Mme Dickson et qu’il s’est rendu d’une façon ou d’une autre jusqu’au journal The Globe and Mail. M. Read était également au courant de la diffusion ciblée du rapport, mais il ne l’a pas déclarée lui non plus.
270 Pendant le contre-interrogatoire, quand M. Marshall a été prié de se reporter au rapport d’enquête de M. Desmarais sur la communication clandestine du rapport de voyage de M. Tipple à The Globe and Mail, il a déclaré qu’il était en vacances quand le journal a obtenu copie du rapport et que l’enquête a pris fin après son départ de TPSGC. Quand l’avocat de M. Tipple lui a demandé de se reporter à certains paragraphes du rapport d’enquête, M. Marshall a déclaré qu’il avait probablement été informé de l’enquête à son retour de vacances. J’ai peine à croire que pendant ses conversations avec Mme Aloïsi, qui était en contact régulier avec lui pendant ses vacances, il n’a pas été informé de l’enquête, notamment parce qu’elle portait sur son conseiller spécial et sur le personnel de direction de TPSGC. J’estime qu’il est improbable que M. Marshall n’ait pas ordonné immédiatement une enquête et qu’il n’ait pas été tenu personnellement au courant des faits nouveaux. Le fait pour M. Marshall de prendre la situation à la légère et de déclarer qu’il a peut-être été informé de la communication clandestine à son retour de vacances m’amène à croire que son témoignage sur ces événements n’était pas franc. À titre de sous-ministre, M. Marshall avait pour fonction d’assurer la direction de TPSGC après la publicité défavorable occasionnée par le scandale des commandites. Sa charge a marqué le début d’un autre scandale. M. Tipple a déclaré que par le passé, les documents confidentiels auxquels il a travaillé pour le ministre et le BCP avaient été communiqués clandestinement aux médias. Il y a maintenant eu une autre communication clandestine aux médias, et les questions posées par les médias, comme le dit le vieil adage « ouvraient une boîte de vers ».
271 La preuve révèle que le 22 août 2006, M. Minto était chargé de faire enquête sur le voyage au Royaume-Uni. L’avocat du défendeur a déclaré que M. Marshall a parrainé le rapport Minto et a convenu qu’il exonérait M. Tipple de tout acte répréhensible. Même si M. Marshall voulait licencier M. Tipple pour un acte répréhensible, le rapport Minto l’empêchait de le faire. La décision de M. Marshall de demander à M. Minto de mener une enquête a été prise après qu’il ait envoyé les lettres d’excuses. À mon avis, M. Marshall a agi ainsi pour valider l’annulation par M. Tipple des réunions et un comportement inapproprié de la part de ce dernier. La preuve indique que le rapport Minto exonérait M. Tipple de tout acte répréhensible pendant qu’il était au Royaume-Uni, et je crois que M. Marshall ne s’attendait pas à ce résultat.
272 Le vendredi 25 août 2006, M. Marshall a rencontré le ministre. Ce dernier lui a alors demandé si l’« expérience » — le recrutement des conseillers spéciaux — était sur la bonne voie. D’après M. Marshall, le ministre n’a pas exercé de pressions sur lui pour qu’il les licencie. Toutefois, il a expliqué de quelle façon la réunion a crystallisé sa réflexion et, après avoir réfléchi à la question pendant la fin de semaine, il a décidé de mettre fin à l’emploi de M. Tipple. Il a déclaré qu’il a pris cette décision parce que l’initiative Les prochaines étapes était en avance sur son calendrier, M. Tipple avait réalisé ses principaux engagements, il n’y avait plus d’initiatives majeures à diriger pour lui et TPSGC ne pouvait pas absorber d’autres changements. De plus, il avait confiance que M. McGrath pouvait assumer le travail supplémentaire que nécessitait l’initiative Les prochaines étapes.
273 Le lundi 28 août 2006, M. Marshall a informé le ministre de sa décision de mettre fin à l’emploi des conseillers spéciaux. Toutefois, Mme Lorenzato a témoigné que le 24 août 2006, M. Marshall lui a demandé de rencontrer Mme Aloïsi pour discuter des options en vue de mettre fin à l’emploi de M. Tipple. Elle s’est fait demander d’étudier les options suivantes : la suppression du travail, un renvoi en cours de stage et un échange avec un autre ministère ou organisme du gouvernement. Mme Lorenzato a déclaré qu’elle n’appuyait pas la décision d’abolir le poste de M. Tipple et de transférer ses fonctions à M. McGrath. Elle a également témoigné qu’il n’y a jamais eu d’analyse ni de discussions pour déterminer les initiatives qu’il restait à diriger et qui en assumerait la responsabilité après le 31 août 2006. De plus, elle a déclaré qu’ils n’avaient pas expressément discuté d’une mise en disponibilité, mais plutôt d’une cessation d’emploi.
274 M. Marshall s’est également fait demander en contre-interrogatoire d’expliquer la « Note au sous-ministre » qu’il a approuvée le 1er septembre 2006 dans le but d’harmoniser les fonctions de transformation des affaires au sein de TPSGC. Il a déclaré qu’il avait décidé de modifier la structure organisationnelle en une journée pace qu’à titre de sous-ministre, il avait le pouvoir de le faire.Mme Lorenzato et lui ont affirmé qu’aucune étude ni analyse n’avait été menée avant le 31 août 2006 relativement aux changements organisationnels. M. Marshall n’a jamais discuté des changements organisationnels avec M. McGrath ou M. Tipple.
275 Pendant le contre-interrogatoire de M. Marshall, je lui ai demandé, à des fins de clarification, si les initiatives Les prochaines étapes qui étaient dirigées par M. Tipple avant le 31 août 2006 avaient été interrompues par TPSGC. Il a répondu que c’était exact. Toutefois, après le dépôt de la pièce G-6 et un interrogatoire exhaustif par l’avocat de M. Tipple, M. Marshall a convenu que les travaux de mise en œuvre de la plupart de ces initiatives s’étaient poursuivis. L’avocat du défendeur a admis que M. Tipple avait un certain nombre d’initiatives en cours qui se sont poursuivies après le 31 août 2006.
276 M. Marshall a également déclaré qu’il avait décidé d’intégrer les fonctions de M. Tipple à celles de M. McGrath et que Mme Orange serait disponible pour l’aider. Toutefois, il a convenu ultérieurement avec l’avocat de M. Tipple que certaines des fonctions de M. Tipple (l’étude sur le secteur des biens immobiliers) avaient été exécutées par M. Homma.
277 M. Tipple n’a jamais été informé avant le 31 août 2006 que sa période de nomination pour une durée déterminée se terminerait plus tôt que ce qui était indiqué dans sa lettre d’offre et que ses fonctions seraient intégrées à celles de M. McGrath. Il n’y a eu ni étude sur la réorganisation, ni analyse, ni preuve de réunions ou de discussions sur cette question. En fait, je n’ai reçu aucune preuve que M. Marshall a déjà discuté de la réorganisation de la Direction générale des biens immobiliers avec M. McGrath ou a informé ce dernier qu’il devrait assumer les fonctions de M. Tipple.
278 M. Marshall a déclaré qu’il a aboli le poste de M. Tipple et qu’il n’a pas été créé de nouveau. Toutefois, il n’a pas mentionné que moins de huit mois plus tard, un poste de sous-ministre adjoint délégué, Direction générale des biens immobiliers, a été créé au sein de TPSGC. Ce poste, bien que non identique, était très similaire au poste de conseiller spécial de M. Tipple, et le titulaire de ce poste s’est consacré à un certain nombre des initiatives Les prochaines étapes.
279 M. Marshall a déclaré que M. Tipple était « l’un de ses hommes ». Si telle était la vérité, pourquoi ne s’est-il pas montré franc et honnête avec lui?
280 Après un examen exhaustif de l’ensemble de la preuve documentaire présentée à l’audience et des témoignages, et compte tenu des critères d’évaluation de la crédibilité des témoins énoncés dans Faryna et McDougall, je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que le témoignage de M. Marshall n’est pas crédible, en particulier, mais non exclusivement, en raison de son incapacité — ou peut-être de sa réticence — à se souvenir de nombreux événements importants. Ce n’est qu’à la suite des questions de l’avocat de M. Tipple qu’il a reconnu avec réticence les événements et qu’il a déclaré qu’il était au courant des courriels échangés et des autres documents pertinents.
281 Par ailleurs, je conclus que M. Tipple est un témoin très crédible qui a témoigné de manière franche et ouverte. Il ne s’est jamais montré évasif et a répondu clairement et avec exactitude à toutes les questions posées par les deux avocats.
282 Comme je l’ai mentionné précédemment, la note de breffage dressée par Mme Aloïsi le 21 août 2006 en vue de la réunion de M. Marshall avec le ministre n’a jamais été produite même si M. Marshall et l’avocat du défendeur ont convenu qu’ils en fourniraient une copie à M. Tipple et à son avocat. Ce n’était pas la première fois que le défendeur avait omis de produire des documents, et ce fait m’amène à tirer une conclusion défavorable.
283 Bien qu’au cours de l’audience, l’avocat du défendeur a déclaré à de nombreuses occasions que Mme Aloïsi serait appelée à témoigner, elle ne l’a pas été. Si Mme Aloïsi avait été appelée à témoigner par le défendeur, elle aurait pu expliquer pourquoi elle estimait que le rôle de M. Tipple comme conseiller spécial n’avait pas fonctionné. En outre, elle aurait pu expliquer pourquoi elle n’avait pas informé M. Marshall qu’elle avait ajouté la question des réunions annulées aux messages clés des infocapsules. Si Mme Aloïsi avait été appelée à témoigner par le défendeur, elle aurait pu clarifier le contexte de ses conversations avec M. Marshall et le plan de communication de TPSGC à la suite des articles parus dans The Globe and Mail. Elle aurait également pu commenter la note de breffage qu’elle a élaborée le 21 août 2006 en vue de la réunion de M. Marshall avec le ministre. Compte tenu de l’implication de Mme Aloïsi dans cette affaire, je conclus de son défaut de témoigner que son témoignage aurait nui à la cause du défendeur.
284 Compte tenu de l’ensemble de la preuve, je ne suis pas convaincu selon la prépondérance des probabilités qu’il y a eu une véritable réorganisation de la Direction générale des biens immobiliers. Je suis persuadé que la suppression factice des fonctions de M. Tipple avait pour but de justifier la décision de M. Marshall de mettre fin à l’emploi de M. Tipple pour d’autres motifs.
285 Tel qu’il est énoncé dans Rinaldi, un arbitre de grief a compétence pour entendre et trancher un grief qui conteste une mise en disponibilité s’il croit que la mise en disponibilité ne constituait pas une véritable cessation d’emploi, mais plutôt une tentative de dissimuler que l’on a invoqué de façon factice la LEFP. M. Tipple s’est acquitté de son fardeau de preuve en me convainquant, selon la prépondérance des probabilités, que les conditions requises pour le mettre en disponibilité en vertu du paragraphe 64(1) de la LEFP n’étaient pas présentes au moment pertinent et que par conséquent son emploi n’a pu prendre fin en vertu de la LEFP. En conséquence, je rejette la prétention du défendeur selon laquelle M. Tipple a été mis en disponibilité en vertu du paragraphe 64(1) de la LEFP et son objection à la compétence d’un arbitre de grief dans la présente affaire. M. Tipple a renvoyé son grief à l’arbitrage à juste titre. Comme il était un fonctionnaire de l’administration publique centrale et que son licenciement, qui n’a pas été fait en vertu de la LEFP, constituait un subterfuge ou un camouflage, je conclus que j’ai compétence sur ce grief en vertu du sous-alinéa 209(1)c)(i) de la LRTFP.
286 Ayant conclu que le défendeur n’était pas fondé de mettre fin à l’emploi de M. Tipple, j’examinerai maintenant la question de la réparation.
B. Réparations
287 J’ai conclu que le licenciement de M. Tipple de son poste de EX-05 à TPSGC à la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006 n’a pas été fait en vertu de la LEFP, mais constituait plutôt un subterfuge ou un camouflage. Le défendeur n’était pas justifié de mettre fin à sa nomination pour une période déterminée.
288 La jurisprudence établit très clairement qu’une fois que la nomination pour une période déterminée d’un fonctionnaire a pris fin, comme dans le présent cas, un arbitre de grief n’a pas la compétence de nommer le fonctionnaire à un autre poste au sein de la fonction publique. C’est la CFP qui possède ce pouvoir.
289 Toutefois, en vertu de la LRTFP, un arbitre de grief possède de vastes pouvoirs généraux dans les cas de licenciement injustifié. Le paragraphe 228(2) confère les pouvoirs de réparation qui suivent :
228. (2) Après étude du grief, il tranche celui-ci par l’ordonnance qu’il juge indiquée […]
290 M. Tipple demande les mesures correctives suivantes :
a. une ordonnance le réintégrant dans son poste de conseiller spécial du sous-ministre, Transformation du secteur des biens immobiliers, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (au niveau EX-05), avec remboursement du salaire et des autres avantages qu’il aurait reçu avant la date de la réintégration;
b. subsidiairement, plutôt qu’une ordonnance le réintégrant dans son poste :
I. des dommages pour perte de salaire passé et futur d’un montant de 726 923,08 $;
ii. des dommages pour perte de bonis passés et futurs, d’un montant de 109 038,46 $ (soit environ 15 % de son salaire);
iii. des dommages pour perte d’avantages sociaux (y compris l’assurance-maladie, l’assurance dentaire, l’assurance-vie, etc.), d’un montant de 109 038,46 $ (soit environ 15 % de son salaire);
c. le paiement de frais de réinstallation et de déménagement d’un montant de 10 000,00 $;
d. des dommages parce que TPSGC a enfreint son obligation d’agir de bonne foi à l’égard de M. Tipple et son obligation de protéger la réputation de M. Tipple et de ne pas lui porter préjudice, d’un montant de 250 000,00 $;
e. des dommages punitifs découlant du comportement injuste, fallacieux, insouciant, capricieux, arbitraire et tyrannique de TPSGC, qui a occasionné du stress et de l’anxiété chez M. Tipple, a nui à sa réputation, et a perturbé sa vie personnelle, d’un montant de 250 000,00 $;
f. l’intérêt sur les montants qui précèdent;
g. le paiement complet de ses frais juridiques engagés dans la poursuite de son grief et de la présente demande d’arbitrage de grief.
291 En réponse, le défendeur a prétendu ce qui suit :
[Traduction]
[…]
[…] si l’on présume que ce Tribunal conclut qu’il a compétence pour entendre ce grief au fonds et que l’employeur est responsable, les dommages doivent être limités à juste titre à ce qui reste de l’emploi pour une période déterminée du fonctionnaire duquel il faut soustraire la preuve que le fonctionnaire n’a pas tenté d’atténuer ses dommages. Les faits de la présente affaire ne justifient pas d’adjuger au fonctionnaire quoi que ce soit qui s’apparente à des dommages punitifs.
[…]
292 Je traiterai maintenant de chacune des prétentions de M. Tipple.
1. Dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux
293 Le 31 août 2006, M. Tipple a reçu un mois de salaire plutôt que le préavis mentionné dans la Politique sur l’emploi pour une période déterminée du Conseil du Trésor, pour la période du 31 août 2006 au 29 septembre 2006.
294 En conséquence de son licenciement illégal, M. Tipple a perdu 360 000,00 $ par année en salaire, y compris les augmentations automatiques qui auraient pu être prévues, de son licenciement à la fin de sa nomination pour une période déterminée, c’est-à-dire du 30 septembre 2006 au 6 octobre 2008. Toutefois, je constate que M. Tipple ne réclame pas le montant complet de cette perte, mais a plutôt décidé de limiter sa réclamation au titre de la rémunération perdue à 726 923,08 $. Je juge que ce montant doit être utilisé aux fins du calcul des dommages pour perte de salaire.
295 Comme les deux parties ont convenu que M. Tipple était tenu d’atténuer les dommages qu’il a subis, je n’ai pas à traiter de la question de savoir si cette obligation de common law s’applique en vertu de la LRTFP à un fonctionnaire ayant fait l’objet d’un licenciement illégal.
296 M. Tipple a prouvé de manière exhaustive qu’il était incapable de trouver un emploi valable, malgré ses efforts visant à vendre ses compétences auprès de 15 recruteurs de cadres et de 37 sociétés d’experts-conseils, ou de créer des possibilités d’affaires importantes entre sa cessation d’emploi et la fin de sa nomination pour une période déterminée. J’estime que M. Tipple a examiné avec diligence les différentes possibilités avec les recruteurs et les sociétés d’experts-conseils dans le but de limiter la perte de son emploi à TPSGC.
297 La preuve révèle en outre que M. Tipple n’avait pas de revenu du 30 septembre 2006 à la fin de 2007 et qu’en 2008, il a gagné 38 172,00 $ de la société Solus Financial Corporation. Compte tenu de la preuve qui m’a été soumise, je suis convaincu que M. Tipple n’a pas touché d’autre revenu entre sa cessation d’emploi et le reste de sa nomination pour une période déterminée. En conséquence, ses dommages pour perte de salaire sont réduits de 38 172,00 $, pour être établis à 688 751,08 $.
298 La preuve révèle en outre que M. Marshall considérait M. Tipple comme un excellent fonctionnaire, dont les services étaient précieux, et ce même s’il a mis fin à son emploi, et que le 27 juin 2006, il a signé l’accord sur le rendement de M. Tipple, qui s’appliquait à la période du 11 octobre 2005 au 31 mars 2006. L’accord sur le rendement de M. Tipple démontrait qu’il a dépassé tous ses objectifs de l’initiative Les prochaines étapes, et à ce titre, M. Marshall a autorisé un boni de rendement de 25 655,00 $ pour cette période, ce qui représente 15 % du salaire de M. Tipple jusqu’au 31 mars 2006.
299 Du 1er avril 2006 à son licenciement, M. Tipple a poursuivi ses efforts dans le cadre de l’initiative Les prochaines étapes, tel qu’il est établi dans les rapports express, et je n’ai entendu aucun témoignage selon lequel M. Tipple n’a pas maintenu son rendement dans l’exécution de ses principaux engagements et dans la réalisation de ses objectifs dans l’initiative Les prochaines étapes. Ainsi, je suis convaincu que, selon la prépondérance des probabilités, M. Tipple a maintenu son niveau d’excellence jusqu’à son licenciement et aurait continué à excéder les attentes par la suite, ce qui lui donne droit à un boni de rendement de 15 % pour la période du 1er avril 2006 au 6 octobre 2008. Encore une fois, je constate que M. Tipple ne réclame pas le montant complet de cette perte, mais a plutôt décidé de restreindre sa réclamation pour perte de boni de rendement à 109 038,46 $. Par conséquent, je conclus qu’il a droit à des dommages pour perte de boni de rendement de 109 038,46 $.
300 M. Tipple réclame également des dommages pour perte d’avantages sociaux. Sa lettre d’offre mentionne qu’il y avait droit.
301 Depuis déjà un certain temps, des arbitres du secteur privé concluent qu’une adjudication de dommages constitue un dédommagement adéquat pour la perte d’avantages sociaux non concrets. Bien qu’il soit difficile de calculer la valeur précise d’avantages sociaux perdus, il est important qu’ils soient pris en compte pour établir un dédommagement juste dans les cas de licenciement illégal.
302 Des décideurs ont attribué des dédommagements pour la perte d’avantages sociaux non concrets en adjugeant des dommages dont les montants variaient entre 13 % et 20 % du salaire du fonctionnaire. Dans la présente affaire, les parties n’ont pas convenu d’un pourcentage représentant la valeur des avantages sociaux de M. Tipple. Toutefois, M. Tipple m’a demandé d’utiliser le facteur de 15 % pour calculer sa perte.
303 Dans des cas comme De Havilland Inc. v. Canadian Auto Workers, Local 112 (1999), 83 L.A.C. (4e) 157; Metropolitan Toronto (Municipality) v. Canadian Union of Public Employees, Local 79 (2001), 99 L.A.C. (4e) 1; NAV Canada v. International Brotherhood of Electrical Workers, Local 2228 (2004), 131 L.A.C. (4e) 429, un facteur de 15 % a été utilisé comme base de dédommagement pour la perte d’avantages sociaux. Comme je ne crois pas qu’un pourcentage plus bas représente une valeur équitable des avantages sociaux dans la fonction publique, je juge que le facteur de 15 % demandé par M. Tipple est raisonnable comme base de dédommagement de la perte des avantages sociaux dont il aurait bénéficié n’eût été de son licenciement illégal. Par conséquent, je conclus que M. Tipple a droit à une prime de 15 %, calculée sur la base de sa réclamation pour perte de salaire de 726 923,08 $, comme dédommagement pour la perte de ses avantages sociaux entre la cessation de son emploi et le reste de sa nomination pour une période déterminée. Ces 15 % correspondent à 109 038,46 $.
304 M. Tipple a également réclamé de l’intérêt au taux de la Banque du Canada du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008, en regard des dommages subis pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux.
305 La compétence d’un arbitre de grief d’adjuger de l’intérêt dans un cas de licenciement est précisée à l’alinéa 226(1)(i) de la LRTFP,qui se lit comme suit :
226. (1) Pour instruire toute affaire dont il est saisi, l’arbitre de grief peut :
[…]
i) dans le cas du grief portant sur le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire, adjuger des intérêts au taux et pour la période qu’il estime justifiés […]
306 Le pouvoir d’un arbitre de grief d’adjuger de l’intérêt dans le cas d’un grief qui implique un licenciement a été confirmé dans Nantel c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 351. Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale mentionnait ce qui suit aux paragraphes 6 et 7 :
[6] […] En effet, la nouvelle LRTFP prévoit à son alinéa 226(1)(i) que l’arbitre peut « dans le cas du grief portant sur le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire [nous soulignons] adjuger des intérêts au taux ou pour la période qu’il estime justifiée ».
[7] Cette modification [de l’alinéa 226(1)i) de la LRTFP], lorsque considérée à la lumière de la jurisprudence constante dont fait état le juge Pinard dans ses motifs laquelle, sans exception, interprète la LRTFP de la même façon depuis plus de trente ans, démontre sans équivoque que le législateur fédéral était bien conscient de l’état du droit sous la LRTFP, et qu’il a choisi de renoncer au bénéfice de la règle de Common-Law, à compter du 1er avril 2005, dans les cas précis prévus à l’alinéa 226(1)i) […]
307 Dans Canada (Procureur général) c. Morgan (1991), [1992] 2 C.F. 401 (C.A.), la majorité de la Cour d’appel fédérale a statué qu’un dédommagement doit être versé advenant un geste illégal. La majorité a en outre conclu que si de l’intérêt est adjugé comme dédommagement, il convient d’« […] adopter […] le taux des obligations d’épargne du Canada qui s’appliquerait chaque année sur le montant de l’indemnité, jusqu’au paiement de la somme due ». Enfin, la majorité a conclu que le « tribunal peut accorder des intérêts composés si, et seulement si, en vertu des éléments de preuve et des circonstances de l’affaire, ces intérêts sont nécessaires pour indemniser les pertes subies ».
308 Dans la présente affaire, le licenciement illégal de M. Tipple par le défendeur est survenu à la fermeture des bureaux le 29 septembre 2006. Je constate que M. Tipple ne réclame pas d’intérêt jusqu’à la date de cette décision sur les dommages pour perte de salaire de boni de rendement et d’avantages sociaux, mais qu’il a plutôt décidé de limiter sa réclamation à la période du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008. En conséquence, conformément à Morgan, je conclus qu’il a droit à de l’intérêt sur les dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux au taux des obligations d’épargne du Canada qui s’appliquerait chaque année du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008.
309 Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2006 est de 2,75 % par année, ce qui représente des intérêts de 24 937,77 $ sur les dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux pour la période du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2007. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2007 est de 3,10 % par année, ce qui représente des intérêts de 28 884,74 $ pour la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2008 est de 2,45 % par année, ce qui représente des intérêts de 386,89 $ pour la période du 1er au 6 octobre 2008. Je conclus donc que M. Tipple a droit à des intérêts de 54 209,40 $ sur les dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux.
2. Remboursement de frais de réinstallation et de déménagement
310 M. Tipple a réclamé 10 000,00 $ en frais de déménagement de sa famille de Toronto à Ottawa en mars 2006. La lettre d’offre mentionne que M. Tipple avait droit à des frais de réinstallation conformément à la Directive sur la réinstallation intégrée qui était en vigueur du 1er avril 2005 au 31 mars 2009.
311 Je crois le témoignage de M. Tipple selon lequel il a réinstallé sa famille de Toronto à Ottawa en raison des représentations de M. Marshall selon lesquelles il faudrait probablement de trois à cinq ans pour achever l’initiative Les prochaines étapes. Si M. Tipple avait présenté une demande de remboursement de frais de réinstallation et de déménagement à TPSGC, et si TPSGC avait rejeté cette demande, il aurait eu droit de franchir une autre étape sous la forme d’un grief individuel en vertu du paragraphe 208(1) de la LRTFP. Le paragraphe 208(1) prévoit ce qui suit :
208. (1) […] le fonctionnaire a le droit de présenter un grief individuel lorsqu’il s’estime lésé :
a) par l’interprétation ou l’application à son égard :
(i) soit de toute disposition d’une loi ou d’un règlement, ou de toute directive ou de tout autre document de l’employeur concernant les conditions d’emploi,
(ii) soit de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;
b) par suite de tout fait portant atteinte à ses conditions d’emploi.
312 Toutefois, comme il était un cadre de direction, si M. Tipple avait présenté un grief individuel réclamant le remboursement de frais de réinstallation et de déménagement, et s’il n’avait pas obtenu satisfaction au moyen de la procédure de règlement de griefs, il n’aurait pas été autorisé à renvoyer son grief à l’arbitrage. Le paragraphe 209(1) de la LRTFP confère aux fonctionnaires le droit de renvoyer des griefs à l’arbitrage concernant leurs modalités ou conditions d’emploi si celles-ci font partie de leurs conventions collectives ou de décisions arbitrales. Le paragraphe 209(2) assujettit ce droit à l’approbation et aux représentations de leurs agents négociateurs. Les paragraphes 209(1) et (2) sont ainsi rédigés :
209. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :
a) soit l’interprétation ou l’application, à son égard, de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;
b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire;
c) soit, s’il est un fonctionnaire de l’administration publique centrale :
(i) la rétrogradation ou le licenciement imposé sous le régime soit de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques pour rendement insuffisant, soit de l’alinéa 12(1)e) de cette loi pour toute raison autre que l’insuffisance du rendement, un manquement à la discipline ou une inconduite,
(ii) la mutation sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique sans son consentement alors que celui-ci était nécessaire;
d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, s’il est un fonctionnaire d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe (3).
(2) Pour que le fonctionnaire puisse renvoyer à l’arbitrage un grief individuel du type visé à l’alinéa (1)a), il faut que son agent négociateur accepte de le représenter dans la procédure d’arbitrage.
313 Comme M. Tipple n’est pas représenté par un agent négociateur, et comme il ne faisait pas partie d’une unité de négociation visée par une convention collective ou une décision arbitrale, il ne peut renvoyer à l’arbitrage un différend qui découle de sa réinstallation de Toronto à Ottawa. En conséquence, je n’ai pas de compétence en vertu de la LRTFP pour connaître de sa réclamation de 10 000,00 $ portant sur des frais de réinstallation et de déménagement.
3. Dommages pour préjudice psychologique
314 M. Tipple, dans le cadre de sa demande de mesures correctives, demande des dommages d’un montant de 250 000,00 $ [traduction] « […] découlant du comportement injuste, fallacieux, insouciant, capricieux, arbitraire et tyrannique de TPSGC […] ».
315 Dans Wallace, la majorité de la Cour suprême du Canada a énoncé clairement aux paragraphes 95 et 98 qu’une obligation de bonne foi et d’équité dans le mode de licenciement fait partie de la relation d’emploi :
[95] Le moment où il y a rupture de la relation entre l’employeur et l’employé est celui où l’employé est le plus vulnérable et a donc le plus besoin de protection. Pour reconnaître ce besoin, le droit devrait encourager les comportements qui réduisent au minimum le préjudice et le bouleversement (tant économique que personnel) qui résultent d’un congédiement. Dans l’arrêt Machtinger, précité, on a fait remarquer que la façon dont il peut être mis fin à un emploi revêt tout autant d’importance pour l’identité d’une personne que le travail lui-même (à la p. 1002). En poussant plus loin cet énoncé, je souligne que la perte d’emploi est toujours un événement traumatisant. Cependant, lorsque la cessation d’emploi s’accompagne d’actes de mauvaise foi dans la façon dont le renvoi est effectué, les résultats peuvent être particulièrement dévastateurs. À mon avis, pour que les employés puissent bénéficier d’une protection adéquate, les employeurs devraient assumer une obligation de bonne foi et de traitement équitable dans le mode de congédiement […]
[…]
[98] Il n’est pas possible de définir exactement l’obligation de bonne foi et de traitement équitable. Cependant, je crois tout au moins que, dans le cadre d’un congédiement, les employeurs doivent être francs, raisonnables et honnêtes avec leurs employés et éviter de se comporter de façon inéquitable ou de faire preuve de mauvaise foi en étant, par exemple, menteurs, trompeurs ou trop implacables. […]
316 Dans Keays, la majorité de la Cour suprême du Canada a confirmé cette obligation de bonne foi et d’équité dans le mode de licenciement et a écrit ce qui suit aux paragraphes 58 à 60 :
[58] […] Dans l’arrêt Wallace, elle [la Cour] a statué que les employeurs ont « une obligation de bonne foi et de traitement équitable dans le mode de congédiement » (par. 95) et qu’ils devraient, dans le cadre d’une telle mesure, être « francs, raisonnables et honnêtes avec leurs employés » (par. 98). Depuis cette décision, à tout le moins, [les deux parties au contrat] s’attendent donc à ce que l’employeur agisse de bonne foi s’il congédie l’employé, faute de quoi il y aura préjudice prévisible susceptible d’indemnisation. Je le rappelle, notre Cour l’a reconnu tout autant dans l’arrêt Fidler lui-même en précisant que le principe de l’arrêt Hadley « explique […] qu’une prolongation de la période de préavis ait pu être accordée dans un cas de congédiement injustifié en droit de l’emploi » (par. 54).
[59] Pour clarifier tout à fait ma pensée, je conclus cette analyse de la jurisprudence de notre Cour en affirmant qu’il n’y a aucune raison de continuer à faire une distinction entre les « dommages-intérêts majorés proprement dits » accordés sur le fondement d’une cause d’action distincte et les dommages-intérêts accordés pour le préjudice moral infligé par le comportement de l’employeur lors du congédiement. Le préjudice causé par les circonstances du congédiement est toujours indemnisable suivant le principe de l’arrêt Hadley […] Le montant de l’indemnisation est calculé en appliquant les mêmes principes et de la même manière que pour les autres préjudices moraux. Partant, lorsque l’employé peut prouver que les circonstances du congédiement lui ont infligé un préjudice moral que les parties avaient envisagé, l’indemnisation se fera non pas par l’allongement arbitraire du préavis, mais bien par l’octroi d’une somme dont le montant reflète le préjudice réel. À titre d’exemples de comportements qui infligent un préjudice indemnisable, mentionnons l’atteinte à la réputation de l’employé découlant de déclarations faites lors du congédiement, l’inexactitude du motif invoqué ou le dessein de priver l’employé d’un droit, notamment celui à des prestations de retraite ou à la titularisation (voir les exemples donnés dans l’arrêt Wallace, par. 99-100).
[60] […] Il convient de signaler l’importance de préserver la nature fondamentale des dommages-intérêts liés aux circonstances du congédiement, c’est-à-dire que la somme accordée pour le préjudice psychologique doit toujours viser l’indemnisation […]
317 Comme je l’ai déjà établi, en l’espèce, le défendeur a faussement représenté la raison pour laquelle il a mis fin à l’emploi de M. Tipple. La preuve révèle clairement que M. Tipple n’a pas été mis en disponibilité en raison d’un manque de travail ou de la suppression d’une fonction, mais plutôt que son licenciement a été dissimulé en invoquant de façon factice la LEFP et qu’il s’agissait d’un subterfuge ou d’un camouflage.
318 M. Marshall a témoigné que M. Tipple était [traduction] « un de ses hommes », un excellent fonctionnaire apprécié. Quand M. Marshall a recruté M. Tipple pour une période de trois ans, il a incité M. Tipple à croire que l’initiative Les prochaines étapes durerait entre cinq et sept ans. M. Tipple a réinstallé sa famille à Ottawa en mars 2006 en se fondant sur ses représentations.
319 En mai 2006, M. Marshall a approuvé le voyage d’affaires au Royaume-Uni de M. Tipple et en juin 2006, il a autorisé le paiement de ses frais d’adhésion au National Club de Toronto. Le 27 juin 2006, M. Marshall a signé l’évaluation « a excédé les attentes » de M. Tipple dans son accord sur le rendement, et M. Tipple a reçu un boni de rendement de 15 % à la suite de son évaluation. À ce moment-là, M. Tipple n’avait aucune indication de son licenciement éventuel, quoique M. Marshall avait censément réfléchi à cette possibilité.
320 En juillet 2006, M. Marshall avait bien dit à M. Tipple de ne pas s’en faire au sujet de la couverture médiatique du voyage au Royaume-Uni. Du 12 au 17 juillet 2006, M. Marshall a rencontré M. Tipple à plusieurs reprises et encore une fois, il ne lui a donné aucune indication qu’il envisageait de le licencier ou qu’il avait approuvé l’envoi de lettres d’excuses à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni.
321 Le 25 août 2006, M. Marshall a rencontré M. Minto et a été informé que M. Tipple avait fait bon usage de son temps au Royaume-Uni. M. Marshall n’a jamais partagé les résultats du rapport Minto avec M. Tipple et, encore une fois, ne lui a donné aucune indication qu’il le licencierait.
322 Le 31 août 2006, M. Tipple a reçu sa lettre de licenciement. M. Marshall l’a informé qu’il n’y avait pas de discussion possible parce que sa décision était définitive et que M. Tipple devait quitter les lieux sur-le-champ.
323 Comme la preuve l’indique, M. Marshall a agi de manière fallacieuse et cavalière en licenciant M. Tipple. La preuve révèle que M. Marshall avait faussement incité M. Tipple à se sentir en sécurité. Je juge que M. Marshall s’est comporté de façon injuste ou a fait preuve de mauvaise foi en mentant et en trompant M. Tipple et en se montrant indument insensible à son égard. On pourrait même se demander comment M. Tipple aurait été traité si M. Marshall ne l’avait pas considéré comme [traduction] l’« un de ses hommes ».
324 De plus, le 1er septembre 2006, Mme Lorenzato a retiré à M. Tipple tous les biens de TPSGC qui étaient en sa possession et l’a autorisé à enlever ses effets personnels de son bureau. M. Tipple a déclaré que sa mise en disponibilité l’a laissé sous le choc et que ça ressemblait davantage à un congédiement qu’à une mise en disponibilité.
325 Dans ces circonstances, je conclus sans aucune hésitation que le défendeur n’a été ni franc, ni raisonnable et ni honnête avec M. Tipple dans sa façon de mettre fin à son emploi et qu’il a manqué à son obligation de bonne foi et d’équité à cette occasion.
326 M. Tipple a déclaré que son licenciement illégal a été source de grand stress et qu’il a affecté sa santé physique et mentale de même que celle de sa famille. M. Tipple a expliqué qu’à cause de son licenciement illégal, il a subi des épisodes de perte de confiance, de préjudice moral, de manque d’estime de soi, d’humiliation, de tension, d’angoisse et des sentiments de trahison. M. Tipple a déclaré que cette épreuve s’est révélée très émotive et traumatisante et que sa santé mentale et physique en a été affectée.
327 Je suis convaincu que M. Tipple a satisfait au critère énoncé dans Keays et que le manquement du défendeur à son obligation de bonne foi et d’équité quant au mode de licenciement lui a causé un préjudice psychologique que les parties avaient envisagé. En conséquence, je conclus que M. Tipple a droit à des dommages pour préjudice psychologique.
328 Pour établir le montant du dédommagement à adjuger, je dois tenir compte du poste de M. Tipple dans la collectivité des cadres de direction. Il est vrai que M. Tipple n’a pas produit de preuve médicale d’un état particulier ou d’un traitement administré à la suite de son licenciement. Toutefois, je conviens que si M. Tipple avait présenté une telle preuve, elle aurait probablement affecté sa capacité de vendre avec succès ses compétences comme cadre de direction à des employeurs et des relations d’affaires possibles. Dans de telles circonstances, et en l’absence d’une preuve particulière qui justifierait un plus gros dédommagement, je conclus qu’un montant de 125 000,00 $ dédommage raisonnablement M. Tipple pour la perte de dignité, le préjudice moral et l’humiliation qui ont résulté du mode de son licenciement. En conséquence, je conclus que M. Tipple a droit à des dommages pour préjudice psychologique d’un montant de 125 000,00 $. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont déjà été formulés dans le cas des dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux, je conclus que M. Tipple a droit à des intérêts sur les dommages pour préjudice psychologique au taux des obligations d’épargne du Canada qui s’appliquerait chaque année du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008.
329 Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2006 est de 2,75 % par année, ce qui représente des intérêts de 3 437,50 $ sur les dommages pour préjudice psychologique pour la période du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2007. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2007 est de 3,10 % par année, ce qui représente des intérêts de 3 981,56 $ pour la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2008 est de 2,45 % par année, ce qui représente des intérêts de 53,33 $ pour la période du 1er au 6 octobre 2008. Je conclus donc que M. Tipple a droit à des intérêts de 7 472,39 $ sur les dommages pour préjudice psychologique.
4. Dommages pour perte de réputation
330 M. Tipple, dans sa demande de mesure corrective, demande des dommages d’un montant de 250 000,00 $ pour perte de réputation.
331 Pour évaluer la demande de M. Tipple, je dois garder à l’esprit que sa réputation a pu être affectée non seulement par la façon dont TPSGC a géré la situation, mais également par des commentaires formulés à la Chambre des communes par le secrétaire parlementaire du ministre ainsi que dans les médias. En conséquence, mon analyse se concentrera seulement sur la façon dont TPSGC a géré la situation.
332 Le 12 juillet 2006, M. Tipple a informé M. Marshall qu’il n’a manqué ni annulé aucune des réunions sur les biens immobiliers qui étaient prévues pendant qu’il était au Royaume-Uni. Malgré ce fait, le 17 juillet 2006, Mme Aloïsi, au nom de M. Marshall, a envoyé des lettres d’excuses à M. Saint-Jacques et aux organismes du Royaume-Uni qui prenaient part aux réunions que M. Tipple avait censément manquées. La lettre transmise au NAO s’excusait expressément du comportement de M. Tipple. Ultérieurement, les médias ont demandé des copies de ces lettres.
333 À un moment donné entre le 2 août et le 9 août 2006, M. Leblanc a obtenu une copie du rapport de voyage au Royaume-Uni de M. Tipple. Ce n’est pas la première fois qu’un document interne préparé par M. Tipple aboutit de façon douteuse entre les mains de représentants des médias.
334 Le 9 août 2006, M. Tipple a appris que M. Marshall avait envoyé des lettres d’excuses et que M. Leblanc avait obtenu une copie de son rapport de voyage au Royaume-Uni. Le même jour, M. Baril a demandé à M. Tipple de commenter une version provisoire des messages clés qu’il avait préparée en vue d’une entrevue sur le voyage au Royaume-Uni qui avait été demandée par M. Leblanc. M. Tipple a fait part de ses commentaires, a informé M. Baril qu’il n’avait manqué aucune des réunions prévues et lui a demandé de trouver de quelle manière M. Leblanc avait obtenu une copie de son rapport de voyage. M. Baril a accepté et a avisé M. Tipple qu’il lui reviendrait. Il ne l’a pas fait. Plus tard, le même jour, M. Anderson a répondu qu’il fournirait à M. Tipple des copies des échanges de courriels avec M. Leblanc et des rapports diffusés dans les médias (un synopsis des conversations avec M. Leblanc). M. Tipple ne les a pas reçus. M. Tipple a demandé à M. Baril s’il pouvait assister à l’entrevue avec M. Leblanc; cependant, M. Loiselle a refusé.
335 Le 10 août 2006, M. Tipple a demandé que la communication clandestine de son rapport de voyage au Royaume-Uni aux médias fasse l’objet d’une enquête de TPSGC. Ultérieurement, le rapport Desmarais a tiré la conclusion suivante :
En résumé, Mme Thorsteinson est la seule fonctionnaire de TPSGC identifiée pendant l’enquête comme ayant fourni une copie du rapport de voyage à Catherine Dickson, qui ne travaille pas au ministère. Catherine Dickson […] [a] reconn[u] avoir été en communication avec le journaliste Daniel Leblanc. La preuve n’a pas établi de lien direct entre Mme Thorsteinson et la remise du rapport de voyage au journaliste; cependant, elle a fourni une copie du document à Mme Dickson […]
336 Le 15 août 2006, M. Leblanc a contacté l’adjoint de M. Tipple. M. Tipple a demandé à M. Baril s’il pouvait parler à M. Leblanc. Il a été informé que tous les appels des journalistes devaient passer par la Direction générale des relations avec les médias de TPSGC. M. Tipple a demandé à M. Baril le plan médias, qu’il a dit avoir en sa possession. Toutefois, M. Trépanier a donné instruction à M. Anderson de ne pas répondre à la demande de M. Tipple. M. Tipple a également demandé à M. Baril s’il pouvait rencontrer le ministre pour expliquer sa version des faits. Il a encore obtenu une réponse négative.
337 Le 16 août 2006, M. Tipple a envoyé un courriel à M. Marshall, dans lequel il mentionnait que sa réputation a été ternie.
338 Le 17 août 2006, M. Tipple a envoyé des courriels à MM. Trépanier et Loiselle et à Mme Aloïsi pour demander de nouveau le plan médias. Il ne l’a pas obtenu. Plus tard le même jour, M. Tipple a demandé une réunion avec la Direction générale des communications pour élaborer une approche proactive afin de protéger sa réputation. M. Trépanier a répondu que M. Tipple avait approuvé les infocapsules et qu’à ce titre, TPSGC avait transmis sa réponse à M. Leblanc en termes clairs. M. Trépanier a également informé M. Tipple que l’article de journal avait soulevé des questions s’appliquant de manière pertinente au gouvernement du Canada, que le ministre était responsable des gestes de TPSGC et que le ministre avait la responsabilité finale en matière de communications. M. Trépanier a également déclaré que la stratégie de communications retenue constituait la meilleure option pour communiquer la position du gouvernement du Canada et qu’au fur et à mesure de l’évolution de la situation, l’approche adoptée serait constamment réévaluée. Il a informé M. Tipple qu’il serait tenu au courant des développements. M. Tipple n’a été informé d’aucune réévaluation de la stratégie ni de développements.
339 M. Tipple a déclaré qu’il se sentait démuni de ne pas avoir été autorisé de se défendre lui-même, de n’avoir jamais reçu le plan médias, les rapports des médias, les échanges de courriels ou la stratégie de communications, et de ne pas avoir été tenu informé. En outre, il a déclaré que, bien qu’il a approuvé les infocapsules initiales, elles portaient sur la demande de renseignements initiale présentée par M. Leblanc. Toutefois, de nombreux articles de journaux qui ont ensuite été publiés comportaient de nouvelles allégations qui ternissaient sa réputation, et il n’était pas protégé par TPSGC. M. Tipple a déclaré que les commentaires faits par M. Baril aux médias après la parution de l’article du 15 août 2006 dans The Globe and Mail étaient trompeurs et ne précisaient pas qu’il n’avait annulé aucune des réunions prévues au Royaume-Uni.
340 Le 22 août 2006, M. Marshall a rencontré M. Minto et lui a donné instruction de faire enquête sur le voyage au Royaume-Uni. Le 25 août 2006, M. Minto a informé M. Marshall que M. Tipple avait fait un usage productif de son temps. Comme le faisait valoir l’avocat du défendeur, le rapport Minto a blanchi M. Tipple de tout acte répréhensible.
341 Le 18 septembre 2006, Mme Lorenzato a préparé la réponse proposée et le document d’information pour le ministre, et M. Trépanier les a approuvés. Ces documents ont été utilisés par le secrétaire parlementaire du ministre pour sa réponse à Mme Nash au cours de la période de questions à la Chambre des communes le 9 novembre 2006, et sa réponse se lit comme suit : [traduction] « […] le Haut-commissariat du Canada à Londres nous a informé que trois des réunions ont été manquées. Des lettres d’excuses ont été envoyées aux responsables du Royaume-Uni […] » Le secrétaire parlementaire du ministre n’a pas reçu de réponse proposée ni de document d’information propres à M. Tipple. Si cela avait été le cas, sa réponse malheureuse à la question de Mme Nash aurait été exacte, du moins le souhaitons-nous. Le rapport Minto a établi que M. Tipple a été blanchi de tout acte répréhensible et qu’il avait assisté à toutes les réunions concernant son portefeuille pendant qu’il était au Royaume-Uni.
342 Dans les circonstances de la présente affaire, je conclus qu’une fois que TPSGC a dit à M. Tipple qu’il s’occupait des communications externes, et en particulier une fois que M. Tipple a fait part de ses préoccupations sur sa réputation ternie et qu’il a reçu la directive de ne pas s’adresser aux médias, le défendeur était tenu de protéger la réputation de M. Tipple.
343 M. Marshall a déclaré que TPSGC avait comme politique de ne pas se livrer à une guerre de mots avec les médias au sujet d’un événement. En outre, si l’événement rapporté dans les médias avait une certaine importance, le cabinet du ministre élaborait la stratégie à l’égard des médias et la stratégie de communications. Je conviens avec M. Marshall que les médias font rapport sur des événements d’une manière qui, à leur avis, intéressera le public. Toutefois, il incombait à TPSGC non seulement de protéger ses propres intérêts et sa réputation, mais également les intérêts et la réputation de M. Tipple. Un employeur qui décide de fournir de l’information aux médias, dans des circonstances telles que la réputation de l’un de ses employés est en jeu, est tenu de transmettre de l’information qui est à la fois pertinente et exacte. Le défendeur était au moins tenu de veiller à ce que M. Tipple soit informé de la stratégie de communications retenue.
344 On pourrait affirmer sans risquer de se tromper que le défendeur était en mode de limitation des dégâts. TPSGC avait fait récemment l’objet d’une forte couverture médiatique sur le scandale des commandites, et M. Marshall devait mener TPSGC et ses employés à se sortir de ce scandale.
345 On ne m’a fourni aucune preuve qui établissait que le défendeur a déjà eu un plan médias ou une stratégie de communications. Je n’ai constaté l’existence d’aucune preuve selon laquelle le défendeur a communiqué le rapport Minto aux médias ou a inclus les conclusions du rapport dans la réponse proposée ou dans les documents d’information utilisés par le secrétaire parlementaire du ministre. M. Tipple a accepté la première version des infocapsules; toutefois, au fur et à mesure que la situation prenait de l’ampleur et que la réputation de M. Tipple était ternie, aucune stratégie révisée n’apparaissait. M. Tipple avait droit à la protection de sa réputation par le défendeur. Ce droit ne lui a pas été reconnu.
346 Je crois que TPSGC savait que le fait de pas fournir de renseignements pertinents et exacts aux médias ferait en sorte que la réputation de M. Tipple ne serait pas protégée. M. Marshall a déclaré que Mme Aloïsi l’avait informé que M. Tipple estimait sa réputation ternie et qu’il s’attendait à ce que TPSGC le protège. De plus, le 16 août 2006, M. Tipple a informé directement M. Marshall par courriel que sa réputation était ternie. En outre, M. Marshall a reconnu dans son témoignage que la transmission clandestine du rapport de voyage au Royaume-Uni a pu nuire à la réputation de M. Tipple et que ces dommages auraient pu être atténués en informant M. Leblanc que M. Tipple a assisté à toutes les réunions qui concernaient son portefeuille.
347 La stratégie de communications utilisée par le défendeur était intéressée et comportait un seul objectif précis : protéger ses propres intérêts en veillant à ce qu’aucun scandale n’embarrasse le défendeur ou le gouvernement du Canada. Malheureusement, cette démarche a été faite aux dépens de la réputation de M. Tipple. La réputation sans tache acquise par M. Tipple pendant 23 ans comme cadre de direction a été ternie en 6 semaines. Il peut maintenant trouver un certain réconfort dans cette décision qui reconnaît que sa réputation a été sacrifiée pour préserver celle de TPSGC.
348 L’aspect le plus troublant de la conduite du défendeur est que malgré les demandes faites par M. Tipple à TPSGC de protéger sa réputation, TPSGC ne l’a pas fait quand le premier article a été publié par The Globe and Mail ni n’a, par la suite, fait quoi que ce soit pour atténuer les dommages causés à la réputation de M. Tipple. De fait, M. Marshall a empiré la situation en mettant fin illégalement à l’emploi de M. Tipple dans une atmosphère de scandale. Je conclus donc que le défendeur n’a pas respecté son obligation de protéger la réputation de M. Tipple.
349 Des dommages peuvent être adjugés si une partie subit une perte par suite des gestes d’autrui. Pour évaluer le montant des dommages auxquels M. Tipple a droit pour perte de réputation, je dois, encore une fois, tenir compte de son poste au sein de la communauté des cadres de direction et reconnaître l’impact des dommages à sa réputation sur sa capacité de vendre avec succès ses compétences comme cadre de direction à des employeurs éventuels ainsi qu’à des relations d’affaires. Dans les circonstances de la présente affaire, je n’ai aucune réserve à accepter que M. Tipple a droit à sa réclamation de 250 000,00 $. Pour les mêmes motifs que ceux que j’ai déjà exprimés dans le cas des dommages pour perte de salaire, prime de rendement et avantages sociaux, je conclus que M. Tipple a droit à des intérêts sur les dommages pour perte de réputation au taux des obligations d’épargne du Canada qui s’appliquerait chaque année, du 1er octobre 2006 au 6 octobre 2008.
350 Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2006 est de 2,75 % par année, ce qui représente des intérêts de 6 875,00 $ sur les dommages pour perte de réputation pour la période du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2007. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2007 est de 3,10 % par année, ce qui représente des intérêts de 7 963,13 $ pour la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008. Le taux affiché des obligations d’épargne du Canada applicable en date du 1er octobre 2008 est de 2,45 % par année, ce qui représente des intérêts de 106,66 $ pour la période du 1er octobre au 6 octobre 2008. Je conclus donc que M. Tipple a droit à des intérêts de 14 944,79 $ sur les dommages pour perte de réputation.
5. Dommages pour entrave à la procédure
351 M. Tipple a également demandé d’être indemnisé complètement pour ses frais juridiques dans le cadre de son grief jusqu’à l’arbitrage inclusivement.
352 Dans Canada (Procureur général) c. Mowat, 2009 CAF 309, la Cour d’appel fédérale a statué que le Tribunal canadien des droits de la personne n’avait pas le pouvoir d’adjuger des dépens en vertu des dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Aux paragraphes 80, 81, 94 et 95, la Cour a écrit ce qui suit :
[…]
[80] Dans le contexte particulier des lois sur les droits de la personne, la question des dépens a été abordée dans Ontario (Régie des alcools) c. Ontario (Commission ontarienne des droits de la personne) (1988), 25 O.A.C. 161, 27 O.A.C. 246 (addendum) (C. Div.). La cour a conclu comme suit :
[TRADUCTION] Aucun tribunal, ni aucun organisme constitué en vertu d’une loi n’a compétence inhérente pour accorder des dépens […] La Commission d’enquête a été créée par le Code des droits de la personne de l’Ontario [référence omise]. En tant qu’organisme constitué en vertu d’une loi, la Commission se voit conférer le pouvoir d’accorder des dépens seulement s’il y a dans le Code ou dans toute autre loi une disposition le prévoyant expressément […] Le pouvoir accordé à la Commission d’enquête en vertu du paragraphe 40(1) d’ordonner « le remboursement de toute somme, y compris d’accorder une compensation financière » n’est pas prévu par une disposition expresse relative aux dépens accordés au plaignant en vertu du Code. La règle d’interprétation libérale pour l’application du Code visant, dans la mesure du possible, à remédier aux conséquences de la discrimination et à protéger contre toute forme de discrimination ne s’applique pas aux questions de procédure ni à la question des dépens.
[81] Dans le même ordre d’idées, dans Moncton c. Buggie and N.B. Human Rights Commission (1985), 21 D.L.R. (4th) 266; 65 N.B.R. (2d) 210 (C.A.) (Buggie), autorisation d’interjeter appel refusée, [1986] S.C.C.A. No. 21, la Cour d’appel du Nouveau- Brunswick a conclu que, même si l’alinéa 21(1)c) de la loi du Nouveau-Brunswick accordait à la Commission le pouvoir de [TRADUCTION] « rendre toute ordonnance jugée nécessaire pour donner effet à la recommandation de la Commission », l’exercice de ce pouvoir ne comprend pas le pouvoir d’accorder des dépens contre l’une des parties.
[…]
[94] Je souscris également à l’observation du juge Heald dans NEB Reference selon laquelle il existe un motif additionnel de ne pas invoquer la théorie de la déduction nécessaire. Au paragraphe 14, il a estimé que le Parlement du Canada et les législatures provinciales ont établi dans diverses lois leur capacité d’accorder explicitement aux tribunaux un pouvoir général d’adjuger des dépens. [TRADUCTION] « J’estime qu’il est possible d’en inférer qu’en l’absence d’une disposition législative expresse accordant le pouvoir d’adjuger des dépens, un tel pouvoir ne devrait pas être déduit. » Il convient de souligner qu’il existe une disposition expresse concernant les frais des témoins (par. 50(6)) et les intérêts accordés (par. 53(4)).
[95] Je reviens au point de départ. La recherche vise à déterminer si le législateur voulait investir le Tribunal du pouvoir d’accorder des dépens au plaignant ayant gain de cause. Pour les motifs exposés ci-dessus, je conclus que le législateur n’avait pas l’intention d’investir, et n’a pas investi, le Tribunal du pouvoir d’accorder des dépens. Conclure que le Tribunal peut accorder des dépens au titre des « dépenses entraînées par l’acte » aurait pour effet d’introduire indirectement dans la Loi un pouvoir qui ne correspondait pas à l’intention du législateur.
[…]
353 La LRTFP ne renferme pas de disposition expresse qui autorise un arbitre de grief à adjuger des dépens à un fonctionnaire s’estimant lésé dont le grief est accueilli. Bien que le paragraphe 228(2) de la LRTFP donne à un arbitre de grief de vastes pouvoirs de réparation qui justifient de rendre l’ordonnance qu’il estime indiquée dans les circonstances, la Cour d’appel fédérale nous rappelle dans Mowat que le libellé d’une disposition similaire dans la Loi sur les droits de la personne du Nouveau-Brunswick, L.R.N.-B. 1973, c. H-11, ne conférait pas le pouvoir d’accorder des dépens : Moncton (City) c. Buggie (1985), 21 D.L.R. (4e) 266 (C.A. du N.-B.). Cela dit, je suis d’avis qu’un arbitre de grief a le pouvoir de dédommager une partie pour la perte qu’elle a subie en poursuivant un grief si la perte découle des gestes de l’autre partie.
354 Dans la présente affaire, cinq ordonnances de divulgation ont été rendues en application du pouvoir conféré à un arbitre de grief par l’alinéa 226(1)e) de la LRTFP, qui prévoit ce qui suit :
226.(1) Pour instruire toute affaire dont il est saisi, l’arbitre de grief peut,
[…]
e) obliger, en tout état de cause, toute personne à produire les documents ou pièces qui peuvent être liés à toute question dont elle est saisie. […]
355 Le défaut constant du défendeur de divulguer complètement les documents pertinents, en temps opportun et conformément aux ordonnances de divulgation, a prolongé considérablement et indûment l’audience, a entraîné de nombreuses lettres de l’avocat de M. Tipple demandant que le défendeur se conforme aux ordonnances de divulgation, et a entraîné la tenue de nombreuses conférences de gestion des cas. J’ai la certitude que M. Tipple a engagé des frais juridiques supplémentaires qui étaient attribuables directement à l’inobservation, par le défendeur, des ordonnances de divulgation.
356 Compte tenu de l’ensemble de la preuve qui m’a été soumise, je conclus que, selon la prépondérance des probabilités, M. Tipple a engagé des frais juridiques supplémentaires occasionnés par le défaut incessant du défendeur de se conformer aux ordonnances de divulgation rendues dans la présente affaire et que le défendeur est responsable de ces frais supplémentaires. Pour déterminer la valeur des dommages pour entrave à la procédure, l’avocat de M. Tipple transmettra à l’avocat du défendeur, d’ici le 30 juillet 2010, un énoncé détaillé de toutes les mesures raisonnables prises au nom de M. Tipple en raison de l’inobservation continue par le défendeur des ordonnances de divulgation rendues dans la présente affaire. Les parties se rencontreront ensuite pour convenir de la valeur des dommages pour entrave à la procédure dus par le défendeur à M. Tipple. Je demeurerai saisi de cette question si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur la valeur des dommages pour entrave à la procédure. L’audience reprendra seulement à cette fin le 5 octobre 2010 au besoin.
357 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :
VI. Ordonnance
358 L’objection à la compétence d’un arbitre de grief d’entendre ce grief est rejetée, et je déclare que le grief de M. Tipple a été renvoyé à juste titre à l’arbitrage.
359 Je déclare en outre que le licenciement de M. Tipple n’a pas été fait aux termes de la LEFP, mais qu’il constituait plutôt un subterfuge ou un camouflage et que l’administrateur général n’était pas justifié de licencier M. Tipple.
360 Je déclare en outre que je n’ai pas compétence, en vertu de la LRTFP, pour connaître de la demande de remboursement de 10 000,00 $ de M. Tipple au titre de ses frais de réinstallation et de déménagement de Toronto à Ottawa.
361 J’ordonne à l’administrateur général de verser à M. Tipple les montants suivants, d’ici le 16 août 2010 :
• Dommages pour perte de salaire | 688 751,08 $ |
• Dommages pour perte de boni de rendement | 109 038,46 $ |
• Dommages pour perte d’avantages sociaux | 109 038,46 $ |
• Intérêt sur les dommages pour perte de salaire, de boni de rendement et d’avantages sociaux | 54 209,40 $ |
• Dommages pour préjudice psychologique | 125 000,00 $ |
• Intérêt sur les dommages pour préjudice psychologique | 7472,39 $ |
• Dommages pour perte de réputation | 250 000,00 $ |
• Intérêt sur les dommages pour perte de réputation | 14 944,79 $ |
TOTAL | 1 358 454,58 $ |
362 Je déclare en outre que M. Tipple a engagé des frais juridiques supplémentaires occasionnés par le défaut constant de l’administrateur général de se conformer aux ordonnances de divulgation rendues dans la présente affaire et que l’administrateur général est responsable de ces frais supplémentaires. Pour déterminer la valeur des dommages pour entrave à la procédure, j’ordonne à l’avocat de M. Tipple de fournir à l’avocat de l’administrateur général, d’ici le 30 juillet 2010, un énoncé détaillé de toutes les mesures raisonnables prises au nom de M. Tipple en raison de l’inobservation continue par l’administrateur général des ordonnances de divulgation rendues dans la présente affaire. J’ordonne également que les parties se rencontrent pour convenir de la valeur des dommages pour entrave à la procédure dus par l’administrateur général à M. Tipple. Je demeure saisi de cette question si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur la valeur des dommages pour entrave à la procédure. L’audience reprendra seulement à cette fin le 5 octobre 2010 au besoin.
Le 16 juillet 2010.
Traduction de la CRTFP
D.R. Quigley,
arbitre de grief