Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La fonctionnaire s’estimant lésée a été renvoyée en cours de stage - son agent négociateur a renvoyé son grief à l’arbitrage, invoquant un licenciement pour motif non disciplinaire - l’administrateur général a contesté la compétence d’un arbitre de grief pour instruire le grief - la fonctionnaire s’estimant lésée n’a pas répondu à l’objection de l’administrateur général - l’arbitre de grief a décidé de trancher l’affaire sans tenir d’audience - l’arbitre de grief a conclu que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) ne l’habilite pas à entendre un grief individuel portant sur un licenciement aux termes de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique - elle a aussi conclu qu’en raison de l’omission de la fonctionnaire s’estimant lésée de répondre à l’objection de l’administrateur général, elle n’avait devant elle aucune allégation de fait qui, si elle était établie, lui attribuerait la compétence d’entendre le grief sous le régime de la LRTFP. Objection accueillie. Dossier clos.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2010-06-10
  • Dossier:  566-02-3028
  • Référence:  2010 CRTFP 76

Devant un arbitre de grief


ENTRE

ÉMILIE MAÏTÉE CARBRAY

fonctionnaire s'estimant lésée

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Carbray c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, arbitre de grief

Pour la fonctionnaire s'estimant lésée:
elle-même

Pour le défendeur:
Stéphane Ferland, Secrétariat du Conseil du Trésor

Décision rendue sur la base des documents
déposés entre le 4 août 2009 et le 20 mai 2010.

Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1 La fonctionnaire s’estimant lésée, Émilie Maïtée Carbray (la « fonctionnaire »), était une agente correctionnelle, au niveau CX-1, au Centre régional de réception à Ste-Anne-des-Plaines. La fonctionnaire a été embauchée le 19 juillet 2007 pour une période indéterminée et était régie par le Règlement sur les conditions d’emploi dans la fonction publique. La fonctionnaire était assujettie à une période de stage d’une durée de 12 mois. Comme la fonctionnaire a été en congé non payé entre le 23 février et le 25 décembre 2008, son stage a été suspendu pendant son absence et a recommencé lors de son retour au travail. Le 13 mars 2009, l’administrateur général (l’ « employeur ») a licencié la fonctionnaire au cours de sa période de stage selon les dispositions de l’article 62 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP).

2 Les motifs du licenciement sont détaillés dans une lettre de trois pages en date du 13 mars 2009, et reposent sur les agissements suivants de la fonctionnaire :

  • ne pas avoir informé l’employeur d’avoir enfreint une loi dans un autre pays;
  • être entrée par effraction dans le véhicule d’une employée;
  • avoir eu une altercation physique avec un autre employé hors des lieux du travail;
  • avoir atteint à la réputation de certains membres du personnel;
  • de façon générale, avoir manqué de jugement, de discernement et d’intégrité.

3 Le 23 mars 2009, la fonctionnaire a déposé un grief, contresigné par l’agent négociateur, qui se lit comme suit :

Je conteste mon congédiement du Centre Régionale de Réception en date du le 13 mars 2009. Ce congédiement est injustifié et arbitraire.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

Comme redressement, la fonctionnaire demande ce qui suit :

La réintégration comme agente correctionnelle et la récupération de tout avantage perdu depuis le renvoi effectif le 13 mars 2009.

4 L’employeur n’a répondu au grief qu’au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs prévue à la convention collective, le 11 mai 2009. Le grief a été renvoyé à l’arbitrage par l’agent négociateur le 4 août 2009 et reçu par la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission »), le 6 août 2009.

Objection de l’employeur

5 Le 1er avril 2010, l’employeur a soulevé une objection à la compétence d’un arbitre de grief pour entendre le renvoi à l’arbitrage du grief de la fonctionnaire au motif qu’il s’agit d’un licenciement pendant une période de stage en vertu de l’article 62 de la LEFP. Au soutien de son objection, l’employeur a cité les décisions suivantes : Canada (Procureur général) c. Leonarduzzi, 2001 CFPI 529; Archambault c. Canada (Agence des douanes et du revenu), 2005 CF 183; Melanson c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada), 2009 CRTFP 33; Maqsood c. Conseil du Trésor (ministère de l’Industrie), 2009 CRTFP 175; Currie c. Administrateur général (ministère des Pêches et des Océans), 2010 CRTFP 10.

6 Le greffe de la Commission a écrit à la représentante de la fonctionnaire le 7 avril 2010, lui demandant de fournir sa position sur la question de compétence au plus tard le 21 avril 2010. Cette demande est restée sans réponse. Le 23 avril 2010, le greffe a envoyé un rappel par courriel. Ce rappel est aussi demeuré sans réponse.

7 Le 4 mai 2010, cette affaire m’a été remise pour évaluation. Compte tenu du sérieux de l’objection de l’employeur, j’ai décidé d’exercer mon pouvoir discrétionnaire de trancher cette affaire sans tenir d’audience, tel que le prévoit l’article 227 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). Le 5 mai 2010, le greffe a écrit aux parties, les informant que l’objection de l’employeur serait traitée sur la base de l’information au dossier.

8 Dans un courriel en date du 20 mai 2010, l’agent négociateur a indiqué qu’il retirait sa représentation de la fonctionnaire dans ce grief.

Motifs

9 Le grief de la fonctionnaire allègue un « congédiement » injustifié et arbitraire.  « Injustifié » veut dire qui n’est pas équitable ou qui n’est pas conforme à la justice.     « Arbitraire » veut dire qui dépend de la seule bonne volonté plutôt que d’uniquement la vérité. Dans les circonstances de cette affaire, l’allégation d’un congédiement injustifié et arbitraire ne correspond pas à un licenciement pour un motif disciplinaire.

10 Les faits mis de l’avant par l’employeur indiquent que la fonctionnaire était en période de stage lorsqu’elle a été licenciée. La lettre de licenciement, ainsi que la décision de l’employeur au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, indiquent clairement les motifs qui ont mené au licenciement de la fonctionnaire pendant sa période de stage, ainsi que les admissions de la fonctionnaire quant aux trois premiers motifs du licenciement (voir le paragraphe 2). Tous les motifs invoqués par l’employeur sont liés à l’emploi. Il n’y a aucune indication au dossier que l’administrateur général a pris des mesures disciplinaires à l’encontre de la fonctionnaire, même s’il dispose de ce pouvoir.

11 L’alinéa 211a) de la LRTFP crée un régime d’exception à l’égard d’un licenciement en période de stage qui exclut la compétence de l’arbitre de grief :

211. L’article 209 n’a pas pour effet de permettre le renvoi à l’arbitrage d’un grief individuel portant sur :

a) soit tout licenciement prévu sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique;

12 En l’absence d’une réponse de la fonctionnaire niant ou contestant les faits mis de l’avant par l’employeur ou encore expliquant en quoi le licenciement n’est pas conforme au régime de la LEFP, je n’ai devant moi aucune allégation de faits qui, même s’ils étaient prouvés, me permettrait de prendre compétence en vertu de l’alinéa 209(1)c) de la LRTFP pour entendre un grief portant sur un licenciement.

13 Ma seule discrétion est à savoir s’il s’agit effectivement d’un licenciement en période de stage. Je n’ai pas à décider si l’employeur était justifié ou non.

14 En l’espèce, je suis d’avis que dans les circonstances de cette affaire, la fonctionnaire a effectivement été licenciée en période de stage. Par conséquent, il n’y a pas lieu de tenir une audience pour décider du bien-fondé du grief.

15 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

16 Je déclare qu’un arbitre de grief n’a pas compétence pour entendre ce grief.

17 J’ordonne la fermeture du dossier.

Le 10 juin 2010.

Michele A. Pineau,
arbitre de grief

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