Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le plaignant a présenté une plainte fondée sur les alinéas 190(1)b), d) et g) de la Loi à l’encontre d’une de ses supérieures hiérarchiques - la Commission a tranché d’emblée que le plaignant ne pouvait fonder sa plainte sur les alinéas 190(1)b) et d) parce que ceux-ci portent sur l’obligation de négocier collectivement de bonne foi et que seules les parties à la négociation collective (un agent négociateur ou un employeur) peuvent présenter une plainte à cet égard - la Commission a aussi conclu que, des pratiques déloyales de travail visées à l’alinéa 190(1)g), seules celles prévues à l’article 186 (mesure de représailles, distinction illicite ou influence indue) ou 189 (influence indue) pouvaient être alléguées par le plaignant - le plaignant a allégué que sa supérieure l’avait traité de façon inéquitable dans le cadre d’une enquête disciplinaire qu’elle a menée à son égard - la Commission a conclu que les faits reprochés à la supérieure ne pouvaient appuyer une conclusion qu’elle avait enfreint la Loi. Plainte rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2011-09-02
  • Dossier:  561-02-521
  • Référence:  2011 CRTFP 109

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

STÉPHANE KÉROUACK

plaignant

et

SYLVIE GRAVEL

défenderesse

Répertorié
Kérouack c. Gravel

Affaire concernant une plainte visée à l'article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Renaud Paquet, vice-président

Pour le plaignant:
Lui-même

Pour la défenderesse:
Maureen Harris, Secrétariat du Conseil du Trésor

Décision rendue sur la base d'arguments écrits
déposés le 11 juillet et les 2 et 17 août 2011.

Plainte devant la Commission

1  Stéphane Kérouack (le « plaignant ») travaille comme mécanicien d’entretien à l’établissement de Ste-Anne-des-Plaines du Service correctionnel du Canada (le « SCC »). Le 2 juin 2011, le plaignant a déposé une plainte à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») contre Sylvie Gravel, directrice adjointe de l’établissement de Ste-Anne-des-Plaines (la « défenderesse »). Le plaignant fonde sa plainte sur les alinéas 190(1)b), d), et g), de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »).

2 Le plaignant prétend que la défenderesse a mené de mauvaise foi une enquête illégale à son sujet. Le plaignant reproche entre autres à la défenderesse de ne pas avoir suivi les procédures d’enquête en vigueur, de ne pas avoir retenu sa version des faits, d’avoir sollicité un faux témoignage et de l’avoir harcelé. Le plaignant demande qu’une enquête soit tenue sur ces pratiques, qu’un dédommagement monétaire lui soit versé et qu’il ne soit plus en contact direct ou indirect avec la défenderesse.

3 L’article 190 de la Loi, sur lequel la plainte est fondée, se lit comme suit :

190. (1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle :

a) l’employeur a contrevenu à l’article 56 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

b) l’employeur ou l’agent négociateur a contrevenu à l’article 106 (obligation de négocier de bonne foi);

c) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 107 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

d) l’employeur, l’agent négociateur ou l’administrateur général a contrevenu au paragraphe 110(3) (obligation de négocier de bonne foi);

e) l’employeur ou l’organisation syndicale a contrevenu aux articles 117 (obligation de mettre en application une convention) ou 157 (obligation de mettre en œuvre la décision arbitrale);

f) l’employeur, l’agent négociateur ou le fonctionnaire a contrevenu à l’article 132 (obligation de respecter les conditions d’emploi);

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

4 Peu de temps après avoir reçu la plainte, j’ai demandé au greffe de la Commission d’aviser le plaignant que sa plainte ne pouvait pas se fonder sur les alinéas 190(1)b), et d) de la Loi. Ces alinéas renvoient aux obligations mutuelles de bonne foi des parties impliquées dans la négociation d’une convention collective ou dans une négociation collective à deux niveaux, tel qu’il est prévu par les articles 106 et 110 de la Loi. Seules les parties à ces négociations peuvent déposer une plainte l’une contre l’autre alléguant une violation de ces dispositions de la Loi.

5 Il reste à déterminer, selon les soumissions du plaignant, si sa plainte peut être fondée sur l’alinéa 190(1)g) qui renvoie à l’article 185 de la Loi. Tel que je l’écrivais au paragraphe 10 de Paradis c. Fraser et Conseil du Trésor, 2009 CRTFP 130 :

[10] Les pratiques déloyales dont il est question à l’article 185 de la Loi visent les interventions de l’employeur dans les affaires syndicales (186(1)a)), les distinctions illicites de l’employeur à l’égard d’une organisation syndicale (186(1)b)) ou d’une personne qui y adhère, y participe ou exerce les droits que lui confère la Loi (186(2)). Les articles 187 et 188 imposent des interdictions aux organisations syndicales. Quant au paragraphe 189(1), il interdit à quiconque de menacer ou d’obliger un employé à adhérer ou à ne pas adhérer à un syndicat ou à s’abstenir d’exercer tout droit que lui accorde la partie 2 de la Loi. […]

6 Compte tenu que la plainte vise Mme Gravel, une des représentantes de l’employeur, elle doit nécessairement se fonder sur les dispositions des articles 186 ou 189 de la Loi. À ce sujet et à ma demande, le 24 juin 2011, le greffe de la Commission a écrit au plaignant pour lui demander de nous faire parvenir une soumission détaillée expliquant en quoi les gestes, actions ou décisions de la défenderesse constituaient des manquements à l’alinéa 190(1)g) de la Loi. Tel qu’il est stipulé dans le Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, le greffe de la Commission a transmis la plainte à la défenderesse et lui a demandé d’y répondre. Je n’ai pas tenu compte de cette réponse pour rédiger ma décision si ce n’est du commentaire compris plus loin au paragraphe 10.

Résumé des éléments soumis à l’appui de la plainte

7 J’ai révisé minutieusement les documents soumis par le plaignant en réponse à ma demande du 24 juin 2011. Ces documents sont les suivants : une note non datée qui renvoie à un rapport d’enquête et aux reproches formulés contre la défenderesse, un rapport d’enquête daté du 15 octobre 2009, un rapport de mesures disciplinaires daté du 5 août 2010, un grief daté du 9 août 2010, un document non daté relatif à une plainte de harcèlement contre la défenderesse, un courriel daté du 3 septembre 2009, un courriel daté du 3 novembre 2010, des extraits de la page « Facebook » du plaignant, un courriel daté du 23 septembre 2009 et une lettre du plaignant datée du 28 mars 2011. Même si les documents en question renvoient aussi à d’autres sujets, ils portent avant tout sur une enquête dirigée par la défenderesse au nom du SCC relativement à  certains gestes, actions et comportements reprochés au plaignant. Le plaignant prétend que cette enquête a été mal faite et qu’elle est illégale. Elle aurait aussi eu des conséquences dévastatrices sur sa vie personnelle et sa santé. Le plaignant blâme aussi la défenderesse de l’avoir intimidé et harcelé et de s’être comportée de façon inacceptable à son égard.

8 Le plaignant a déposé une plainte de harcèlement contre la défenderesse. Comme il n’a pas obtenu gain de cause, il a décidé de déposer la présente plainte à la Commission. Le plaignant a aussi déposé un grief à l’encontre de la mesure disciplinaire qui lui a été imposée par le SCC à la suite de l’enquête dirigée par la défenderesse.

9 La défenderesse a allégué qu’elle n’a pas agi en contravention de la Loi. Il est inutile de reporter ici ce qu’elle m’a soumis.

Motifs

10 Comme je l’ai mentionné précédemment, j’ai révisé minutieusement les documents transmis par le plaignant. Il n’a rien soumis dans ces documents qui puisse m’amener à conclure que la défenderesse a enfreint les dispositions de la Loi sur lesquelles se fonde la plainte. Qui plus est, le plaignant ne m’a pas démontré que la défenderesse a enfreint d’autres dispositions de la Loi.

11 Ce que le plaignant a démontré, c’est qu’il a été, selon lui, victime d’un traitement qu’il considère très injuste qui aurait eu un impact néfaste sur lui. À cet effet, même s’il avait raison, cela ne justifierait pas de conclure à une violation de la Loi.

12 Les sujets à l’égard desquels un employé peut déposer une plainte contre un représentant de son employeur en vertu de la Loi sont relativement limités. Le grief est plutôt le mécanisme habituel qui doit être utilisé par un employé qui veut contester des gestes, actions ou comportements de l’employeur ou de ses représentants à son égard. Comme je l’ai déjà mentionné, les pratiques déloyales dont il est question à l’article 185 de la Loi visent les interventions de l’employeur dans les affaires syndicales, les distinctions illicites de l’employeur à l’égard d’une organisation syndicale ou d’une personne qui y adhère, y participe ou exerce les droits que lui confère la Loi. Rien dans le dossier devant moi ne suggère de telles pratiques de la part de la défenderesse ni des gestes interdits par l’article 189 de la Loi, soit des menaces relatives à l’adhésion ou à la non adhésion syndicale ou à l’exercice d’un droit que lui accorde la partie 2 de la Loi.

13 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

14 La plainte est rejetée.

Le 2 septembre 2011.

Renaud Paquet,
vice-président

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