Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Santé et sécurité au travail - Refus de travailler - Gardiens de prison - Renvoi de la décision de l'agent de sécurité aux termes du paragraphe 129(5) du Code canadien du travail - les requérants étaient des agents de correction dans un établissement pénitencier à sécurité moyenne - l'employeur a donné un ordre permanent instaurant des « rondes avec cellules ouvertes » qui obligeaient les agents de correction à patrouiller les corridors pendant que les portes des cellules étaient ouvertes, ce qui permettait aux détenus d'avoir accès aux corridors - en vertu de l'ancien ordre permanent, les agents de correction effectuaient des rondes avec cellules fermées, c.-à-d. pendant que les détenus étaient enfermés dans leurs cellules - le nouvel ordre permanent réduisait également le nombre d'agents de correction (de cinq à trois) effectuant ces rondes, un agent restant à l'extérieur pendant que les deux autres patrouillaient à l'intérieur - les agents de correction effectuant la ronde à l'intérieur qui empruntaient l'escalier pour passer à un autre étage se trouvaient pendant quelques secondes hors du champ de vision de l'agent se trouvant à l'extérieur - le changement avait pour but de favoriser l'interaction entre les agents de correction et les détenus - les requérants ont refusé d'effectuer une ronde avec cellules ouvertes au motif que cela mettait leur vie en danger au sens du Code - après avoir mené une enquête relativement à chacun des refus de travailler, les agents de sécurité ont conclu qu'il n'y avait aucun danger - subséquemment, l'employeur a offert aux agents de correction effectuant une ronde avec cellules ouvertes la possibilité d'emprunter l'escalier de l'extérieur pour passer à un autre étage - à la demande des requérants, les agents de correction ont renvoyé les décisions à la Commission - le requérant Czmola était particulièrement perturbé par ce changement de politique parce qu'il se trouvait dans l'établissement en 1984 lorsqu'une émeute avait entraîné la mort de deux agents de correction - M. Czmola touche des indemnités d'accident du travail depuis qu'il a refusé de travailler parce que, selon son médecin, il souffre du syndrome de stress post-traumatisme - la Commission a conclu que les requérants croyaient de bonne foi que l'instauration de cette politique mettait réellement et de façon immédiate leur sécurité en danger - la Commission a constaté que leurs préoccupations étaient plus que purement hypothétiques vu que la perspective de violence qui existe dans un pénitencier à sécurité moyenne est une réalité de tous les jours qui nécessite une vigilance constante - toutefois, la Commission a accepté la position de l'employeur selon laquelle un élément important de la sécurité active au sein de l'établissement est l'interaction et les contacts entre les agents de correction et les détenus et que les rondes effectuées par les cellules ouvertes sont un aspect important du processus de sécurité - la Commission a conclu que les risques associés à la politique de rondes avec cellules ouvertes étaient inhérents aux fonctions des agents de correction - toutefois, Il incombe toujours à l'employeur de prendre les mesures voulues pour s'assurer que l'exécution de ces fonctions est exempte de risques inutiles - le fait de permettre que les agents de correction patrouillant la rangée empruntent les escaliers intérieurs et se trouvent ainsi momentanément hors de la vue de l'agent posté à l'extérieur constituait un risque inutile - par conséquent, en vertu du pouvoir conféré par l'alinéa 130(1)b) du Code, la Commission a ordonné à l'employeur d'aviser les agents de correction effectuant les rondes avec cellules ouvertes d'emprunter l'escalier à l'extérieur pour passer à un autre étage - la Commission n'était pas convaincue qu'un retour à l'utilisation de cinq agents de correction améliorerait la sécurité des agents de correction effectuant les rondes - la Commission a déclaré qu'il était incontestable que M. Czmola souffrait des effets psychologiques, désignés comme le syndrome du stress post-traumatique, de l'émeute de 1984 - toutefois, la Commission n'était pas convaincue que la maladie était attribuable au changement de politique concernant les rondes étant donné qu'il avait dû prendre des congés de maladie pour cause de stress professionnel à plusieurs occasions par le passé. Des instructions ont été données. Décisions citées : Holigroski (165-2-30); Stephenson et autres (165-2-83).

Contenu de la décision

Dossiers : 165-2-201 165-2-202

Code canadien du travail, Devant la Commission des relations partie II de travail dans la fonction publique ENTRE GEORGE CZMOLA ET CHARLES RODIER requérants et LE CONSEIL DU TRÉSOR (Solliciteur général - Service correctionnel Canada)

employeur AFFAIRE : Renvoi fondé sur le paragraphe 129(5) du Code canadien de travail Devant : P. Chodos, vice-président Pour les requérants : Art Curtis, Philippe Trottier, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l’employeur : David Merner, avocat Affaire entendue à Winnipeg (Manitoba), les 17 et 18 septembre 1998 Arguments écrits présentés les 9, 14 et 17 octobre 1998

DÉCISION La Commission a été saisie de la présente affaire à la suite du renvoi de la décision de deux agents de sécurité en vertu du paragraphe 129(5) de la partie II du Code canadien du travail, dont voici le libellé : 129. (5) Si l’agent de sécurité conclut à l’absence de danger, un employé ne peut se prévaloir de l’article 28 ou du présent article pour maintenir son refus d’utiliser ou de faire fonctionner la machine ou la chose en question ou de travailler dans le lieu en cause; il peut toutefois, par écrit et dans un délai de sept jours à compter de la réception de la décision, exiger que l’agent renvoie celle-ci au Conseil, auquel cas l’agent de sécurité est tenu d’obtempérer.

La compétence de la Commission à l’égard de ces questions est définie au paragraphe 130(1), qui dit : 130. (1) Le Conseil procède sans retard et de façon sommaire à l’examen des faits et des motifs de la décision dont il a été saisi en vertu du paragraphe 129(5) et peut : a) soit confirmer celle-ci; b) soit donner, en ce qui concerne la machine, la chose ou le lieu, les instructions qu’il juge indiquées parmi celles que doit ou peut donner l’agent de sécurité aux termes du paragraphe 145(2).

Les deux requérants sont des agents de correction à l’établissement de Stony Mountain, un pénitencier à sécurité moyenne situé à quelques milles au nord de Winnipeg. À l’établissement les détenus sont logés dans des unités contenant de nombreuses cellules réparties sur deux étages, chacun étant désigné comme une « rangée »; les rangées sont disposées en rayons autour d’un espace central appelé le « dôme », qui est séparé de la rangée par une porte verrouillée ou barrière. Dans l’unité les rangées supérieure et inférieure sont reliées par un escalier. Dans chaque rangée, adjacent aux cellules, se trouve un corridor; les corridors s’étendent de la porte verrouillée jusqu’au bout de la rangée, l’on trouve une horloge de pointage appelée « Deister ». Juste à l’extérieur de chaque unité il y a un autre escalier qui relie les rangées supérieure et inférieure. On peut observer chaque rangée de l’extérieur de la barrière. Lorsque les portes des cellules sont ouvertes, les détenus ont accès au corridor adjacent aux cellules; toutefois, ils ne peuvent quitter l’unité à moins que la barrière ne soit ouverte. Dans le corridor on trouve, entre autres, des tables et des chaises ainsi qu’un réfrigérateur. L’établissement est doté de nombreuses installations, dont un gymnase, divers ateliers, ainsi qu’une cuisine, une salle à Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 2 manger et des salles de classe. Il y a des boutons d’alerte dans les salles de classe et un certain nombre des autres secteurs sont surveillés au moyen de caméras vidéo. Il est courant que le personnel et les détenus aient des rapports dans ces secteurs.

Le 22 avril 1998, M. Chris Price, sous-directeur de l’établissement Stony Mountain, a envoyé à tout le personnel de correction une note de service l’informant que les « rondes avec cellules ouvertes » seraient instaurées à l’établissement le 28 avril 1998. Essentiellement, ce type de ronde oblige des agents de correction à patrouiller les corridors de la rangée pendant que les portes des cellules sont ouvertes, ce qui permet aux détenus d’avoir accès aux corridors. La note de service précisait également ce qui suit : [traduction] « En prévision de ce changement de procédure, l’éclairage de toutes les rangées a été amélioré afin de satisfaire aux normes de Travail Canada. » Dans son témoignage, M. Price a en outre signalé que les murs des rangées avaient été peints afin d’améliorer l’éclairage. M. Rodier, l’un des requérants, a affirmé avoir pris connaissance de cette directive le 28 avril. Vers 9 h 30 ce jour-là, il a reçu instruction de son superviseur, M. Bill Robb, d’effectuer une ronde avec les cellules ouvertes dans les rangées A-2 et A-4. Il a refusé de le faire, invoquant la partie II du Code canadien du travail. M. Rodier a expliqué que depuis 1984, lorsqu’une émeute avait entraîné dans l’établissement la mort de deux agents de correction, seules des rondes avec cellules fermées avaient été effectuées à Stony Mountain. Un ordre permanent en date du 30 janvier 1991 (pièce 13) sur les patrouilles de rangées en fait état, a-t-il ajouté. En vertu de cet ordre permanent et selon une pratique de longue date, cinq agents de correction participaient aux rondes avec cellules fermées (c.-à-d. pendant que les détenus sont enfermés dans leurs cellules). Aux termes du nouvel ordre permanent, seulement trois agents participent aux rondes avec cellules ouvertes; un agent se tient à l’extérieur de la barrière et observe l’intérieur des rangées; les deux autres patrouillent la rangée, le premier longeant le mur le plus éloigné du corridor afin d’avoir une vue le plus large possible du deuxième étage et du rez-de-chaussée. Ils marchent jusqu’au bout de la rangée et poinçonnent l’heure avec l’horloge de pointage; ils reviennent ensuite sur leurs pas jusqu’à environ le milieu de la rangée, puis ils montent l’escalier ouvert jusqu’au deuxième étage; pendant qu’ils montent ainsi l’escalier, l’agent posté à la barrière du rez-de-chaussée monte l’escalier extérieur jusqu’à la rangée supérieure afin de garder à vue les agents se trouvant dans la rangée.

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Décision Page 3 M. Rodier a expliqué que, pendant les nombreuses secondes qu’il faut à l’agent posté à la barrière pour monter l’escalier, les deux agents se trouvant à l’intérieur de la rangée sont hors de sa vue. M. Rodier a décrit la capacité de l’agent posté à la barrière d’observer leurs mouvements comme leur « filin de sécurité ». Pendant toutes les 20 secondes qu’il faut à cet agent pour monter l’escalier extérieur, a-t-il dit, leur sécurité est en danger. M. Rodier a fait remarquer que, après le 28 avril, on lui a donné l’option de quitter la rangée inférieure et d’utiliser l’escalier extérieur pour monter à la rangée supérieure, ce qui faisait que les deux agents de correction patrouillant la rangée et l’agent de correction posté à la barrière ne se perdaient jamais de vue. Cependant, le 28 avril, on ne lui a pas donné cette option, et il a emprunter l’escalier à l’intérieur de la rangée pour monter au deuxième étage.

Après le 28 avril, M. Rodier a effectué plusieurs rondes avec les cellules ouvertes en compagnie de M. Chris Price, le sous-directeur; à ces occasions, il avait emprunté l’escalier à l’extérieur de la rangée pour monter au deuxième étage. M. Price s’est souvenu avoir accompagné M. Rodier pour effectuer des rondes avec cellules ouvertes dans l’unité 1 à deux reprises. La première fois, il a parcouru la rangée, est revenu sur ses pas et a monté au deuxième étage en empruntant l’escalier extérieur. L’autre fois, ils ont amorcé leurs rondes au deuxième étage et sont descendus au rez-de-chaussée en prenant l’escalier intérieur. M. Price a signalé qu’il laisse aux agents de correction le choix de décider s’ils veulent emprunter l’escalier intérieur ou non. Il a en outre signalé que, le 28 avril, on a suggéré qu’il s’établisse un dialogue avec l’agent négociateur au sujet des rondes; certains des membres du personnel ont affirmé qu’il y avait des choses à éclaircir, et ils voulaient une certaine latitude quant à la façon d’effectuer les rondes. M. Price a déclaré que, initialement, la direction voulait que les rondes soient effectuées d’une façon précise, c’est-à-dire en empruntant l’escalier intérieur, et les surveillants correctionnels ont été avisés en conséquence. M. Price s’est reporté à une note de service qu’il avait rédigée et dont voici la teneur (pièce 16) : [Traduction] [...] Actuellement, pour tous les quarts de travail on effectue les rondes avec trois agents. Cependant, les méthodes varient - certains agents patrouillent tout le rez-de-chaussée avant de passer au deuxième étage, tandis que d’autres font les deux étages de la rangée avant de passer à une autre rangée. La consigne de poste se prête à des interprétations

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Décision Page 4 différentes car elle ne dit pas clairement quelle procédure l’on devrait utiliser. Pour le moment, veuillez permettre au personnel d’effectuer les rondes d’une façon ou de l’autre pourvu qu’on n’utilise que trois agents.

M. Price a en outre fait remarquer que le 28 avril au matin, à 9 h 30, il a constaté que la majorité des portes des cellules étaient verrouillées; les seuls détenus qui étaient dans la rangée étaient ceux à qui on avait permis d’utiliser le téléphone ou qui accomplissaient des tâches de nettoyage; les cellules avaient été verrouillées afin de permettre au personnel de les fouiller.

M. Rodier s’est dit préoccupé par le fait que la première note de service qu’a envoyée la direction et qui donnait instruction d’effectuer des rondes avec les cellules ouvertes obligeait les agents de correction à n’emprunter que l’escalier se trouvant à l’intérieur de la rangée; il a dit craindre que, bien que les agents de correction semblent actuellement pouvoir utiliser l’escalier extérieur, cette option leur soit retirée à tout moment (lors d’une visite de l’établissement, le soussigné a remarqué que deux agents de correction ont emprunté l’escalier intérieur pendant leur ronde, tandis que l’agent de correction à la barrière a monté au deuxième étage en prenant l’escalier extérieur).

M. Rodier a en outre signalé qu’à sa connaissance on n’offrait aucune formation aux agents de correction au sujet des rondes effectuées avec les cellules ouvertes. Il a reconnu n’avoir produit aucun rapport d’observation précisant que de telles rondes étaient plus risquées. Il a affirmé que l’établissement de Stony Mountain avait toujours eu pour politique d’interdire aux agents de correction de porter des radios ou tout autre matériel de communication pendant qu’ils effectuaient leurs rondes, étant donné que les détenus pouvaient les leur enlever afin de contrôler l’information durant une prise d’otage. Par conséquent, seul l’agent qui observe la rangée depuis la barrière a un accès immédiat à une radio.

M. Rodier a en outre affirmé que cet été il avait visité les établissements de Prince Albert et de Drumheller; à ces établissements, les agents peuvent transporter leur radio avec eux; à Drumheller, on surveille les agents à l’aide de caméras vidéo.

M. Rodier a fait remarquer qu’il y avait un grand nombre de bandes criminalisées à l’établissement, notamment plusieurs bandes de motards et un certain

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Décision Page 5 nombre de bandes autochtones, sans compter divers groupes ethniques; sur une population de 400 détenus, il estime qu’il y a environ 125 membres de bandes organisées à Stony Mountain. À son avis, le fait qu’il y ait de nombreux membres de bandes criminalisées pose un risque additionnel à la sécurité des agents de correction. Il est assez courant, a-t-il ajouté, de trouver des armes en la possession de détenus ainsi que des drogues et de l’alcool « maison »; il lui arrive souvent d’avoir affaire à des détenus qui sont en état d’ébriété ou sous l’effet de drogues. Bien qu’il n’y ait pas eu de prise d’otage pendant qu’il était là, il y a eu un nombre considérable d’agressions ainsi que certains meurtres parmi les détenus, sans compter une « mini-émeute » en janvier 1997 (pièces 1, 2, 3, 4).

M. Terrence McKay est agent de sécurité à la Direction générale du travail de Développement des ressources humaines Canada. Le 28 avril à 10 h 40 il a été joint par M. Len Haryski, un surveillant correctionnel à l’établissement de Stony Mountain, qui l’a informé qu’un agent à l’établissement avait refusé de travailler en vertu de la partie II du Code canadien du travail. M. McKay a affirmé qu’il était courant que deux agents mènent une enquête; par conséquent, M. Ed Francis a été désigné à titre de deuxième agent afin de l’accompagner dans son enquête à l’établissement. Il est arrivé à 12 h 35 et il a été accueilli par M. Gunnar Ivans, le sous-directeur, Services de gestion, qui était en outre coprésident du comité de la santé et de la sécurité au travail. On l’a subséquemment informé que M. Rodier avait refusé d’effectuer une ronde avec les cellules ouvertes parce qu’il allait être hors de la vue de l’agent posté à la barrière. Il a rencontré M. Rodier à 13 h 06 en présence de M. Gilles Chiasson, un agent de correction qui est un délégué syndical. Un autre délégué syndical, M. Lorne Jacobson, qui est un représentant siégeant au comité de la santé et de la sécurité au travail, s’est joint à eux.

On a demandé à M. Rodier de remplir une formule d’enregistrement de son refus de travailler. M. McKay a examiné avec M. Rodier la nature de sa plainte. M. Rodier a expliqué la façon dont on effectuait les rondes avec cellules ouvertes. M. Rodier avait informé M. Robb qu’il refusait de travailler parce que, à son avis, il y avait un danger lorsque l’agent posté à la barrière montait au deuxième étage et que, par conséquent, il ne pouvait voir les agents de correction se trouvant dans la rangée. MM. Rodier et Robb ont communiqué avec les autres membres du comité de la santé et de la sécurité au travail et l’employeur a mené une enquête, à la suite de laquelle Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 6 l’employeur a conclu qu’il n’y avait pas de danger. M. Rodier a été informé de cette décision et a continué d’exercer son droit de refuser de travailler en vertu du Code canadien du travail, et c’est ainsi que l’on a pris contact avec M. McKay.

M. McKay a demandé à M. Rodier de clarifier davantage ses préoccupations à propos de sa sécurité. M. Rodier a expliqué que lorsque l’agent posté à la barrière monte au deuxième étage, il n’est pas capable de garder à vue les agents qui se trouvent dans la rangée. Ainsi les agents peuvent être agressés par un ou plusieurs des détenus pendant qu’on ne les observe pas de l’extérieur de la barrière.

À 14 h 15 toutes les parties intéressées ont poursuivi l’enquête à l’unité 1, rangées A à A-4. On a expliqué à M. McKay que chaque étage renfermait 19 cellules; pendant la journée celles-ci logent 26 détenus; toutefois, à l’heure du refus, soit à 9 h 30, il y aurait eu 10 ou 11 détenus dans la rangée. M. McKay a précisé que ce matin-là il n’y avait rien d’inhabituel à signaler dans la rangée, c’est-à-dire qu’il n’a constaté aucun geste menaçant ni activité qu’on aurait pu qualifier de menaçante. M. McKay s’est enquis s’il circulait des rumeurs de violence à ce moment-là (des renseignements secrets connus sous le vocable « KITES ») et on lui a répondu par la négative. L’établissement fonctionnait à ce moment avec un effectif complet. M. McKay a observé les rangées depuis les barrières; il n’a constaté aucune indication de comportement violent. M. Rodier lui a expliqué que, puisque les deux agents qui effectuent la ronde n’ont pas le droit de porter des radios, du poivre de Cayenne ou des dispositifs d’alarme personnels, leur capacité d’appeler à l’aide, ou de se protéger, est restreinte s’il se produit un incident pendant qu’ils sont hors de la vue de l’agent en poste à la barrière. M. Rodier lui a en outre dit qu’il n’avait reçu aucune formation particulière sur la façon d’effectuer les rondes avec les cellules ouvertes.

M. McKay et M. Francis ont ensuite étudié l’affaire et ont examiné la note de service du 22 avril concernant la patrouille des rangées. M. Ivans leur a dit que cette note de service avait été distribuée à tout le personnel par courrier interne le 22 avril. M. Rodier a confirmé qu’il en avait reçu copie. Ils ont en outre appris de M. Ivans qu’il s’agissait d’une politique nationale, c.-à-d. que les rondes avec cellules ouvertes étaient menées dans tous les établissements à sécurité moyenne, et que cette question avait fait l’objet de discussions tout au long de l’année aux réunions du comité patronal-syndical (pièces 8, 9, 10). Ils ont en outre appris qu’une dizaine d’agents de

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Décision Page 7 correction s’étaient rendus dans d’autres établissements afin d’observer les rondes avec cellules ouvertes et de se familiariser avec celles-ci. M. McKay a noté qu’il était courant pour le personnel correctionnel, notamment les enseignants et les instructeurs dans les ateliers, de travailler avec les détenus dans des secteurs ouverts sans sécurité particulière, par exemple des salles de classe et des ateliers; de plus, le personnel d’entretien travaille souvent seul avec les détenus. Enfin, on leur a remis une description de travail signée pour le poste d’agent de correction (pièce 11).

Vers 16 h 35 une réunion a eu lieu dans la salle de conférence. M. McKay a discuté des éléments du « danger inhérent », a passé en revue les conditions qui existaient dans l’unité 1 lors de l’enquête, et a conclu qu’il n’existait aucun danger. Il a ensuite informé les parties du processus d’appel et, le 4 mai 1998, il a remis à M. Rodier en main propre une copie de la décision de l’agent de sécurité. Le lendemain il a remis une copie de sa décision aux dirigeants de l’établissement. Le 6 mai il a reçu la requête de M. Rodier lui demandant de renvoyer sa décision à la Commission.

On a demandé à M. McKay de décrire la configuration des rangées. Il a expliqué qu’aux deuxième étage il y a un couloir de ciment, et que les cellules sont situées du côté droit; à gauche se trouve une barrière de sécurité; à mi-chemin le long de la rangée se trouve une plate-forme d’où part un escalier menant au rez-de-chaussée. Le couloir, estime-t-il, mesure entre 30 pouces et trois pieds; la barrière de sécurité ou le garde-fou mesure entre trois et quatre pieds de hauteur. Il ne se souvenait pas si les cellules étaient en retrait (le soussigné a remarqué qu’elles l’étaient). Les rangées, a-t-il constaté, étaient très tranquilles à ce moment-là. Il se souvient d’avoir vu les portes des cellules ouvertes et d’avoir aperçu un détenu sortir dans le corridor, jeter un coup d’oeil autour et retourner dans sa cellule. Il croit se souvenir que M. Rodier était avec lui tout au long de l’enquête.

M. McKay fait remarquer que le l'expression « danger inhérent » n’est pas définie dans le Code; le Ministère a distribué des lignes directrices internes (pièce 12) qui définissent en général ce qu’est un danger inhérent. Voici certains des éléments qu’on y relève : « le danger est un attribut ou une qualité permanente du travail; le danger est une caractéristique ou un élément essentiel du travail; le danger risque d’entraîner une lésion si des précautions spéciales ne sont pas prises; le danger existe

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Décision Page 8 indépendamment de la méthode utilisée pour exécuter le travail ». M. McKay a affirmé qu’il déterminerait si l’on a mis en place des « précautions spéciales ». À son avis, la possibilité d’une agression est inhérente au travail d’un agent de correction.

Le requérant, M. George Czmola, est agent de correction à l’établissement de Stony Mountain depuis 21 ans. M. Czmola était présent à l’établissement en 1984 lors d’une émeute qui a entraîné le meurtre de deux agents de correction. Il a décrit en détail les événements qu’il avait observés à cette occasion, y compris le fait de voir le corps ensanglanté d’un collègue, un agent nommé Wendl. M. Czmola a été tenu de demeurer à l’établissement à ce moment-là pendant 35 heures avant qu’on l’autorise à partir. M. Czmola a signalé qu’il y avait eu en 1982 une autre prise d’otage, qu’il attribuait à la politique obligeant les agents à effectuer des rondes avec les cellules ouvertes dans l’aile à sécurité maximale. Après 1984 l’établissement a instauré les seules rondes avec cellules fermées et il n’y a pas eu de prise d’otage depuis.

M. Czmola a fait remarquer qu’il y avait eu de nombreuses agressions à Stony Mountain et au moins une vingtaine de meurtres de détenus depuis qu’il y travaille. À de nombreuses occasions il a participé à des fouilles de cellules les agents de correction ont découvert des couteaux fabriqués par les détenus, des aiguilles, des balles, de la drogue et de l’alcool maison. Il n’est pas rare de trouver des détenus en état d’ébriété ou sous l’effet de drogues. Il a signalé qu’il y avait une prolifération de bandes et qu’en général les détenus sont plus organisés aujourd’hui. En 1996, un détenu appelé Myron, un homme de main, a été assassiné. En janvier 1998 il y a eu une émeute provoquée par des détenus (pièce 2) qui revendiquaient entre autres l’introduction des rondes avec cellules ouvertes.

Le 28 avril M. Czmola a commencé son poste de travail à 15 h 35. Il a reçu instruction d’effectuer sa première ronde avec les cellules ouvertes à 19 h; il a dit au gardien qu’il refusait de la faire parce qu’il craignait pour sa sécurité. Par conséquent, M. Francis est retourné à l’établissement (cette fois en tant que principal agent de sécurité) avec M. McKay à 21 h 20; il a rencontré brièvement M. Ivans, qui lui a dit que M. Czmola refusait d’effectuer la ronde avec les cellules ouvertes. M. Ivans a en outre indiqué qu’une enquête avait été menée en la présence de M. Ivans, de M. Victor Sinclair le supérieur immédiat de M. Czmola —, de M. Richard Chartrand et de M. Czmola. On a demandé à M. Czmola de remplir une formule

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Décision Page 9 d’enregistrement de son refus de travailler; M. Czmola, M. Chartrand, M. McKay et M. Francis sont allés observer les rangées en question (B-2 et B-4). M. Francis a vu trois détenus dans la rangée à ce moment-là; un était au téléphone et les deux autres se promenaient dans le corridor; d’autres détenus étaient dans leurs cellules. M. Francis et M. McKay ont ensuite patrouillé la rangée; les détenus étaient enfermés dans leurs cellules à ce moment-là. Ils ont parcouru la rangée d’un bout à l’autre puis ils ont monté l’escalier intérieur. Ils ont pris certaines mesures, notamment le retrait des portes de la cellule, qui est de 15 pouces par rapport au mur. Ils ont constaté que depuis l’extrémité extérieure du retrait jusqu’au garde-fou la largeur du corridor était de 36 pouces; la distance entre la porte de la cellule et le garde-fou est de 51 pouces et la hauteur du garde-fou est de 33 ½ pouces.

M. McKay et M. Francis ont discuté brièvement des faits qui s’étaient produits jusque alors; ils ont étudié l’information additionnelle qu’ils avaient reçue plus tôt dans le contexte du refus de travailler de M. Rodier ce jour-là, c.-à-d. la note de service de M. Price, ainsi que le procès-verbal de réunions patronales-syndicales. Ils ont rencontré MM. Ivans, Sinclair, Chartrand et Czmola afin de faire clarifier les sept points que M. Czmola avait notés dans sa formule de plainte. M. Ivans a expliqué que l’un des raisons pour lesquelles on avait opté pour les rondes avec cellules ouvertes était de favoriser davantage les relations entre les agents de correction et les détenus, ce qui permettait d’être mieux à même d’observer quoi que ce soit d’inhabituel. M. Francis a demandé si, le soir en question, il y avait quelque chose d’exceptionnel qui lui faisait craindre un danger; M. Chartrand lui a dit qu’un détenu de l’unité 4 avait dit à un agent de correction « de venir fêter avec eux »; il a pu s’agir d’une menace, a-t-il dit. M. Francis a fait remarquer que cela ne s’était pas produit dans la rangée en question et qu’il avait donc rejeté cette information comme non pertinente. M. Francis a déclaré que, bien qu’il comprît le caractère sérieux de la question du type de rondes avec cellules ouvertes ou fermées à privilégier, il n’a constaté rien d’extraordinaire ce soir-là. À 12 h 45 il a conclu qu’il n’y avait aucun danger et il en a informé M. Czmola, à qui il a remis un rapport écrit le 4 mai. Le 6 mai M. Czmola a demandé à M. Francis de renvoyer l’affaire à la Commission.

M. Francis a reconnu avoir discuté avec M. McKay de la décision Rodier. Toutefois, il a maintenu qu’il n’avait eu aucune idée préconçue à propos de l’affaire et que, avant d’arriver à l’établissement, il n’avait aucune idée des motifs pour lesquels Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 10 M. Czmola avait refusé de travailler. Il s’est enquis à propos de la pratique concernant les rondes et on l’a informé qu’avant le 28 avril cinq agents de correction participaient aux rondes qu’on effectuait avec les cellules fermées. M. Czmola a décrit à M. Francis comment la directive d’effectuer des rondes avec les cellules ouvertes l’avait affecté; il était évident qu’il était bouleversé et préoccupé par cette directive. En ce qui concerne les points soulevés par M. Czmola dans sa plainte, notamment à propos de la présence d’objets interdits dans l’établissement, il ne s’est pas renseigné sur le nombre de fois l’on avait découvert de tels objets, ni sur les cas des détenus avaient été poignardés ni sur les prises d’otage qui s’étaient produites. Il a reconnu qu’il y avait à l’établissement divers outils pour le travail du bois ainsi que des aiguilles de tatouage; à son avis, il incombe aux agents de correction de prendre les mesures voulues à ce sujet.

M. Francis a expliqué que l’agent de sécurité examine les conditions qui existent au moment de l’enquête. À propos des caractéristiques du danger inhérent mentionnées dans la pièce 12, il a affirmé que les « précautions spéciales » mentionnées pourraient inclure l’obtention de rapports de renseignements faisant état de l’existence de dangers spéciaux. Il s’est renseigné sur la formation qu’on offrait aux agents de correction et on lui a dit que dix agents avaient été envoyés à d’autres établissements pour y observer les pratiques qu’on y appliquait à propos des rondes avec cellules ouvertes. On a demandé des précisions à M. Francis au sujet de la mention dans la pièce 9 (le procès-verbal de la réunion patronale-syndicale du 1 er décembre 1997) qui, sous la rubrique « Open Range Walks » (rondes avec cellules ouvertes), fait allusion à de la formation qui aurait été offerte au cours du mois de décembre. M. Francis a reconnu qu’il n’avait posé aucune question à ce sujet; il lui a semblé que les rondes avec les cellules ouvertes ne constituaient pas un élément particulièrement complexe des fonctions d’un agent de correction.

M. Czmola a témoigné que le lendemain, soit le 29 avril, pendant qu’il effectuait une ronde avec cellules ouvertes dans les rangées B-2 et 4 avec M. Chartrand, il a entendu des détenus crier : [traduction] « Attrapons-les. Sautez dessus. Sautez dessus. » (pièce 21, Rapport d’observation ou déclaration d’un agent daté du 29 avril 1998); ils ont également entendu quelqu’un dire « ils s’en viennent le faucher ». M. Czmola a affirmé que ces commentaires l’avaient sérieusement affecté; il a immédiatement dit à son surveillant qu’il était trop stressé pour continuer de Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 11 travailler et qu’il rentrait chez lui. M. Czmola n’est pas retourné à l’établissement depuis; il touche des prestations d’accident du travail et son médecin lui a dit qu’il souffrait du syndrome de stress post-traumatisme (pièces 14 et 5). M. Czmola a précisé qu’avant cette occasion il avait s’absenter plusieurs fois du travail à cause du stress; son stress avait été déclenché par des suicides qui s’étaient produits à l’établissement et par le meurtre de M. Myron, qui lui rappelaient tous le décès de M. Wendl en 1984.

En réponse aux questions que lui a posées l’avocat de l’employeur, M. Czmola a fait remarquer que ce qui était véritablement important pour lui, c’était le fait qu’il croyait que l’on devrait rétablir les rondes avec cellules fermées qui étaient effectuées par cinq agents de correction. Si cette pratique était demeurée en place, il n’aurait pas refusé de travailler. En raison des incidents antérieurs, il avait l’impression que la situation qui existait dans les unités était potentiellement dangereuse. Selon M. Czmola, le système de gestion par unité est « affreux », car il accorde trop de liberté aux détenus. Il a en outre fait remarquer que le 28 avril les détenus savaient que les agents de correction allaient être forcés d’effectuer des rondes avec les cellules ouvertes, et « ils les attendaient de pied ferme ». M. Czmola a en outre affirmé que la formation des agents ne valait en général rien.

M. Chartrand était avec M. Czmola le 29 avril lorsqu’on les a désignés pour effectuer une ronde avec les cellules ouvertes dans les rangées B-2 et 4. Autant qu’il s’en souvienne le surveillant de poste leur a donné instruction de suivre les lignes directrices concernant les rondes avec cellules ouvertes, c’est-à-dire qu’un agent est posté à la barrière et que deux autres agents patrouillent la rangée pendant que les cellules sont ouvertes; ils devaient faire la ronde de tout le rez-de-chaussée, revenir sur leurs pas et quitter la rangée, puis ensuite emprunter l’escalier extérieur pour monter au deuxième étage. Il se souvient que des détenus ont proféré des menaces à leur endroit avant qu’ils amorcent leur ronde. Il a entendu des détenus crier [traduction] « Attrapez-les », « Ne les laissez pas quitter la rangée » et « Ils vont en trouver un pendu ». Il a informé son surveillant, M. J.L. Meyer, qu’on les avait menacés dans la rangée. M. Czmola a ensuite refusé d’effectuer la ronde. M. Chartrand a fait remarquer que M. Czmola avait été très ébranlé par les menaces et qu’il avait dit à son surveillant qu’il rentrait chez lui; celui-ci l’a convaincu de demeurer sur place. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 12 M. Chartrand a noté que lorsqu’il a commencé à travailler à Stony Mountain en 1987 la pratique consistait à effectuer les rondes avec les cellules fermées; on faisait la ronde des deux étages en même temps. Il y avait trois agents au rez-de-chaussée; deux des agents faisaient la ronde de cette rangée pendant que l’autre assurait le contrôle de la barrière. Un des agents marchait loin des cellules afin de voir l’ensemble de la rangée; l’autre agent longeait les cellules et vérifiait chacune d’entre elles; les agents faisaient ensuite demi-tour et revenaient sur leurs pas. Il y avait également deux autres agents au deuxième étage, un à la barrière et l’autre qui effectuait la ronde de la rangée. Ils étaient à l’affût d’activités suspectes, par exemple, l’utilisation de narcotiques; ils vérifiaient en outre si les détenus étaient blessés.

M. Chartrand a expliqué qu’il avait « officiellement » fait la tournée des établissements de Bowden et de Drumheller les 8 et 9 septembre 1998 pour vérifier des points de construction et pour examiner les mécanismes de verrouillage. À ce moment-là, a-t-il fait remarquer, les deux établissements faisaient faire les rondes avec les cellules ouvertes; à Drumheller les pavillons cellulaires sont surveillés au moyen de caméras vidéo placées dans les postes de contrôle auxiliaires qui assurent la surveillance des rangées du rez-de-chaussée. À Drumheller, a-t-il ajouté, il n’y a pas les mêmes problèmes concernant les bandes criminalisées qui existent à l’établissement de Stony Mountain. À Drumheller les agents ont des dispositifs d’alarme personnels qu’ils portent avec eux lorsqu’ils effectuent leurs rondes. De même, à Bowden ils apportent leurs radios partout ils vont. De plus, à l’établissement de Stony Mountain on trouve souvent des objets interdits, c’est-à-dire des armes et de la drogue. Le témoin a mentionné l’incident M. Myron avait été poignardé il y a trois ans; il a en outre signalé qu’il y a deux mois un détenu dénommé Campbell avait été poignardé; enfin il a dit qu’il s’était produit de nombreuses émeutes l’an dernier. Le 29 avril M. Chartrand a rédigé un Rapport d’observation ou déclaration d’un agent concernant les menaces qui avaient été proférées dans la rangée B-4 (pièce 21).

M. Chris Price est sous-directeur à l’établissement de Stony Mountain depuis avril 1996. Il travaille pour le Service correctionnel depuis juin 1984 et il a occupé divers postes dans plusieurs établissements. Stony Mountain, d’expliquer M. Price, est divisé en cinq unités distinctes; quatre abritent la population carcérale générale et une unité sert à loger tous les détenus du Manitoba qui doivent faire l’objet d’une Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 13 évaluation initiale pendant huit semaines. Durant cette période on détermine ce que devrait être la classification de sécurité du détenu, en appliquant un certain nombre de facteurs d’évaluation. Selon que le détenu présente un risque faible, moyen ou élevé, on le place dans un établissement à sécurité moyenne, maximale ou minimale. M. Price a signalé qu’en 1997, 65 détenus avaient été transférés de Stony Mountain à un établissement à sécurité maximale.

M. Price a fait remarquer que la philosophie de gestion par unité avait été adoptée en 1996; celle-ci prévoit une approche décentralisée de la gestion des détenus; chaque établissement est divisé en unités et au sein de chaque unité il y a une interaction dynamique entre le personnel et les détenus; tout le personnel, y compris le surveillant correctionnel, l’agent de liberté conditionnelle et les agents de correction doivent répondre du fonctionnement des unités, et ils agissent de façon autonome. M. Price a expliqué que cette interaction était essentielle pour atteindre les objectifs de la philosophie de gestion par unité. Il s’est reporté à la description de travail de l’agent de correction (pièce 11) et a signalé que les fonctions des agents sont centrées sur la participation aux activités de gestion des cas. Afin d’atteindre les objectifs de la sécurité active il importe que les agents de correction apprennent à connaître les détenus et à anticiper les situations irrégulières. La politique prévoyant les rondes avec cellules ouvertes, a-t-il maintenu, concorde avec la mission de la gestion par unité, qui repose sur l’interaction constante entre les agents de correction et les détenus (pièce 17).

M. Price a expliqué que lorsqu’il était arrivé à l’établissement en 1996 il n’y avait pas beaucoup d’interaction entre les agents de correction et les détenus dans les rangées. Il est essentiel, a-t-il dit, que les agents de correction fassent la ronde des rangées pendant que les détenus sont à l’extérieur de leurs cellules afin de s’assurer qu’ils sont en sécurité, de permettre une interaction dans la rangée et de communiquer aux détenus que les agents de correction peuvent aller ils veulent quand ils veulent.

M. Price a déclaré qu’avant d’instaurer la politique sur les rondes avec cellules ouvertes il avait discuté de la question avec les agents de correction et l’agent négociateur; en général leur réaction a été très négative à cause de leurs craintes à propos d’un environnement dangereux. Ils ont également dit être inquiétés par

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Décision Page 14 l’éclairage inadéquat et les murs sombres. Par conséquent, on a pris contact avec Travail Canada; à ce moment-là M. McKay avait conclu que l’éclairage était inadéquat. Un nouvel éclairage a donc été installé dans toutes les rangées et les murs ont été repeints. M. Price a en outre signalé que des cours de recyclage avaient été offerts en décembre 1997 (pièce 18).

M. Price a expliqué que le 28 avril lui et M. Thompson avaient effectué les premières rondes; un agent était demeuré à la barrière pendant qu’ils patrouillaient la rangée, qu’ils sont revenus sur leurs pas et qu’ils ont descendu par l’escalier intérieur au rez-de-chaussée. L’agent posté à la barrière, a-t-il soutenu, ne les avait perdus de vue que pendant cinq ou six secondes. Il a fait remarquer que tout le monde était inquiet à ce moment-là; les détenus faisaient savoir à tout le monde qu’ils s’approchaient dans la rangée. Cependant, il a trouvé que les détenus étaient polis et que le climat semblait très positif. Depuis qu’on effectue des rondes avec les cellules ouvertes, il n’y a eu aucun incident autre que celui survenu le 29 avril (pièce 21) mentionné par M. Czmola et M. Chartrand.

M. Price a dit avoir eu plusieurs entretiens avec les surveillants et les comités de détenus, sans compter qu’il a lui-même effectué quatre rondes. Il a conclu que les détenus aimaient la nouvelle politique car elle leur accordait plus de liberté et ils se sentent plus en sécurité avec le personnel qui est présent dans l’unité. Les rondes sont effectuées au hasard et les détenus ignorent quand le personnel viendra; ceux-ci sont donc plus enclins à se comporter comme il faut. Selon M. Price, cela réduit le risque qu’ils agressent un autre détenu ou qu’ils se piquent avec des aiguilles.

En réponse aux questions posées par le représentant des requérants, M. Price a reconnu que l’interaction que peuvent avoir les agents de correction et les détenus durant une ronde les cellules sont ouvertes est somme toute limitée; lorsqu’on effectuait les rondes avec les cellules fermées les agents de correction pouvaient voir si les détenus étaient en sécurité et pouvaient leur parler par la porte de leurs cellules. Il a convenu que les agents de correction consacraient beaucoup de temps à des questions de gestion de cas, lesquelles nécessitaient peu d’interaction entre les agents et les détenus. M. Price a en outre reconnu que la pièce 18 concernant la formation ne mentionne nullement les rondes, et que le 28 avril la direction avait donné instruction

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Décision Page 15 aux agents de correction d’emprunter l’escalier intérieur lorsqu’ils effectuaient leurs rondes.

Les représentants des parties ont demandé la permission de présenter des arguments écrits, lesquels ont été déposés à la Commission les 9, 14 et 17 octobre; nous les reproduisons ci-dessous.

Arguments des requérants [Traduction] Ces affaires découlent de deux refus de travailler distincts invoqués en vertu de la partie II du Code canadien du travail à l’établissement de Stony Mountain le 28 avril 1998.

Comme la preuve le montre clairement, en 1984, deux (2) agents de correction ont été brutalement assassinés par des détenus en état d’ébriété (ils avaient bu de l’alcool maison). De plus, la preuve montre clairement qu’entre 1982 et 1984 il y a eu trois (3) prises d’otage à Stony Mountain mettant en cause des agents de correction qui se trouvaient dans les rangées. L’une (1) de ces prises d’otage a eu lieu après les meurtres de deux (2) agents de correction et avant la publication des conclusions de l’enquête Rankin. Ce rapport avait été commandé par le ministère pour que l’on fasse enquête sur les circonstances entourant les meurtres qui avaient eu lieu en 1984 et qu’on examine les fonctions générales de l’établissement.

À la suite de l’enquête, les procédures ont été changées dans l’ensemble de l’établissement. La procédure visant les rondes est l’une de celles qu’on a modifiées en profondeur. Avant le changement de procédure, les agents de correction effectuaient des rondes avec les cellules ouvertes. Cette procédure a été modifiée pour permettre l’isolement cellulaire des prisonniers avant que les agents pénètrent dans la rangée. Cinq (5) agents de correction participaient à la ronde effectuée dans chaque rangée. Trois (3) agents entraient dans la rangée, deux au rez-de-chaussée et un au deuxième étage. Les deux (2) autres agents observaient ces activités de l’extérieur des barrières principales, un agent étant posté à la barrière du rez-de-chaussée et l’autre à celle du deuxième étage. Ainsi on pouvait en tout temps voir les agents qui effectuaient leurs rondes dans la rangée.

Un (1) des agents effectuant la patrouille au rez-de-chaussée entrait le pavillon cellulaire et, une fois arrivé dans le secteur principal du rez-de-chaussée, se déplaçait le plus loin possible des cellules pour faire sa ronde. Depuis cette position, située

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Décision Page 16 près des téléphones, il pouvait voir si tous les détenus étaient dans leurs cellules, ou s’ils cherchaient à se cacher de la vue générale des personnes se trouvant à l’extérieur des cellules. Les barreaux et les portes des cellules sont aménagés en retrait, soit à environ quinze (15) pouces des colonnes situées entre chaque cellule dans la rangée. Le premier agent vérifiait visuellement toutes les cellules du rez-de-chaussée et du deuxième étage, avant que les deux (2) agents qui se trouvaient également dans la rangée inspectent les cellules et poinçonnent l’horloge au fond de la rangée. De cette façon, le premier agent veillait à ce qu’il ne se produise aucun affrontement imprévu entre un agent et un détenu.

Cette procédure, qui a été instaurée pour la première fois à la suite des conclusions du rapport Rankin, a été renforcée par la diffusion de « consignes de poste » subséquentes, comme le montre la pièce 13, les consignes de poste diffusées le 30 janvier 1991. Il importe de signaler que dans ces consignes de poste, à la première page sous la rubrique « Direction » (directive), au point 3, on peut lire [traduction] « L’agent qui observe ne doit à aucun moment perdre de vue au moins un des agents qui effectuent la patrouille de la rangée. »

Cette procédure est demeurée en vigueur jusqu’à ce que ce l’agent Rodier se présente à son poste de jour le 28 avril 1998.

Selon la preuve, il est clair que les agents Rodier et Chartrand, qui ont commencé à travailler à l’établissement de Stony Mountain en 1988 et 1987 respectivement, n’avaient jamais connu aucune autre procédure que celle décrite plus haut, durant toute leur carrière à titre d’agent de correction. De plus, d’après la preuve, il est clair que l’agent Czmola, qui a été témoin des événements survenus entre 1982 et 1984, à savoir les trois (3) prises d’otage et les deux (2) meurtres, avait appliqué ces procédures depuis leur instauration en 1984 jusqu’à ce qu’il se présente au travail l’après-midi du 28 avril 1998. De plus, il est clair d’après la preuve que l’agent Czmola, encore plus que les agents qui ont été engagés après 1984, savait et comprenait pourquoi l’on avait mis en oeuvre ces procédures, à savoir prévenir la répétition de situations semblables à l’avenir, et faire en sorte que la sécurité de sa propre personne soit assurée.

Le 28 avril 1998, pendant le poste de jour, on a expressément ordonné au plaignant Rodier d’effectuer une ronde avec les cellules ouvertes. On lui a ordonné de faire la ronde avec deux (2) autres agents, plutôt qu’avec quatre (4) autres agents comme il l’avait toujours fait depuis qu’il travaillait à l’établissement. Le plaignant, comme le montre la preuve, a

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Décision Page 17 reçu des directives spécifiques sur la façon d’effectuer ladite ronde avec les cellules ouvertes. Plus précisément, on a ordonné à l’agent Rodier d’entrer dans la rangée, de patrouiller la rangée jusqu’au bout de celle-ci accompagné d’un autre agent, de poinçonner l’horloge, de retourner à l’escalier au centre, qui se trouve dans la rangée proprement dite, puis de monter au deuxième étage de cellules. Cette patrouille devait s’effectuer avec les portes des cellules ouvertes et en présence des détenus dans la rangée; ils avaient accès sans restriction à toute la rangée, de même que les deux agents présents. Pendant que l’agent Rodier et son collègue agent montaient au deuxième étage, l’agent qui les observait à la barrière du rez-de-chaussée devait quitter son poste et aller se placer à la barrière du deuxième étage en empruntant l’extérieur de la rangée, et de ce point il devait de nouveau observer l’agent Rodier et son collègue au deuxième étage pendant qu’ils poursuivaient leur ronde avec les cellules ouvertes, et ce, jusqu’à ce qu’ils atteignent la barrière, auquel moment ils déverrouillaient celle-ci et les laissaient sortir de la rangée. Il est intéressant de noter que lorsque nous nous sommes rendus sur place pour examiner les lieux et observer plus particulièrement la procédure suivie, il a fallu à l’agent en question un bon vingt (20) secondes pour passer d’une barrière à l’autre, et ce, sans interruption importante en cours de route. Voilà vingt (20) secondes pendant lesquelles les deux agents qui se trouvaient dans la rangée ne pouvaient compter sur personne qui aurait pu assurer leur sécurité. Les agents étaient hors de vue pendant un bon vingt (20) secondes. Si jamais l’observateur était retardé ou distrait, cette période pourrait être considérablement plus longue.

Les trois agents devaient ensuite se rendre à la prochaine rangée et répéter la même procédure.

L’agent Rodier a en outre soulevé la question du matériel de protection personnelle (dispositif d’alarme personnel, poivre de Cayenne, etc.) ou du matériel de communication (radio), qu’il a demandé qu’on lui fournisse, ce qu’a refusé de faire le surveillant.

L’agent Rodier a ensuite refusé de travailler en invoquant la partie II du Code canadien du travail.

L’employeur a mené sa propre enquête et avisé l’agent Rodier qu’il n’était pas d’accord qu’il existait un « danger ».

L’agent Rodier a ensuite avisé l’employeur qu’il continuait de refuser de travailler en vertu de la partie II du Code canadien du travail, après quoi on a avisé DRHC - Programme du travail. Les agents de sécurité McKay et Francis se sont

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Décision Page 18 présentés à l’établissement et ont fait enquête au sujet de la plainte. L’agent de sécurité McKay a confirmé verbalement sa décision comme quoi il n’existait pas de danger et a communiqué celle-ci par écrit le 4 mai 1998.

Le 6 mai 1998, l’agent Rodier a demandé à l’agent de sécurité McKay de renvoyer sa décision à la CRTFP pour qu’elle la révise.

L’agent Czmola s’est présenté au travail pour son poste de l’après-midi le 28 avril 1998. Il a reçu de son surveillant les mêmes directives que l’agent Rodier avait reçues pour le poste de jour. L’agent Czmola a informé son surveillant qu’il refusait de travailler en vertu de la partie II du Code canadien du travail. Son surveillant l’a informé qu’il y avait déjà eu un refus de travailler pendant le poste de jour et que les agents de sécurité avaient conclu qu’il était sans danger d’effectuer les rondes avec les cellules ouvertes. L’agent Czmola a insisté pour qu’une enquête ait lieu, et le surveillant est allé discuter de l’affaire avec la direction. La direction est revenue et a informé l’agent Czmola qu’elle n’était pas d’accord avec lui. L’agent Czmola a ensuite invoqué son droit de continuer de refuser de travailler en vertu de la partie II du Code canadien du travail, et l’on a avisé DRHC - Programme du travail.

Les agents de sécurité Francis et McKay se sont présentés à l’établissement. Il importe de signaler que ces deux agents de sécurité avaient déjà pris part à l’enquête concernant l’agent Rodier. L’agent de sécurité McKay avait été le principal enquêteur pour l’enquête Rodier, et l’agent de sécurité Francis l’avait accompagné. Pour l’enquête Czmola, l’agent de sécurité Francis a assumé la direction et l’agent McKay l’a accompagné.

Puisque ces deux agents de sécurité avaient plus tôt dans la journée pris part à l’enquête concernant l’agent Rodier et qu’ils avaient conclu à « l’absence de danger », on peut se demander comment ces deux mêmes agents pouvaient mener une enquête impartiale? L’agent de sécurité Francis pouvait-il faire abstraction de tous les renseignements qu’on lui avait communiqués et qu’il avait examinés durant l’enquête Rodier plus tôt dans la journée, et amorcer cette enquête avec « l’esprit ouvert », comme il l’a déclaré dans son témoignage? Il n’a peut-être pas consciemment utilisé l’information concernant le refus de travailler précédent, mais il est presque impossible qu’aucun des éléments recueillis précédemment n’ait pas teinté son enquête et les conclusions auxquelles il est arrivé. De plus, et c’est un point encore plus important, à la lumière de sa participation

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Décision Page 19 précédente à l’enquête Rodier, le plaignant Czmola n’avait-il pas raison de craindre qu’il y ait partialité dans cette affaire?

L’agent Czmola était dans un état agité durant l’enquête, et l’employeur était bien au fait que, tel que l’ont souligné les parties au début de l’audience, il avait précédemment souffert d’un trouble grave de stress post-traumatique. Cet état de stress post-traumatique, qu’il avait en outre vécu par rapport à des incidents qui s’étaient produits dans l’établissement (meurtres, prises d’otage, suicides de détenus (dont certains faisaient partie de sa charge de travail et avec qui il avait établi une relation personnelle), des menaces verbales, écrites et illustrées, etc.).

On trouve dans le Code canadien du travail, partie II, la définition suivante de danger :

« danger » Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié. (c’est nous qui soulignons)

Même si les agents de sécurité n’ont pas été informés de la situation concernant l’agent Czmola, l’employeur était tout à fait au courant de la situation. Le syndrome de stress post-traumatique est une maladie qui est directement liée à l’exposition aux risques présents au travail. Les agents de correction sont avant tout des êtres humains, non des machines, et en tant que tels ils sont susceptibles d’avoir les mêmes maladies que les autres êtres humains. Le syndrome de stress post-traumatique est une maladie reconnue par la Commission des accidents du travail du Manitoba. L’agent Czmola a été diagnostiqué par de nombreux médecins comme ayant cette maladie. Cette maladie est directement liée à un choc éprouvé sur le lieu de travail.

Le syndicat soutient que post-traumatique est une maladie qui tombe clairement sous la définition de « danger » qu’on trouve dans le Code canadien du travail - partie II.

Le 29 avril 1998, le lendemain de son refus de travailler, et après que l’agent de sécurité Francis l’eut informé qu’il y avait « absence de danger », l’agent Czmola s’est présenté au travail et a commencé à exécuter ses tâches pendant le poste d’après-midi. Pendant qu’il effectuait sa première ronde avec les cellules ouvertes, et qu’il appliquait les procédures dictées par l’employeur, il a entendu des menaces provenant d’un groupe de détenus se trouvant dans la rangée proprement dite. L’agent Czmola était à ce moment-là accompagné de l’agent Chartrand. Immédiatement en quittant la rangée, les

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le syndrome de stress

Décision Page 20 deux agents ont approché un surveillant et l’ont informé de ce qui s’était produit. La pièce 21 décrit en détail ce qui s’est produit pendant cette rencontre, et contient également les deux rapports d’observation rédigés par les agents Czmola et Chartrand. Il est important de noter, dans le rapport d’accompagnement, ce qui suit : [traduction] « Czmola m’a dit par ailleurs qu’il était très stressé et qu’il voulait rentrer chez lui et qu’il allait présenter une demande d’indemnité d’accident du travail. » Le lendemain il a consulté son médecin et, tel que l’ont mentionné les parties au début de l’audience, il est absent du travail depuis, sa demande d’indemnité ayant été acceptée par la Commission des accidents du travail pour cause de stress post-traumatique. La situation ci-dessus a « ramené » M. Czmola à 1984, lorsqu’il avait vu un de ses collègues agents se faire brutalement assassiner et qu’il l’a par la suite transporté sur une civière. Il se remémorait « sa tête écrasée et le sang qu’il y avait partout ».

À l’article 24 de la partie II du Code canadien du travail, on peut lire l’obligation générale suivante qui incombe à l’employeur : « L’employeur veille à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail. » L’employeur était bien au courant qu’il y avait eu par le passé des cas de syndrome de stress post-traumatique, ce qui ne l’a pas empêché de créer une dynamique au sein du lieu de travail, à savoir l’instauration de rondes avec les cellules ouvertes. De plus, à ce moment-là l’employeur a ramené le nombre d’agents chargés des rondes de cinq (5) agents à trois (3). Cette réduction d’effectif a été instaurée alors que le potentiel d’agression ou d’incidents encore pires était grandement accru. En ce qui a trait à la réduction du personnel, et quant à savoir s’il s’agit d’une question de relations du travail ou de sécurité, je renvoie la Commission à la décision rendue par le juge Mahoney dans Dragseth c. Canada (Conseil du Trésor) (copie ci-jointe). Dans cet arrêt le juge Mahoney, au nom de la Cour d’appel fédérale, a fait l’observation suivante à la page 250, première colonne :

[Traduction] « Dans son argumentation le ministère du Travail a décidé que les litiges en matière de dotation avaient trait à la négociation collective et non à la sécurité. Manifestement, dans un environnement comme un pénitencier à sécurité maximale, ils peuvent être les deux à la fois. »

De toute évidence, l’établissement de Stony Mountain est un environnement comme un pénitencier à sécurité maximale.

J’aimerais maintenant signaler à l’attention de la Commission la question du danger « inhérent ». Cette question découle du

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Décision Page 21 paragraphe 128. (2) de la Loi, qui stipule qu’un employé ne peut refuser de travailler dans un lieu lorsque :

« b) le danger visé au paragraphe (1) est inhérent à son emploi ou en constitue une condition normale. » (c’est nous qui soulignons)

Premièrement, permettez-moi de dire que la position du syndicat est claire, c’est-à-dire que le danger soit inhérent au travail ou non, cela ne soustrait aucunement l’employeur aux responsabilités ou devoirs qui lui incombent en vertu de l’article 124 de la Loi.

Pour ce qui est du qualificatif « inhérent », il importe de signaler que, contrairement à la notion de « danger », la Loi ne contient aucune définition. Cela dit, je renvoie la Commission à d’autres sources.

Le Concise Oxford Dictionary définit « inherent » (inhérent) dans les termes suivants :

[Traduction] « qui existe dans quelque chose ou qui lui appartient, notamment en tant qu’attribut permanent ou caractéristique; »

Le Black’s Law Dictionary définit quant à lui « inherent » (inhérent) comme suit :

[Traduction] « Défaut inhérent ou latent. Faute ou déficience dans une chose qui n’est pas facilement discernable et qui appartient en propre à l’objet comme tel et qui ne lui est pas extrinsèque. »

La violence et le potentiel de violence à Stony Mountain sont manifestement connus et la preuve présentée le démontre hors de tout doute. Elle est « facilement discernable ».

De plus, le Black’s Law Dictionary définit ainsi « inherently dangerous » (danger inhérent) :

[Traduction] « Danger qui est intrinsèque à une méthode ou à une condition, de sorte qu’il faille prendre des précautions spéciales pour éviter les blessures; non pas un danger découlant de la simple négligence fortuite ou incidente d’autrui dans des circonstances particulières. » (c’est nous qui soulignons)

Si nous nous reportons à la pièce 12, qui est le document auquel les deux agents de sécurité se sont référés lorsqu’ils

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Décision Page 22 ont abordé la question de l’inhérence du danger, nous pouvons lire ce qui suit au point 4 - CARACTÉRISTIQUES D’UN DANGER INHÉRENT :

« Il n’est pas facile de déterminer les dangers qui sont inhérents à un travail donné, mais on pourrait considérer un danger comme inhérent dans les cas suivants :

- le danger est un attribut ou une qualité permanente du travail;

- le danger est une caractéristique ou un élément essentiel du travail;

- le danger risque d’entraîner une lésion si des précautions spéciales ne sont pas prises;

- le danger existe indépendamment de la méthode utilisée pour exécuter le travail. »

Les deux derniers points de cette section revêtent un intérêt particulier. Premièrement, l’on reconnaît que des précautions spéciales doivent être prises, et deuxièmement, que le danger existe indépendamment de la méthode utilisée pour accomplir le travail. La procédure en place pour l’isolement cellulaire durant les rondes indique clairement que, pendant 14 ans, celle-ci a effectivement enlevé le danger (agressions) de l’exercice des fonctions et montre en outre qu’une « précaution spéciale » a été prise afin d’assurer la sécurité.

L’employeur ne peut jouer sur les deux tableaux à la fois. Ou bien la violence à Stony Mountain est « inhérente » au travail et par conséquent l’employeur doit prendre des précautions spéciales pour prévenir les blessures, ou inversement, la violence découle de la simple négligence fortuite ou incidente d’autrui en certaines circonstances particulières. Si tel est le cas, alors le danger n’est pas inhérent au travail pas plus qu’il n’est une condition normale d’emploi; par conséquent l’employeur est clairement responsable de prendre toutes les mesures raisonnables voulues pour veiller à la protection de ses employés.

Dans la circonstance expliquée à la Commission, le syndicat est d’avis que cela nécessite que la Commission donne instruction à l’employeur de retourner à la pratique antérieure instituée en 1984 à la suite des prises d’otage et des deux meurtres. Au cours des 14 dernières années, cette pratique s’est révélée efficace.

L’établissement de Stony Mountain, tels que l’ont montré les documents et les témoignages entendus, est un Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 23 environnement hostile dans lequel travailler. En fait, il est clair que les conditions sociales se sont gravement détériorées au cours des quelques dernières années. Bien qu’il s’agisse d’un établissement à sécurité moyenne, il compte plus de détenus autochtones et de membres de bandes criminalisées que d’autres prisons à sécurité moyenne. Le fait que plus du quart de la population carcérale soit constitué de membres de bandes criminalisées, sans compter les types de bandes que l’on y trouve (Hell’s Angels, Los Bravos, Manitoba Warrior’s, Indian Posse, etc.), est une indication claire que Stony Mountain est unique parmi les établissements à sécurité moyenne.

Comme la preuve le montre clairement, l’on saisit des objets interdits presque quotidiennement. La drogue et l’alcool maison » et autre) sont très courants. Il n’est pas rare de trouver des détenus en état d’ébriété ou sous l’effet de drogues. On saisit constamment des armes de tous genres : couteaux ou instruments pouvant servir à poignarder, objets en métal et en bois pouvant servir de massue, balles, seringues et aiguilles à tatouage, mèches de perceuse, fraises de toupie et autres outils. L’environnement est très hostile et menaçant.

Les agressions contre les détenus sont courantes, comme le sont les menaces à l’endroit des agents de correction. Il y a eu des suicides chez les détenus au cours des dernières années, en partie à cause de la peur que suscitent les membres des bandes criminalisées.

Les rondes constituent un domaine l’employeur peut offrir une grande protection à ses agents. Le rétablissement de la politique antérieure apportera les précautions spéciales nécessaires à la protection de ces travailleurs. Il s’agit d’une obligation que la Loi impose à l’employeur.

Lorsque nous avons visité l’établissement, nous nous sommes rendus dans d’autres secteurs tels que la cuisine, les ateliers, les salles de classe et les gymnases, et nous avons pu constater qu’il y avait des risques clairs dans ces secteurs également. Le syndicat reconnaît, toutefois, que dans ces autres secteurs les détenus avaient fait l’objet d’une présélection; de plus, une protection supplémentaire était offerte sous la forme d’alarmes fixes, de dispositifs d’alarme personnels, de caméras, de radios, etc. Lorsqu’ils se trouvent dans les rangées et que les cellules sont ouvertes, les agents ne bénéficient d’aucune de ces considérations, et de plus ils ont affaire à de larges segments de la population qui sont regroupés sans qu’il y ait d’activité de prévu ni d’ordre structuré, comme c’est le cas dans une salle de classe ou dans les ateliers. De toute évidence il s’agit de l’endroit le plus

Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 24 dangereux dans l’établissement, et il faut prendre des précautions spéciales afin de protéger les travailleurs.

L’employeur, par l’entremise de son représentant, le sous-directeur Price, a expliqué ce qui l’avait incité à instaurer les rondes avec cellules ouvertes. Il a mentionné les trois raisons principales suivantes :

1. s’assurer que les détenus sont en sécurité et vivants.

2. favoriser l’interaction avec les détenus. 3. montrer aux détenus que c’était l’installation de l’employeur et qu’ils pouvaient aller ils voulaient quand ils voulaient.

En contre-interrogatoire, il a admis qu’on pouvait déterminer si les détenus étaient en sécurité et vivants avec les portes des cellules ouvertes ou fermées. De plus , il a convenu qu’il était possible d’avoir des rapports avec les détenus dans leurs cellules ou à l’extérieur de celles-ci. De plus, si nous tenons compte de ce que nous avons observé pendant notre visite, l’interaction entre les agents et les détenus est minime et la ronde est terminée en moins d’une minute ou deux.

En ce qui a trait à la dernière raison avancée, elle semble plutôt fournir une incitation et un défi aux détenus. De plus, que les détenus soient isolés dans leurs cellules ou non, les agents peuvent aller partout l’employeur veut qu’ils aillent dans l’établissement. En outre, il est de loin plus facile de contrôler les situations si les détenus sont isolés dans leurs cellules que s’ils déambulent dans les rangées, advenant le cas quelqu’un deviendrait incontrôlable ou si jamais l’on découvrait des objets interdits, spécialement si l’incident avait à sa source une bande criminalisée.

De plus, on a produit en preuve le procès-verbal des réunions patronales-syndicales des mois d’octobre et décembre. Dans le procès-verbal de la réunion de décembre, il est clairement dit que la formation sera accordée avant l’instauration de cette politique. L’employeur a d’autre part présenté la pièce 18 pour montrer qu’il avait fourni cette formation. Premièrement, tel que l’a déclaré le sous-directeur à l’audience, les notes d’information ont été lues telles que présentées. Rien ne permettait de conclure qu’il s’agissait de rien de plus qu’une formation d’appoint. Les deux plaignants n’y ont pas assisté. La formation était facultative. La formation n’a duré que quatre heures et le programme provisoire qui avait été établi comportait neuf sujets qui, si on les avait traités en profondeur, auraient nécessité chacun

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Décision Page 25 plus de temps qu’il avait été alloué pour l’ensemble de la séance. Cela est indicatif de l’importance que l’employeur accordait à cette question.

En dépit des promesses concernant la formation qui ont été faites aux réunions patronales-syndicales en octobre et décembre, l’employeur n’a pas clairement défini la formation qu’exigeait ce changement de politique sérieux, pas plus qu’il n’a offert de formation appropriée.

Quant à savoir de quoi la Commission devrait tenir compte, je me reporte au paragraphe 130 (1) de la Loi, qui dit :

130. (1) Le Conseil procède sans retard et de façon sommaire à l’examen des faits et des motifs de la décision dont il a été saisi en vertu du paragraphe 129 (5) et peut :

a) soit confirmer celle-ci; b) soit donner, en ce qui concerne la machine, la chose ou le lieu, les instructions qu’il juge indiquées parmi celles que doit ou peut donner l’agent de sécurité aux termes du paragraphe 145(2). (c’est nous qui soulignons)

De toute évidence la Loi oblige la Commission à faire enquête sur les circonstances de la décision, et cela doit inclure, pensons-nous, toute l’information disponible concernant le refus de travailler, que les agents de sécurité en aient tenu compte ou non. De plus, nous soutenons que si la Commission devait agir autrement cela diminuerait sa capacité de faire enquête sur les circonstances de la situation et porterait atteinte à sa capacité d’agir en vertu du paragraphe 130 (1) b). S’il existe un danger, et si un agent de sécurité néglige de prendre en considération des éléments de preuve qui étaient disponibles mais qu’il n’a pas utilisés, la Commission doit pouvoir prendre en considération cette preuve en révisant la décision de l’agent de sécurité. Voilà la position que soutient le syndicat sur cette question, position que mon collègue a contestée à plusieurs occasions durant l’instruction de l’affaire devant la Commission, à savoir la pertinence des éléments de preuve que les agents de sécurité n’ont pas utilisés en prenant leurs décisions.

Contrairement à la position qu’a fait valoir mon collègue dans son exposé introductif, à savoir qu’il s’agissait d’un recours inapproprié à la partie II du Code canadien du travail, le syndicat soutient qu’il s’agit précisément du genre de question pour lequel la partie II a été conçue. L’employé au travail a des motifs raisonnables de croire qu’il y a un danger pour lui de travailler dans le lieu. L’employé en question refuse alors de travailler dans ce lieu et, lorsque

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Décision Page 26 l’employeur est en désaccord, il continue de refuser jusqu’à ce qu’un agent de sécurité mène son enquête. Le Code définit ainsi ce qui constitue un danger : « risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié ». Cette définition, de l’avis du syndicat, enlève de la Loi les anciennes notions « imminent » ou « immédiat », et depuis 1986 a substitué à ces notions ce qui suit : « risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié. » La situation dont la Commission est saisie, à savoir les rondes effectuées avec les cellules ouvertes, satisfait à cette définition. Il n’est pas nécessaire qu’une attaque ou une agression ait lieu comme tel avant que l’employé puisse refuser de travailler. Il n’est pas nécessaire que le danger soit immédiat, toutefois, il doit effectivement y avoir un risque pouvant causer des blessures à quelqu’un qui y est exposé ou souvent le rendre malade avant que la situation ne puisse être corrigée. L’article 122.1 de la Loi dit ce qui suit : « La présente partie a pour objet de prévenir les accidents et les maladies liées à l’occupation d’un emploi régi par ses dispositions. » Le changement de procédure prévoyant les rondes avec cellules ouvertes crée le risque qu’il en découle des blessures avant que l’on puisse corriger la situation. Le syndicat soutient donc que la Loi est ainsi rédigée de façon à prévenir les maladies et blessures avant qu’elles ne se produisent et de façon à corriger les situations dangereuses avant que quelqu’un ne soit blessé.

Le syndicat maintient que la présente situation tombe entièrement sous le coup de la partie II du Code canadien du travail, et que la Commission a les pouvoirs en vertu de cette partie d’intervenir dans cette affaire et d’ordonner des mesures correctives sous la forme d’instructions fondées sur le paragraphe 145(2).

Nous demandons à la Commission d’ordonner à l’employeur de modifier ses procédures concernant les rondes afin de veiller à la protection des employés contre les agressions ou de pires éventualités. Cela voudrait notamment dire revenir à l’utilisation de cinq (5) agents au lieu de trois (3) pour l’exécution de ces rondes.

De plus, nous demandons à la Commission d’ordonner à l’employeur de fournir du matériel de protection personnelle tel que des dispositifs d’alarme personnels, du poivre de Cayenne, des radios, etc. à ces employés pendant qu’ils sont au travail.

Enfin, nous demandons à la Commission d’ordonner à l’employeur d’accorder aux Commission des relations de travail dans la fonction publique

employés une formation

Décision Page 27 convenable et adéquate afin qu’ils puissent faire face efficacement aux situations pouvant surgir durant les rondes.

La Commission est manifestement habilitée à donner de telles instructions en vertu de l’alinéa 130 (1) b) et du paragraphe 145 (2), dont voici le libellé :

« 130. (1) b) soit donner, en ce qui concerne la machine, la chose ou le lieu, les instructions qu’il juge indiquées parmi celles que doit ou peut donner l’agent de sécurité aux termes du paragraphe 145(2). »

« 145 (2) S’il estime que l’utilisation d’une machine ou chose ou qu’une situation existant dans un lieu constitue un danger pour un employé au travail, l’agent de sécurité : a) en avertit l’employeur et lui enjoint, par des instructions écrites, de procéder, immédiatement ou dans le délai qu’il précise : (i) soit à la prise de mesures propres à parer au danger, (ii) soit à la protection des personnes contre ce danger; b) peut en outre, s’il estime qu’il est impossible dans l’immédiat de parer à ce danger ou de prendre des mesures de protection, interdire, par des instructions écrites données à l’employeur, l’utilisation du lieu, de la machine ou de la chose en cause jusqu’à ce que ses instructions aient été exécutées, le présent alinéa n’ayant toutefois pas pour effet d’empêcher toute mesure nécessaire à la mise en oeuvre des instructions. »

Nous demandons à la Commission qu’elle exerce les pouvoirs que lui confère cette partie de la Loi et qu’elle donne des instructions appropriées à l’employeur pour qu’il protège efficacement ces employés au travail.

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Décision Page 28 Veuillez agréer l’expression de nos sentiments les meilleurs. Art Curtis Représentant régional AFPC London (Ontario)

Arguments de l’employeur [Traduction] Introduction MM. Charles Rodier et George Czmola sont des agents de correction qui travaillent à l’établissement de Stony Mountain. Ces employés prétendent que la politique concernant les rondes avec les cellules ouvertes instaurée à l’établissement le 28 avril 1998 les expose à un danger qui a justifié leur refus de travailler en vertu du Code canadien du travail (le Code). On a demandé à deux agents de sécurité, MM. McKay et Francis, de faire enquête sur les refus de travailler respectifs des employés le 28 avril, en vertu du paragraphe 129(5) du Code. Les agents de sécurité ont déterminé qu’il n’existait aucun danger justifiant un refus de travailler. La question dont est maintenant saisie la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la Commission) en l’espèce est de savoir si les agents de sécurité avaient raison de décider qu’il n’existait aucun danger justifiant un refus de travailler dans ces cas.

Afin d’avoir gain de cause en l’occurrence, les employés doivent démontrer qu’ils satisfont à certaines exigences fondamentales prescrites par le Code. Selon l’employeur, les employés n’ont pas démontré qu’ils satisfaisaient à ces exigences de deux façons. Premièrement, ils n’ont pas prouvé qu’il existait, lors de leur refus de travailler, un danger au sens du Code. Deuxièmement, ils n’ont pas montré qu’aucun des présumés dangers auxquels ils disaient avoir à faire face allait au-delà des dangers inhérents à l’exercice normal de leurs fonctions de gardiens de prison.

Dans les présentes conclusions finales, l’employeur soutient que les décisions rendues par la Cour fédérale et la Commission concernant les refus de travailler par des gardiens de prison montrent que l’interprétation du Code avancée par les employés ne peut être soutenue. De plus, l’employeur maintient que les preuves fournies par les

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Décision Page 29 employés eux-mêmes, par les agents de sécurité et par M. Chris Price, le sous-directeur de l’établissement de Stony Mountain, montrent que les décisions respectives des agents de sécurité étaient correctes.

Danger L’alinéa 128(1)b) du Code prévoit ce qui suit : 128. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l’employé au travail peut refuser d’utiliser ou de faire fonctionner une machine ou une chose ou de travailler dans un lieu s’il a des motifs raisonnables de croire que, selon le cas [...] b) il y a un danger pour lui de travailler dans le lieu.

Le Code définit « danger » à l’article 122 : « danger » Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié.

À notre avis, les employés devaient montrer à la Commission que le danger auquel ils avaient à faire face le 28 avril 1998 était « réel » 1 . Il s’agit d’un point crucial, à la lumière de l’argument avancé par M. Curtis selon lequel une « blessure potentielle » est un danger qui est couvert par le Code 2 . À notre avis, cet argument va à l’encontre de la définition ci-dessus que donne le Code de danger, ainsi que des décisions rendues par la Cour fédérale et la Commission.

Les préoccupations qu’ont exprimées les employés dans leur témoignage devant la Commission et dans ce qu’ils ont dit aux agents de sécurité donnent à croire que ce qui les préoccupait était le fait que la nouvelle politique sur les rondes avec cellules ouvertes les exposait à un danger potentiel plus grand à l’avenir. Les blessures potentielles et la possibilité d’être attaqué par des détenus durant une ronde avec les cellules ouvertes, comme l’ont fait valoir les employés dans leur témoignage, ne constituent pas un danger selon la définition qu’en donne le Code. Étant donné que le danger

1 Il s’agit du critère établi dans Stephenson et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-83, à la page 2 (Kwavnick) et appliqué plus récemment dans Procureur général du Canada et Mario Lavoie, Cour fédérale du Canada, Section de première instance, dossier T-2420-97, décision non publiée du juge Marc Nadon, datée du 9 septembre 1998. (Seule la version française est actuellement disponible.) Au sujet de la nécessité de montrer l’existence d’un danger « réel » afin de justifier un refus de travailler, voir également Laflèche et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-61.

2 Voir les conclusions finales de M. Curtis, deuxième paragraphe, page 9. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 30 mentionné par les employés en l’occurrence est hypothétique plutôt que réel 3 , le refus de travailler des employés n’était pas fondé et la décision rendue par les agents de sécurité à cet effet était correcte.

Il est très significatif que la preuve tant des employés que des deux agents de sécurité montre qu’il n’y avait rien d’exceptionnel à signaler dans les rangées le jour en question. Ces quatre témoins ont confirmé que les détenus ne manifestaient aucun comportement inhabituel les jours ou les heures qui ont précédé le refus de travailler 4 . Il s’agit d’une preuve critique montrant que l’élément de danger réel n’existait pas en l’espèce.

Il importe par ailleurs de signaler qu’en l’occurrence les employés ont tous les deux témoigné avoir refusé de travailler avant même de pénétrer une rangée les cellules étaient ouvertes. Selon l’employeur, les employés n’étaient pas en mesure de dire s’il existait un danger réel justifiant un refus de travailler étant donné que, le 28 avril, ni l’un ni l’autre des employés n’a effectué de ronde avec les cellules ouvertes qui lui aurait permis de déterminer s’il existait un danger réel. Les faits de l’espèce sont assez semblables à ceux de l’affaire Bidulka 5 et de l’affaire Stephenson 6 en ce sens que les employés dans ces affaires ont prétendu qu’il existait un danger dans le lieu de travail sans avoir été comme tel dans le lieu en question.

Les deux employés ont témoigné qu’il ne s’était produit rien d’anormal dans les rangées le jour ils ont refusé de travailler. À la lumière de ce témoignage et du fait que la seule chose hors de l’ordinaire ce jour-là était l’entrée en vigueur de la nouvelle politique sur les rondes, l’employeur invite la Commission à évaluer soigneusement ce qui a motivé les employés à refuser de travailler. Le litige réel

3 Voir Stephenson, note au bas de page 1, à la page 32. 4 Voir Amell et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-56 (Chodos). Il convient de comparer les faits décrits à ceux de l’affaire Amell. Dans cette affaire une infirmière employée au Centre de soins psychiatriques du pénitencier de Kingston a refusé de travailler à cause des préoccupations qu’elle avait au sujet de l’application d’une politique concernant la patrouille des rangées avec cellules ouvertes. Le jour avant son refus de travailler certains détenus ont tenu un congé de maladie concerté relativement à la question des cellules ouvertes et fermées, alors que le jour du refus de travailler le climat était demeuré tendu, selon M m e Amell. En dépit de ce contexte, la Commission a confirmé la conclusion de l’agent de sécurité comme quoi le refus de M m e Amell de travailler n’était pas fondé. 5 (1987) 3 C.F. 630 à la page 642. 6 Voir la note au bas de page 1. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 31 concernant ce refus de travailler le 28 avril, à notre avis, était que les employés n’acceptaient pas la politique sur les rondes avec cellules ouvertes. Le témoignage de M. Rodier quant aux entretiens qu’il a eus avec des collègues au sujet d’un refus de travailler avant d’invoquer ce droit est également pertinent puisqu’il indique un certain degré de préméditation, au lieu d’une réaction à un danger réel. Le témoignage de l’agent de sécurité à propos du fait que M. Czmola et son représentant syndical ont mettre une heure et demie pour remplir la formule expliquant les dangers auxquels M. Czmola estimait être exposé est révélateur dans ce contexte, car il reflète un effort d’élaborer une histoire crédible, au lieu d’exposer un danger réel.

De plus, la nature de la preuve produite par les employés relativement à leurs vues sur la sécurité active en général et sur la politique concernant les rondes avec cellules ouvertes en particulier corrobore l’argument voulant que la motivation réelle derrière ce refus de travailler était moins la crainte d’un danger réel qu’un désaccord sur la politique en question et la crainte d’un danger potentiel. Par exemple, lorsqu’on lui a demandé ce qu’il pensait de la philosophie de gestion par unité, M. Czmola a répondu qu’à son avis elle était « affreuse » et permettait aux détenus d’aller n’importe et de faire ce qu’ils voulaient. À notre avis, la Commission voudra déterminer soigneusement si le « danger » était le motif réel du refus de travailler, ou si le motif véritable n’était pas plutôt le désaccord sur la politique relative aux rondes avec les cellules ouvertes permettant aux détenus de circuler dans la rangée en même temps que les agents de correction.

Enfin, le témoignage de M. Price quant au présumé danger découlant de la politique sur les rondes avec cellules ouvertes indique qu’aucun rapport d’incident n’a été présenté qui permettrait de conclure que les agents de correction ont été exposés à un danger plus grand à cause de cette politique. M. Rodier a convenu qu’aucun rapport du genre n’avait été présenté, et il a ajouté que d’après son expérience si on peut vous atteindre, alors c’est plus risqué. À notre avis, ce témoignage révèle un vice fondamental dans la preuve des employés : ce qu’ils avaient à l’esprit lorsqu’ils ont refusé de travailler, c’était le risque accru que présentait pour eux la politique en question. Tel qu’il est mentionné plus haut, un risque accru ou un danger potentiel ne saurait constituer un danger justifiant un refus de travailler. De plus, nous ferons valoir ci-dessous que tout risque accru de faire face à une situation dangereuse était inhérent aux responsabilités d’un agent de correction.

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Décision Page 32 Danger inhérent L’alinéa 128(2)b) du Code canadien du travail prévoit ce qui suit :

(2) L’employé ne peut invoquer le présent article pour refuser de faire fonctionner une machine ou une chose ou de travailler dans un lieu lorsque, selon le cas [...] b) le danger visé au paragraphe (2) est inhérent à son emploi ou en constitue une condition normale.

Les agents de sécurité ont conclu que les dangers mentionnés par les employés lors de leur refus de travailler le 28 avril étaient des dangers qui étaient inhérents à leur travail. À notre avis, cette conclusion est correcte. Les dangers découlant d’actions possibles des détenus sont des dangers qui sont inhérents aux fonctions des agents de correction -- ceux-ci se présentent chaque fois que les agents de correction sont en contact avec les détenus 7 . Les descriptions de travail de MM. Rodier et Czmola indiquent clairement que la sécurité active et l’interaction avec les détenus font partie intégrale de leurs fonctions. Le témoignage de M. Price quant à la nouvelle approche de la gestion par unité suivie en milieu correctionnel indique que les agents de correction sont tenus d’avoir des rapports avec les détenus par une gestion de cas directe et l’approfondissement de la connaissance des détenus. Il s’agit d’un aspect critique de l’objectif qu’ont les agents de correction d’aider les détenus à devenir des citoyens respectueux de la loi, selon M. Price.

L’employeur a concédé que le travail d’un agent de correction est un travail comportant des dangers inhérents. Cependant, aucune preuve crédible n’a été produite pour montrer que les rondes avec cellules ouvertes présentaient des dangers spéciaux plus grands que ceux qui étaient inhérents aux autres aspects des opérations carcérales. Dans la mesure où la preuve présentée au sujet des deux meurtres commis en 1984 est pertinente (et nous montrerons ci-dessous qu’une telle preuve historique n’est pas pertinente), il convient de signaler que ces meurtres ont été commis dans des rangées les cellules étaient fermées et par des prisonniers qui s’étaient cachés dans une douche près de la barrière de la rangée avant qu’on verrouille leurs cellules 8 . Par conséquent, 7 Voir Mahoney et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-35. 8 Voir la pièce 6, « Report of the Inspector General’s Special Inquiry into the Murder of Two Officers » (rapport de l’enquête spéciale menée par l’inspecteur général relativement au meurtre de deux agents) daté de juillet 1984, à la page 11, il est expliqué que l’isolement

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Décision Page 33 à notre avis, les agents de sécurité et la Commission n’avaient en main aucune preuve montrant que les dangers associés aux rondes avec cellules ouvertes constituaient des dangers plus grands que les dangers inhérents auxquels tous les agents de correction ont à faire face lorsqu’ils ont des rapports avec les détenus.

Finalement, il y a lieu de signaler que notre visite a clairement montré que l’établissement de Stony Mountain est un endroit les agents de correction sont exposés aux dangers mentionnés par les deux employés le 28 avril sur une base quotidienne et dans de nombreux secteurs de l’établissement. Ces dangers sont inhérents au travail des agents de correction.

Éléments de preuve non pertinents présentés à la Commission

Bien que l’employeur respecte le processus d’enquête et reconnaisse le désir des employés d’exprimer pleinement leurs préoccupations, une partie importante de la preuve présentée à la Commission était non pertinente puisqu’elle n’avait pas trait à la question réelle, à savoir si les agents de sécurité étaient fondés à décider qu’il n’existait aucun danger justifiant un refus de travailler le 28 avril. À notre avis deux types de témoignages entendus par la Commission sont dans une large mesure non pertinents : (1) le témoignage quant aux dangers potentiels et (2) la preuve « historique » dont la Commission a été saisie.

Le témoignage quant aux dangers potentiels créés par la politique sur les rondes avec cellules ouvertes était sans rapport avec la question de savoir s’il existait un danger réel justifiant un refus de travailler le 28 avril. Si la Commission décide que la preuve relative aux dangers potentiels découlant de cette politique est pertinente, alors nous soutenons que la politique en question réduit le danger à l’établissement de Stony Mountain. Dans son témoignage M. Price a essentiellement déclaré que cette politique permettait d’avoir des rangées plus sécuritaires. Il a affirmé qu’une plus grande interaction entre les détenus et les agents de correction aidait à créer un élément de confiance, fournissait aux agents une bonne occasion de prévoir les situations irrégulières, permettait aux agents de prendre des mesures proactives afin de désamorcer les situations potentiellement dangereuses avant qu’elles ne se produisent et souvent faisait en sorte qu’on obtenait à l’avance des

cellulaire a été annoncé par le système de diffusion publique, puis que les agents de correction ont ouvert les barrières, après quoi les détenus ont attaqué les agents.

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Décision Page 34 détenus des renseignements relatifs à des questions de sécurité. M. Price a en outre commenté la réaction que les détenus avaient eue aux rondes avec cellules ouvertes, laquelle donnait à croire que la nouvelle politique faisait qu’ils se sentaient plus en sécurité. Ce témoignage corrobore notre argument à savoir que la politique sur les rondes avec cellules ouvertes réduit le danger qui existe dans les rangées.

En ce qui a trait aux éléments de preuve « historiques » présentés à la Commission, l’employeur soutient que cette preuve ne devrait pas être admise car elle n’est pas pertinente puisqu’elle n’a pas été présentée par les employés aux agents de sécurité lorsque ces derniers ont effectué leur enquête. Si la Commission conclut que la preuve historique relative aux rondes effectuées à l’établissement de Stony Mountain est pertinente, alors il importe de signaler certains aspects de la preuve dont elle est saisie. Premièrement, l’instauration d’une politique des rondes avec cellules ouvertes est l’aboutissement d’un train de mesures adoptées sous la rubrique de la philosophie de gestion par unité mise en oeuvre à l’établissement de Stony Mountain. Cette nouvelle approche prévoyait des mesures visant à changer la culture à l’établissement, à améliorer le moral du personnel et des détenus et à améliorer l’environnement physique. M. Price a fait état de nouvelles initiatives telles que la classification systématique des détenus selon le risque qu’ils posaient et le transfert plus rapide de ceux qui présentent un risque élevé. Toutes ces politiques font de Stony Mountain un établissement différent de celui qui existait il y a même dix ans, un endroit les conditions sociales se sont améliorées et continuent de s’améliorer 9 . Deuxièmement, la politique concernant les rondes avec cellules ouvertes a elle-même été mise en oeuvre progressivement, à la suite de consultations approfondies entre le syndicat et la direction. Les agents de sécurité de Travail Canada ont aussi été consultés et l’on a appliqué les recommandations des agents, qui avaient demandé qu’on peinture les murs des rangées une couleur plus pâle et qu’on installe un nouvel éclairage. M. Price a en outre témoigné qu’on avait offert aux agents de correction une formation facultative et payée en prévision de l’instauration de la politique en question et M. Francis a fait remarquer que des agents avaient été envoyés observer les rondes qu’on effectuait avec les cellules ouvertes dans un autre établissement. À notre avis, la mise en oeuvre de cette politique a eu lieu de manière à faire en sorte que l’employeur respecte toutes les obligations que lui imposait le

9 Voir le paragraphe 1 à la page 7 des conclusions finales de M. Curtis à ce sujet. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 35 Code, notamment en ce qui concerne les précautions à prendre afin d’éviter que les employés ne soient blessés 1 0 . Arguments ayant trait à M. Rodier L’employeur soutient que la Commission devrait rejeter l’affirmation de M. Rodier selon laquelle la politique sur les rondes avec cellules ouvertes posait un danger en ce sens qu’elle obligeait les deux agents patrouillant la rangée à être hors de la vue du troisième agent posté à la barrière lorsque ce dernier passait d’un étage à l’autre. Premièrement, le fait que les deux agents se trouvant dans la rangée soient hors de la vue de l’agent posté à la barrière ne présente pas de danger à moins qu’un autre événement ne se produise, par exemple si un détenu attaque l’un des gardiens à l’intérieur. Par conséquent, le danger qui surgit du fait d’être hors de vue n’est pas un danger réel, mais un danger potentiel qui ne constitue pas un motif suffisant pour refuser de travailler en vertu du Code.

Deuxièmement, nous soutenons que la probabilité que ce danger potentiel devienne réel est faible. Cet argument repose sur le témoignage du sous-directeur Chris Price, qui a précisé a) qu’aucun rapport d’observation n’avait été présenté au sujet d’incidents qui auraient découlé de la politique sur les rondes avec cellules ouvertes depuis qu'elles avaient commencé le 28 avril 1998; et b) que la pratique générale que suivent les gardiens lorsqu’ils font la ronde des rangées et que les cellules sont ouvertes consiste à utiliser l’escalier à l’intérieur de la rangée, plutôt que de retourner à la barrière et d’emprunter l’escalier extérieur. Les rondes que nous avons observées lors de notre visite confirment cette description de la pratique générale. Si les dangers découlant de l’utilisation de l’escalier intérieur étaient réels, nous estimons que les agents de correction choisiraient d’emprunter l’escalier extérieur, comme ils ont le droit de le faire en vertu de la politique 11 . Enfin, à notre avis les dangers posés par le fait d’être hors de la vue du gardien posté à la barrière sont les dangers qui sont inhérents au travail d’un agent de correction. Le témoignage des employés, le témoignage du sous-directeur Price et notre

10 Voir les deux derniers paragraphes à la page 6 des conclusions finales de M. Curtis à ce sujet.

11 Il y a lieu de signaler en passant que l’un des témoins des employés, M. Chartrand, a contredit carrément l’affirmation de M. Rodier selon laquelle la politique sur les rondes avec cellules ouvertes nécessitait l’utilisation de l’escalier intérieur. Les surveillants, a-t-il expliqué, obligent les agents de correction à emprunter l’escalier extérieur et les agents n’ont pas reçu instruction d’emprunter l’escalier intérieur, a-t-il ajouté.

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Décision Page 36 visite confirment tous le fait que les agents de correction se trouvent souvent seuls, hors de la vue de collègues agents pendant de longues périodes et en la compagnie de détenus dans divers endroits de l’établissement. Cela fait partie du travail normal et courant d’un agent de correction et, tel qu’il est décrit plus haut, il s’agit d’un danger inhérent. Les exemples les plus clairs de cette situation que nous avons pu observer durant notre visite étaient les situations les agents de correction se trouvaient dans le gymnase et dans l’atelier.

Arguments concernant M. Czmola Dans ses conclusions finales, M. Curtis soulève le fait que M. Czmola souffrait du syndrome de stress post-traumatique. À notre avis, la façon dont M. Czmola réagit à son contact avec les détenus est une affaire qui doit être laissée à la Commission des accidents du travail. La question dont étaient saisis les agents de sécurité et que doit trancher la Commission est de savoir si les conditions qui existaient dans le lieu de travail justifiaient un refus de travailler, et non de savoir si l’état de la personne qui invoque le refus justifie un refus de travailler. M. Czmola n’a jamais établi, ni devant les agents de sécurité ni devant la Commission, qu’il y avait une relation de cause à effet entre les conditions existant dans le lieu de travail et le risque ou préjudice réel sur lequel reposait son refus de travailler 1 2 . En effet, ce n’est que le lendemain de son refus de travailler que M. Czmola a soulevé la question du stress avec la direction dans le contexte des rondes effectuées avec les cellules ouvertes. Lorsque les agents de sécurité ont mené leur enquête il n’a aucunement été fait mention de l’état de santé de M. Czmola. Plus précisément, M. Francis a indiqué dans son témoignage qu’il ne se souvenait d’aucune déclaration qui aurait été faite au sujet de la santé de M. Czmola et il ne se rappelle pas que M. Czmola ait utilisé le mot « paniqué », le terme que lui a suggéré M. Curtis durant l’interrogatoire. Il convient en outre de signaler qu’aucune des raisons citées dans la documentation sur le refus de travailler produites par M. Czmola le 28 avril ne fait allusion à son état de santé. Par conséquent, la Commission ne devrait accorder aucun poids aux arguments sur la santé de M. Czmola, puisque son état n’est pas relié à son refus de travail initial.

12 Voir à ce sujet l’affaire Scott et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-71 (Chodos), pages 11 et 12, la décision rendue par la Commission dans Bliss et le Conseil du Trésor, dossier de la CRTFP 165-2-18 (Nisbet) est citée, ainsi que les pages 13 et 14.

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Décision Page 37 En ce qui concerne les articles dangereux énumérés par M. Czmola et que, a-t-il dit, l’on trouvait couramment dans les rangées (matériel de bricolage, aiguilles à tatouage, etc.), il convient de signaler que M. Francis a indiqué qu’à sa connaissance les agents de correction étaient responsables « de l’éradication » de ces articles des rangées. L’employeur soutient que ces articles se trouvent dans les rangées et que les rondes effectuées avec les cellules ouvertes augmentent la probabilité qu’on trouvera ces articles. Le témoignage de M. Price selon lequel l’un des objectifs des rondes non prévues effectuées avec les cellules ouvertes toutes les heures est d’accroître la sécurité dans les rangées et de rendre l’utilisation illicite de ces objets plus difficile corrobore cet argument.

Enquête impartiale menée par les agents de sécurité M. Francis, selon l’employeur, a répondu de façon convaincante devant la Commission aux questions soulevées par M. Curtis dans ses conclusions finales aux pages 3 et 4, relativement à l’impartialité des agents de sécurité. M. Francis a témoigné que lui et son collègue M. McKay avaient approché leurs tâches avec un esprit ouvert et sans idée préconçue.

L’affirmation selon laquelle la participation de M. Francis à l’enquête menée par M. McKay pouvait faire craindre une partialité de sa part à l’endroit de M. Czmola n’est étayée sur aucun élément de preuve avancé par M. Czmola devant la Commission. En effet, tout comme les parties ont convenu que c’était une utilisation rationnelle des ressources que de demander à la Commission d’entendre les refus de travailler de M. Rodier et de M. Czmola en même temps, nous soutenons que l’affectation de deux agents de Travail Canada pour faire enquête sur les mêmes cas n’était rien de plus qu’une utilisation rationnelle des ressources.

Conclusion Retourner en arrière aux jours des rangées fermées à clé, à notre avis, serait contre-productif du point de vue de la sécurité tant des détenus et du personnel qui vivent et travaillent dans les rangées de l’établissement de Stony Mountain. Les raisons pour lesquelles il faudrait le faire n’ont pas été établies puisque les employés ne se sont pas acquittés du fardeau de la preuve que leur imposait en l’occurrence le Code. Plus précisément, ils n’ont pas montré qu’il existait un danger, au sens du Code, lors de leur refus de travailler. De plus, ils n’ont pas réussi à prouver qu’aucun des présumés dangers auxquels ils auraient eu à faire face allait au-delà des

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Décision Page 38 dangers inhérents associés à l’exercice normal de leurs fonctions à titre de gardiens de prison.

Contre-preuve des requérants [Traduction] Dans les conclusions finales de l’employeur, M e Merner soutient que la présente situation ne constitue pas un danger au sens du Code. Tout ce dont il s’agit, et je cite : « Les préoccupations qu’ont exprimées les employés dans leur témoignage devant la Commission et dans ce qu’ils ont dit aux agents de sécurité donnent à croire que ce qui les préoccupait était le fait que la nouvelle politique sur les rondes avec cellules ouvertes les exposait à un danger potentiel plus grand à l’avenir ». Or le syndicat soutient que la définition de « danger » couvre en fait cette situation, puisqu’il s’agit d’un « risque ou [d’une] situation susceptible de causer des blessures à une personne qui est exposée, ou de la rendre malade, avant qu’il ne puisse y être remédié ». Un exemple aidera peut-être à démontrer ce point. Si un travailleur est exposé à un bruit excessif au travail, une situation que l’on pourrait qualifier d’« inhérente » au travail, et s’il est raisonnable de penser que le bruit excessif pourrait causer du dommage à l’ouïe (une blessure), à un moment donné dans l'avenir, ce bruit est réputé constituer un danger. À la suite de cette conclusion, l’on prend des mesures afin de réduire le risque pour ce travailleur. Par exemple, on peut isoler la cause du bruit dans une cabine insonorisée, ou en installant un panneau insonorisant, ou encore en fournissant au travailleur un matériel de protection tels des protecteurs pour les oreilles. Cette situation est-elle vraiment différente de celle qui nous occupe, il a été prouvé historiquement que des personnes ont été victimes d’agressions aux mains des détenus, que les mêmes mesures peuvent être prises, à savoir créer une barrière entre le travailleur et le risque (cellules verrouillées) ou fournir au travailleur le matériel de protection nécessaire et une formation appropriée? À notre avis il n’y a manifestement aucune différence entre ces deux scénarios, les deux satisfaisant à la définition de « danger » prévue par le Code.

La prétention de l’employeur comme quoi, lorsque les agents avaient refusé de travailler, ils ne l’avaient pas fait tant par crainte d’un danger réel que parce qu’ils étaient en désaccord avec la politique sur les rondes avec cellules ouvertes n’est pas fondée. Rien dans la preuve ne diminue les préoccupations légitimes qu’avaient les deux agents de correction à partir des expériences de vie réelle qui s’étaient produites avant le changement de politique, ni ne diminue leur inquiétude que cette situation se produise de nouveau à

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Décision Page 39 l’avenir à la suite de ce changement. Oui, il est vrai que les deux plaignants ne sont pas d’accord avec le changement de politique, toutefois, il est clair d’après la preuve que leur préoccupation est directement reliée à leur inquiétude raisonnable de voir l’instauration de cette politique créer un « danger », au sens qu’en donne le Code.

M e Merner, à la page 3 de son mémoire, en parlant du témoignage de M. Price, soutient qu’aucun rapport d’incident n’a été produit qui montrerait que les agents de correction ont été exposés à un danger plus grand à cause de la « politique sur les rondes effectuées avec les cellules ouvertes. » Or les agents Czmola et Chartrand ont présenté deux rapports d’incident concernant des menaces qui avaient été proférées, et auxquelles M. Price a fait allusion et a donné suite. De plus, on ne peut affirmer de façon absolue que parce qu’il n’y a pas eu d’incident jusqu’à présent il n’y en aura pas à l’avenir. C’est précisément la nature du risque qui existe en l’occurrence, on ne saurait prédire quand il se manifestera, mais ici encore le syndicat soutient que cela est prévu dans la définition de « danger » que contient le Code. Je dirais que les travailleurs à cet établissement ont jusqu’ici été chanceux de ne pas avoir à présenter de rapport signalant un incident, mais cela ne prouve d’aucune façon qu’il n’y a pas de « danger ».

Pour ce qui est de l’argument voulant que le risque accru soit inhérent aux responsabilités d’un agent de correction, je renvoie la Commission à mes arguments antérieurs, dans lesquels j’ai abordé cette question. Je demanderais en outre à la Commission d’examiner une fois de plus le scénario que j’ai présenté plus tôt dans mes arguments, à propos de la présence d’un bruit dans le lieu de travail, et des mesures qui sont prises par les employeurs ou que leur ordonnent de prendre les agents de sécurité afin de rectifier la situation. Le dommage à l'ouïe ne se produit pas de la même façon chez tous les travailleurs et prend plusieurs années à se produire, et par conséquent le danger n’est d’aucune façon immédiat, ce qui n’empêche pas que l’on prenne des mesures pour protéger les travailleurs. Les mêmes circonstances s’appliquent ici. Aucun travailleur ne devrait avoir à travailler en l’absence de mesures appropriées pour protéger sa santé le plus possible pendant qu’il est au travail, que certains risques soient manifestes ou non dans le travail. Il incombe toujours à l’employeur de protéger la santé des employés lorsqu’ils sont au travail.

À propos de la pertinence de la preuve, le syndicat soutient que tous les éléments de preuve sont pertinents en l’espèce et que l’agent de sécurité aurait pu en prendre connaissance. Cette preuve est importante puisqu’elle établit le contexte

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Décision Page 40 dans lequel cette affaire évolue. Elle explique pourquoi la politique qui était en place depuis 14 ans avait été établie, et elle aide à comprendre les préoccupations et lacunes dont fait l’objet la politique actuelle. Si l’on fermait les yeux sur ces éléments de preuve, comme l’employeur voudrait qu’on le fasse, on se trouverait à ajouter foi au vieil adage qui veut qu’à ignorer l’histoire on se condamne à le répéter.

Conclusion Le syndicat demande à la Commission d’examiner les mesures correctives formulées dans son argumentation première, et de se pencher sur les mesures appropriées à prendre afin d’assurer la sécurité de ces travailleurs lorsqu’ils sont au travail. À notre avis, ce n’est pas une solution d’accepter la requête de l’employeur, qui ne veut pas que l’on retourne en arrière et qui soutient que l’on doit maintenir le statu quo c’est-à-dire la politique nouvelle. Le danger est réel et peut être réduit ou contrôlé.

Motifs de la décision Les dispositions suivantes de la partie II du Code canadien du travail s’appliquent plus particulièrement aux questions qui sont en litige en l’espèce :

122.(1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie. [...] «danger» Risque ou situation susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade, avant qu'il ne puisse y être remédié.

[...] 124. L'employeur veille à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail.

[...] 128.(1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, l'employé au travail peut refuser d'utiliser ou de faire fonctionner une machine ou une chose ou de travailler dans un lieu s'il a des motifs raisonnables de croire que, selon le cas :

a) l'utilisation ou le fonctionnement de la machine ou de la chose constitue un danger pour lui-même ou un autre employé;

b) il y a danger pour lui de travailler dans le lieu. Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 41 (2) L'employé ne peut invoquer le présent article pour refuser de faire fonctionner une machine ou une chose ou de travailler dans un lieu lorsque, selon le cas :

a) son refus met directement en danger la vie, la santé ou la sécurité d'une autre personne;

b) le danger visé au paragraphe (1) est inhérent à son emploi ou en constitue une condition normale.

Essentiellement, les agents de sécurité devaient en l’occurrence déterminer si l’instauration de la politique prévoyant des rondes effectuées avec les cellules ouvertes constituait un « danger » au sens défini ci-dessus pour les requérants et, dans l’affirmative, si ce danger tombe sous le coup de l’alinéa 128(2)b). Il ne fait aucun doute dans mon esprit que, à tort ou à raison, les requérants croyaient véritablement que l’instauration de cette politique mettait réellement et de façon immédiate leur sécurité en danger. Je signale en outre que leurs préoccupations sont plus que purement hypothétiques. La perspective de violence qui existe dans un pénitencier à sécurité moyenne les bandes criminalisées sont partout, l’on trouve de temps à autre des armes fait maison, et les détenus sont à l’occasion en état d’ébriété et sous l’effet de drogues est une réalité de tous les jours qui nécessite une vigilance constante et qui requiert que l’on prenne des précautions. Cependant, j’accepte le témoignage de M. Price selon lequel cela constitue un élément important de la sécurité active au sein de l’établissement qu’il y ait, et que cela soit manifeste, une interaction et des contacts entre les agents de correction et les détenus, et que les rondes effectuées par les cellules ouvertes sont un aspect important du processus de sécurité et favorisent l’exécution du mandat de l’établissement. Je signale, à titre d’exemple, que la description de travail du poste d’agent de correction II (pièce 11) contient de nombreuses mentions faisant état de la nécessité pour les agents de correction d’avoir des relations et des contacts directs avec les détenus. Par exemple, à l’alinéa 1a) on dit de l’agent qu’il est le premier point de contact pour les détenus qui y sont confiés; à l’alinéa 3a) on dit qu’ils doivent avoir des rapports fréquents et actifs avec les détenus; au paragraphe 5, on signale que les agents de correction doivent assurer la sécurité active en surveillant et contrôlant les activités et programmes des détenus au sein de l’unité et de l’établissement, en : a) assurant une présence active dans les domaines d’activité des détenus à l’intérieur et à l’extérieur de l’unité et de l’établissement.

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Décision Page 42 Par conséquent, je conclus que les risques associés aux rondes avec cellules ouvertes sont inhérents aux fonctions des agents de correction. Autrement dit, les risques liés à l’interaction et au contact avec les détenus font partie du travail. Voilà une conclusion qui n’a rien de nouveau à l’égard des litiges sur la santé et la sécurité au travail survenus au Service correctionnel; la Commission est arrivée à des conclusions très semblables dans les affaires Holigroski (dossier 165-2-30) et Stephenson et autres (dossier 165-2-83).

Il importe de signaler que le fait de conclure que les risques associés à une politique prévoyant des rondes effectuées avec les cellules ouvertes sont inhérents aux fonctions de l’agent de correction n’enlève rien au fait que l’employeur est tenu par la loi de veiller « à la protection de ses employés en matière de sécurité et de santé au travail » (article 124). Il incombe toujours à l’employeur de prendre les mesures voulues pour s’assurer que l’exécution de ces fonctions est exempt de risques inutiles. À cet égard, je partage le point de vue exprimé par M. Rodier quant à la nécessité pour l’agent de correction qui est posté à la barrière de la rangée d’observer en tout temps les agents qui patrouillent comme tel les rangées. Il est clair d’après la preuve que pendant quelques secondes tout au moins, lorsque l’agent de correction posté à la barrière emprunte l’escalier extérieur pour monter au deuxième étage ou pour descendre au rez-de-chaussée, il perd de vue les agents qui prennent l’escalier intérieur pour monter au deuxième étage. La présence d’un troisième agent de correction à la barrière est nécessaire pour que quelqu’un à l’extérieur de la rangée puisse continuellement voir les agents qui patrouillent la rangée et réagir immédiatement dans l’éventualité d’un trouble. Cela est d’autant plus important que les agents qui patrouillent la rangée ne peuvent porter de radio, de dispositif d’alarme, etc.

Il n’y a en fait aucune raison de briser le contact visuel, même pendant quelques secondes. À mon avis, cela expose les agents de correction à un danger au sens de la partie II du Code, un danger qui est tout à fait inutile. La proposition de M. Rodier répond à cette préoccupation; autrement dit, il s’agirait pour les agents de correction qui patrouillent la rangée de prendre l’escalier extérieur pour monter au deuxième étage en la compagnie de l’agent de correction posté à la barrière. La direction a en fait reconnu qu’il était possible de modifier ainsi la procédure: M. Price a témoigné que les agents de correction peuvent actuellement choisir d’emprunter soit Commission des relations de travail dans la fonction publique

Décision Page 43 l’escalier intérieur ou extérieur lorsqu’ils effectuent leurs rondes. En toute déférence, cela m’apparaît être une abdication de la responsabilité qui incombe à l’employeur en matière de sécurité. La direction prévoit des directives détaillées et fermes pour de nombreux aspects de l’exercice des fonctions des agents de correction, notamment sur le plan de la sécurité. Elle devrait le faire également dans ce contexte. La sécurité des agents de correction ne doit pas être laissée à la discrétion de chacun. Par conséquent, en vertu du pouvoir que confère à la Commission l’alinéa 130(1)b), j’ordonne à la direction d’aviser les agents de correction qui effectuent des rondes avec les cellules ouvertes d’emprunter l’escalier à l’extérieur de la barrière pour avoir accès aux rangées du deuxième étage ou du rez-de-chaussée.

Je me suis penché sur la proposition de M. Curtis selon laquelle l’employeur devrait retourner à sa pratique d’utiliser cinq agents de correction pour les rondes, au lieu de trois, comme c’est le cas actuellement. Toutefois, on ne m’a pas prouvé que cela améliorerait la santé et la sécurité des agents de correction lorsqu’ils effectuent leurs rondes. Je ne suis pas convaincu, d’autre part, qu’il serait particulièrement utile d’ordonner à l’employeur d’offrir de la formation relativement aux rondes.

J’ai en outre pris en considération les préoccupations exprimées par le représentant des requérants au sujet du fait que les deux mêmes agents de sécurité ont mené les deux enquêtes. Je n’ai vu aucune preuve comme quoi cela avait compromis l’indépendance ou l’équité de l’une ou l’autre enquête. Au contraire, il est tout à fait logique de penser que plus les agents de sécurité sont exposés à l’environnement sur lequel ils font enquête, plus il est probable que leur connaissance de cet environnement et leur expertise soient rehaussées. Les agents de sécurité ont affirmé catégoriquement qu’ils avaient effectué chaque enquête avec un esprit ouvert, et je ne vois aucune raison de mettre en doute cette affirmation.

En ce qui concerne les circonstances entourant le refus de travailler de M. Czmola, il est incontestable que ce dernier souffre des effets psychologiques, désignés comme le syndrome du stress post-traumatique, provoqués par les expériences horrifiantes qu’il a vécues en 1984 lorsque deux de ses collègues ont été assassinés. Toutefois, la preuve ne montre pas que cette maladie a été causée par le changement de politique concernant les rondes. En fait, M. Czmola a reconnu qu’il avait prendre des congés de maladie à cause de stress professionnel à plusieurs

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Décision Page 44 occasions avant le 28 avril. La preuve n’a pas établi que le retour à l’ancienne politique concernant les rondes avec cellules fermées, et en utilisant cinq plutôt que trois agents de correction pour effectuer les patrouilles, aurait un effet significatif sur la maladie de M. Czmola. Je signale par ailleurs que les menaces proférées à l’endroit de M. Czmola et de M. Chartrand le 29 avril l'ont été après que les agents de sécurité eurent effectué leur enquête et que ceux-ci ne pouvaient manifestement pas en tenir compte à ce moment-là.

Par conséquent, pour reprendre ce que j’ai dit plus haut, j’ordonne à l’employeur d’obliger les agents de correction qui ont à effectuer des rondes à utiliser l’escalier situé à l’extérieur de la barrière lorsqu’ils doivent se déplacer entre le rez-de-chaussée et le deuxième étage d’une unité.

P. Chodos, vice-président

OTTAWA, le 19 novembre 1998. Traduction certifiée conforme

Serge Lareau

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