Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La plaignante a déposé, en cours de stage, un grief de harcèlement avec l’aide des défendeurs, représentants de son agent négociateur - elle a ensuite été renvoyée en cours de stage - elle a voulu contester son licenciement, et les défendeurs lui ont assuré que ce serait fait - des mois plus tard, la plaignante a découvert que les défendeurs n’avaient rien fait en son nom - elle s’est plainte qu’ils ont manqué à leur devoir de représentation équitable à son égard - les défendeurs ont objecté que la plainte était hors délai - la Commission a jugé que le dépôt de la plainte n’était pas hors délai - elle a aussi jugé que les défendeurs n’avaient pas analysé les circonstances entourant les préoccupations de la plaignante et qu’ils n’avaient pris aucune mesure en son nom, ce qui constitue une négligence grave, voire de l’arbitraire - elle n’a pas admis leur défense voulant qu’il y ait eu manque de communication, que l’incompétence ne soit pas une négligence grave et que la plaignante aurait dû suffisamment connaître le processus de grief pour ne pas avoir besoin de leur aide. Objection rejetée. Plainte accueillie. Compétence réservée pour la réparation.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2011-08-19
  • Dossier:  561-02-450
  • Référence:  2011 CRTFP 107

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

LISE SUZANNE JUTRAS OTTO

plaignante

et

RAYMOND BROSSARD et ALEX KOZUBAL

défendeurs

Répertorié
Jutras Otto c. Brossard et Kozubal

Affaire concernant une plainte visée à l’article 190 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Stephan J. Bertrand, commissaire

Pour la plaignante:
Elle-même

Pour les défendeurs:
Helen Nowak, Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire entendue à Winnipeg (Manitoba),
du 8 au 10 mars 2011.

I. Plainte devant la Commission

1 Le 23 mars 2010, Lise Suzanne Jutras Otto (la «plaignante ») a déposé une plainte en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la «Loi»), dans laquelle elle allègue que Raymond Brossard et AlexKozubal (les «défendeurs»), deux représentants de l’Alliance de la Fonction publique du Canada (l’ «AFPC»), l’agent négociateur de la plaignante, ont agi de manière arbitraire lorsqu’ils ont omis de transmettre son grief de harcèlement au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs et de traiter un grief portant sur son renvoi en cours de stage. Bien que le formulaire de plainte fasse état officiellement d’un seul grief daté du 14 juillet 2009, il ressort de la preuve présentée à l’audience que ce grief comprendrait, à juste titre ou non, tant le grief de harcèlement que le grief concernant le renvoi en cours de stage de la plaignante.

2 L’alinéa 190(1)g) de la Loi se lit comme suit :

190.(1) La Commission instruit toute plainte dont elle est saisie et selon laquelle:

[…]

g) l’employeur, l’organisation syndicale ou toute personne s’est livré à une pratique déloyale au sens de l’article 185.

L’article 185 de la Loi définit une pratique déloyale comme étant tout ce qui est interdit par les paragraphes 186(1) et (2), les articles 187 et 188, et le paragraphe 189(1) de la Loi.

3 La disposition particulière de la Loi visée par l’article 185 et se rapportant à la plainte en l’instance est l’article 187; il est libellé comme suit :

187. Il est interdit à l’organisation syndicale, ainsi qu’à ses dirigeants et représentants, d’agir de manière arbitraire ou discriminatoire ou de mauvaise foi en matière de représentation de tout fonctionnaire qui fait partie de l’unité dont elle est l’agent négociateur.

Cette disposition a été adoptée afin de s’assurer que les organisations syndicales soient tenues à un devoir de représentation équitable, un devoir dont ne se seraient pas acquittés les défendeurs, selon la plaignante.

4 Selon la plaignante, la conduite des défendeurs constitue un manque à leur devoir de représentation équitable pour lequel elle réclame un dédommagement de nature financière. Les défendeurs ont nié avoir contrevenu à l’article 187 de la Loi. De plus, environ une semaine avant l’audience, ils ont soulevé une objection selon laquelle la plainte était hors délai.

II. Audience

5 Après avoir témoigné pendant une trentaine de minutes, la plaignante a demandé l’exclusion des témoins des défendeurs, au motif qu’elle entendait présenter des preuves litigieuses. Le représentant des défendeurs ne s’est pas opposé à cette demande, et j’y ai acquiescé. Pendant la pause du midi, j’ai constaté que le formulaire de plainte ne mentionnait que les deux représentants, messieurs Brossard et Kozubal, à titre de défendeurs, alors que la réponse des défendeurs faisait plutôt mention de l’AFPC à titre de défendeur. J’ai alors suspendu et reporté l’audience au lendemain afin de donner l’occasion au représentant des défendeurs de leur faire un compte rendu du témoignage entendu en matinée, constitué d’environ une trentaine de minutes de renseignements contextuels de la part de la plaignante, et pour lui donner l’occasion d’obtenir leur permission afin que l’audience se poursuive. Le lendemain, on m’a informé que les deux défendeurs avaient reçu un compte rendu en règle et qu’ils consentaient à ce que l’audience se poursuive.

A. Résumé de la preuve

6 Lors de l’audience, j’ai entendu le témoignage de la plaignante et des défendeurs.

7 La plaignante a été embauchée au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (AINC), le 10 novembre 2008, à titre d’agente de soutien au processus d’évaluation indépendant (PEI) du Secrétariat d’adjudication des pensionnats indiens (SAPI), un poste classifié au niveau PM-3. La plaignante, bien qu’elle ne soit pas une néophyte dans la fonction publique fédérale (elle a travaillé pour divers ministères par le passé), avait quitté la fonction publique pour travailler dans le secteur privé et était donc considérée comme une candidate de l’extérieur lorsqu’elle s’est jointe à AINC. Comme c’est le cas pour toutes les personnes nouvellement nommées à la fonction publique, la plaignante était assujettie à une période probatoire d’une année.

8 La plaignante a affirmé qu’elle avait remarqué des signes précurseurs de ce qu’elle percevait comme étant du harcèlement de la part de collègues de travail ainsi que d’un superviseur, et qu’elle en avait fait part à son gestionnaire sectoriel en janvier 2009. Selon les dires de la plaignante, elle devait souvent encaisser des commentaires peu aimables ayant trait à ses origines canadiennes françaises. Toutefois, je remarque qu’il y a eu peu, voire aucune, preuve indépendante produite au soutien de ces allégations.

9 Les documents produits par la plaignante indiquent qu’AINC avait fait état à plus d’une occasion de ses préoccupations au sujet de son comportement et de son rendement au travail. Ces préoccupations liées au travail auraient notamment été l’objet de discussions lors de réunions entre la plaignante et son gestionnaire sectoriel qui ont eu lieu le 23 janvier et les 5 et 26 février 2009.

10 Au début du mois de mai 2009, le superviseur de la plaignante l’a avisé que certaines tâches et fonctions ne feraient plus partie de ses attributions et qu’il en serait ainsi jusqu’à ce qu’elle puisse rencontrer le directeur intérimaire de la Gestion des services à la clientèle. Le 5 mai 2009, la plaignante a envoyé un courriel à M.Brossard, un agent des relations de travail attaché à l’Élément national de l’AFPC, dont les bureaux sont à Ottawa, afin de le mettre au courant de cette situation et lui demander qu’un représentant syndical soit présent à la rencontre prévue avec le directeur intérimaire. Durant son contre-interrogatoire, la plaignante a confirmé que c’était effectivement la première fois qu’elle communiquait avec son agent négociateur.

11 M. Brossard lui a répondu en l’informant qu’il demanderait à M.Kozubal, un vice-président régional dont le bureau était situé dans le même édifice que celui de la plaignante, à Winnipeg, de l’assister à cet égard. M. Kozubal n’avait jamais rencontré la plaignante auparavant et n’était pas au courant des activités du SAPI, une initiative relativement nouvelle à cette époque. Selon M.Brossard, le fait que M.Kozubal ait accepté d’assister la plaignante dans ses démarches signifiait que le rôle de M.Brossard se limiterait à fournir des conseils complémentaires par la suite, au besoin. Pour reprendre les propres mots de M.Brossard, ce dernier avait [traduction] «renvoyé la balle» à M.Kozubal et ne s’était jamais vraiment impliqué dans la représentation de la plaignante; malheureusement, nous en avons eu la preuve ultérieurement.

12 Bien qu’on l’ait informée que M. Kozubal n’était pas bilingue, la plaignante ne s’est pas opposée à sa représentation dans le cadre de la rencontre avec le directeur intérimaire. Elle a toutefois mentionné à M.Brossard qu’elle préfèrerait bénéficier des services d’un représentant bilingue dans l’éventualité où un grief serait déposé, étant donné que bon nombre des documents ayant trait à son travail étaient rédigés en français.

13 Le ou vers le 6 mai 2009, la plaignante a fourni à M. Kozubal ce qu’elle a qualifié d’une épaisse pile de documents, notamment de la correspondance et des notes de conversations avec divers représentants d’AINC, ainsi que d’autres documents. M.Kozubal a indiqué qu’il avait pris les documents avec lui afin de les étudier et qu’il les avait remis à la plaignante le lendemain. Bien qu’elle ait produit en preuve plusieurs documents durant l’audience, elle a choisi de ne pas déposer en preuve toute la pile de documents qu’elle avait remis à M.Kozubal, en particulier les notes rendant compte des entretiens qu’elle avait eus avec des représentants d’AINC.

14 La plaignante a rencontré M.Kozubal pour la première fois le 11 mai 2009. Elle a discuté avec lui de la question du retrait de certaines attributions de son poste et l’a informé de la question du harcèlement dont elle aurait fait l’objet de la part de son superviseur. Selon M. Kozubal, la principale question à régler était celle du rendement au travail de la plaignante, mais il a affirmé avoir néanmoins soulevé la question du harcèlement lors de sa rencontre avec son superviseur. Cette réunion avait eu lieu à l’instigation de M. Kozubal parce qu’il voulait mieux saisir les rôles et responsabilités des agents de soutien au processus d’évaluation indépendant (PEI) et du SAPI en général. Peu après cette rencontre, il a été convenu qu’en raison du fait que la prochaine réunion de la plaignante avec le directeur intérimaire porterait sur la récente évaluation du rendement de la plaignante et non sur des mesures disciplinaires, M.Kozubal n’y assisterait pas, mais qu’il serait disponible dans l’éventualité où la réunion se transformerait en processus disciplinaire. À la suggestion de M.Kozubal, avant cette réunion, la plaignante a demandé une copie de son évaluation du rendement, mais elle ne l’a pas obtenu.

15 La réunion avec le directeur intérimaire a eu lieu le 27 mai 2009. Au cours de cette réunion, le directeur a essentiellement informé la plaignante qu’elle ne répondait pas aux exigences de son poste et que son rendement était insatisfaisant à plusieurs égards. Tous ces éléments ont été consignés dans une lettre datée du 27 mai 2009 que le directeur intérimaire a remise à la plaignante, dans laquelle on avise officiellement cette dernière que si elle n’apportait pas les correctifs nécessaires afin de régler les problèmes relevés quant à son rendement au travail, elle pourrait être renvoyée en cours de stage. Le directeur intérimaire l’a également informée à cette occasion qu’elle n’effectuerait pas la totalité des tâches et des attributions de son poste avant d’avoir complété de la formation additionnelle, dont certains éléments avaient déjà été complétés, et que l’on s’attendait à ce qu’elle travaille en étroite collaboration avec son superviseur.

16 Peu après cette réunion, la plaignante a tenté de rencontrer M. Kozubal. Elle lui a transmis une copie de la lettre du directeur intérimaire, en plus d’un courriel qu’elle avait récemment reçu de son superviseur à titre de preuve supplémentaire du harcèlement dont elle faisait l’objet. La plaignante a affirmé qu’elle avait demandé des conseils et des commentaires de M. Kozubal à ce sujet, mais que ses demandes étaient restées sans réponse.

17 Selon la plaignante, les rapports professionnels avec son superviseur se sont détériorés et cela commençait à avoir des répercussions sur sa santé. La plaignante a affirmé qu’elle a dû prendre un congé de maladie en raison de stress au mois de juin 2009. En outre, elle estimait qu’elle n’avait plus le choix de déposer un grief contre son superviseur. Comme elle n’avait obtenu aucune réponse ni soutien de M.Kozubal à cette fin, elle a communiqué avec M.Brossard. Ce dernier a témoigné qu’il était en congé et en voyage pour des activités syndicales et non-syndicales à l’époque. Pendant ce temps, AINC tentait d’organiser une rencontre avec la plaignante pour examiner avec elle les modalités d’un plan d’action.

18 Le 14 juillet 2009, avec l’aide et le soutien de M. Kozubal, la plaignante a déposé un grief dans lequel elle réclame un milieu de travail sans harcèlement. Bien que le grief indique que des allégations seraient formulées par la suite, il n’y en a pas eu. Laplaignante a affirmé qu’aucune demande ne lui avait été faite à cet égard de la part d’AINC ou de son agent négociateur. Toutefois, un courriel de M. Brossard daté du 16 juillet 2009 faisait référence à la nécessité de rédiger des allégations détaillées au soutien du grief. Les défendeurs n’ont plus fait état de telles allégations avant le mois de juin 2010. M.Brossard a indiqué qu’il n’avait jamais reçu d’allégations à cet égard et qu’il incombait à plaignante de les communiquer directement àAINC.

19 Selon la plaignante, M. Kozubal ne s’est jamais montré intéressé à discuter avec elle du grief de harcèlement. M.Kozubal a affirmé que, comme l’essentiel de la documentation était en français et qu’elle se rapportait à l’utilisation du français dans le milieu de travail, on n’aurait pas dû s’attendre à ce qu’il s’occupe de ce grief puisqu’il ne parlait pas français. Il a néanmoins aidé la plaignante à préparer le formulaire de grief, veillé à ce qu’il soit présenté aux personnes pertinentes et qu’il en soit accusé réception.

20 Selon M. Kozubal, il était difficile d’établir quel élément de l’AFPC devait prendre en charge le grief de harcèlement en raison de la relation inusitée existant entre AINC et le SAPI. M.Kozubal a témoigné qu’il n’était pas certain si cela devait incomber à l’Élément régional ou à l’Élément national de l’AFPC, mais qu’après en avoir discuté avec M. Brossard, il avait compris que ce serait l’Élément national, situé à Ottawa, qui s’en occuperait.

21 M. Kozubal a en outre souligné qu’il se concentrait sur la résolution de la question du rendement de la plaignante et que, une fois cette question réglée, la plaignante aurait alors pu poursuivre le dossier concernant la question du harcèlement. Toujours selon M. Kozubal, comme un grief de harcèlement prend un certain temps à se régler et que celui dont il est question n’aurait certainement pas été résolu avant la fin de son stage, l’objectif principal était tout d’abord de s’assurer du maintien en poste de la plaignante. Il estimait qu’il était possible qu’AINC envisage le renvoi de la plaignante en cours de stage et qu’il y avait donc lieu de se concentrer tout d’abord sur la question du rendement de la plaignante plutôt que sur celle du harcèlement. Cependant, lors de son contre-interrogatoire, il a admis qu’il n’avait effectivement pas songé à informer la plaignante que, selon lui, M.Brossard s’occuperait du grief de harcèlement et que lui-même ne s’impliquerait pas dans ce volet du dossier.

22 Lors de son témoignage, M. Brossard a indiqué qu’il croyait que M.Kozubal s’occupait du grief de harcèlement. Il n’a pas, par ailleurs, communiqué cette interprétation à la plaignante.

23 Peu après le dépôt du grief de harcèlement, la plaignante a été convoqué par son superviseur à une autre rencontre afin de discuter de l’utilisation inappropriée, par la plaignante, d’une enregistreuse lors d’une conversation qu’il a eue avec elle. Cette rencontre a aussitôt été suivie d’une lettre de réprobation de son superviseur datée du 17 juillet 2009. La plaignante n’a pas nié qu’elle avait agi comme tel dans le but de faire cesser le harcèlement à son égard de la part de son superviseur. M.Kozubal n’a pas approuvé ce geste de la plaignante. D’ailleurs, peu après l’incident, il a expressément communiqué sa désapprobation à cet égard tant à la plaignante qu’à son superviseur lors d’une conférence téléphonique qui a eu lieu le 23juillet 2009. Cette réunion avait pour but d’aborder la lettre du 17 juillet 2009 et la réaction supposément inappropriée de la plaignante à cet égard. M.Kozubal y a participé car il estimait que la convocation à cette réunion avait une connotation disciplinaire. Il a décrit la réunion comme étant désagréable, et que l’animosité existant entre la plaignante et son superviseur y avait été mis en relief.

24 La plaignante était en vacances du 24 juillet au 10 août 2009. À son retour, elle a été convoquée de nouveau à une réunion avec son superviseur afin de revoir son évaluation du rendement pour la période du 23juin au 22juillet2009. La plaignante a transmis l’évaluation du rendement, qui caractérisait son rendement comme étant généralement insatisfaisant, à M.Brossard ainsi qu’à M.Kozubal.

25 La plaignante a affirmé que son superviseur lui avait par la suite communiqué un nouveau plan d’action destiné à l’aider à améliorer son rendement au travail pour la période d’évaluation du 11 août au 10 septembre 2009. À cette occasion, son superviseur l’a avisée par écrit que le défaut d’améliorer de manière significative son rendement pourrait entrainer un renvoi en cours de stage.

26 Lors d’une brève réunion avec M.Kozubal le 14août2009, il a été question d’un nouveau plan d’action et d’autres échanges entre la plaignante et son superviseur. Durant cette même réunion, la plaignante a passé en revue avec M.Kozubal son évaluation du rendement, et lui a signalé, entre autres, que cette évaluation ne correspondait pas à la réalité de son rendement au travail. Durant son témoignage, la plaignante a affirmé qu’elle voulait, par la même occasion, aborder avec M.Kozubal la question de son grief de harcèlement mais que ce dernier lui disait qu’il préférait se concentrer sur la question de son rendement au travail et des améliorations pouvant être apportées par la plaignante à ce chapitre. Or, d’après la plaignante, la question du rendement n’était qu’un paravent destiné à balayer sous le tapis la question du harcèlement. Elle a affirmé qu’elle s’était toujours attendue à ce que les défendeurs en fassent davantage au sujet de son grief de harcèlement, ce qu’ils n’ont pas fait.

27 Le 20 août 2009, alors qu’elle était à la maison en congé de maladie, la plaignante a reçu un appel de son superviseur; elle en a été offusquée. Le 24 août 2009, elle a écrit une lettre de protestation à cet égard à son superviseur. Elle a ensuite été convoquée à une autre rencontre avec son superviseur le 27août2009, au cours de laquelle le superviseur de la plaignante lui a donné l’occasion de s’expliquer au sujet du ton et de la teneur de cette lettre. La plaignante était encore en congé de maladie au moment de cette réunion. M.Kozubal était présent à la rencontre afin d’assister la plaignante. Il a décrit le ton de la plaignante et de son superviseur comme étant très acrimonieux, et a souligné qu’il s’était senti plutôt mal à l’aise durant toute la réunion. Après la réunion, la plaignante a été informée qu’elle devait rester en congé avec solde durant la semaine suivante, soit du 31 août 2009 au 4septembre2009, au moins. En même temps, le 27août 2009, une lettre de réprimande a été remise à la plaignante relativement à l’incident qui avait mené à la lettre de réprobation datée du 17 juillet 2009.

28 Le 3 septembre 2009, la plaignante a de nouveau été convoquée à une rencontre avec son superviseur, soit le lendemain. Cette rencontre sera sa dernière avec son superviseur. M.Kozubal était encore une fois présent. Lors de cette réunion, la plaignante s’est vue remettre une lettre l’informant qu’elle était renvoyée en cours de stage, mettant ainsi fin à son emploi à AINC. Le motif invoqué pour son renvoi était son rendement insatisfaisant et le fait qu’elle ne possédait pas les aptitudes requises pour le poste. On l’a informée de son droit de déposer un grief si elle estimait que son renvoi en cours de stage n’était pas justifié.

29 À la suite de la réunion du 3 septembre 2009, la plaignante a rencontré M.Kozubal pour discuter de ce qui venait de se passer. Elle était perturbée et estimait que la situation ne se serait pas détériorée à ce point s’il avait donné suite à son grief de harcèlement. La plaignante a affirmé qu’à ce moment, M.Kozubal l’avait rassurée en lui disant que l’AFPC pouvait maintenant se concentrer sur son grief. Or, le seul grief que la plaignante avait déposé jusqu’alors était le grief de harcèlement.

30 Lorsqu’on lui a demandé pourquoi elle n’avait pas déposé de grief au sujet de son renvoi en cours de stage, la plaignante a affirmé que M. Kozubal lui avait dit que le grief de harcèlement qu’elle avait déposé le 14juillet2009, engloberait également son renvoi en cours de stage. M. Kozubal lui a aussi dit que toute l’affaire serait fort probablement prise en charge par « Ottawa », faisant alors référence à l’Élément national de l’AFPC, le bureau d’attache de M. Brossard. M.Kozubal n’a pas contredit ces faits lors de son témoignage. La plaignante avait déjà dit à M.Brossard qu’elle ne voulait pas être représentée par M.Kozubal parce qu’il n’était pas bilingue, elle s’attendait donc à ce que M.Brossard la représente. Toutefois, elle continuait d’écrire à M. Kozubal ou à lui envoyer une copie conforme de la correspondance, puisqu’il était au courant de son dossier.

31 Dans un courriel daté du 8 septembre 2009, M. Brossard a demandé à M.Kozubal de [traduction] « […] voir si le grief pouvait être entendu au deuxième palier ». Il est difficile de savoir à quel grief il faisait référence, mais il ressort de la preuve que le grief de harcèlement était le seul grief existant déposé par la plaignante à l’époque. Lors de son témoignage à cet égard, M.Brossard ne se souvenait pas si M.Kozubal avait donné suite ou non à cette demande.

32 Lorsqu’on lui a demandé s’il avait effectivement renvoyé le grief au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, M.Kozubal a indiqué qu’il ne l’avait pas fait, et qu’il n’en avait pas non plus informé M. Brossard ou la plaignante. Il a également confirmé qu’il ne s’était pas informé auprès d’AINC pour connaître l’état du dossier de grief de la plaignante, croyant que c’était M.Brossard qui s’en occupait. M.Kozubal a de plus confirmé ne pas avoir pris contact avec M. Brossard afin de vérifier s’il avait raison de penser que ce dernier s’occupait du dossier. M.Kozubal a admis que cela avait été une erreur de sa part mais qu’il n’entretenait aucune mauvaise volonté envers la plaignante. Il a qualifié ses actions ou son inaction comme étant simplement [traduction] « un manque de communication » de sa part.

33 Le 23 septembre 2009, la plaignante a écrit aux deux défendeurs pour les informer à propos de deux demandes d’accès à l’information qu’elle avait présentées et leur demander des conseils sur la marche à suivre, notamment si elle devait déposer un grief distinct portant sur son renvoi en cours de stage. La plaignante a reçu des courriels automatisés d’absence du bureau en provenance de la messagerie électronique des deux défendeurs, celui de M.Kozubal mentionnant qu’il serait absent du 8 au 24 septembre 2009, et celui de M. Brossard précisant que ce dernier était absent jusqu’au 5octobre2009. À leur retour respectif, ni l’un ni l’autre des défendeurs n’avait répondu au courriel que la plaignante leur avait envoyé le 23septembre2009.

34 À l’époque, la plaignante avait informé les défendeurs de ses problèmes de santé et qu’elle comptait beaucoup sur eux pour obtenir de l’assistance et des conseils sur la marche à suivre. Il convient toutefois de noter qu’aucune preuve médicale n’a été produite quant aux problèmes de santé allégués par la plaignante.

35 Les 26 et 28 octobre 2009, la plaignante a fait un suivi, par courriel, auprès des deux défendeurs, sans obtenir davantage de réponse de leur part. M.Kozubal a affirmé qu’il avait vu les courriels de la plaignante mais qu’il n’y avait pas répondu puisqu’il était absent lorsqu’ils lui ont été envoyés et qu’à son retour il a présumé que M. Brossard y avait déjà répondu. Quant à M.Brossard, il ne pouvait pas se rappeler précisément s’il y avait ou non répondu, tout en mentionnant que s’il n’y avait pas répondu, ce qui semble de toute évidence être le cas, il [traduction] « a sans doute présumé que [M.Kozubal] s’en était occupé ». En contre-interrogatoire, M.Brossard a indiqué qu’il croyait que M. Kozubal s’occupait de toutes les questions ayant trait à la plaignante et a qualifié de [traduction] « simple manque de communication » toute interprétation erronée à cet égard qui aurait pu s’être produite entre lui-même et M.Kozubal. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait vérifié auprès de M.Kozubal si ce dernier avait répondu à la plaignante et s’il s’occupait de son grief, il a affirmé ne pas s’en souvenir.

36 En contre-interrogatoire, la plaignante a admis qu’elle n’avait pas lu la convention collective pertinente et qu’elle n’était pas au courant qu’elle aurait pu déposer elle-même un grief visant son renvoi en cours de stage, et ce, sans l’intervention de son agent négociateur. De toute façon, selon la plaignante cela n’était pas nécessaire, puisqu’on lui avait laissé entendre que le grief de harcèlement englobait toutes les questions en litige, y compris son renvoi en cours de stage. M.Kozubal n’a pas réfuté cette allégation lors de son témoignage à l’audience.

37 Le 17 décembre 2009, la plaignante a laissé un message dans la boîte vocale de chacun des défendeurs, les informant qu’elle avait reçu des documents à la suite de sa demande d’accès à l’information. Selon ses dires, ni l’un ni l’autre ne l’ont rappelée. M.Brossard s’est souvenu qu’il était en congé à cette époque et a dit avoir pris connaissance du message vocal de la plaignante à son retour en janvier 2010, mais ne se souvenait pas s’il avait rappelé la plaignante. Il a ajouté ne pas se souvenir de quelque communication qu’il ait pu avoir avec la plaignante jusqu’en juin 2010.

38 La plaignante a affirmé qu’elle avait passé une bonne partie des mois de janvier et de février 2010 à examiner les documents qui se trouvaient dans les boîtes qui lui avaient été envoyées à la suite de ses deux demandes d’accès à l’information. Le 10mars 2010, elle a envoyé de nouveau un courriel aux deux défendeurs, leur demandant de lui expliquer pourquoi son grief, qui selon elle regroupait la question du harcèlement et celle de son renvoi en cours de stage, ne progressait pas, et pourquoi ils ne lui retournaient pas ses appels et ne répondaient pas à ses courriels. Elle n’a jamais obtenu de réponse. Le 23 mars 2010, elle a déposé la présente plainte.

39 La plaignante n’a reçu aucune nouvelle de ni l’un ni l’autre des défendeurs jusqu’au 21 juin 2010, date à laquelle M. Brossard lui a écrit pour faire un suivi relativement au grief de harcèlement et lui demander de lui fournir des allégations détaillées au sujet de la nature de ses doléances. Il a joint à cette correspondance une lettre reçue d’AINC le 14 juin 2010, dans laquelle ces informations lui étaient demandées. Selon M. Brossard, il incombait à AINC d’obtenir la liste détaillée des allégations directement auprès de la plaignante. De plus, selon M. Brossard, il incombait à cette dernière de fournir ces informations directement à AINC. Néanmoins, je constate que la lettre du 14juin 2010 d’AINC était adressée à M.Brossard, sans mention d’une copie conforme à la plaignante.

40 Contrairement aux allégations soulevées dans la réponse des défendeurs en date du 12mai2010, M.Brossard a précisé lors de son témoignage qu’il n’avait jamais indiqué à la plaignante que lui-même ou l’AFPC ne voulait pas la représenter en ce qui concerne le grief de harcèlement ou qu’il n’y avait aucun motif pour donner suite à son grief. En fait, il a affirmé qu’aucune décision n’avait effectivement été prise en ce qui concerne tant le grief de harcèlement que la question de son renvoi en cours de stage.

B. Résumé de l’argumentation

1. Pour la plaignante

41 Quant à l’objection portant sur le respect des délais, la plaignante a expliqué pourquoi elle avait inscrit deux dates différentes dans le formulaire de plainte, soit le 17 décembre 2009 et le 3 mars 2010, celles-ci étant les dates auxquelles elle a pris connaissance d’une action, d’une omission ou d’une autre matière sur laquelle se fonde sa plainte. Elle a précisé que ces deux dates correspondaient à ses deux dernières tentatives d’obtenir une réponse quelconque de la part des défendeurs, soit par téléphone le 17 décembre 2009 et par courriel le 3 mars 2010. Elle en est arrivée à la conclusion, peu après le 3 mars 2010, que les défendeurs ne s’acquittaient pas de leurs devoirs et que leur comportement était devenu tout à fait inacceptable. Selon la plaignante, cette explication fait en sorte que sa plainte a effectivement été présentée à l’intérieur des délais impartis.

42 La plaignante soutient que les deux défendeurs ont agi de manière arbitraire en omettant de s’occuper de son grief de harcèlement et en omettant de protéger ses intérêts par le dépôt d’un grief distinct pour contester son renvoi en cours de stage.

43 Selon la plaignante, toute référence à son grief après le 4 septembre 2009 doit être considérée comme visant à la fois les deux questions, celle du harcèlement et celle du renvoi en cours de stage, et ce, pour les deux raisons suivantes: tout d’abord, en raison de l’affirmation que lui a faite M. Kozubal selon laquelle son grief de harcèlement comprenait également la question de son renvoi en cours de stage; deuxièmement, en raison du défaut par les défendeurs de répondre à ses demandes cherchant à savoir si elle devait déposer un grief distinct au sujet de son renvoi en cours de stage.

44 Bien que la plaignante se soit sentie rassurée par le fait que rien ne serait laissé au hasard et que ses intérêts seraient dûment protégés, étant donné qu’elle avait deux représentants syndicaux à sa disposition, elle déclare que c’est tout le contraire qui s’est produit.

45 La plaignante déclare en outre qu’elle n’était pas au courant de la procédure de règlement de grief et qu’elle comptait essentiellement sur les défendeurs à cet égard, ce qui explique notamment pourquoi elle avait confié à M.Kozubal une quantité aussi importante de documents et pourquoi elle avait tenté, en décembre 2009, de faire revoir, par les défendeurs, la documentation reçue à l’aide de l’accès à l’information. Elle souligne qu’elle ne savait pas qu’elle pouvait donner suite elle-même aux griefs.

46 Selon la plaignante, l’affirmation des défendeurs voulant que leur comportement dans ce dossier ne constituait ni plus ni moins qu’un manque de communication n’est pas un argument valable. La plaignante soutient qu’elle a toujours eu l’intention de poursuivre les démarches relatives à son grief de harcèlement et de contester son renvoi en cours de stage, et que ses nombreux courriels et appels téléphoniques aux défendeurs sont la preuve manifeste de cette intention.

47 La plaignante déclare que, si les défendeurs avaient véritablement eu l’intention de représenter ses intérêts dans le grief de harcèlement, ils auraient répondu à ses nombreux courriels et lui auraient demandé de leur communiquer ses allégations, mais ils ne l’ont pas fait. Aucun des défendeurs ni même AINC ne lui ont demandé de fournir une liste des allégations avant le mois de juin 2010. La plaignante soutient qu’elle avait été surprise de constater que rien n’avait été fait jusqu’alors, tant au sujet de son grief de harcèlement qu’au sujet de son renvoi en cours de stage; elle estimait qu’il était alors trop tard pour exiger un milieu de travail exempt de harcèlement, puisqu’elle ne travaillait plus à AINC et qu’elle avait dépassé le délai pour contester son renvoi en cours de stage.

48 Selon la plaignante, le grief de harcèlement avait été préparé avec le soutien de M.Kozubal et celui-ci l’avait présenté à AINC. Le fait qu’AINC décide soudainement, près d’un an après le dépôt de son grief, d’écrire à M. Brossard pour lui demander une liste de ses allégations constitue, aux yeux de la plaignante, une manœuvre visant à camoufler le fait que les défendeurs n’avaient rien fait pour faire progresser le grief pendant une année entière et à leur donner l’occasion de montrer qu’ils s’occupaient du dossier.

49 La plaignante est d’avis que les défendeurs ont manifestement fait preuve de négligence dans le cadre de leur représentation et du traitement qu’ils lui ont réservé et qu’ils ont sciemment voulu la laisser à elle-même.

2. Pour les défendeurs

50 Pour ce qui est de l’objection portant sur le respect des délais, la représentante des défendeurs n’a offert que très peu d’arguments à ce sujet. En bref, elle a déclaré que la plaignante devait avoir eu connaissance d’une action, d’une omission ou d’une autre matière sur laquelle se fonde sa plainte peu après le 4septembre 2009, soit la date de son renvoi en cours de stage. Elle ajoute que le fait que personne n’ait répondu à ses courriels ou ses appels téléphoniques en septembre, en octobre ni en novembre 2009 aurait dû l’inciter à présenter une plainte à ce moment-là. Or, la plainte a été produite le 23 mars 2010, ce qui est, selon les défendeurs, nettement au-delà des délais impartis à cet égard. Je ne vois pas vraiment quel événement particulier survenu en novembre 2009 aurait pu déclencher une réaction de la part de la plaignante, alors que ses tentatives de communication en décembre 2009 et mars 2010 étaient aussi restées sans réponse de la part des défendeurs.

51 Les défendeurs ont soutenu que le traitement de la question portant sur le rendement de la plaignante était plus important que le traitement du grief de harcèlement qui se serait prolongé au-delà de la période de stage de la plaignante et que, de toute façon, la plaignante n’avait fourni aucune allégation détaillée, sinon peu, au soutien de son grief de harcèlement. Les défendeurs ont aussi soutenu qu’ils n’avaient jamais refusé de représenter la plaignante dans le dossier de son grief de harcèlement, et que ni l’un ni l’autre n’avait pris une telle décision. Ils ont plutôt maintenu que leur inaction ou leurs omissions étaient attribuables à un manque de communication de leur part. Ils ont également fait valoir que rien n’empêchait la plaignante de continuer par elle-même les démarches relativement à son grief de harcèlement ou de déposer un grief contestant son renvoi en cours de stage sans le soutien de son agent négociateur. Bien que je ne suis pas certain de ce que l’on entend ici par le fait de continuer les démarches relativement à un grief, je constate que la plaignante ne pouvait pas, en vertu du paragraphe 208(4) de la Loi, présenter par elle-même son grief de harcèlement sans obtenir l’approbation préalable de son agent négociateur et être représentée par celui-ci.

52 En réponse à l’affirmation de la plaignante selon laquelle elle n’était pas au courant de la procédure de règlement des griefs, les défendeurs ont avancé que la plaignante avait auparavant travaillé au sein de la fonction publique fédérale pendant environ 22 ans.

53 Les défendeurs ont soutenu que la plaignante n’avait pas établi l’existence d’une intention malicieuse, d’un propos délibéré ou de la mauvaise foi de leur part. L’un et l’autre des défendeurs ont affirmé avoir présumé que c’était l’autre qui s’occupait du grief de la plaignante. Selon les défendeurs, la seule question que je dois trancher consiste à déterminer si les défendeurs ont agi de manière arbitraire, et le fait qu’aucune décision quant à la représentation de la plaignante n’ait été communiquée à cette dernière devrait m’empêcher d’arriver à un tel constat. Ils ont soutenu en outre que la relation entre AINC et le SAPI pouvait susciter une certaine confusion quant à la structure interne appropriée de l’AFPC devant prendre en charge un tel dossier, ce qui pourrait expliquer le manque de communication entre les deux défendeurs.

54 Les défendeurs ont affirmé que les erreurs ou le manque de jugement ne constituaient pas en soi une faute lourde ou une conduite arbitraire. À cet égard, ils ont porté à mon attention l’extrait suivant de la décision rendue dans Alam v. Power Workers’ Union - CUPE Local 1000, [1994] OLRB Rep. juin 627, au paragraphe 69, lequel est libellé en partie comme suit :

[Traduction]

69.  Ceci ne signifie pas que l’article 69 ne s’appliquerait pas pour autant à la procédure de grief. Toutefois, afin de conclure à une violation de l’article 69, il faut que l’action du syndicat puisse être qualifiée comme étant :

a) « ARBITRAIRE » - c’est-à-dire, flagrante, capricieuse ou manifestement négligente;

b) « DISCRIMINATOIRE » - c’est-à-dire, fondée sur une distinction malicieuse et injustifiée en matière de relations de travail; ou

c) « DE MAUVAISE FOI » - c’est-à-dire, inspirée par de la mauvaise volonté, la malice, l’hostilité, ou la malhonnêteté.

[…]

55 Les défendeurs soutiennent enfin que les représentants syndicaux ne sont pas tenus à la perfection, et que l’incompétence ne saurait constituer une faute grave. Au soutien de cette dernière prétention, ils me renvoient à United Steelworkers of Americav.Butt, 2002 NLCA 62.

III. Motifs

56 Les défendeurs ont soulevé à titre de question préliminaire le fait que la plainte était irrecevable et devait être sommairement rejetée du fait qu’elle n’avait pas été déposée dans les délais impartis au paragraphe 190(2) de la Loi, qui se lit comme suit :

190. (2) […] les plaintes prévues au paragraphe (1) doivent être présentées dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent la date à laquelle le plaignant a eu — ou, selon la Commission, aurait dû avoir — connaissance des mesures ou des circonstances y ayant donné lieu.

57 La plaignante a soutenu que ce n’est qu’en mars 2010, après une série de communications destinées aux défendeurs sur une période d’environ six mois, qu’elle a réalisé à quel point le comportement des défendeurs avait été inapproprié. Elle a expliqué à ma satisfaction le sens des réponses qu’elle avait inscrites à la partie 5 du formulaire de plainte (dans laquelle le plaignant ou la plaignante doit indiquer la date à laquelle il ou elle a eu connaissance des actions, des omissions ou de quelque autre circonstance sur laquelle la plainte est fondée), et son témoignage à cet égard n’a pas été réfuté de manière significative par les défendeurs.

58 Je suis par conséquent convaincu, selon la preuve devant moi, que c’est peu après le 10 mars 2010 que la plaignante a eu, ou aurait dû avoir, connaissance des actions, des omissions ou de quelque autre circonstance sur laquelle sa plainte est fondée, ce qui signifie que la plainte du 23 mars 2010 a été présentée dans les délais impartis. En outre, le courriel de la plaignante en date du 10 mars 2010 confirme le fait qu’elle ne reçoit pas les services de représentation qu’on lui avait promis. Jusqu’alors, la plaignante semblait avoir l’impression qu’elle bénéficierait éventuellement d’une représentation sous une forme ou une autre. Le témoignage de la plaignante à cet égard est à la fois crédible et convaincant.

59 Pour les motifs exposés ci-après, je conclus que la plaignante a démontré un manque de la part des défendeurs quant à leur devoir de représentation équitable à son égard et, partant, je conclus que la plainte doit être accueillie.

60 Tel qu’il a été statué par la Commission dans Ouellet c. Luce St-Georges et Alliance de la Fonction publique du Canada, 2009 CRTFP 107, le fardeau de la preuve dans une plainte alléguant une violation de l’article 190 de la Loi incombe à la plaignante.

61 Dans Halfacree c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2009 CRTFP 28, au paragraphe 17, la Commission a formulé le commentaire suivant au sujet du droit à la représentation syndicale, rejetant en outre l’idée qu’il puisse s’apparenter par ailleurs à un droit absolu :

[17]  La défenderesse, en tant qu’agent négociateur, a le droit de refuser de représenter un membre, et une plainte devant la Commission n’est pas un mécanisme d’appel contre un tel refus. La Commission ne va pas remettre en question la décision de l’agent négociateur. Le rôle de la Commission est de statuer sur le processus décisionnel de l’agent négociateur et non sur le bien-fondé de sa décision. […]

Comme il est affirmé dans Halfacree, le rôle de la Commission n’est pas de décider si la décision des défendeurs de représenter la plaignante était appropriée, convenable, bonne ou mauvaise, voire si la décision était fondée ou non. Le rôle de la Commission est plutôt de statuer si les défendeurs ont agi de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire dans le cadre du processus décisionnel en lien avec la question de la représentation.

62 Les agents négociateurs et leurs représentants jouissent d’un grand pouvoir discrétionnaire dans leur décision de représenter ou non un employé faisant partie de leur unité de négociation, mais ce pouvoir n’est pas absolu. La portée de cet pouvoir a notamment été circonscrite dans Guilde de la marine marchande du Canada c. Gagnon et autre, [1984] 1 R.C.S. 509, à la page 527. Dans cette décision, la Cour suprême du Canada a énoncé les principes sous-tendant l’obligation de la juste représentation comme suit :

[…]

3. Cette discrétion doit être exercée de bonne foi, de façon objective et honnête, après une étude sérieuse du grief et du dossier, tout en tenant compte de l’importance du grief et des conséquences pour le salarié, d’une part, et des intérêts légitimes du syndicat d’autre part.

4. La décision du syndicat ne doit pas être arbitraire, capricieuse, discriminatoire, ni abusive.

5. La représentation par le syndicat doit être juste, réelle et non pas seulement apparente, faite avec intégrité et compétence, sans négligence grave ou majeure, et sans hostilité envers le fonctionnaire.

[…]

63 Dans Savoury c. Guilde de la marine marchande du Canada, 2001 CRTFP 79, la Commission s’est exprimée en ces termes à ce propos, au paragraphe 126 :

[126] […] Lorsque l’arbitrage est envisagé, on doit reconnaître que le fonctionnaire n’a pas un droit absolu à l’arbitrage, car le syndicat jouit d’une discrétion appréciable dans la prise de cette décision, mais ce pouvoir discrétionnaire est limité par la gravité et les répercussions de la sanction disciplinaire sur le fonctionnaire. […]

64 Les plaintes visant le devoir de représentation équitable et la preuve requise pour établir une allégation de mauvaise foi ou d’action arbitraire ont fait l’objet de nombreuses décisions rendues par la Commission. Dans Ménard c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 95, la Commission relève certaines des décisions faisant jurisprudence en la matière :

[…]

[22]  Sur le terme arbitraire, la Cour suprême du Canada, dans Noël c. Société d’énergie de la Baie James, 2001 CSC 39, écrit au paragraphe 50 :

Se reliant étroitement, les concepts d’arbitraire et de négligence grave définissent la qualité de la représentation syndicale. L’élément de l’arbitraire signifie que, même sans intention de nuire, le syndicat ne saurait traiter la plainte d’un salarié de façon superficielle ou inattentive. Il doit faire enquête au sujet de celle-ci, examiner les faits pertinents ou obtenir les consultations indispensables, le cas échéant. […]

[23] […] Dans International Longshore and Wharehouse Union, Ship and Dock Foremen, section locale 514 c. Empire International Stevedores Ltd. et al., [2000] A.C.F. no 1929 (C.A.) (QL), la Cour d’appel fédérale, sur la question du caractère arbitraire d’une décision, écrit que, pour faire la preuve d’un manquement au devoir de représentation équitable, « […] le plaignant doit convaincre le Conseil que les investigations faites par le syndicat au sujet du grief étaient sommaires et superficielles ».

[…]

65 À l’été 2009, il est évident que les interactions entre la plaignante et son superviseur s’étaient détériorées au point de non retour, tel qu’il appert du ton de la correspondance déposée en preuve par les parties et du témoignage de M.Kozubal. Alors que le superviseur de la plaignante semblait estimer que le rendement de la plaignante était la principale problématique, la plaignante y voyait plutôt une problématique liée au harcèlement et à la discrimination.

66 Bien qu’elle ait demandé l’aide des défendeurs seulement en mai 2009, alors que certaines de ses attributions lui avaient été retirées, et même si à ce moment on se soit peu ou pas concentré sur le règlement de la question du harcèlement, cela ne signifie pas pour autant que le grief de harcèlement de la plaignante était sans fondement.

67 M. Kozubal a témoigné qu’il n’avait jamais été question, quant à lui, qu’il s’occupe du grief de harcèlement. Par ailleurs, aucune preuve n’a été produite pour démontrer qu’il ait clairement communiqué ce fait à la plaignante ou qu’il se soit assuré qu’une autre personne s’occupe de son dossier. Selon un courriel daté du 8septembre 2009 de M. Brossard à l’attention de M.Kozubal, M. Brossard aurait demandé à M. Kozubal de [traduction] « […] voir si le grief pouvait être entendu au deuxième palier ». Le seul grief déposé à l’époque était le grief de harcèlement. Lorsqu’on lui a demandé s’il avait effectivement renvoyé le grief au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, M.Kozubal a témoigné qu’il ne l’avait pas fait et qu’il n’avait pas non plus informé M.Brossard de sa décision de ne pas le faire. Il a aussi confirmé qu’il ne s’était pas enquis auprès d’AINC au sujet de l’état du grief, parce qu’il présumait que M. Brossard s’en occupait. Il a admis par ailleurs n’avoir jamais communiqué avec M.Brossard pour vérifier si celui-ci s’occupait du grief ou s’il avait répondu aux courriels de la plaignante. La plaignante n’avait pas à se soucier que ce soit l’Élément régional ou l’Élément national de l’AFPC qui soit l’instance responsable du traitement de son grief, et cet imbroglio ne devrait pas servir à minimiser la gravité des manques des défendeurs à l’égard de la plaignante.

68 M. Kozubal n’a pas tenu compte de la possibilité qu’il puisse y avoir un lien entre la question du rendement et celle du harcèlement, mettant en scène les deux mêmes acteurs et pourtant étroitement liées. Il a affirmé qu’il cherchait à protéger l’emploi de la plaignante, mais il n’a aucunement tenu compte du grief de harcèlement que la plaignante avait déposé contre son superviseur, la même personne qui évaluait son rendement et qui, ultimement, l’a congédiée. Bien qu’il ait décrit l’atmosphère de la réunion du 23 juillet 2009 comme étant plutôt désagréable, et que cela avait nettement mis en relief à ses yeux l’animosité existant entre la plaignante et son superviseur, il n’a pas pour autant jugé bon d’agir de manière à ce que le grief de harcèlement chemine d’une manière ou d’une autre.

69 La plaignante n’a pas prétendu que M. Kozubal avait omis de lui apporter son soutien en ce qui a trait à la question de son rendement, soit la question qui a mené à son renvoi en cours de stage. Les doléances formulées dans sa plainte portent plutôt sur le fait qu’il n’a rien fait pour faire progresser le grief de harcèlement à un moment où l’animosité entre la plaignante et son superviseur était pourtant évidente, qu’il n’a pas su voir le lien entre son grief de harcèlement et la question de son rendement, et qu’il n’a pas protégé ses intérêts lors de son renvoi en omettant de déposer un grief à cet égard, contrairement à ce qu’on lui a laissé croire.

70 Je perçois d’importantes failles dans l’argument des défendeurs selon lequel le traitement de la question du rendement de la plaignante était plus important que le traitement du grief de harcèlement qui se serait prolongé au-delà de la période de stage de la plaignante et que, de toute façon, la plaignante n’avait fourni aucune allégation détaillée, sinon très peu, au soutien de son grief de harcèlement. Tout d’abord, cela confirme que les défendeurs n’ont pas su déceler une connexion ou une relation potentielle entre la question du harcèlement et celle du rendement, bien que ces deux questions mettent en scène les mêmes protagonistes. Deuxièmement, cette stratégie fait fi du nombre considérable de documents que la plaignante a fourni à M.Kozubal en mai 2009, que ce dernier n’a pas nié avoir reçu et examiné, ainsi que les tentatives de la plaignante de remettre aux défendeurs les boîtes de documents qu’elle avait obtenues en décembre 2009 au moyen de demandes d’accès à l’information. Troisièmement, les défendeurs n’ont jamais informé la plaignante qu’il leur fallait un complément d’information afin d’analyser plus à fond ses chances de réussite, et ils ne lui ont jamais officiellement demandé de fournir des informations supplémentaires outre le conseil qu’on lui avait initialement donné de rédiger une liste des allégations en juillet 2009. Quatrièmement, bien que les défendeurs aient soutenu qu’ils voulaient se concentrer sur la question du rendement pour s’assurer du maintien en poste de la plaignante, ils ont tous deux rapidement abandonné après son renvoi en cours de stage.

71 L’argument des défendeurs selon lequel rien n’empêchait la plaignante de continuer son grief de harcèlement par elle-même ou de déposer un grief pour contester son renvoi en cours de stage sans le soutien de son agent négociateur, fait fi du fait que la Loi exige l’approbation et la représentation de l’agent négociateur pour le dépôt d’un grief de harcèlement, et du fait qu’on lui avait laissé croire que son grief de harcèlement adresserait en même temps la question de son renvoi en cours de stage. Les défendeurs ont laissé la plaignante à elle-même pendant neuf mois, ne réagissant que deux mois après la présentation de la plainte en l’instance, et ce, sans aborder la question de son renvoi en cours de stage.

72 Bien que les défendeurs ont soutenu que la plaignante avait travaillé au sein de la fonction publique pendant environ 22 ans et qu’elle devrait par conséquent être au courant de la procédure de règlement de grief, aucune preuve n’a été produite pour démontrer qu’elle avait déposé un grief par le passé ou qu’elle était effectivement au courant de ce processus. De toute façon, tel qu’il a été signalé précédemment, elle avait été portée à croire que son renvoi en cours de stage serait traité dans le cadre du grief de harcèlement. Par ailleurs, l’acceptation d’un tel argument aurait pour effet d’absoudre presque à chaque fois les agents négociateurs de leurs obligations lorsqu’ils traitent avec des fonctionnaires ayant des longs états de service, un résultat qui n’est certes pas celui visé par l’intention de la Loi.

73 Les deux défendeurs ont témoigné qu’ils n’avaient jamais manifesté quelque réticence à représenter la plaignante que ce soit dans le dossier du grief de harcèlement ou celui concernant le renvoi en cours de stage. Il n’en demeure pas moins qu’ils ont failli à la tâche de s’occuper de ces questions de manière diligente, ce qui a notamment fait en sorte que la question du harcèlement est devenue sans objet et que le renvoi en cours de stage n’a pas été contesté et que ce recours soit devenu hors délai. Rien ne me démontre que les défendeurs ont analysé ou étudié ces questions de quelque manière que ce soit. Les faits suggèrent plutôt qu’ils ont induit la plaignante en erreur et qu’ils ont omis de préciser si son grief de harcèlement pouvait ou non inclure la question de son renvoi en cours de stage. Ils ne lui sont pas revenus au sujet de ces deux questions. Ils ne l’ont pas informé du fait qu’elle aurait pu déposer un grief visant son renvoi en cours de stage sans leur soutien. Ils ne lui ont pas fourni de justification pour le fait qu’ils n’avaient pas continué les démarches relativement à son grief de harcèlement ni déposé un grief distinct pour contester son renvoi en cours de stage. Il n’y a pas eu de processus décisionnel. En somme, l’attitude des défendeurs envers la plaignante était tout à fait cavalière et irresponsable.

74 Le défaut des défendeurs de fournir des conseils à la plaignante et, à tout le moins, de tenter de protéger ses intérêts dans ces affaires constitue rien de moins que de la négligence grave, en particulier à la lumière de la gravité et des conséquences de leur inaction. Ils ont manqué à leurs obligations, et ce, malgré les nombreuses occasions d’assistance et en dépit du fait que la plaignante avait de toute évidence mis toute sa confiance dans les défendeurs.

75 Les défendeurs ont soutenu que la relation entre AINC et le SAPI pouvait susciter une certaine confusion quant à la structure interne appropriée de l’AFPC devant prendre en charge un tel dossier, ce qui pouvait expliquer le manque de communication entre les deux défendeurs. Il m’est difficile d’accepter un tel argument de la part de représentants de l’agent négociateur du secteur public le plus important au pays, qui possèdent une vaste expérience dans le domaine des relations de travail. Tout ce que cela exigeait c’était que l’un des deux communique avec l’autre, par téléphone ou par courriel, et de déterminer lequel s’occuperait de la plaignante et la représenterait dans ses démarches. Cela n’était pas trop demander à la lumière de l’importance des questions en cause dans cette affaire.

76 M. Kozubal a souvent affirmé que le principal objectif était de s’assurer du maintien en poste de la plaignantecar il entrevoyait la possibilité de son renvoi en cours de stage; or, quand cela s’est effectivement produit, il n’a rien fait pour s’y opposer ou pour tenter de sauvegarder l’emploi de la plaignante.

77 La représentante des défendeurs a présenté divers arguments au sujet du bien-fondé du grief de la plaignante, ou de son absence. Elle a similairement attaqué les fondements même d’une contestation éventuelle du renvoi en cours de stage de la plaignante. Or, la plaignante n’a pas demandé à la Commission de réviser l’exercice de la discrétion par l’agent négociateur quant à sa décision de la représenter ou non. Comme il a déjà été dit, un tel processus décisionnel n’a pas eu lieu. On l’a incitée à penser qu’elle bénéficiait de la représentation des défendeurs. La présente affaire en est une de négligence et d’omission de prendre les mesures qui s’imposaient afin d’analyser et d’étudier le bien-fondé d’un grief existant et d’un grief éventuel. Cette affaire en est une visant une situation dans laquelle les défendeurs n’ont pris aucune mesure utile, malgré les demandes d’aide répétées de la plaignante.

78 Il ne s’agit certainement pas d’une affaire dans laquelle les défendeurs auraient pris une décision éclairée de ne pas procéder au cheminement d’un grief après avoir étudié tous les faits pertinents, toute la preuve documentaire à leur disposition et tous les arguments juridiques pertinents. Il s’agit plutôt d’une affaire dans laquelle les défendeurs ont failli à leur tâche et n’ont pas pris les mesures nécessaires afin d’étudier minutieusement la preuve et de conseiller la plaignante en conséquence. Leur attitude cavalière envers les circonstances entourant les préoccupations de la plaignante était évidente durant leur témoignage. Bien qu’un agent négociateur ne soit pas tenu d’acheminer tous les dossiers vers le processus de grief, étant donné la grande latitude qui lui est laissée de décider s’il y a lieu de faire cheminer un dossier dans cette direction, il doit néanmoins étudier sérieusement le bien-fondé de chaque dossier avant de prendre une telle décision, au cas par cas.

79 Bien qu’il ne s’agisse pas ici d’une situation dans laquelle les défendeurs auraient agi de mauvaise foi ou avec hostilité envers la plaignante, il s’agit certes d’un cas de négligence, au point que cela doit être considéré comme étant un comportement arbitraire. Il appert donc que les défendeurs ont manqué à leur devoir de représentation équitable envers la plaignante tant au niveau de son grief de harcèlement que de son renvoi en cours de stage. Je ne peux tout simplement pas me résoudre à avaliser des actions ou des inactions qui ne sont pas fondées sur des considérations ayant un lien avec le milieu de travail d’un individu mais plutôt sur une abdication aveugle de ses obligations envers autrui. Les inactions des défendeurs ne peuvent être vues comme étant un simple manque de communication ou de l’incompétence. Elles constituent des actes négligents, que l’on pourrait mieux caractériser comme représentant de la négligence grave.

80 Pour ces motifs, je conclus que la plaignante a établi que le comportement des défendeurs constituait une violation du devoir de représentation équitable de la plaignante et qu’ils ont commis une pratique déloyale de travail.

81 Les mesures de redressement appropriées en l’instance seront étudiées à une date ultérieure.

82 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

IV. Ordonnance

83 L’objection des défendeurs quant au respect des délais est rejetée.

84 La plainte est accueillie.

85 Une audience sera fixée dans les meilleurs délais afin d’entendre les parties sur la question des mesures de redressement appropriées. D’ici là, j’incite les parties à entreprendre une médiation afin de régler cette question. 

Le 19 août 2011.

Traduction de la CRTFP

Stephan J. Bertrand,
commissaire

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