Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le fonctionnaire s’estimant lésé conteste une suspension de trois jours pour avoir tenu des propos désobligeants envers son supérieur et pour avoir parié avec un détenu dans une partie de tir au poignet - le fonctionnaire s’estimant lésé a nié avoir tenu des propos irrespectueux - il a admis avoir tenu un pari mais précise qu’il n’en a tiré aucun bénéfice personnel et qu’il l’avait fait dans le but d’obtenir de l’information de la part du détenu - l’employeur était d’avis qu’il n’avait aucune raison de croire que les détenus avaient organisé un complot contre le fonctionnaire s’estimant lésé, et ce, même si les détenus qui avaient rapportés les propos irrespectueux avaient fait l’objet de plusieurs rapports d’infractions de la part du fonctionnaire s’estimant lésé - en ce qui concerne les propos désobligeants, l’employeur a présenté seulement une preuve indirecte - un arbitre de grief peut accepter la preuve par ouï-dire mais cette preuve ne peut servir, à elle seule, à prouver un fait fondamental, surtout lorsque ce fait est contredit - accepter cette preuve équivaudrait à un déni de justice naturelle - l’arbitre de grief a conclu que les propos attribués au fonctionnaire s’estimant lésé n’avaient pas été justifiés par une prépondérance de la preuve et elle a donc accueilli cette partie du grief - la tenue d’un pari est un acte fautif grave et la justification du fonctionnaire s’estimant lésé n’a pas convaincu l’arbitre de grief - comme l’employeur a indiqué que la tenue du pari était le comportement le plus grave, l’arbitre a conclu que la tenue du pari représentait deux jours de suspension sur les trois jours imposés et que cette partie de la sanction devait être maintenue. Grief accueilli en partie.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2011-11-28
  • Dossier:  566-02-3149
  • Référence:  2011 CRTFP 134

Devant un arbitre de grief


ENTRE

MARTIN LAPOSTOLLE

fonctionnaire s'estimant lésé

et

ADMINISTRATEUR GÉNÉRAL
(Service correctionnel du Canada)

défendeur

Répertorié
Lapostolle c. Administrateur général (Service correctionnel du Canada)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Michele A. Pineau, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Éric Lévesque, avocat

Pour le défendeur :
Josianne Phénix, stagiaire en droit

Affaire entendue à Montréal (Québec),
du 4 au 6 mai 2011.

I. Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1 Au moment de déposer son grief, le fonctionnaire s’estimant lésé, Martin Lapostolle (le « fonctionnaire ») était agent correctionnel de niveau CX-02 au Centre régional de réception de Ste-Anne-des-Plaines (le « Centre de réception »). Il était à l’emploi du Service correctionnel du Canada (l’ « employeur » ou le « SCC ») depuis 1996. Le 1er avril 2009, l’employeur a imposé au fonctionnaire une suspension de trois jours pour avoir tenu des propos désobligeants envers un supérieur et pour avoir parié avec un détenu dans une partie de tir au poignet.

2 Le fonctionnaire nie avoir tenu des propos irrespectueux. Il admet avoir tenu un pari, mais précise qu’il n’en a tiré aucun bénéfice personnel. À titre de redressement, le fonctionnaire demande le remboursement de la perte pécuniaire, le retrait de la mesure disciplinaire et l’annulation du rapport disciplinaire en date du 1er avril 2009. Dans l’alternative, il demande que la mesure disciplinaire soit réduite à une lettre de réprimande.

II. La preuve de l’employeur

A. Témoignage de Guy Bolduc

3 Guy Bolduc est gestionnaire correctionnel au Centre de réception depuis 13 ans. Il compte 30 ans de service avec le SCC. Le Centre de réception est responsable de l’évaluation et du placement des détenus, après sentence, dans diverses institutions à travers le pays. Le Centre de réception héberge en permanence certaines catégories de détenus, notamment les plus dangereux, ceux qui présentent un danger pour la sécurité de la population institutionnelle et ceux qui ont besoin de protection.

4 À l’automne 2008, M. Bolduc a eu le mandat de faire peinturer certaines parties de l’établissement, dont le pavillon D. Il a été décidé que le contrat serait exécuté par des détenus. Pour chaque pavillon à peinturer, M. Bolduc a demandé au personnel correctionnel de trouver quatre ou cinq détenus qui étaient dignes de confiance et qui pouvaient peindre. Le fonctionnaire était, à ce moment-là, en charge par intérim du contrôle des détenus au pavillon D. Lors d’une conversation animée entre M. Bolduc et le fonctionnaire dans le poste de contrôle, le fonctionnaire s’est dit en désaccord avec le mandat de peindre le pavillon parce que la peinture avait été rafraîchie récemment et que ce n’était pas sa tâche de trouver des détenus pour peindre. M. Bolduc lui a alors répondu que son travail était de trouver les détenus, qu’il soit d’accord ou non avec le mandat de peindre le pavillon.

5 Le 15 octobre 2008, le jour suivant la discussion, M. Bolduc a été interpellé par un détenu pendant qu’il faisait ses rondes de sécurité habituelles. Le détenu lui a dit que le fonctionnaire avait traité M. Bolduc de toutes sortes de noms la soirée précédente. Un autre détenu est venu lui demander si un agent correctionnel était autorisé à parier avec un détenu, soit lors d’une partie de tir au poignet contre une canette de Pepsi. Le fonctionnaire avait apparemment gagné le pari et le détenu avait été obligé de lui payer la canette de Pepsi. Par la suite, les deux détenus ont remis des lettres à M. Bolduc qui attestaient leurs dires. Les détenus auraient demandé à M. Bolduc de ne pas sévir contre le fonctionnaire avant qu’ils aient obtenu leur transfert dans un autre établissement car ils avaient peur de subir des représailles de la part du fonctionnaire et de perdre leur emploi privilégié dans l’établissement. M. Bolduc a remis les lettres à ses supérieurs. M. Bolduc a témoigné que d’autres détenus sont venus lui parler de propos désobligeants du fonctionnaire à son endroit.

6 M. Bolduc a témoigné qu’il n’avait aucune raison de croire que les détenus avaient organisé un complot contre le fonctionnaire parce que la discussion qu’il avait eue avec le fonctionnaire concernant la peinture avait eu lieu dans un poste de contrôle fermé. Un complot est une chose sérieuse et, en l’espèce il s’agissait d’une banalité.

7 À la suite d’une discussion avec son superviseur, M. Bolduc a d’abord pensé déposer une plainte de harcèlement. Puis, il a appris que le fonctionnaire avait déposé une plainte de harcèlement contre lui. M. Bolduc a donc laissé tomber cette idée. La plainte du fonctionnaire contre M. Bolduc a été rejetée par l’employeur.

8 M. Bolduc a témoigné qu’il avait été profondément offensé par les propos du fonctionnaire. Il a souligné que l’employeur prône une politique de politesse et de respect entre les membres du personnel et avec les détenus. M. Bolduc a témoigné qu’il était le patron, que la décision lui revenait de décider du contrat de peinture et que le fonctionnaire devait se conformer. Le 15 octobre 2008, à la fin de son quart de travail, M. Bolduc a complété un rapport des incidents qui ont eu lieu ce jour-là avec les détenus. M. Bolduc a admis que le fonctionnaire « n’était pas un de mes préférés ». Toutefois, le fonctionnaire n’était pas un mauvais employé. C’était un « leader » et il savait répondre du tac au tac. Selon M. Bolduc, le fait que le fonctionnaire portait parfois son uniforme de façon négligée et qu’il avait comme habitude de mettre les pieds sur le bureau donnait l’impression qu’il se foutait de lui.

9 En contre-interrogatoire, M. Bolduc a témoigné avoir rapporté les événements du 15 octobre 2008 dans son rapport, et ce, sans discuter du contenu avec le fonctionnaire, et avoir remis le rapport directement à son supérieur. Il a admis que le fonctionnaire était prompt et franc, voire irrespectueux et qu’il ne se gênait pas pour dire qu’il n’était pas d’accord avec une tâche. M. Bolduc ne se souvenait pas si le fonctionnaire s’opposait à la tâche ou à la couleur de la peinture, ni si la peinture avait été rafraîchie récemment. Il se souvenait toutefois que le fonctionnaire lui avait exprimé son fort mécontentement concernant la peinture.

10 M. Bolduc a admis qu’il pouvait y avoir jusqu’à trois agents correctionnels à la fois dans un poste de contrôle et qu’un détenu faisait le ménage à 8 h 30. Selon M. Bolduc, la porte du poste de contrôle du pavillon D est toujours fermée même pendant le ménage. Les détenus n’entendent pas les conversations qui se déroulent dans le poste de contrôle même à travers l’issue pour leur parler. M. Bolduc ne pouvait pas dire si le bas de la porte de la salle de contrôle affleurait le sol de façon à prévenir l’ébruitement des conversations.

11 M. Bolduc a admis que les lettres rédigées par les détenus n’étaient pas signées. Il a dit ne plus se souvenir de l’identité de l’un d’eux. Il n’a fait aucun suivi auprès des détenus qui se sont plaints parce que ça ne fait pas partie de ses tâches. La tâche d’un agent correctionnel de niveau CX-02 est de faire les rondes de sécurité et les fouilles des détenus sur le plancher. Il intervient auprès des détenus et est appelé à faire des rapports d’observation ou d’infraction lorsque les consignes de l’établissement ne sont pas respectées, fumer par exemple. Ces rapports sont classés dans le dossier disciplinaire du détenu. Les CX-02 ont généralement une bonne connaissance de ce qui se passe chez les détenus.

12 M. Bolduc a admis que le fonctionnaire « mettait du cœur dans ses fouilles […] un peu trop parfois » et que trois des détenus qui lui avaient rapporté les propos irrespectueux avaient fait l’objet d’une fouille par le fonctionnaire. M. Bolduc a aussi admis que les détenus n’ont pas peur de faire des plaintes contre les agents correctionnels pour les motifs qui leur semblent bons, et que ces plaintes peuvent parfois servir à faire quitter un agent correctionnel d’un pavillon donné.

13 Toutefois, M. Bolduc était d’avis que les lettres déposées par les détenus n’avaient aucun rapport avec un complot pour se débarrasser du fonctionnaire. Il n’a pas vérifié dans les dossiers des détenus à savoir s’ils avaient déposés des plaintes contre le fonctionnaire, parce que cette activité ne fait pas partie de ses tâches. Son rôle est de donner des sanctions aux détenus après avoir reçu les rapports des agents correctionnels.

14 En ré-interrogatoire, M. Bolduc a témoigné que les détenus sont ceux qui donnent aux agents correctionnels les informations concernant les complots.

C. Témoignage d’Alain Giguère

15 Alain Giguère travaille actuellement à l’établissement Drummond à titre de gestionnaire correctionnel. En 2009, il était directeur régional adjoint au Centre de réception, et ce depuis août 2007. Il travaille pour le SCC depuis 27 ans. La sécurité des employés et des détenus relevait de lui; il relevait du sous-directeur de l’établissement.

16 M. Giguère est le gestionnaire qui a signé le rapport de mesures disciplinaires invoqué au soutien de la mesure disciplinaire contre le fonctionnaire. M. Giguère témoigne que M. Bolduc lui a rapporté les lettres qu’il a reçues des détenus en novembre 2008. M. Giguère témoigne que les paris sont interdits. Les propos du fonctionnaire étaient dégradants et dirigés contre un supérieur, ce qui les rendait plus graves. M. Bolduc a insisté pour qu’il y ait une enquête au sujet de cet incident pour tirer les choses au clair. M. Giguère lui a répondu qu’il trouverait une façon de valider les propos qui lui avaient été rapportés. Afin de vérifier la fiabilité des détenus et de corroborer leurs propos, M. Giguère s’est adressé à la directrice de l’établissement. Il a été convenu d’effectuer des vérifications préliminaires parce que la direction ne détenait pas assez d’information pour faire une enquête officielle. L’objet de la vérification était de voir si les détenus avaient des motifs pour inventer les propos du fonctionnaire à l’endroit de M. Bolduc.

17 Le fonctionnaire a été convoqué à une rencontre disciplinaire le 6 février 2009 avec un représentant syndical. M. Giguère lui a communiqué les plaintes des détenus et lui remis une photocopie de deux lettres rédigées pas eux. Le fonctionnaire a nié catégoriquement les propos qu’il aurait tenus contre M. Bolduc. Il a dit que les propos dont il était accusé ne faisaient pas partie de son vocabulaire et que jamais il n’aurait utilisé le mot « tapette ». Il a aussi témoigné que s’il avait à critiquer M. Bolduc, il l’aurait fait devant lui.

18 Le fonctionnaire a admis qu’il avait fait un pari lors d’une partie de tir au poignet. Le but était d’obtenir des informations sur une agression qui avait été commise à l’intérieur de l’établissement. M. Giguère lui a répondu que le pari avec les détenus allait à l’encontre du code d’éthique et que la cueillette de renseignements concernant les agressions ne faisait pas partie des tâches d’un agent correctionnel. M. Giguère a dit au fonctionnaire que les paris dans le but d’obtenir des informations mettaient non seulement sa sécurité en danger mais l’exposaient éventuellement au chantage. Selon M. Giguère, le fonctionnaire n’a pas semblé prendre cet avertissement au sérieux.

19 Après le transfert des détenus à un autre établissement, M. Giguère a demandé qu’un agent de renseignement de sécurité rencontre les détenus qui s’étaient plaints. Selon l’expérience de M. Giguère, les détenus se plaignent contre un agent correctionnel pour des raisons sérieuses sachant que les conséquences contre lui seront graves. Des propos irrespectueux n’attirent pas des conséquences graves, alors il ne peut être présumé qu’il s’agissait d’un complot contre le fonctionnaire.

20 Selon M. Giguère, il n’était pas impossible que le fonctionnaire ait tenu ce genre de propos à l’égard de M. Bolduc. M. Giguère avait déjà rencontré le fonctionnaire pour lui demander de changer d’attitude envers ses supérieurs. Le fonctionnaire lui avait répondu que, sauf un, ses supérieurs étaient incompétents et ne savaient pas travailler. De plus, le fonctionnaire avait un dossier disciplinaire antérieur tandis que M. Bolduc avait 30 ans de carrière. M. Giguère a conclu que rien ne mettait en doute les propos rapportés par les détenus. À la suite des rapports des agents de renseignement de sécurité, M. Giguère a jugé que les propos rapportés par les détenus n’étaient pas inventés et que le fonctionnaire avait enfreint la directive du Commissaire concernant la conduite et la discipline en milieu de travail (le « Code de discipline »). M. Giguère a aussi jugé que l’incident du pari était un comportement grave, surtout aux yeux de la population du pénitencier. De plus, le fonctionnaire avait avoué ses actes.

21 M. Giguère témoigne que le Code de discipline est la politique qui dicte une conduite professionnelle et respectueuse entre collègues, le public et les détenus en tout temps. Le Code de discipline représente les valeurs fondamentales du SCC et fait partie du serment que prête un agent correctionnel.

22 M. Giguère témoigne qu’il a décidé d’une sanction de trois jours pour trois raisons : il ne détenait pas une preuve hors de tout doute que les propos irrespectueux envers M. Bolduc avaient été tenus; le pari était une infraction grave; une suspension de trois jours s’inscrivait dans les normes de la discipline progressive établie par entente entre l’employeur et l’agent négociateur.

23 En contre-interrogatoire, M. Giguère admet qu’il n’a pas rencontré M. Bolduc après la remise du rapport du 15 octobre 2008, sauf qu’il a discuté avec lui de la plainte de harcèlement déposée par le fonctionnaire. Il a rencontré la directrice de l’établissement peu après concernant la meilleure démarche à suivre. Les détenus ont été transférés dans d’autres établissements entre le 15 octobre 2007 et le 6 février 2008. L’enquête a été retardée à une date ultérieure à leur transfert parce que ceux-ci avaient demandé que rien ne soit fait avant leur départ pour éviter des représailles.

24 La procédure d’enquête a été la suivante. M. Giguère a demandé à l’agent de renseignement de sécurité du Centre de réception de communiquer avec l’agent de renseignement de sécurité de l’établissement ou se trouvaient les détenus afin de corroborer les renseignements inscrits dans les lettres. Il en est ressorti que les détenus n’avaient jamais fait des allégations semblables et n’avaient aucune raison d’inventer une telle histoire, hormis que le fonctionnaire avait rédigé plusieurs rapports d’infractions relativement à ces détenus, comme il l’avait fait pour d’autres. L’agent de renseignement de l’établissement de Ste-Anne-des-Plaines a ensuite analysé les renseignements obtenus et a préparé un rapport pour M. Giguère.

25 M. Giguère témoigne qu’il ne peut dire si les détenus en étaient à leur première sentence ou s’ils avaient des antécédents concernant la sécurité de l’établissement, parce qu’il s’agit de renseignements protégés. M. Giguère a demandé de vérifier si les détenus avaient déposé des plaintes du même genre contre d’autres membres du personnel d’un établissement. Il n’a pas demandé de vérifier si les détenus avaient déposé d’autres plaintes contre le fonctionnaire.

26 Au sujet de l’ampleur de la sanction disciplinaire de trois jours attribuable à chacun des deux incidents de la sanction, M. Giguère témoigne que la sanction est indivisible parce qu’elle tient compte de l’ensemble du comportement. Toutefois, l’incident du pari est très grave. Il ne se souvient pas si le fonctionnaire s’est excusé pour cet incident.

III. La preuve du fonctionnaire

A. Témoignage de Pierre Chapleau

27 Pierre Chapleau est gestionnaire correctionnel depuis 1989. Il occupe un poste de niveau CX-04 au Centre de réception et s’occupe de plusieurs secteurs, dont le bureau opérationnel.

28 À compter de 1999, M. Chapleau a occupé un poste de niveau CX-02 dans la même unité que le fonctionnaire. Il a ensuite travaillé avec le fonctionnaire au pavillon F, lorsqu’il a occupé un poste de niveau CX-03 pendant 1 an et 2 mois entre 2002 et 2003. M. Chapleau explique qu’un employé de niveau CX-02 a une fonction dynamique à l’intérieur de l’établissement. Les agents correctionnels de niveau CX-02 sont à l’affut de beaucoup d’information pour la sécurité des détenus et du personnel, par exemple, les menaces contre d’autres détenus, les suicides et l’interception de la contrebande, qui affecte la sécurité des détenus et des employés réguliers du pénitencier. Un agent de niveau CX-02 produit des rapports d’observation concernant les détenus et partage les informations qu’il obtient avec ses supérieurs. L’ensemble de l’information obtenue permet de déceler des risques ou de traiter les infractions plus graves, comme par exemple l’opération d’une distillerie, la construction d’armes illégales ou d’armes blanches. Les agents sont exposés aux détenus pendant qu’ils sont dans la cour, dans le pavillon, dans le gymnase ou même dans leur cellule. Ils sont impliqués dans les activités, par exemple comme arbitre à une joute de baseball. Les activités physiques aident à diminuer la tension.

29 M. Chapleau a complété trois évaluations concernant le travail du fonctionnaire pendant la période de 2000 et 2009. Il a été frappé par le dynamisme du fonctionnaire qui réussissait à tout coup à dénicher de l’information concernant des activités illégales comme la contrebande du tabac, des stupéfiants et la confection de boissons artisanales. Le fonctionnaire ne s’est pas fait beaucoup d’amis parmi les détenus. Le fonctionnaire a reçu des félicitations à trois reprises par des corps policiers de l’extérieur relativement à son dynamisme. Les interventions du fonctionnaire lui ont valu bien des plaintes de la part des détenus qui trouvaient qu’il manquait de flexibilité concernant les règles en vigueur dans l’établissement.

30 M. Chapleau témoigne qu’un détenu porte plainte lorsqu’un agent nuit à ses activités illégales, comme les interceptions de boissons artisanales, les armes et le tabac. Ils menacent de le « faire sortir » s’il continue à produire des rapports d’observation. M. Chapleau témoigne que la porte du poste de contrôle est ouverte pendant que le ménage est fait (sortie des meubles, polissage du plancher, etc.). Ainsi, les communications à l’intérieur du poste peuvent être entendues car les contacts avec les détenus se continuent pendant cette période.

31 En contre-interrogatoire, M. Chapleau explique que le poste de contrôle n’est pas un poste armé, mais un poste sécuritaire et que les détenus peuvent y venir en tout temps lorsqu’ils circulent librement. Règle générale, les détenus n’aiment pas les agents correctionnels qui font leur travail correctement. Certains agents tolèrent les activités des détenus pour éviter les plaintes. M. Chapleau admet que la tenue de pari n’est pas accepté. Les agents correctionnels ne sont pas tous diligents au sujet du dépôt de rapports d’observation. À quelques reprises, des détenus ont porté plainte en vue de se débarrasser d’un agent correctionnel. M. Chapleau ne fait aucun lien entre le nombre de rapports d’observation et la compétence d’un agent correctionnel. Il a eu connaissance de plaintes déposées contre le fonctionnaire mais ne sais pas comment cela s’est terminé. Il ne peut témoigner des lettres que les détenus ont fait parvenir à M. Bolduc.

B. Témoignage du fonctionnaire

32 Le fonctionnaire a commencé comme stagiaire à l’établissement Leclerc en 1996, et ce, pour une période de six mois, jusqu’en 1997. Il a ensuite gagné un concours et il a commencé à travailler comme commis à Montréal. Puis, il a été embauché comme employé indéterminé pour faire de la gestion de cas. Il est devenu un employé de niveau CX-01, à Port Cartier, en 1997. Il a obtenu un poste au Centre de réception en 1999. Il a travaillé comme CX-01 au pavillon F pendant environ neuf mois puis il est devenu un employé de niveau CX-02.

33 Au moment de la sanction disciplinaire qui a fait l’objet du grief, il travaillait au pavillon D depuis trois ans. La clientèle du pavillon D comprend la population qui a besoin de protection. Ce sont des délinquants qui ont commis des crimes de nature sexuelle, qui ne fonctionnent pas dans les autres pavillons, qui ont des dettes, qui ont eu des problèmes avec d’autres détenus. Ces détenus peuvent y effectuer leur première sentence s’il n’y a pas de place pour eux dans un autre pavillon. Certains détenus sont en voie de transfert vers une autre institution. Il y a beaucoup de récidivistes bien connus des agents correctionnels.

34 En 2008-2009, comme il était un des agents correctionnels avec le plus d’expérience, le fonctionnaire travaillait souvent au poste de contrôle s’il était affecté au quart de jour. Son travail consistait à donner le travail aux détenus, à assigner les rondes aux agents correctionnels et à gérer de façon générale le pavillon pendant le quart de travail.

35 Le fonctionnaire a expliqué les circonstances concernant le pari avec un détenu comme suit. Il y a eu une urgence au pavillon D; le pavillon a été fermé et il y a eu une fouille des détenus. Un détenu a été frappé par un autre détenu. Un rapport d’observation a été fait concernant l’incident. Au moment de la fouille, un détenu impliqué dans l’incident lui a dit de venir dans sa cellule pour régler l’affaire. Pour désamorcer la tension et éviter d’aller dans sa cellule, le fonctionnaire lui a offert une partie de tir au poignet dont le prix était une boisson gazeuse. Le fonctionnaire a gagné la partie, le détenu lui a apporté la boisson gazeuse et l’atmosphère a été détendue. Par la suite, il y a eu un autre incident avec le même détenu concernant une affaire de stupéfiants. C’est à ce moment que le détenu a dénoncé le pari aux supérieurs du fonctionnaire.

36 Le fonctionnaire témoigne qu’il a admis avoir fait un pari, mais qu’il ne le ferait plus. Il fait ouvertement ses rondes. Il vit dans le quotidien des détenus, mais sait tirer la ligne concernant les comportements inacceptables. Il admet qu’il a fait des erreurs mais qu’il apprend.

37 Le fonctionnaire témoigne qu’il s’est opposé au rafraîchissement de la peinture dans le pavillon D parce que le pavillon avait été peint récemment. Le travail avait pris presque deux mois à compléter et il avait eu à gérer « le bordel » créé pendant toute cette période. Il ne voulait pas recommencer l’expérience de sitôt. Il a dit à M. Bolduc de s’occuper de son bloc et qu’il s’occuperait du sien. La discussion a eu lieu dans la cuisinette adjacente au poste de contrôle entre 8 h 30 et 9 h 15.  Les activités générales du poste de contrôle, y compris le ménage, commencent à ces heures. Il y avait des détenus nettoyeurs et des cuisiniers sur place qui pouvaient entendre la discussion avec M. Bolduc. Le fonctionnaire croit avoir fait l’annonce du projet de peinture à l’intercom et a demandé des volontaires. Aucun volontaire s’est pointé même si un détenu est payé plus cher pour faire ce type de travail.

38 Le fonctionnaire nie les propos inscrits dans les lettres des détenus parce qu’il ne s’agit pas du vocabulaire qu’il utilise couramment. Le fonctionnaire commente que les paroles qui lui sont attribuées sont haineuses et qu’il n’a pas cette haine à l’égard de M. Bolduc. Le fonctionnaire témoigne connaître les détenus qui se sont plaints; il s’agit d’un cuisinier que le fonctionnaire surprenait régulièrement à fumer à l’intérieur et d’un autre qu’il avait sous surveillance.

39 En contre-interrogatoire, le fonctionnaire admet avoir dit à M. Bolduc, en l’absence de tout détenu, qu’il le trouvait incompétent. Il admet avoir porté plainte concernant M. Bolduc. Le fonctionnaire témoigne que les détenus savent toujours où s’en tenir avec lui et qu’il obtient sans trop de mal des renseignements concernant le trafic de stupéfiants. Il partage ces renseignements avec ses supérieurs. Ses supérieurs lui demandaient souvent de faire des fouilles plus approfondies. Il admet qu’il n’est pas un employé parfait et qu’il a reçu un avertissement de M. Chapleau concernant son absentéisme. Le fonctionnaire dit ne pas regretter l’incident du pari parce qu’il a agi en regard des circonstances. Toutefois, il ne recommencerait pas. Le fonctionnaire témoigne que les agents correctionnels ne discutent pas entre eux de situations où les détenus les auraient forcés à changer de pavillon ou d’établissement.

IV. Argumentation

A. Pour l’employeur

40 L’employeur soutient qu’il n’a pas à présenter une preuve hors de tout doute d’une inconduite, mais bien une preuve raisonnable des faits qui ont mené à la sanction  disciplinaire à l’égard du fonctionnaire. En l’espèce, je dois préférer le témoignage de M. Bolduc. M. Bolduc a témoigné qu’il n’avait aucune raison de douter des propos des détenus. Les lettres des détenus ne peuvent avoir été inventées car elles renvoient à des expressions bien connues du milieu carcéral.

41 M. Bolduc a témoigné du message de respect et de politesse qui est important pour lui. Il a soulevé combien il a été bouleversé et choqué par les propos rapportés dans les lettres. Il n’y a aucune preuve du complot allégué par le fonctionnaire. Les faits ne sont pas assez sérieux. L’assignation du projet de peinture revenait à M. Bolduc et le fonctionnaire n’avait pas à être d’accord avec lui. Selon M. Bolduc, il n’y avait aucun détenu au poste de contrôle au moment de sa conversation avec le fonctionnaire. La porte était fermée. Les détenus sont venus d’eux-mêmes parler à M. Bolduc et n’ont pas été sollicités.

42 M. Giguère témoigne qu’il n’a aucune raison de ne pas croire M. Bolduc. Il était visiblement ébranlé par les propos. M. Giguère avait déjà rencontré le fonctionnaire et lui avait demandé d’avoir un comportement plus respectueux envers ses supérieurs. L’employeur a cherché des indices de fiabilité avant de sévir. Les dossiers des détenus ne révélaient aucun antécédent de plainte contre un agent correctionnel. De plus, les détenus savent qu’ils sont dans un centre de réception pour être évalués. Alors pourquoi auraient-ils voulu faire une vague alors qu’ils sont en attente de placement, pourquoi risquer de perdre leur emploi rémunéré qui est un privilège.

43 Il n’est pas évident, dans un cas comme celui-ci, d’obtenir une preuve directe des actes commis par le fonctionnaire. M. Giguère a obtenu toutes les preuves qu’il jugeait nécessaires en demandant à un agent de renseignement de sécurité dont c’est la tâche de rencontrer les détenus. Deux détenus ont confirmé le contenu de leur lettre et un autre était prêt à témoigner. Les détenus ne tiraient aucun avantage en faisant leurs déclarations à M. Bolduc. Ils étaient même susceptibles de représailles de la part du fonctionnaire. Les détenus n’ont pas été appelés à témoigner pour des raisons de sécurité et du manque de ressources pour les accompagner. Selon la procureure de l’employeur, il y n’y a eu qu’un cas où un détenu aurait témoigné lors d’un arbitrage. L’arbitre de grief peut admettre toute preuve pertinente. Lorsque la preuve est contradictoire, l’arbitre de grief doit trancher selon la crédibilité des témoins. M. Bolduc est le témoin le plus crédible, car il a fait une déclaration immédiatement après avoir obtenu les lettres des détenus. M. Chapleau n’a été témoin de ni l’un ni l’autre des incidents reprochés au fonctionnaire.

44 Le pari est une inconduite grave et enfreint les articles 5 et 6 du Code de discipline. De par sa conduite, le fonctionnaire a terni l’image du SCC. Il a enfreint l’article 7 en étant injurieux vis-à-vis un autre employé. De plus, il a reçu un bénéfice émanant du pari. En imposant la sanction de trois jours, M. Giguère a pris en considération les facteurs aggravants atténuants, ainsi que l’entente globale avec l’agent négociateur sur la discipline progressive. L’employeur a aussi considéré l’effet dissuasif par rapport aux autres agents correctionnels. L’agent correctionnel est soumis à des règles de conduite plus rigoureuses que les autres fonctionnaires. Un employé de niveau CX-02 est considéré comme un meneur et doit donner l’exemple. Le remords éprouvé en ce qui concerne le pari n’est pas suffisant pour éviter une mesure disciplinaire. Les infractions n’avaient pas à être graves pour donner une sanction de trois jours. La sanction est donc juste.

45 Au soutien de sa position, l’employeur cite les décisions suivantes : Faryna c. Chorny, [1952] 2 D.L.R. 354; F.H. c. McDougall, 2008 CSC 53; R. c. F. (W.J.), [1999] 3 R.C.S. 569; Chénier c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada – Service correctionnel), 2002 CRTFP 40; R. c. O’Brien, [1978] 1 R.C.S. 591; R. c. Edwards, [1996] 1 R.C.S. 128; R. v. Salutin, [1979] O.J. No. 806; Alward et al. c. La Reine, [1978] 1 R.C.S. 559; Gale c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada – Service correctionnel), 2001 CRTFP 85; Bruce Power LP, [2009] O.L.R.D. No. 2095; Slicer c. Québec (Comité de déontologie policière), [1998] J.Q. No. 4303; Way c. Agence du revenu du Canada, 2008 CRTFP 39; Brazeau c. Administrateur général (ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2008 CRTFP 62; Northwest Territories Power Corp. v. Union of Northern Workers (Melanson), [2004] N.W.T.L.A.A. No. 4 (Power); Weyerhaeuser Co. (Drayton Valley Operations) v. United Steelworkers Local 1-207 (Greaves Grievance), [2007] A.G.A.A. No. 14; Alcan Smelters Inc. and Chemicals Inc. v. Canadian Auto Workers, Local 2301 (Pegley Grievance), [1998] B.C.C.A.A.A. No. 596; Hogarth c. Conseil du Trésor (Approvisionnement et Services Canada), dossier de la CRTFP 166-2-15583 (19870331); Re Rolland Inc. v. Canadian Paperworkers Union, Local 310, [1983] O.L.A.A. No. 75; Scapa Tapes North America Renfrew v. United Steelworkers of America, Local 6946-1 (Gilbert Grievance), [2003] O.LO.A.A. No. 579; Ferguson c. Conseil du Trésor (Solliciteur général du Canada – Service correctionnel), dossier de la CRTFP 166-2-26970 (19961028); Union des chauffeurs de camions, hommes d’entrepôts et autres ouvriers, Teamsters Québec, (FTQ, section locale 106) c. Résidences Soleil – Manoir Saint-Laurent, 2007 CanLII 9340 (QC A.G.); Commissaire à la déontologie policière c. Dussault, 2001 CanLII 27914 (QC C.D.P.); Commissaire à la déontologie policière c. Gagnon, 2008 Can LII 29837 (QC C.D.P.); Parmalat Canada Inc. v. CAW (Canada), Local 462 (Leach Grievance), [2005] O.L.A.A. No. 385.

46 En réplique aux arguments du fonctionnaire, l’employeur soutient qu’il ne relevait pas du rôle de M. Bolduc de vérifier l’information donnée par les détenus parce qu’il était la victime et aurait été en conflit d’intérêt. L’obligation de faire enquête relevait des supérieurs de M. Bolduc. Ce qu’ils ont fait en l’instance. L’employeur soutient qu’il n’y a aucune preuve à l’appui de l’allégation du fonctionnaire que M. Bolduc aurait sollicité les lettres des détenus.

47 L’employeur me demande de rejeter le grief.

B. Pour le fonctionnaire

48 Le fonctionnaire admet que s’il avait tenu les propos que l’employeur tente de mettre en preuve, il aurait mérité les trois jours de suspension imposés. Toutefois l’employeur avait l’obligation de démontrer de façon prépondérante les fautes reprochées et la proportionnalité de la sanction. L’employeur a imposé trois jours de suspension de façon indistincte pour deux fautes : avoir tenu des propos désobligeants et avoir tenu un pari.

49 Le fonctionnaire soutient que la preuve selon laquelle il a tenu des propos irrespectueux et dénigrants à l’endroit d’un gestionnaire n’est pas prépondérante. D’abord, il a nié avoir tenu ces propos. Ensuite, il a expliqué pourquoi ces propos ne pouvaient lui être attribués. Selon lui, la preuve de l’employeur est fondée sur des ouï-dire. Le fonctionnaire me demande de ne pas tenir compte de ces ouï-dire en raison des faits contradictoires.

50 Le 15 octobre 2008, M. Bolduc a effectué une ronde de sécurité dans le pénitencier, et ce, sans vérifier la véracité des propos.  Il a reçu des lettres de détenus et a fait un rapport écrit de ce qu’il croyait de l’incident. Il a communiqué le tout à son supérieur. M. Bolduc a témoigné qu’il n’était pas important que les détenus aient un quelconque intérêt à faire les déclarations. Il y a aussi une contradiction entre le témoignage de M. Bolduc, qui dit que la discussion concernant la peinture s’est passée alors que le poste de contrôle était fermé, et celui du fonctionnaire, qui dit que la porte du poste de contrôle était ouverte à cette heure parce que les détenus y font le ménage. La colère du fonctionnaire par rapport à la peinture a vraisemblablement été entendue par des détenus.

51 À partir de la seule déclaration de M. Bolduc, M. Giguère tire rapidement des conclusions et met le fonctionnaire en garde; il lui dit de changer son comportement, même s’il n’a encore fait aucune vérification des faits allégués par M. Bolduc. Par la suite, M. Giguère demande que le dossier de sécurité des détenus soit vérifié par un agent de renseignement de sécurité du pénitencier. L’unique intérêt de M. Giguère est de savoir si ces détenus ont des antécédents de même nature relativement à d’autres agents correctionnels. Il ne s’agit pas d’une enquête ouverte, mais de la validation d’information que le SCC détient déjà. On ne tient pas compte d’autre chose pour évaluer le dossier du fonctionnaire. Le fonctionnaire soutient que les plaintes à l’endroit d’autres agents correctionnels et les dossiers disciplinaires des détenus n’ont aucune pertinence. Aucune vérification n’a été faite entre le dossier de plaintes des détenus concernant le fonctionnaire et les déclarations des détenus.

52 La preuve de l’employeur repose uniquement sur du ouï-dire « au cube ». Ni M. Giguère ni M. Bolduc, n’ont personnellement vérifié l’information. Le détenu qui a accepté de venir témoigner n’a pas été entendu. La preuve de l’employeur repose uniquement sur trois éléments : la gravité des propos allégués, le fait que les propos auraient été tenus devant plusieurs personnes et le fait que le fonctionnaire avait deux mesures disciplinaires à son dossier. Le fonctionnaire plaide que cette preuve est insuffisante pour justifier les gestes qui lui sont reprochés et que la question de la sécurité publique et du manque de ressources ne justifie pas la présentation d’une preuve de si piètre qualité. Bref, il n’y a pas de preuve.

53 Le fonctionnaire admet la souplesse du tribunal qui, pour des questions de commodité, peut accepter une preuve fondée sur du ouï-dire. Toutefois, toute la preuve de l’employeur ne peut reposer que sur du ouï-dire car cette situation prive le fonctionnaire de son droit de contre-interroger, ce qui est contraire aux règles de justice naturelle et de ses droits les plus fondamentaux.

54 Le fonctionnaire est en désaccord avec la conclusion de l’employeur voulant que les détenus n’avaient aucun intérêt à faire des déclarations à M. Bolduc. Au contraire, M. Chapleau a témoigné que le fonctionnaire était diligent concernant les fouilles et les rapports d’observation au sujet du trafic de tabac, des stupéfiants et des distilleries. Les déclarations des détenus comportent toujours un échange d’information. Il n’y a rien de gratuit. Ceci était aussi vrai des déclarations faites à M. Bolduc.

55 Contrairement à ce qu’ont prétendu M. Giguère et M. Bolduc, M. Chapleau a témoigné qu’il n’y a pas que les événements majeurs qui suscitent un complot. Il n’est pas inusité que des détenus tentent de se défaire d’agents correctionnels un peu trop diligents.

56 Le fait que le fonctionnaire ait pu dire dans le passé qu’il trouvait certains gestionnaires incompétents n’est pas pertinent et ne mène pas à la une conclusion inévitable que le fonctionnaire a tenu les propos reprochés. Le fonctionnaire allègue que l’employeur avait en tête de le discipliner par tous les moyens. Le fonctionnaire déclare que son franc parler peut être dérangeant pour certains, mais qu’il y a un gouffre entre ce qu’il a pu dire dans le passé et les propos désobligeants qui lui sont reprochés. Le fonctionnaire plaide que l’employeur a sanctionné son attitude.

57 Selon M. Giguère, le pari était un geste plus grave que les propos désobligeants. Le fonctionnaire a admis qu’il avait participé à un pari. Il a reconnu que c’était mal même si son geste lui semblait juste à l’époque. Il a déclaré qu’il ne recommencerait pas.

58 La plainte de harcèlement du fonctionnaire contre M. Bolduc est postérieure aux événements et il ne peut en être tenu compte. D’ailleurs, M. Bolduc pensait lui aussi en déposer une. On pourrait même supposer que M. Bolduc tentait d’amasser des preuves.

59 Le fonctionnaire plaide qu’il n’y aucune preuve directe des gestes qui lui sont reprochés; les mesures antérieures ne sont d’aucune pertinence. Son admission devrait être considérée comme un facteur atténuant. Dans la mesure où je décidais que l’employeur était justifié de lui imposer une mesure disciplinaire, le fonctionnaire demande que la mesure disciplinaire soit réduite à une lettre de réprimande.

60 À l’appui de sa position selon laquelle l’employeur ne peut uniquement présenter une preuve de ouï-dire, le fonctionnaire cite Basra c. Administrateur général (Services correctionnels du Canada), 2007 CRTFP 70 (renversé pour d’autres motifs, voir : 2008 CF 606; appel déposé devant la Cour d’appel fédérale rejeté, 2010 CAF 24).

61 Le fonctionnaire me demande d’accueillir le grief.

V. Motifs

62 Dans l’évaluation d’un grief disciplinaire, l’arbitre de grief doit décider de deux choses : a) l’employé a-t-il eu un comportement qui justifie une mesure disciplinaire? b) le cas échéant, le comportement justifie-t-il la peine disciplinaire?

63 Il incombe à l’employeur de justifier les mesures prises contre l’employé selon la norme civile ordinaire de la prépondérance de la preuve, que voici.

64 Le ou vers le 15 octobre 2008, M. Giguère a reçu une plainte de M. Bolduc concernant des propos désobligeants tenus à son égard par le fonctionnaire. Les propos lui ont été rapportés par quelques détenus. M. Bolduc a formulé sa plainte dans un rapport auquel était annexé deux lettres anonymes venant de détenus. M. Giguère a convoqué le fonctionnaire le 27 novembre pour l’aviser de cesser ce comportement immédiatement. M. Giguère a aussi indiqué qu’il rencontrerait le fonctionnaire éventuellement pour plus de détails.

65 Le 6 février 2009, M. Giguère a rencontré le fonctionnaire pour obtenir ses explications concernant les faits survenus en octobre 2008. Le fonctionnaire a désavoué avoir tenu les propos injurieux notés dans les lettres des détenus. Son explication a été qu’il ne tenait pas ce genre de propos et qu’il ne s’agissait pas du vocabulaire qu’il employait. Le fonctionnaire a avoué avoir fait un pari sur une partie de tir au poignet avec un détenu en échange d’une information de lui.

66 À la suite de la rencontre du 6 février 2009, M. Giguère a entrepris des démarches complémentaires. Voici ce qu’il rapporte dans le rapport disciplinaire du 1er avril 2009 :

Suite à la rencontre, des démarches supplémentaires ont été effectuées par l’agent de renseignement de sécurité (ARS) qui a contacté les ARS des établissements où étaient rendus les détenus impliqués.

Un détenu a confirmé les informations impliquant un conflit entre vous et M. Guy Bolduc et que vous aviez tenu des propos dégradant à son endroit, mais il n’était pas intéressé à aller plus loin ni à témoigner devant qui que ce soit.

Un deuxième a confirmé qu’il avait écrit une lettre et réitéré tous les propos mentionnés dans cette lettre et qu’il était prêt à rencontrer n’importe qui pour confirmer votre attitude et vos propos.

Le troisième n’a offert aucune collaboration lorsque rencontré par l’ARS de l’établissement, mentionnant au début qu’il ne se souvenait de rien et ensuite qu’il ne voulait plus rien savoir de ce qui était arrivé au CRR et de ne plus jamais l’écœurer ou le rencontrer à ce sujet.

Les facteurs aggravants et atténuants suivants ont été évalués :

  • Considérant la nature et la gravité des propos que vous avez tenus au sujet d’un supérieur,
  • Considérant que vous avez tenus ces propos devant plusieurs personnes et particulièrement devant la clientèle,
  • Considérant la présence de deux mesures disciplinaires à votre dossier, soit une réprimande écrite et une journée de suspension,
  • Considérant que malgré plusieurs rencontres de ma part depuis plusieurs mois afin de changer votre attitude envers vos supérieurs, vous persistez à manquer de respect à vos superviseurs,
  • Considérant que vous avez accepté de faire une rencontre de médiation avec M. Bolduc,

Je vous impose comme mesure disciplinaire, une sanction pécuniaire représentant trois journées de salaire tel que le prévoit l’entente globale III-A dans le cas d’une 3e infraction. Toute récidive de votre part pourra entraîner des mesures disciplinaires plus sévères n’excluant pas le licenciement.

[Sic pour l’ensemble de la citation]

67 Les seuls témoignages de l’employeur ont été ceux de M. Giguère et de M. Bolduc. L’employeur n’a pas fait témoigner les agents de renseignement de sécurité qui ont fait enquête ou le seul détenu qui aurait accepté de se présenter. Je n’ai donc qu’une preuve indirecte du comportement reproché au fonctionnaire.

68 L’enquête visant à savoir si les détenus avaient déjà dénoncé d’autres agents correctionnels ou s’ils avaient des dossiers disciplinaires n’est pas pertinente et n’ajoute aucun poids aux déclarations des détenus. L’important était de vérifier les faits qui se rapportaient au fonctionnaire. J’estime que la direction n’a pas procédé à une évaluation sérieuse du comportement reproché au fonctionnaire, soit qu’il ait tenu des propos désobligeants envers un superviseur. L’employeur n’a pas fait la preuve que le fonctionnaire avait tenus des propos devant plusieurs personnes où devant la clientèle de l’établissement.

69 Or, sans le témoignage des détenus, je note que la preuve de l’employeur ne repose pas sur grand-chose. Sur trois détenus qui auraient dit avoir entendu les propos du fonctionnaire, un n’a pas voulu poursuivre ses allégations et un autre n’a pas voulu collaborer. Par conséquent, la preuve de l’employeur repose sur un témoin, essentiel, qui n’a pas été entendu. 

70 L’alinéa 226(1)d) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP) prévoit expressément qu’un arbitre de grief peut accepter des éléments de preuve qu’ils soient admissibles ou non en justice. La preuve par ouï-dire constitue un assouplissement de la preuve, mais elle ne peut servir, à elle seule, à prouver un fait fondamental, surtout lorsque ce fait est contredit par de la preuve directe. En plus du ouï-dire de M. Bolduc concernant ce que lui aurait dit les détenus, je suis saisie du double (entrevues et vérifications faites par les agents de renseignement de sécurité des établissements où étaient rendus les détenus impliqués), du triple (rapport à M. Giguère par l’agent de renseignement de sécurité du Centre de réception concernant ce que d’autres agents de sécurité du renseignements lui auraient dit) et même du quadruple ouï-dire (témoignage de M. Giguère concernant ce qui lui été dit par l’agent de renseignement de sécurité du Centre de réception).

71 J’estime aussi que d’accepter la seule preuve par ouï-dire aurait un impact défavorable sur l’équité de la procédure arbitrale. En l’espèce, compte tenu des répercussions, le fonctionnaire avait le droit de mettre à l’épreuve les faits qui lui étaient reprochés par un contre-interrogatoire. Dans Grunerud c. Conseil du trésor (ministère de la Justice), 2007 CRTFP 79, j’ai étudié la question de ce qui constitue la cueillette de la preuve pertinente et du droit fondamental au contre-interrogatoire.

72 En résumé, dans Grunerud, la fonctionnaire avait contesté la date rétroactive de sa reclassification et l’employeur s’est opposé à la tardivité du grief. La fonctionnaire a fait valoir que son témoignage était essentiel pour expliquer la question du délai, et a demandé la permission de témoigner par téléphone en raison de son état de santé. En l’absence d’une preuve médicale à l’appui de son invalidité et vu l’absence de raison convaincante se rapportant au déplacement au lieu de l’audience, aux frais ou au retard, j’ai conclu que de lui permettre de témoigner par téléphone priverait le défendeur de la possibilité de la contre-interroger et, par conséquent, aurait un impact défavorable sur l’équité de la procédure et serait un manquement aux principes de justice naturelle.

73 Je reprends ici les principes de cette décision qui sont pertinents au présent dossier:

[…]

21. À cet égard, il me faut respecter la règle audi alteram partem, autrement dit le droit de se faire entendre. Pour que le processus d'arbitrage de grief soit juste et crédible, les parties doivent avoir toutes les possibilités d'être entendues, ce qui implique l'obligation pour l'arbitre de grief de recevoir toute la preuve pertinente que l'une ou l'autre des parties souhaite produire pour trancher l'affaire à partir de là. Un arbitre de grief n'a pas appliqué les règles de la justice naturelle s'il refuse à une partie la possibilité de se faire pleinement entendre.

22. Dans un contexte d'arbitrage de grief, les affaires doivent être réglées rapidement et sans formalités, mais il faut aussi respecter les règles de la justice naturelle. Dans Université du Québec à Trois-Rivières c. Larocque, [1993] 1 R.C.S. 471, le juge Lamer a écrit ce qui suit à cet égard (aux pages 488 et 489) :

La difficulté de cette question tient à la tension qui existe entre la recherche de l'efficacité et de la rapidité dans le règlement des griefs d'une part, et, d'autre part, le maintien de la crédibilité du processus d'arbitrage, qui dépend de la conviction des parties qu'elles ont pleinement eu la possibilité de faire entendre leur point de vue. Le professeur Ouellette parle à cet égard de la « . perpétuelle contradiction entre la liberté de fonctionnement et son encadrement nécessaire » (Y. Ouellette, « Aspects de la procédure et de la preuve devant les tribunaux administratifs » (1986), 16 R.D.U.S. 819, à la p.850) […]

23. Le juge Lamer a aussi cité, en y souscrivant, l'extrait suivant de l'article du professeur Ouellette (à la page 489) :

[TRADUCTION] Les grands arrêts qui ont formulé le principe de l'autonomie de la preuve administrative par rapport aux règles techniques ont, du même souffle, énoncé que cette autonomie devait s'exercer dans le respect des principes de justice fondamentale. Il ne suffit pas que les tribunaux administratifs fonctionnent avec simplicité et efficacité, ils doivent atteindre cet idéal élevé sans sacrifier les droits fondamentaux des parties.

24. Dans Université du Québec à Trois-Rivières, l'employeur voulait produire un témoignage sur le manque de financement qui avait mené au licenciement de deux assistants de recherche. Le syndicat s'y opposait, en alléguant que l'employeur tentait de modifier les raisons invoquées dans les avis de licenciement. L'arbitre s'est prononcé pour l'objection puis a accueilli les griefs. La Cour supérieure du Québec a ensuite accueilli la demande d'évocation de l'employeur au motif que l'arbitre avait excédé sa compétence en refusant d'entendre un témoignage pertinent et admissible; elle a ordonné un nouvel arbitrage devant un nouvel arbitre, et la Cour d'appel a confirmé son jugement. L'appel à la Cour suprême du Canada avait essentiellement pour but de déterminer si le refus de l'arbitre d'autoriser l'employeur à introduire un témoignage était susceptible de contrôle judiciaire, et la Cour suprême a statué que l'arbitre avait effectivement omis de se conformer à une règle de justice naturelle en ne tenant pas compte d'un élément de preuve pertinent.

25. Bien que les faits en l'espèce ne soient pas identiques à ceux dans Université du Québec à Trois-Rivières, les principes généraux établis par la Cour sont manifestement les mêmes. Le juge Lamer, pour les juges La Forest, Gonthier et Iacobucci, a reconnu le grand pouvoir discrétionnaire de l'arbitre appelé à déterminer la portée d'une question dont il est saisi en jugeant que seule une erreur de droit manifestement déraisonnable ou un manquement à la justice naturelle pouvait lui faire dépasser sa compétence et donner lieu à un contrôle judiciaire. À la page 471 de cet arrêt, la majorité de la cour a donc déclaré que l'arbitre « est dans une situation privilégiée pour évaluer la pertinence des preuves » qui lui sont soumises par les parties. Néanmoins, l'arbitre excède sa compétence lorsque sa décision de rejeter une preuve pertinente a « un impact tel sur l'équité du processus, que l'on ne pourra que conclure à une violation de la justice naturelle » (p. 491; je souligne).

26. Qui plus est, le juge L'Heureux-Dubé a écrit ce qui suit dans des motifs souscrivant à ceux de la majorité (p. 495) :

Refuser une preuve pertinente et admissible constitue une violation des règles de justice naturelle. C'est une chose que d'adopter des règles de procédure propres à une audition, c'en est une autre que de ne pas respecter une règle fondamentale, soit celle de rendre justice aux parties en entendant une preuve pertinente et, partant, admissible. […]

27. Dans le présent grief, l'employeur a déclaré qu'il serait difficile, voire virtuellement impossible, de contre-interroger s'il ne peut pas utiliser les pièces. À cet égard, la raison d'être d'un contre-interrogatoire est pertinente. Contre-interroger un témoin ne consiste pas seulement à revenir sur les faits avancés au cours de l'interrogatoire principal, mais sur tous les faits contestés, qu'ils aient été soulevés lors de l'interrogatoire principal ou pas. Il s'ensuit que le contre-interrogatoire est aussi un moyen d'obtenir des renseignements supplémentaires ou de mettre la crédibilité du témoin à l'épreuve. Ici, en raison de l'importance du témoignage de la fonctionnaire s'estimant lésée, son absence à l'audience réduirait énormément la possibilité pour l'employeur de la contre-interroger, ce qui compromettrait donc l'équité de la procédure, tout comme dans Université du Québec à Trois-Rivières. Il s'ensuit que je dois accueillir l'objection de l'employeur voulant que le témoignage de la fonctionnaire s'estimant lésée par téléconférence ne satisfait pas efficacement à l'exigence de donner à l'employeur la possibilité de faire entendre pleinement son point de vue. Par conséquent, ce facteur prévaut sur tous les inconvénients d'assister à l'audience pour la fonctionnaire s'estimant lésée.

[…]

74 En l’espèce, je suis d’avis que d’accepter la seule preuve par ouï-dire, sans que le fonctionnaire ait la possibilité de contre-interroger les faits contestés équivaudrait à un déni de justice naturelle. J’estime que les facteurs d’inconvénients invoqués par l’employeur pour expliquer l’absence d’une preuve directe, soit la question de sécurité publique et l’absence de ressources, ne peuvent prévaloir sur le droit du fonctionnaire de faire entendre pleinement son point de vue. Par conséquent, je n’accorde aucun poids à la preuve par ouï-dire soumise par l’employeur et je conclus que les propos attribués au fonctionnaire n’ont pas été justifiés par une prépondérance de la preuve. J’accueille donc cette partie du grief.

75 Quant à l’évaluation de la peine disciplinaire, l’employeur a imposé une suspension de trois jours, de façon indistincte, pour les deux fautes reprochées au fonctionnaire, soit : avoir tenu des propos désobligeants et avoir tenu un pari. Le rapport disciplinaire ne fait pas état de la proportionnalité de la peine à l’un ou l’autre des comportements. M. Giguère a témoigné que le comportement du fonctionnaire concernant le pari était plus grave que celui concernant les propos désobligeants à l’égard de M. Bolduc. Toutefois, la preuve a porté presque uniquement sur la faute se rapportant aux propos désobligeants. En ce qui concerne le pari, je note qu’il y a eu admission du fonctionnaire et qu’il s’est engagé à ne plus recommencer. L’employeur n’a pas avancé une preuve de récidivisme à cet égard et n’a pas présenté une preuve qui me permettrait de départager la conséquence ou la mesure appropriée pour sanctionner l’une et l’autre de ces fautes. Je n’ai devant moi qu’une pièce déposée au soutien d’une mesure disciplinaire antérieure se rapportant à l’assiduité à laquelle s’est opposé le fonctionnaire sur une question de pertinence.

76 Je partage l’avis de l’employeur que le pari du fonctionnaire avec un détenu était un comportement fautif grave. Je suis également d’avis qu’un agent correctionnel d’expérience de niveau CX-02 doit être tenu de savoir que la tenue d’un pari va à l’encontre des dispositions de l’article 8 du Code de discipline. Le fonctionnaire ne m’a pas convaincue de sa justification pour avoir tenu un tel pari. J'estime que le fonctionnaire mérite une sanction disciplinaire pour avoir tenu le pari.

77 Comme l'employeur a imposé une sanction de trois jours à la fois pour les propos irrespectueux et pour la tenue du pari et que l'employeur a indiqué que la tenue du pari était le comportement le plus grave, je conclus que la tenue du pari représentait deux jours de suspension sur les trois jours imposés et que cette partie de la sanction doit être maintenue. En l'absence de preuve prépondérante quant aux propos irrespectueux, j'annule la troisième journée de suspension. La sanction disciplinaire est donc modifiée selon l'ordonnance qui suit.

78 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

VI. Ordonnance

79 Le grief est accueilli en partie.

80 La sanction disciplinaire de trois jours de suspension est annulée et remplacée par une sanction disciplinaire de deux jours de suspension.

81 J’ordonne à l’employeur de rembourser au fonctionnaire le salaire d’une journée de travail équivalent à la suspension.

Le 28 novembre 2011.

Michele A. Pineau,
arbitre de grief

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