Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

La convention collective précise que <<l'employé-e désigné [...] pour remplir des fonctions de disponibilité, doit [...] pouvoir rentrer au travail aussi rapidement que possible s'il ou elle est appelé à le faire [...]>> - le fonctionnaire s’estimant lésé a contesté le délai de réponse de 45 minutes imposé par l'employeur - l'employeur a soutenu que le grief était prématuré - l'arbitre de grief a conclu que, dans le cadre de la procédure ministérielle de règlement des griefs, l'employeur croyait que le grief soulevait un problème réel entre les parties - de plus, l'employeur n'a pas évoqué le caractère prématuré du grief à la première occasion - l'arbitre de grief a déclaré que la pratique antérieure des parties n'appuyait pas la notion de préclusion, car le fonctionnaire s’estimant lésé ne s'était pas fié, à son détriment, à une promesse que lui avait faite l'employeur - l'arbitre de grief a rejeté l'idée que le délai de réponse de 45 minutes imposait une condition de résidence - l'arbitre de grief a aussi déclaré que, compte tenu des tâches du fonctionnaire s’estimant lésé, le délai de réponse de 45 minutes était raisonnable, qu’il s'inscrivait dans les droits de la direction et qu’il ne contrevenait pas à la convention collective. Objection rejetée. Grief rejeté.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2011-04-12
  • Dossier:  566-02-719
  • Référence:  2011 CRTFP 44

Devant un arbitre de grief


ENTRE

DOUGLAS STEWART SWEIGER

fonctionnaire s'estimant lésé

et

CONSEIL DU TRÉSOR
(ministère de l’Environnement)

employeur

Répertorié
Sweiger c. Conseil du Trésor (ministère de l’Environnement)

Affaire concernant un grief individuel renvoyé à l'arbitrage

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Roger Beaulieu, arbitre de grief

Pour le fonctionnaire s'estimant lésé:
Daniel Fisher, Alliance de la Fonction publique du Canada

Pour l'employeur:
Joshua Alcock, avocat

Affaire entendue à Hamilton (Ontario),
le 25 novembre 2009,
et à Toronto (Ontario), les 14 et 15 juin 2010.
(Traduction de la CRTFP)

1.  Grief individuel renvoyé à l'arbitrage

1 Lorsqu’il a déposé son grief, le fonctionnaire s’estimant lésé, Douglas Stewart Sweiger (le « fonctionnaire ») était un agent d’application de la loi, classifié dans le groupe et au niveau GT-04, et il travaillait à la Division de l’application de la loi sur la faune (la « DALF ») au ministère de l’Environnement (l’« employeur »). La question au cœur du différend est l’interprétation de la clause 30.02 (la « clause sur la disponibilité ») et plus précisément le sens de l’expression [traduction] « aussi rapidement que possible » de la convention collective conclue entre le Conseil du Trésor et l’Alliance de la Fonction publique du Canada pour le groupe Services techniques (la « convention collective »), qui est expirée depuis le 21 juin 2007,. La clause sur la disponibilité est formulée comme suit :

ARTICLE 30
DISPONIBILITÉ

[…]

30.02 L’employé-e désigné par une lettre ou un tableau pour remplir des fonctions de disponibilité, doit pouvoir être atteint au cours de cette période à un numéro de téléphone connu et pouvoir rentrer au travail aussi rapidement que possible s’il ou elle est appelé à le faire. Lorsqu’il désigne des employé-e-s pour des périodes de disponibilité, l’Employeur s’efforce de prévoir une répartition équitable des fonctions de disponibilité.

[Je souligne.]

2 Le grief est formulé comme suit : [traduction] « Je dépose un grief pour contester le fait que la direction ne régit pas les procédures de « disponibilité » au sens de la convention collective. » À titre de mesure corrective, le fonctionnaire demande ce qui suit : [traduction] « que la direction administre les procédures de « disponibilité » conformément aux modalités de la convention collective. »

3 Aux premier et deuxième paliers de la procédure de règlement des griefs, l’employeur a rejeté le grief en raison de sa présentation tardive, mais s’est tout de même penché sur les mérites de celui-ci. La question du retard a été abandonnée au dernier palier de la procédure de règlement des griefs et n’a pas été soulevée au moment de l’arbitrage.

4 Le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 19 décembre 2006. L’employeur n’était pas disponible aux dates qui avaient été proposées à l’origine aux parties et, par conséquent, l’audition de cette affaire a débuté le 25 novembre 2009.

II. Résumé de la preuve

A. Pour le fonctionnaire

5 Le représentant du fonctionnaire a déclaré dans ses arguments initiaux qu’il se baserait sur la pratique antérieure de l’employeur en ce qui a trait au moment où un employé doit se présenter au travail lorsqu’il est en disponibilité à son « domicile familial ».

6 Le fardeau de la preuve incombait au fonctionnaire. Il a témoigné en son propre nom et a déposé huit pièces en preuve. Il n’a appelé aucun autre témoin.

7 Le lieu de travail du fonctionnaire se situe à Burlington, en Ontario, et est connu sous le nom d’« administration centrale » pour les cinq agents d’application de la loi qui y travaillent, y compris le fonctionnaire. Une semaine sur cinq, chaque agent d’application de la loi est en disponibilité en dehors des heures de travail normales; les fonctions de disponibilité sont donc réparties équitablement entre les cinq agents. La famille du fonctionnaire habite à Tobermory, en Ontario, dans la péninsule de Bruce Nord, à environ 298 km de l’administration centrale. Le village de Tobermory est situé dans une ceinture de neige.

8 En octobre 2001, le fonctionnaire a été embauché par l’employeur et, en 2002, il est devenu agent d’application de la loi. Subséquemment, l’employeur a proposé au fonctionnaire de déménager sa famille dans la zone de l’administration centrale (pièce U-4). Le fonctionnaire a décidé de ne pas déménager sa famille. Toutefois, à l’été 2004, le fonctionnaire a accepté une aide à la réinstallation des Services de réinstallation de Royal Lepage (un entrepreneur tiers agissant pour le compte de l’employeur) après avoir confirmé que son nouveau domicile principal se trouvait à Mississauga, en Ontario (pièce U-4). À l’époque, le fonctionnaire a décidé de ne pas vendre son domicile familial de Tobermory, il a plutôt accepté un décaissement personnalisé en vertu de la Directive sur la réinstallation du Conseil national mixte, ce qui a eu pour effet d’augmenter l’allocation qui lui était versée. Ainsi, il conservait un pourcentage de la commission qu’il aurait peut-être eu à payer à l’agent immobilier s’il avait vendu le domicile familial de Tobermory. La décision du fonctionnaire de ne pas vendre son domicile familial de Tobermory ne signifiait pas que son domicile à Mississauga n’était pas son nouveau domicile principal aux fins du travail, et cette décision lui permettait d’habiter plus près de l’administration centrale et d’être admissible à une aide à la réinstallation.

9 Le fonctionnaire a déclaré qu’au moment de son embauche en 2001, il n’y avait aucune exigence voulant qu’il ait un domicile dans la zone de l’administration centrale. Il a déposé comme preuve la pièce U-5, soit une description complète et exhaustive de ses fonctions de travail en vigueur au moment du dépôt du grief. Le fonctionnaire était d’avis que pendant qu’il était en disponibilité à son domicile familial de Tobermory, il pouvait quand même répondre à tout appel et conduire son véhicule jusqu’à l’administration centrale. La description de travail du fonctionnaire renferme l’exigence suivante :

[Traduction]

[…]

Des interruptions, durant des inspections et des enquêtes mineures et la participation à des programmes de sensibilisation et de formation ou en période de disponibilité, sont un aspect régulier de la vie professionnelle de l’agent. Celui-ci est muni d’un téléavertisseur remis à l’agent de service, à tour de rôle, selon un calendrier partagé avec d’autres inspecteurs, et qui permet d’intervenir 24 heures sur 24 pour fournir de l’aide à d’autres agents d’Environnement Canada ou agents d’autres ministères et organismes du gouvernement. Ces interruptions peuvent survenir de façon quotidienne (les soirs et les fins de semaine pendant la période de disponibilité), et leur nombre, durée et moment sont imprévisibles. Des interruptions fréquentes au bureau chargé de l’application de la loi de la part d’autres employés et de membres du public augmentent le nombre des exigences multiples auxquelles doit satisfaire l’agent et causent, à l’occasion, des niveaux de stress élevés.

[…]

[Je souligne.]

10 Par ailleurs, le fonctionnaire a présenté en preuve les pièces U-6, U-7 et U-8 alléguant que l’employeur aurait apporté, de façon unilatérale, des changements importants aux fonctions liées à la période de disponibilité, et ce, sans avoir mené une consultation suffisante. Il a mentionné tout particulièrement des suggestions et des options qu’il avait formulées, mais que l’employeur a éventuellement rejetées.

11 En outre, le fonctionnaire a déclaré que ses responsabilités liées à la disponibilité sont strictement de nature consultative et peuvent ainsi être remplies par téléphone.

12 Finalement, le fonctionnaire a fait valoir que s’il doit être en disponibilité une semaine sur cinq, cette exigence aura des conséquences négatives pour lui et sa famille.

13 Durant le contre-interrogatoire, le fonctionnaire a reconnu que son domicile familial se trouvait à Tobermory mais que son domicile aux fins du travail est situé dans la région du Grand Toronto (RGT), à Mississauga. Le fonctionnaire a aussi reconnu qu’il pouvait échanger sa responsabilité d’agent de service avec l’un de ses quatre collègues en cas de conflit, à condition que l’échange ne se fasse pas à la dernière minute et que le superviseur approuve l’échange après en avoir été informé à l’avance.

14 Finalement, le représentant du fonctionnaire, en réponse au contre-interrogatoire de celui-ci, a déclaré que le fonctionnaire avait pris un congé de maladie pour cause de stress de novembre 2006 à février 2007. Il a également déclaré que, de février à mai 2007, le fonctionnaire n’occupait pas ses fonctions habituelles d’application de la loi et qu’on lui avait confié des tâches administratives jusqu’à ce qu’une évaluation médicale effectuée en mai 2007 établisse qu’il était apte à reprendre ses tâches habituelles. En juillet 2007, le fonctionnaire a accepté une affectation à Ottawa d’une durée de huit mois. Finalement, le 5 mars 2009, le fonctionnaire a de nouveau pris un congé de maladie pour cause de stress et il était toujours en congé de maladie au début de l’audience en novembre 2009.

B. Pour l’employeur

15 Gerry Brunet a été le seul témoin appelé par l’employeur. Au moment de l’audience, il était gestionnaire des opérations pour le district régional du sud de l’Ontario et était responsable de neuf agents d’application de la loi chargés des inspections à l’administration centrale et à Windsor, en Ontario, y compris le fonctionnaire.

16 M. Brunet a 19 années de service. Il a commencé comme enquêteur puis est devenu responsable de l’ensemble des enquêtes de l’employeur dans la région de l’Ontario. Il était un membre clé de l’équipe de la haute direction et il était impliqué au niveau des politiques et des procédures de la région de l’Ontario.

17 La DALF, l’Agence des services frontaliers du Canada (l’« ASFC ») et l’Agence canadienne d’inspection des aliments (l’« ACIA ») collaborent étroitement depuis longtemps pour combattre l’importation et l’exportation illégales d’espèces en voie de disparition (plantes et animaux vivants) aux points d’entrée de l’Ontario. Le Canada est un signataire et membre actif de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (la « CITES »).

18 Il est reconnu que l’employeur, l’ASFP et l’ACIA ont des ressources limitées et qu’ils doivent concentrer leurs efforts d’application de la loi dans les secteurs où ils pourront le mieux protéger les espèces en voie de disparition. M. Brunet a indiqué que, dans le cadre de l’effort conjoint déployé, les téléavertisseurs dont sont équipés les agents d’application de la loi sont non seulement nécessaires mais essentiels puisque c’est dans la région de l’Ontario que sont commises 50,53 % de toutes les violations à la CITES au Canada. Ainsi, une intervention rapide et bien coordonnée de la part des agents d’application de la loi est nécessaire afin de protéger les espèces en voie de disparition et pour satisfaire aux besoins des trois organismes. De plus, selon M. Brunet, non seulement les trois organismes doivent coopérer ensemble en faisant preuve de célérité, mais il est  également essentiel qu’ils se fient l’un à l’autre dans le cadre de toutes les inspections et enquêtes. Autrement, les éléments de preuve entourant la violation de la CITES pourraient être remis en question au tribunal.

19 Lorsqu’on lui a demandé comment fonctionnait, en 2006, les procédures liées à la disponibilité à Burlington, en Ontario, M. Brunet a répondu qu’il y avait à l’administration centrale cinq agents d’application de la loi qui assumaient à tour de rôle les responsabilités de l’agent de service, à raison d’une semaine sur cinq. Chaque agent devait se conformer à un horaire préétabli concernant la disponibilité. Lorsqu’il recevait un message par téléavertisseur, l’agent de service devait se présenter au travail aussi rapidement que possible.

20 M. Brunet a également renvoyé deux courriels à cet effet qu’il avait envoyés aux agents d’application de la loi le 29 mars et le 13 avril 2006, respectivement (pièce U-6), qui étaient formulés comme suit :

[Traduction]

J’aimerais vous signaler que Denise a préparé l’horaire des agents de service à la suite de discussions qu’elle a eues avec moi pour l’AF 2006-2007. Bienvenue Todd […] vous faites maintenant partie de l’horaire des agents de service de façon permanente.

Vous trouverez chacun l’horaire dans le calendrier d’Outlook de Denise auquel, si je comprends bien, vous avez chacun accès par l’intermédiaire de votre ordinateur au bureau.

Comme l’année dernière, vous devez discuter avec moi des changements envisagés et je dois les approuver (ou ils doivent être approuvés par Gary, en mon absence).

À compter du 3 avril, le personnel sera répartie comme suit :

Stan – du 3 au 9 avril
Val – du 10 au 16 avril
Todd - du 17 au 23 avril
Doug – du 24 au 30 avril

Andrew – du 1er au 7 mai

Et ainsi de suite […].

Veuillez examiner et prendre connaissance de votre horaire. Je vous prie de planifier votre vie et vos fonctions en conséquence lorsque vous agissez à titre d’agent de service durant la période qui vous est assignée à tour de rôle. Comme pour les années antérieures, on attend à ce que l’agent de service soit disponible dans la région du grand Toronto (RGT) pendant cette période. De plus, il incombe à chacun d’entre vous de pouvoir accomplir vos fonctions lorsque vous agissez à titre d’agent de service, si et lorsque c’est nécessaire. Le concept de l’agent de service a été discuté à un certain nombre de réunions de l’équipe de gestion (ÉG) au cours des derniers mois et nous avons l’intention de rédiger des instructions permanentes d’opération (IPO) dans un proche avenir afin de mettre par écrit ce qui a été convenu jusqu’à maintenant.

Un aspect qui a été porté à mon attention et qui pourrait peut-être constituer un changement pour certains d’entre vous à compter du 1er avril est le suivant : tandis qu’auparavant, nous avions affirmé que les responsabilités de l’agent de service devaient être assumées de 20 h à 22 h (époque où Dane en était le responsable), j’ai constaté que nous vous avons en fait rémunéré pour deux périodes les jours de semaines (de 16 h à 20 h et de 20 h à 24 h) et pour quatre périodes les fins de semaine (de 8 h à 12 h, de 12 h à 16 h, de 16 h à 20 h et de 20 h à 24 h). Ceci étant le cas, si vous ne le faites pas déjà, veuillez vous assurer que votre téléavertisseur reste allumé jusqu’à minuit, les jours de semaine et les fins de semaine.

Merci de votre attention.

Gerry

[…]

Objet : Discussions entourant le téléavertisseur et la disponibilité des agents de service

Inspecteurs : La note qui suit vise à vous fournir un résumé des discussions qui ont eu lieu entre vous, Gary et moi le mardi 11 avril 2006. La note comprend également des renseignements en réponse à certaines des questions soulevées par l’agent Sweiger dans un courriel daté du 30 mars 2006.

L’ÉG a informé tous les inspecteurs qu’elle a entièrement l’intention d’élaborer des IPO au sujet des responsabilités des agents de service et des responsabilités durant la période de disponibilité afin d’améliorer les instructions permanentes qui existent déjà au niveau régional et pour clarifier les attentes à l’égard de l’ensemble des employés concernés.

L’ÉG a expliqué qu’elle s’attend maintenant à ce que les agents prolongent l’exécution de leurs responsabilités d’agent de service de 22 h à 24 h. Les raisons à cela sont simples. Les employés concernés ont été rémunérés pour deux périodes les jours de semaine (16 h-20 h et 20 h-24 h) et pour quatre périodes les fins de semaine (8 h-12 h, 12 h-16 h, 16 h-20 h et 20 h-24 h). Il serait illogique pour l’employeur de débourser des fonds pour un travail qui n’est pas accompli. De plus, on sait que certains des agents d’inspection étirent déjà la période prolongée de disponibilité jusqu’à 24 h. Ainsi, nous informerons nos partenaires du changement de l’horaire de la période de disponibilité et il faudra modifier les cartes de visite actuellement en circulation des agents de service.

L’ÉG a expliqué que le port du téléavertisseur de l’agent de service n’est pas une responsabilité volontaire pour les inspecteurs concernés. Ils assurent ce service pendant une période prolongée et en échange touchent une indemnité de disponibilité conformément à la convention collective. L’ÉG a expliqué que les inspecteurs ne peuvent « renoncer » à cette responsabilité, elle fait partie intégrale de ses tâches.

L’ÉG a expliqué qu’il y avait toujours eu une entente selon laquelle l’agent de service demeurerait dans la « RGT » lorsqu’il est responsable du téléavertisseur. Elle a expliqué le concept de la « RGT » en précisant que le bureau de Burlington est notre administration centrale et que chaque inspecteur concerné a un domicile qui se trouve à l’intérieur d’un corridor situé à une distance acceptable de l’administration centrale. Doug, dans votre cas et aux fins du travail, l’ÉG a été informée du fait que le ministère estime que votre domicile se trouve dans la région de Toronto. L’ÉG a expliqué et les inspecteurs ont confirmé que la vaste majorité des appels faits au téléavertisseur de l’agent de service ont trait à la région de Toronto (Aéroport international Pearson). L’ÉG a expliqué que l’agent de service doit faire en sorte que, durant sa période de disponibilité, on puisse le joindre à un numéro de téléphone connu et qu’il doit pouvoir rentrer au travail aussi rapidement que possible après avoir reçu un appel. L’ÉG a expliqué qu’il incombe aux agents de service de planifier leur vie en conséquence lorsqu’ils assument les responsabilités d’agent de service. Elle a expliqué qu’il faut répondre immédiatement aux appels au téléavertisseur et, lorsque c’est nécessaire, l’agent de service doit pouvoir retourner rapidement au travail; par conséquent, il appartient à l’agent de service de s’assurer qu’il peut remplir ses obligations, surtout en dehors des heures de bureau normales (du lundi au vendredi). Si l’agent de service a connaissance d’un conflit personnel au moment où il doit agir comme agent de service, il doit trouver un collègue qui peut le remplacer durant la période prévue, mais il faut que son superviseur soit informé lui aussi des changements apportés.

Les inspecteurs ont demandé à l’ÉG d’envisager la définition d’un « rayon » ou d’une zone où ils doivent se trouver pendant qu’ils agissent comme agent de service plutôt que de simplement parler de la « RGT ». L’équipe de gestion a accepté d’envisager d’inclure une telle définition dans les nouvelles instructions permanentes.

Les IPO régionales en vigueur qui portent sur les appels au téléavertisseur et les interventions auprès des Opérations passagers à l’Aéroport international Pearson (AIP) précisent qu’il faut appeler le téléavertisseur lorsque surviennent des scénarios de Priorité 1 ou lorsqu’on soupçonne que des articles contrôlés qui ne sont accompagnés d’aucun permis émis en vertu de la CITES appartiennent à l’une ou l’autre des catégories suivantes : a) animaux vivants, b) plantes vivantes, c) produits à l’annexe I, d) importations considérées comme étant des quantités commerciales, e) biens périssables. L’agent de service doit répondre immédiatement à l’appel et passer en revue les circonstances de la découverte. Si l’on décide qu’il est nécessaire de se rendre au point d’entrée pour y entamer une quelconque procédure d’application de la loi, l’agent de service a un certain nombre d’options, qui peuvent aller du refus d’autoriser l’accès des articles en question à différentes formes de poursuites. Selon les circonstances, l’agent de service peut communiquer avec des membres de l’ÉG et envisager de faire appel à un enquêteur ou à un agent d’inspection régional. D’autres types d’appels sont considérés comme des scénarios de Priorité 2; on s’attend quand même à ce que l’agent de service y réponde immédiatement, qu’il consigne les détails nécessaires et qu’il prenne des arrangements avec la DALF en vue du ramassage des articles au point d’entrée à un moment approprié (par exemple, une fois par semaine). Note : Veuillez consulter votre manuel des IPO régionales pour obtenir plus de détails.

L’ÉG a expliqué qu’à compter de la présente année financière, on n’inclura pas au calendrier des agents de service les activités qui pourraient les obliger à quitter la « RGT ». L’ÉG a demandé aux inspecteurs de coopérer en signalant les erreurs commises à cet égard et de lui signaler s’ils sont affectés à un projet qui pourrait entrer en conflit avec leurs responsabilités d’agent de service telles qu’elles sont décrites.

L’ÉG a expliqué que, durant la semaine où un agent est de service, il doit fournir une confirmation à l’ASFC ou se rendre aux services passagers et de fret à l’AIP au milieu de la semaine pour vérifier la situation des articles confisqués par l’ASFC et prendre les mesures nécessaires à leur égard ou les ramasser. La détention de spécimens vivants par l’AFPC au nom de la DALF est une préoccupation considérable. L’agent de service doit y aller ou faire en sorte qu’un collègue s’y rende pour s’occuper desdits articles.

L’ÉG a expliqué que tous les appels au téléavertisseur reçus par l’agent de service en poste doivent être consignés dans le registre de l’agent de service.

Certains inspecteurs ont demandé à l’ÉG d’envisager d’étendre les responsabilités d’agent de service à d’autres agents qui travaillent au bureau. L’ÉG a convenu d’examiner/d’envisager une telle mesure à l’avenir.

Merci de votre attention.

Gerry

[Les passages en gras le sont dans l’original.]

[Je souligne.]

21 De plus, M. Brunet a déposé en preuve la pièce E-1, qui porte sur la disponibilité et les responsabilités de l’agent de service ainsi que les instructions permanentes d’opération (IPO) de l’administration centrale et d’autres questions ayant trait aux fonctions et responsabilités liées aux responsabilités et à l’application de la loi sur la faune dans cette région stratégique de l’Ontario.

22 Une IPO spécifique a été élaborée pour la RGT et l’Aéroport international Pearson (AIP) à Toronto, formulée comme suit (pièce U-8) :

[Traduction]

Instructions permanentes d’opération concernant la détention d’animaux protégés par la CITES dans le cadre des Opérations passagers à l’AIP

1. Partenaires :

Douanes Canada (Agence des services frontaliers du Canada)
Agence canadienne d’inspection des aliments
Division de l’application de la loi sur la faune, Environnement Canada

2. Introduction

Aussi bien Douanes Canada (Agence des services frontaliers du Canada) que l’Agence canadienne d’inspection des aliments découvrent couramment des animaux sauvages dont on soupçonne qu’ils sont visés par la CITES et qui ne sont pas accompagnés de permis valides émis aux termes de celle-ci, durant l’exécution de leurs fonctions d’inspection. Les deux organismes collaborent étroitement et depuis longtemps avec Environnement Canada dans le but de contrôler l’importation ou l’exportation illégales d’espèces de plantes et d’animaux en voie de disparition aux ports d’entrée de l’Ontario.

Il est reconnu que les trois organisations ne disposent pas de ressources illimitées et qu’elles souhaitent chacune concentrer leurs efforts d’application de la loi là où ces efforts pourront le mieux protéger les espèces les plus menacées. Ainsi, les présentes IPO font la distinction entre deux séries de mesures d’application de la loi en réponse à deux catégories distinctes de détention en vertu de la CITES, comme suit :

Priorité 1 – Importations de spécimens visés par la CITES exigeant un contact immédiat avec Environnement Canada

Priorité 2 – Importations nécessitant la détention d’articles figurant dans la CITES, suivie d’un contact avec/de la part d’Environnement Canada

3. Priorité 1 – Importations de spécimens visés par la CITES exigeant un contact immédiat avec Environnement Canada.

La Division de l’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada demande que chaque organisme communique immédiatement avec elle lorsque surviennent les situations suivantes où l’on soupçonne que des plantes et/ou animaux visés par la CITES sont importés ou exportés sans permis valide délivré aux termes de la CITES :

L’ACIA communiquera avec Environnement Canada lorsqu’on découvre ce qui suit :

• Animaux vivants
• Plantes vivantes

L’ARC communiquera immédiatement avec Environnement Canada dans les situations où l’on découvre ce qui suit :

Animaux vivants
Plantes vivantes
• Produits figurant à l’annexe I (p. ex. des produits confectionnés à partir d’éléphants [ivoire], de tigres et de tortues marines)
• Importations considérées comme des quantités commerciales (p. ex. 25 portefeuilles en peau de serpent, sacs à main en peau d’alligator, etc.)
• Articles périssables (caviar)

4. Comment communiquer avec la Division de l’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada

Agent de service (de 8 h à 22 h), 7 jours par semaine
No du téléavertisseur : […]

5. Priorité 2 – Importations nécessitant la détention d’articles figurant dans la CITES, et suivi auprès d’Environnement Canada.

Pour toutes les autres importations ou exportations d’espèces sauvages visée par la CITES, sans permis valide de la CITES, et considérées comme n’étant pas une priorité 1, on demande que Douanes Canada détienne les espèces sauvages visées par la CITES par l’émission d’un formulaire K24 (reçu non monétaires) et remette, en mains propres, à l’importateur ou à l’exportateur indiqué, le feuillet d’information d’une page décrivant la Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvageset la réglementation de leur commerce international et interprovincial (WAPPRITTA), (annexe A). Il n’est pas nécessaire pour l’ARC ou l’ACIA de communiquer immédiatement avec EC dans ces circonstances.

6.0 Protocole d’action d’Environnement Canada

6.1 Priorité I – Importations visées par la CITES nécessitant un contact immédiat avec Environnement Canada

Il incombe à l’agent de service en disponibilité de s’occuper de tous les appels reçus de l’ARC et de l’ACIA durant les heures de travail ou reçus au moyen du téléavertisseur en dehors de celles-ci.

Options d’intervention

Environnement Canada répondra promptement à tous les appels comme ci-dessus et examinera les circonstances entourant l’incident.

Si l’on décide de se rendre au point d’entrée pour y prendre une quelconque mesure d’application de la loi, voici les options possibles.

1. Refus d’accès et délivrance d’un avis de retrait (conformément à l’article 18 de la WAPPRIITA).

On a surtout recours à cette mesure lorsque l’animal est un animal de compagnie. L’importateur recevra comme consigne de retirer l’animal à ses propres frais.

2. Délivrance d’un avertissement

L’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada émettra un avertissement et un reçu d’Environnement Canada.

3. Délivrance d’un avis d’infraction en vertu de la Partie I de la Loi sur les infractions provinciales

• en conformité avec les IPO sur les mesures d’application de la loi du Service canadien de la faune – région de l’Ontario (SCF – RO).

4. Sommation en vertu de la Partie I

• en conformité avec les IPO sur les mesures d’application de la loi du Service canadien de la faune – région de l’Ontario (SCF – RO).

5. Poursuite en vertu de la Partie III

• en conformité avec les IPO sur les mesures d’application de la loi du Service canadien de la faune – région de l’Ontario (SCF – RO).

6. Recours à la Cour provinciale (criminelle)

• en conformité avec les IPO sur les mesures d’application de la loi du Service canadien de la faune – région de l’Ontario (SCF – RO).

6.2 Priorité 2 – Importations nécessitant la détention d’articles figurant dans la CITES, et suivi auprès d’Environnement Canada

L’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada visitera une fois par semaine les terminaux à l’AIP et communiquera avec les principaux points d’entrée une fois par semaine pour obtenir et évaluer tous les articles détenus par l’ARC et/ou l’ACIA dans le cadre de la CITES et pour prendre les mesures nécessaires à leur égard.

7. Communication téléphonique avec l’importateur des espèces soupçonnées qui sont protégées par la CITES

L’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada qui reçoit un appel téléphonique de l’importateur ou de l’exportateur indiqué pour discuter de la détention en vertu du formulaire K24, tel qu’il a été demandé dans le feuillet d’information d’une page sur la WAPPRIITA, évaluera les circonstances relatives au dossier.

Options :

1. Les articles ont été inspectés et identifiés comme n’étant pas protégés par l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada. Dans ce cas-là, on autorisera leur libération par Environnement Canada et toutes les parties concernées seront avisées.

2. Les articles ont été inspectés et identifiés par l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada en poste comme étant l’une des exemptions prévues au Règlement sur le commerce d’espèces animales et végétales sauvages. Dans ce cas-là, on autorisera leur libération par Environnement Canada et toutes les parties concernées seront avisées de la décision.

3. Les articles n’ont pas encore été inspectés. Dans ce cas-là, l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada confirmera le numéro de téléphone et l’adresse de l’appelant et l’informera qu’on communiquera avec lui une fois que l’inspection et l’identification des articles seront terminées.

4. Les articles ont été inspectés et déclarés comme étant visés par la CITES et on établit qu’il y a eu violation. L’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada informera l’importateur indiqué du besoin de discuter de la question. On fixe une date et un endroit pour la réunion.

Durant la réunion avec l’importateur ou l’exportateur indiqué, l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada examinera les circonstances de l’incident et prendra une décision concernant le plan d’action approprié à suivre. À ce moment-là, on envisagera les options énoncées aux pages 4 et 5 des présentes IPO.

8. Si l’importateur ne peut rencontrer l’agent

Si l’importateur ne peut se réunir avec l’agent pour discuter davantage de la question, l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada lui enverra, par la poste, l’avertissement et le reçu d’Environnement Canada, indiquant que les articles ont été confisqués.

Selon la quantité, la valeur des articles, la gravité du danger auquel est exposé l’article, etc., l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada peut décider de se rendre au domicile, au lieu de travail ou à l’entreprise de l’importateur pour poursuivre son enquête.

9. Si l’importateur n’appelle pas, comme l’exige le feuillet d’information de la CITES (annexe A)

Si aucun appel n’est reçu de l’importateur indiqué dans les sept jours à compter de la date de la détention de l’espèce en vertu du formulaire K24 de Douanes Canada et que les articles ont été déclarés comme étant visés par la CITES, l’agent d’application de la loi sur la faune d’Environnement Canada appliquera les mesures prévues au point 8 ci-dessus (si l’importateur ne peut pas rencontrer l’agent).

Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES)

Loi sur la protection d’espèces animales ou végétales sauvages et la réglementation de leur commerce international et interprovincial (WAPPRIITA)

Les articles décrits dans le reçu K24 de Revenu Canada ont été détenus en vertu de l’article 101 de la Loi sur les douanes en attendant le transfert du dossier à Environnement Canada.

Veuillez vous assurer de communiquer avec l’organisme indiqué ci-dessous au plus tard sept jours civils après la date estampillée sur le formulaire K24 (non monétaire) qui vous a été remis pour discuter de l’espèce sauvage en question.

[…]

[Les passages en gras le sont dans l’original.]

[Les passages soulignés le sont dans l’original.]

[Je souligne en double.]

Ces IPO font partie des exigences opérationnelles de l’employeur. Les agents d’application de la loi affectés à l’administration centrale, y compris le fonctionnaire, doivent les respecter. D’après l’avocat de l’employeur, les responsabilités énoncées dans ces IPO ne sont pas volontaires, elles font partie intégrante des fonctions des agents.

23 M. Brunet a souligné que l’AIP est l’un des endroits de travail les plus occupés pour les agents de la DALF en raison du nombre important d’importations et d’exportations illégales et légales de faune et de flore vivantes. M. Brunet a réitéré qu’une intervention rapide est nécessaire chaque fois qu’un agent de service reçoit un appel.

24 Il y a eu un échange de courriels entre le fonctionnaire et M. Brunet à propos des responsabilités de l’agent de service (pièce U-7). Le premier courriel, envoyé par le fonctionnaire, est daté du 26 avril 2006 :

[Traduction]

[…]

Messieurs, par souci de clarté, je suppose que l’acronyme ÉG dans votre communication écrite du 13 avril 2006 désigne l’Équipe de gestion qui, je pense, est composée du directeur régional, Gary Colgan, et du directeur régional adjoint, Gerry Brunet.  

Après avoir examiné sérieusement et attentivement les assertions faites dans vos instructions écrites à la date susmentionnée, je suis obligé de répondre et de demander que vous envisagiez les options qui suivent, afin que nous puissions continuer à assurer [traduction] « le maintien de rapports harmonieux et mutuellement avantageux entre l’Employeur (ÉG) et l’employé » (Douglas Sweiger) (Convention collective, Partie 1, Article 1, 1.01).

Brièvement, la façon dont j’interprète la directive reçue de vive voix qui m’a été fournie par Gary Colgan et Gerry Brunet (désignée ci-après comme l’ÉG) lors de notre réunion du 11 avril 2006 et confirmée par la suite dans une communication écrite qui m’était adressée le 13 avril 2006, est que je ne serai plus autorisé à retourner chez moi et à retrouver ma famille les jours de repos pendant une période de dix semaines au cours de l’année financière 2006-2007, quand je suis censé être en disponibilité en tant qu’agent de service. Je comprends de plus qu’on me demande de rester dans la région du grand Toronto durant ces dix fins de semaine et qu’en contrepartie, je toucherai une rémunération qui s’élèvera au total à 4 heures de paye pour 32 heures de disponibilité pendant chacune de ces fins de semaine. Depuis que j’ai commencé à travailler pour la Division de l’application de la loi sur la faune il y a quatre ans et demi en octobre 2001, les fins de semaine, j’ai accompli la fonction de disponibilité en tant qu’agent de service, alors que la direction en était au courant, depuis mon domicile dans le comté de Bruce ou à partir de divers autres endroits dans la province où j’étais affecté à des projets dans le cadre du travail. Pendant deux ans, c’est-à-dire d’octobre 2001 à octobre 2003, j’ai accepté de plein gré d’assumer la responsabilité de disponibilité à titre d’agent de service désigné sans rémunération, 24 heures sur 24, 7 jours par semaine, à tour de rôle, avec deux ou trois autres agents. De janvier 2003 jusqu’à ce jour, à en croire les inscriptions faites au registre du téléavertisseur de l’agent de service, il y a eu au total quatre appels au téléavertisseur après les heures demandant notre intervention dans la RGT, et ce, strictement durant des jours de semaine. Pour ce qui est des centaines d’autres appels au téléavertisseur, on y a répondu par téléphone ou en se rendant à l’endroit voulu durant les heures de travail pendant la semaine. À l’automne 2003, le superviseur des inspections, Dane Wesley, a réussi à négocier une indemnité de disponibilité pour les agents qui, auparavant, n’étaient pas rémunérés en conséquence, afin qu’ils le soient durant les périodes allant de 16 h 30 à 22 h les jours de semaine, et de 7 h à 22 h les fins de semaine. Plus ou moins au même moment, les agents qui se chargeaient des inspections de conformité ont été informés par le superviseur (Dane Wesley) que le chef (Gary Colgan) souhaitait que les agents de service demeurent dans la RGT si possible durant la semaine de travail. Durant toute cette période, j’ai continué à accomplir la fonction de disponibilité en tant qu’agent de service à partir de mon domicile dans le comté de Bruce durant mes jours de repos. Un fait important que je dois signaler est que la fonction de disponibilité à titre d’agent de service n’était pas rémunérée et ne comportait aucune imposition ou restriction géographique quand ma famille et moi-même avons décidé de ne pas déménager à Burlington en 2002. Par conséquent, les attentes et les directives communiquées récemment par l’ÉG que les agents de service demeurent dans la RGT lorsqu’ils sont de service durant les jours de repos ont été mise en œuvre après que j’aie décidé de ne pas me réinstaller et de déménager ma famille à Burlington. De plus, je me suis régulièrement porté volontaire pour travailler durant mes jours de repos puisque divers projets par le passé l’exigeaient, et continueront de l’exiger, lorsque le besoin s’en fait sentir durant ces périodes. Toutefois, l’obligation d’être séparé de mon domicile et de ma famille pendant dix fins de semaine additionnelles par an, strictement pour assurer la disponibilité, causera et cause un préjudice extrême.

Les options proposées qui suivent et que je soumets à votre examen devraient nous sortir de cette impasse et permettre à l’Équipe de gestion et à Douglas Sweiger de continuer à collaborer ensemble dans un climat de confiance et de respect mutuels.

OPTION 1  Les jours normaux de repos, lorsqueDouglas Sweiger se voit assigner la responsabilité d’agent de service (samedi et dimanche), l’ÉG pourrait permettre à Douglas Sweiger de se présenter au travail à Burlington ces journées-là et puis d’utiliser le congé compensatoire accumulé pour prendre deux jours de congé la semaine suivante.

OPTION 2 – Je pourrais continuer à remplir la fonction de disponibilité en tant qu’agent de service durant les jours de repos réguliers à partir de mon domicile dans le comté de Bruce, comme je le fais depuis 2001.

OPTION 3 – Je pourrais entièrement arrêter d’assurer la disponibilité en tant qu’agent de service durant mes jours de repos réguliers afin de pouvoir retourner chez moi pour y retrouver ma famille.

En ce qui concerne certains des points soulevés par l’ÉG dans le message qui m’a été envoyé le 13 avril 2006, il n’était pas « toujours entendu que l’agent de service demeurerait dans la RGT lorsqu’il était muni du téléavertisseur ». Si un tel principe s’appliquait, je suppose que j’en aurais été informé quand j’ai commencé à travailler au SCF/DALF en 2001. En dépit du fait que j’ai accès à une chambre dans la RGT lorsque je travaille au Centre canadien des eaux intérieures (CCEI) durant la semaine, l’ÉG sait pertinemment que mon domicile et ma famille se trouvent dans le comté de Bruce. La somme de […] qui m’a été versée par l’EC au lieu des frais de réinstallation et dont je me sers pour défrayer mes coûts de voyage et d’hébergement alors que je fais la navette entre mon lieu de travail et mon domicile représente une économie considérable pour l’EC lorsque comparée aux coûts prévus de […] si ma famille déménageait à Burlington.

Autant que je puisse en juger, j’ai toujours été disponible à un « numéro connu » afin d’aller travailler aussi rapidement que possible si nécessaire, quand j’étais en disponibilité dans le comté de Bruce durant mes jours de repos.

Si l’ÉG, pour quelque raison que ce soit, ne trouve pas l’option 1 ou l’option 2 attrayantes, je demanderais respectueusement que l’ÉG reporte ou réaffecte la responsabilité d’agent de service durant mes jours de repos.

Pour ce qui est de la décision de l’ÉG de retirer, durant mes jours de repos, les privilèges de stationnement de mon véhicule de travail derrière la grille verrouillée et dans le garage verrouillé de l’Office de protection de la nature de la rivière Grand (OPNRG)/établissement de formation de la Division de l’application de la loi sur la faune au marais Luther Marsh, permettez-moi de préciser que cet arrangement avait été pris à la suite d’une offre que m’avait fait en 2002, sans que je le demande, un ami que je connais depuis 30 ans et qui est gestionnaire de l’installation où se trouve l’OPNRG, Robert Bell. Mon intention était de protéger un bien de la Couronne contre les intempéries et un accès non autorisé du public lorsque je m’absente durant mes jours de repos, et de faciliter mon voyage entre la RGT, Burlington et mon domicile. Je ne pourrais pas assurer ce degré de protection à l’adresse où se trouve ma chambre dans la RGT durant mes absences, et le garage verrouillé dans l’établissement hébergeant l’OPNRG se trouve à une distance du bureau à Burlington qui est inférieure à la distance parcourue quotidiennement par certains de nos autres agents pour se rendre chez eux. Bob Bell n’aurait eu aucune difficulté à me demander de déplacer mon véhicule de travail ailleurs, si sa présence le dérangeait. L’ÉG s’est dite préoccupée par le fait que le véhicule de travail pouvait être incendié, volé ou vandalisé à l’installation de l’OPNRG pendant que j’étais absent durant mes jours de repos. Je crois sincèrement que le véhicule de travail est mieux protégé dans cette installation qu’il le serait dans l’aire de stationnement au CCEI. Durant mes jours de repos, je pourrais stationner le véhicule de travail au domicile de ma sœur qui se trouve à proximité, en amont de la rivière Grand, ou même au détachement local de la police si l’ÉG acceptait que je procède ainsi. J’ai commencé à prendre des arrangements pour amener mon véhicule personnel au CCEI comme me l’a ordonné l’ÉG, si sa directive originale est maintenue. En ce qui concerne l’observation faite par l’ÉG que « votre situation est unique en ce sens que vous êtes le seul employé à avoir décidé, dans le cadre de l’initiative de réinstallation, de laisser votre famille et domicile principal à un endroit lointain et de vous installer dans un deuxième domicile aux fins du travail », mes raisons à l’origine de cette décision étaient profondément personnelles et complexes; par ailleurs, vous avez peut-être oublié que ma conjointe et moi-même avions intenté un important procès contre une société forestière qui avait illégalement abattu des arbres sur notre propriété et que nous ne pouvions pas vendre celle-ci durant la période où nous aurions pu nous réinstaller, même si nous souhaitions le faire. Les poursuites intentées en 1998 en réponse à cette activité forestière illégale ont seulement abouti en 2006.

Pour conclure, j’espère sincèrement que l’Équipe de gestion reconsidérera sa décision en raison de l’effet négatif qu’aura sa position actuelle sur ma famille et moi-même à l’avenir.

[…]

[Les passages en gras le sont dans l’original.]

25 M. Brunet a répondu ceci au fonctionnaire le 6 mai 2006 :

[Traduction]

[…]

Doug, la présente fait suite à votre lettre et à la réunion du 26 avril où il a été question du sujet mentionné en rubrique. L’Équipe de gestion (ÉG) de la DALF – région de l’Ontario, tient à vous remercier d’avoir pris le temps de la rencontrer le 26 avril et d’avoir mis par écrit vos pensées ainsi que quelques options suggérées. Vos arguments et vos options ont été examinées par tous les membres de l’ÉG de la DALF – région de l’Ontario (voir ci-dessous), qui en ont discuté et qui les ont étudiées attentivement.

Premièrement, pour répondre à la question dans votre lettre, l’abréviation ÉG est utilisée depuis plusieurs années au sein de notre division et correspond à « Équipe de gestion ». À l’heure actuelle, l’ÉG se compose de trois membres, soit du directeur, Gary Colgan, du directeur adjoint, Gerry Brunet, et de l’adjointe administrative, Susan Morgan.

Responsabilités de l’agent de service :

Conformément à la directive écrite qui vous a été communiquée le 13 avril 2006, l’ÉG a pris des mesures pour s’assurer que la couverture assurée par l’agent de service au sein de la DALF est uniforme et conforme aux modalités de la convention collective.

Le 11 avril 2006, il y a eu une réunion entre Gary, tous les employés responsables de l’exécution de ces fonctions dans la région de l’Ontario, c’est-à-dire les inspecteurs de la faune (Bruce, Chow, Kish, Morton et Sweiger) et moi-même. Lors de cette réunion, tous les employés concernés ont été informés du plan de la direction visant à améliorer et à rationaliser le système des agents de service au sein de la région et ont appris que des IPO modifiées suivraient pour que l’on dispose d’un document écrit des responsabilités. L’ÉG a discuté des modifications prévues, qui ont pour but d’assurer le traitement égal de tous les employés concernés, en partant du principe que Burlington est le bureau principal de notre Direction, ou notre administration centrale, si vous préférez. Étant donné que Burlington est notre administration centrale et que la clause 30.02 de la convention collective précise que « [l]’employé-e désigné par une lettre ou un tableau pour remplir des fonctions de disponibilité, doit pouvoir être atteint au cours de cette période à un numéro de téléphone connu et pouvoir rentrer au travail aussi rapidement que possible s’il ou elle est appelé à le faire ». L’ÉG a avisé les agents de service que, lorsqu’ils sont en fonction et qu’ils sont chargés de la surveillance des appels envoyés au téléavertisseur, ils doivent planifier leur vie personnelle en conséquence en dehors des heures de travail normale afin qu’ils puissent intervenir de la manière indiquée ci-dessus. De l’avis de l’ÉG, les cinq inspecteurs habitent à une distance raisonnable de Burlington, ce qui leur permet d’intervenir aussi rapidement que possible. Dans votre cas particulier, notre bureau des Ressources humaines nous a informés que votre domicile est considéré comme se trouvant à Mississauga aux fins du travail, selon un accord que vous avez conclu avec le ministère concernant votre réinstallation, durant les deux premières années de votre emploi à la DALF.

Les décisions que vous avez prises vous-même ou avec n’importe quel membre du personnel concernant la réinstallation, au cours des deux premières années de votre emploi au sein de notre Direction, sont des décisions indépendantes et personnelles qui n’ont aucun lien avec l’ÉG.

Comme cela a toujours été le cas, chacun des cinq inspecteurs accomplit, à tour de rôle, une affectation d’agent de service définie, durant une période allant du lundi au dimanche (7 jours). Il s’agit là de la façon dont l’ÉG s’assure de répartir équitablement les fonctions de disponibilité, toujours en conformité avec la clause 30.02. Il incombe à chaque inspecteur d’accomplir ses fonctions d’agent de service selon l’horaire qui leur a été assigné en respectant la convention collective. Pour des raisons et préoccupations opérationnelles, l’ÉG a informé chaque inspecteur qu’il doit pouvoir se présenter aussi rapidement que possible à Burlington (bureau principal) et dans un secteur qui a été décrit antérieurement comme la RGT dans le contexte des responsabilités de l’agent de service. Manifestement, par souci d’équité vis-à-vis de chaque inspecteur, l’ÉG s’attend à ce que chaque agent de service travaille le quart assigné conformément à l’horaire et tout en respectant les directives émises par la direction. L’ÉG reconnaît qu’il y aura, de temps en temps, des conflits pour les agents de service assignés. Tel qu’il a été prévu dans des accords antérieurs, si l’agent de service fait face à un conflit qui l’empêche d’avoir le téléavertisseur sur sa personne durant la période de travail qui lui est assignée, il doit en discuter avec les autres inspecteurs pour trouver quelqu’un qui peut le remplacer et informer le surveillant des arrangements pris à cet effet.

Vous avez fourni à l’ÉG trois options que nous devrions examiner, selon vous, en réponse aux circonstances qui vous sont propres. Nous avons examiné chacune des options et en avons discuté, mais l’ÉG est toujours d’avis que si l’on adoptait l’une ou l’autre de ces options, nous nous placerions dans une situation où nous manquerions d’uniformité et créerions de l’inégalité, parce que nous vous traiterions différemment des autres inspecteurs appelés à agir comme agent de service. Pour prouver cette affirmation, chacune de vos options reproduites ci-dessous est suivie de quelques commentaires :

OPTION 1  –Les jours normaux de repos, lorsqueDouglas Sweiger se voit assigner la responsabilité d’agent de service (samedi et dimanche), l’ÉG pourrait permettre à Douglas Sweiger de se présenter au travail à Burlington ces journées-là et puis d’utiliser le congé compensatoire accumulé pour prendre deux jours de congé la semaine suivante.

Selon vos intentions, cette option ferait en sorte que l’ÉG conclurait un accord en dehors des modalités de la convention collective. Celle-ci exigerait qu’après avoir travaillé la période de 37,5 heures (du lundi au vendredi) en tant qu’agent de service, nous vous rémunérions à une fois et demie et deux fois votre taux salarial les premier et deuxième jours de repos, respectivement.

Même si vous acceptiez de travailler vos premier et deuxième jours de repos en échange d’un congé compensatoire calculé en temps normal (15 heures) la semaine d’après, vous pourriez quand même soumettre par la suite une réclamation selon laquelle vous aviez droit à un taux plus élevé durant ces périodes, et l’ÉG (ministère) serait obligée d’accepter de vous payer à ce taux-là conformément à la convention collective.

OPTION 2 – Je pourrais continuer à remplir la fonction de disponibilité en tant qu’agent de service durant les jours de repos réguliers à partir de mon domicile dans le comté de Bruce, comme je le fais depuis 2001.

L’ÉG a expliqué qu’il ne s’agit plus d’une option dans votre cas lorsque vous agissez comme agent de service. L’ÉG a expliqué qu’elle fait la transition à un système qui permettrait de faire en sorte qu’au besoin, l’agent de service puisse intervenir aussi rapidement que possible dans sa zone de l’administration centrale, décrite historiquement comme correspondant à la « RGT ». Vous avez indiqué qu’il vous faudrait environ trois heures pour vous rendre du comté de Bruce à la zone de votre administration centrale (ou « RGT »). L’ÉG a expliqué que ce délai n’est pas acceptable. L’ÉG a informé tous les agents qu’ils devraient planifier leur vie personnelle en conséquence lorsqu’ils agissent à titre d’agent de service désigné et pour la durée du temps où ils assument cette responsabilité. Il s’agit d’un objectif qui peut être atteint par tous les agents de service qui assurent la disponibilité à partir de leur domicile après les heures de travail. Dans votre cas, votre domicile aux fins du travail est considéré comme étant situé à Mississauga, en Ontario.

OPTION 3 –Je pourrais entièrement arrêter d’assurer la disponibilité en tant qu’agent de service durant mes jours de repos réguliers afin de pouvoir retourner chez moi pour y retrouver ma famille.

L’ÉG vous a avisé qu’il ne s’agit pas d’une option. En tant que l’un des cinq inspecteurs, l’une des responsabilités de votre poste est d’assurer les fonctions d’agent de service (7 jours – 8 h à 24 heures) à tour de rôle. Le ministère vous rémunère pour ce service en appliquant les dispositions sur l’indemnité de disponibilité contenues dans votre convention collective, durant les périodes allant de 16 h à 24 h, les jours de semaine, et de 8 h à 24 h, les fins de semaine

Le stationnement du véhicule de la DALF à l’Office de protection de la nature de la rivière Grand – Zone de gestion de la faune du marais Luther :

Merci d’avoir pris le temps de fournir quelques précisions concernant le stationnement de votre véhicule de la DALF à l’Office de protection de la nature de la rivière Grand – Zone de gestion de la faune du marais Luther et de proposer quelques solutions de rechange.

Comme l’ÉG vous l’a expliqué dans une lettre datée du 13 avril 2006 après notre réunion du 11 avril 2006, cet arrangement la met mal à l’aise. Nous ne sommes pas disposés à changer d’avis sur la question et nous aimerions que nos instructions antérieures soient respectées.

En partant du principe que votre domicile aux fins du travail se trouve à Mississauga et que le bureau de la DALF à Burlington est considéré comme votre administration centrale, l’ÉG tente d’appliquer à votre égard les mêmes dispositions qui s’appliquent à tous les autres agents qui travaillent au sein de la Direction. Je sais que vous aviez l’intention de demander à Todd Kish de vous conduire au marais Luther hier (vendredi 5 mai 2006) pour aller y chercher votre véhicule personnel et je vous remercie de vous conformer à cette requête antérieure. Maintenant, vous pourrez utiliser le véhicule de patrouille du ministère en suivant les mêmes principes de fonctionnement que les autres agents, à partir de la semaine du 8 mai 2006.

En espérant que la présente répond à votre lettre du 26 avril 2006.

[…]

[Je souligne.]

26 Selon le témoignage non contredit de M. Brunet, dans la RGT, en 2006, l’administration centrale était le seul endroit dans la région de l’Ontario où l’on trouvait des installations adéquates pour assurer l’hébergement contrôlé de plantes et d’animaux vivants.

27 M. Brunet s’est référé à un courriel envoyé le 17 novembre 2006 à tous les agents d’application de la loi (pièce E-1, onglet 2), qui clarifiait les responsabilités des agents de service. Voici un extrait du courriel :

[Traduction]

[…]

Pour éviter tout malentendu quant aux attentes de l’Équipe de gestion à cet égard et pour respecter notre engagement énoncé au paragraphe 2 ci-dessus, la présente vise à confirmer que nous nous attendons à ce qu’un inspecteur de la faune qui est en disponibilité s’assure qu’il est en mesure de retourner au CCEI, c’est-à-dire à notre zone de l’administration centrale, dans les 45 minutes.Cela signifie que lorsque vous êtes en disponibilité, vous devez vous arranger pour vous trouver tout au plus à 45 minutes du bureau.

[…]

[Les passages mis en évidence le sont dans l’original.]

28 M. Brunet a expliqué que le nombre d’appels faits aux agents de service de l’Ontario augmente et que plus de la moitié concerne l’AIP et la RGT; ces deux secteurs relèvent de la responsabilité des cinq agents d’application de la loi à l’administration centrale. Les statistiques qui suivent montrent qu’à chaque année, depuis janvier 2003, le nombre total des heures travaillées en dehors des heures de travail normales a augmenté : 164 heures en 2003, 208 heures en 2004, 282 heures en 2005 et 143 heures entre janvier 2006 et le 30 juin 2006 (pièce E-1, onglet 4).

29 M. Brunet a présenté des rapports d’enquête portant sur de multiples cas où l’on a essayé de faire passer en contrebande des espèces protégées de serpents, en violation de la CITES, et portant sur l’importation illégale d’espèces protégées d’aigles du Vietnam, également en violation de la CITES (pièce E-1, onglets 5 et 7). Dans chaque cas, une intervention rapide, la confiscation des spécimens et une enquête menée sur le terrain ont sauvé des espèces menacées et ont abouti à la condamnation des contrebandiers. Si ces condamnations ont pu se faire, c’est grâce à la présentation de renseignements de qualité recueillis dans le cadre d’interventions et d’enquêtes coordonnées et efficientes menées par les agents d’application de la loi, grâce à une étroite collaboration entre les partenaires et grâce à des notifications et enquêtes rapides aux endroits où l’on tentait d’introduire les articles clandestinement.

30 À l’onglet 8 de la pièce E-1, on trouve la carte Google créée par M. Brunet pour montrer la distance qu’il faut parcourir en voiture pour se rendre du domicile familial du fonctionnaire, à Tobermory, à l’administration centrale, et pour se rendre de son domicile aux fins du travail, à Mississauga, à l’administration centrale. La distance qui sépare le domicile familial du fonctionnaire, à Tobermory, de l’administration centrale est d’environ 298 km dans une direction, ce qui correspond à un voyage de 4 heures et 13 minutes. La distance entre le domicile du fonctionnaire aux fins du travail, à Mississauga, et l’administration centrale est de 43,6 km, et il faut une trentaine de minutes pour faire le trajet en voiture.

31 M. Brunet a affirmé que l’employeur n’avait pas imposé d’obligation quant à l’adresse domiciliaire aux agents d’application de la loi en disponibilité. Cependant, les agents de service doivent pouvoir intervenir en réponse à un appel fait au téléavertisseur aussi rapidement que possible, soit dans un délai de tout au plus 45 minutes. M. Brunet a souligné que, lorsqu’on est en disponibilité, l’intervention en réponse à un appel n’est pas volontaire, mais une obligation, puisque cette intervention fait partie des tâches de l’agent d’application de la loi et répond à des besoins opérationnels.

32 M. Brunet s’est référé à la description de travail (pièce U-5), qui décrit plus en détail les devoirs et les responsabilités d’un inspecteur à la DALF.

III. Résumé de l’argumentation

A. Pour le fonctionnaire

33 Le représentant du fonctionnaire a précisé que l’employeur avait apporté, aux conditions de travail du fonctionnaire, un important changement qui avait eu un effet négatif sur sa vie personnelle et familiale.

34 Le représentant du fonctionnaire a également demandé pourquoi, si l’exigence de disponibilité est un besoin tellement urgent, l’employeur ne répond pas aux appels entre 23 h 59 et 8 h, sept jours par semaine. D’après le représentant du fonctionnaire, l’employeur n’utilise pas un service de messagerie durant cette période de huit heures.

35 Par ailleurs, pourquoi l’employeur a-t-il autorisé le fonctionnaire à assurer la disponibilité pendant quatre ans à partir de son domicile familial de Tobermory, lorsqu’il savait qu’il avait besoin de plus de trois heures pour se rendre à l’administration centrale? Le représentant du fonctionnaire a fait valoir que rien dans le libellé de l’article 30 de la convention collective ne laisse supposer qu’il s’agit d’un travail urgent ou de situations d’urgence.

36 Le représentant du fonctionnaire a attiré l’attention sur la pièce U-7 et a souligné que l’employeur aurait pu prendre des mesures d’adaptation à l’égard du fonctionnaire et accepter au moins l’une des trois options proposées lorsqu’il a soulevé la question de la disponibilité. Le représentant du fonctionnaire a suggéré qu’en rejetant les options proposées par le fonctionnaire, l’employeur agissait de façon déraisonnable.

37 Par ailleurs, le représentant du fonctionnaire a indiqué que l’on pouvait toujours joindre celui-ci par téléavertisseur lorsqu’il était en disponibilité et qu’il n’avait jamais omis d’exécuter ses fonctions avant ou après le dépôt de son grief en 2006.

38 Pour conclure, le représentant du fonctionnaire a déclaré que la convention collective n’impose aucune exigence selon laquelle le fonctionnaire doit habiter dans la zone de l’administration centrale ou dans la RGT et qu’il est raisonnable pour le fonctionnaire d’habiter à Tobermory et d’accomplir ses fonctions de disponibilité à partir de cet endroit même si, dans certaines circonstances exceptionnelles, il peut avoir besoin de plusieurs heures pour se présenter au travail.

39 À l’appui de ses arguments, le représentant du fonctionnaire a fourni les six cas suivants : Cochrane (Town) v. Canadian Union of Public Employees, Local 71 (2005),141 L.A.C. (4e) 238; Kamsack (Town) v. Canadian Union of Public Employees, Local 1881 (2000), 89 L.A.C. (4e) 153; KVP Co. Ltd. v. Lumber & Sawmill Workers’ Union, Local 2537 (1965), 16 L.A.C. 73; Gasbarro c. Conseil du Trésor (Bureau canadien d’enquête sur les accidents et la sécurité des transports), 2007 CRTFP 87; Helmer c. Conseil du Trésor (Défense nationale), dossier de la CRTFP 166-02-25427 (19940524); Dahl c. Conseil du Trésor (Agriculture Canada), dossier de la CRTFP 166-02-25535 (19941123).

B. Pour l’employeur

40 L’avocat de l’employeur a suggéré dans son argumentation qu’il importait de répondre aux trois questions suivantes : Le grief est-il prématuré? Dans la négative, les mots « aussi rapidement que possible » dans la clause portant sur la disponibilité peuvent-ils être définis par la direction? Si la direction est en mesure de définir le sens de l’expression « aussi rapidement que possible », le fonctionnaire peut-il quand même être autorisé à remplir ses obligations en matière de disponibilité à partir de son domicile familial de Tobermory?

1. Le grief est-il prématuré?

41L’avocat de l’employeur a commencé son argumentation en affirmant que le grief était prématuré et que l’arbitre de grief n’avait pas compétence en la matière. Le fonctionnaire n’a pas prouvé qu’il avait été lésé selon le paragraphe 208(1) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP). À l’appui de son argument concernant le caractère prématuré du grief, l’avocat de l’employeur a présenté Fok et Granger c. Conseil du Trésor (ministère des Transports), 2006 CRTFP 93, etYoung c. Conseil du Trésor (Revenu Canada — Impôts), dossier de la CRTFP 166-02-22120 (19920908).

2. Définition de l’expression « aussi rapidement que possible » contenue dans la clause sur la disponibilité

42 L’avocat de l’employeur a présenté plusieurs cas où l’on a examiné l’expression « aussi rapidement que possible ». Le cas qui correspond le plus à la situation examinée ici est Canada v. Beatrice (The) (1895), 5 Ex.C.R. 9. On y déclare que l’expression [traduction] « “[a]ussi rapidement que possible” signifie “dans un délai raisonnable” […] » et « […] que la définition d’un délai raisonnable dépend des faits ayant trait à l’affaire dans le cadre de laquelle la question survient ». De plus, la Cour suprême du Canada a décrit le bout de phrase « aussi rapidement que possible » dans W.A. Bechtel Co. v. Stevenson & Van Humbeck Sawmill, [1945] S.C.R. 652, comme signifiant une période [traduction] « […] ayant des limites raisonnables dans le temps […] ».

43 L’avocat de l’employeur a soutenu que, dans le cas examiné ici, si l’employeur ne peut pas définir le sens de la notion selon laquelle il faut intervenir dans un délai précis, la clause 30.03 de la convention collective ne peut être déclenchée et ne peut s’appliquer. Voici le libellé de la clause :

30.03 Il n’est pas versé d’indemnité de disponibilité si l’employé-e est incapable de se présenter au travail lorsqu’il ou elle est tenu de le faire.

44 Finalement, l’avocat de l’employeur s’est référé à Cochrane (Town), où l’arbitre de grief a indiqué que l’employeur avait une préoccupation légitime concernant le délai d’intervention d’un employé en disponibilité. Dans ce cas, l’arbitre de grief avait déclaré qu’il pouvait être raisonnable pour l’employeur d’exiger un délai d’intervention précis de la part des employés en disponibilité. Ce principe s’applique également en l’espèce. De plus, l’arbitre de grief dans Cochrane (Town) a affirmé que la définition d’un délai d’intervention était raisonnable en raison de la nature du travail (où il était nécessaire de se présenter au travail aussi rapidement que possible, comme en l’espèce) et parce que l’employeur rémunérait les employés pour leur statut de disponibilité. L’arbitre de grief a écrit ce qui suit : [traduction] « [e]n versant aux employés une somme additionnelle pour être en disponibilité, l’employeur a le droit d’exercer un certain contrôle sur les heures où ces employés ne travaillent pas que, sinon, il ne pourrait exercer […] ».

45 En ce qui concerne l’exigence contenue dans la clause sur la disponibilité de répondre « aussi rapidement que possible » à un appel, le fonctionnaire a déclaré, durant son témoignage, que bien qu’une grande partie de son travail consiste à fournir des conseils par téléphone, un grand nombre des appels qu’il reçoit l’obligent à se rendre sur place pour faire une inspection visuelle et assurer la santé et la sécurité de toutes les parties à l’endroit où l’on soupçonne qu’il y a une importation ou exportation illégale d’animaux vivants qui risquent d’être des espèces en voie de disparition. Ce besoin est particulièrement prononcé en raison de la possibilité qu’il s’agisse de reptiles ou d’autres animaux venimeux. Les agents d’application de la loi suivent une formation spéciale qui leur permet d’intervenir et de saisir des reptiles. Bien que la santé et la sécurité de tous les partenaires participant aux enquêtes sur place soient importantes et souvent critiques, il est essentiel aussi de se conformer à la législation qui exige la protection des espèces en voie de disparition tandis qu’elles sont en vie. Cela explique le besoin d’intervenir rapidement pour assurer la survie des espèces en voie de disparition et la nécessité de respecter de nombreuses exigences opérationnelles liées aux responsabilités des agents d’application de la loi.

3.  Peut-on continuer à autoriser le fonctionnaire à remplir ses obligations en matière de disponibilité à partir de son domicile familial de Tobermory?

46 L’avocat de l’employeur a fait valoir que l’employeur a de nombreuses responsabilités et obligations qui découlent à la fois de lois fédérales au Canada et de plusieurs traités et conventions à l’échelle internationale dont le Canada est signataire. Ces traités internationaux ont donné lieu à plusieurs partenariats où l’employeur, l’ASFC et l’ACIA collaborent ensemble pour s’assurer que le Canada fait sa part en se conformant à la législation fédérale sur la faune et la CITES. Non seulement l’employeur (par l’intermédiaire de la DALF) doit respecter les lois sur la santé et la sécurité et l’ensemble des règlements d’application, il a également adopté et mis en œuvre des IPO portant sur la détention des espèces sauvages protégées par la CITES.

47 L’avocat de l’employeur a souligné que tous les appels reçus de l’ASFC et de l’ACIA durant les heures de travail ou au moyen du téléavertisseur en dehors des heures de travail relèvent de la responsabilité de l’agent de service en disponibilité. Le fonctionnaire assume fréquemment le rôle de l’agent de service en disponibilité et partage cette responsabilité, à tour de rôle, avec les autres agents. L’agent de service doit intervenir de façon appropriée en se conformant aux directives contenues dans les IPO. Souvent, l’agent de service est appelé à intervenir sur place à l’endroit de l’incident. Une intervention rapide et immédiate peut être nécessaire parce qu’une espèce en voie de disparition risque d’être en détresse et avoir besoin d’une attention particulière pour survivre. Dans ces circonstances, et selon la nature de l’incident, il se peut que l’agent de service ait besoin de l’aide d’un autre agent d’application de la loi. Si un employé de l’ASFC demande l’aide et l’intervention d’un agent d’application de la loi et que celui-ci n’intervient pas rapidement, l’employé risque de se trouver dans une situation où il ne peut pas remplir ses fonctions normales. Si l’agent de service n’intervient pas promptement, cela risque de nuire à la relation à long terme avec l’ASFC et l’ACIA.

48  Au fil du temps, le sud de l’Ontario est devenu la principale région pour l’exportation et l’importation illégales au Canada d’animaux en danger, des reptiles et des plantes en voie de disparition. Étant donné que plus de la moitié (proportion qui augmente) de ces exportations et importations se font dans la RGT, Burlington est aujourd’hui l’administration centrale pour les interventions dans le sud de l’Ontario. Ce niveau d’activité élevé à l’administration centrale a rendu nécessaire une plus grande efficience opérationnelle dans la RGT et à l’AIP.

49 Pendant qu’ils sont en disponibilité, les agents de service rencontreront, dans l’exercice normal de leurs fonctions, certaines situations extrêmes pour lesquelles ils ont suivi une formation. L’avocat de l’employeur a souligné que l’on ne crée pas intentionnellement de telles situations pour les agents de service, mais que lorsqu’elles surviennent, ils savent comment y réagir. Ils sont entraînés à prendre en considération la santé et la sécurité de tous les employés concernés et de protéger les espèces en voie de disparition, qui est un objectif de la CITES. Lorsqu’un agent de service en disponibilité reçoit un appel, il doit intervenir. Au moment de l’appel, il n’est pas possible pour lui de communiquer avec l’un des quatre autres agents pour lui demander d’intervenir à sa place. Il doit réagir immédiatement. Toutefois, lorsqu’un agent reçoit la liste de disponibilité ou la liste des affectations plusieurs semaines à l’avance, il peut demander à échanger son affectation avec un autre agent et demander au surveillant d’approuver ce changement à l’avance. L’agent de service en disponibilité ne peut déléguer cette responsabilité à un autre agent à la dernière minute. Toute substitution avec un autre agent doit se faire à l’avance, et le surveillant doit en avoir connaissance et l’approuver. L’employeur doit contrôler l’efficience opérationnelle de l’organisation tout en disposant d’une marge de manœuvre normale.

50 Si le fonctionnaire est à son domicile aux fins du travail, à Mississauga, durant son affectation consistant à assurer la disponibilité une semaine sur cinq, il se trouve à 43,6 km (une trentaine de minutes) de l’administration centrale. Si le fonctionnaire se trouve à son domicile familial de Tobermory durant cette semaine, il est éloigné de 298 km (environ quatre heures) de l’administration centrale (pièce E-1, onglet 8). Le trajet en automobile de Tobermory à l’administration centrale est long dans des circonstances normales et devient plus long lorsqu’il y a certaines conditions hivernales ou conditions dues à d’autres facteurs, souvent imprévisibles. Par conséquent, il est déraisonnable pour le fonctionnaire de demander l’autorisation d’accomplir ses fonctions de disponibilité à partir de son domicile familial à Tobermory.

51 Toujours d’après l’avocat de l’employeur, le fonctionnaire ne pouvait pas s’appuyer sur une pratique antérieure lui permettant de répondre aux appels pendant qu’il était en disponibilité à son domicile familial de Tobermory pour exiger la préclusion. Aucune pratique de ce genre n’équivaut à une promesse faite au fonctionnaire par l’employeur que la pratique se poursuivrait indéfiniment. L’avocat de l’employeur a attiré l’attention sur le témoignage du fonctionnaire selon lequel il ne pouvait pas déménager sa famille de Tobermory à cause d’un litige entourant la propriété, qui n’a été réglé qu’après plusieurs années, lorsqu’il travaillait déjà pour l’employeur. L’avocat de l’employeur m’a référé à Pronovost c. Conseil du Trésor (ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2007 CRTFP 93.

52 Finalement, le fonctionnaire insistait que lui-même et sa famille avaient subi un préjudice à cause des fonctions de disponibilité qu’il devait remplir. Or, lors de son témoignage, il a déclaré que non seulement il était toujours disponible et pouvait travailler, mais qu’il se portait volontaire pour travailler des heures supplémentaires durant ses jours de repos. D’après l’avocat de l’employeur, le fonctionnaire ne peut pas soutenir maintenant que le fait d’avoir à répondre à des appels pendant qu’il était en disponibilité à son domicile familial de Tobermory lui causait un préjudice.

53 Durant le contre-interrogatoire, on a demandé à M. Brunet pourquoi le fonctionnaire était assujetti à une exigence selon laquelle il devait habiter dans la RGT ou dans la zone de l’administration centrale. M. Brunet a répondu que l’employeur n’imposait pas au fonctionnaire une exigence selon laquelle il devait habiter dans la région, mais plutôt une exigence qu’en sa qualité d’agent de service en disponibilité, il puisse répondre aussi rapidement que possible à un appel lui demandant de se présenter au travail. La même exigence s’appliquait à l’ensemble des cinq agents d’application de la loi à l’administration centrale. M. Brunet a expliqué que le port du téléavertisseur de l’agent de service n’est pas volontaire pour l’agent désigné mais fait plutôt partie de ses fonctions. Par ailleurs, M. Brunet a affirmé que l’on n’avait pas demandé au fonctionnaire d’habiter dans la zone de l’administration centrale puisque depuis 2004, son domicile aux fins du travail se trouvait à Mississauga. M. Brunet a ajouté que si le fonctionnaire a un domicile à Mississauga, c’est qu’il en a décidé ainsi lui-même et qu’il s’agit d’un libre choix.

54 L’avocat de l’employeur a parlé du fait que le représentant du fonctionnaire s’est référé à Kamsack (Town) et Dahl. Selon l’avocat, ces deux cas sont entièrement différents du cas examiné ici.

55 L’avocat de l’employeur a fait valoir que l’employeur administrait la clause sur la disponibilité en se conformant à l’entier article 30 de la convention collective. Selon lui, il n’y avait pas eu violation de la convention collective et surtout pas de la clause sur la disponibilité. L’article 30 impose deux obligations à l’employeur, à savoir répartir équitablement les fonctions de disponibilité et verser l’indemnité de disponibilité prévue lorsqu’un employé est appelé à se présenter au travail. Le fonctionnaire n’a pas prétendu ni prouvé qu’il y avait eu violation de ces obligations par l’employeur.

IV. Motifs

A. Objection liée au caractère prématuré du grief

56 Je me pencherai d’abord sur la question du caractère prématuré du grief. L’avocat de l’employeur a soulevé, pour la première fois, une objection lors de l’audience que je présidais selon laquelle le fonctionnaire n’avait pas encore subi de préjudice personnel aux termes de l’alinéa 208(1)a) de la LRTFP lorsqu’il a déposé son grief. L’avocat de l’employeur m’a demandé de statuer que lorsqu’il a été déposé, le grief était strictement de nature prospective.

57 J’ai de la difficulté à comprendre l’objection soulevée par l’avocat de l’employeur lorsque j’examine les documents que j’ai devant moi. Premièrement, l’employeur a rejeté le grief en invoquant sa présentation tardive aux premier et deuxième paliers de la procédure de règlement des griefs. Cela correspond très peu à un argument lié au caractère prématuré du grief. Deuxièmement, l’employeur a néanmoins reconnu et examiné spécifiquement, dans le contexte de la procédure interne de règlement des griefs, la contestation soulevée par le fonctionnaire en ce qui concernait son interprétation de l’exigence de rentrer au travail « aussi rapidement que possible » contenue dans la clause sur la disponibilité. Cela indique que l’employeur considérait que la question s’appliquait à l’époque, plutôt que d’être prématurée. Troisièmement, même si le grief a été renvoyé à l’arbitrage le 19 décembre 2006, il a fallu attendre près de trois ans pour que soit soulevée la question du caractère prématuré du grief, pour la première fois, à l’audience que je présidais.

58 Dans des décisions antérieures, des arbitres de grief ont considéré comme abandonnées des objections qui n’avaient pas été soulevées dès la première occasion. Par exemple, dans Kettle c. Conseil du Trésor (Transports Canada), dossier de la CRTFP 166-02-21941 (19920413), Sauvé c. Conseil du Trésor (Travaux publics et Services gouvernementaux Canada), dossier de la CRTFP 166-02-26974 (19981130), Beers c. Conseil du Trésor (ministère de la Défense nationale), 2000 CRTFP 2, McMahon c. Sénat du Canada, 2003 CRTFP 50, et Doiron c. Conseil du Trésor (Service correctionnel du Canada), 2006 CRTFP 77, l’arbitre de grief a rejeté pour ce motif des objections quant à la recevabilité de griefs soulevées pour la première fois lors de l’audience d’arbitrage. Je ne vois pas comment, en l’espèce, l’employeur n’aurait pas pu mentionner sa préoccupation concernant le caractère prématuré du grief dans le cadre de la procédure de règlement des griefs, s’il estimait réellement que le grief était strictement de nature prospective.

59 Je rends que, dans les circonstances particulières de ce cas, l’objection soulevée par l’avocat de l’employeur concernant le caractère prématuré du grief est peu sincère. En omettant de soulever cette préoccupation dès la première occasion, l’employeur a renoncé à son droit de le faire.

B. Préclusion

60 Le fonctionnaire s’est appuyé sur le fait que pendant environ quatre ans avant le dépôt du grief, soit à compter de mai 2006, il voyageait à l’administration centrale à partir de son domicile familial de Tobermory. Il prétend que, par conséquent, le fait de se rendre au travail à partir de son domicile familial de Tobermory est une pratique de longue date que l’employeur ne peut modifier. L’avocat de l’employeur a invoqué Pronovost pour faire valoir qu’une telle pratique antérieure n’équivalait pas à une promesse faite par l’employeur au fonctionnaire qu’à l’avenir, il pourrait continuer à intervenir en réponse à des appels reçus pendant qu’il était en disponibilité depuis son domicile familial de Tobermory. Je suis d’accord avec cette affirmation.

61 Par ailleurs, je ne dispose d’aucune preuve qui m’aurait été fournie par le fonctionnaire à l’appui de sa demande de préclusion qu’il s’était fié à une promesse, implicite ou explicite, de l’employeur. Au contraire, la preuve montre que l’employeur avait cinq agents d’application de la loi à l’administration centrale et que les cinq agents partageaient des affectations qui les obligeaient à être disponibles pendant une semaine, selon un cycle de cinq semaines. Ce tableau de répartition de la disponibilité exigeait que tous les agents d’application de la loi se présentent à l’administration centrale dans les 45 minutes suivant la réception d’un appel leur demandant de rentrer au travail.

C. Présumée exigence quant au lieu du domicile

62 Le représentant du fonctionnaire a prétendu que l’employeur avait apporté, aux conditions de travail du fonctionnaire, un important changement qui avait eu un effet négatif sur sa vie personnelle et familiale. Le fonctionnaire a le sentiment que l’employeur l’a traité injustement en n’acceptant pas l’une des trois options qu’il lui a suggérées. Le représentant du fonctionnaire a également soutenu qu’aucune exigence domiciliaire ne s’applique au fonctionnaire dans la RGT ou dans la zone de l’administration centrale. Finalement, le représentant du fonctionnaire a affirmé qu’il est raisonnable pour le fonctionnaire d’avoir son domicile familial à Tobermory et de quand même remplir ses fonctions de disponibilité à partir de cet endroit, même si, dans des circonstances exceptionnelles, il peut avoir besoin de plusieurs heures pour se rendre à l’administration centrale.

63 Pour ce qui est des trois options proposées par le fonctionnaire, après les avoir examinées soigneusement, l’employeur a répondu qu’il ne pouvait pas prendre les mesures demandées sans créer des circonstances spéciales qui auraient enfreint la convention collective. De plus, il n’aurait pas respecté le calendrier de disponibilité établi pour les quatre autres agents d’application de la loi, ni les besoins opérationnels de l’employeur et l’exigence énoncée dans la convention collective qu’il fallait répartir équitablement les fonctions de disponibilité (pièce U-7).

64 Finalement, la preuve non réfutée présentée par M. Brunet a montré clairement que l’employeur n’a pas une exigence selon laquelle le domicile doit se trouver dans la RGT ou dans la zone de l’administration centrale. Le fonctionnaire et les quatre autres agents d’application de la loi sont tenus de réagir aux appels durant leur période de disponibilité et de se présenter au travail aussi rapidement que possible. Cette exigence est clairement énoncée dans la description de travail (pièce U-5) :

[Traduction]

[…]

Des interruptions, durant des inspections et des enquêtes mineures et la participation à des programmes de sensibilisation et de formation ou en période de disponibilité, sont un aspect régulier de la vie professionnelle de l’agent. Celui-ci est muni d’un téléavertisseur remis à l’agent de service, à tour de rôle, selon un calendrier partagé avec d’autres inspecteurs, et qui permet d’intervenir 24 heures sur 24 pour fournir de l’aide à d’autres agents d’Environnement Canada ou agents d’autres ministères et organismes du gouvernement. Ces interruptions peuvent survenir de façon quotidienne (les soirs et les fins de semaine pendant la période de disponibilité), et leur nombre, durée et moment sont imprévisibles. Des interruptions fréquentes au bureau chargé de l’application de la loi de la part d’autres employés et de membres du public augmentent le nombre des exigences multiples auxquelles doit satisfaire l’agent et causent, à l’occasion, des niveaux de stress élevés.

[…]

[Je souligne.]

65 Quoi qu’il en soit, il est clair lorsqu’on examine la preuve non réfutée déposée par l’employeur que, depuis 2004, le fonctionnaire avait une adresse domiciliaire aux fins du travail à Mississauga, à moins de 45 minutes de l’administration centrale.

D. Interprétation donnée par l’employeur à la clause sur la disponibilité

66 Le représentant du fonctionnaire a insisté qu’en dépit du fait qu’il avait un domicile aux fins du travail à Mississauga, il était raisonnable pour le fonctionnaire d’intervenir en réponse à des appels durant sa période de disponibilité à partir de son domicile familial de Tobermory.

67 Je suis d’avis que l’intervention en réponse à des appels durant la période de disponibilité à partir du domicile aux fins de travail du fonctionnaire à Mississauga, qui est situé à 45 minutes de l’administration centrale, est plus raisonnable que l’intervention à partir de son domicile familial situé à 298 km. Le fait d’avoir à voyager pendant plus de quatre heures pour se rendre au travail dans des conditions normales est déraisonnable. Le trajet à l’administration centrale depuis Tobermory est long lorsque les conditions routières sont normales et est encore plus long lorsqu’elles sont anormales. Il convient aussi de noter que Tobermory se trouve dans une région connue comme une ceinture de neige.

68 Pour ce qui est du sens de l’expression « aussi rapidement que possible », telle qu’elle figure dans la clause sur la disponibilité, après avoir examiné la jurisprudence soumise par les deux parties et après avoir appliqué le principe de la prépondérance des probabilités, je statue que la preuve déposée par l’employeur l’emporte. Dans le contexte et les circonstances du cas examiné ici, le fait d’exiger que les employés se présentent au travail dans les 45 minutes quand ils sont en disponibilité est raisonnable lorsqu’on examine non seulement les besoins opérationnels en matière de santé et de sécurité mais également la raison d’être de la CITES, qui est de protéger les plantes et animaux vivants interceptés. Il est primordial d’intervenir rapidement. Cette réalité est d’autant plus évidente lorsqu’on examine les IPO.

69 Finalement, l’article 30 dans la convention collective impose deux devoirs à l’employeur, en premier lieu, répartir équitablement les fonctions de disponibilité et, en deuxième lieu, verser l’indemnité de disponibilité prévue si un agent reçoit un appel et se présente au travail. Le fonctionnaire n’a ni prétendu ni prouvé que l’employeur avait omis de remplir l’un ou l’autre de ces devoirs.

70 En conclusion, l’interprétation donnée par l’employeur au bout de phrase « aussi rapidement que possible » et son exigence que les agents doivent se présenter au travail dans les 45 minutes sont raisonnables et correspondent entièrement aux droits de l’employeur en tant que gestionnaire et aux dispositions de la convention collective.

71 Pour ces motifs, je rends l’ordonnance qui suit :

V. Ordonnance

72 L’objection liée au caractère prématuré du grief est rejetée.

73 Le grief est rejeté.

Le 12 avril 2011.

Traduction de la CRTFP

Roger Beaulieu,
arbitre de grief

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.