Décisions de la CRTESPF

Informations sur la décision

Résumé :

Le demandeur a soutenu que la Commission devrait réviser sa décision de clore son dossier en raison du retrait de sa plainte- rien n’indiquait à première vue qu’il exposerait un nouveau fait ou présenterait un nouveau point de droit à l’appui de son argumentation - quoi qu’il en soit, la Commission a jugé qu’il n’y avait aucune décision à réviser- la lettre annonçant la clôture du dossier à la suite du retrait de la plainte ne constituait pas une décision ni une ordonnance de la Commission- elle ne dépendait pas de la présentation de preuve ou d’arguments à la Commission. Demande rejetée.

Contenu de la décision



Loi sur les relations de travail 
dans la fonction publique

Coat of Arms - Armoiries
  • Date:  2011-08-03
  • Dossier:  525-02-34, XR: 561-02-125
  • Référence:  2011 CRTFP 98

Devant la Commission des relations
de travail dans la fonction publique


ENTRE

DAVID BARRYMORE DAVIES

demandeur

et

ALLIANCE DE LA FONCTION PUBLIQUE DU CANADA

défenderesse

Répertorié
Davies c. Alliance de la Fonction publique du Canada

Affaire concernant une demande d’exercice par la Commission de l’un ou l’autre des pouvoirs prévus à l’article 43 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique

MOTIFS DE DÉCISION

Devant:
Stephan J. Bertrand, commissaire

Pour le demandeur:
Lui-même

Pour la défenderesse:
Wael Afifi, Alliance de la Fonction publique du Canada

Décision rendue sur la base d’arguments écrits
déposés le 24 janvier et le 29 mars 2011.
(Traduction de la CRTFP)

Demande devant la Commission

1 Le 19 octobre 2006, David Barrymore Davies (le « demandeur ») a déposé une plainte de pratique déloyale de travail contre l’Alliance de la Fonction publique du Canada (la « défenderesse ») en vertu de l’alinéa 190(1)g) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (la « Loi »). Dans sa plainte, il soutient que la défenderesse a, par ses actions arbitraires et négligentes, manqué à son devoir de représentation équitable relativement à divers griefs déposés contre son employeur, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux (TPSGC). Cette plainte antérieure sera désignée sous le nom de dossier de la CRTFP 561-02-125.

2 L’audience de la plainte devait avoir lieu à Vancouver (Colombie-Britannique) du 5 au 7 mai 2009.

3 Or, le 22 avril 2009, le demandeur a écrit à la Commission des relations de travail dans la fonction publique (la « Commission ») pour l’aviser qu’à la suite d’un examen approfondi, il avait décidé [traduction] « avec réticence » de retirer sa plainte contre la défenderesse.

4 Après la réception de l’avis de retrait du demandeur, la directrice des opérations du greffe de la Commission a écrit aux parties le 27 avril 2009 pour les informer de l’annulation de l’audience prévue du 5 au 7 mai 2009, de l’arrêt de la procédure et de la clôture du dossier de la CRTFP 561-02-125, conséquences du retrait de la plainte.

5 Le 16 novembre 2010, le demandeur a demandé le réexamen de la fermeture du dossier de la CRTFP 561-02-125 en vertu de l’article 43 de la Loi. Cette demande était fondée sur de nouveaux renseignements qu’il aurait obtenus et qui, selon lui, auraient eu une incidence majeure sur sa décision antérieure de retirer sa plainte. Au dernier paragraphe de la page 4 de ses arguments du 29 mars 2011, le demandeur mentionne avoir [traduction] « abandonné » sa plainte en avril 2009.

6 La défenderesse soutient que la demande de réexamen ne satisfait pas aux critères énoncés à l’article 43 de la Loi et ne constitue rien de moins qu’une tentative du demandeur de rouvrir sa plainte de pratique déloyale de travail (dossier de la CRTFP 561-02-125). Au soutien de sa prétention, la défenderesse m’a renvoyé au paragraphe 14 de Danyluk et al. c. Union des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale no 832, 2005 CRTFP 179, évoquée plus loin dans la présente décision.

7 Essentiellement, la défenderesse soutient que le demandeur n’a fourni aucune précision au sujet des nouveaux renseignements présumés qu’il a obtenus, aucune raison pour laquelle ces renseignements n’auraient pas pu raisonnablement être présentés en mai 2009 et aucun motif impérieux de réexamen de la plainte de 2006.

8 Le demandeur affirme que les nouveaux éléments de preuve qu’il aurait obtenus n’étaient pas accessibles au moment où il a retiré sa plainte. Il évoque de fausses assertions de la part de représentants de TPSGC et d’agents du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada sans toutefois préciser lesquelles. Il mentionne aussi la collusion constante entre la défenderesse et TPSGC, toujours sans dévoiler les fondements de cette allégation. Il soutient à de nombreuses reprises que les nouvelles preuves seront déposées ultérieurement sans fournir de détails concrets, comme des noms et des dates.

9 Il est difficile de débrouiller les arguments du demandeur. Ainsi, il affirme à la page 7 de ses arguments que [traduction] « [l]e fait pour la défenderesse de n’avoir fourni aucune aide pour la divulgation des nouveaux éléments de preuve, comme il le lui avait été demandé, a été l’une des principales raisons pour lesquelles le plaignant, le 22 avril 2009, a abandonné l’audience devant la Commission prévue du 5 au 7 mai 2009 ». Ce type d’énoncé, parmi de nombreux autres du même style, ne satisfait manifestement pas aux critères d’intervention qu’évoque l’article 43 de la Loi. Si le demandeur cherchait déjà à obtenir ces nouvelles preuves supposées avant même de retirer sa plainte, celles-ci peuvent difficilement être qualifiées de nouvelles.

10 Le demandeur consacre une partie importante de ses arguments à son manque de représentation de la part de la défenderesse, élément qui vise clairement la plainte retirée et dont je n’ai pas à tenir compte pour la présente demande. De plus, beaucoup des commentaires du demandeur portent sur un protocole d’entente conclu avec son employeur qui n’était pas évoqué dans la plainte initiale et qu’il est donc impossible de réexaminer.

11 L’article 43 de la Loi confère à la Commission le pouvoir discrétionnaire de réviser ses propres décisions :

43. (1) La Commission peut réexaminer, annuler ou modifier ses décisions ou ordonnances ou réentendre toute demande avant de rendre une ordonnance à son sujet.

(2) Dans un tel cas, les droits acquis par suite d’une de ces décisions ou ordonnances ne peuvent être modifiés ou abolis qu’à compter de la date du réexamen, de l’annulation ou de la modification de la décision ou de l’ordonnance.

12 Bon nombre de décisions de la Commission ont traité de cette question. Dans Veillette c. Institut professionnel de la fonction publique du Canada, 2010 CRTFP 38, la Commission a écrit :

23 L’article 43 de la Loi est entré en vigueur le 1er avril 2005. Cette disposition est identique à l’article 27 de l’ancienne Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.R.C. (1985), ch. P-35, qui était applicable avant le 1er avril 2005. La jurisprudence, tant de l’ancienne Commission que de la nouvelle Commission, a interprété ces dispositions et développé des paramètres d’intervention. La décision Danyluk et al. c. Union des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce section locale no 832, 2005 CRTFP 179, illustre bien les critères développés par la Commission :

[…]

[14] […] L’ancienne Commission a longtemps interprété l’article 27 de l’ancienne LRTFP en concluant qu’il n’avait pas pour objet de permettre à une partie déboutée de faire valoir à nouveau sa thèse, mais plutôt de permettre à la Commission de réexaminer une décision en tenant compte d’un changement des circonstances ou de permettre à une partie de présenter de nouveaux éléments de preuve ou de nouveaux arguments qu’elle ne pouvait pas raisonnablement présenter à l’audition originale, ou encore de permettre à la Commission de rouvrir le dossier lorsqu’il existait d’autres motifs de réexamen impérieux. Qui plus est, la jurisprudence de la Commission a établi que les nouveaux éléments de preuve ou nouveaux arguments soulevés par une partie dans une demande de réexamen doivent avoir des conséquences importantes et déterminantes sur sa décision. Je souscris à la position de l’ancienne Commission quant à l’interprétation à donner à l’article 27 de l’ancienne LRTFP et je ne vois aucune raison pour qu’on n’interprète pas la nouvelle Loi de la même façon. […]

[…]

13 L’article 44 de la Loi confère au président de la Commission le pouvoir d’assigner les affaires dont la Commission est saisie à des formations dont il détermine la composition.

14 En conséquence, avant d’intervenir, la Commission doit confirmer i) qu’une partie présente des éléments de preuve ou des arguments nouveaux qui n’étaient pas accessibles lorsqu’une formation de la Commission a rendu la décision initiale; ii) que les éléments de preuve ou les arguments nouveaux sont pertinents à la question ayant fait l’objet de la décision initiale rendue par la formation de la Commission; iii) que les éléments de preuve ou les arguments nouveaux pourraient vraisemblablement influer sur l’issue du dossier.

15 Même si la présente demande satisfaisait à première vue aux critères selon lesquels la Commission pourrait décider d’intervenir et de réexaminer la fermeture du dossier de la CRTFP 561-02-125, et je ne soutiens pas que ce soit le cas, un obstacle de taille continue d’entraver le parcours du demandeur vers une révision de l’affaire : il n’existe aucune décision à réexaminer, tout simplement.

16 À mon avis, la lettre de la directrice des opérations du greffe de la Commission en date du 27 avril 2009 ne constitue ni une ordonnance ni une décision de la Commission. Aucune formation de la Commission n’a entendu la plainte du demandeur ni étudié d’éléments de preuve, qu’ils soient d’ordre documentaire ou autre. Le dossier de la CRTFP 561-02-125 s’est conclu sur un avis aux parties selon lequel il avait été mis fin à la procédure en cause, une issue qui découle strictement, en définitive, de l’avis de retrait du demandeur. Quels éléments de preuve « supplémentaires » pourrait-on prendre en considération par rapport à cette issue? Comme il a été mentionné plus haut, aucune décision n’a été rendue initialement, et aucun élément de preuve original n’a été examiné.

17 Dans le cas présent, le demandeur a retiré sa plainte après un examen approfondi de ses allégations à l’encontre de la défenderesse, et la Commission a réagi au retrait de cette plainte en annulant l’audience et en fermant le dossier. De toute évidence, cette situation ne correspond pas à l’objet de l’article 43 de la Loi. Aucune formation de la Commission n’a pris connaissance d’éléments de preuve ou d’arguments originaux ni n’a rendu de décision ou d’ordonnance. Voilà qui porte malheureusement un coup fatal à la demande de M. Davies.

18 Pour ces motifs, la Commission rend l’ordonnance qui suit :

Ordonnance

19 La demande de réexamen est rejetée.

Le 3 août 2011.

Traduction de la CRTFP

Stephan J. Bertrand,
commissaire

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